Séance du 3 décembre 1999







M. le président. Dans la suite de l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant les services communs, l'urbanisme et le logement, la parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Monsieur le président, Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'orientation générale de ce projet de budget maintient le cap fixé par le Gouvernement précédent en pérennisant le soutien à l'effort d'investissement privé. Il privilégie le logement social et introduit des mesures fiscales nouvelles. Aussi la commission des affaires économiques préconise-t-elle l'adoption des crédits consacrés au logement.
Soucieux de ne pas imposer à notre assemblée la réitération d'une analyse globale, je souhaite évoquer l'habitat en zone rurale, thème que j'avais déjà abordé en commission.
La mise à disposition de logements locatifs est indéniablement un instrument de lutte contre la désertification. Elle fixe le plus souvent une population jeune, en capacité de procréation, constituant en outre un creuset de main-d'oeuvre.
La présence des services publics reste acquise ; du moins, la menace de leur retrait ne pèse plus avec autant d'acuité. Cette spirale brisée laisse souvent la place à une dynamique d'implantation d'entreprises qui ne choisissent jamais des lieux de repli.
Cette réalité, je l'ai observée dans mon canton, où à été lancée par le conseil général, entre 1991 et 1993, une politique d'offre de logements locatifs. Une enveloppe de 5,5 millions de francs a été débloquée pour la création de 1 000 logements locatifs supplémentaires en Haute-Saône. Nous en aurons finalement créé 1 500. Cette initiative venait après un constat voisin de celui d'aujourd'hui dans la mesure où le parc HLM ne permettait plus de répondre aux demandes et où l'offre privée disparaissait progressivement.
Au-delà du soutien que les exécutifs locaux peuvent apporter, le traitement décentralisé des besoins paraît essentiel. Ne pourrait-on envisager que l'Etat soutienne plus efficacement, par des aides appropriées et simplifiées, et moyennant certains critères à définir, les propriétaires disposés à louer ?
En effet, justifier le maintien de certains crédits, tels ceux de l'ANAH, l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, au niveau antérieur par le fait qu'ils n'ont pas été intégralement consommés revient à enregistrer un échec sans en chercher les causes.
Actuellement, les délais de réalisation des opérations sont trop longs et les procédures trop compliquées. Or un parc existe, une demande est exprimée ; mais des candidats renoncent face aux pesanteurs. Le parc locatif privé constitue pourtant 5 % du parc total, ce qui n'est pas négligeable, et il présente l'avantage d'être diffus. Il accueille en majorité des jeunes ménages aux revenus modestes séduits par des loyers à l'évolution plutôt plus faible que celle du secteur public. En conclusion, c'est un outil de programmation territoriale.
Par ailleurs, le problème du bâti inoccupé se présente un peu différemment en milieu rural et en zone urbaine. Il s'agit souvent de propriétaires qui n'ont aucun projet de réhabilitation ni de vente, parfois de biens en indivision. La solution extrême consiste, pour le maire, à prendre un arrêté de péril qui est une mise en demeure d'agir. Néanmoins, il conviendrait de trouver une solution susceptible de débloquer les centres anciens où se trouve la pupart du temps ce patrimoine gelé.
Pourrait-on améliorer le dispositif des OPAH - opérations programmées d'amélioration de l'habitat - en vue d'une meilleure gestion urbaine et architecturale du bâti et du parc de logements ? En effet, le suivi normalisé s'attache plus à la gestion qu'à la mise en oeuvre d'une stratégie sociale et urbaine. Les travaux sont répertoriés par type de crédits afin de réaliser un équilibre social. Les aspects urbains et patrimoniaux y échappent souvent. La présence des bilans rarement cartographiés l'atteste.
Par ailleurs, des OPAH à volet « patrimoine » ne sont pas systématiquement proposées au sein des ZPPAUP - zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager - alors que l'intérêt architectural y est recensé en concertation avec le service départemental de l'architecture et du patrimoine. En généralisant ces opérations à volet « patrimoine » situées dans les ZPPAUP, on préserverait la vocation sociale des investissements tout en s'adaptant aux contraintes architecturales du bâti, aux enjeux urbains de la reconquête des centres, qui sont des périmètres à protéger, et aux savoir-faire à mobiliser ; je pense là, notamment, aux artisans.
En ce qui concerne le logement social, on enregistre le même phénomène de sous-consommation des crédits qui sont in fine reversés au budget général. Là aussi, il convient de se demander pourquoi les communes déclinent l'offre de logement social. Répond-elle aux priorités des collectivités locales, qui sont pourtant porteuses de demandes de logements locatifs ? Elles expriment des craintes, et celles-ci les font finalement renoncer, compte tenu des charges foncières, financières et sociales qui leur incomberont à l'issue du processus.
En revanche, ces mêmes collectivités souhaiteraient avoir accès au prêt locatif à usage social, qui met en jeu un mécanisme différent. Les petites communes ont souvent sur leur territoire des bâtiments vacants qui pourraient être rachetés et transformés en logements. Plus léger, plus souple, calibré à la demande, ce dispositif autorise une maîtrise des investissements et du fonctionnement. Peut-on espérer voir intervenir l'élargissement souhaité ?
La prime à l'amélioration de l'habitat, dont le niveau n'évolue pas, tente pourtant les propriétaires occupants, particulièrement en zone rurale. L'actuel plafonnement des revenus qui autorise l'obtention de l'aide mériterait d'être actualisé. Il évince de toute évidence un bon nombre de candidats, souvent âgés. Le maintien à domicile passe aussi par ces aménagements indispensables que la capacité financière personnelle interdit.
Lors d'un débat récent, j'avais indiqué qu'en coût et en efficacité on gagnerait à rompre le cycle prélèvements-redistribution. Je fais le même constat en matière d'aides au logement. Ne pourrait-on envisager d'appréhender l'allocation à venir avant taxation quand elle a lieu ? L'Etat et les citoyens y gagneraient par la simplification et la clarification des procédures.
En matière d'urbanisme, je déplore que l'essentiel des mesures concerne les grandes villes. Ne pourrait-on, en ciblant les bénéficiaires, soutenir les collectivités locales de moindre importance dans leur démarche ? L'amélioration du patrimoine culturel, architectural et paysager mérite mieux que le sort qui lui est le plus souvent réservé.
En effet, ces cités doivent appréhender les abords des éléments du patrimoine qui exigent d'être replacés dans une vision d'ensemble. Eux-mêmes doivent prendre place dans un schéma directeur pluriannuel pour l'aménagement des espaces publics où peuvent s'insérer des actions d'accompagnement des OPAH.
La réhabilitation des monuments historiques et du patrimoine rural non protégé dépasse largement les capacités financières des communes qui les possèdent. Comme beaucoup de mes collègues, je suis chaque année sollicité par des maires afin que soient trouvés dans la réserve parlementaire des fonds qu'ils sont incapables de réunir malgré les financements croisés obtenus. La solution consiste-t-elle à fermer les lieux et à observer les dégradations ?
Par ailleurs, concernant l'aménagement qualitatif des espaces publics en milieu rural, plusieurs dysfonctionnements sont observés.
Tout d'abord, les espaces publics sont traités selon une approche plus fonctionnelle que qualitative, à l'échelle d'une place et non d'une commune rurale, qui équivaut, en gros, à un quartier d'une agglomération. Leurs aspects patrimonial et touristique sont à mesurer en termes démographiques et économiques.
Ensuite, l'affection des espaces selon les différents usages et usagers n'est pas systématique, ce qui peut engendrer des ruptures dans la pratique de la cité. Les aménagements s'effectuent souvent en dehors d'un plan de déplacement urbain. L'ordre des priorités tend à favoriser ceux qui sont relativement imposants ou d'ordre routier, parfois au détriment des usagers et d'une bonne gestion. Les espaces publics apparaissent trop souvent peu structurés et déséquilibrés.
Enfin, il y a une réelle carence des programmes liés aux coûts, et les procédures de financements sont limitées. Les interventions réalisées sont, pour l'essentiel, fondées sur le partenariat ; je songe à la dissimulation des réseaux téléphoniques et électriques ou à la réfection de l'éclairage public.
