Séance du 4 mai 2000







M. le président. Par amendement n° 688 rectifié bis , Mme Bardou, MM. Faure, Braun, Blanc, Natali, Vial, Amoudry, Grillot, Jourdain, de Rocca Serra, Descours et Fournier proposent d'insérer, après l'article 19 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« L'avant-dernier alinéa de l'article L. 145-9 du code de l'urbanisme est ainsi rédigé :
« Une unité touristique nouvelle ne peut être réalisée que dans une commune disposant d'un plan local d'urbanisme, ou d'une carte communale, opposable aux tiers. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° 272, M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques, propose d'insérer, après l'article 19 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans les parties du territoire auxquelles la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative à la protection et au développement de la montagne est applicable, caractérisées par l'existence d'un habitat traditionnel composé de constructions implantées de façon discontinue, le plan d'occupation des sols ou la carte communale peut délimiter, après avis de la commission départementale des sites, des zones d'habitat individuel. Ces zones sont desservies partiellement par des équipements qu'il n'est pas prévu de renforcer. Les caractéristiques, le périmètre, les prescriptions architecturales et paysagères, le coefficient d'occupation des sols, sont déterminés après avis conforme de la commission départementale des sites. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 685 rectifié bis , présenté par Mme Bardou, MM. Faure, Braun, Blanc, Natali, Vial, Amoudry, Grillot, Jourdain, de Rocca Serra, Descours et Fournier, et tendant à supprimer la deuxième phrase du texte proposé par l'amendement n° 272.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 272.
M. Louis Althapé, rapporteur. Cet amendement est essentiel aux yeux de la commission des affaires économiques. Il permet en effet de reconnaître, dans les zones soumises à la loi « montagne », après avis de la commission des sites, des zones historiquement mitées où pourraient être édifiées quelques constructions destinées à l'habitat individuel, sous réserve du respect des prescriptions architecturales et paysagères du POS.
Actuellement, on cherche désespérément en zone de montagne des hameaux pour pouvoir y construire en continuité des maisons nouvelles. Comme l'indiquait notre collègue Charles Revet, la zone rurale ne peut se satisfaire de la rénovation des constructions anciennes ; il lui faut aussi des constructions neuves.
Or, actuellement, dès lors qu'il n'y a pas de hameau, il est impossible d'obtenir un permis de construire. Je vous laisse imaginer le désarroi des maires qui, alors qu'ils reçoivent des demandes, ne peuvent les satisfaire !
Dès lors, commence un long processus de négociations avec la DDE pour savoir ce qu'est un hameau. Certains services de l'Etat ont même pris la peine - c'est méritoire - de réunir dans un document unique ce qui leur paraît constituer la définition d'un hameau.
Il faut sortir de ces mésaventures à la recherche du hameau perdu et définir des zones où les constructions pourront être réalisées parce que ces zones sont mitées de toute éternité.
M. le président. Le sous-amendement n° 685 rectifié bis est-il soutenu ?...
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 272 ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis résolument défavorable. En effet, même s'il comprend les préoccupations qui motivent cette proposition, il estime que la garantie offerte par l'intervention de la commission des sites n'est pas suffisante pour avoir l'assurance que ne sera pas favorisée une urbanisation par trop anarchique.
Il rappelle au rapporteur et au Sénat que le mécanisme de transfert des COS, prévu à l'article L. 123-4, facilite la création de petits hameaux bien intégrés dans l'environnement, ce qui est conforme à l'esprit de la loi « montagne ».
Ainsi, avec cette disposition, il est possible aux communes de prévoir des constructions peu denses dans la zone rurale, mais de façon organisée. Organiser ne veut pas dire densifier, ni tout regrouper au même endroit.
Le Gouvernement préfère donc cette formule à celle de l'amendement, dont il demande le rejet.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 272, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 19 bis.
Par amendement n° 273, M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques, propose d'insérer, après l'article 19 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 111-1 du code de l'urbanisme, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Dans les zones rurales caractérisées par l'absence de toute pression foncière et la présence d'un habitat traditionnel comportant des constructions implantées de façon discontinue, il peut être dérogé aux dispositions de l'article L. 111-1 afin d'autoriser, à titre exceptionnel et dans la limite d'un nombre maximum de deux constructions par commune et par an, l'implantation de constructions nouvelles, sous réserve que celles-ci soient desservies par des équipements qu'il n'est pas prévu de renforcer.
« Toute autorisation d'occupation du sol délivrée en application du présent article détermine les conditions de l'insertion paysagère et les prescriptions architecturales auxquelles celle-ci est soumise. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Althapé, rapporteur. Cet amendement poursuit un objectif analogue au précédent en tentant de faire échapper les communes qui ne sont pas dotées de carte communale ou de POS à ce que d'aucuns ont appelé devant le groupe de travail de la commission des affaires économiques sur l'urbanisme « le diktat de la DDE ».
Les communes rurales se heurtent à de grandes difficultés pour construire des logements sociaux. La crainte du mitage sert souvent de raison - je n'irai pas jusqu'à utiliser le mot « prétexte » - pour justifier l'attitude malthusienne que les services de l'Etat manifestent parfois dans la gestion des crédits des documents d'urbanisme.
