SEANCE DU 11 JANVIER 2001


M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Ma question s'adresse à M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.
Monsieur le secrétaire d'Etat, voilà quelques semaines, au cours des débats concernant la proposition de résolution sur l'avenir de La Poste, vous avez, à notre grand étonnement, accusé notre collègue, le sénateur Gérard Larcher, à l'origine du texte de cette proposition de résolution que j'ai eu l'honneur de rapporter devant le Sénat, de vouloir privatiser La Poste. Il a d'ailleurs fait un rappel au règlement à ce sujet.
Depuis, M. Alain Vial, directeur général de La Poste, a été nommé président en remplacement de M. Bourmaud. Si l'on en croit la presse, vous lui auriez promis cette haute fonction depuis 1997, mais c'est votre droit, monsieur le secrétaire d'Etat !
Une simple observation aujourd'hui nous permet de constater que les priorités de M. Vial, dès sa prise de fonctions, sont quelque peu différentes, voire opposées à celles que vous avez défendues, ici même voilà quelques semaines. Toujours dans cette même presse, nous découvrons que le nouveau président, entouré de son cabinet semble en place en vue de transformer le statut de La Poste. Il prétend lui-même que la situation actuelle ne peut pas durer en raison de l'évolution dans ce secteur d'activité par rapport aux postes européennes.
Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, pour vous retourner le compliment que vous m'avez adressé au moment de la discussion de la résolution sur l'ouverture à la concurrence des services postaux de la Communauté européenne, n'êtes-vous pas extrêmement gêné qu'à peine nommé le nouveau président de La Poste conduise une politique qui colle mot pour mot à la résolution votée par le Sénat voilà quelques semaines ? A ce moment-là, il n'était pas non plus question de privatisation de La Poste. Nous n'avons jamais utilisé cette expression.
La question est simple, monsieur le secrétaire d'Etat : cautionnez-vous le projet de M. Vial tel qu'il ressort de la présentation faite dans la presse sur la transformation de La Poste en société anonyme ou restez-vous sur la position qui est la vôtre sur l'avenir de La Poste ? Votre position peut se résumer ainsi : « Tout va très bien, madame la marquise » et, « surtout, évitons de faire des vagues avant la campagne présidentielle ». Si tel est le cas, c'est faire payer beaucoup trop cher cette absence de réforme de la poste française, et surtout compromettre l'avenir de tous ceux qui y travaillent ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, je vais, je l'espère, être aussi clair aujourd'hui que je l'ai déjà été le 14 décembre dernier. Il n'entre pas du tout dans l'intention du Gouvernement de modifier le statut de La Poste.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Ce n'est pas le mandat de son nouveau président, M. Vial, qui ne s'est, à ma connaissance, jamais prononcé en ce sens.
Le Gouvernement, à la demande du Premier ministre, poursuit depuis trois ans et demi une politique très claire et très ferme à l'égard du développement des services publics, en particulier de La Poste.
Qu'avons-nous l'intention de faire ? Nous voulons manifester l'exemplarité de La Poste en matière de service public. Il s'agit non pas de préserver le pré carré de La Poste de manière frileuse, mais, au contraire, de développer un service public au bénéfice de tous. Par exemple, pour 2001, nos objectifs sont d'assurer une distribution du courrier six jours sur sept - ce qui n'est pas le cas dans tous les pays de l'Union européenne - de maintenir le prix du timbre à trois francs et de garantir une distribution de 84 % des courriers le lendemain de leur envoi. Voilà des objectifs et des engagements forts qui qualifient la pertinence de l'organisation du service public.
Ce service public, c'est aussi celui de la croissance et de la performance de l'entreprise. Comme vous tous, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureux et très fier de voir que, depuis trois ans, l'entreprise a retrouvé les bénéfices. Elle a réalisé 1,9 milliard de francs de bénéfices en 1999 et, en 2000, elle sera également très nettement bénéficiaire. Elle s'est projetée dans l'avenir en investissant 8 milliards de francs par an, alors qu'avant 1997 elle avait en moyenne investi seulement 2,5 milliards de francs par an.
M. Henri de Raincourt. Oh, oh !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Elle s'est vu confier la gestion des avoirs des comptes chèques postaux. Elle est positionnée avec force sur le marché international des colis grâce aux accords passés avec Geodis et avec la Fedex et grâce à ses prises de participation dans les entreprises allemandes, britanniques et américaines.
Bien sûr, il ne s'agit en aucune façon d'encourager l'immobilisme en refusant de modifier le statut de La Poste. L'action du Gouvernement prouve à l'envi le contraire depuis trois ans et demi. (M. de Raincourt rit.)
Mais, nous refusons catégoriquement la logique du tout-libéral qui ne provoque dans les pays où elle est appliquée que des licenciements, des suppressions de postes et qui se traduit donc en fait par une dégradation de la qualité du service. C'est ainsi qu'en Suède les tarifs augmentent, les bureaux de poste ferment et qu'il faut procéder à une restructuration interne. Quant à l'Allemagne, elle attend 100 000 suppressions d'emploi en cinq ans.
M. Charles Revet. C'est normal !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Notre logique est donc celle du service public, du développement de La Poste, qui entend concilier la performance, la présence internationale et un service public dynamique. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

SITUATION DES CONVOYEURS DE FONDS