Séance du 7 décembre 1999







M. le président. Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant l'économie, les finances et l'industrie : II. - Industrie (et Poste).
Dans la suite de la discussion, la parole est àM. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits de l'industrie inscrits à ce projet de budget s'élèvent à 15,6 milliards de francs en moyens de paiement, soit, à périmètre constant, une augmentation de 2,3 %.
Cette progression doit être appréciée au regard de la hausse des dépenses totales de l'Etat, limitée cette année à 0,9 %. Surtout, elle s'inscrit dans un mouvement de croissance des crédits de l'industrie depuis 1997, qui tranche avec les années où la droite assumait la gestion du pays.
Pour autant, les moyens budgétaires consacrés chaque année à ce secteur vital de notre économie sont sans commune mesure avec la place et le rôle qu'occupe encore - et ce malgré les assauts de la mondialisation capitaliste - le secteur industriel en France.
Ainsi, l'industrie manufacturière a consommé, pour l'année 1998, plus de 132 milliards de francs d'investissements et employé plus de 3 300 000 salariés, soit 18 000 de plus qu'en 1997.
Une étude plus détaillée de la croissance de la production industrielle depuis quelques années montre cependant que sa portée est limitée en matière de création d'emplois et qu'elle cache mal une absence de stratégie industrielle ambitieuse et cohérente.
Sur ce point, il suffit de considérer quelques indicateurs économiques, par exemple la part de l'investissement manufacturier dans la valeur ajoutée, qui n'a cessé de se réduire depuis dix ans, et le montant des dépenses de recherche-développement et de formation, qui sont largement insuffisantes eu égard à ce qu'elles représentent dans les autres grands pays industriels.
S'agissant de la structure de l'emploi industriel - qui représente seulement 18 % du total des emplois salariés - le recours aux contrats précaires et à l'intérim tend de plus en plus à devenir la règle, ce qui fait du facteur « travail » un élément flexible et malléable de la gestion des entreprises, subordonné aux perspectives de croissance des marchés financiers.
Par conséquent, je ne vois, dans la configuration de ce secteur de l'économie, aucune vision porteuse d'avenir, les mégafusions qui se multiplient répondant davantage au souci de donner des gages aux actionnaires, qui exigent une rentabilité maximale et rapide de leurs capitaux, qu'à celui de créer les conditions d'une meilleure complémentarité entre les métiers pour faire face à la concurrence internationale.
Ce constat n'a rien d'étonnant, dès lors que l'Etat a progressivement déserté le terrain de la production industrielle pour laisser la place à la seule logique du marché. L'Etat pouvait conduire une politique industrielle sur le long terme qui soit favorable à la croissance et à l'emploi, tandis que la main invisible du marché tâtonne et se laisse guider par les fluctuations erratiques des valeurs financières internationales.
Comme l'a écrit mon ami Claude Billard, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges de l'Assemblée nationale, si la logique industrielle des grands pays est de moins en moins claire, la logique financière, elle, est en revanche tout à fait évidente. C'est la preuve, pense-t-il, « qu'une croissance non maîtrisée par la puissance publique peut être l'ennemie de l'emploi ».
Sans une intervention volontariste de l'Etat plus marquée, votre rôle, monsieur le secrétaire d'Etat, pourrait se résumer à celui d'« ambulancier », dont la tâche ingrate serait de ramasser les cadavres des victimes sacrifiées sur l'autel du libéralisme.
La régulation, que l'on tente d'assimiler à la nouvelle doctrine politique du xxie siècle, n'est en réalité que la réponse insignifiante apportée par les pouvoirs publics pour remédier aux défaillances du marché et permettre ainsi à celui-ci de poursuivre sa route jalonnée de concentrations, de fusions et de restructurations, avec, à la clef, des milliers d'emplois supprimés.
En outre, comment l'Etat pourrait-il prétendre jouer efficacement son rôle d'arbitre, dès lors que ce sont de plus en plus à des autorités de régulation indépendantes qu'est confiée la mission de définir et d'appliquer les règles de la concurrence dans des secteurs essentiels de notre économie ?
Ainsi, la commission de régulation de l'électricité, la dernière-née, disposera, en son domaine, de pouvoirs exorbitants de proposition, de décision et de sanction, sans que le Gouvernement ait la possibilité de faire valoir l'intérêt national - et ce serait encore pire si les positions de la droite sénatoriale avaient été adoptées !
Le désengagement de l'Etat ne coïncide-t-il pas, d'ailleurs, avec la montée en puissance du phénomène de désindustrialisation, qui a pour effet de désagréger le tissu social et de désarticuler les territoires ?
Notre assemblée a débattu récemment du projet de loi de libéralisation du secteur de l'électricité. L'opérateur historique EDF, qui jouit d'atouts industriels importants sur le territoire national, n'aurait-il pas tendance à priviligier la conquête des marchés extérieurs par rapport à toute autre considération liée, en particulier, au service public ?
De même, on peut s'interroger sur la validité des objectifs d'indépendance énergétique et de sécurité d'approvisionnement, dès lors que les opérateurs privés chercheront à produire au meilleur coût, quelles que soient les orientations énergétiques fixées par ailleurs.
Dans ce contexte plein d'incertitudes, le moins que l'on puisse dire, c'est que ce budget suscite des inquiétudes, à l'heure où certains moyens qui participent de notre politique énergétique mériteraient d'être renforcés.
Je pense notamment à la dotation versée par l'Etat au Commissariat à l'énergie atomique pour compenser la baisse des recettes extérieures, qui devrait s'élever à environ 140 millions de francs. A ce jour, seuls 40 millions de francs sont engagés, mais aucun versement n'a encore été effectué.
Comment faut-il comprendre le refus de l'Etat de faciliter le passage aux 35 heures en incitant le CEA à prendre sur ses fonds propres, au détriment de la politique salariale et des programmes de recherche en cours ?
Si, comme vous le dites, monsieur le secrétaire d'Etat, l'option nucléaire reste ouverte, comment justifier le maintien du CEA dans une situation précaire, alors que des décisions d'importance majeure s'imposent, s'agissant, par exemple, du lancement de l'EPR ?
Dans ce projet, dont la réalisation rapide est essentielle pour le renouvellement dans les meilleures conditions de notre parc nucléaire, le CEA devra jouer un rôle de premier plan.
L'an dernier, monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous annonciez que la décision concernant la construction de l'EPR serait prise avant la fin de l'année 1999. Etes-vous en mesure de nous confirmer le calendrier ou bien faudra-t-il attendre, comme j'ai cru l'entendre, trois ou quatre ans supplémentaires ?
Compte tenu des délais nécessaires avant l'exploitation d'une centrale et du vieillissement prévisible du parc existant, n'y a-t-il pas urgence à faire un choix qui s'imposera, tôt ou tard, dès lors que la France souhaite préserver sa filière nucléaire ?
L'annonce, hier, de la fusion des activités nucléaires de Framatome et de Siemens nous inquiète, monsieur le secrétaire d'Etat, en ce qui concerne tant le programme EPR, l'emploi, le statut des salariés que la maîtrise publique de la filière nucléaire dans notre pays et, en particulier, de la recherche dans ce secteur.
A cet égard, comment faut-il interpréter les propos du président de Framatome, selon lesquels l'entreprise publique française acquiert, par ce rapprochement, « le statut d'une entreprise soumise à la concurrence » ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous préciser le contenu de l'accord intervenu entre les deux opérateurs, notamment les garanties présentées par Siemens ? Le partenaire allemand amorce-t-il ainsi un retrait progressif de la production nucléaire, compte tenu des perspectives pour le moins incertaines qui prévalent outre-Rhin ?
Le désengagement de l'Etat est également manifeste dans le secteur charbonnier, auquel je reste profondément attaché.
La lecture de cette loi de finances fait apparaître deux paradoxes sur lesquels je souhaiterais vous entendre, monsieur le secrétaire d'Etat.
