Séance du 3 décembre 1999







M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant l'équipement, les transports et le logement : I. - Services communs et II. - Urbanisme et logement.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je vais être conduit à vous présenter successivement deux rapports portant, l'un, sur les services communs, l'autre, sur le logement.
Je commencerai donc par les services communs.
Les crédits du fascicule « Services communs » du ministère de l'équipement, des transports et du logement s'élèvent à 24,5 milliards de francs pour 2000, soit une progression de 5,6 % par rapport à 1999.
Cette importante progression est trompeuse, car elle est en grande partie le résultat de la réintégration des recettes des missions d'ingénierie publique au sein du budget général de l'Etat, pour un montant total de 948 millions de francs.
Une présentation des crédits à structure constante montre que le budget des services communs progresse, en réalité, de 1,4 % en moyens de paiement pour 2000.
Les dépenses ordinaires, c'est-à-dire les crédits de personnel et de fonctionnement du ministère de l'équipement, représentent 99,3 % du budget des services communs. Les personnels sont à 96 % dans les services déconcentrés.
Je note que le ministère de l'équipement, des transports et du logement réalise encore un effort de réduction de ses effectifs pour 2000, mais moindre que les années précédentes.
En 1999, en effet, le ministère de l'équipement, des transports et du logement avait procédé à la suppression de 490 postes. Pour 2000, l'effort de compression des effectifs sera moins important, puisqu'il portera sur 385 emplois.
Le souci de ne pas porter atteinte à certaines actions, notamment l'entretien des routes, est louable mais, il faut le rappeler, le ministère doit également utiliser ses possibilités de redéploiements en faveur des actions qu'il juge prioritaires. Sans compter, mes chers collègues, que si la Commission européenne interdit aux directions de l'équipement de travailler pour les collectivités locales, ce qui représente à peu près 15 % de leur activité, il faudra reclasser des personnels.
Par ailleurs, les mesures statutaires concernant les personnels auront un impact budgétaire, puisque les rémunérations progresseront de 2,1 %.
Cette augmentation s'explique par l'application de l'accord salarial de la fonction publique pour les corps de catégorie C et par la nécessité d'un « rattrapage » pour l'application du protocole Durafour en ce qui concerne les personnels de catégorie B.
A l'inverse des dépenses de rémunérations, les crédits de fonctionnement du ministère seront réduits de l'ordre de 3 %.
Le coût des rémunérations progresse donc plus rapidement que les crédits du budget de l'Etat - 2,1 % contre 0,9 % - si bien que l'effort budgétaire porte non pas sur le personnel, mais sur les moyens d'action du ministère.
Ma deuxième observation découle de l'examen de la gestion des années précédentes et du projet de loi de finances pour 2000 : il est devenu impératif de clarifier la présentation budgétaire des crédits des services communs.
Le projet de loi de finances pour 2000 est marqué par une clarification importante puisque son article 25 vise à intégrer les recettes des missions d'ingénierie publique au budget des services communs.
La réintégration de ces sommes s'accompagnera d'un dispositif destiné à maintenir aux agents des droits constants. Les indemnités concernent 25 000 agents, soit un quart des agents du ministère de l'équipement, des transports et du logement. Les critères de répartition des recettes d'ingénierie publique étaient fonction du grade, mais aussi de la situation géographique des agents - avec une « prime » pour les départements les moins attractifs - et de leur service. Ces critères devraient être maintenus.
Je me félicite de cette clarification budgétaire, qui parachève le mouvement de rapatriement au sein du budget de l'Etat de dépenses permanentes.
Cependant, de nouvelles clarifications budgétaires seraient bienvenues.
En effet, les très nombreux transferts internes de crédits nuisent à l'analyse du budget des services communs : ce budget compte cette année pas moins de dix transferts internes et dix-huit transferts entre sections, sans qu'il soit possible de connaître précisément les articles budgétaires affectés par ces transferts. Dans ces conditions, une analyse détaillée des crédits est impossible, et l'information du Parlement peut être considérée comme insuffisante.
D'importants transferts d'emplois et de crédits ont lieu en cours de gestion.
Selon le rapport du contrôleur financier, l'effectif autorisé par la loi de finances de 1998 aura été dépassé de 2 080 emplois par transferts. Pour 1999, de nombreux transferts ont déjà eu lieu, portant au total sur 4 583 emplois.
Je souhaite, autant que possible, que les crédits de rémunération des personnels gérés par l'administration centrale du ministère de l'équipement figurent au budget des services communs lorsque ces personnels font partie du ministère.
En conclusion, la commission des finances, à la majorité, propose au Sénat de rejeter l'ensemble des crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement pour 2000.
J'en viens au deuxième rapport que je dois vous présenter et qui concerne le logement.
L'examen du budget du logement pour 2000 se déroule dans un contexte un peu particulier, marqué par une certaine euphorie, avec une reprise du marché de l'immobilier et une croissance du secteur de la construction.
Tous les indicateurs montrent que 1999 sera une année exceptionnelle pour l'immobilier, et nous nous en réjouissons. Selon les prévisions du secrétariat d'Etat au logement, le secteur de la construction devrait croître de 4 % en 2000 et créer plusieurs dizaines de milliers d'emplois.
L'examen du budget du logement ne saurait donc faire abstraction de ces considérations.
Pour 2000, le budget de l'urbanisme et du logement progresse de 6 %, pour s'établir à 48,2 milliards de francs.
Toutefois, la clôture de deux comptes d'affectation spéciale, le Fonds pour l'aménagement de l'Ile-de-France et le Fonds pour le financement de l'accession à la propriété, entraîne la réintégration d'importantes masses de crédits.
Ainsi, à structure constante, le budget de l'urbanisme et du logement diminue en réalité de 2,3 %, la baisse étant nettement plus accentuée pour les dépenses en capital, 7 %, que pour les dépenses ordinaires, 0,5 %.
Cette diminution s'explique à la fois par la croissance économique, qui conduit à diminuer les concours aux aides personnelles, et par la nécessaire contrepartie des aides fiscales très significatives accordées cette année au secteur du logement. L'effort en faveur du logement - aides budgétaires et fiscales - est donc globalement très important pour 2000.
Le projet de budget du logement pour 2000 prend en compte, pour la première fois, l'amélioration de la situation économique, et je m'en félicite.
Ainsi, les crédits destinés aux aides personnelles sont réduits de 284 millions de francs pour l'année 2000. Cette mesure d'« ajustement aux besoins » était indispensable, puisque le maintien d'une dotation élevée s'était accompagnée en 1998 comme en 1999 d'importantes annulations de crédits en cours d'année. La décision du Gouvernement conforte la position du Sénat, qui avait adopté une réduction de crédits ciblés de 500 millions de francs lors du vote de la loi de finances pour 1999. Il s'agit donc d'une opération de vérité budgétaire qu'il faut saluer.
Le budget de l'urbanisme et du logement bénéficiera également de la diminution du coût du crédit, et donc de la diminution du coût du prêt sans intérêt, qui passe de 6,3 milliards de francs en 1999 à 5,8 milliards de francs en 2000, pour financer un nombre de prêts équivalent - environ 110 000. Il est toutefois difficile de savoir si cette dotation sera suffisante. En effet, la croissance économique accentue le nombre d'accédants à la propriété, et les taux d'intérêt ont tendance à se relever. Il convient donc que le Gouvernement, qui a accepté de dénouer le lien entre le versement des organismes du 1 % logement et la dotation au prêt à taux zéro, fasse les efforts nécessaires pour maintenir une dotation adéquate et ne cherche pas, par voie réglementaire, à en réduire la portée.