Or, nombre de nos concitoyens aspirent à vivre en zone rurale. Ce phénomène, souligné à plusieurs reprises par le Sénat, est désormais bien connu : ainsi, Le Monde constatait récemment que l'arrivée d'anciens citadins dans les petites villes contribuait à une rénovation de la ruralité.
La construction de logements sociaux en milieu rural et la délivrance d'autorisations de construire, qui serait pourtant parfois justifiée, souffrent malheureusement d'une lecture presque « intégriste » du code de l'urbanisme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est très défavorable à cet amendement, parce qu'il lui semble que l'on se lance vraiment, en l'occurrence, dans l'édification d'une « usine à gaz », pour employer une expression familière.
Comment définir des critères objectifs pour décider quelles sont les collectivités où s'exerce une pression foncière ? Qui pourra déterminer les critères permettant de caractériser une tradition d'habitat dispersé ? Le Gouvernement pense donc que cet amendement risque de poser davantage de problèmes qu'il n'est susceptible de permettre d'en résoudre.
Par ailleurs, ce dispositif sera très vite perçu comme injuste par beaucoup de nos concitoyens, puisque le nombre des autorisations sera limité à deux par an, ce qui signifie qu'il faudra choisir et que, en tout état de cause, au-delà de ce chiffre, les demandes seront écartées.
Le Gouvernement pense qu'il serait préférable que la commune se trouvant dans cette situation se dote d'une carte communale prévoyant la constructibilité de zones équipées. C'est donc l'article 4 qui, aux yeux du Gouvernement, règle le problème posé par la commission sans engendrer plus de difficultés que de résultats convaincants.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 273.
M. Charles Revet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Revet.
M. Charles Revet. Je suis tout à fait favorable à cet amendement, même s'il conviendra peut-être d'en revoir les dispositions - j'ai bien noté vos remarques, monsieur le secrétaire d'Etat.
Les membres du groupe de travail de la commission des affaires économiques sur l'urbanisme ont constaté sur le terrain que, dans nombre de communes où les demandes de permis de construire se limitent à une, deux, voire trois par an, celles-ci sont bloquées par une stricte application du dispositif actuellement en vigueur.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous venez de nous répondre qu'il fallait que ces communes se dotent d'une carte communale, et c'est cela qui m'a amené à réagir : comment voulez-vous qu'une commune qui n'est saisie que d'une ou deux demandes de permis de construire par an s'engage dans un processus de carte communale ? Outre le coût, vous savez comme moi qu'étant donné le nombre de cartes communales à établir, ce n'est pas avant cinq, dix voire quinze ans, si tant est que les communes s'engagent dans ce processus, que la totalité de nos communes en sera dotée ! On fait donc une croix sur un tiers des communes de France, ce n'est pas acceptable.
Nous sillonnons tous notre beau pays, il est magnifique, et ce grâce à ceux qui, au fil des siècles, ont construit. Aujourd'hui, on nous propose des dispositifs pour protéger cet habitat ou ces équipements, souvent réalisés, à l'époque, sans permis de construire.
Monsieur le secrétaire d'Etat, faites un peu confiance aux élus locaux !
M. Alain Gournac. Ah oui !
M. Charles Revet. Et même, à la limite, pourquoi ne pas imposer le recours à un architecte. Faites aussi confiance aux hommes de l'art !
Par ailleurs, nous avons également constaté sur le terrain que nos concitoyens souhaitent vivre autrement. Je parlerai de mon département, qui est celui que je connais le mieux. Je suis président d'un OPAC, qui compte 27 000 logements. Nous ne savons pas répondre aux demandes, que ce soit en habitat locatif ou en accession à la propriété, dans la plupart des villes moyennes ou des petites communes et, dans le même temps, des logements restent vacants en zones urbaines, à Rouen ou au Havre. Répondons-nous vraiment aux aspirations de nos concitoyens et organisons-nous le territoire en conséquence ?
Aujourd'hui, 80 % de la population vit sur 20 % du territoire. Ce n'est pas une fatalité !
Je suis un défenseur des petits oiseaux et des animaux. Il faut certes les protéger, mais doit-on aller jusqu'à aboutir à des situations absurdes ? Je prendrai l'exemple d'un tracé d'autoroute : parce que, sur un vieil arbre, on a trouvé un insecte que personne ne connaissait, ...
M. Louis Moinard. Vive Mme Voynet !
M. Charles Revet. ... on a interrompu le chantier, on a modifié le tracé, avec comme conséquence un surcoût de plusieurs milliards de francs ! C'est véritablement une absurdité, nous marchons sur la tête !
Pardonnez-moi d'être aussi passionné, mais nous avons aujourd'hui le sentiment que certains souhaitent créer un désert pour protéger l'environnement et la nature, quitte à parquer les humains sans prende en compte leurs aspirations.
