SEANCE DU 14 JUIN 2001


M. le président. Par amendement n° 1, M. Bret, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'ajouter, avant l'article unique, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 88-4 de la Constitution est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« Une loi organique définit les conditions dans lesquelles le Gouvernement négocie au sein du Conseil européen dans le respect d'orientations définies par le Parlement et lui en rend compte. »
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Je pense n'avoir surpris personne en déposant avec mon amie Nicole Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen cet amendement de fond, qui porte sur la nature des rapports entre parlements nationaux et institutions européennes dans le cadre de la construction européenne.
Depuis des années, et encore aujourd'hui, chacun parle du déficit démocratique qui prévaut en Europe. Dès 1992, face au traité de Maastricht et à l'éloignement considérable des centres de décision qu'entraînait le transfert de compétences incontesté qu'il induisait, le Sénat préconisait le vote de résolutions portant sur les propositions d'acte communautaire.
Pour notre part, nous avions vigoureusement souligné - j'ai relu les interventions remarquées de notre regretté ami Charles Lederman - le caractère purement consultatif de ces résolutions, qui n'engageaient en rien le Gouvernement.
Depuis, nous vous proposons régulièrement d'instituer une nouvelle procédure qui imposera au Gouvernement une orientation à respecter dans les négociations et un compte rendu de ces dernières à présenter devant les assemblées.
Le débat de ce matin au sein de la commission des lois, le débat ici même, mais surtout l'inquiétude que j'évoquais, le désarroi croissant de nos concitoyens à l'égard d'une construction européenne qui leur échappe de plus en plus, exigent, mes chers collègues, de prendre des mesures fortes et de modifier l'article 88-4 de notre Constitution pour rétablir un lien entre les peuples, par l'intermédiaire de leurs représentants, et l'exécutif européen.
La rédaction de notre amendement n'est assurément pas parfaite, et j'entends déjà les remarques de certains de mes collègues de la commission des lois sur la nécessité de la retravailler. S'ils veulent déposer un sous-amendement à notre amendement, je suis preneur !
Cela ne doit pas pour autant servir de prétexte à un nouveau recul face aux décisions qu'il est nécessaire de prendre.
Le vote, aujourd'hui, d'un tel amendement par le Sénat serait un signe fort qui marquerait notre volonté que le Parlement national retrouve une place dans la construction européenne, afin de rapprocher celle-ci des aspirations populaires. Notre Parlement passerait ainsi du rôle de simple chambre d'enregistrement à celui d'acteur dans la construction européenne - sauf, mais ce n'est pas notre souhait, à ne pas vouloir lui faire jouer son rôle, et tout son rôle.
Le dispositif en aval proposé par les textes que nous examinons ce matin n'aura qu'une portée particulièrement limitée, nous en avons tous conscience. Il faut enfin traduire dans la loi ce que chacun affirme en privé ou publiquement : l'Europe ne réussira pas sans l'adhésion des peuples. Pour l'instant, ces derniers, ainsi que leurs représentants, en sont écartés.
La disposition que je propose n'a rien de maximaliste ni d'irréaliste par rapport à ce que font nos partenaires. Je l'ai rappelé, le Danemark, par exemple, a conféré ce droit à son Parlement dès 1992, et le système fonctionne bien, sans blocage ni retard pour l'institution européenne, tout simplement parce que le Parlement national est associé à la démarche de construction européenne.
Nous vous proposons donc solennellement, par cet amendement, d'engager aujourd'hui un processus visant à remettre l'Europe sur ses pieds.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission des lois a examiné cet amendement avec un grand sérieux. Force est en effet de reconnaître, comme l'a souligné M. Bret, qu'il pose une question de fond.