S'agissant de crédits d'investissement, destinés à aider les ménages modestes à accéder à la propriété, je pense qu'il conviendrait plutôt de profiter de la réduction du coût moyen du prêt à taux zéro pour 2000 pour en élargir le champ. Je rappelle que l'expérience de 1996, année au cours de laquelle le prêt à taux zéro avait été ouvert aux logements nécessitant au moins 20 % de travaux, au lieu des 35 % habituellement requis, sur l'initiative du Sénat, avait permis de faire bénéficier 30 000 ménages supplémentaires de ce dispositif d'accession à la propriété. En tout état de cause, un soutien au prêt à taux zéro permettrait d'apporter un rééquilibrage supplémentaire pour les aides à la pierre par rapport aux aides à la personne.
Hormis la diminution de la TVA pour les travaux dans les logements privés, la grande réforme en matière de logement concerne, cette année, le logement social.
La principale mesure a été l'allégement de la dette du secteur HLM en vertu de la décision ministérielle du 23 avril 1999, qui porte sur 114 milliards de francs d'encours, et conduira, à terme, à un allégement de 20 milliards de francs pour le secteur HLM.
L'encours de la dette supporte désormais un taux de 3,8 %, contre 4,3 % initialement. La diminution de 0,75 % du taux du livret A, à compter du 1er août 1999, a permis d'abaisser le coût de l'ensemble des opérations des organismes sociaux. Cet abaissement du coût de la ressource, de nature à améliorer la construction de logements sociaux, était préconisé par la commission des finances du Sénat depuis de nombreux mois.
Toutefois, il faut noter que des efforts restent encore à faire, et il apparaît que des négociations pourraient être engagées afin de voir si le coût de rémunération de la collecte, qui représente 1,2 % de l'encours pour les caisses d'épargne et 1,5 % pour La Poste, ne pourrait pas être abaissé.
Ensuite, un décret du 14 septembre 1999 a substitué un prêt locatif unique, le PLUS, au PLA ordinaire et au PLA à loyer minoré.
Il bénéficie d'une subvention de 5 % dans le neuf et de 10 % dans l'ancien, et d'un prêt de la Caisse des dépôts et consignations à 3,45 %.
La mise en place du PLUS répond à la fois au souhait de développer la mixité sociale et à la nécessité de faire baisser les loyers des opérations neuves et des opérations d'acquisition-amélioration.
J'espère que ce nouveau produit, plus simple, pourra enfin redonner du souffle à la construction sociale. Cependant, il apparaît que les collectivités locales et leurs groupements en seraient exclus : je souhaite que vous puissiez nous donner des assurances sur leur inclusion prochaine dans ce dispositif.
S'agissant du logement privé, la réduction de la TVA sur les travaux dans les logements devrait représenter un coût fiscal d'environ 12 milliards de francs en régime de croisière et favoriser le développement du secteur de la réhabilitation, tout en luttant contre le travail au noir. Le logement social, qui bénéficiait déjà d'un dispositif de récupération de la TVA s'apparentant à une TVA à taux réduit - mécanisme de la livraison à soi-même - bénéficiera d'une extension de ce mécanisme aux travaux d'entretien. Enfin, la réduction des droits de mutation sur les logements d'habitation permettra un allégement de la fiscalité de 4,6 milliards de francs.
En définitive, ces mesures auront un effet significatif sur les aides au logement pour 2000. Les aides fiscales devraient représenter 32 % des aides au logement en 2000, contre 24 % auparavant.
Sur les autres points, le budget du logement pour 2000 est un budget de continuité. Il aurait toutefois pu être l'occasion d'une réflexion sur un certain nombre de sujets.
En ce qui concerne les aides budgétaires au logement privé, le budget pour 2000 ne comporte pas de modifications significatives. La réforme d'importance a été l'abaissement du taux de TVA sur les travaux dans les logements à usage d'habitation.
La mise en oeuvre d'une mesure fiscale aussi significative devrait s'accompagner d'une réflexion sur les aides budgétaires au logement privé, afin d'aboutir à une simplification. Or, pour l'instant, ce n'est pas le cas. Le secrétariat d'Etat au logement relève pourtant « les insuffisances des procédures comptables de gestion de l'ANAH, l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, et de la prime à l'amélioration de l'habitat, la PAH, notamment au regard des observations de la Cour des comptes ».
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous annoncez que le futur projet de loi sur l'urbanisme, l'habitat et les déplacements constituera le cadre de la mise en oeuvre d'une réforme tendant à l'unification des interventions financières sur le parc privé. La réforme visera à « regrouper, auprès d'un seul organisme public, dont la vocation serait élargie à l'ensemble du parc privé, les outils et moyens financiers existants ». Je souhaiterais que vous nous apportiez, si vous le pouvez, des précisions sur cette réforme en cours de préparation.
Au sein des aides au logement figurent les aides à la réhabilitation des logements les plus dégradés.
A ce titre, il faut remarquer que 75 millions de francs de dotations nouvelles seront apportés pour la lutte contre le saturnisme.
Concernant la lutte contre l'habitat insalubre, un rapport de Mme Bouché, inspectrice générale de l'équipement, propose des réformes afin de mieux prendre en compte les situations d'insalubrité. Je suis sûr que le prochain projet de loi sur l'urbanisme, l'habitat et les déplacements comportera des mesures adaptées à l'urgence des situations décrites dans ce rapport.
En matière de sécurisation de l'accession à la propriété, malgré le faible taux de sinistres des prêts à l'accession sociale, la dotation de l'Etat au fonds de garantie de l'accession sociale est revalorisée de 125 millions de francs. Il s'agit d'une augmentation mécanique prenant en compte l'augmentation attendue des prêts à l'accession sociale, ce qui ne reflète en rien les risques couverts.
Les discussions entamées entre le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, le secrétariat d'Etat au logement et les établissements prêteurs, contributeurs avec l'Etat au fonds de garantie de l'accession sociale, le FGAS, sur une réduction de leurs cotisations, ont échoué. Un succès aurait pourtant permis de réduire les dotations de l'Etat.
En ce qui concerne les aides à la personne, un groupe de travail entre l'Etat et la Caisse nationale des allocations familiales a été mis en place voilà environ un an et demi.
Cependant, à ce jour, aucune réforme d'envergure n'est encore engagée.
Chacun reconnaît pourtant que le dispositif des aides au logement comporte de nombreuses insuffisances, notamment au regard de l'appréciation des ressources des bénéficiaires et de la neutralité des aides.
D'une manière générale, il apparaît essentiel que soit tiré profit de l'amélioration de la situation économique pour engager une réforme substantielle des aides au logement, afin, notamment, d'inciter à la reprise de l'activité professionnelle.
Il apparaît également à la suite des observations de la Cour des comptes, qu'il serait souhaitable de simplifier le mécanisme de financement des aides, qui comprend aujourd'hui trois fonds distincts qui s'alimentent mutuellement. Les frais de gestion versés aux caisses d'allocations familiales et de mutualité sociale agricole, 2 % ou 4 % suivant l'aide versée, semblent élevés. L'absence de négociation sur ces frais contraste avec les efforts demandés aux collecteurs du 1 % logement, qui ont dû réduire progressivement leurs frais de gestion.
Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous apportiez quelques précisions s'agissant de vos intentions sur la réforme des aides au logement, leur financement et les coûts de gestion, ainsi que, éventuellement, sur le calendrier de mise en oeuvre des réformes que vous souhaitez.
Le budget du logement pour 2000 est un bon budget. Il présente certains aspects positifs, au premier rang desquels des opérations vérité sur les crédits de chapitres budgétaires traditionnellement surdotés.
Je ferai toutefois trois observations.
D'abord, il apparaît regrettable que les économies sur le budget du logement soient plus visibles sur la partie investissement que sur le chapitre fonctionnement. En effet, les crédits d'aide à l'accession sociale diminueront de 500 millions de francs en 2000, contre une baisse de moins de 300 millions de francs pour les aides personnelles.