Aussi, je fais une proposition : en renforçant le rôle de l'Etat en amont des projets et en favorisant une plus grande participation avec les collectivités locales, pourraient être réalisées des études dégageant des schémas d'aménagement des espaces publics pour la cité et les entrées de ville. Comme dans les ZPPAUP, serait mis en place un suivi concerté de l'étude, avec consultation préalable d'architectes, étude dans laquelle seraient appréciées les dimensions urbaines et patrimoniales. L'étude comporterait en outre un cahier des charges, les profils des aménagements, les esquisses, les recommandations techniques et, enfin, la programmation. Par cette démarche complète serait obtenue une meilleure maîtrise des différents niveaux.
L'espace correctement rythmé est une vitrine qui contribue également à un enrichissement de l'environnement. Les acteurs doivent y trouver leur place et leur raison d'être pour le faire vivre. Puissions-nous, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, inverser la tendance à la concentration urbaine pour un meilleur équilibre spatial et social. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, l'examen par notre assemblée des crédits affectés au logement constitue, certes, un passage obligé mais, à mes yeux, il représente bien plus : depuis que vous avez été chargés de ce secteur par Lionel Jospin, nous avons, en effet, le plaisir renouvelé de vous entendre nous présenter un bon budget.
Ce projet de budget pour l'an 2000 ne fait pas exception à la règle : d'un montant de 47,5 milliards de francs, les dépenses budgétaires pour l'an 2000 affichent une hausse de 5,3 %.
Toutefois, et cela a été déjà indiqué, si l'on tient compte de la rebudgétisation du prêt à taux zéro et de la suppression des comptes d'affectation spéciale, c'est à une légère baisse par rapport à 1999 que nous assistons. Dans ces conditions, n'y a-t-il pas un paradoxe à afficher notre satisfaction ? Je ne le pense pas, car ce projet de loi de finances pour 2000 doit être replacé dans l'ensemble des mesures, notamment fiscales, prises en faveur du logement au cours de l'année 1999 et qui représentent un allégement de l'impôt de 28 milliards de francs pour l'année 2000.
Ainsi, le cap est maintenu : soutien au parc privé, priorité confirmée pour le logement social et lutte contre les exclusions.
S'agissant du logement privé, le maintien à 2,2 milliards de francs des crédits de l'ANAH et à 800 millions de francs de ceux de la PAH - prime à l'amélioration de l'habitat - doit s'apprécier au regard de l'application du taux réduit de TVA aux travaux effectués par l'Agence.
En outre, l'extension du taux de TVA à l'ensemble des travaux d'entretien des logements ne peut être que positif pour le secteur.
Enfin, le produit de la taxe sur la vacance doit venir également abonder les crédits de l'ANAH.
A propos du logement privé, permettez-moi, monsieur le ministre, de vous redire, une fois encore, mon désir de voir mises au point des procédures facilitant l'intervention publique dans les copropriétés dégradées, procédures qui pourraient être reprises dans le cadre du projet de loi « habitat, urbanisme et déplacements » qui est en cours d'élaboration. Je souhaite, monsieur le ministre, que vous nous donniez ici l'assurance que ce problème majeur sera traité en profondeur et que de nouveaux outils permettront enfin de faciliter les mesures de redressement nécessaires et de protéger les futurs acquéreurs.
Je voudrais maintenant aborder le volet « logement social » au travers non seulement des dotations purement budgétaires, mais aussi des décisions très favorables qui ont été prises en cours d'année : la baisse du taux du livret A et les mesures financières qui lui sont associées, d'une part, les mesures fiscales du projet de loi de finances, d'autre part.
Le projet de budget pour 2000 prévoit de financer soixante-dix mille logements. Cet objectif, qui est en adéquation avec les besoins réels de nos concitoyens, sera-t-il concrétisé ? Le pari pourra-t-il être tenu, alors qu'un constat s'impose : si les organismes d'HLM ont parfaitement consommé les crédits PALULOS, en revanche, ils se sont insuffisamment mobilisés pour les prêts locatifs aidés, avec cinquante mille agréments consommés en 1998 pour quatre-vingt mille budgétés.
Le dispositif de relance globale présenté le 21 juillet dernier, qui s'appuie sur le prêt locatif à usage social, le PLUS, devrait permettre d'enrayer cette dérive continue depuis 1994, et même, si possible, d'inverser la tendance.
Ce produit financier nouveau, réservé aux bailleurs sociaux, et dont le taux est fixé à 3,45 %, répond à une attente du mouvement HLM et à une simplification des modalités de gestion des PLA. Il s'agit d'un retour de l'aide à la pierre, puisqu'il bénéficie d'une subvention de 5 % pour le neuf et de 10 % pour les opérations d'acquisition-amélioration. Il présente l'avantage d'être à la fois plus solvabilisateur et plus créateur de mixité sociale. Les logements devront en effet accueillir au moins 30 % de locataires ayant un niveau de revenu inférieur à 60 % des plafonds PLA, mais ils pourront aussi accueillir 10 % de locataires ayant un revenu supérieur au plafond PLA.
Je rejoins là notre collègue Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, quant à l'opportunité d'ouvrir le bénéfice du PLUS aux collectivités et aux associations pour des opérations d'acquisition-amélioration.
Il convient, par ailleurs, d'appréhender la stabilité de la dotation consacrée à la construction et à la réhabilitation pour le parc HLM - 2 930 millions de francs - en liaison avec les mesures de réaménagement, de la dette des organismes annoncé le 21 juillet dernier - l'allègement global s'élève à 45 milliards de francs - et de baisse de la TVA. Sur ce point, je reprendrai les observations formulées notamment par la Confédération nationale du logement, qui redoute que les avantages fiscaux consentis par l'Etat ne soient pas sensiblement répercutés sur les locataires. Il nous appartient, aux uns et aux autres, de veiller à ce que ce soit le cas.
Dans ce nouveau contexte, le pari que j'évoquais plus haut devrait pouvoir être tenu : le Gouvernement escompte un effort évalué à hauteur de 15 000 à 20 000 logements sociaux supplémentaires pour l'année 2000.
Il faudra être vigilant : bien construire est l'une des missions du mouvement HLM, au même titre que bien gérer et bien entretenir. Les moyens sont là, il reste à les utiliser.
Je m'adresserai maintenant plus particulièrement à M. Besson, qui s'est rendu à plusieurs reprises dans l'Hérault - mais je sais aussi combien vous êtes attaché à ce département, monsieur Gayssot ! Sans doute me pardonnerez-vous mon manque de modestie en citant le département de l'Hérault comme référence à propos de cette ambition, puisque, comme vous le savez, nous avons entièrement consommé nos dotations PLA au cours de ces dernières années.
Il faudra aussi être vigilant en ce qui concerne l'engagement pris par l'Union nationale des fédérations d'organismes d'HLM de geler les loyers pendant deux ans.
La prévention des exclusions, avec en particulier la mise en oeuvre progressive de la loi de juillet 1998, est également une priorité que reflètent les crédits affectés aux opérations très sociales, pour 290 millions de francs, à la lutte contre le saturnisme, pour 75 millions de francs, ainsi que ceux qui sont alloués à la médiation locative et à la location aux associations.
La baisse de 0,8 % des crédits affectés aux aides personnalisées au logement s'explique par une meilleure conjoncture économique. Rappelons qu'elle s'assortit de l'actualisation annuelle des barèmes, réinitiée en 1997.
Mais, la prévention des exclusions, ce sont aussi des crédits qui passent de 685 millions de francs dans le budget de 1999 à 720 millions de francs dans le projet de budget pour 2000, soit une hausse d'un peu plus de 5 %.
A ce propos, au cours des débats sur à la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, j'avais déjà eu l'occasion d'exprimer la nécessité de mieux encadrer les frais de gestion du fonds de solidarité pour le logement. En 1998, ils représentaient près de 10 % des dotations, le reste correspondant aux aides financières apportées aux ménages. Qu'en est-il aujourd'hui ?
La politique du logement plus globale, plus juste et plus stable que vous vous efforcez de mettre en place depuis votre arrivée, monsieur le secrétaire d'Etat, ne trouvera sa pleine efficacité que si elle permet de fédérer l'action de l'Etat, des organismes et des collectivités locales.
Le 16 avril dernier, j'ai eu le plaisir de vous accueillir une nouvelle fois à l'hôtel du département de l'Hérault pour la signature d'une convention intitulée « Pour une politique solidaire de l'habitat et du logement social ». L'Etat s'est engagé à hauteur de 88 millions de francs et le département de 22 millions de francs, l'objectif étant de développer et de diversifier l'offre de logement en milieu rural et urbain, de soutenir la réhabilitation et le renouvellement du parc et de favoriser la mixité sociale.
