SEANCE DU 15 NOVEMBRE 2001


M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 30, présenté par MM. Leclerc et Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Après l'article 27, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale sont abrogés.
« II. - La perte de recettes pour les régimes spéciaux d'assurance vieillesse de salariés est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° 67, présenté par MM. Domeizel, Chabroux et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
« Après l'article 27, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 134-2 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, et par dérogation à l'alinéa précédent, le taux de recouvrement de la compensation entre les régimes spéciaux d'assurance vieillesse et de salariés est fixé, chaque année, par le Parlement dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale. Ce taux est fixé à 22 % à partir du 1er janvier 2002. »
La parole est à M. Leclerc, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 30.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. A défaut d'engager une réforme des retraites, le Gouvernement aurait pu clarifier le financement des régimes spéciaux. Or tel n'a pas été le cas.
La compensation spécifique, qu'on appelle aussi « surcompensation », a attiré particulièrement l'attention de la commission.
La loi de 1974 a institué le mécanisme de la compensation généralisée. Son principe ne peut guère être remis en cause. Toutefois, on doit constater des modes de calculs de plus en plus arbitraires, de plus en plus contestés par les régimes débiteurs. Dans mon rapport écrit, j'analyse longuement cette situation, qu'il faudra bien résoudre un jour.
Pour corriger l'insuffisance des transferts de compensation généralisée vis-à-vis des régimes spéciaux, la loi du 30 décembre 1985 a institué une compensation supplémentaire spécifique aux régimes spéciaux qui s'ajoute à cette compensation généralisée.
Le régime fictif des fonctionnaires de l'Etat et la CNRACL sont les deux principaux régimes débiteurs. En revanche, les principaux régimes bénéficiaires sont le régime de la caisse des mines, le régime de la SNCF, le régime des ouvriers de l'Etat et le régime des marins.
Structurellement excédentaire, la CNRACL est ainsi déficitaire du fait des transferts de compensation, ce qui l'a tout d'abord conduite, à partir de 1992, à utiliser les réserves qu'elle avait engrangées. Mais, aujourd'hui, les réserves se sont épuisées et il a fallu se résoudre - ce qui est ubuesque compte tenu du résultat technique de la caisse - à recourir à l'emprunt.
Au sein du conseil d'orientation des retraites, une étude a été réalisée en septembre dernier sur les transferts de compensation.
Cette étude, après avoir décrit longuement les mécanismes de calcul de plus en plus arbitraires des compensations généralisées et de la compensation spécifique, conclut ainsi : « De fait, la compensation spécifique a peu de justifications. Telle qu'elle fonctionne, elle met à la charge d'un régime des transferts pour d'autres régimes qui, par ailleurs, sont équilibrés par une subvention de l'Etat. Sans homogénéité entre les régimes, il est difficile de mettre en place une compensation équitable, qui complète la compensation généralisée. Dans ce cas, il faudrait peut-être recourir à d'autres mécanismes de solidarité, du moins pour les régimes les plus atypiques ou les plus déséquilibrés démographiquement, dont l'équilibre pourrait être assuré par l'Etat ou par le FSV. »
La suppression de la compensation spécifique nécessiterait, afin d'équilibrer les régimes spéciaux aujourd'hui bénéficiaires, d'augmenter les subventions d'équilibre de l'Etat à ces mêmes régimes. Cependant, cette augmentation serait pour partie compensée, pour le budget de l'Etat, par la suppression parallèle de la participation du régime des fonctionnaires de l'Etat : ainsi, l'effet net sur les dépenses serait d'environ 9,2 milliards de francs.
J'ajoute que, si les conséquences d'une suppression de la surcompensation sur le solde budgétaire de l'Etat sont réelles, les conséquences sur le solde des administrations publiques sont nulles. En effet, l'augmentation nette des subventions d'équilibre est compensée par l'excédent retrouvé de la CNRACL, lequel permettra à la caisse de préparer l'avenir, qui ne s'annonce pas rose dans son cas. C'est maintenant ou jamais qu'il faut s'efforcer de recourir à la répartition provisionnée.
Ainsi, la commission des affaires sociales vous propose d'abroger le deuxième alinéa de l'article L. 134-2 du code de la sécurité sociale, qui constitue le fondement de la compensation spécifique, ainsi que le troisième alinéa de cet article, qui découle directement du précédent.