Ensuite, la principale mesure concernant la construction sociale, à savoir la mise en place d'un produit unique, le PLUS, traduit un changement d'orientation par rapport aux réformes introduites en 1997, qui consistaient précisément à différencier les produits offerts aux organismes d'HLM. L'échec de la relance de la construction sociale depuis deux ans semble expliquer ce retour à un produit simple et unique, censé connaître dans l'avenir plus de succès, mais qui doit encore faire ses preuves. Pour que ce produit soit un succès, il faut toutefois au moins qu'il soit ouvert aux collectivités locales ; c'est très important.
Enfin, chacun observe que, pour l'an 2000, le Gouvernement consentira des efforts fiscaux importants en faveur du logement. Cette politique a des vertus, notamment celle de soutenir l'activité de l'immobilier. Cependant, il convient également de préparer l'avenir, c'est-à-dire des jours moins favorables, et de profiter de la bonne conjoncture économique actuelle pour entamer des réformes importantes, par exemple en ce qui concerne les aides personnelles qui, rappelons-le, représentent 73 % des crédits du budget du logement.
En conclusion, je vous indique que j'ai donné personnellement un avis favorable à l'adoption des crédits de l'urbanisme et du logement pour 2000.
Je regrette beaucoup que le Gouvernement ait demandé un seul vote sur l'ensemble du budget de l'équipement, des transports et du logement. La commission des finances, à la majorité, a en effet décidé de rejeter cet ensemble, alors que le budget du logement, qui est un bon budget, ne méritait pas un tel sort et qu'un vote positif aurait été possible si nous avions pu voter sur chaque fascicule budgétaire.
M. le président. La parole est à Mme Boyer, rapporteur pour avis.
Mme Yolande Boyer, en remplacement de M. Jacques Bellanger, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour l'urbanisme. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, notre collègue Jacques Bellanger étant empêché, il me revient de présenter devant vous les crédits demandés au titre de la politique de l'urbanisme.
Permettez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, de noter que la présentation du fascicule budgétaire qui leur est consacré demeure assez difficile à « décrypter ». Les modifications qui apparaissent invariablement chaque année privent les agrégats de toute espèce de signification. Je constate, toutefois, que les crédits de fonctionnement traduisent parfois une stabilisation, voire au pire, une diminution.
Les principales priorités du budget de l'urbanisme n'ont pas varié depuis l'an passé. Le soutien aux agences d'urbanisme, les grandes opérations, telles qu'Euroméditerranée, ou l'élaboration des directions territoriales d'aménagement, les DTA, sont toujours d'actualité. S'y ajoutent des aides spécifiques aux syndicats d'agglomérations nouvelles et la reconduction des crédits du secrétariat général du groupe central des grandes opérations d'urbanisme.
Bien qu'ils ne relèvent plus, depuis trois ans, du budget du ministère de l'équipement, les modestes crédits consacrés au conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement ne sont pas suffisants, et je le regrette.
Comme chaque année, la commission des affaires économiques a dressé un état de l'application des textes que nous avons adoptés.
La commission souhaite que les décrets ayant trait à la loi du 30 mars 1999, relative à la responsabilité en matière de dommages miniers, adoptée grâce au Sénat, et ceux qui concernent la loi n° 96-1241, relative à l'aménagement de la zone des cinquante pas géométriques dans les départements d'outre-mer, soient publiés dès que possible.
Nous attendions aussi, depuis deux ans, le décret relatif à la commission régionale du patrimoine et des sites, chargée de statuer en appel des décisions des architectes des Bâtiments de France. Il est paru le 5 février dernier. La commission des affaires économiques regrette que la place réservée aux élus locaux dans cette nouvelle instance n'ait pas été accrue par rapport à celle qu'ils tenaient dans les anciennes commissions régionales du patrimoine historique et ethnologique.
Venons-en au contentieux de l'urbanisme, dont vous serez heureux d'apprendre, mes chers collègues, qu'il est stabilisé, tant en ce qui concerne les décisions prises par l'Etat qu'en matière de contrôle de légalité. Comme nous le réclamions depuis quatre ans, un suivi statistique informatisé des dossiers est maintenant en place, même s'il ne recense pas les actes pris au nom des collectivités locales, omission qu'il conviendra de corriger.
Les crédits budgétaires destinés aux collectivités locales au titre de la compensation des transferts de compétence en matière d'urbanisme croissent toujours au même rythme que la dotation globale de fonctionnement, la DGF, et consistent en deux dotations, l'une destinée à l'élaboration des documents d'urbanisme, l'autre tendant à compenser les charges résultant de la nécessité de souscrire des contrats d'assurance pour les communes qui délivrent les autorisations d'utilisation du sol.
Venons-en au panorama « contrasté » que présentent les documents d'urbanisme.
Les directives territoriales d'aménagement sont toujours en cours d'élaboration depuis 1995. Nous savons la complexité de cet exercice. Un tel délai pose cependant problème pour la poursuite d'une politique d'aménagement du territoire cohérente.
Les schémas directeurs sont toujours trop peu nombreux : seuls 219 sont actuellement approuvés. Les plans d'occupation des sols demeurent, quant à eux, toujours aussi instables : plus d'un tiers sont en révision. Cette situation rend d'autant plus nécessaire d'envisager les conditions dans lesquelles on pourrait généraliser le système, plus souple, des cartes communales.
Au demeurant, le dépôt, en l'an 2000, du projet de loi portant diverses dispositions en matière d'urbanisme, de transport et de logement, fournira l'occasion de mettre cette question sur le métier. Un certain nombre de points seront accueillis avec intérêt par notre commission, par exemple, des précisions sur le contrôle par le préfet des règles de procédures, la suppression de certaines procédures inutilement complexes, un plus grand rôle reconnu aux cartes communales.
La commission des affaires économiques souhaite également que cette loi prenne en compte l'existence des espaces périurbains, aux problèmes spécifiques desquels elle doit proposer des solutions innovantes.
Permettez-moi d'ajouter, en conclusion, que, alors que son rapporteur pour avis lui proposait d'émettre un avis favorable, la commission des affaires économiques s'en est remise à la sagesse du Sénat pour l'adoption des crédits de l'urbanisme inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - MM. les rapporteurs applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Plancade, rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour le logement. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, dans le projet de loi de finances pour 2000, les moyens d'engagement en faveur du seul logement s'élèvent à 48 milliards de francs, soit une légère baisse de 1,26 %. Mais cette baisse n'affecte en aucune façon les actions du secrétariat d'Etat ; l'effort en matière de logement est maintenu, comme le démontrent les documents budgétaires qui nous ont été remis.
Il s'agit d'une baisse purement mécanique liée à l'amélioration de la conjoncture économique, deux phénomènes se conjuguant : la diminution du taux d'intérêt, qui profite directement au budget de l'Etat et se traduit forcément par la diminution des dotations affectées au prêt à taux zéro ; la croissance, qui fait qu'un certain nombre de foyers ne sont plus éligibles aux crédits d'aide à la personne parce que leurs revenus sont supérieurs aux critères définis. Peut-être, d'ailleurs, faudra-t-il s'interroger sur les conditions d'attribution de ces prêts ?
Sur ce budget, dont la commission des affaires économiques a approuvé les grandes orientations, je souhaite faire quelques observations.
S'agissant de la consolidation de l'effort budgétaire en faveur du logement privé, je me félicite de ce que le financement de l'accession sociale à la propriété soit confirmé, avec la budgétisation totale des ressources du prêt à taux zéro, comme vous vous y étiez engagé, monsieur le secrétaire d'Etat.