Malgré les efforts consentis depuis les années quatre-vingt-dix en passant de 26 680 à 38 000 logements, le déficit reste chronique. L'exception héraultaise d'une forte poussée démographique qui va se poursuivre ne fera qu'amplifier le phénomène : avec 400 000 nouveaux Héraultais attendus dans les vingt prochaines années, ce sont quelque 120 000 à 150 000 logements nouveaux qui seront nécessaires.
J'évoquais tout à l'heure la place accordée dans le budget à la prévention des exclusions. Je dirai d'un mot la satisfaction que j'ai eue à cosigner avec le représentant de l'Etat et les responsables d'HLM une convention contre la précarité, la première de ce type en France.
Elle vise à reloger cent familles, avec le souhait, pour chacun des partenaires, que le département, pilote en la matière, fasse école.
Cette convention, issue de la loi de juillet 1998, a pour objet de s'attaquer à la précarisation ; elle préconise la recherche de mixité, l'engagement étant pris par écrit, par l'ensemble des intervenants, de transparence, de coordination des interventions et de prise en compte, presque individuelle, des difficultés de chacun.
Cet exemple concret témoigne que, pour espérer porter ses fruits, une politique locale de l'habitat doit être mise en oeuvre au plus près des besoins. Elle doit aussi être intégrée à des politiques urbaines renouvelées, afin de garantir la prise en compte fine des équilibres sociaux et territoriaux.
Cela me conduit tout naturellement, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, à vous interroger sur le futur projet de loi « habitat, urbanisme et déplacements » et sur les moyens que vous proposez pour renforcer la mixité urbaine à l'échelle de l'agglomération. Le bilan de la loi d'orientation pour la ville, considérablement « édulcorée » entre 1993 et 1997, est à ce jour notoirement insuffisant.
L'état des lieux, si j'ose dire, est parfaitement connu.
« Certains élus ne souhaitent plus de logements sociaux parce qu'ils estiment en avoir beaucoup et veulent se consacrer à l'amélioration du parc et à ses enjeux sociaux. D'autres en ont peu ou pas et osent parfois faire de leur refus du logement social un argument électoral. Cela ne peut plus être admis. » Vous reconnaîtrez certainement ces propos, monsieur le ministre d'Etat : vous les avez tenus au dernier congrès des HLM, à Nantes. J'y adhère pleinement.
L'attente est très forte. Où en est l'état des réflexions et des propositions de votre ministère ?
Il paraît indispensable de prévoir des mécanismes d'action directe de l'Etat pour assurer la construction de logements en lieu et place des communes en cas de refus avéré de celles-ci. Ce texte aura également à traiter des copropriétés dégradées ; j'en ai parlé précédemment, je n'y reviens pas.
En conclusion, 1999 aura été l'année d'une croissance confirmée du secteur du bâtiment : une progression de 4,5 % en volume de l'activité pour les douze derniers mois et près de 25 000 emplois créés en 1999 après une perte de plus de 200 000 au cours des sept dernières années.
L'année 1999 aura également été celle d'un environnement fiscal beaucoup plus favorable. Des réformes d'importance restent à réaliser, en particulier celle de la taxe d'habitation. Le Premier ministre Lionel Jospin en a annoncé le principe. C'est un vaste chantier auquel il faut s'atteler dès la prochaine loi de finances.
Votre budget est un très bon budget et le groupe socialiste s'apprête à le voter avec une grande satisfaction. Il réunit toutes les conditions pour que l'année 2000 soit placée sous le signe de la consolidation et du développement de l'action en faveur du logement que le Gouvernement a engagée dès 1997 et que le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, avait inscrite comme une priorité gouvernementale. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Francis Giraud. Amen !
M. le président. La parole est à M. Cornu.
M. Gérard Cornu. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, après l'exercice d'autosatisfaction de mon prédécesseur, je vais tenter de rectifier un peu les choses. (Protestation sur les travées socialistes.)
Depuis un certain temps, en matière de logement, nous habituons nos concitoyens à disposer de mesures spécifiques afin d'encourager la construction.
Il est vrai - comme le dit l'adage, quand le bâtiment va, tout va » - que les dispositifs antérieurs ont donné d'excellents résultats, qu'il s'agisse du dispositif. Méhaignerie ou du dispositif Périssol.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. La loi Besson est récente !
M. Gérard Cornu. Permettez-moi de citer ces dispositifs par le nom du ministre du logement de l'époque car, désormais, l'habitude de chaque ministre du logement est de donner son nom à une nouvelle mesure...
Mme Odette Terrade. On préfère celui d'aujourd'hui !
M. Gérard Cornu. ... à tel point que l'on pourrait se demander si ces changements successifs ne sont pas nuisibles à la lisibilité et à la continuité de l'action.
Vous n'échappez pas à cette habitude, monsieur le secrétaire d'Etat, puisque aujourd'hui, après les dispositifs Méhaignerie et Périssol, c'est au dispositif Besson d'être à l'honneur.
M. André Vezinhet. Il est bien meilleur !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'est mérité !
M. Gérard Cornu. Si le fameux amortissement Périssol a rempli pleinement sa fonction première au regard de la construction de logements neufs - de l'ordre de 45 000 par an - il est vraiment dommage qu'il n'existe plus depuis fin août 1999. D'autant qu'il avait rencontré un grand succès auprès des investisseurs privés, pour qui il présentait l'énorme avantage d'être simple et souple dans sa mise en oeuvre concernant le montant des loyers.
Aujourd'hui, nous voilà donc à la fin de la première année d'application du dispositif Besson, qui confère au statut de bailleur privé une dimension à la fois économique et sociale.
Pour assurer cette fonction économique et sociale, ce dispositif divise la France en quatre zones, aussi bien pour le montant du loyer au mètre carré que pour le revenu du locataire, et il provoque de fortes disparités en fonction du zonage préalable.
C'est précisément de ce sujet que je veux vous entretenir, monsieur le secrétaire d'Etat, et je vous poserai deux questions.
La première a trait aux conséquences de la loi sur l'intercommunalité, récemment votée par les deux assemblées, qui dégage la notion d'agglomération, à tel point que l'on peut créer des communautés d'agglomération à taxe professionnelle unique pour les agglomérations de plus de 50 000 habitants.
Or, dans les quatre types de zones référencées, la notion d'agglomération de plus de cent mille habitants existe puisqu'elle permet de bénéficier du classement en zone 2. Je crois savoir que, dans votre dispositif, cette notion d'agglomération est une référence INSEE et non pas une référence intercommunalité à fiscalité propre, voulue, elle, par les élus locaux.
En clair, les élus subissent les critères de l'agglomération INSEE, puisque cela ne dépend pas d'eux. En revanche, ils décident d'une communauté d'agglomération avec l'obligation de prendre la compétence de l'équilibre social de l'habitat sur le territoire communautaire.
Il serait donc à mon avis judicieux de compléter les critères de la zone 2. Actuellement, on prend en compte les agglomérations de plus de 100 000 habitants, mais il n'est pas spécifié qu'il s'agit d'une référence INSEE. Je vous propose donc d'introduire le critère « agglomération de plus de 100 000 habitants, référence INSEE » ou - et j'insiste sur ce « ou » - « communauté d'agglomération de plus de 100 000 habitants ».
En effet, on peut avoir une agglomération qui, au titre de la référence INSEE, compte 90 000 ou 95 000 habitants. Mais, de par la volonté des conseils municipaux élus, on peut tout aussi bien avoir une communauté d'agglomération qui regroupe plus de 100 000 habitants, soit beaucoup plus que l'agglomération au sens de la référence INSEE.
A partir du moment où il s'agit d'une compétence obligatoire de la communauté d'agglomération voulue par les élus, cette proposition peut être intéressante et s'inscrire tout à fait dans l'intercommunalité que nous avons votée.
J'aimerais connaître votre avis sur cette proposition, monsieur le secrétaire d'Etat. Voyez que l'opposition peut être constructive !
M. Patrick Lassourd. Très bien !
M. Gérard Cornu. Ma deuxième question a trait à l'aménagement du territoire, qui intéresse tout autant M. le ministre que M. le secrétaire d'Etat, raison pour laquelle je veux les rendre attentifs l'un et l'autre à la proposition qui va suivre.
Les « franges franciliennes » sont des espaces qui ont les mêmes caractéristiques que la région d'Ile-de-France mais qui sont limitrophes. Il s'agit, en clair, de l'Oise, de l'Eure, de l'Eure-et-Loir et de l'Aisne.