Au fur et à mesure de l'évolution du processus continu qui nous est soumis, au fur et à mesure de l'avancement de la construction de l'Union européenne, il apparaît que le problème de fond réside dans le fait que, de plus en plus, le Parlement est non pas mis en demeure - je m'empresse de le préciser, car il nous faut peser nos mots -, mais amené à accepter ou à rejeter des dispositions qui ont déjà été « bouclées » très en amont par le Gouvernement. Au demeurant, je ne sous-estime aucunement les difficultés de ce dernier, car il est certain qu'en ces matières européennes il faut parvenir à des compromis quelquefois difficiles puisqu'ils doivent en même temps garantir le principe de subsidiarité et protéger les intérêts nationaux dans la lente évolution vers l'Europe, alors qu'ils s'achèvent quelquefois à quatre heures du matin, dans une fatigue généralisée à laquelle il ne faut pas céder.
Cela étant posé, il est temps - et c'est en définitive ce qui nous occupe aujourd'hui -, pour la transposition des directives européennes comme pour la ratification des conventions internationales, que le Gouvernement comprenne qu'il doit associer le Parlement plus en amont dans la discussion, afin que celui-ci puisse se déterminer. Ce doit être l'objet de la réflexion du groupe de travail que demande le Gouvernement, et dont nous ne rejetons pas du tout l'idée.
Si la commission des lois a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 1, c'est pour des raisons de forme, en l'occurrence pour son caractère très général. S'il était adopté en l'état, il contraindrait à définir « les conditions dans lesquelles le Gouvernement négocie au sein du Conseil européen dans le respect d'orientations définies par le Parlement ». Le Gouvernement rencontrerait alors de très grosses difficultés dans les discussions de l'Union européenne, puisqu'il serait tenu dans un carcan imposé par le Parlement, ce qui limiterait considérablement les possibilités de trouver des compromis avec les autres Etats.
Reste qu'il faut trouver le moyen que le Parlement ne soit plus mis au pied du mur et amené à accepter des directives simplement parce qu'elles sont le résultat d'un compromis.
Tel est le problème de fond qu'il nous faut résoudre. Le Parlement ne peut plus être considéré ainsi. C'était à la rigueur valable dans les débuts, lorsqu'il y avait peu de décisions à prendre : nous pouvions en discuter, nous pouvions les modifier. Maintenant que le processus se précipite, il faut regarder les choses en face.
Le Parlement doit absolument être associé à la réflexion beaucoup plus en amont ; il doit alerter le pouvoir exécutif sur ce que sont, selon lui, les limites de la discussion.
Une difficulté surgit immédiatement à la lecture de la proposition présentée dans l'amendement n° 1. En effet, elle pourrait conduire, en pratique, à un régime d'assemblée. Il nous faut donc être très attentifs à ce processus, afin de laisser également à l'exécutif le soin d'exercer ses prérogatives.
Les propositions que nous formulerons doivent être applicables. Or, l'amendement n° 1, même sous-amendé, ne le sera pas. Notre rôle n'est pas de travailler ainsi !
Monsieur le ministre, la question qui est posée revêt une très grande importance ; il s'agit même d'une question de fond. Je souhaite donc très vivement que vous mettiez en place le plus rapidement possible le groupe de travail que nous avons déjà évoqué afin qu'il puisse l'examiner très attentivement.
En conclusion, mes chers collègues, si la commission prend en grande considération le problème posé par l'amendement, elle ne peut l'accepter pour des raisons de forme et, à certains égards, de fond. Elle a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. M. Bret a rappelé que l'amendement n° 1, déposé au nom du groupe communiste républicain et citoyen, avait déjà été examiné, bien que sous une forme quelque peu différente, le 17 décembre 1998, lors de l'examen du projet de loi constitutionnelle modifiant les articles 88-2 et 88-4 de la Constitution.
Comme vous l'avez souligné, monsieur le sénateur, cet amendement s'inspire d'un dispositif qui existe déjà dans un autre pays européen, le Danemark. Le Parlement danois, le Folketing - je rappelle qu'il s'agit d'un système monocaméral - donne au Gouvernement des orientations pour les négociations communautaires. Il s'agit non pas d'un mandat impératif, puisque l'exécutif n'est pas lié, article par article, pour l'examen de chaque directive, mais plutôt d'orientations générales.
Votre amendement, monsieur le sénateur, s'inspire de ce mécanisme et tend à ajouter une nouvelle procédure à celle de l'article 88-4 de la Constitution, qui n'est pourtant pas muet sur ce point puisque le Parlement peut déjà voter des résolutions valant orientation pour la négociation.