De plus, la baisse des taux sur les prêts immobiliers permet de faire baisser le coût de ce prêt, et l'enveloppe budgétaire passe de 6,16 milliards de francs à 5,8 milliards de francs pour financer un nombre de prêts équivalents, soit environ 110 000.
Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d'Etat, les membres de la commission des affaires économiques ont estimé que le Gouvernement pourrait utiliser ces marges budgétaires pour élargir le champ du prêt à taux zéro, en réitérant l'expérience de 1996 - mon éminent collègue, M. Pelletier, y a fait illusion - année où la quotité de travaux exigible pour bénéficier du prêt dans l'ancien avait été abaissée à 20 %, au lieu de 35 %. Cela pourrait concerner 30 000 ménages supplémentaires, pour un coût estimé à 1,8 milliard de francs.
Je note, cependant, que l'application du taux réduit de TVA sur les travaux réalisés dans un logement contribue déjà à abaisser le coût d'une opération réalisée dans l'ancien et financée par un prêt à taux zéro.
Cette mesure fiscale générale portant sur la réduction de la TVA sur les travaux d'amélioration et d'entretien dans les logements représente un coût fiscal de près de 20 milliards de francs pour 2000. Elle devrait favoriser le secteur de la réhabilitation et encourager la création d'emplois. C'est d'ailleurs principalement sur ce point que la mesure, accordée pour trois ans par la Commission européenne, fera l'objet d'une évaluation, ce qui constitue un véritable défi pour les professionnels de ce secteur.
Il faudra donc veiller à ce que cette baisse fiscale ne se traduise pas par une augmentation des prix qui ne serait pas justifiée, même si l'on peut accepter l'idée que certaines entreprises ont besoin de refaire leur trésorerie, mise à mal ces dernières années. Sinon, les effets positifs attendus de cette mesure en matière de soutien à l'activité, à l'emploi et à la lutte contre le travail au noir seraient réduits à peu de chose et nous serions contraints, alors, dans trois ans, de revenir à l'ancien taux de TVA. Il s'agit donc bien d'un vrai challenge pour nos entreprises.
Sur le problème spécifique de l'application de ce taux réduit aux travaux réalisés dans les parties communes des immeubles collectifs, la réponse récente du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, que vous avez bien voulu me communiquer, simplifie effectivement le mode de calcul de la TVA et la répartition des travaux lorsque la copropriété comprend également des lots à usage professionnel. Cette mesure était très attendue par les professionnels de l'immobilier.
En ce qui concerne la priorité confirmée pour le logement social, le Gouvernement cherche à relancer la construction de logements sociaux, en forte diminution depuis 1994. En 1999, l'objectif physique affiché portait sur 80 000 logements construits, mais à peine 51 000 ont été réalisés. La même tendance se confirme pour 2000.
Je sais, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il s'agit là d'un problème difficile. J'avais déjà attiré votre attention, à cette même occasion, l'année dernière, en suggérant l'idée d'un groupe de travail avec l'Etat, les collectivités locales et les bailleurs sociaux.
Je sais également que les responsabilités sont partagées : un produit, le PLA, qui n'est plus attractif, des collectivités locales qui parfois « rechignent » à faire du logement social et des bailleurs sociaux certainement un peu timorés.
Je sais également que vous avez le souci de changer les choses. D'ailleurs, l'ensemble des mesures fiscales concernant l'allégement de l'encours de la dette des HLM, ainsi que la mise en place d'un nouveau produit, appelé prêt locatif à usage social, ou PLUS, qui va se substituer au PLA et au PLA à loyer minoré, en sont la preuve. Ce prêt associe un prêt à 3,45 % à une subvention de 5 % ou 10 % ainsi qu'au bénéfice d'un taux de TVA à 5,5 %.
Lors de votre audition devant la commission, monsieur le secrétaire d'Etat, j'avais attiré votre attention sur l'impossibilité, pour les collectivités locales, d'accéder à ce nouveau prêt, ce qui aurait pour conséquence d'exclure, notamment en milieu rural, celles qui souhaitent s'engager dans des petites opérations de logements sociaux. Je souhaiterais que vous me confirmiez que cette restriction devrait être rapidement aménagée afin que les collectivités qui voudraient conduire des opérations d'acquisition-amélioration puissent en bénéficier.
L'intérêt de ce prêt est de favoriser la mixité à travers un produit unique puisque, sur une opération, 30 % des ménages devront avoir des ressources inférieures à 60 % des plafonds de ressources PLA et 10 % pourront avoir des ressources supérieures à 120 % du plafond.
Cette mesure, qui traduit la volonté de mixité sociale qui anime ce gouvernement, en particulier, et les acteurs du logement, en général, est à saluer, mais plusieurs membres de la commission des affaires économiques et moi-même nous interrogeons sur l'hypothétique réalisation de l'équilibre financier d'une opération effectuée avec un PLUS si l'on ne trouve pas 10 % de locataires ayant des ressources supérieures à 120 % du plafond, notamment dans les quartiers très dégradés en ville ou dans les zones les moins urbanisées.
En conclusion, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il faut se féliciter de la forte croissance de l'effort public total en faveur du logement, qui passe de 165 milliards à 192 milliards de francs. L'essentiel du rééquilibrage se fait au profit des aides fiscales, qui devraient représenter 32 % des aides au logement en 2000.
Compte tenu de ces observations, la commission des affaires économiques s'est déclarée favorable à l'adoption des crédits budgétaires consacrés au logement pour 2000. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyens. - M. le rapporteur spécial applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Bimbenet, rapporteur pour avis.
M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales et pour le logement social. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, compte tenu du temps de parole alloué à la commission des affaires sociales, bien court pour un sujet d'une telle ampleur, je consacrerai mon propos aux quatre points qui me paraissent prioritaires : la situation, toujours très préoccupante, du logement social, les difficultés de la lutte contre l'exclusion du logement, les aides personnelles, la situation délicate du logement intermédiaire.
La crise de la construction de logements sociaux se confirme, même si la diminution continue des mises en chantier semble avoir atteint un plancher, d'après les premiers chiffres disponibles pour 1999. Alors qu'en 1971 140 000 logements sociaux avaient été mis en chantier, ils n'ont été que 44 000 en 1998.
Certes, le Gouvernement a annoncé, en juillet dernier, une réforme significative des conditions de financement du logement social. Les précédents orateurs en ont décrit les principales mesures. J'observe, à ce propos, que ces mesures correspondent très largement aux propositions de la commission des affaires sociales, qui s'était prononcée, l'an passé, en faveur d'une diminution du coût de la ressource et de la dette, et d'une simplification des aides. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
Toutefois, il est à craindre que ces mesures restent insuffisantes pour permettre la relance de la construction de logements locatifs sociaux.
Pour être efficace, la réforme en cours doit être consolidée sur trois points.
En premier lieu, il est indispensable de revenir sur certaines insuffisances du prêt locatif à usage social.
D'une part, les collectivités locales, en l'état actuel de la réglementation, n'auront pas accès à ce prêt, ce qui ne sera pas sans poser de problèmes, notamment pour les montages de petites opérations de logement social en milieu rural.
D'autre part, il n'est pas sûr que la mise en place de ce prêt règle définitivement la question de l'équilibre financier des opérations de construction. Déjà, le contexte a évolué. On constate depuis quelques mois un nombre accru d'appels d'offres infructueux, soit que les entreprises n'y répondent pas, soit que les prix du bâtiment aient très significativement augmenté. En outre, le fait de retenir pour les loyers 90 % des loyers plafonds antérieurs rendra l'équilibre plus difficile à atteindre.
En second lieu, il serait nécessaire de renforcer la décentralisation en matière de logement social. Il importe d'introduire plus de souplesse, alors que les contraintes en matière de programmation imposées par l'administration, notamment en termes de mixité sociale, demeurent fortes.