Or, ces franges franciliennes sont très pénalisées par la loi Besson, puisqu'elles se trouvent en zone 3 alors que, à un kilomètre près, dès que l'on pénètre dans la région d'Ile-de-France, on se trouve en zone 2. Et pourtant, le prix du terrain au mètre carré est le même.
C'est ainsi que, dans mon département, l'Eure-et-Loir, plus particulièrement dans le pays chartrain, la tension en logement locatif est très forte.
Le dispositif actuel incite donc les investisseurs à construire dans la région d'Ile-de-France plutôt que dans les départements limitrophes. Les conséquences sont extrêmement négatives et contrarient toute véritable politique d'aménagement du territoire, dont l'un des buts doit être, ne l'oublions pas, de désengorger la région parisienne.
A mon avis, il convient d'encourager l'amortissement Besson dans les franges franciliennes et, pour ce faire, de classer les franges franciliennes dans la même zone que la région d'Ile-de-France, c'est-à-dire en zone 2.
Voilà deux propositions concrètes, sur lesquelles je souhaite connaître le sentiment du Gouvernement. Elles vont dans le sens de l'aménagement du territoire et de la promotion d'une loi que, monsieur le secrétaire d'Etat, vous devez avoir à coeur de promouvoir puisqu'elle porte votre nom ! (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, vous consacrez une journée entière de débat au budget du ministère de l'équipement, des transports et du logement, ce qui nous donne l'occasion d'évoquer les grandes orientations des politiques que je conduis au nom du Gouvernement dans ces domaines.
A la suite de Mme Michelle Demessine, ce matin, pour le tourisme, M. Louis Besson interviendra sur les questions d'urbanisme et de logement que vous avez soulevées, dans un esprit constructif.
Pour ma part, je vais évoquer brièvement les grandes lignes de mon budget.
Ce projet de loi de finances, le troisième que nous vous présentons, confirme l'effort durable et soutenu que le Gouvernement a voulu consacrer aux secteurs du logement et des transports.
Quelle que soit la présentation des chiffres que l'on retienne - nous y reviendrons précisément en abordant les sections budgétaires spécialisées - chacun reconnaît que ce ministère, pris dans son ensemble, reçoit pour l'année 2000 des moyens importants et que son enveloppe budgétaire progresse.
Ces moyens permettent la mise en oeuvre des grandes priorités que le Gouvernement s'est fixées, M. Vezinhet l'a rappelé.
Il s'agit de la solidarité, notamment par la relance du logement social et l'effort en faveur des transports collectifs ; il s'agit de l'emploi, notamment par les encouragements fiscaux à l'activité du bâtiment ; il s'agit de l'investissement, avec une hausse significative des autorisations de programme ; il s'agit encore de la sécurité, qu'elle soit routière, aérienne ou maritime, car c'est la responsabilité éminente de l'Etat de la garantir ; il s'agit, enfin, du rééquilibrage des modes de transport, qui se décline dans ce budget comme dans les contrats de plan.
Les crédits budgétaires s'élèvent à 147 milliards de francs si l'on y inclut le budget annexe de l'aviation civile et les comptes d'affectation spéciale, à savoir le fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien, le FIATA, et le fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, le FITTVN. L'augmentation est de 2,5 % par rapport à 1999, alors que le taux de progression moyen de l'ensemble des dépenses de l'Etat est de 0,9 %.
On peut aussi parler d'un total de 165 milliards de francs si l'on prend en compte les 12 milliards de francs de dotation en capital à Réseau ferré de France, les crédits issus du FARIF, ce fonds pour l'aménagement de la région d'Ile-de-France qu'il est prévu de rebudgétiser, et enfin les crédits ajoutés à l'Assemblée nationale par voie d'amendements pour les ajustements entre régimes de retraite et compensation de la TVA sur les subventions à Réseau ferré de France. Voilà pour les grandes masses.
En termes d'emplois budgétaires, nous avons pu, cette année encore, poursuivre dans la voie de 1999 et continuer à freiner la réduction des effectifs. Je sais bien que certains d'entre vous le regrettent, notamment M. le rapporteur spécial.
Sur les services communs de l'équipement, cette réduction sera limitée à 385 emplois. Je n'ai eu de cesse, depuis ma prise de fonctions, de réduire le rythme annuel des 1 000 suppressions d'emploi prévues antérieurement. Ces ponctions répétées se sont traduites, je le rappelle, par la suppression de 16 000 emplois en quinze ans dans le secteur de l'équipement.
En ce qui concerne les agents d'exploitation, qui ont supporté le plus grand nombre de suppressions d'emplois, le rythme de réduction aura été divisé par quatre en trois ans, ce qui permettra, en 2000, de ne pas diminuer les effectifs d'exploitation et d'entretien dans la vingtaine de départements où les problèmes de viabilité hivernale sont les plus aigus ainsi que dans les départements sinistrés par les inondations.
Sur l'ensemble des secteurs de ce ministère, la réduction des emplois n'est plus que de 0,18 %, compte tenu des créations nettes dans la navigation aérienne.
Le budget des services communs s'élève à 24,5 milliards de francs pour l'an prochain, ce qui représente une progression de 5,6 % par rapport à l'an dernier.
Comme l'a signalé M. le rapporteur spécial, les rémunérations accessoires des agents du ministère de l'équipement seront réintégrées dans le budget général, à la suite des observations de la Cour des comptes. Je me félicite également de cette évolution, qui favorisera la lisibilité des crédits et des moyens consacrés aux dépenses de personnel et pérennisera le régime indemnitaire des agents concernés.
A propos du taux de progression des dépenses de personnel, qui sera de 2,1 % pour 2000 et dont le Sénat... je veux dire la majorité sénatoriale...
M. Gérard Cornu. Bien entendu !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... regrette la rigidité, je voudrais faire deux remarques.
Premièrement, le ministère de l'équipement a la particularité de comporter une part importante d'agents à petit salaire, que ce soit dans le secteur de l'exploitation ou dans celui de l'administration, qui connaît une proportion d'agents de la catégorie C très supérieure à la moyenne.
Il est donc normal que les conséquences de l'accord salarial de la fonction publique, qui profite principalement aux petites catégories, se fasse sentir sur le budget 2000, comme cela a d'ailleurs été le cas en 1999.
Je suis convaincu, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous n'y êtes pas, au fond, hostiles. Il y a là, en effet, un effort de justice sociale totalement justifié envers des agents auxquels on demande beaucoup et dont le sens du service public est irréprochable.
Deuxièmement, les agents sont la force du ministère et la condition des services rendus au pays. Le personnel est donc non pas une rigidité, mais bien le fondement et la chance du service public.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne pense pas qu'il y ait un seul d'entre vous pour mettre en doute le rôle que jouent les services déconcentrés du ministère de l'équipement pour répondre aux défis économiques, sociaux, techniques de la mise en oeuvre des nouvelles politiques territoriales, ni leur capacité à prêter assistance aux collectivités locales dans un très grand nombre de domaines, et ce au plus près des besoins des citoyens.
Je veux insister ici sur la qualité du travail de ces agents, qui a été une nouvelle foi démontrée à l'occasion des tragiques inondations du Midi.
Je tiens enfin à réaffirmer la solidarité du Gouvernement tout entier devant les attaques dont ils font parfois l'objet, et m'élever une nouvelle fois contre l'attentat odieux qui a visé la direction départementale de l'équipement de la Corse-du-Sud et d'autres établissements publics.
La commission des finances évoque par ailleurs les choix à faire pour doter l'Institut géographique national, l'IGN, de moyens d'équipement performants et de ressources propres renforcées.
Je dois souligner, monsieur Pelletier, que l'équipement de l'IGN est de bon niveau, avec, de surcroît, un personnel d'une grande compétence. Il est exact cependant qu'il faut rechercher pour l'Institut une meilleure adéquation entre les moyens et les missions ainsi qu'une adaptation de ses produits, notamment dans les bases de données géographiques à grande échelle.
Il y a aussi le domaine très prometteur des systèmes d'information géographiques dans lequel l'IGN est appelé à se développer. Le rapport que M. Guy Lengagne a récemment remis au Gouvernement contribuera à éclairer la réflexion engagée dans ce sens avec l'IGN.
Ce matin, Mme Demessine vous a présenté nos orientations et le détail des crédits proposés pour le tourisme.
Comme en 1999, les crédits progresseront en 2000 de 7 %.