M. Jean Chérioux. Très juste !
M. Charles Revet. Monsieur le secrétaire d'Etat, faites preuve d'un peu de pragmatisme ! Quelle est la demande qui vous est faite à travers cet amendement ? Il vous est demandé de laisser un peu de responsabilité aux élus. Ils sont élus pour cela. Et s'ils font des bêtises, ce sont eux qui seront sanctionnés par leurs électeurs, et non pas celui qui prend la décision dans un bureau loin de la réalité du terrain.
Monsieur le secrétaire d'Etat, prenez un peu plus en compte l'aspiration de nos concitoyens à vivre autrement, faites en sorte d'instaurer un meilleur équilibre sur l'ensemble de notre pays entre les grandes villes qui doivent être réaménagées, les villes moyennes et les zones rurales. C'est cela, en fait, la France ! (Très bien ! sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je souhaite répondre brièvement à M. Revet, que j'ai écouté avec beaucoup d'attention.
Tout d'abord, monsieur le sénateur, vous connaissez la position du Gouvernement sur la vacance des logements lorsqu'elle est structurelle dans des ensembles urbains dont une partie est devenue obsolète. Nous avons complètement rompu avec le tabou de la non-démolition. Nous avons même créé les outils pour y parvenir. Adapter l'offre à la demande de nos concitoyens est véritablement une de nos préoccupations.
Ensuite, lorsqu'en alternative à l'amendement n° 273, dont je crains que vous n'ayez pas estimé convenablement les difficultés de mise en oeuvre, je suggère d'y substituer une incitation à l'élaboration des cartes communales, cette proposition ne peut pas être interprétée comme l'expression d'une défiance à l'égard des élus locaux.
M. Charles Revet. Vous savez que ce n'est pas réaliste !
M. Alain Gournac. C'est théorique !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. C'est un point sur lequel je souhaitais être très clair.
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le secrétaire d'Etat, c'est un point que nous avons souvent abordé, en tout cas plusieurs fois avec vous, notamment à l'occasion de vos différentes auditions devant la commission des affaires économiques. Je me souviens d'un long débat voilà un peu plus d'un an, où nous avons été nombreux à attirer votre attention sur l'attitude systématiquement restrictive des directions départementales de l'équipement à l'égard de toute construction dans l'espace rural. Cette réticence se manifeste aussi à l'occasion de l'établissement des cartes communales ou des plans d'occupation des sols, ...
M. Charles Revet. Tout à fait !
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. ... avec la volonté de tout restreindre dans des périmètres aussi limités que possible et qui tournent le dos au désir de ceux qui souhaitent s'installer dans l'espace rural et de vivre justement dans un milieu naturel. Nous avions attiré votre attention sur ce point et vous nous aviez donné le sentiment d'être étonné. Vous nous aviez dit que des instructions seraient données pour que les DDE adoptent une attitude plus ouverte et plus libérale.
M. Alain Gournac. Ça n'a pas évolué !
M. Charles Revet. En tout cas, ces instructions n'ont pas été appliquées !
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Ces instructions n'ont pas été données et nous nous heurtons partout à une attitude systématiquement négative.
La réponse que vous nous donnez, c'est la carte communale. Monsieur le secrétaire d'Etat, faites la grâce aux élus qui sont ici de reconnaître que, la carte communale, ils savent ce que c'est ! Ils la pratiquent depuis longtemps ; ils ont aidé les communes rurales qui souhaitaient s'en doter à l'établir.
Un grand nombre de communes n'ont pas l'intention d'établir une carte communale car elles ne sont pas soumises à une pression foncière. C'est très simple. Pourquoi établiraient-elles une carte communale si aucune construction n'est prévue ? En conséquence, la réponse que vous nous avez apportée, excusez-moi de vous le dire, n'en est pas une.
M. Alain Gournac. Absolument !
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Nous voulons obliger les DDE à avoir une vision plus ouverte. Nous voulons éviter la dépopulation dans l'espace rural, ce qui est essentiel. Un certain nombre de cantons ruraux connaissent en effet une véritable désertification.
Nous demandons au Gouvernement d'adopter une attitude ouverte à cet égard. Si nous rapprochons, monsieur le secrétaire d'Etat, votre position sur ce sujet d'un certain nombre d'autres positions du Gouvernement sur l'espace rural, l'agriculture - je pense à la TGAP par exemple - nous avons le sentiment d'une attitude systématiquement négative à l'égard de l'espace rural.
M. Alain Gournac. Fermée !
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. En conséquence, nous n'avons pas d'autres moyens que de présenter un texte comme celui-ci. Je reconnais qu'il est quelque peu sommaire mais vous ne nous laissez aucun autre moyen.
Les critères, dites-vous, sont difficiles à établir. Excusez-moi, je serais presque tenté de dire que vous me faites sourire. Les critères sont très faciles à identifier. On ne peut, par exemple, pas parler de pression foncière pour une commune où rien n'a été construit depuis deux ans. De même, les géographes savent depuis longtemps que toute une partie de la France comporte des habitats dispersés. Vous usez d'alibis pour justifier une attitude que nous n'arrivons pas à comprendre.
Je demande donc à mes collègues d'adopter l'amendement de la commission, en souhaitant que l'Assemblée nationale le maintienne, tout simplement parce que les élus locaux qui partagent cette position sont légion en France. Monsieur le secrétaire d'Etat, si vous assistiez à une assemblée de maires dans mon département, vous changeriez sans doute d'avis !