Premièrement, l'évolution à la baisse de la dotation budgétaire consacrée à Charbonnages de France se confirme cette année. Elle frappe, à hauteur de 30 millions de francs, le chapitre « exploitation » et s'inscrit par là même dans la pleine application du pacte charbonnier signé par le Gouvernement Balladur-Longuet en 1994 ; ce qui est nouveau, en revanche, c'est la réduction de 20 millions de francs de la prise en charge par CdF des prestations versées aux retraités mineurs et à la gestion de l'ancien patrimoine minier.
Or, ces charges iront croissant au fur et à mesure que l'exploitation des derniers sites s'arrêtera. Cette situation contraint Charbonnages de France à s'endetter toujours plus, ce qui ne peut que mettre à mal les engagements pris concernant le statut des mineurs, en particulier en matière de retraite, de logement ou de santé.
Le désengagement industriel opéré dans ce secteur, qui dispose pourtant encore de ressources non négligeables, s'accompagne-t-il également d'un désengagement « moral » à l'égard de salariés qui ont contribué à reconstruire la France d'après-guerre ?
A ce propos, monsieur le secrétaire d'Etat, vous venez de recevoir les résultats d'une mission confiée à M. Pierre Castagnou. Quelle suite entendez-vous donner à ce rapport ? Notamment, par quelle voie êtes-vous prêt à garantir la pérennité des droits des mineurs, spécifiques ou non au bassin du Nord - Pas-de-Calais, au-delà de 2005 ?
Un second paradoxe ressort de ce budget : le soutien à la reconversion industrielle des bassins miniers diminue. Les crédits du fonds d'industrialisation du bassin minier, le FIBM, sont réduits de nouveau de 7,4 % en 1999, et ceux du fonds d'industrialisation de la Lorraine, le FIL, de 10,2 %. Dans ce contexte, peut-on encore prétendre instaurer un environnement favorable à la création d'entreprises ?
S'agissant des aides publiques à la construction navale, il faut noter une progression sensible des crédits octroyés, qui s'élèvent à 1,287 milliard de francs, soit une hausse de plus de 60 % en 1999.
Outre le coût social immédiat, il y a aussi, pour la puissance publique, nécessité d'assurer, dès lors, la reconversion de régions qui se retrouvent du jour au lendemain orphelines d'une industrie jadis florissante. La fermeture des Ateliers et chantiers du Havre et ses conséquences en termes d'emplois et d'aménagement du territoire illustrent de quelle manière, hélas ! l'Etat est de plus en plus acculé à réparer les dégâts du libéralisme.
J'aborderai, enfin, le budget de la poste et des télécommunications, en augmentation de plus de 4 %.
La priorité donnée, une fois de plus, aux crédits de l'autorité de régulation des télécommunications, en augmentation de 4,03 %, et à l'agence nationale des fréquences, en hausse de 14 %, témoigne des transferts de compétences de l'opérateur historique France Télécom vers des structures propres.
Si l'on ne peut que se féliciter des moyens supplémentaires dégagés en faveur de l'enseignement supérieur des télécommunications, il appartient, en revanche, à l'Etat de réaffirmer le rôle essentiel que doit jouer le Centre national d'études des télécommunications, le CNET, en matière de recherche technologique.
En outre, il me semble que la dimension sociale de France Télécom, depuis sa privatisation partielle, ne cesse de s'estomper, tant à l'égard des usagers que de son personnel.
Ainsi, qu'en est-il de la tarification sociale promise en 1997 ? Alors que les conditions de travail et les salaires se dégradent toujours davantage, que dire de l'accord conclu sur les 35 heures, duquel aucune création nette d'emplois n'est attendue ?
Un même constat peut être fait s'agissant de La Poste, qui, tout en étant la plus importante entreprise de France à passer aux 35 heures, ne reçoit pour autant aucune subvention de sa tutelle.
D'aucuns, jusqu'au sein de notre Haute Assemblée, d'ailleurs, n'hésitent pas à envisager, avant l'échéance de 2003, date à laquelle une nouvelle libéralisation est programmée, de demander le démantèlement du service public postal.
Ainsi, notre collègue Gérard Larcher s'est récemment prononcé pour une ouverture du capital en proposant, dans un premier temps, une recapitalisation à partir d'une cession d'actifs de France Télécom pour mieux préparer, à terme, la privatisation de La Poste.
Le Gouvernement doit, à notre avis, s'opposer catégoriquement à ce qui reviendrait, en définitive, à dilapider les deniers publics pour le profit d'intérêts privés.
Enfin, pour conclure, nous souhaitons également une clarification de la position du Gouvernement sur l'avenir de Gaz de France, qui suscite de plus en plus les convoitises des groupes pétroliers. Une forte pression semble s'exercer en faveur de la transformation de Gaz de France en société anonyme, qui viendrait en corollaire à la libéralisation du marché du gaz. Monsieur le secrétaire d'Etat, c'est là une proposition qui nous inquiète beaucoup.
Malgré les insuffisances que nous avons relevées, nous voterons ce budget, tout en souhaitant être rassurés sur les questions que je viens d'évoquer. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Monsieur le secrétaire d'Etat, je parlerai essentiellement de la politique d'innovation, si nécessaire à la France et si importante pour votre ministère.
Le Sénat s'honore d'avoir largement participé, l'été dernier, à l'élaboration de la loi sur l'innovation. Cette loi concerne, bien entendu, la recherche, mais aussi l'industrie et les finances.
La situation est désormais meilleure, bien qu'il reste encore à lui apporter des améliorations indispensables, notamment en matière d'incitation fiscale, pour que les particuliers qualifiés de business angels puissent investir massivement et que les entreprises innovantes, qui ont pour vocation de grandir et de créer des emplois et de la richesse, puissent se développer rapidement, sans oublier la mise en place d'un système de stock-options généralisé qui s'ajouterait au système de bon de souscription pour création d'entreprise.
Devant la fuite des cerveaux que nous constatons tous avec regret, il est nécessaire de montrer à ceux de nos compatriotes qui ont participé à la nouvelle ruée vers l'or des start-up miracles de Californie que, chez nous, les choses se sont améliorées.
Avec différents appuis publics et privés, je compte organiser un charter San Francisco - Nice - Sophia-Antipolis pour montrer que, ici aussi, on peut, à partir de matière grise, créer des emplois, des richesses et faire fortune.
Nous en convaincrons certains, qui ont le mal du pays. Mais si nous voulons en convaincre plus, il faut faire mieux. Désormais, nous roulons bien, nous roulons vite. Mais même si l'on roule à 100 kilomètres à l'heure, en Formule 1, on est vite dépassé par ceux qui vont beaucoup plus vite, et le retard s'aggrave.
C'est vrai par rapport à la Californie, au Maryland, à New York, à Boston, mais c'est vrai aussi par rapport à d'autres pays plus proches de nous.
Déjà, le gouvernement allemand affiche qu'au mois de juin 2000 un réseau à deux gigabits permettra de réunir les centres de compétence de toute l'Allemagne. Je crains que nous n'en soyons pas encore là !
Par ailleurs, indépendamment de ce qu'a fait le gouvernement, il y a, en Bavière, un programme budgétaire financé par le Land qui s'ajoute au programme fédéral et qui dépasse 2,65 milliards de deutsche Mark. J'ai, sur ce sujet, quantité de documents que je mettrai à votre disposition et à celle de votre administration, monsieur le secrétaire d'Etat.
Transposé en France, cela représente de l'ordre de 50 milliards de francs, pour la seule année 2000, pour une offensive high-tech .
Cette offensive pour le budget 2000 s'ajoute à d'autres offensives de même style, qui ont déjà été réalisées et qui ont pour nom Bayern on line et Offensive Zukunft Bayern , ce qui triple à peu près la mise. En France, cela représenterait un programme sur trois ans de 150 milliards de francs pour une offensive ciblée et s'ajoutant aux programmes normaux.