En dernier lieu, il me semble souhaitable de revoir la fiscalité locale applicable aux logements sociaux. En l'absence de révision des valeurs locatives cadastrales, les locataires et les organismes d'HLM doivent s'acquitter d'impôts locaux supérieurs à ceux qui seraient normalement exigibles si l'on prenait en compte l'état actuel du parc. Cette situation est particulièrement dommageable, tant pour les locataires qui, par définition, possèdent des ressources modestes, que pour les organismes dont on connaît les difficultés financières.
J'en viens maintenant au logement des personnes les plus défavorisées.
La situation est toujours aussi difficile. L'exclusion par le logement persiste, alors même que se développe un véritable « marché des taudis », comme l'a montré un récent rapport.
Dans ce contexte, votre projet de budget, monsieur le secrétaire d'Etat, marque le pas. Les crédits consacrés au logement des personnes les plus démunies n'augmentent que faiblement. Or, c'est sans doute en 2000 que le volet « logement » de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions commencera à s'appliquer pleinement. Sur le terrain, les résultats concrets sont encore loin d'être évidents. Comme l'observe la fondation Abbé Pierre, « un an après le vote de la loi, l'état d'avancée de son application est difficilement décryptable et les effets de sa mise en oeuvre sont imperceptibles. (...) Les associations impliquées dans l'insertion par le logement sont peu à peu gagnées par le scepticisme ».
Un tel constat ne peut qu'inquiéter la commission des affaires sociales. Nous aurions alors souhaité un budget un peu plus ambitieux en ce domaine.
S'agissant des aides personnelles, la légère diminution de la contribution de l'Etat s'explique à la fois par l'amélioration du contexte économique et par une rationalisation des inscriptions budgétaires, les crédits inscrits étant loin d'être consommés.
Cette moindre pression budgétaire aurait pu être l'occasion d'une réforme des aides à la personne. On sait en effet que ces aides, même si elles sont un moyen de solvabilisation souvent indispensable pour l'accès au logement des familles, souffrent de certains dysfonctionnements. C'est un système complexe dont les barèmes ne sont pas harmonisés. C'est un système qui n'est pas toujours équitable, car, pour des charges de logement, des ressources et des situations familiales identiques, les ménages peuvent toucher des aides d'un montant différent. C'est également un système qui n'a pas toujours fait la preuve de son efficacité sociale. Ainsi, les « taux d'effort » des ménages continuent à augmenter et les aides peuvent être versées dans le « marché des taudis ».
Dans ce contexte, la commission des affaires sociales donne acte au Gouvernement de la poursuite du mouvement d'actualisation des barèmes, mais regrette qu'il n'ait pas choisi de se lancer dans une réforme plus profonde.
Je terminerai cette intervention en évoquant la situation du logement intermédiaire, secteur auquel la commission des affaires sociales prête une attention toute particulière.
Une frange importante des ménages à revenus moyens - souvent de jeunes ménages - est exclue du parc social, mais rencontre parallèlement des difficultés d'accès au logement locatif privé. Les loyers du marché libre sont souvent trop élevés pour eux.
Or, malgré ces difficultés, on ne peut que constater l'essoufflement continu du prêt locatif intermédiaire. Il serait alors nécessaire de revoir ce type de prêt, qui paraît désormais largement inadapté, avec un taux d'intérêt de 5,5%.
L'action en faveur du logement intermédiaire pourrait également se faire par un élargissement du prêt à taux zéro à l'immobilier ancien. A cet égard, la commission des affaires sociales considère que la quotité de travaux nécessaire pour bénéficier du prêt à taux zéro dans l'immobilier ancien pourrait être ramenée de 35 % à 20 % du coût total de l'opération.
Au total, la commission des affaires sociales ne peut porter qu'un jugement pour le moins très nuancé sur ce projet de budget. Certes, la diminution des crédits ne remettra pas en cause la réalisation des programmes ; certes, ce projet de budget comporte quelques mesures nouvelles positives, notamment en faveur du parc privé. Mais, comme je crois l'avoir montré, il n'apporte pas de réponse à un certain nombre de lacunes de la politique du logement.
Aussi, la commission des affaires sociales a décidé de s'en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée pour l'adoption des crédits consacrés au logement social. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 20 minutes ;
Groupe socialiste, 10 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 14 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 26 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 14 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 13 minutes ;
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud. Monsieur le secrétaire d'Etat, notre collègue Pierre Hérisson, qui devait intervenir ce matin, est retenu dans son département ; je le remplacerai donc pour donner le point de vue du groupe de l'Union centriste sur les crédits concernant l'urbanisme.
Chacun s'accorde à reconnaître que le droit de l'urbanisme est l'un des plus techniques, l'un des plus complexes. Il n'assure, hélas ! que bien imparfaitement la sécurité juridique des personnes. En outre, dix-sept ans après le vote des lois de décentralisation, la gestion des documents d'urbanisme et celle des autorisations de construire n'est pas encore totalement confiée aux collectivités locales. Parallèlement, l'Etat ne poursuit pas, me semble-t-il, une politique de l'urbanisme suffisamment active.
Au vu de ces éléments préoccupants et en prévision de la discussion du projet de loi relatif à la modernisation de l'urbanisme, aux déplacements et à l'habitat, la commission des affaires économiques a crée un groupe de travail, dont Pierre Hérisson est le président et Louis Althapé, le rapporteur.
Monsieur le secrétaire d'Etat, notre premier sujet de préoccupation concerne les documents d'urbanisme. Quel est l'état d'avancement des directives territoriales d'aménagement, dont le régime a été édicté par la loi n° 95-115 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ? En théorie, ces directives sont destinées à mette en oeuvre de façon fine les lois « littoral » et « montagne ». On nous annonce régulièrement le lancement de nouvelles directives sans que, pour le moment, l'on ait jamais vu aboutir le résultat des travaux menés sur les premières depuis quatre ans. Au train où vont les choses, je crains que ces documents ne soient périmés quand ils entreront en vigueur.
Ne conviendrait-il pas également d'encourager l'élaboration de plans d'occupation des sols ? Le budget annuel total des petites communes étant bien souvent inférieur au coût unitaire d'un POS, il est urgent de mettre au point un document de planification allégé. Les cartes communales ne constituent-elles pas, sous réserve de quelques améliorations techniques, le véhicule réglementaire de nature à résoudre ce problème ? J'observe cependant que leur nombre est encore bien trop limité.
D'un point de vue plus général, monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaiterais savoir si vous envisagez d'aider financièrement les collectivités locales à traiter par elles-mêmes les demandes de permis de construire. Tous les observateurs s'accordent à reconnaître qu'il n'est pas souhaitable que les services déconcentrés du ministère de l'équipement soient à la fois les conseillers des communes et les contrôleurs de la légalité de leurs actes. Or - je vous le rappelle - 60 % des décisions prises dans le cadre de la procédure décentralisée de délivrance du permis de construire restent formellement instruites par les services de l'Etat mis à disposition gratuitement. Encore faudrait-il également transférer les moyens financiers nécessaires aux communes !
J'en viens aux questions relatives à l'application de la loi « montagne ». Parmi nous, chacun se félicite des acquis obtenus grâce à ce texte. La protection de l'environnement montagnard et des espaces agricoles a puissamment bénéficié de son adoption. Nul ne songe aujourd'hui à revenir en arrière.
Cependant, nous savons tous que l'application restrictive de la règle de constructibilité limitée pose des problèmes spécifiques en zone de montagne. Sur ce point, nous sommes désireux, quelles que soient nos affinités politiques - je pense ici aux réflexions de notre collègue Michel Teston - que le Gouvernement trouve des solutions appropriées afin de permettre de revitaliser ou d'assurer le développement des zones montagnardes, notamment de certaines vallées enclavées. Ce qui vaut spécifiquement pour la montagne est également valable pour le milieu rural.