En trois exercices budgétaires, ils seront ainsi passés de 340 millions de francs à un peu plus de 420 millions de francs, et ce pour permettre à l'Etat de mieux jouer son rôle de régulation et d'impulsion dans cet important secteur d'activité. Comme Mme Demessine, je suis particulièrement attaché à ce que soient prises en compte tant la dimension aménagement du territoire que la dimension sociale de se secteur, qu'il s'agisse du droit aux vacances pour tous ou de l'amélioration du travail saisonnier.
Depuis deux ans, l'urbanisme et le logement sont une dimension essentielle de l'action gouvernementale, ce qui tranche avec la politique menée précédemment.
Plusieurs sénateurs du RPR. Oh non !
M. Gérard Cornu. Vous êtes sévère, et même injuste !
Mme Hélène Luc. Non, c'est vrai !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Franchement, je ne pense pas être sévère, je crois même être modéré.
Mme Hélène Luc. Objectif !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je vais vous dire pourquoi.
L'intervention de l'Etat en matière de logement est capitale pour la vie quotidienne des Français, notamment pour les plus modestes d'entre eux. L'enveloppe budgétaire proposée pour 2000 est de 48 milliards de francs, en hausse de 5,3 %, compte tenu de la budgétisation du prêt à taux zéro. Elle permettra de confirmer notre politique dans deux directions.
Il s'agit, d'abord, de la relance significative de la construction de logements sociaux, en particulier grâce au prêt locatif à usage social, le PLUS.
Ce nouveau prêt a pour objet, à côté d'autres dispositifs, de nous aider à relever ensemble le défi de la mixité sociale. La stabilisation à 3 milliards de francs des dotations budgétaires au parc d'HLM s'accompagne d'un allègement important des charges financières et fiscales pour les organismes, ce qui permet notamment le gel des loyers sur deux ans, auquel, à notre demande, s'est engagé le mouvement HLM.
Une autre orientation affirmée tient au financement de la lutte contre les exclusions. La loi que vous avez adoptée voilà un an est désormais appliquée et financée. Je citerai l'exemple du Fonds de solidarité pour le logement, cofinancé avec les conseils généraux, pour lesquels l'effort de l'Etat augmente de 50 % en deux ans, ou encore celui des nouveaux moyens dégagés pour prévenir le saturnisme.
La principale ligne du budget du logement - M. Besson vous en parlera plus en détail dans quelques instants - celle qui concerne les aides personnelles au logement, dont bénéficie la population la moins aisée, sera dotée de 34,3 milliards de francs.
Je peux vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que le pouvoir d'achat des aides à la personne sera maintenu grâce à l'actualisation régulière des barèmes.
Face à ces dépenses, au budget du logement proprement dit s'ajoutent 28 milliards de francs d'allégements fiscaux : il s'agit de la baisse de la TVA sur les travaux d'amélioration et d'entretien des logements, de la réduction des droits de mutation et de la suppression en deux ans du droit de bail, qui doit se traduire - et cela est assez exceptionnel - par une baisse des loyers, dans le privé comme dans le public.
Cette dernière mesure, que le Premier ministre a acceptée sur ma proposition, aura - et il faut y veiller - une traduction directe sur la quittance des locataires qui, au total, bénéficieront d'un allégement de charge de 7 milliards de francs. Ces dispositions fiscales, d'une ampleur importante, voire sans précédent, et c'est en ce sens que je parlais de rupture, renforceront donc de façon considérable l'impact social du budget du logement, ainsi que ses effets sur l'emploi dans le secteur du bâtiment.
Dans ce domaine, se pose un important problème d'adéquation entre les offres d'emplois et l'embauche. Je travaille actuellement - et je crois l'avoir déjà dit devant le Sénat - avec les professionnels et le service public pour que, en cas de demandes d'emplois importantes, nous appliquions aux intéressés, jeunes et moins jeunes, la formule suivante : « Si tu sais, on te prend ; si tu ne sais pas, on t'apprend. » En tout cas, on crée les conditions pour que ceux qui veulent travailler aient une activité, qu'ils puissent répondre aux demandes de personnels des entreprises.
En ce qui concerne l'équipement et les transports, je ne traiterai, à ce point du débat, que de l'investissement et de l'emploi.
Le volume des engagements que le Gouvernement vient d'annoncer pour les prochains contrats de plan Etat-région est une chance pour l'équipement et l'économie du pays.
Si l'on me dit que ce qui est fait n'est pas suffisant et qu'il convient de faire davantage, je partagerai cette opinion. Mais, par comparaison avec les réalisations du XIe Plan, les enveloppes sont multipliées par 10 pour le transport ferroviaire - hors TGV - par 4 pour les ports et par 8 pour les voies navigables. En raison du rééquilibrage d'ensemble entre les différents modes de transport, l'enveloppe pour les routes ne croît pas dans les mêmes proportions ; elle augmente tout de même de plus de 30 %.
La croissance de l'activité des entreprises du bâtiment et des travaux publics sera, en 1999 et en l'an 2000, supérieure à celle de l'économie française. Après les 30 000 créations nettes d'emplois en 1999, le bâtiment continuera à embaucher. En effet, on s'attend à la création de plusieurs dizaines de milliers d'emplois l'an prochain. Les travaux publics retrouvent le chemin de la croissance après plusieurs années particulièrement difficiles.
Certes, il reste beaucoup à faire, et on connaît le drame que représentent les 2 600 000 chômeurs ; mais cette relance de l'activité, y compris dans les transports, génère des situations nouvelles. Ainsi, à la suite de la signature d'un accord signé par les partenaires sociaux, la SNCF connaîtra dans les trois ans, pour la première fois depuis plusieurs décennies, un solde positif de ses effectifs, avec l'embauche de 25 000 cheminots.
Mme Hélène Luc. C'est un événement !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. L'application des 35 heures se traduira par des milliers de créations d'emplois à Air France, alors que l'on avait dénombré 9 000 suppressions d'emplois entre 1993 et 1997. Cela permettra à la compagnie nationale d'accompagner sa démarche de conquête et de reconquête des marchés après les années difficiles qu'elle a connues.
Il en va de même dans les transports en commun. On assiste aujourd'hui à une relance de l'activité, y compris en région parisienne. Les moyens sont plus importants pour développer les transports collectifs. A la RATP, par exemple, nous avons, là encore, une croissance de l'activité et de l'emploi.
Mon ministère est celui de la vie quotidienne, c'est d'ailleurs ce qui fait tout son intérêt.
Ce rôle sera encore élargi - vous avez évoqué ce point, monsieur Vezinhet - dans le cadre de la préparation du projet de loi sur la rénovation et la solidarité urbaines, dont le titre n'est pas encore défini mais que certains appellent la LOVES, la loi d'orientation pour des villes plus équilibrées et plus solidaires. Ce texte, qui sera présenté prochainement au Parlement et que M. le Premier ministre m'a demandé de mener à bien pour le premier semestre de l'an prochain, est très important.
Dans quel esprit abordons-nous ces questions ?
Nous devons retrouver une vision globale de l'urbanisme, de l'habitat et des déplacements. Il faut mettre en place des outils et des procédures permettant de mener des politiques plus cohérentes, au lieu de politiques sectorielles qui s'ajoutent les unes aux autres, comme ce fut le cas dans les périodes passées. En effet, si ces politiques sectorielles ont obtenu des résultats, elles ont aussi généré de nombreuses complications et certains cloisonnement.
Dans le cadre de ce texte, s'agissant de la SNCF, nous proposerons un dispositif de transfert aux régions des services régionaux de transport de voyageurs, qui permettra de transformer la dynamique que nous constatons dans les régions en cours d'expérimentation et de faire le lien entre agglomération et ruralité, urbanisme et ruralité.
Toutes ces orientations devraient converger vers le mieux-être des hommes et des femmes. C'est le sens profond de notre engagement pour qu'un mieux-vivre se développe dans le logement, la ville, les territoires, les transports et l'environnement, car notre société l'exige à l'aube du troisième millénaire.
Comme vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons devant nous de très grands chantiers à mener à bien. Le projet de budget de l'équipement, des transports et du logement que nous vous proposons pour l'an 2000 permettra d'avancer dans cette direction. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d'abord de remercier MM. Pelletier et Bellanger, remplacé aujourd'hui par Mme Boyer, comme MM. Plancade et Bimbenet, qui, en qualité de rapporteurs, vous ont présenté les grandes orientations et les principaux chiffres du projet de budget du logement et de l'urbanisme pour 2000.