La majorité des membres de la commission des affaires sociales, et peut-être au-delà, sont convaincus de la nécessité de créer un véritable régime de retraite pour la fonction publique de l'Etat, soit par la constitution d'une caisse autonome, soit par son intégration au sein de la CNRACL. Nous aurions ainsi un régime commun aux trois fonctions publiques.
Pour des raisons de recevabilité financière, l'amendement de la commission gage la perte de recettes entraînée pour les régimes spéciaux par la création d'une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs. Il va cependant de soi que la commission ne souhaite pas une augmentation de la fiscalité et que, dans son esprit, les pertes de recettes pour les régimes spéciaux de salariés seraient compensées par une augmentation des subventions d'équilibre.
Certes, le coût financier d'une telle mesure pour l'Etat n'est pas négligeable, mais n'est-ce pas le seul moyen de faire apparaître le véritable coût pour la solidarité nationale des régimes spéciaux ?
Telles sont les raisons, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, qui ont conduit la commission à adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Domeizel, pour défendre l'amendement n° 67.
M. Claude Domeizel. Comme l'a dit M. le rapporteur, la loi de finances de 1986 a créé une compensation entre régimes spéciaux, plus connue par les élus locaux sous le vocable de surcompensation. Cette dernière n'a été remise en cause par aucun gouvernement, qu'il soit de droite ou de gauche, et, depuis 1986, cette surcompensation a épuisé les réserves de la CNRACL, qui a connu des difficultés dès 1999.
Aux termes d'un accord entre le comité des finances locales, l'association des maires de France et le conseil d'administration de la CNRACL, l'équilibre a été rétabli grâce à une augmentation du taux de la cotisation de 0,5 point en 2000 puis en 2001, et l'Etat a fait un pas en diminuant dans le même temps le taux de surcompensation de 4 %, ce dernier passant de 38 % à 34 % en 2000 et de 34 % à 30 % en 2001. Ainsi, les collectivités locales et les hôpitaux ont versé 1 milliard de francs supplémentaire alors que, sur la même période, la surcompensation était diminuée de 1 milliard de francs.
Aujourd'hui, la CNRACL accuse un déficit de 2 milliards de francs. Monsieur Leclerc, il s'agit d'un déficit structurel et non du remboursement d'un emprunt souscrit pour faire face à des difficultés de trésorerie ponctuelles.
Trois solutions sont envisageables pour résorber le déficit. La première consiste à reconduire l'augmentation opérée en 2000 et en 2001 en augmentant le taux de la cotisation et en diminuant la surcompensation. La deuxième solution consiste à augmenter le taux de cotisation de 1 %. La troisième solution, enfin, consiste à diminuer la surcompensation de 8 %, en passant de 30 % à 22 %.
Avec l'amendement n° 67, c'est la troisième solution que nous proposons.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 30 et 67 ?
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat. Chacun s'en tient à sa cohérence. Ainsi, avec l'amendement n° 30, la commission propose, ni plus ni moins, de faire disparaître les surcompensations entre les régimes. Nous ne pouvons évidemment pas la suivre sur ce terrain.
J'ajoute, comme vous l'avez dit vous-même, monsieur le rapporteur, que la charge qui en découlerait pour l'Etat serait de l'ordre de 10 milliards de francs. J'invoque donc l'article 40.
Avec l'amendement n° 67, MM. Domeizel et Chabroux attirent l'attention du Gouvernement sur le déséquilibre probable de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales dès 2002. Ils proposent une solution qui pèse cependant lourdement sur les finances publiques.
Mais l'ensemble des solutions mérite d'être examiné.
Monsieur Domeizel, en tant que président de la CNRACL, dès l'été dernier, vous avez écrit au Gouvernement pour l'alerter sur la situation financière de la caisse à compter de 2002. La réforme entamée en 1999, c'est-à-dire l'augmentation de un point de la cotisation patronale sur les deux années 2000 et 2001 et l'abaissement du taux de la surcompensation de huit points en deux ans, avait permis à la caisse de revenir presque à l'équilibre en 2001, après un résultat plus fortement négatif en 2000.