Permettez-moi également de dire un mot des problèmes posés par la difficile et longue mise en oeuvre de la loi n° 97-179 du 28 février 1997 relative à l'instruction des autorisations de travaux dans le champ de visibilité des édifices classés ou inscrits et dans les secteurs sauvegardés. J'observe qu'il a fallu deux ans de tractations - sans doute difficiles ! - pour parvenir à élaborer le décret paru le 5 février 1999 relatif à la commission régionale du patrimoine et des sites, qui permet enfin aux maires de faire appel de l'avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France.
Hélas ! monsieur le secrétaire d'Etat, que n'avez-vous respecté l'esprit dans lequel le législateur a élaboré la loi de 1997 ! A quoi sert-il d'avoir créé une nouvelle commission si la proportion des membres détenant un mandat électif local n'y est pas plus importante que celle qu'elle était naguère, au sein de la commission régionale du patrimoine historique, archéologique et ethnologique, la COREPHAE ? Quelle crainte le Gouvernement nourrissait-il à ce sujet, puisque, en dernière analyse, c'est le préfet qui peut seul passer outre l'avis de l'architecte des Bâtiments de France ?
Loin de moi l'idée de vouloir limiter les pouvoirs des architectes des Bâtiments de France, qui jouent, comme nous le savons tous, un rôle essentiel pour la protection du patrimoine et de l'esthétique urbaine et rurale. Cependant, pourquoi marquer une telle défiance face à l'avis des représentants élus au suffrage universel ?
On dit souvent que le droit de l'urbanisme est caractérisé par un contentieux que d'aucuns qualifient de « pathologique ». Si j'en crois les dernières statistiques disponibles, les délais de jugement s'allongent. Le Gouvernement entend-il prendre des mesures afin de permettre que justice soit rendue dans un délai raisonnable ? Que comptez-vous faire, monsieur le secrétaire d'Etat, pour limiter les recours abusifs et réitérés dont certains de nos concitoyens se sont fait une spécialité, profitant du très large intérêt pour agir que leur reconnaît notre droit ?
L'annonce du projet de loi relatif à la modernisation de l'urbanisme a suscité un grand espoir chez les élus locaux. Quand nous présenterez-vous ce texte, qui ne saurait décevoir les attentes qu'il a fait naître dans l'opinion publique en général et chez les maires en particulier ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Cléach.
M. Marcel-Pierre Cléach. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous constatons une nette reprise de l'activité des professions du bâtiment, qui bénéficient d'un environnement économique favorable du fait de la croissance et de la diminution du coût de l'argent.
C'est dans un contexte porteur que se présente le projet de loi de finances pour l'année 2000. Il s'agit donc, pour moi, d'apprécier les dispositions budgétaires que vous nous proposez en fonction non seulement de cet environnement, mais également des besoins du secteur du logement aidé et non aidé, des constats qui peuvent être faits de sa situation actuelle, des enseignements qu'il est nécessaire d'en tirer et des prospectives qu'il convient d'évoquer pour l'avenir.
J'évoquerai tout d'abord les aides à la personne.
Elles diminuent un peu, mais cela semble lié - M. Plancade l'a souligné - à l'amélioration de la conjoncture économique. Quant à la trop grande complexité et aux autres insuffisances de ce système d'aides personnelles, elles ne datent pas d'aujourd'hui, et je sais que le Gouvernement travaille, au sein de la CNAF, à réduire ce problème. Je ne m'attarderai donc pas sur ce point, pour pouvoir vous parler plus longuement du logement social.
Les mesures prises en faveur du logement social vont dans le bon sens, mais elles méritent d'être améliorées.
Vous le savez mieux que personne, monsieur le secrétaire d'Etat, les crédits réellement consommés sont bien moindres que ceux qui sont disponibles.
Le taux de consommation des PLA est alarmant, M. Bimbenet vient de le souligner. Il convient donc de s'interroger sur cette situation, qui tend à perdurer. Nous en avons, les uns et les autres, identifié quelques causes.
En milieu urbain, malgré une demande forte, le coût du foncier permet difficilement aux constructeurs sociaux d'équilibrer leurs opérations.
En secteur rural, malgré une demande potentiellement élevée et qu'il convient d'encourager, il est également difficile d'équilibrer de petites opérations locatives sans demander aux communes l'apport gratuit des terrains viabilisés. C'est devenu une pratique généralisée, c'est un partenariat que j'ai moi-même développé - comme vous, je crois, monsieur le secrétaire d'Etat - et que j'encourage. Mais cet apport demandé aux communes est quelquefois disproportionné par rapport à leurs capacités financières : cette participation peut en effet être estimée à 80 000 francs, voir à 100 000 francs par logement à construire.
A cette raison purement financière s'ajoute quelquefois hélas ! la réticence de certains maires ruraux à accueillir une nouvelle population dont on leur a souvent dit, sur la foi de tel ou tel incident, qu'elle poserait problème.
Par ailleurs, le vieillissement des grands ensembles construits dans l'urgence à la périphérie des grandes villes, leur inadéquation aux exigences normales de notre époque, l'insécurité et le mal-vivre qui caractérisent souvent ces quartiers provoquent des phénomènes de vacance qui réduisent les ressources des organismes bailleurs et ne les encouragent pas à de nouveaux investissements.
S'ajoute à cet état de fait une faiblesse quasi structurelle des fonds propres des offices et des OPAC, aggravée par une gestion pas toujours draconienne et, en tout cas, pas toujours dynamique - il faut avoir le courage de le dire.
Tous ces éléments contribuent à l'importante décrue de la consommation des prêts locatifs aidés, laquelle n'est pas sans grave conséquence pour nos compatriotes qui recherchent un logement et pour le secteur économique du bâtiment, aujourd'hui heureusement porté par la croissance, mais qui ne l'a pas toujours été.
Je dois également citer, après M. Bimbenet, les nombreux appels d'offres infructueux et souvent à répétition, les entreprises s'intéressant moins au secteur social lorsqu'elles ont d'autres marchés plus rémunérateurs.
Les dispositions du projet de loi de finances, mais aussi les mesures prises en avril et juillet dernier pour alléger la dette du secteur HLM, prennent manifestement en compte une partie des difficultés que je viens d'évoquer et le mouvement HLM les a appréciées.
Vous avez fait, monsieur le secrétaire d'Etat, une bonne partie du chemin nécessaire à la relance de la construction locative sociale, et je le reconnais bien volontiers.
Reste une question essentielle : la demande de logements aidés est-elle toujours aussi importante et est-il nécessaire d'en construire toujours plus sans s'interroger sur la réalité de la demande ?
Certaines villes connaissent des taux de vacance extrêmement importants, qui ne sont pas toujours dus à la vétusté et à l'inconfort des immeubles et des logements.
Le numéro d'enregistrement unique prévu par la loi relative à la lutte contre l'exclusion devrait permettre de mieux cerner la véritable demande et constituera incontestablement une statistique fiable des besoins réels.
Il est vraisemblable que, dans certains bassins d'habitat, l'exploitation de ces données conduira à une politique de redéploiement et de remplacement, notamment par voie de reconstruction - démolition et de recherche d'espaces pour un habitat plus aéré, moins concentré, offrant une qualité de vie favorable à la solution des problèmes d'incivisme que connaissent aujourd'hui les cités des années soixante.
Ce serait une grande et noble ambition pour les premières années du prochain siècle, monsieur le secrétaire d'Etat, que de définir et promouvoir, en s'en donnant les moyens, une grande politique de réaménagement de ces tristes cités, en développant les PLA démolition - reconstruction dans l'optique d'une politique de la ville réunissant tous les partenaires.
