SEANCE DU 11 DECEMBRE 2000


M. le président. « Art. 61. - Les trois premiers alinéas de l'article 4 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique sont ainsi rédigés :
« Le demandeur à l'aide juridictionnelle doit justifier, pour l'année 2001, que ses ressources mensuelles sont inférieures à 5 175 francs pour l'aide juridictionnelle totale et à 7 764 francs pour l'aide juridictionnelle partielle.
« Ces plafonds sont affectés de correctifs pour charges de famille.
« Ils sont revalorisés, au 1er janvier de chaque année, comme la tranche la plus basse du barème de l'impôt sur le revenu. »
Sur l'article, la parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'article 61 me ramène logiquement à mon propos liminaire : à travers l'aide juridictionnelle, c'est en effet la conception même de la justice d'aujourd'hui et de demain qui est en jeu.
La très forte augmentation des demandes d'aide juridictionnelle montre, à l'évidence, que le nombre de pauvres est considérable dans notre pays. En effet, de plus en plus de nos concitoyens ont affaire à la justice. Or, selon moi, leur situation ne devrait pas relever de la justice. Nous connaissons de nombreuses situations où les difficultés et l'état de pauvreté conduisent à des situations insupportables.
Madame la ministre, je partage vos propos : les mouvements actuels des professionnels traduisent des difficultés accumulées, des frustrations, des problèmes qui ne sont pas liés au budget pour 2001 ou à une situation récente.
Cela doit nous conduire à réfléchir sérieusement en termes de droit à la justice, de « justice pour tous », si vous préférez, dont le principe d'accès à la justice constitue un indispensable corollaire.
Le système actuel de l'aide juridictionnelle, parce qu'il ne prend pas acte de cette judiciarisation, ne peut qu'être insatisfaisant.
D'une part, il explique que son accès soit considéré comme trop limité : c'est la question des seuils d'admission, qui est l'objet du présent article. Vous nous proposez un relèvement de 4,2 %, qui, aux yeux de beaucoup, paraît insuffisant. Un relèvement de l'aide juridictionnelle au SMIC n'est pas, selon moi, aberrant.
Le deuxième dysfonctionnement recensé, c'est le mode de rémunération des avocats. Il ne s'agit non pas d'une rémunération mais d'une simple indemnisation. On sait les diffcultés que ce système génère pour nombre d'avocats, contraints de travailler à perte. On ne peut se satisfaire d'une telle situation. Une réflexion doit être menée avec la profession sur les moyens de répondre à cette exigence de service public. Là encore, on ne peut se satisfaire de la situation actuelle.
Vous avez annoncé une refonte du système pour 2003. C'est une décision heureuse. Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen s'en félicitent, d'autant que la désignation de M. Bouchet pour réfléchir à la question, lui qui connaît tant les difficultés de la profession que les problèmes d'accès à la justice des plus démunis, laisse augurer les meilleurs résultats.
En attendant, vous avez admis la nécessité de mesures urgentes. Un progrès réel a été fait la semaine dernière avec l'acceptation du doublement de l'unité de valeur pour tout le contentieux pénal, les infractions au séjour des étrangers, les expulsions au logement et, en deux étapes, les référés prud'homaux.
Malgré son caractère tardif et peut-être incomplet, nous espérons que cette initiative marque la volonté d'un réinvestissement de l'Etat dans le service public de la justice.
Nous suivrons en tout cas attentivement l'évolution de ce dossier. Nous serons particulièrement vigilants face à toute dérive de privatisation d'une aide juridictionnelle qui ne subsisterait que sous la forme d'une aide charitable de l'Etat aux miséreux.
Pour l'heure, nous voulons vous faire confiance, et nous voterons donc l'article 61 en l'état.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 61.

(L'article 61 est adopté.)

Article additionnel après l'article 61