S'agissant de l'équilibre futur des comptes, l'application des 35 heures à la fois pour les hôpitaux et les collectivités locales va avoir des effets favorables sur les recettes de la caisse. Le rythme de la création d'emplois doit être précisé pour permettre à la CNRACL d'affiner ses prévisions. Concernant l'hôpital, l'accord signé le 27 septembre entre le Gouvernement et les organisations syndicales prévoit la création de 45 000 emplois sur trois ans, dont 40 % seront effectifs d'ici à la fin de l'année 2002.
La création d'emplois sur l'exercice 2002 ne résoudra cependant pas l'intégralité des difficultés financières rencontrées par la caisse.
Dans l'immédiat, il est nécessaire d'engager des travaux permettant de dégager les bonnes solutions. Je suis donc chargé de vous transmettre la proposition de Mme la ministre de constituer sans délai un groupe de travail associant votre caisse et les différentes administrations concernées afin d'affiner les prévisions financières et de déterminer les mesures à prendre ainsi que leurs modalités de mise en oeuvre.
Ce groupe de travail devrait pouvoir conclure ses travaux avant la fin de cette année.
Dans ces conditions, je vous suggère de retirer l'amendement n° 67.
M. le président. Monsieur Joyandet, l'article 40 de la Constitution est-il applicable à l'amendement n° 30 ?
M. Alain Joyandet, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Il ne s'applique pas, monsieur le président. (M. le secrétaire d'Etat s'étonne.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. L'article 40 de la Constitution ne s'applique pas, monsieur le secrétaire d'Etat, tout simplement parce qu'une perte de recettes gagée est acceptable.
Nous n'étions pas dans la même situation tout à l'heure puisqu'il s'agissait d'une augmentation des dépenses, laquelle ne peut pas être gagée.
Je propose cependant, parce que M. Domeizel n'a pas forcément tort, de modifier l'amendement de la commission.
Le paragrahe I de cet amendement reprendrait le texte de l'amendement n° 67 de M. Domeizel. Son paragraphe II maintiendrait le gage, dont le montant serait d'autant plus faible que la dépense serait moins élevée.
Cette solution permettrait à chacun de faire le point, de voir dans quelles conditions on peut abandonner le système de la surcompensation.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Jean Chérioux. Voilà une solution constructive !
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 30 rectifié, présenté par MM. Leclerc et Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, qui est ainsi libellé :
« Après l'article 27, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 134-2 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, et par dérogation à l'alinéa précédent, le taux de recouvrement de la compensation entre les régimes spéciaux d'assurance vieillesse et de salariés est fixé, chaque année, par le Parlement dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale. Ce taux est fixé à 22 % à partir du 1er janvier 2002. »
« II. - La perte de recettes pour les régimes spéciaux d'assurance vieillesse de salariés est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat. J'invoque à nouveau l'article 40 de la Constitution.
M. le président. Monsieur Joyandet, l'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. Alain Joyandet, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Il n'est pas applicable, monsieur le président.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 30 rectifié.
M. Claude Domeizel. Je demande la parole contre l'amendement .
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Le Gouvernement a répondu au conseil d'administration de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales en proposant de réunir un groupe de travail pour trouver une solution à ce délicat problème.
Comme je l'ai déjà dit, il y a trois solutions. La première consiste à partager la charge du déficit : chacun fait un geste, on augmente le taux de cotisation et on diminue la surcompensation. La deuxième consiste à diminuer la surcompensation, c'était l'objet de l'amendement que j'ai soutenu. La troisième solution, enfin, consiste à augmenter le taux de cotisation.
Il faut bien savoir que toute augmentation du taux de la cotisation pose des problèmes.
M. Leclerc, notre rapporteur, est intervenu au sujet de la constitution d'un régime de retraite unique pour fonctionnaires. Mais, à cet égard, il ne faut jamais négliger le fait que, actuellement, si les fonctionnaires des collectivités territoriales, des hôpitaux et de l'Etat ont des droits identiques, les deux premières catégories dépendent d'une caisse alors que la troisième n'en a pas.
Il ne faut jamais oublier non plus, lorsqu'on parle de la fusion des régimes de retraite des agents des trois fonctions publiques, que le taux de cotisation des employeurs pour les collectivités territoriales et pour les hôpitaux est de 26,1 %, alors que les cotisations de l'Etat, au demeurant fictives, sont, elles, de 40 %.