Il est indispensable de supprimer tous ces grands ensembles, ces barres et ces tours construites dans l'urgence pour répondre à la croissance démographique et qui aujourd'hui suscitent, ou à tout le moins entretiennent les maux que nous connaissons bien : insécurité, bruit, violence, mal de vivre et délinquance. Il faudrait développer encore les contrats ville - Etat pour accompagner cette politique des PLA démolition - reconstruction, afin que ces actions, permettant la mise en place d'un aménagement urbain offrant un visage plus humain, participent à la mise en oeuvre d'une grande politique d'urbanisme, beaucoup plus ambitieuse, à la hauteur des enjeux que nous avons à relever pour le siècle prochain.
En ce qui concerne les plus démunis de nos concitoyens - et cela vient également d'être souligné - il convient de mettre en place des petites unités de vie, car le système des logements « secs » ne permet pas d'assurer une réelle réinsertion des personnes en difficulté. Je pense que nous devrions mettre en place - vous avez d'ailleurs commencé à le faire - des logements dans lesquels les gens pourraient vivre en semi-collectivité, tout en bénéficiant d'un encadrement social et psychologique proche. Il reste, à mon sens, à définir et à instaurer ce contrat original, et à l'instituer partout où le besoin s'en fait jour.
En attendant le développement de cette grande politique, il convient cependant de ne pas négliger le patrimoine vieillissant et d'en permettre le gros entretien et la modernisation dans des conditions acceptables pour les organismes d'HLM. Je veux parler, monsieur le secrétaire d'Etat, vous vous en doutez, de la PALULOS. Il m'apparaît nécessaire de relever le plafond primable, le plafond actuel ne correspondant plus, et de loin, à la réalité économique.
Enfin, j'en viens au PLUS. Il permet une heureuse simplification et l'unification des règles existantes puisque seules subsisteront, parallèlement au PLUS, les PLA d'intégration et les PLA démolition-reconstruction.
Ce nouvel outil répond à une demande, ce dont on ne peut que se féliciter, mais il me semble que le PLUS est un produit dont l'équilibre peut et doit encore être amélioré.
L'un de ses objectifs affichés est la promotion de la mixité sociale. Il faut, à cet égard, avoir le courage et la franchise de dire qu'il s'agit là d'une vision assez optimiste dans la mesure où les personnes ayant des revenus corrects, au-dessus des plafonds exigés pour bénéficier d'un HLM, refusent de vivre dans un environnement jugé insécurisant, bruyant, anxiogène et dévalorisant. Il ne suffit pas de dire vouloir la mixité sociale pour arriver à l'instaurer !
Or l'équilibre financier des opérations PLUS dépendra, je le pense, en partie - et en partie importante - de la présence effective de 10 % de locataires ayant des ressources supérieures à 120 % des plafonds de ressources PLA, ce qui sera difficile, surtout en milieu rural, ainsi que l'a souligné mon éminent collègue M. Plancade.
Cela étant, les dispositions en faveur du logement social, qu'elles relèvent de la loi de finances ou des mesures prises en cours d'année, sur votre initiative, monsieur le secrétaire d'Etat, méritent une appréciation globalement positive, et le président d'OPAC que je suis vous en rend bien volontiers témoignage.
Mais votre compétence et votre responsabilité vont cependant bien au-delà du soutien au seul logement social, et les dispositions prises en faveur du parc privé m'apparaissent insuffisantes pour réduire les tensions pesant sur le marché locatif privé.
Le parc locatif privé représente environ 55 % du parc locatif. Il est diffus et bien réparti géographiquement. Il accueille majoritairement des ménages aux revenus modestes et ses loyers connaissent une évolution modérée, plutôt plus faible que celle du parc public. C'est dire, monsieur le secrétaire d'Etat, combien il remplit, lui aussi, une fonction sociale indispensable.
Les tensions locatives, notamment sur le marché intermédiaire, résultent des contraintes et de l'absence de garantie ou de l'insuffisance de rentabilité par rapport aux risques encourus par les propriétaires.
Pour y remédier, il faut mettre en place des incitations réelles et importantes pour favoriser la construction privée et l'investissement dans l'immobilier locatif.
L'investissement dit « Périssol » a beaucoup fait pour la reprise du marché du logement neuf et l'offre de biens immobiliers en location. Il a été remplacé par un dispositif fiscalement moins avantageux mais qui a le mérite d'exister et d'avoir, pour la première fois, défini un statut du bailleur privé. Mais ce dispositif qui porte votre nom, monsieur le secrétaire d'Etat, est encore insuffisant pour la région parisienne. Il convient donc de revoir à la hausse les plafonds des loyers ou les amortissements déductibles si l'on veut lui voir remplir pleinement son rôle.
Cette nécessité d'améliorer les incitations à l'investissement dans l'immobilier locatif me conduit à me réjouir que le Sénat, lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances, ait adopté un amendement permettant à un investisseur « Besson » - pour citer une nouvelle fois votre nom - de louer son bien à un ascendant ou descendant respectant bien évidemment les conditions de ressources inscrites dans la loi.
Il s'agit là d'une mesure de bon sens et d'équité, comme le faisait remarquer M. le rapporteur général, et qui, compte tenu de l'encadrement du dispositif, est peu susceptible de susciter des abus. J'espère que cet aménagement du dispositif sera conservé par nos collègues de l'Assemblée nationale.
En outre, et plus généralement, mais cela ne dépend que pour une moindre partie de vos responsabilités, je souhaiterais que le statut du bailleur privé comporte un encouragement fiscal pérenne pour les propriétaires du secteur libre.
L'imposition des revenus fonciers procède du « matraquage » fiscal auquel sont soumis les titulaires de hauts et même de moyens revenus : il a éloigné bon nombre de ces investisseurs traditionnels du secteur locatif.
La diminution de l'offre qui en résulte, notamment dans les grandes villes, provoque un enchérissement des loyers et une difficulté grandissante pour beaucoup de jeunes cadres à se loger à distance convenable de leur lieu de travail.
Je souhaiterais enfin que la politique de soutien à l'accession sociale à la propriété soit développée et amplifiée.
Devenir propriétaire est un rêve caressé par la très grande majorité de nos concitoyens. De surcroît, le statut de propriétaire est un puissant facteur d'intégration sociale. Or, en la matière, le prêt à taux zéro dont le succès ne s'est pas démenti depuis sa mise en place en octobre 1995, a montré son efficacité. Constatant que, sur les six premiers mois de 1999, le nombre des prêts mis en place a augmenté de 20 %, on peut craindre que les dotations budgétaires se révèlent à terme insuffisantes. Il existe pourtant une marge de manoeuvre disponible puisque le solde de la contribution des collecteurs du 1 % logement est, m'a-t-on dit, de l'ordre de 3,5 milliards de francs. Ce solde devrait être affecté à l'accession à la propriété.
Il conviendrait de profiter, en outre, de la réduction du coût moyen du prêt à taux zéro dû à la baisse du coût du crédit, pour étendre le champ d'application de ce dispositif, en baissant, par exemple, la quotité des travaux nécessaires pour bénéficier de la délivrance de ce prêt dans le logement ancien, comme ce fut fait en 1996 sur l'initiative du Sénat, ainsi que l'a rappelé notre rapporteurspécial.
L'adoption de cette disposition complémentaire permettrait, par ailleurs, de minorer la réduction importante des aides à la pierre dans votre projet de budget.
Malgré les quelques réserves exprimées tant en ce qui concerne le secteur du logement social - elles sont marginales - que le secteur privé, notamment le secteur libre - mais cette observation relève de la politique fiscale du Gouvernement - je considère que les dispositions du projet de loi de finances relatives au logement, complétées par les mesures que vous avez prises, monsieur le secrétaire d'Etat, en avril et juillet derniers, peuvent être appréciées comme une contribution très largement positive au développement du secteur du logement, dont nous connaissons tous l'importance économique et sociale.