Le principal ajout à l'article 88-4 de la Constitution serait le caractère plus systématique de la procédure et l'obligation pour le Gouvernement de rendre compte au Parlement des négociations communautaires. Ces deux points ne nous paraissent pas recevables, et cela à un double titre.
Tout d'abord, sur le plan constitutionnel, vous savez que nous sommes dans un système bicaméral. Il faudrait donc que les deux chambres votent un texte d'orientation dans des termes identiques, afin de définir des orientations communes. Cela me semble difficile.
Mais la raison principale de mon opposition est qu'une telle disposition modifierait l'équilibre des pouvoirs et entamerait notamment le pouvoir de négociation dont dispose, au sein des instances communautaires, notre exécutif - en premier lieu le Président de la République -, en vertu de la Constitution.
L'article 88-4 de la Constitution, tel qu'il est rédigé aujourd'hui, a marqué un progrès dans l'association du Parlement aux discussions relatives à l'élaboration des directives. Je ne crois pas qu'il faille aller plus loin ni lier le Gouvernement par une procédure parlementaire contraignante. Cela ne serait pas conforme à l'esprit des institutions.
J'ajoute, comme l'a fait remarquer M. Lanier, qu'une telle contrainte rendrait très difficile l'exécution de ce mandat dans les négociations européennes, dont nous avons constaté, par exemple à l'occasion des discussions du traité de Nice - bien qu'il ne s'agisse pas là d'une directive -, quelle capacité d'initiative et quel sens du compromis elle exigent de la part de l'exécutif quand il s'agit d'harmoniser les positions des quinze pays membres.
Le Gouvernement est donc défavorable à votre amendement.
Je terminerai en précisant à M. Lanier que le groupe de travail dont il a été question vient d'être constitué. Il devra faire des propositions pour sortir de la situation que nous connaissons, et je considère notre débat de ce matin comme une « piqûre de rappel » du caractère vraiment désagréable pour le Parlement, mais également irritant à l'égard de la construction européenne, de la procédure actuelle de transposition des directives.
Ce groupe de travail, qui associe le Gouvernement et les deux délégations pour l'Union européenne, celle du Sénat et celle de l'Assemblée nationale, devrait nous donner la possibilité d'avancer vers des propositions concrètes, voire de suggérer des pistes constitutionnelles permettant d'apporter une amélioration indispensable.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. J'ai noté avec intérêt, monsieur le ministre, que vous étiez tout disposé à accroître les pouvoirs du Sénat, puisque vous avez évoqué l'adoption d'orientations en termes identiques : nous n'avons jamais eu l'outrecuidance de vous demander une telle chose ! (Sourires.)
Sur le fond, je crois que M. Bret a posé le véritable problème, qui se situe non pas en aval - même si nous essayons de traiter ce point important - mais en amont.
En effet, nous nous trouvons dans une situation qui n'a pas été prévue par la Constitution de 1958 et nous sommes devenus un législateur à compétence liée.
Ainsi, nous devons examiner des directives à l'élaboration desquelles nous n'avons pas participé et qui sont le fruit d'un travail gouvernemental. Certaines d'entre elles ne nous sont d'ailleurs jamais soumises, puisque le Gouvernement, par exemple, ne souhaite pas que nous nous penchions sur les questions relatives aux marchés du gaz et de l'électricité...
Par conséquent, nous ne disposons que d'un pouvoir extrêmement faible. Tout se passe comme si un projet de loi nous était présenté, auquel nous n'aurions pas le droit de toucher ! Or le nombre de cas dans lesquels jouera la compétence liée s'accroît sans cesse, nous le savons bien.
Un problème de fond extrêmement grave se pose donc, et M. Bret l'a très bien expliqué. Nous cherchions d'ailleurs à lui donner une solution lorsque nous avons arraché - cela n'a pas été commode ! - le droit de voter des résolutions. Mais si nous élaborons des résolutions, le Gouvernement n'en tient jamais compte ! Que l'on me cite un seul exemple de résolution importante dont on aurait trouvé la traduction dans une directive finalement adoptée ! Il n'y en a pas, ou peut-être un ou deux tout au plus...