Vous voyez quelles conséquences aurait un régime unique. Mettre dans un même panier, si je puis dire, les actifs et les retraités des deux systèmes obligerait les collectivités territoriales et les hôpitaux, pour respecter le taux d'équilibre, à cotiser beaucoup plus qu'ils ne le font aujourd'hui. C'est un aspect important.
Si l'on augmente le taux de la cotisation des collectivités locales, c'est le contribuable local qui paie ; si l'on majore le taux de la cotisation des hôpitaux, c'est la sécurité sociale qui paie. Ce problème très délicat touche donc à l'équilibre des relations financières qu'entretiennent l'Etat et les collectivités locales, d'une part, l'Etat et la sécurité sociale, d'autre part.
Il me paraît difficile aujourd'hui de voter l'amendement n° 30 rectifié défendu par M. le président de la commission, car cet amendement ne tient pas compte des données que je viens d'énoncer. Je préfère de loin que le Gouvernement et le conseil d'administration de la CNRACL engagent en concertation une étude approfondie dans l'optique de la réforme globale des retraites.
Le problème de la CNRACL fait partie de l'édifice général du système des retraites. Dès lors, on ne voit pas comment on pourrait modifier le moindre élément sans que l'édifice tout entier ne s'écroule. C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste ne votera pas cet amendement n° 30 rectifié.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Il a tort !
M. Claude Domeizel. Par ailleurs, je retire l'amendement n° 67, compte tenu des réponses de M. le secrétaire d'Etat.
M. le président. L'amendement n° 67 est retiré.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Leclerc, rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Monsieur Domeizel, quand j'ai évoqué le regroupement dans une seule caisse des trois branches de la fonction publique - collectivités locales, hôpitaux et d'Etat - il est évident que cette proposition s'inscrivait dans le cadre d'une réforme plus vaste.
Il me semble, nos amendements le montrent bien, que nous disons tous la même chose.
Ce que je vous reproche c'est donc d'avoir tant attendu alors que les conditions étaient favorables. C'était un moment historique qui risque malheureusement de ne pas se reproduire. Mesdames, messieurs de la majorité qui soutient ce gouvernement, je considère que vous êtes coupables de ne pas avoir saisi cette opportunité.
Quoi qu'il en soit, nous attendons tous des propositions constructives dans ce domaine. Je m'étonne donc que vous plaidiez maintenant contre l'amendement que vous aviez vous-même déposé, monsieur Domeizel.
M. Claude Domeizel. Pas du tout !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Mon cher collègue, vous vivez mal la surcompensation du fait des responsabilités éminentes que vous exercez au sein de la CNRACL. Vos collaborateurs, eux aussi, ne supportent plus cette situation invraisemblable.
Ce soir, nous nous rallions à votre proposition.
M. Claude Domeizel. Ce n'est plus la mienne !
M. Alain Gournac. Ce n'est plus la sienne !...
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Nous nous rallions à votre proposition intermédiaire qui permet de réduire la dépense de neuf milliards de francs à deux milliards de francs. Excusez du peu, sept milliards de francs, ce n'est pas rien. Je ne comprends pas pourquoi vous venez de plaider contre vous.
M. Alain Gournac. Nous non plus, nous ne comprenons plus !
M. Jean-Jacques Hyest. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Il y a tout de même une limite à l'hypocrisie ! La commission vient en effet de reprendre exactement les termes de l'amendement de M. Domeizel. La seule différence, c'est le gage. L'article 40 de la Constitution ne lui est donc pas opposable !
M. Alain Gournac. Ils pèsent les godillots !
M. Jean-Jacques Hyest. En fait, vous avez déposé un amendement, vous vous apercevez qu'il gêne, et vous le retirez.
Comme l'a dit M. le secrétaire d'Etat, on peut augmenter les cotisations. C'est facile, les cotisations patronales sont payées par les collectivités locales, qui sont habituées aux augmentations de leurs charges. Elles ont déjà dû faire face à l'allocation personnalisée d'autonomie, aux 35 heures et à bien d'autres choses encore. Faire payer les collectivités locales, cela ne pose aucun problème, on peut toujours. Il s'agit pourtant, en fin de compte, de l'argent des contribuables.
Mes chers collègues, si les comptes de la CNRACL ont été très largement bénéficiaires, c'est en raison de la forte augmentation des personnels territoriaux liée à la décentralisation. Pensez aux nouveaux services créés, notamment dans les communes. Pour faire face à ces tâches nouvelles, il a fallu embaucher des jeunes.