Comme chaque année, la qualité de leurs rapports et de leurs exposés me facilite la tâche et me permet de limiter mon propos à l'essentiel, tout en m'efforçant d'apporter des réponses à quelques questions qui m'ont été posées par les intervenants. J'ajoute que j'ai pris note de nombreuses de leurs suggestions, dont je remercie les auteurs, même si le temps qui m'est imparti ne me permettra pas de leur faire écho.
Comme vient de le dire M. Jean-Claude Gayssot, ce projet de budget montre que le logement et l'urbanisme restent bien une priorité centrale de l'action du Gouvernement, comme ils le sont depuis deux ans et demi, avec les nombreuses réformes de structure que nous avons menées à bien, et qui vont très au-delà des simples moyens budgétaires mis en place par les lois de finances successives, même si, bien sûr, celles-ci sont importantes.
Cette priorité s'est traduite notamment par l'ensemble des mesures mises en place en juillet dernier en faveur du logement social et des habitants, qu'il s'agisse des allégements très importants des charges financières des organismes d'HLM, du financement amélioré pour les nouvelles opérations avec le prêt locatif à usage social et du gel des loyers pour les années 2000 et 2001 en faveur des locataires du parc HLM, comme vient de le rappeler M. Gayssot. Priorité maintenue également à travers les instruments que nous avons mis en place en 1998, instruments pérennes destinés à prendre la suite de dispositifs qui avaient été voulus conjoncturels et, de ce fait, dont l'avenir n'était pas assuré. Je pense, notamment, au nouveau statut du bailleur privé, qui accorde à l'investisseur dans la pierre le bénéfice d'avantages fiscaux, mais en contrepartie d'engagements sociaux en direction du locataire, et c'est là que nous trouvons la légitimité du dispositif.
Sur ce sujet, monsieur Cornu, nous avons souhaité proposer des dispositifs simples, notamment dans les zonages, afin de garder une bonne lisibilité. Votre réflexion sur la définition des agglomérations ne manque pas de pertinence et mérite sûrement d'être approfondie, même s'il faut savoir que l'Institut national de la statistique et des études économiques est rattaché à un ministère qui est forcément très vigilant s'agissant des dépenses induites par des modifications d'appréciation de certaines situations urbaines.
S'agissant de la disparition de l'amortissement Périssol, vos regrets, monsieur le sénateur, s'adressent d'abord au gouvernement précédent. En effet, celui-ci avait proposé au Parlement de ne le mettre en place que pour deux ans. Le Gouvernement actuel, soucieux de soutenir la croissance, a pris la décision, que je crois sage, de le proroger huit mois, ce « tuilage » permettant au nouveau dispositif de se mettre en place complètement. Donc, le Gouvernement a plutôt la responsabilité de l'avoir prorogé que de l'avoir interrompu.
M. André Vezinhet. Qui se sent morveux se mouche !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Cela étant, vous savez très bien que le dispositif antérieur ouvrait les mêmes avantages fiscaux que le loyer soit de 120 francs le mètre carré, comme c'était le cas à Paris, ou de 40 francs le mètre carré, comme c'était le cas dans des petites villes.
Etait-il logique d'ouvrir droit à des avantages fiscaux alors que la rentabilité par le loyer était déjà largement assurée ? Bref, ce que nous souhaitions, c'était une autre logique. Elle a été mise en place. Nous pourrons y revenir.
Il me semble que les professionnels s'approprient ce dispositif. Cela nous donne à espérer qu'il fonctionnera bien.
J'indique à Mme Terrade que nous ne pourrons pas, avec ce système, avoir l'équivalent de réservations préfectorales. En effet, les investisseurs procèdent à des investissements quasi individuels. En revanche, avec le dispositif que M. Jean-Claude Gayssot et moi-même avons signé avec les collecteurs du 1 %, il y a maintenant possibilité d'intervention de ces derniers, en plein accord avec les partenaires sociaux, unanimes sur ce point.
En contrepartie, il y aura des réservations pour les salariés des entreprises cotisantes.
Ce dispositif s'installe de manière pérenne dans la politique globale du logement. Nous ne sommes absolument plus dans la logique et l'approche conjoncturelles que nous avons connues pendant de nombreuses années.
Vous avez évoqué les noms qui sont donnés aux différents dispositifs. Comme vous le savez, il n'y avait pas de « loi Périssol », il n'y a pas de « loi Besson ». Dans les deux cas, il y a un article de loi de finances. Si les professionnels recourent de manière habituelle à ce type d'appellations, c'est par commodité, pour faciliter leur communication. Je ne suis pour rien dans cette pratique, et je serais le premier à me réjouir si elle cessait. Vous savez que, là, nous sommes emportés dans une spirale et des développements difficilement maîtrisables.
Puisque j'évoquais les dispositifs pérennes, je veux, bien sûr, après le statut du bailleur privé, mentionner la rebudgétisation des coûts de l'accession sociale à la propriété, dont je me plais à souligner le caractère pérenne auprès des nombreux sénateurs qui s'inquiétaient de ce qui allait se passer après les deux années de prélèvement sur la collecte du 1 %. Je pense que vous vous en réjouirez tous.
Je veux mentionner la refondation de la politique d'emploi des fonds du « 1 % logement » réalisée par la convention du 3 août 1998, que Jean-Claude Gayssot et moi-même avons signée avec l'Union d'économie sociale du logement.
Elle permet tout à la fois de restituer aux financements « classiques » du 1 % les capacités qui lui étaient nécessaires pour poursuivre ses interventions classiques, pour retrouver toutes capacités d'action dans le domaine du logement locatif social et, enfin, pour s'adapter aux nouvelles conditions de vie et de logement des salariés compte tenu de la mobilité accrue que nous observons et de la nécessité de mettre en place des garanties plus étendues.
Il existe à cet égard de nouveaux produits. Une campagne de communication a été lancée voilà exactement un mois qui, selon nos informations, a rencontré un véritable écho, notamment auprès des jeunes, puisque, parmi ces nouveaux produits, figure le paiement de la caution que nombre d'entre eux n'arrivaient pas à réunir.
Comme vous l'avez souligné, le budget pour 2000 prolonge les efforts des deux budgets précédents. Je ne reprendrai pas les chiffres puisqu'ils ont été cités par les rapporteurs et repris à l'instant par M. Gayssot.
L'an dernier, nombreux avaient été ceux - notamment MM. Plancade, Cléach, Lassourd et Vezinhet - qui avaient exprimé une préoccupation forte relative au logement social. Ils avaient fait part d'inquiétudes que nous partagions quant à la capacité des différents acteurs à mobiliser les crédits de construction et de réhabilitation que l'Etat mettait à leur disposition.
Il est parfaitement vrai que, dans ce secteur du bâtiment et de l'immobilier, qui connaît actuellement une situation très favorable - et je remercie M. Pelletier de l'avoir rappelé d'emblée - le développement de l'offre HLM n'est pas à la hauteur de nos attentes ni des demandes de nos concitoyens.
On a enregistré environ 320 000 logements mis en chantier en 1999, 40 000 à 50 000 investissements dans le logement locatif privé, plus de 110 000 accessions à la propriété aidées par un prêt à taux zéro, mais seulement 51 500 nouveaux logements locatifs sociaux en 1998 et un nombre sans doute équivalent en 1999.
Certes - et c'est important -, l'acquisition-amélioration progresse de 20 % à la fin du mois d'octobre 1999 par rapport au même mois de 1998. Nous y voyons l'effet des mesures prises, notamment l'exonération de quinze ans de taxe foncière bâtie. Mais la construction neuve d'HLM reste insuffisante.
Dans ce budget 2000 et pour ce parc d'HLM, les dotations budgétaires pour financer les travaux de construction et de réhabilitation s'élèvent à 2 930 millions de francs.
Cette stabilité des moyens est cependant à replacer dans un contexte qui nous paraît créer les conditions de cette relance que nous attendons tous.
Il s'agit, d'abord, des baisses de charges de remboursements d'emprunts annoncées en deux étapes, le 23 avril, puis le 21 juillet dernier. Ces mesures vont représenter un allégement global de l'ordre de 45 milliards de francs, en cumulé sur la durée des prêts restant à rembourser, avec un effet dès le 1er janvier 2000 qui correspond à un allégement estimé à deux milliards de francs.