Le système est donc difficile à mettre en oeuvre. De plus, il est inefficace, parce que le Gouvernement accueille les résolutions votées par nous avec la politesse requise mais n'en fait aucun cas. Par conséquent, comme je l'indiquais, il ne nous reste qu'à accepter le texte de la directive : le pouvoir législatif disparaît véritablement dans ce domaine.
Il convient à mon sens d'être très attentif à ce problème. Je pense même, monsieur le ministre, qu'il faudra réfléchir - vous y avez d'ailleurs fait allusion tout à l'heure - à un aménagement d'ensemble des procédures parlementaires, car nous n'allons pas jouer éternellement - je l'ai souvent dit et répété - cette sorte de fiction qu'est le débat parlementaire en séance plénière.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Très bien !
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Les propositions que j'ai déjà faites à cet égard n'ont pas été retenues, mais, un jour, il sera absolument nécessaire d'apporter une solution au problème extrêmement important posé par mon ami Robert Bret.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Très bien !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Robert Bret. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Les membres du groupe communiste républicain et citoyen ont bien conscience de poser un problème de fond s'agissant non seulement des rapports entre l'exécutif et le législatif, mais aussi des relations de notre pays avec les institutions européennes.
M. le ministre a indiqué que nous proposons tout simplement de modifier les équilibres, notamment en matière de pouvoir de négociation de la France avec les instances communautaires. Mais, de ce point de vue, pourquoi ce qui est possible pour le Danemark ne le serait-il pas pour la France ? Il me semble qu'il y a là deux poids, deux mesures, et qu'il faut quand même savoir si l'on veut vraiment faire avancer les choses.
Par ailleurs, on m'objecte toujours qu'il faut se donner le temps de la réflexion. Mais, mes chers collègues, cela fait neuf ans que l'on réfléchit ! Aujourd'hui, je crois qu'il faut agir, d'autant que l'on sent bien que des inquiétudes, des désarrois, des mécontentements se font jour à l'égard de l'Europe : les résultats du référendum organisé en Irlande sur le traité de Nice l'ont montré. Si les peuples, et donc les parlements nationaux, ne sont pas davantage associés aux décisions, c'est toute la construction européenne qui pourrait en pâtir.
Enfin, on a évoqué la création d'un groupe de travail, à laquelle j'ai tout à l'heure donné mon accord ; mais pensez-vous vraiment, mes chers collègues, que le calendrier électoral qui nous attend permettra à ce groupe de s'atteler à la tâche et que nous pourrons avoir un débat sur ces questions dans les mois à venir ? Quand on entend les grandes déclarations des candidats potentiels à l'élection présidentielle sur ce point, on comprend à quoi ce débat va se résumer...
Nous sommes donc placés devant nos responsabilités : nous ne pourrons pas nous dérober ! C'est pourquoi nous avons déposé cet amendement. Il est évident que, de notre point de vue, et comme cela a été rappelé par M. le rapporteur, les problèmes doivent être traités en amont, par le bais d'une concertation associant étroitement le Parlement à l'ensemble du processus normatif, que nous souhaitons plus équilibré et plus efficace. Le Gouvernement aurait lui aussi tout à y gagner, quelle que soit sa couleur politique.
Tels sont les élements que nous voulions apporter au débat et sur lesquels le Sénat doit prendre position aujourd'hui. Avec cet amendement, je vous renvoie, mes chers collègues, à vos responsabilités !
M. Pierre Fauchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon. L'affaire qui nous occupe est en effet très importante, mais il faut être réaliste et avoir conscience de ce que les institutions françaises sont à l'origine des maux dont nous nous plaignons.
En effet, la Constitution de la Ve République, chacun le sait, donne une marge d'action considérable au Gouvernement et ne facilite pas le contrôle du Parlement. Nous constatons que, en Grande-Bretagne et au Danemark par exemple, la liaison entre l'exécutif et le législatif se fait mieux ; mais les institutions et les pratiques en vigueur dans ces pays sont différentes des nôtres.