Je suis désolé d'avoir plaidé avec tant de passion, mais ce problème nous taraude depuis des années et des années et nous souhaitons lui apporter une solution.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Jarlier, rapporteur pour avis.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. M. François-Poncet a pratiquement dit ce que je voulais dire. Je partage totalement ses propos.
Si cet amendement a été déposé, c'est parce que, aujourd'hui, les possibilités de construire sont complètement impossibles dans un certain nombre de communes rurales.
M. Ladislas Poniatowski. Tout à fait !
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous avez indiqué tout à l'heure que des outils existaient pour permettre la construction dans certains cas, et vous les avez cités. Or les DDE appliquent les textes d'une façon si restrictive qu'aucune construction n'est possible.
La solution est simple : il suffit d'assouplir ces directives afin de permettre à ces zones rurales, en voie de dépopulation, comme l'a dit M. François-Poncet, de se développer.
Aujourd'hui, les élus sont découragés : dès lors qu'existe une possibilité de construction, l'administration leur rétorque qu'ils ne peuvent pas construire sous prétexte qu'il manque tel ou tel document.
Certes, comme l'a dit M. le secrétaire d'Etat, la solution peut passer par la carte communale, mais il ne faut pas que ce soit le passage obligé pour autoriser une construction dans ces zones.
M. Ambroise Dupont. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont.
M. Ambroise Dupont. Je m'interroge, après avoir entendu tous les orateurs précédents. Je connais, naturellement, pour être un élu de zone rurale, les difficultés que nous rencontrons.
Pour autant, je constate également que si nous attribuons deux permis de construire par an en zone rurale, sans avoir une réflexion préliminaire, nous en arrivons, de fil en aiguille, à dire qu'il faut faire de la continuité le long des routes à grande circulation, à autoriser le mitage dans tous les sens alors que les exigences des SDIS - services départementaux d'incendie et de secours - sont de plus en plus fortes pour protéger les maisons et faire en sorte que les pompiers puissent arriver à temps pour éviter qu'elles ne brûlent.
Je suis donc très perplexe et M. le secrétaire d'Etat a raison de dire que les communes doivent se doter d'instruments de réflexion, que ce soit par le biais des cartes communales ou des cartes intercommunales. Cette dernière option serait d'ailleurs préférable car la réflexion sur un paysage, sur une ressource en eau ou des voies de communication passe par la maîtrise de l'urbanisme.
Je suis très perplexe, disais-je, et je souhaite que les communes puissent bénéficier des conseils de praticiens compétents - il convient à cet égard de rappeler que les CAUE ont été créés par la loi à leur service - et de crédits suffisants pour pouvoirs réaliser les études, qu'il s'agisse de la carte communale ou du POS. Au gré des autorisations de construire qui sont accordées, nous risquons en effet d'être confrontés à des situations insolubles.
Le mieux, c'est la réflexion préalable, Je le dis d'autant plus volontiers que, dans le Calvados, des petits chemins deviennent absolument inutilisables car, sous prétexte qu'un premier permis de construire a été accordé, d'autres n'ont pas été refusés. Et nous en arrivons à des situations très conflictuelles et très dommageables, qui ne s'inscrivent en rien dans une gestion d'avenir de notre territoire.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Les observations de M. Besson ne sont pas dénuées de pertinence, au moins en partie, comme mon collègue M. Ambroise Dupont vient de s'en faire l'écho, même si j'adhère à l'argumentation développée par M. le président de la commission des affaires économiques et du Plan, par M. le rapporteur et par d'autres collègues.
Cela étant, en ma qualité d'élu d'une commune rurale de moins de deux cents habitants, et alors que je n'ai pas le souvenir que des modifications réglementaires et législatives soient intervenues sur ce point, je sais que, lorsque le maire d'une commune rurale est saisi d'une demande de permis de construire en dehors du périmètre urbanisable de la commune, le conseil municipal de ladite commune peut, par délibération motivée, justifier la construction d'une maison d'habitation en dehors de ce périmètre.
Cet exemple me laisse à penser que rien ne s'oppose aujourd'hui à ce que le maire d'une petite commune puisse autoriser la construction d'un, de deux ou de trois pavillons en dehors du périmètre urbanisable et, par cette voie, répondre à l'objet de cet amendement.
Il est vrai que l'amendement n° 273 soulève des problèmes d'interprétation. Il présente par ailleurs un caractère limitatif, comme l'a souligné très justement M. le secrétaire d'Etat, en limitant à deux constructions, alors que les dispositions actuelles sont beaucoup plus souples.
A ce propos, je rejoins l'argumentation de M. François-Poncet sur un point : la carte communale n'est pas forcément la panacée et il faut, là ou la pression de l'urbanisme n'est pas importante, là où l'habitat est dispersé, laisser un maximum de souplesse au maire et au conseil municipal pour décider de l'opportunité d'accéder ou non à une demande de construction.