Mais la démographie des personnels territoriaux va évoluer progressivement et les charges vont augmenter, Comme vous le savez bien, monsieur le président de la CNRACL, si l'on ne trouve pas rapidement de solution, le déficit ne pourra que s'aggraver encore.
Cela relève de la politique du sapeur Camember : creuser deux trous pour en combler un troisième !
Ce n'est pas une façon de faire et c'est pourquoi votre amendement était parfaitement justifié !
M. Serge Franchis. Bravo !
M. Robert Del Picchia. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Del Picchia.
M. Robert Del Picchia. Je ne suis pas membre de la commission des affaires sociales, mais je voudrais, en tant qu'observateur attentif, faire une remarque. Après une valse-hésitation sur un amendement devenu pseudo amendement puis contre-amendement en quelque sorte, je suis désolé de le dire dans cette assemblée républicaine : le père Ubu est toujours roi !
M. Claude Domeizel. Je demande la parole pour explication de vote. (Protestations sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Permettez que j'explique mon vote et celui du groupe socialiste, après avoir parlé contre l'amendement !
Il est vrai que la CNRACL a connu des périodes au cours desquelles les actifs ont augmenté. Depuis quelques années, la tendance s'est inversée et, aujourd'hui, le nombre d'actifs n'augmente que de 1 % par an alors que celui des retraités augmente de 3,5 % par an ! Le taux d'équilibre, c'est-à-dire le moment où les prestations seront égales aux cotisations, sera vraisemblablement atteint aux environs de 2007.
J'en reviens à l'amendement n° 30 rectifié. Pour trouver une solution sur un sujet aussi délicat, entre une proposition de rencontre entre le conseil d'administration de la CNRACL et le Gouvernement, et un bidouillage de dernier moment, je choisis la première solution !
Nous voterons donc contre l'amendement n° 30 rectifié !
M. Jean-Jacques Hyest. C'est le vôtre !
M. Claude Domeizel. Je préfère offrir la possibilité au conseil d'administration de discuter avec le Gouvernement sur ce problème.
M. Alain Gournac. Vous ne pouviez pas le faire avant ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Permettez-moi, monsieur Domeizel, de ne pas accepter vos propos quand vous dites que la commission bidouille lorsqu'elle reprend l'amendement de l'un de ses plus éminents membres.
MM. Robert Del Picchia, Michel Guerry et Max Marest. Oui !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Comment voulez-vous nous faire croire, monsieur Domeizel, qu'un homme aussi important et compétent que vous dans ce domaine a brusquement une révélation en séance publique, à la lumière des propos d'un secrétaire d'Etat qui ne connaît pas forcément le sujet à fond...
M. Alain Gournac. Oh !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. ... sur le taux de recouvrement de la compensation ? A qui voulez-vous faire croire pareille chose au sein du Sénat alors que c'est vous, monsieur Domeizel, qui m'avez convaincu lors de nos travaux en commission ? C'est aussi parce que vous avez convaincu les membres de la commission que ceux-ci ont émis des doutes sur leur propre amendement et ont dit qu'ils se réservaient la possibilité de revenir au vôtre puisque vous étiez l'homme compétent !
M. Alain Gournac. C'est exact !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est encore vous qui avez dit en commission que, pour atteindre l'équilibre des comptes de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et résorber le déficit prévisible des 300 millions d'euros, le taux devait être fixé à 22 % à partir du 1er janvier !
Ce sont quelques conseils donnés par le secrétaire d'Etat qui, tout à coup, vous auraient convaincu de revenir sur un travail de plusieurs années ? Ce n'est pas crédible ! Une telle attitude réduit à néant le travail de la commission. Ce n'est pas raisonnable !
M. Alain Gournac. Effectivement, ce n'est pas raisonnable !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est pour cela que, par respect pour vous, pour la commission et le Sénat, j'ai cru devoir non pas « bidouiller » l'amendement de la commission, mais reprendre le vôtre en l'améliorant par la simple adjonction d'un gage, afin d'éviter que le Gouvernement ne lui oppose l'article 40. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. Jean-Jacques Hyest. M. Domeizel vote contre ! Il s'expliquera à la CNRACL !
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas glorieux !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 27.

Article 28