En Bavière, l'argent provient de la privatisation d'une partie de sociétés nationales du type de celles qui exploitent l'électricité ou le gaz - ou d'autres entreprises analogues - en Bavière.
Connaissez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, des opérations menées par les régions en France ou des contrats Etat-région de niveau comparable ? Je crains que la réponse ne soit négative !
J'ajoute que, dans ses programmes, la Bavière prévoit des crédits d'internationalisation et que - vous voudrez bien m'excuser de le mentionner - elle veut nouer des liens avec la Californie, le Québec et Sophia-Antipolis, ce dont je suis très heureux.
La conclusion que nous devrions en tirer, c'est que la France devrait, elle aussi, avoir des stratégies nationales ciblées s'appuyant sur des réalisations régionales dynamiques et les confortant. A cet égard, les technopoles françaises peuvent très bien constituer le point de départ d'un développement massif des nouvelles technologies.
C'est, on le sait, la seule façon de créer rapidement des emplois, des richesses et une dynamique nouvelle. Les Etats-Unis, qui, à un moment donné, étaient menacés dans leur suprématie par le Japon, ont pu reprendre l'offensive et, dans le même temps, faire passer le chômage de 8 % à 4 %.
Cela mérite une réflexion politique approfondie à tous les niveaux des pouvoirs publics français - national, régional, local - mais aussi l'appui des médias.
J'en viens à mon second point : il est nécessaire que notre pays se dote d'une véritable structure coordonnée de réflexion prospective.
Il existe, en France, en Europe et dans le monde, quantité d'équipes de prospective qui, chacune, ont une thématique particulière. Or, avec les nouvelles donnes et la rapidité de l'évolution des techniques et des restructurations industrielles et financières, avec le développement des relations et mondiales du e- commerce via Internet, qui va tout bouleverser et menacer beaucoup d'emplois, nous devons avoir une vision globale des stratégies industrielles, financières et politiques, aussi bien au niveau national qu'au niveau local, car cela touche tous les éléments de notre société.
Par conséquent, tous ceux qui réfléchissent sur le devenir de la sociologie, sur les problèmes que connaissent les quartiers difficiles des villes, sur les relations Nord-Sud, doivent être en réseau avec ceux qui s'occupent du développement des télécommunications et du commerce international.
Voilà pourquoi nous travaillons à la création d'un Institut du futur, qui fonctionnera en réseau avec de multiples équipes sur des programmes définis par des comités ad hoc, avec les structures opérationnelles légères que, désormais, les moyens télématiques permettent de mettre en contact.
Une telle structure se constitue à Sophia-Antipolis, où un certain nombre de conventions ont déjà été passées avec l'Institut du futur de Menlo Park, en Californie, ainsi qu'avec des structures telles que l'Ecole de Paris, pour la gestion, l'Institut français des relations internationales, pour les aspects géopolitiques, l'Institut régional de développement industriel, pour les relations Nord-Sud, mais aussi avec le groupe de prospective du Sénat, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, ainsi que de multiples structures industrielles ou financières.
Le financement initial nécessite un support de l'Etat - peut-être de votre département, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est pourquoi je vous en parle - et certainement des collectivités locales ainsi que d'un certain nombre de grands groupes intéressés, que ce soit EDF, Alcatel ou des groupes européens ou mondiaux.
Tels sont les deux points sur lesquels, monsieur le secrétaire d'Etat, je me suis permis d'insister, tout en regrettant que votre secrétariat d'Etat ne soit pas doté de moyens financiers comparables - toutes proportions gardées, parce qu'il faudrait multiplier le chiffre par cinq - à ceux dont bénéficient nos amis allemands, et notamment nos amis bavarois. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Weber.
M. Henri Weber. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avant toute chose, permettez-moi de dire combien il m'est agréable de discuter le budget de l'industrie alors que tous les indicateurs témoignent des bons résultats de la politique que ce budget incarne : politique de soutien à la croissance, politique d'accompagnement en profondeur des mutations industrielles, politique de régulation du marché. La voie tracée depuis plus de deux ans par le Gouvernement a fait ses preuves. L'investissement industriel a progressé de 8 % l'an dernier, et ce chiffre s'élève à 13 % dans les PMI, dont nous savons tous ici qu'elles sont aujourd'hui les plus à même de créer de l'emploi. Pour la première fois depuis de nombreuses années, l'emploi industriel a progressé en 1998 de 50 000 unités, enrayant une longue spirale du déclin.
A ceux qui ne voient dans ces bons résultats que le seul fruit du hasard ou d'une conjoncture internationale porteuse, je répondrai par une simple comparaison : depuis l'arrivée au pouvoir de la majorité plurielle, le budget de l'industrie aura, au total, augmenté de 7 %...
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. C'est exact !
M. Henri Weber. ... quand ses crédits avaient connu, durant les deux années précédentes, une baisse cumulée de 17 %.
C'est donc dans le cadre d'une politique industrielle volontaire, soucieuse de développer une croissance forte et riche en emplois que vous nous soumettez aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'Etat, un budget en hausse de 2,3 %.
Celui-ci présente quelques innovations dans sa forme, puisque l'ancienne section « industrie » des crédits du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie est fondue dans une section unique. Parallèlement, les dépenses du secrétariat d'Etat à l'industrie sont réparties en quatre agrégats.
A travers cette modification formelle, il s'agit de s'orienter vers la création d'un véritable pôle économique et industriel, ce que Dominique Strauss-Kahn - auquel je tiens aujourd'hui à rendre un vibrant hommage - a appelé un « ministère de la production », car ce budget de l'industrie développe une ambition unique : celle de préparer l'avenir de l'industrie française, en accompagnant et en anticipant ses mutations.
Cela passe par différents niveaux d'intervention, que je résumerai en trois catégories : des efforts pour assurer la pérennité de notre tissu industriel, le souci de développer autour des entreprises un environnement favorable à leur performance, et la volonté d'anticiper les grandes évolutions à venir de notre industrie.
La première priorité vise à assurer la pérennité de notre maillage industriel et de ses infrastructures.
Cela nécessite tout d'abord de conforter notre indépendance énergétique. Il s'agit de veiller à l'avenir de notre industrie dans le cadre d'une politique énergétique maîtrisée, garante d'un service public modernisé et respectueuse de l'environnement.
Les crédits alloués à ce titre sont consolidés, ce qui nous permet d'appréhender sereinement les échéances à venir. A court terme se pose en effet la question de la transposition des directives européennes relatives aux marchés de l'électricité et du gaz.
L'Assemblée nationale a montré la voie d'une ouverture prudente et équilibrée du marché de l'électricité, et je ne doute pas qu'une telle attitude raisonnable accompagnera - au moins à l'Assemblée nationale - la transposition de la directive sur le gaz.
Mais les enjeux énergétiques auxquels nous sommes confrontés vont plus loin. Il s'agit de développer des techniques innovantes, afin de produire des énergies moins polluantes et plus sûres. Je salue donc la consolidation des crédits de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, dont je souhaite qu'elle contribue à faire de la France un pays phare dans le domaine des énergies alternatives : je pense notamment à la cogénération.
Il s'agit également d'envisager l'avenir de notre parc nucléaire, alors que commence à se poser la question de son renouvellement.
Sécurité, transparence et responsabilité sont ici les maîtres mots de la politique qu'attendent nos concitoyens. A ce titre, monsieur le secrétaire d'Etat, je salue à mon tour la fusion entre Framatome et Siemens, intervenue hier et qui fait de la nouvelle société ainsi constituée, détenue à 66 % par Framatome, la première entreprise mondiale dans les services de combustibles et d'équipements nucléaires, devant l'américain General Electric et le britannique BNFL, qui vient d'acheter Westinghouse en 1998.
Je m'inquiète toutefois de constater que les crédits du CEA ne sont que reconduits, quand les défis auxquels il lui faut faire face se multiplient. Il serait en effet imprudent de vouloir assurer l'avenir de notre politique énergétique en négligeant ce qui demeure, en la matière, notre principal outil.