Cela étant même dans le cadre de nos propres institutions, la pression exercée sur le Gouvernement serait peut-être déjà un peu plus forte si nous étions plus nombreux à assister à cette séance... Par conséquent, balayons devant notre porte !
D'ailleurs, l'Assemblée nationale a les moyens de se faire entendre du Gouvernement et pourrait l'interpeller avec la vigueur voulue, y compris en menaçant de voter une motion de censure. Elle a le dernier mot - M. le président de la commission des lois a rappelé tout à l'heure que nous ne prétendions pas lui imposer notre volonté - et dispose largement des moyens de jouer son rôle dans les processus décisionnels de l'Union européenne.
Pour autant, mesurons aussi les limites de l'exercice. A cet égard, tout dépend de ce que l'on recherche, et je me demande quelle était tout à l'heure l'intention de M. Bret. Cherche-t-il à mieux faire fonctionner l'Union européenne ?
M. Robert Bret. Dans sa dimension sociale et non pas libérale, mon cher collègue ! (Sourires.)
M. Pierre Fauchon. Je n'en suis pas totalement sûr, je suis obligé de vous l'avouer ! Or il faut bien se dire que, si l'on cherche réellement à mieux faire fonctionner l'Union européenne, on ne peut pas espérer que la multiplication et l'accumulation des délibérations au sein de tous les parlements nationaux permettent de déboucher sur un processus législatif vraiment satisfaisant. Ne tombons pas non plus dans cette illusion !
Quel est le problème qui se pose à nous ? C'est de faire entendre, dans le domaine législatif, la voix de chaque Etat, marquée par ses particularismes, son système de valeurs, ses traditions juridiques, etc. La seule façon de faire entendre cette voix pour elle-même et non pas au travers de l'expression qu'en donne le Gouvernement lors des délibérations des différents conseils, c'est de créer une seconde chambre à l'échelon européen, associée à la décision et donc au processus législatif et apportant, par un recrutement approprié, la contribution effective des Etats-nations, avec leurs particularités.
Cette seconde chambre pourrait être du même type que le Bundesrat. Je ne sais d'ailleurs pas pourquoi l'on a critiqué les suggestions qui ont été formulées à cet égard, car c'est la forme qui permettrait le mieux de respecter la singularité et l'originalité de chacun des membres de ce que l'on n'ose pas appeler « une fédération », puisque l'on a toujours plus peur des mots que des réalités. Quoi qu'il en soit, cette seconde chambre pourrait aussi être constituée de représentants des parlements nationaux, ce qui serait plus satisfaisant à tous points de vue. On peut imaginer plusieurs formules, mais c'est dans cette direction, me semble-t-il, qu'il faudrait chercher la vraie solution aux problèmes dont nous débattons aujourd'hui.
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. A la suite de l'intervention de M. le président de la commission des lois, je voudrais souligner que, de par l'article 88-4 de la Constitution, le Parlement dispose, avec le vote des résolutions, de moyens de renforcer son influence en matière d'élaboration des normes communautaires.
Je voudrais également indiquer aux membres de la commission des lois que deux propositions de résolution ayant été déposées par la délégation du Sénat pour l'Union européenne sont en attente d'examen : l'une porte sur le regroupement familial, l'autre sur la protection temporaire des réfugiés ; je crois qu'il serait intéressant de connaître l'avis de la commission des lois du Sénat sur ces deux textes. En outre, l'Assemblée nationale examinera, avant la fin de cette session, une proposition de résolution sur les transports publics de voyageurs et l'organisation du service public.
Le Parlement dispose donc de moyens d'action. Certes, il est incontestable, sur le plan institutionnel, que la construction européenne conduit, d'une certaine façon, à une compétence liée puisque le Gouvernement investit, via Bruxelles, le champ du législatif et de l'article 34 de la Constitution ; mais peut-être faudrait-il, dans un premier temps, que l'article 88-4 soit bien appliqué à l'échelon du Sénat. C'est pourquoi je tenais à évoquer deux exemples actuels à cet égard.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

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