SEANCE DU 25 AVRIL 2001


M. le président. Par amendement n° 381, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 36, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 122-3-13 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute rupture du contrat de travail prononcée ou constatée à raison du terme initialement fixé dans le contrat requalifié est nulle et de nul effet. La réintégration est de droit si le salarié en fait la demande. Celui-ci est regardé comme n'ayant jamais cessé d'occuper son emploi. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Si vous le voulez bien, monsieur le président, je défendrai en même temps l'amendement n° 382.
M. le président. J'appelle donc l'amendement n° 382, présenté par MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et tendant à insérer, après l'article 36, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le deuxième alinéa de l'article L. 124-7 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toute rupture du contrat de travail prononcée ou constatée à raison du terme initialement fixé dans le contrat requalifié est nulle et de nul effet. La réintégration est de droit si le salarié en fait la demande. Celui-ci est regardé comme n'ayant jamais cessé d'occuper son emploi. »
Veuillez poursuivre, monsieur Fischer.
M. Guy Fischer. La loi du 12 juillet 1990 favorisant la stabilité de l'emploi par l'adaptation du régime des contrats précaires pose le principe selon lequel le « contrat de travail à durée indéterminée est la forme normale du contrat de travail ».
Au nombre des mesures protectrices instituées au profit des salariés et déclinées dans le code du travail aux articles L. 122-3-13 et L. 124-7, relatifs, respectivement, aux contrats à durée déterminée et aux contrats de travail temporaires, figure la garantie, pour ces salariés, de requalification de leur contrat, faussement qualifié par l'employeur de « contrat à durée déterminée ».
Au terme d'une procédure dérogatoire au droit commun, le salarié peut faire constater par la juridiction prud'homale qu'occupant un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise il est titulaire d'un contrat à durée indéterminée.
Par conséquent, le terme fixé par un contrat à durée déterminée requalifié est privé d'effet ; les relations contractuelles se poursuivent.
Dans un arrêt récent du 13 mars 2001, Hugues/société France-Télécom, la Cour de cassation a décidé que la poursuite du contrat de travail requalifié n'était pas de droit lorsque la relation contractuelle a été rompue en raison d'un licenciement fondé sur la caducité du terme, en l'absence d'une disposition prévoyant l'annulation du licenciement à défaut d'une violation d'une liberté fondamentale.
Les amendements que je vous propose d'adopter sont de nature à combler ce vide juridique, en prévoyant expressément dans ces cas précis la nullité du licenciement et la réintégration du salarié à sa demande.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 381 et 382 ?
M. Alain Gournac, rapporteur. L'amendement n° 381 vise à inscrire dans la loi des dispositions que le juge applique déjà, en particulier en ce qui concerne la nullité de la rupture d'un contrat de travail qui serait prononcée ou constatée à raison du terme fixé dans le contrat requalifié. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Elle est également défavorable à l'amendement n° 382, relatif au travail temporaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Ces deux amendements ne se justifient pas vraiment. En effet, la requalification du contrat à durée déterminée a déjà pour conséquence de rendre sans objet le terme initialement fixé dans le contrat. Vous affirmez qu'une jurisprudence s'est prononcée en sens inverse. Je n'ai pas la même appréciation que vous sur la portée de la jurisprudence. Je suggère donc que, pendant la navette, nous examinions cette question et que nous puissions voir si, comme vous le proposez, il est effectivement nécessaire de préciser ce point.
M. Jean Chérioux. D'où l'utilité de la navette !
M. le président. Monsieur Fischer, les amendements n°s 381 et 382 sont-ils maintenus ?
M. Guy Fischer. Puisque j'ai l'assurance de Mme la ministre que ce point fera l'objet d'une étude attentive et que nous pourrons y revenir, je retire les amendements.
M. Hilaire Flandre. C'est un effort méritoire !
M. Jean Chérioux. Beau succès pour le Gouvernement !
M. le président. Les amendements n°s 381 et 382 sont retirés.
Par amendement n° 418, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 36, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 432-4-1 du code du travail est complété par les trois alinéas suivants :
« Lorsque le comité d'entreprise a connaissance de faits susceptibles de caractériser un recours non conforme aux dispositions des articles L. 122-1 et L. 124-2 du présent code, il peut décider de saisir l'inspecteur du travail afin que celui-ci effectue les constatations qu'il estime utiles. L'inspecteur du travail adresse à l'employeur le rapport de ses constatations. L'employeur communique ce rapport au comité d'entreprise en même temps que sa réponse motivée aux constatations de l'inspecteur du travail dans laquelle il précise, en tant que de besoin, les moyens qu'il met en oeuvre dans le cadre d'un plan de résorption de la précarité destiné à limiter le recours à ces formes de contrats de travail et, le cas échéant, faire disparaître les irrégularités constatées.
« A défaut de comité d'entreprise, les délégués du personnel peuvent exercer les attributions conférées au comité d'entreprise pour l'application de l'alinéa précédent.
« Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret. »
La parole est à Mme le ministre.
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Pour renforcer la maîtrise du recours au travail précaire, il est souhaitable de faire appel à la vigilance des représentants du personnel,...
M. Hilaire Flandre. ... à la délation !
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. ... qui sont les mieux à même de déceler l'existence de pratiques contestables au sein de leur entreprise. La mise en oeuvre par les représentants du personnel d'un dispositif d'alerte permettrait aux services de l'inspection du travail de constater les faits et d'inviter l'employeur à leur faire connaître les mesures qu'il compte mettre en oeuvre pour assurer un retour à la normale.
L'objectif de cette proposition, qui rejoint celles qui sont faites par le groupe communiste républicain et citoyen et par le groupe socialiste, est bien de s'attaquer au recours structurel abusif aux contrats précaires que l'on constate dans certains secteurs d'activité ou entreprises.
L'amendement confère au comité d'entreprise et, à défaut, aux délégués du personnel la possibilité d'alerter l'inspecteur du travail sur toutes les pratiques de recours aux contrats précaires non conformes aux cas prévus par la loi. Il appartient alors à l'inspecteur du travail d'effectuer les constatations, qu'il consigne dans un rapport à l'employeur. Celui-ci doit alors répondre à l'inspecteur du travail et, au besoin, présenter un plan de résorption du travail précaire.
La présentation par l'employeur d'un plan de résorption des emplois précaires dans l'entreprise - j'y faisais allusion tout à l'heure, madame Dieulangard - ne l'exonère pas des sanctions qui lui sont éventuellement applicables si des infractions ont été commises.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. La commission ne pense pas beaucoup de bien de cet amendement. En effet, il vise à mettre en place une procédure compliquée, qui ne semble pas indispensable compte tenu du droit en vigueur et des possibilités actuelles de saisine de l'inspecteur du travail. Il s'agit, selon moi, d'un amendement d'affichage. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 418.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Le groupe socialiste pense au contraire beaucoup de bien de cet amendement, qui répond parfaitement et probablement de façon plus complète aux objectifs qu'il souhaitait atteindre par un amendement précédent, qui a été retiré. Il le votera donc.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 418, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 37