Séance du 4 avril 2000







M. le président. « Art. 22. - Il est inséré, après l'article 35 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, un article 35 ter ainsi rédigé :
« Art. 35 ter . - I. - Lorsqu'elle est réalisée sans l'accord de l'intéressé, la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, de l'image d'une personne identifiée ou identifiable mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale mais n'ayant pas fait l'objet d'un jugement de condamnation et faisant apparaître qu'elle porte des menottes ou des entraves, est punie de 100 000 francs d'amende.
« II. - Est puni de la même peine le fait :
« - soit de réaliser, de publier ou de commenter un sondage d'opinion, ou toute autre consultation, portant sur la culpabilité d'une personne mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale ou sur la peine susceptible d'être prononcée à son encontre ;
« - soit de publier des indications permettant d'avoir accès à des sondages ou consultations visés à l'alinéa précédent. »
Par amendement n° 91, M. de Broissia propose, dans le I du texte présenté par cet article pour l'article 35 ter de la loi du 29 juillet 1881, de remplacer les mots : « et faisant apparaître qu'elle porte des menottes ou des entraves » par les mots : « et faisant apparaître soit que cette personne porte des menottes ou entraves, soit qu'elle est placée en détention provisoire ».
La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. J'avais déjà défendu cet amendement en première lecture.
J'estime effectivement - j'espère être rejoint en cela par la commission et par le Sénat - que faire apparaître une personne placée en détention provisoire, par exemple derrière les barreaux d'une prison, dans un journal est de nature à porter atteinte à la présomption d'innocence, au même titre que la montrer avec des menottes ou des entraves.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Jolibois, rapporteur. La commission a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement a émis un avis défavorable.
J'avais déjà indiqué, en première lecture, que j'étais opposée à toute aggravation des dispositions pénales du projet concernant la communication, car il en résulterait, à mes yeux, une atteinte excessive à la liberté de la presse.
J'indique toutefois que la prise de photographies au téléobjectif d'une personne détenue dans un établissement pénitentiaire et sa diffusion ultérieure peuvent non seulement donner lieu à des dommages et intérêts sur le fondement des dispositions du code civil, mais constituer également le délit d'atteinte à la vie privée, comme l'ont d'ailleurs déjà jugé le tribunal correctionnel et la cour d'appel de Paris en 1986.
Les peines prévues par les articles 226-1 et suivants du code pénal, qui protègent tant les prévenus que les condamnés, sont d'ailleurs plus sévères que celles qui sont prévues par le projet de loi. Aussi M. de Broissia pourrait-il peut-être - c'est une suggestion que je me permets de lui faire - retirer son amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 91, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 22, ainsi modifié.

(L'article 22 est adopté.)

Article 25