Dans ce même souci d'assurer la pérennité de notre maillage industriel et de ses infrastructures, votre projet de budget prévoit 4,8 milliards de francs pour la reconversion des bassins industriels en difficulté, soit une hausse de 9,5 %. Je ne peux que me féliciter de cet effort de solidarité nationale, qui s'inscrit dans le long terme et qui touche l'élu de Seine-Maritime que je suis.
Le second volet sur lequel je veux insister, monsieur le secrétaire d'Etat, concerne la modernisation de l'environnement des industries françaises.
Il s'agit tout d'abord d'assurer la compétitivité des produits industriels français, notamment par la reconnaissance des normes internationales de qualité en vigueur ; il s'agit aussi d'accentuer les mesures en faveur de la qualité prévues dans les chapitres « normes-qualité », qui progressent de 7 % en autorisations de programme ; de même, l'augmentation de 14 % en autorisations de programme et de 18 % en crédits de paiement des moyens du bureau national de la métrologie permettra d'accomplir d'importants progrès.
Un autre élément important concernant l'environnement des entreprises est constitué par les actions engagées en faveur du développement des petites et moyennes entreprises, les PMI.
Je le rappelle, c'est dans ces PMI que réside en grande partie la richesse industrielle de demain. Je me réjouis donc de constater que le soutien aux projets de développement des PMI progresse de 7 % en crédits de paiement. De même, la création de quarante sept emplois au sein du secrétariat d'Etat à l'industrie et de douze emplois dans les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, les DRIRE, contribuera utilement au développement industriel de nos régions et, ainsi, à la création d'emplois nouveaux.
Ces emplois que nos PMI créeront demain, votre budget s'en préoccupe, puisque 25 % des aides prévues au chapitre 66-01 seront affectées aux entreprises médianes. Ce redéploiement traduit une volonté salutaire d'accompagner le développement des industries nouvelles.
C'est à cette volonté que répond également, monsieur le secrétaire d'Etat, votre souci de développer l'utilisation d'Internet par les PME-PMI. Leur capacité à s'approprier la révolution numérique pour accroître leur productivité, renforcer leur compétitivité et diversifier leurs marchés, est aujourd'hui un facteur essentiel de leur réussite. L'effort de 1,5 milliard de francs prévu à ce sujet me semble donc nécessaire.
Je ne doute pas, par ailleurs, que la loi sur la société de l'information, annoncée par le Premier ministre à l'université de Hourtin, permettra de renforcer encore les efforts en ce domaine.
Enfin, toujours dans le cadre d'une amélioration de l'environnement des industries françaises, votre budget consacre des moyens importants à la formation des futurs entrepreneurs. Dans les établissements qui dépendent de votre secrétariat d'Etat, un effort est prévu pour le perfectionnement des formations : je pense aux créations d'emplois dans les écoles des mines, ou au soutien apporté à Supélec.
D'autre part, des orientations à long terme sont dessinées : mise en oeuvre de la charte des écoles d'ingénieurs ; maillage de ces écoles avec leurs homologues européens ; approfondissement des relations des écoles des mines avec les grandes directions du ministère ; réflexion prospective pour le renouvellement des concours, afin de répondre aux évolutions démographiques ; redéfinition des cycles pédagogiques. Tels sont les ambitieux chantiers que vous nous proposez. Nous ne pouvons qu'y souscrire.
M. Pierre Laffitte. Bravo !
M. Henri Weber. Le dernier point sur lequel je voulais insister, monsieur le secrétaire d'Etat, est le développement d'actions en faveur de la recherche et de l'innovation.
Nous voyons bien aujourd'hui que la part la plus dynamique de notre croissance provient des nouvelles technologies, de l'utilisation de la recherche, de l'innovation notre collègue Pierre Laffitte a parfaitement raison d'insister sur ce point.
C'est pourquoi le retard français en termes de dépôts de brevets me semble particulièrement préoccupant. Depuis de nombreuses années, le nombre des brevets déposés en France est en effet en baisse constante, malgré une légère reprise depuis deux ans.
Si je me fécilite de voir que votre budget prévoit le maintien de la capacité de l'Agence nationale de valorisation de la recherche, l'ANVAR à 1,4 milliard de francs, je me demande tout de même s'il ne conviendrait pas, à ce sujet, d'engager des politiques plus ambitieuses. Je pense à une meilleure interprénétation des univers, trop souvent cloisonnés, de la recherche et de la technologie. Je pense aussi à la création, au-delà d'un crédit-recherche, d'un crédit-innovation en faveur des petites entreprises innovantes. Je pense également à la possible mise en place de structures juridiques et comptables destinées à aider les chercheurs qui souhaiteraient développer leurs compétences en créant des sociétés innovantes.
De même, si je me réjouis de constater que la collecte de capital-risque s'est élevée l'an dernier à 11,5 milliards de francs, triplant ainsi en deux ans, je souhaite que nos efforts en ce sens soient maintenus et même renforcés, notamment en faveur des start-up . Je sais que vous partagez cette préoccupation, monsieur le secrétaire d'Etat, et que M. Christian Sautter en a fait l'une de ses priorités.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Tout à fait !
M. Henri Weber. J'aimerais néanmoins avoir quelques détails quant aux mesures que vous comptez prendre à ce sujet.
Ces quelques réserves - modestes - formulées, nous voterons votre bon budget, monsieur le secrétaire d'Etat,...
M. Josselin de Rohan. Nous ne le voterons pas !
M. Henri Weber. ... parce que c'est un budget de croissance, un budget d'emploi, un budget d'avenir qui contribuera à pérenniser le dynamisme nouveau de notre économie. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Teston.
M. Michel Teston. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, chères et chers collègues, je veux saisir l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui pour insister plus particulièrement sur l'exigence fondamentale qui doit être la nôtre en matière de présence postale sur l'ensemble du territoire, que ce soit dans les zones rurales ou dans les quartiers urbanisés dits « sensibles ».
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Michel Teston. Certes, depuis la loi du 2 juillet 1990, La Poste doit accorder une attention toute particulière à l'amélioration de sa présence territoriale afin d'assurer un service public de qualité accessible à tous.
De même, il faut rappeler que des orientations très positives ont été définies dans le contrat d'objectifs et de progrès signé le 25 juin 1998 entre l'Etat et La Poste, orientations qui visent à préciser les conditions d'évolution et d'amélioration du service postal, tant en zone rurale qu'en zone urbaine.
De plus, ce même contrat d'objectifs et de progrès prévoit la mise en oeuvre d'une concertation locale rénovée et renforcée. C'est ainsi que je veux rendre hommage à la décision de créer dans chaque département une commission départementale de présence postale territoriale, qui contribue à accompagner la modernisation du réseau tout en permettant la nécessaire concertation avec les élus sur les projets d'intérêt local.
Ne serait-il d'ailleurs pas souhaitable, monsieur le secrétaire d'Etat, d'envisager le même dispositif pour France Télécom ?
Enfin, sur le plan financier, je tiens à souligner l'avancée positive que constitue la proposition qui nous est faite d'augmenter de 50 millions de francs l'aide au transport et à la distribution de la presse, qui sera portée à 1,9 milliard de francs.
Toutes ces mesures, ajoutées à la hausse globale d'un peu plus de 4 % des crédits affectés à La Poste et aux télécommunications, témoignent, à l'évidence, de la volonté du Gouvernement d'affirmer la présence de l'Etat, dans un secteur où la concurrence devient chaque jour plus vive.