C'est la volonté d'élaborer un dispositif souple qui devrait nous animer ; elle seule permettrait d'éviter, contrairement à ce projet de loi, d'enserrer l'ensemble de nos administrés et de nos élus dans un carcan administratif dont on ne saura pas sortir et qui sera plus source de difficultés que d'avantages.
Selon moi, le Gouvernement est en train de mettre en place un dispositif d'une contrainte telle qu'il sera amené lui-même à faire un constat d'échec de cette disposition législative, et, si ce n'est pas lui, ses successeurs devront revenir sur ce texte pour redonner de la souplesse à la gestion de l'urbanisme dans ce pays. Qui trop embrasse mal étreint ! Et le résultat de l'opération n'est pas du tout celui que l'on a espéré.
Voilà pourquoi, comme mon collègue M. Ambroise Dupont, j'ai un avis partagé sur cet amendement.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Jarlier, rapporteur pour avis.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. Je voudrais répondre à M. Vasselle que, pour être intéressante, sa proposition se heurte néanmoins à une difficulté d'ordre juridique majeure. En l'absence de carte communale ou de POS, le maire et le conseil municipal n'ont aucune compétence pour décider de l'extension des périmètres.
M. Ladislas Poniatowski. Quand cela arrive, la DDE refuse !
M. Alain Gournac. La DDE n'en tient pas compte !
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. D'où la difficulté de mettre en place ce dispositif.
C'est vrai que, dans la mesure où les nouvelles cartes communales sont aujourd'hui opposables aux tiers et donnent le pouvoir aux maires d'attribuer le permis de construire, elles pourraient effectivement faciliter la construction en milieu rural.
Pour autant, je réitère ce que je disais précédemment : en l'absence de dispositif satisfaisant, cet amendement permet de régler les problèmes, au moins à court terme.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je n'aurai pas l'outrecuidance de prendre parti sur le fond en ce qui concerne les zones rurales ! A Paris, les problèmes sont très différents.
Cela dit, je voudrais soutenir un argument qu'a donné M. Revet en ce qui concerne l'OPAC.
A l'évidence, il arrive souvent en ville - et c'est aussi le cas à Paris - que de nombreux logements soient vides. Et je voudrais répondre à M. le secrétaire d'Etat que, contrairement à ce qu'il a dit à M. Revet, ce n'est pas du fait de l'obsolescence des logements, c'est parce que la capitale est devenue une grande administration et qu'on est amené à construire pour des raisons administratives plutôt que purement fonctionnelles et de rééquilibrage.
Lorsque j'arrive à obtenir un logement, certains me disent : « Nous sommes allés le voir, nous n'irons jamais là-bas, nous aimons mieux rester où nous sommes ! »Et c'est ainsi que des centaines de logements sont inoccupés !
Cela montre bien que, quand on va trop loin dans la réglementation, finalement, on en vient à gaspiller des fonds publics.
M. Alain Gournac. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gournac.
M. Alain Gournac. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous ai écouté avec beaucoup de respect, et j'ai eu le sentiment que vous ne nous apportiez pas la réponse que, en tant qu'homme, vous souhaitiez nous donner.
Pour vous, la carte communale doit résoudre le prolème. Or, c'est une approche théorique, vous le savez très bien ; certains de mes collègues l'ont évoqué. Quant il n'y a pas de construction ou qu'il y en une tous les deux ans, je vous laisse imaginer la complexité qui découlerait du dispositif que vous souhaitez mettre en place.
Votre approche est totalement théorique, et c'est le problème : cela ne correspond absolument pas à ce que les maires veulent faire sur le terrain.
Les maires, on veut toujours les encadrer, et je me demande ce qu'ils auront le droit de faire, bientôt.
Pour ma part, je voudrais que l'on ait une approche réaliste de cette question, et je voterai donc cet amendement. Nous devons laisser « respirer » les maires d'autant que, si jamais les maires font des bêtises, ils seront jugés par les électeurs !
Vous nous dites, monsieur le secrétaire d'Etat : il y a les DDE. Pourtant, si vous leur avez donné des instructions, il ne me semble pas qu'elles soient arrivées dans toutes les DDE de France ! Les DDE, ce n'est pas le parapluie, c'est le parasol ! Les DDE, c'est le blocage, la fermeture !
Quand on leur demande quelque chose, leur réponse est toujours : ce n'est pas possible. Je me souviens pourtant que, il y a quelque temps, vous m'aviez dit que les choses devraient aller dans le bon sens. Mais, moi, je peux dire que les DDE sont complètement bloquées, qu'elles donnent une image de fermeture totale !
M. Jean-Pierre Plancade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. C'est un débat déchirant, car les arguments avancés par les tenants de la ruralité sont imprégnés d'un réalisme absolu.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous connaissez bien les communes rurales et vous savez toutes les difficultés que recontrent leurs maires du fait de la dictature imposée par les fonctionnaires de la DDE !
Hier, nous avons été obligés - je l'ai moi-même fait - de voter contre un amendement défendu par M. Ambroise Dupont, qui était pourtant parfaitement légitime. Pourquoi ? Précisément parce que l'on sait avec quelle sévérité, avec quelle dureté les lois sont appliquées dans nos petites communes : sans aucun discernement, sans aucune mesure, on ouvre le parasol !
