SEANCE DU 16 NOVEMBRE 2000


M. le président. La parole est à M. Bernard. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Jean Bernard. Ne m'en veuillez pas, monsieur le ministre, de revenir sur le sujet, mais il s'agit vraiment d'une question d'actualité, dont nous espérons toutefois qu'elle ne le restera pas trop longtemps tout de même !
Le Gouvernement vient d'annoncer une série de mesures afin de renforcer la sécurité alimentaire concernant le dossier crucial de l'encéphalopathie spongiforme bovine. Parmi ces mesures figurent la suspension de l'utilisation des farines de viande et d'os dans l'ensemble de l'alimentation animale ainsi que la suspension de l'importation sur le territoire national de farines carnées et d'aliments de bétail contenant ces farines.
Si l'absence de certitude recommandait irrémédiablement cette suspension de l'utilisation des farines animales, conformément d'ailleurs à la demande lucide et opportune du Président de la République, se pose néanmoins la question de la substitution à ces protéines animales de protéines végétales.
Un tel plan devra prendre en compte la destruction annuelle de 430 000 tonnes de farines animales, la construction de centres d'incinération, vous l'avez dit, la maîtrise des rejets de dioxine et la réduction des jachères pour relancer la production d'oléoprotéagineux sur deux millions d'hectares environ.
Son coût est estimé à plus de 5 milliards de francs, mais la santé de nos concitoyens d'abord, la survie et le renom de l'élevage français ensuite, sont, à mes yeux, à ce prix.
Or, monsieur le ministre, au regard des fameux accords de Blair House , nous resterions dépendants pour 80 % de nos besoins en protéines végétales. C'était hier un problème de balance commerciale, c'est devenu aujourd'hui, et ce le sera plus dans l'avenir, un problème de sécurité alimentaire.
En conséquence, monsieur le ministre, allez-vous profiter de la présidence française pour demander à vos collègues de l'Union européenne de reconsidérer le différentiel de subventions entre céréales et protéagineux et ainsi inciter nos agriculteurs en pleine détresse à produire plus de protéines végétales ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, ma réponse comportera deux parties.
La première concerne l'interdiction des farines animales. Il était temps, avez-vous dit.
M. Jean Delaneau. Plus que temps !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. J'ai insisté tout à l'heure sur le fait qu'il fallait au contraire prendre son temps compte tenu des problèmes que nous avons. Un responsable de l'opposition - pas dans cet hémicycle, on y est sage par tradition,...
M. Philippe François. Et par nature !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. ... mais peut-être dans un autre... - nous a demandé pourquoi nous n'avions pas pris plus tôt la décision d'interdire les farines compte tenu de l'avis des scientifiques. Mais aucun scientifique français n'a émis d'avis dans ce sens ! Seul le bon sens nous a amenés à prendre une telle décision, et j'ai d'autant moins de scrupules à en parler que j'ai été le premier des ministres de l'agriculture en Europe, voilà deux ans, à dire qu'il fallait aller dans cette direction. Cela me paraissait déjà de bon sens. Il faut remettre les choses à leur place !
La seconde partie de ma réponse concerne le « plan protéines », qui est évidemment nécessaire ! Là encore, j'ai d'autant moins de scrupules à en parler que la France a été le seul pays d'Europe, au moment des accords de Berlin, par ma voix, par celle du Premier ministre, par celle du Président de la République, à critiquer les mesures concernant les oléoprotéagineux et à exiger une clause de rendez-vous en 2002 pour revoir la politique d'aide aux oléoprotéagineux dans le cas où les emblavements diminueraient, et ce n'était pas être grand clerc que de deviner qu'ils allaient effectivement diminuer.
Il faut donc revenir sur les dispositions des accords de Berlin le plus vite possible, sans attendre 2002. Nous pourrons aussi remettre en cause les accords de Blair House , qui, reconnaissons-le, résultaient d'un compromis entre les exigences américaines et les exigences européennes, puisque l'Europe avait demandé l'autorisation de « surprimer » les oléoprotéagineux contre cette autolimitation des surfaces. Comme nous nous sommes engagés, à Berlin, à limiter ou à éliminer les surprimes, nous allons nous libérer automatiquement de l'accord de Blair House sans attendre sa remise en cause et sans attendre une éventuelle renégociation de la PAC. Je vais m'y employer dès lundi et mardi prochains à Bruxelles.
En France, nous avons les moyens d'élaborer un « plan protéines » afin de relancer la production de soja, notamment de soja de pays sans OGM, pour répondre à une autre aspiration des consommateurs de notre pays. Vous pouvez en être sûr, le Gouvernement prévoira des mesures dans ce sens dans le plan qu'il prépare. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

DÉNEIGEMENT DES ROUTES
DANS LES COMMUNES RURALES