Néanmoins, si l'on peut se réjouir de cet engagement pour une présence postale prenant en compte la diversité des territoires, l'instauration d'un véritable « service postal universel » doit maintenant être concrétisé par un renforcement de la garantie de maintien des services publics, par exemple dans les zones rurales et de montagne les plus fragiles.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Michel Teston. A l'heure des nouvelles technologies de communication, il ne faut pas oublier que ces services ont constitué en milieu rural une avancée sociale majeure. Privilège des citadins, la distribution du courrier à domicile ne concernait pas, à l'origine, les millions de ruraux. Il a fallu attendre la grande réforme postale de 1829 pour que bourgs et villages de France reçoivent la visite du facteur, d'abord tous les deux jours, puis quotidiennement.
Bien sûr, les services de La Poste doivent s'adapter et se moderniser. Néanmoins, cette réorganisation ne doit pas se faire au détriment de la présence postale dans nos villages et nos quartiers récemment urbanisés.
Je suis, pour ma part, fortement convaincu que le développement de nos communes, qui est un élément essentiel de la démocratie, est étroitement lié à une offre de services publics de qualité. Mis à part l'éducation nationale, il n'existe probablement aucun service public dont la présence soit aussi importante pour l'aménagement du territoire que La Poste.
M. Gérard Delfau. Très bien !
Il convient d'ailleurs d'insister sur l'implication des personnels de La Poste, agents qui sont animés d'une culture de service public exemplaire.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous avons totalement confiance en votre volonté d'oeuvrer pour le maintien de ce service postal universel, mais nous resterons vigilants, comme nous le demandent avec insistance nos concitoyens. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à remercier tous les orateurs. La qualité des débats, celle des rapports présentés par M. Clouet, au nom de la commission des finances, de MM. Grignon, Hérisson et Besson, pour la commission des affaires économiques et du Plan, témoignent du réel intérêt que porte le Sénat à la politique industrielle. Cet intérêt, j'ai pu l'apprécier également lors des auditions devant les commissions respectives, sous les présidences de MM. Lambert et François-Poncet, et ce même si je suis en désaccord avec trois des quatre rapporteurs sur les conclusions qu'ils croient pouvoir tirer de leur examen de mes crédits.
Mon action, ce budget 2000, je les résume en quelques mots qui constituent en quelque sorte une réponse à MM. Clouet, Hérisson et Grignon : oui, nous avons une ambition pour l'industrie !
Ambitieux, le budget qui vous est présenté l'est à plusieurs titres : il est en progression, il est plus lisible, plus transparent et recentré sur les dépenses d'intervention.
Ce budget atteint 16,6 milliards de francs de crédits - c'est plus, monsieur Clouet, qu'une coquille d'huître vide (Sourires) - soit une progression de 2,3 % par rapport à 1999, alors que l'évolution globale du budget de l'Etat n'est que de 0,9 %, comme M. Lefebvre l'a relevé au début de son intervention.
Le secteur secondaire est donc désormais un budget prioritaire et l'on ne peut par conséquent pas parler, comme l'a fait M. Clouet. Par ma part, je dirai plutôt à l'inverse que, dans l'huître, il y avait une perle : c'est le remarquable effort consenti par ce gouvernement pour l'industrie et, en particulier - j'y reviendrai -, pour l'innovation industrielle.
Ce budget bénéficie d'une présentation plus transparente. M. Weber l'a bien montré, notant également que mes crédits augmentaient de 7 % entre la loi de finances pour 1998 et la loi de finances pour 2000.
Ces 7 % font l'objet d'une présentation transparente au sein d'une section budgétaire unique consacrant la réalisation d'un grand ministère cohérent, chargé de l'économie, des finances et de l'industrie, un ministère de la production comme a pu le dire - M. Weber le rappelait - Dominique Strauss-Kahn avec justesse.
Quatre agrégats vous sont désormais présentés, agrégats qui retracent l'activité du secrétariat d'Etat à l'industrie. Pour chaque action, des indicateurs d'activité et de performance ont été établis, avec des objectifs annuels qui améliorent très sensiblement la qualité de l'information parlementaire quant à l'utilisation des crédits.
Près de 650 millions de francs sont budgétisés - j'aurais pu dire rebudgétisés - traduisant clairement, par le chiffre et la volonté politique qu'il signifie, cet impératif de vérité, de sincérité, de transparence, donc de contrôle parlementaire, vérité qui m'anime.
Ce budget est enfin, ai-je dit en commençant, recentré sur des dépenses d'intervention. L'Etat doit concentrer son action aujourd'hui sur les réussites de demain. Si les dépenses ordinaires n'évoluent que de 1,2 % - il est normal qu'elles soient contenues pour être plus efficaces avec des moyens qui évolueront donc de 1,2 % - les dépenses en capital progressent de 4,5 % pour les crédits de paiement et - j'y insiste, mesdames et messieurs les sénateurs - de 8 % pour les autorisations de programme.
Mon ambition pour l'industrie, je souhaite la décliner, en 2000, en trois volets : une ambition pour l'innovation, une ambition en faveur du développement industriel, une ambition pour nos services publics.
Tout d'abord, j'ai une ambition en matière d'innovation.
Ce budget soutient l'innovation pour un montant de 2 850 millions de francs. Nous poursuivons la politique et le programme de « technologies clés », nous poursuivons le maintien de la capacité d'engagement de l'ANVAR à un niveau de 1 400 millions de francs, nous poursuivons un effort remarquable pour l'innovation, stratégie fondamentale de mon secrétariat d'Etat avec les 1 836 millions de francs d'autorisations de programme du chapitre clé de la lecture de notre politique industrielle, le chapitre 66-01. Je sais que les connaisseurs que vous êtes, mesdames, messieurs les sénateurs, apprécieront cet effort en faveur de l'innovation. Et ce chapitre augmente de 1 %.
Je suis tenté de dire : non au saupoudrage et oui aux aides structurantes ! Je crois, monsieur Clouet, vous avoir entendu et pouvoir ainsi répondre aux critiques que vous citez.
Nous avons une démarche rationnelle et une démarche contrôlée. Depuis les Assises de l'innovation qui se sont tenues en 1998, les crédits du chapitre 66-01 ont été très rationnellement, profondément renouvelés. Ils sont réorientés vers les entreprises médianes, qui constituent peut-être l'une des faiblesses du paysage industriel français par rapport à celui de nos concurrents, allemands en particulier ; 25 % de ce chapitre leur seront consacrés dès l'an 2000. Grâce aux appels à projets gérés avec des comités d'experts externes, de nombreuses et nouvelles entreprises bénéficient des aides du secrétariat d'Etat à l'industrie. La montée en puissance des avances remboursables - elles atteindront 40 % de ce chapitre en 2000 - augmente la capacité d'action du secrétariat d'Etat à l'industrie. Enfin, des priorités thématiques ont été affirmées : ce sont les technologies clés pour structurer au niveau des régions des pôles de compétences, par exemple les biotechnologies et la société de l'information.
Au sein du même chapitre 66-01, 1,5 milliard de francs environ est consacré à la société de l'information. Je pense à l'action pour l'utilisation collective d'Internet par les PME, le programme UCIPE, ouvert depuis 1999 à l'ensemble des PME pourvu qu'elles agissent collectivement. Je pense, monsieur Trémel, monsieur Laffitte, au réseau national de recherche en télécommunications, le RNRT, qui, en 1995, a engendré 1 milliard de francs de recherche dans le secteur. Et puisque plusieurs sénateurs m'ont interrogé sur ce réseau, j'ai le plaisir d'indiquer que le soutien spécifique de l'Etat, ministère de l'industrie et ministère de la recherche, a été de 200 millions de francs en 1998 et de 270 millions de francs en 1999, apportés directement au RNRT. A cela s'ajoute d'ailleurs un montant d'aides de 50 millions de francs attribuées à des PME par l'ANVAR. Nous proposons de reconduire ces efforts en l'an 2000.