On en arrive à créer un vrai problème dans nos petites communes. Laissons respirer les maires, laissons-les vivre !
M. Charles Revet. Très bien !
M. Jean-Pierre Plancade. Evidemment, il existe des outils : les cartes communales, l'intercommunalité. Il ne faut certes pas négliger ce que vient de dire M. Ambroise Dupont pour éviter des dérives. Il faut intervenir auprès de M. Gayssot pour faire en sorte que, dans les communes où il n'y a ni de gros problèmes ni une pression foncière importante, un peu de latitude soit laissée aux fonctionnaires de l'équipement et aux maires.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Je ne reviendrai pas sur tous les points qui ont été évoqués jusqu'à présent. Je souhaite simplement attirer l'attention de M. le secrétaire d'Etat, comme j'ai déjà eu l'occasion de le faire sur un autre article.
La difficulté pourrait être réglée d'une manière satisfaisante - et il appartient à M. le secrétaire d'Etat de le faire - si l'esprit urbain soufflait un peu plus sur les services déconcentrés de l'Etat. Il n'y a ni compréhension ni réflexe rural en matière d'instruction des permis de construire en milieu rural dans les services déconcentrés et dans les directions départementales de l'équipement.
Il y a là, comme cela a été dit par certains de nos collègues, un réflexe urbain. Il est vrai qu'il s'agit d'urbanisme ! Mais faut-il introduire la notion de « rurbanisme » ?
En tout cas, il serait souhaitable que nous ne soyons pas trop victimes de la règle des « 80-20 ». En effet, aujourd'hui, les fonctionnaires qui servent dans les services déconcentrés de l'Etat sont d'origine urbaine et ont un réflexe urbain qui gêne beaucoup la discussion avec les maires, qui sont des ruraux au vrai sens du terme, avec le bon sens qui les caractérise.
M. Louis Althapé, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Althapé, rapporteur. Il y a quelque chose d'irréel dans ce débat. Cet après-midi, nous parlerons de l'article 25 et de la densification de la population et, en cette fin de matinée, nous débattons de la possibilité d'édifier quelques constructions en milieu rural.
M. Charles Revet. C'est incroyable !
M. Louis Althapé, rapporteur. C'est un peu fou !
M. Alain Gournac. C'est dingue !
M. Louis Althapé, rapporteur. D'un côté, il y a une France densifiée, et de l'autre, une France complètement désertique et qui essaie d'avoir le droit à une, voire à deux constructions.
M. Pierre Hérisson. Absolument !
M. Louis Althapé, rapporteur. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'espère que vous avez été très sensible aux différentes interventions, en particulier à celles de MM. Charles Revet et Jean François-Poncet.
C'est un cri du coeur que vous avez entendu.
Ce matin - mais je doute que vous ne le sachiez pas - vous avez pu apprécier le message que les élus du Sénat ont l'intention de faire passer.
La carte communale n'est pas applicable partout. Comment peut-on imposer une carte communale dans un village d'une centaine d'habitants où sont accordés deux ou trois permis de construire en l'espace d'un mandat ?
Nos propositions ne sont peut-être pas très acceptables, juridiquement parlant, et elles vont sans doute heurter les bons juristes qui vous entourent, monsieur le secrétaire d'Etat. (Sourires.) Toutefois, nous sommes dans notre rôle de législateur quand nous tentons de démontrer que la législation vue par d'éminents spécialistes peut évoluer sous la pression d'une assemblée parlementaire.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne sais pas ce que deviendra cet amendement. Toutefois, puisque vous allez sans doute l'adopter, mes chers collègues, je suggère de le modifier.
Tout d'abord, je propose d'ajouter les termes : « à titre exceptionnel après avis de la commission de conciliation ».
Cette commission de conciliation a été mise en place pour que, au moins, on puisse discuter ; c'est l'esprit de l'article L. 121-6 qui a déjà été voté. Il me semble que, dans ce domaine également, la DDE ne devrait pas décider d'une manière unilatérale, elle devrait au moins s'expliquer et dire pourquoi elle n'est pas d'accord.
En outre, pour faire suite à la suggestion de mon collègue Charles Revet, nous pourrions ajouter, à la fin du dernier alinéa, les mots suivants : « dès lors qu'elles ont fait l'objet d'une délibération motivée du conseil municipal ».
Après tout cela, si vous ne pouvez pas nous donner satisfaction s'agissant des quelque 10 000 conseils municipaux de France qui, le temps d'un mandat, ont quatre ou cinq constructions à gérer, je crois, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'on pourra désespérer du pouvoir législatif dans notre pays ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 273 rectifié, présenté par M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques, et tendant à insérer, après l'article 19 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 111-1 du code de l'urbanisme, il est inséré un article L. 111-1-1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 111-1-1 A. - Dans les zones rurales caractérisées par l'absence de toute pression foncière et la présence d'un habitat traditionnel comportant des constructions implantées de façon discontinue, il peut être dérogé aux dispositions de l'article L. 111-1 afin d'autoriser, à titre exceptionnel après avis de la commission de conciliation et dans la limite d'un nombre maximum de deux constructions par commune et par an, l'implantation de constructions nouvelles, sous réserve que celles-ci soient desservies par des équipements qu'il n'est pas prévu de renforcer.
