SEANCE DU 7 NOVEMBRE 2000


M. le président. La parole est à M. Vallet, auteur de la question n° 820, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. André Vallet. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous n'ignorez pas que l'obligation qui est faite aux commerçants d'accepter les billets émis par la Banque de France, dès lors qu'ils ont un cours légal, constitue l'un des fondements de notre droit commercial. Un refus serait d'ailleurs sanctionné par l'article R. 642-3 du nouveau code pénal.
Or, en dépit de ce texte, la recrudescence de faux billets de 500 francs incite de nombreux commerçants à refuser purement et simplement les coupures de ce montant. Cette attitude est d'autant plus difficile à admettre qu'il est possible de déceler les contrefaçons et que du matériel simple et accessible permet de contrôler ces billet. D'ailleurs, de nombreux commerçants se sont dotés de ce matériel.
La Banque de France édite une brochure dans laquelle sont détaillés tous les défauts de l'imitation. Elle organise également des stages gratuits à l'adresse des commerçants pour les mettre en mesure de faire face à cet afflux de fausse monnaie. Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d'Etat, il paraît anormal que des consommateurs se voient refuser le paiement avec ces billets.
J'aimerais également soulever la question des responsabilités dans la persistance de la présence de fausse monnaie.
Le billet de 500 francs est aujourd'hui la coupure la plus élevée de notre système monétaire. Par voie de conséquence, sa valeur en limite automatiquement la circulation. En effet, si les commerçants sont tenus d'accepter les billets de 500 francs en paiement, ils n'ont qu'exceptionnellement l'occasion de les remettre directement en circulation auprès des usagers.
Dès lors, l'immense majorité des billets de 500 francs est remise aux organismes financiers, qui en assurent la redistribution au public. On peut donc s'interroger sur le degré de responsabilité de ces établissements qui remettent en circulation des billets dont ils savent qu'une partie au moins constitue une contrefaçon.
Monsieur le secrétaire d'Etat, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour sanctionner le refus de certains commerçants d'accepter des billets de 500 francs dont rien ne permet de mettre en doute l'authenticité ? Comment va-t-il contrôler l'afflux de cette fausse monnaie dans les divers organismes financiers ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation. Monsieur le sénateur, vous évoquez un problème qui, il est vrai, inquiète souvent les commerçants. Il renvoie également à la question de savoir comment, demain, les consommateurs seront protégés eu égard à la future monnaie européenne.
Cette attitude des commerçants peut être compréhensible, car elle est motivée par l'insuffisance des moyens dont ils disposent pour effectuer l'identification des faux billets. Ils prennent ainsi le risque, en les acceptant, que leur établissement bancaire les confisque, sans évidemment leur fournir la contrepartie en valeur équivalente. Je suis néanmoins obligé de vous rappeler que cette attitude est illégale, comme vous l'avez souligné, monsieur Vallet, en faisant référence au code pénal. Si un commerçant a bien la possibilité de demander à sa clientèle de faire l'appoint, le fait de refuser des pièces de monnaie ou des billets de banque ayant cours légal en France constitue une infraction passible de l'amende prévue pour les contraventions de deuxième classe.
Le Gouvernement veut, en la matière, montrer l'exemple et aider les commerçants. Tout d'abord, l'Etat montre l'exemple pour ce qui concerne le réseau du Trésor public. A cette fin, j'ai fait rappeler à l'ensemble des comptables publics la réglementation en vigueur, afin d'éviter que ne se reproduisent des initiatives isolées de refus de certains billets.
Ensuite, pour mettre fin au comportement de défiance, la nouvelle gamme de billets de 500 francs à l'effigie de Pierre et Marie Curie, dont la conception et la fabrication ont reposé sur l'utilisation de technologies avancées, se caractérise par un niveau de sécurisation qui est parmi les plus élevés dans le monde.
Le nombre de faux billets a ainsi été divisé par dix entre 1995 et 1999. Il faut encore mieux informer le public et les commerçants des signes de sécurité de la nouvelle gamme de billets. Nous avons donc demandé à la Banque de France d'amplifier les actions de sensibilisation menées en ce sens. M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie vient également de saisir le ministre de l'intérieur pour que les efforts s'intensifient à l'encontre des filières de faux-monnayage.
Les pouvoirs publics suivent donc avec beaucoup d'attention, monsieur le sénateur, le phénomène que vous évoquez.
M. André Vallet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Vallet.
M. André Vallet. Si je ne doute pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que le ministre de l'intérieur et la police surveillent de très près cette fausse monnaie, notamment les faux billets de 500 francs, je comprends toutefois parfaitement l'embarras des commerçants auxquels on présente ce mode de paiement.
Je vous demande simplement de rappeler très fortement que, si un commerçant peut contrôler un billet, il n'est pas en droit de le refuser. Tel est le fond de ma question. En effet, si nous sortions du Sénat pour nous promener dans le quartier, nous ne manquerions pas de voir au-dessus des caisses des pancartes annonçant que les billets de 500 francs ne sont pas acceptés. C'est cela qui n'est pas tolérable.

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