Le deuxième appel à projets du RNRT en 1999 a permis à 120 projets d'être déposés ; 40 de ces projets sont labellisés et font l'objet d'un financement en 1999, ou le feront en 2000. Les thèmes de recherche sont aussi importants que le développement de la norme de troisième génération UMTS, que l'Internet à haut débit, que les terminaux d'accès, qu'une foultitude d'acquisitions innovantes pour lesquelles la France se place bien, grâce en particulier, en effet, monsieur Laffitte, à de petites entreprises, à des petites start-up , comme l'on dit, qui, très rapidement, peuvent conquérir des marchés et dont nous encourageons le succès dans le cadre de cette politique de la société de l'information.
A cela s'ajoute le programme PRIAMM, nouveauté de 1999, qui permet d'inciter les industries culturelles à s'approprier la révolution numérique, programme que nous menons de concert avec Mme Trautmann, ministre de la culture et de la communication.
En 2000, le Gouvernement présentera au Parlement une loi sur la société de l'information qui portera sur la liberté de communication, le développement des réseaux et la sécurité des transactions électroniques. Avec ce texte, qui se nourrira de la grande consultation publique terminée dimanche 5 décembre et au cours de laquelle nous avons reçu plus de 300 propositions, la France se situera résolument parmi les pays pionniers en la matière, et je rassure à cet égard M. Laffitte.
Nous avons vraiment l'intention, avec cette loi sur la société de l'information, de continuer à placer la France dans les tout premiers. Nous sommes à la troisième ou à la quatrième place dans le monde dans ce domaine, et nous entendons y rester, voire gravir de nouveaux échelons.
M. Pierre Laffitte. Il faudra de l'argent !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. En effet, il faudra des crédits, monsieur le sénateur ! Mais je suis en train de démontrer que les priorités du Gouvernement témoignent de la réalité de notre politique industrielle en direction de ces entreprises, de ces actions, de ces recherches et de ces innovations.
L'innovation industrielle est en effet déterminante dans une économie mondialisée et à forte valeur ajoutée. J'en fournirai trois illustrations parmi d'autres.
Première illustration : en France, 95 % de la croissance supplémentaire, en 1998, est liée aux technologies de l'information et de la communication.
Deuxième illustration : au cours du premier semestre de l'année 1999, 16 % de brevets supplémentaires ont été enregistrés par rapport à la même période de 1997. Les choses bougent, et dans le bon sens puisque ce taux progressera encore en 2000 sous l'effet de la baisse que je viens de décider de 50 % de la taxe de recherche sur les brevets.
Troisième illustration : au mois de septembre, il n'y avait pas moins de 1 000 sites de commerce électronique, en France, soit une augmentation d'un tiers du nombre des sites en quatre mois.
L'émergence d'une nouvelle économie est donc maintenant une réalité ; il s'agit d'une croissance high-tech durablement élevée, créatrice d'emplois, et ce dans tous les secteurs.
Nous nourrissons également l'ambition de contribuer au développement de l'industrie tout entière. M. Lefebvre a d'ailleurs eu raison d'indiquer cette inflexion nouvelle par rapport à la politique que nous avons connue avant 1997.
Nous devons agir, non seulement sur l'environnement des entreprises industrielles, mais aussi directement sur les PMI et les secteurs en mutation.
Tout d'abord, nous agissons sur l'environnement des entreprises pour dynamiser le secteur industriel.
Au-delà des seuls effets de la politique économique et fiscale générale illustrée dans la première partie du budget que j'ai défendue devant vous la semaine dernière, nous fondons notre action sur le triptyque : formation, qualité et sécurité.
La formation des entrepeneurs constitue, monsieur Grignon, l'une de mes priorités. Les crédits pour les écoles - Mines, télécommunications et SUPELEC - augmentent de 6 % par rapport à 1999 compte tenu, notamment, de la reprise par le groupe des écoles des télécommunications de certaines équipes du Centre national d'études des télécommunications à Lannion, monsieur Trémel, et à Bagneux, avec 26 créations de postes de chercheurs pour le ministère en charge de l'industrie.
M. Pierre-Yvon Trémel. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Avec ce projet de budget, nous encourageons également la qualité, la sécurité et l'environnement, qui sont essentiels pour la compétitivité de toute notre industrie.
Les crédits pour la métrologie augmentent de 18,5 %, comme l'a souligné M. Weber. Cela permettra, en cinq ans, de multiplier par deux le soutien que nous lui apportons.
Le renouveau de la métrologie française est engagé, prenant appui d'ailleurs sur le remarquable laboratoire public qui oriente l'ensemble de nos recherches et de nos décisions dans ce domaine.
Les moyens pour la sécurité des mines découlant de la mise en oeuvre de la loi « après mines », adoptée à l'unanimité par le Sénat, doublent, ce qui permet de renforcer les actions de prévention des affaissements miniers. Les décrets d'application seront prochainement publiés. M. Besson a eu raison de poser la question.
En deuxième lieu, en se voulant de proximité et, donc, plus performant, ce projet de budget vise plus que jamais la modernisation des petites et moyennes entreprises, en particulier dans le cadre des contrats de plan Etat-région, qui ne laissent évidemment, j'en suis convaincu, aucun sénateur indifférent !
Les crédits en faveur des PMI augmentent de 7 % en 2000, et 703 millions de francs figurent au chapitre 64.92, autre chapitre emblématique de notre action.
Quarante-sept emplois sont créés au sein du secrétariat d'Etat à l'industrie pour l'essentiel sur le plan régional, naturellement, afin de conforter la capacité de développement des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement. Les petites et moyennes entreprises qui soutiennent l'emploi en développant leurs innovations et leurs investissements reçoivent l'appui des DRIRE.
Je cherche ce faisant à accroître l'efficacité de l'Etat dans son action en faveur de l'industrie et de l'emploi. M. Weber l'a tout à l'heure suffisamment expliqué à M. Clouet pour que je n'aie pas à y revenir longuement !
Cet effort se traduit par des procédures simplifiées de façon très significative. Il faut en effet s'attacher à encourager la simplification et la lisibilité de notre action en direction des entreprises. Il s'agit, par exemple, du contrat unique de l'ANVAR, qui est remarquable et qui a été mis en oeuvre dès le mois de septembre 1999. Il s'agit aussi de la procédure ATOUT, et du contrat unique pour les DRIRE, qui sera créé dans les semaines à venir. Il s'agit encore de la suppression de douze taxes industrielles, qui figurent parmi les quarante-neuf suppressions annoncées par M. Sautter dans le projet de loi de finances.
En troisième lieu, ce projet de budget accompagne les mutations de notre industrie.
Des difficultés peuvent survenir çà et là dans certains secteurs, dans certaines régions. Je ne manque jamais de vous rencontrer individuellement dans de telles circonstances.
Ces difficultés sont d'ailleurs parfois lourdes. Je le sais d'expérience, en tant qu'élu d'un département très industriel, et M. Lefebvre l'a rappelé pour le Nord, ainsi que M. Weber, pour la Seine-Maritime.
Ces difficultés requièrent de l'Etat un accompagnement volontaire, qui jamais ne cède à la fatalité, au fatalisme. Ainsi, 2 840 millions de francs sont consacrés à Charbonnages de France sur un budget total de 4,8 milliards de francs, en hausse de 9,5 % par rapport à 1999, destiné à l'ensemble de l'accompagnement des difficultés industrielles.
Les autorisations de programme pour l'équipement naval s'accroissent elles-mêmes de plus de moitié, ce qui traduit l'engagement du Gouvernement de favoriser, dans le respect des règles communautaires, le développement de la construction navale, notamment des remarquables Chantiers de l'Atlantique.
S'agissant des Chantiers de l'Atlantique, je dirai à M. Grignon, comme à Mme Dieulangard, qui interviendra probablement dans quelques instants, que le carnet de commandes de ces chantiers représente aujourd'hui plus de dix-huit mois de pleine charge.
Onze paquebots sont en cours de construction ou en commande. Ce secteur n'avait pas connu une situation aussi satisfaisante depuis de nombreuses années.