« Toute autorisation d'occupation du sol délivrée en application du présent article détermine les conditions de l'insertion paysagère et les prescriptions architecturales auxquelles celle-ci est soumise dès lors qu'elles ont fait l'objet d'une délibération motivée du conseil municipal. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement n° 273 rectifié ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les différents intervenants, et un certain nombre de déclarations talentueuses ne m'ont pas laissé insensible. J'ai toutefois le sentiment d'être au coeur d'une offensive dont j'ai quelque peine à comprendre le bien-fondé.
M. Patrick Lassourd. Vous êtes pourtant maire !
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. J'ai peine à le comprendre, tout simplement parce qu'il faut bien sérier les choses et ne pas mettre en cause toute une politique sur trois lignes seulement d'un projet de loi.
Quand, répondant à une question qui m'avait été posée devant votre commission, monsieur François-Poncet, j'ai explicité la position du Gouvernement sur la construction de logements sociaux en milieu rural, j'ai bien indiqué les précautions auxquelles nous tenions, à savoir qu'il ne s'agissait pas de construire du neuf là où l'habitat existant offrait des possibilités. Il est de plus grande intelligence, pour la revitalisation des zones rurales, de mobiliser d'abord ces disponibilités avant de créer éventuellement une concurrence dans un marché locatif qui est relativement fragile. Telle est la position qui a été la nôtre.
Si vous observez encore des blocages, n'hésitez pas à me les faire connaître.
M. Charles Revet. Mais il y en a partout, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. Jean-Pierre Schosteck. Partout, en effet !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Nous pouvons agir. Nous avons déjà été, par exemple, signataires d'un accord avec le département de la Marne pour la réalisation de quelque 600 logements dans des communes rurales, accord qui a été concrétisé. Nous pouvons même aller jusqu'à la contractualisation. Ne faites donc pas de ce point une raison de conflit, qui, à mon sens, n'a pas lieu d'être !
Lorsque vous nous avez signalé les difficultés que rencontraient les communes rurales en matière de logements locatifs sociaux quand les organismes d'HLM ne voulaient pas intervenir, nous leur avons permis, en leur ouvrant l'accès aux prêts locatifs d'usage social, d'acquérir des bâtiments disponibles grâce à des prêts sur cinquante ans.
Nous sommes encore intervenus auprès de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat pour que puissent être éligibles aux aides de l'ANAH des bâtiments situés en zone rurale qui n'étaient pas, à l'origine, destinés à l'habitation.
Soyez persuadés que nous avons la même volonté pour la conduite d'une politique à la fois active et dynamique en zone rurale. Mais nous pensons que des précautions doivent néanmoins être prises, cela dans l'intérêt même du milieu rural. C'est donc une affaire de jugement et d'appréciation.
Le problème de la constructibilité est différent. J'appelle votre attention sur l'alinéa 4° de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, selon lequel, en l'absence de document d'urbanisme, la commune peut autoriser : « les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l'intérêt de la commune le justifie, dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à la salubrité et à la sécurité publique, qu'elles n'entraînent pas un surcroît important de dépenses publiques ».
M. Alain Vasselle. C'est très bien !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Rien n'interdit que vous rappeliez l'existence de cette disposition aux communes et que vous en demandiez l'application. Cette disposition constitue en effet, à mes yeux, un support bien meilleur que celui qui est proposé dans l'amendement n° 273 rectifié. En outre, il ne comporte pas la limitation à deux constructions par commune et par an qui est prévue dans l'amendement.
Il reste un ultime problème : l'attitude des directions départementales de l'équipement.
MM. Jean-Pierre Plancade et Charles Revet. Voilà !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Les DDE ont vocation à rappeler ce que permettent la loi et les règlements, mais elles n'ont pas à les enfreindre !
M. Charles Revet. Il faut le leur rappeler !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Ou bien elles manifestent une attitude négative, mais argumentée sur des textes législatifs ou réglementaires, et il nous appartient dès lors de modifier ces derniers, ou bien aucun texte ne justifie leur position et, dans cette hypothèse, il n'y a pas lieu de s'en tenir à l'attitude à laquelle vous êtes confrontés. Mais, franchement, cela devrait être l'exception. Si tel n'était pas le cas, soyez assurés que le Gouvernement, à l'occasion des contacts qu'il entretient régulièrement avec les directions départementales de l'équipement, fera passer le message.
M. Jean-Pierre Schosteck. Ils sont sous vos ordres, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Sous le bénéfice de ces indications, je confirme l'avis défavorable du Gouvernement.
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. C'est là un débat très intéressant, auquel un certain nombre de nos collègues ont apporté des indications puisées dans leur propre environnement.
J'ai écouté avec attention et intérêt les propos tenus par M. le secrétaire d'Etat, qui ne m'a pas convaincu.