Il s'agit également de l'extension du bénéfice de la TVA à taux réduit à l'ensemble des travaux des organismes, y compris l'entretien courant. Cette seule baisse de TVA étendue à l'entretien courant représente 1,4 milliard de francs, dont une large part sera répercutée au bénéfice des locataires comme baisse des charges récupérables.
Il s'agit, enfin, pour les nouveaux prêts distribués, les prêts PLUS, les prêts locatifs à usage social, opérationnels depuis septembre, d'une amélioration sensible, du financement avec, à la fois, la baisse de leur taux, ramené à 3,45 %, et un allongement à cinquante ans de la durée de remboursement des prêts relatifs à l'achat du foncier ou de l'immeuble dans le cas d'acquisition-amélioration, ce qui vient, bien sûr, en réduire la charge.
J'ajoute que le retour de l'aide à la pierre, associé à des dispositions tendant à favoriser une meilleure mixité sociale, aidera à la diversification du peuplement, programme par programme, dès leur mise en service. Vous constatez que, sur ce point, nombre de vos suggestions, mesdames, messieurs les sénateurs, ont été prises en compte.
Plusieurs d'entre vous ont soulevé le problème de l'accessibilité de ce prêt PLUS aux communes. Sachez qu'un décret élargissant aux opérations des communes le champ du prêt locatif à usage social à l'occasion de l'acquisition-amélioration a été préparé par le secrétariat d'Etat au logement et va être incessamment soumis à la discussion interministérielle.
Cet élargissement devrait trouver sa pleine application, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs - tout particulièrement M. Joly qui y insistait voilà un instant - dans les zones rurales, et contribuer à la vitalité des centres-bourgs.
Ces mesures nous ont conduits, vous le savez, à demander un effort au profit des locataires, avec le gel des loyers sur les deux prochaines années, que l'Union des fédérations des organismes HLM s'est engagée à mettre en oeuvre.
Nous avons pensé, en effet, qu'il ne serait pas normal que les locataires ne puissent bénéficier, eux aussi, des conséquences positives de la baisse des taux d'intérêt. Nous avons adressé sur ce point, madame Terrade, une circulaire très précise aux préfets les invitant à suivre la bonne mise en oeuvre de cette mesure et à nous en rendre compte.
Ce contexte nous permet également de savoir que ces organismes vont bénéficier de capacités financières accrues, de même que les partenaires du 1 %, pour relancer la construction du logement social, dont je confirme qu'elle est bien notre priorité, comme elle est la vôtre.
Pour ce qui nous concerne, nous pensons avoir levé les obstacles, notamment financiers, qui nous avaient été opposés pour expliquer, à défaut de justifier, l'insuffisance de la construction d'HLM. Il reste dans bien des cas à mobiliser la volonté politique.
Du côté de l'Etat, vous en trouverez la trace dans le projet de loi qui vous sera présenté dans quelques mois et qui proposera de renforcer les dispositifs de la loi d'orientation sur la ville, dont le bilan, j'en suis d'accord avec M. Vezinhet, est insuffisant.
Bien évidemment, le logement des personnes les plus démunies est une préoccupation prioritaire, qui a trouvé sa traduction dans le volet « logement » de la loi relative à la lutte contre les exclusions.
La quasi-totalité des dispositions de cette loi est aujourd'hui opérationnelle, même si je vous concède, monsieur Bimbenet, que les choses bougent sans doute plus lentement sur le terrain. A ce jour, dix-sept décrets, cinq arrêtés et neuf circulaires sont parus. Vous avez pu l'observer, de nombreuses mesures de cette loi trouvent une traduction budgétaire, déjà présente dans le budget pour 1999, elle est renforcée dans ce projet de loi de finances.
C'est notamment le cas des Fonds de solidarité pour le logement, les FSL, qui ont quasiment doublé en trois ans, passant de 270 millions de francs à 507 millions de francs en 2000. Je vous remercie, madame Terrade, d'avoir bien voulu noter que la complète utilisation de ces moyens témoigne de leur caractère nécessaire.
C'est aussi le cas de la lutte contre le saturnisme, que vous avez évoquée. A ce propos, M. le rapporteur spécial m'a interrogé sur l'inscription de ces crédits sur le titre III. Je suis heureux de lui annoncer que cette disposition a fait l'objet d'un accord du contrôle financier. Elle ne posera pas de problèmes car les travaux considérés sont assimilables à de l'entretien léger.
C'est également le cas de la nouvelle aide à la médiation locative. Les conventions par lesquelles elle se met en place sont progressivement signées dans les départements.
Monsieur Cléach, concernant le logement des plus défavorisés, nous avons lancé dernièrement un plan de développement des résidences sociales, qui constituent une réponse intermédiaire entre l'hébergement d'urgence pour quelques jours et la réinsertion dans un logement de droit commun. Il s'agit là de relancer une circulaire de 1995 qui me semble bien répondre à vos observations.
Quant aux aides personnelles au logement, elles seront à nouveau actualisées au 1er juillet prochain, comme vient de le confirmer M. Gayssot. En dépit de l'évolution des sommes inscrites, dont la comparaison de loi de finances initiale à loi de finances initiale peut il est vrai, donner l'impression qu'elles sont en légère baisse, les crédits inscrits pour l'an 2000 seront supérieurs à ce qui sera effectivement consommé en 1999.
Par ailleurs, nous avons lancé, à la demande du Premier ministre, lors de la conférence de la famille du 7 juillet dernier, un vaste chantier de réforme de ces aides au logement que vous appelez tous de vos voeux, dans le sens d'une plus grande justice, d'une simplification des barèmes et d'un meilleur encouragement à la reprise d'une activité professionnelle, ainsi que le souhaitait M. Pelletier. C'est bien le sens que nous donnons aux travaux qui sont conduits.
Sur le calendrier, madame Terrade, le Premier ministre nous a demandé de lui soumettre des propositions pour la prochaine conférence de la famille. Cette dernière se tenant toujours avant l'été, nous les formulerons dans les prochains mois.
Le projet de loi sur l'accueil des gens du voyage, qui a été voté en première lecture par l'Assemblée nationale et que vous examinerez bientôt, a permis l'intégration de quelques éléments financiers dès cette loi de finances : notamment 50 millions de francs pour faire face au doublement de la subvention de l'Etat aux investissements, qui passe de 35 % à 70 %, et 25 millions de francs pour l'aide au fonctionnement des aires existantes.
Contrairement à ce qui a pu parfois être dit, le parc privé n'est nullement sacrifié.
Comme M. Vezinhet l'a fort bien fait observer, non seulement les moyens sont maintenus, mais la baisse de la TVA de 20,6 % à 5,5 % a été, non pas un prétexte à diminuer les subventions, mais un moyen d'aider intégralement de facto le parc privé.
Je voudrais confirmer à M. le rapporteur spécial, M. Pelletier, que, quelle que soit son appellation définitive, le projet de loi « urbanisme, habitat et déplacements » proposera de regrouper au sein d'une ANAH reconfigurée, élargie, la gestion des aides à l'habitat privé, dans un souci d'harmonisation particulièrement souhaitable dans le cas des copropriétés, notamment des copropriétés dégradées.
Je confirme sur ce point à M. Vezinhet que le même texte consacrera des dispositions allant dans le sens des suggestions qu'il a formulées.
S'agissant du prêt à taux zéro, vous avez toutes les données ; je n'y reviens donc pas. Sont confirmées les mêmes possibilités de financement que les deux dernières années.
M. le rapporteur spécial se demande cependant si les crédits pour 2000 seront suffisants. Bien évidemment, personne ne peut prévoir avec exactitude l'évolution des taux d'intérêt l'an prochain. Je peux cependant lui dire que nous avons pu observer des effets contraires de variation des taux : quand les taux baissent, le coût de chaque prêt diminue, mais le nombre d'accédants qui en bénéficient augmente ; s'ils venaient à remonter - ce que nous ne souhaitons pas - il est probable qu'un certain nombre d'acheteurs potentiels seraient amenés à renoncer à leur projet, car, je le rappelle, le prêt à taux zéro ne peut financer que 20 % maximum du prix de l'acquisition. Cet effet en limiterait, bien sûr, l'impact budgétaire.
Dans le même mouvement, les différents rapporteurs m'invitent tous à élargir le champ du prêt à taux zéro dans l'ancien. L'idée est évidemment intéressante.
L'expérience de 1996 a eu un coût, je l'indique, de 1,3 milliard de francs ; la reprendre aurait donc nécessité de dégager des moyens d'un même montant. Par ailleurs, vous le savez - M. Plancade l'a souligné - la baisse de la TVA aura l'effet d'une aide sensiblement équivalente.