Je suis heureux d'avoir été celui des ministres en charge de l'industrie qui a pu, par une aide tout à fait cohérente avec ce que permettent les décisions européennes du Conseil des ministres et le suivi qui en est assuré par la Commission, donner un élan positif en matière d'innovation, de construction et de réalisation de paquebots, en matière de rénovation du tissu industriel de la Loire-Atlantique.
Enfin, les moyens du fonds d'industrialisation de la Lorraine, du fonds d'industrialisation des bassins miniers, les crédits de politique industrielle et du comité interministériel de restructuration industrielle sont consolidés à hauteur de 305 millions de francs d'autorisations de programme.
A propos du FIBM, je tiens à rappeler à M. Besson que les reliquats importants des années passées viennent abonder en cours d'année les crédits initiaux et qu'ils ne font pas l'objet d'une régulation.
Vous l'aurez compris : sur ces crédits essentiels dans la résolution de situations de crise, il existe, au sein du Gouvernement, une volonté de transparence et de vérité sur les coûts comme une volonté de gérer ces aides au quotidien avec une priorité donnée aux actions préservant et consolidant l'emploi.
Ma politique en faveur de l'industrie textile en tient lieu d'illustration : nous sortons progressivement du plan Borotra, sans fuite en avant, en accompagnant au mieux ce secteur qui traverse souvent, c'est vrai, de lourdes difficultés. Je suis naturellement à la disposition du groupe d'études « textile » de la Haute Assemblée, auquel a longtemps oeuvré le regretté Maurice Schumann, pour donner tous les apaisements et toutes les explications nécessaires.
Concernant la taxe générale sur les activités polluantes, dont M. Grignon a parlé, je suis particulièrement vigilant. Il ne saurait en effet être question d'éroder la compétitivité de certains secteurs économiques, en particulier celui de la chimie. Les travaux que j'ai engagés dans ce domaine le garantiront. Nous aurons l'occasion, je l'espère, d'en rediscuter. Ne soyez pas inquiets, nous veillons au respect de la compétitivité de tous les secteurs qui pourraient être concernés par la TGAP.
Après l'innovation et le développement industriel, nous avons aussi une grande ambition pour nos services publics, dans le domaine des communications, évoqué par M. Hérisson, comme dans celui de l'énergie, dont a traité M. Besson.
La gestion des entreprises chargées d'une mission de service public ne s'apprécie pas, pour l'essentiel, lors du vote du budget. Il faut d'ailleurs s'en féliciter, parce que c'est la preuve, s'il en fallait une, de leur bonne santé économique et sociale.
L'engagement budgétaire de l'Etat répond à des motifs précis. Dans le domaine des télécommunications, les moyens de l'autorité de régulation des télécommunications augmentent de 3,5 millions de francs et ceux de l'agence nationale des fréquences, avec le transfert des activités radiomaritimes de France Télécom à la NFR, progressent de 21 millions de francs.
Pour La Poste, la situation économique et sociale est sans commune mesure - en positif - avec ce qu'elle était - en négatif - voilà deux ans. M. Trémel l'a d'ailleurs reconnu. L'effort de l'Etat est porté à 1,9 milliard de francs en faveur du transport de presse, conformément aux engagements que j'avais pris, ici même, voilà un an, et au contrat d'objectifs et de progrès que j'ai signé avec La Poste en juin 1998. M. Teston l'a d'ailleurs remarqué et en a souligné le bien-fondé dans son intervention.
Cet engagement atteint 3 milliards de francs sur la durée du contrat d'entreprise qui lie l'Etat à l'entreprise La Poste en matière de retraites. Sur ces 3 milliards de francs, 600 millions de francs seront engagés dans le projet de loi de finances pour 2000. Le Gouvernement accompagne ainsi La Poste, comme il s'y était engagé clairement dans le contrat d'objectifs et progrès, ce que reconnaît M. Teston et ce que doit reconnaître M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour les technologies de l'information et La Poste. Oh non !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Concernant l'électricité, la loi de finances rectificative dotera la commission de régulation de l'électricité d'environ 50 millions de francs dès 2000, ce qui lui permettra, avec environ cinquante embauches dès la première année, d'assurer ses nouvelles missions, et donc une bonne transposition, que je souhaite la plus rapide possible, de la directive relative au marché intérieur de l'électricité.
La politique énergétique que je conduis s'appuie précisément sur des entreprises de service public. Quels sont ces principes ?
Le premier est celui de la transparence, avec l'application résolue de tous les aspects de la loi de 1991 sur l'aval du cycle nucléaire, loi qui a été adoptée à l'unanimité. Les arbitrages de M. le Premier ministre pris en février et en décembre 1998 ont été rappelés lors de tous les débats que nous avons eus sur la politique énergétique de la France, en particulier à l'Assemblée nationale le 21 janvier 1999.
L'installation de la commission locale d'information et de suivi du laboratoire de Bure, dans la Meuse, qui précède l'ouverture des travaux de celui-ci en est la plus récente illustration et marque la détermination du Gouvernement à appliquer sans faille cette politique.
Les économies d'énergie, les carburants propres, tels que le gaz de pétrole liquéfié et le gaz naturel véhicules, ainsi que la diversification des sources d'énergie, au travers de l'ADEME, notamment, dont la très forte hausse des crédits en 1999 est consolidée en 2000, avec 242 millions de francs d'autorisations de programme en provenance du ministère de l'industrie, constituent le deuxième axe de cette politique. Je citerai enfin la recherche et l'innovation au travers du CEA, remarquable outil scientifique qui, avec plus de 11 milliards de francs de crédits, voit ses moyens progresser de 1,1 % à périmètre constant, et ce sans jeu d'écriture, monsieur Murat.
Je confirme à cette occasion à Mme Heinis que les budgets de 1999 et pour 2000 sont parfaitement équilibrés.
Je tiens, naturellement, à rendre un vibrant hommage à l'action et aux résultats scientifiques des chercheurs du CEA, organisme remarquable qu'il est bien dans l'intention du Gouvernement de conforter et de continuer de développer, car nous en avons besoin pour notre politique énergétique et nucléaire. C'est un organisme tout à fait exceptionnel dans le champ mondial de la recherche, et je tiens à souligner combien le Gouvernement est fier que nous ayons, en France, un CEA de ce niveau-là, de cette qualité-là. (Très bien ! sur les travées socialistes.)
Je suis très attaché à une politique énergétique équilibrée - M. Besson l'a excellemment rappelé - et donc au maintien d'une option nucléaire ouverte, au meilleur niveau technologique du moment, ce qui suppose que nous soyons en mesure de prendre les décisions structurantes qui s'imposent au moment où elles s'imposent comme, par exemple, lorsqu'il nous faudra prendre la décision sur le réacteur de nouvelle génération dit European pressurized water reactor , l'EPRW évoqué à juste titre par MM Besson et Weber.
Enfin, je ne peux que me réjouir de l'annonce faite par Framatome et Siemens, du regroupement de leur activité nucléaire sur les services, les combustibles hors MOX, la construction de chaudières. Cela signifie, monsieur Lefebvre, non pas un désengagement, mais, bien au contraire, une impulsion européenne nouvelle dans le nucléaire et une capacité à réaffirmer, dans le concert européen, l'importance de cette source d'énergie. Elle a vocation non seulement à prendre aujourd'hui une part prépondérante dans le contexte énergétique global français, d'autant qu'elle satisfait les engagements de Kyoto - pas un seul atome de carbone n'est émis dans l'atmosphère -, mais aussi à toujours plus s'affirmer sur le plan international.
Tout à l'heure, une délégation chinoise était dans la tribune officielle. Ce pays aussi, on l'aura compris, peut faire l'objet d'offres intéressantes de la part des entreprises européennes, en particulier de l'industrie française. L'accord entre Framatome et Siemens n'est donc pas du tout indifférent à la dynamique que nous souhaitons, je pense, sur toutes ces travées, et qui est profitable à la fois pour l'emploi, pour l'économie, pour la science et la technologie françaises.