S'agissant de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, vous avez précisé qu'il appartenait au préfet de décider. Mais, en l'espèce, celui-ci est le porte-parole du directeur de l'équipement. Par conséquent, monsieur le secrétaire d'Etat, si la faculté offerte par cet article était utilisée, nous n'aurions pas éprouvé le besoin de déposer cet amendement !
M. Pierre Hérisson. Exactement !
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Faites-nous crédit ! Nous connaissons tous nos préfets ! Nous sommes sur le terrain et je suis moi-même conseiller général depuis près de trente ans ! Il y a longtemps que nous aurions eu recours à cette solution, si elle constituait l'ouverture que vous dites ! Or la réponse qui nous est donnée est systématiquement négative !
M. Pierre Hérisson. Très bien !
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. J'ai bien entendu les propos tenus par M. Dupont, mais nous ne vivons pas dans la même France ! Je parle de régions où il n'y a pas de pression foncière. Il n'est pas question d'avoir deux maisons tous les ans, tout simplement parce qu'il n'y en a pas une en dix ans ! Nous demandons une ouverture, car depuis le temps que nous attendons, monsieur le secrétaire d'Etat, que le message passe, nous n'y croyons plus ! Vous vous heurtez à une technostructure qui a, dans ses gènes, le refus. (Sourires.) C'est aussi simple que cela !
Par conséquent, il nous faut un texte. Cet amendement n'est pas parfait, je suis le premier à le reconnaître, mais, après qu'il aura été adopté, peut-être obtiendrons-nous des DDE la mise en oeuvre plus intelligente de ce qui résulte tout simplement du bon sens !
Des régions entières de France se désertifient. Nous ne pouvons rester les bras ballants devant un tel phénomène, et c'est pourquoi nous demandons qu'une ouverture soit faite. Nous avons songé à celle-ci, mais peut-être ne sommes-nous pas assez imaginatifs. Si vous formuliez une proposition différente, allant dans le même sens que la nôtre mais sans en présenter les inconvénients, nous serions prêts à l'accepter. M. le rapporteur suggère une amélioration rédactionnelle pour répondre aux préoccupations exprimées dans cette enceinte. Il serait aussi possible d'envisager de consulter la commission des sites pour éviter de porter atteinte aux paysages. Nous n'avons pas plus que d'autres envie qu'il y soit porté atteinte.
Permettez-moi de vous citer un autre exemple pour montrer jusqu'où peut aller l'attitude restrictive des DDE. Celles-ci peuvent refuser d'accorder un permis de construire à l'acquéreur d'une maison vieille de deux siècles - nous restons, si je puis dire, dans le sillage de nos ancêtres, puisqu'il ne s'agit pas, dans ce cas-là, d'une nouvelle construction ! - sous le prétexte qu'elle n'est plus habitable car elle n'a plus de toit - elle n'en a bien évidemment plus, mais elle en avait un, voilà deux siècles - et même si cet acquéreur putatif se propose de reconstruire la maison à l'identique !
Il ne s'agit plus seulement de logements sociaux, monsieur le secrétaire d'Etat ; il ne faut pas confondre les choses ! Il s'agit tout simplement de laisser respirer et vivre l'espace rural.
Par conséquent, de tous les articles que nous avons déjà examinés, l'article 19 bis est l'un des plus importants.
M. Pierre Hérisson. Très bien !
M. André Vezinhet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. Ce débat est effectivement passionné et passionnant. Il est peut-être l'occasion pour le législatif d'interroger sérieusement l'exécutif car, tous, nous ressentons les problèmes qui ont été posés. Ce n'est pas différent dans le département de l'Hérault, où nous connaissons une demande prégnante de la part des petites communes, ce qui nous oppose souvent à une administration obtuse. Je demande donc à l'exécutif de faire en sorte que les choses changent dans cette France où l'on nous empêche des réalisations d'évidence.
Etant tout à fait acquis aux dispositions que vous avez avancées, monsieur le secrétaire d'Etat, je voterai contre cet amendement, mais je vous demande néanmoins d'agir pour que les petites communes se dotent de cartes communales et afin que nous puissions franchir ce pas décisif de la modernité, grâce auquel le débat n'aura plus lieu d'être.
C'est d'autant plus complexe que nous avons, en France, 36 000 communes, mais elles sont aussi notre richesse !
M. Ladislas Poniatowski. Absolument !
M. André Vezinhet. Il faut que l'exécutif entreprenne auprès des DDE les démarches appropriées afin que les petites communes soient assistées et que l'accès à cette forme de modernité leur soit facilité.
Je suis très sensible aux propos de notre collègue Ambroise Dupont, qui défend avec ardeur l'action des CAUE, et il a raison. Nous avons à faire obstacle à un mitage qui existe, qu'on le veuille ou non. Quand nous nous rendons dans la France profonde, très profonde pour ce qui me concerne, nous sommes parfois scandalisés par ce qui constitue un affront à la beauté de nos paysages ! Nous devrions pouvoir nous retrouver en aidant à l'élaboration de cartes communales.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 273 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 58:

Nombre de votants 309
Nombre de suffrages exprimés 223
Majorité absolue des suffrages 112
Pour l'adoption 206
Contre 17

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 19 bis.

Article additionnel avant l'article 20