J'ajoute, s'agissant de l'accession dans l'ancien, que la baisse des droits de mutation vient, bien évidemment, alléger le coût des opérations.
Je dirai quelques mots, enfin, sur les interventions en matière d'urbanisme. Nous souhaitons poursuivre, en 2000, le développement des grandes opérations d'aménagement et d'urbanisme, telles que Euroméditerranée à Marseille, et y ajouter les nouveaux projets de la Plaine de France, pour laquelle une mission de préfiguration a été mise en place, et de Nanterre, sur l'axe qui va de la Grande Arche à la Seine.
Par ailleurs, nous accompagnons la phase de retour progressif au droit commun des villes nouvelles. Nous maintenons également notre aide aux agences d'urbanisme, avec une dotation de 58 millions de francs, et aux professions de l'aménagement.
Dans ce domaine décentralisé, c'est sans doute moins par des crédits budgétaires que par la fixation du cadre juridique et réglementaire au sein duquel les collectivités agissent qu'intervient l'Etat.
Ce sera l'un des volets importants du projet de loi sur l'habitat, l'urbanisme et les déplacements, que j'ai déjà cité, projet auquel nous travaillons avec Jean-Claude Gayssot et qui vous sera présenté au début de l'année prochaine, illustrant la volonté du Gouvernement de dégager les moyens en faveur du renouvellement urbain, dont la nécessité a été soulignée par M. Cléach.
Madame Boyer, vous pourrez confirmer à M. Bellanger que les textes qu'il attend avancent. Deux décrets relatifs à la zone des cinquante pas géométriques dans les DOM sont en instance de parution. En ce qui concerne les DTA, leur élaboration n'a commencé en 1995 que pour la première ; d'autres ont été décidées ensuite, mais il est vrai que le cheminement est lent. Enfin, la loi que je viens d'évoquer devrait donner satisfaction à M. Bellanger sur la relance des schémas directeurs, à travers une mise en cohérence d'outils aujourd'hui séparés, sur le rôle des cartes communales, qu'a évoqué M. Arnaud, particulièrement dans les petites communes rurales, sujet de préoccupation de MM. Bimbenet et Joly, ainsi que sur le renforcement de la sécurité juridique des documents d'urbanisme.
Mais le projet de budget du logement pour 2000, ce ne sont pas seulement des dépenses, ce sont aussi des allégements considérables de la fiscalité du logement et de l'immobilier,...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Absolument !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. ... sur lesquels je reviendrai brièvement, même si je vous en ai fait part au fil de mon propos, pour que vous mesuriez leur cohérence avec les dépenses budgétaires, et même si vous les avez déjà, pour la plupart, votés en première partie de cette loi de finances.
Depuis trop longtemps, dans notre pays, on constate une forte imposition du logement. Or, celui-ci est devenu le premier poste de dépenses dans le budget des ménages au cours des dernières années.
Mme Odette Terrade. Absolument !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Evidemment, l'immobilier est facile à taxer, puisqu'il ne peut pas être dissimulé et qu'il n'est pas mobile, comme d'autres formes de placement. C'était donc peut-être trop tentant.
Il fallait, en tout cas, revoir cette situation, et c'est bien ce qui est fait, au travers de ce projet de budget, avec la profonde inflexion qui vous est proposée.
Je reviendrai d'un mot sur le droit de bail. Sa suppression, à laquelle Jean-Claude Gayssot a apporté toute sa détermination, est une véritable petite révolution. Vous savez en effet que les droits de ce type existent dans notre pays depuis une loi du 22 primaire an VII, c'est-à-dire depuis novembre 1798, ce qui explique sans doute que plus personne ne sache très bien à quoi cela correspondait ni par quoi cela se justifiait.
Cette suppression va se traduire, pour la première fois, par une baisse des quittances des locataires dans le parc d'HLM, puisqu'elle s'ajoutera au gel des loyers. J'appelle votre attention sur le fait qu'il s'agit de 2,5 % du loyer brut, ce qui veut dire que, pour les locataires les plus modestes, dont le loyer réel est minoré, grâce, par exemple, à l'APL, ce sera beaucoup plus : 10 %, 12 %, voire 15 % pour certains. L'effet sera donc très sensible dès la première quittance de l'an 2000.
Globalement, sur deux ans, ce sont 7 milliards de francs que l'Etat renonce à percevoir pour son budget.
La baisse du taux de TVA sur les travaux d'amélioration, d'aménagement et d'entretien des logements a été suffisamment commentée pour que je n'y revienne pas, si ce n'est pour confirmer que le Gouvernement vient d'annoncer des mesures de simplification pour l'application de la disposition : dans les cas où plus de 50 % de la copropriété est affectée au logement, il n'y a plus d'hésitation sur le calcul de la TVA applicable aux parties communes. L'affaire était en effet un peu complexe là où il y avait non seulement des logements mais aussi des locaux professionnels ou commerciaux.
Nous attendons, bien sûr, de cette mesure, outre les 20 milliards de francs d'allégement fiscal qu'elle entraîne une diminution du travail clandestin et une relance de l'emploi dans le secteur, dont la bonne santé actuelle ne doit pas faiblir dans la durée.
Cet effet sur l'emploi sera d'ailleurs démultiplié au-delà des entreprises du bâtiment, en particulier pour les entreprises industrielles de production qui fournissent ces dernières en matériaux divers. Sur ce sujet comme sur d'autres, les mesures prises ont une vocation pérenne ; elles ne participent plus de cette logique de mesures conjoncturelles longtemps suivie dans le passé.
Nous serons vigilants, monsieur Plancade, à la bonne répercussion de cette mesure au bénéfice des ménages. Je crois cependant que les professionnels du secteur, en l'occurrence les dirigeant de leurs organisations nationales, ont compris quil était de leur propre intérêt que cette expérimentation réussisse s'ils voulaient qu'elle devienne définitive dans trois ans, avec l'acquiescement de Bruxelles.
Les premières constatations du ministère de l'économie et des finances, rendues publiques à l'occasion de la parution de l'indice des prix du mois d'octobre dernier, vont dans le bon sens, puisqu'une large majorité des entreprises, exactement 92 % d'entre elles, appliquent bien la baisse des prix TTC.
Le projet de loi de finances pour 2000 étend aussi - c'est important pour le secteur locatif privé - le régime simplifié d'imposition des revenus fonciers appelé « microfoncier », institué par la loi de finances de 1999. Il s'agit d'une des nombreuses mesures fiscales de simplification que compte ce budget, et qui profitera aux petits propriétaires. L'abattement forfaitaire est porté de 30 % à 40 % et le plafond d'application de ce régime « microfoncier » est doublé, passant de 30 000 francs à 60 000 francs, ce qui fait qu'il couvre tous les loyers perçus inférieurs à 5 000 francs par mois. Inutile de dire que l'immense majorité des bailleurs privés sont concernés !
Le mouvement de baisse des droits de mutation, appelés improprement « frais de notaire », se poursuit, comme vous le savez. Nous sommes désormais, avec 4,8 % dans tous les départements, dans la moyenne européenne. Nous ne doutons pas que la fluidité du marché immobilier et la mobilité géographique des Français en seront facilitées.
Enfin, le projet de budget pour 2000 prévoit également, dans son article 61, que vous n'avez pas encore examiné, un report de six mois de la date limite d'achèvement des travaux pour les chantiers engagés sous l'ancien régime d'amortissement. Cela devrait permettre d'éviter des tensions pour les entreprises du bâtiment d'ici à la fin de l'an 2000, notamment sur le second oeuvre, tensions que l'on commençait à observer avec le grand nombre de mises en chantier actuel et qui se produisaient d'ailleurs souvent au détriment des prix de la construction de logements sociaux.
Au total, vous le voyez, ce projet de budget pour 2000 poursuit la rénovation globale de la politique du logement à laquelle nous travaillons depuis un peu plus de deux ans maintenant avec Jean-Claude Gayssot et que nous souhaitons, bien entendu, consolider et prolonger avec l'aide du Parlement.
Voilà pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de vos propos d'encouragement et, par avance, de l'approbation que vous voudrez bien apporter à ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Mme et MM. les rapporteurs applaudissent également.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant les services communs, l'urbanisme et le logement, inscrits à la ligne « Equipement, transport et logement », seront mis aux voix aujourd'hui, à la suite de l'examen des crédits affectés à la mer.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 1 201 471 218 francs. »