A ce propos, je souhaite revenir un instant sur le travail de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de transposition de la directive « Electricité ».
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Oh oui, alors ! Nous aussi !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je me dois de préciser dans cet aréopage, après avoir lu certains articles mal fondés que le Gouvernement ne participe pas au travail de cette commission.
Néanmoins, j'ai apprécié la volonté de la Haute Assemblée de faire progresser ce texte important, et disant cela, je m'adresse à Bernard Murat. Je salue également le travail technique et la volonté d'avancer du rapporteur Henri Revol, du président de la commission Jean François-Poncet, du président Jacques Valade.
Gardons-nous de dramatiser le retard qui a été pris. Je m'en suis expliqué jeudi dernier à Bruxelles, au Conseil « Energie », avec mes homologues européens. Le projet de loi de transposition sera examiné en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale le 18 janvier. Le 25 janvier, c'est le Sénat qui aura à en discuter si la conférence des présidents, naturellement, en est d'accord. La lecture définitive pourrait avoir lieu le 1er février et, si M. le Président de la République l'accepte, la promulgation de la loi interviendrait à la mi-février.
Concernant le gaz, monsieur Besson, le Gouvernement proposera au Parlement d'examiner le projet de loi de transposition avant la date limite du 10 août 2000. Je tiendrai une ligne pragmatique - je l'affirme à M. Lefebvre - afin de renforcer l'avenir industriel du gaz dans notre pays et de maintenir le service public du gaz, une ligne telle que vous l'avez suggérée, monsieur le sénateur, et telle que l'a suggérée M. Charles Fiterman, dans un excellent rapport au Conseil économique et social pris en considération par le Gouvernement.
A London Electricity comme à Gaz de Berlin, nos partenaires savent que les services publics français mettent en oeuvre des stratégies commerciales offensives qui leur permettent d'affronter la concurrence internationale avec succès.
Des services publics dynamiques ? Ils le sont !
Des services publics ouverts à l'international ? Il s'ouvrent progressivement à l'international par de magnifiques succès ; je viens d'en évoquer deux.
Des services publics inscrits dans la durée ? Oui ! par une transposition vigilante et concertée des directives européennes sans fragiliser le service public !
Des services publics d'une réelle ambition sociale au travers d'accords sur l'aménagement de la réduction du temps de travail exemplaires, d'une véritable lutte contre la précarité.
Telle est notre vision, telle est ma vision des entreprises publiques, non seulement dans le domaine de l'énergie, mais aussi, messieurs Hérisson, Trémel et Delfau, dans le secteur des communications.
Je voudrais dire un mot, puisque j'y ai été invité, de l'aménagement et de la réduction du temps de travail à France Télécom. C'est peut-être l'occasion de mettre les points sur les « i ».
Le Gouvernement a demandé à France Télécom de mener une concertation plus constructive avec les organisations syndicales et les personnels. Il est, à nos yeux, nécessaire qu'un accord d'entreprise sur l'aménagement et la réduction du temps de travail concernant tous les personnels, qu'ils soient fonctionnaires ou contractuels, permette de trouver rapidement - j'insiste sur cet adverbe - un bon équilibre entre le respect de la compétitivité de l'entreprise, les conditions de travail des salariés et l'emploi.
France Télécom, qui a recruté 12 000 personnes - essentiellement des jeunes - au cours des trois dernières années et qui forme chaque année plus de 1 000 jeunes en alternance, partage d'ailleurs cette préoccupation pour l'emploi, à la différence d'autres opérateurs historiques qui ont engagé une réduction forte de leur effectif en Europe. Pensez à la suppression de 40 000 emplois chez Deutsche Telekom en Allemagne ! A cette occasion, France Télécom doit s'attacher, comme les autres entreprises de télécommunications, à developper l'emploi stable...
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... et à contribuer, par son exemple, à montrer que le développement des nouvelles technologies de l'information peut se traduire par des emplois de qualité, avec de vraies perspectives d'évolution au sein des entreprises du secteur.
La valeur de France Télécom, septième opérateur mondial et non pas quatorzième, monsieur Hérisson,...
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Non, huitième !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... progresse, et l'entreprise ne cesse d'acquérir de nouvelles positions à l'étranger.
L'année dernière, la Haute Assemblée avait souhaité que s'engage un travail sur la taxe professionnelle de France Télécom. Ici, on doit être sensible à l'évolution des impositions locales ! Ce travail est en cours.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Cela fait cinq ans que cela dure !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Il est particulièrement complexe. J'ai donné des instructions pour que ce travail débouche le plus rapidement possible et pour que nous puissions soumettre ces propositions nouvelles aux collectivités locales après en avoir discuté avec le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Quant à La Poste, elle devrait voir son chiffre d'affaires progresser à un rythme d'environ 7 % en 1999. Avec 1,8 milliard de francs investi cette année à l'étranger, elle démontre sa capacité à se développer au niveau international, même sans hausse du prix du timbre - je devance ainsi une question qui ne m'a pas été posée par M. Larcher, mais que je souhaitais évoquer du haut de cette tribune.
La démarche de modernisation des services publics, c'est aussi la mise en place, dans chaque département, d'une commission de présence postale territoriale qui, je vous le rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, résulte d'une concertation longue et approfondie avec l'Association des maires de France, voilà un an et demi. Cette commission doit répondre, je pense, aux souhaits de MM. de Montesquiou et Murat de traiter, au plus près des usagers, du service rendu par La Poste, aussi bien en milieu rural que dans les 700 quartiers dits « zones urbaines sensibles » et définis par le ministère de la ville.
Nous devrions encore enregistrer de réels progrès du point de vue de la présence postale.
Le secteur postal fera l'objet, ainsi que vous l'avez indiqué, d'une négociation européenne en 2000.
Comme vous le savez, monsieur Hérisson - je le dis également à l'attention du groupe socialiste qui m'a interrogé sur ce point - j'ai fait valoir il y a dix jours à M. Bolkestein, le commissaire chargé de ces questions, notre fermeté sur le maintien d'un service réservé large - je pèse mes mots - et le renforcement des exigences du service universel.
A cet égard, je compte sur vous, sur l'Assemblée nationale et sur les représentants français au Parlement européen pour faire valoir, aux côtés du Gouvernement, l'unité de vue de la France dans ce domaine. Nous nous battrons sur ce point, et soyez certains que nous serons très fermes et très déterminés.
En conclusion, ce projet de budget est résolument offensif. Formation, innovation, qualité, telle est notre stratégie pour l'industrie. Pour les services publics, trois mots clés : durée dans le service public, modernité par le service public, exemplarité sur le plan social dans le service public.
La conjoncture industrielle est bonne. Les perspectives de production des industriels pour 1999 sont à un niveau jamais atteint depuis 1980. L'évolution de notre compétitivité est favorable, alors que régresse celle de nos partenaires allemand et britannique. Ne l'oublions jamais dans nos comparaisons. En 1998, nous avons assisté à une inversion de tendance : 50 000 emplois ont été créés dans l'industrie. Je suis convaincu que l'action de l'Etat et la mise en oeuvre d'une véritable politique industrielle ne sont pas pour rien dans ces bons résultats positifs.
Mesdames et messieurs les sénateurs, je regrette que les commissions saisies au fond ou pour avis aient choisi de prendre pour cibles certains budgets - peut-être pour des motifs plus idéologiques que techniques -...
Mme Hélène Luc. Eh oui !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... en refusant leur adoption.
Le Gouvernement entend, quant à lui, bien assumer ses responsabilités. Personnellement, j'ai la satisfaction, c'est vrai, de défendre devant vous un bon budget pour une industrie française et des services publics français qui vont de l'avant ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits figurant aux états B et C et concernant l'économie, les finances et l'industrie : II. - Industrie (et Poste).
Je rappelle au Sénat que ces crédits seront mis aux voix aujourd'hui même, à la fin de l'examen des crédits affectés au commerce extérieur.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 4 806 315 457 francs. »