Aussi, m'exprimant à titre personnel, indépendant parmi les indépendants (Sourires.) , je salue bien volontiers, monsieur le secrétaire d'Etat, la qualité du budget que vous nous présentez. Je m'associe à la réflexion de M. Jacques Pelletier en vous disant que j'aurais très volontiers voté ce budget s'il avait fait l'objet d'un vote distinct. (Applaudissements sur certaines travées du RPR, ainsi que sur les travées socialistes, du RDSE et du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à structure constante, le budget de l'urbanisme et du logement est en baisse de 2,3 %. La hausse de 6 % présentée dans les documents budgétaires résulte de la réintégration de crédits suite à la clôture de deux comptes d'affectation spéciale : le FARIF et le fonds pour le financement de l'accession à la propriété.
Le problème lancinant posé par les crédits du logement réside, depuis plusieurs années, en leur utilisation. Ainsi, si l'on constate une augmentation régulière des crédits, et particulièrement de ceux qui sont alloués aux constructions de logements sociaux, celles-ci ne cessent de diminuer : en 1999, à peine 40 000 logements HLM seront construits, sur les 80 000 annoncés, et en 1998 44 000 constructions ont été réalisées, après 45 000 en 1997. La baisse est donc continue.
Il résulte de cette situation qu'il devient aisé pour un gouvernement d'afficher dans une loi de finances initiale une politique ambitieuse du logement, avec des crédits importants qui, n'étant pas intégralement utilisés, sont affectés en fin d'année à d'autres priorités au détriment du logement !
Monsieur le secrétaire d'Etat, le logement est du ressort et de la compétence de l'Etat, mais rien ne peut se faire sans un engagement dynamique des collectivités locales. Or, ne disposant pas de moyens pour gérer dans de bonnes conditions ce qu'il convient d'appeler « l'après construction », les collectivités locales se détournent de plus en plus souvent de l'habitat social.
De plus, ce sont les collectivités locales qui se retrouvent en première ligne pour appréhender les difficultés posées par les locataires fragilisés. Je tiens donc ici à dénoncer le système pratiqué par l'Etat, qui consiste à se défausser de ses compétences sur les collectivités et, au premier chef, sur les communes.
Un décret du 14 septembre dernier, relatif aux subventions et prêts pour la construction, l'acquisition et l'amélioration des logements locatifs aidés a substitué le prêt locatif à usage social, le PLUS, au PLA ordinaire et au PLA à loyer minoré.
Le PLUS bénéficie d'une subvention de 5 % dans le parc neuf et d'une subvention de 10 % dans le parc ancien. Il bénéficie, en outre, d'un prêt de la Caisse des dépôts et consignations à un taux de 3,45 %. La mise en place du PLUS a été présentée comme la traduction d'une volonté de voir se développer la mixité sociale et de baisser les loyers des opérations neuves et des opérations d'acquisition-amélioration.
Les opérations financées doivent respecter des critères de mixité sociale : 30 % des ménages concernés devraient disposer de ressources inférieures à 60 % des plafonds de ressources du PLA et 10 % des ménages doivent détenir des ressources jusqu'à 120 % de ces plafonds.
En milieu rural, une analyse approfondie du dispositif proposé par le Gouvernement montre que le système des PLUS ne sera en équilibre qu'à la seule condition que la fraction des 10 % des ménages pouvant avoir des ressources jusqu'à 120 % des plafonds de ressources des PLA soit entièrement réalisée. Or cette réalisation totale ne sera atteinte que dans de très rares cas, étant donné le niveau de ressources dont disposent les personnes bénéficiant de ces opérations.
De plus, dans certains cas, notamment en secteur rural, mais aussi en secteur urbain défavorisé, il n'est pas souhaitable de fixer les loyers au-delà du plafond PLA pour les 10 % de locataires dont les revenus sont compris entre 100 % et 120 % des plafonds de revenus PLA, au risque d'être au-delà du marché et donc de « pousser » le marché du locatif privé à la hausse par alignement sur le loyer PLA ; cela n'est pas souhaitable pour les ménages non éligibles à l'APL.
Les prêts locatifs aidés pour la démolition-reconstruction vont être intégrés au sein du nouveau dispositif PLUS. Le programme annoncé pour 2000 dans le budget est bien moindre que celui de cette année. En effet, on passe de 5 000 à 2 000 opérations. Sur le plan juridique, cette baisse doit être analysée comme la traduction d'une volonté de vérité des chiffres, puisque, les années antérieures, les chiffres n'étaient jamais atteints et les crédits ouverts jamais consommés.
L'absence de réelle volonté des acteurs locaux de réaliser ces opérations de démolition-reconstruction doit être prise en compte dans le constat chiffré.
Sur le dossier des aides à la personne, l'actualisation et la revalorisation des barèmes des aides se poursuit pour un peu plus de 1 milliard de francs à la fin du premier semestre de cette année. La contribution de l'Etat au financement de l'aide personnalisée au logement et de l'allocation de logement social est réduite de 284 millions de francs en raison d'un ajustement aux besoins des bénéficiaires. La contribution de l'Etat au Fonds national de l'habitation, qui verse l'APL, diminue, alors que la contribution au Fonds national de l'aide au logement augmente pour sa part.
Pourtant, ces évolutions ne sont pas révélatrices, puisqu'il faut constater que les adaptations qui auront lieu en 2000 résultent d'un mauvais calibrage pour l'année 1999.
A ce stade, il faut reprendre l'analyse de la Cour des comptes dans son rapport relatif à l'exécution de la loi de finances pour 1998 sur la complexité du système existant : deux fonds différents gèrent deux aides parallèles, pendant que l'un d'eux verse une participation à l'autre !
On ne peut que regretter, comme la Cour des comptes, qu'un regroupement des deux fonds ne soit pas initié par le Gouvernement. Une telle mesure aurait sans nul doute l'avantage de la clarté en matière de répartition des dépenses de l'Etat entre l'ALS et l'APL. Il faut s'interroger sur cette extrême complexité administrative et sur sa part de responsabilité dans la mauvaise consommation des crédits affectés au logement.
S'agissant du prêt à taux zéro, si son bilan d'application traduit un succès qui ne s'est pas ralenti depuis sa création en 1999, il n'en demeure pas moins que les offres émises de prêts, et les prêts « mis en force », c'est-à-dire ayant reçu une subvention de l'Etat, baissent quantitativement.
Pour 2000, ce sont plus de 5,8 milliards de francs de crédits qui sont alloués aux subventions pour les prêts « mis en force » en 1999 et 2000. Les dotations budgétaires pour 2000 ne seront suffisantes pour atteindre l'objectif de 110 000 prêts à taux zéro qu'avec une poursuite de la baisse des taux d'intérêt. Or force est de le constater, la tension remarquée sur les taux d'intérêt depuis quelques mois laisse à penser qu'il existe un risque réel de reprise de la hausse. Si tel était le cas, l'objectif fixé pour 2000 serait hors d'atteinte.
A l'heure où chacun constate que la bonne tenue de l'activité économique permet de dégager des marges de manoeuvre suffisantes, on peut légitimement penser qu'un élargissement du champ des prêts à taux zéro pourrait être envisagé.
Cet élargissement devrait pouvoir s'inspirer de l'initiative prise par le Sénat en 1996 et tendant à abaisser la quotité de travaux exigibles pour bénéficier du prêt à taux zéro. Je n'y reviendrai pas, les orateurs précédents ont parfaitement précisé ce point.
L'année 1999 a été la première année d'application du nouveau statut de bailleur privé à vocation sociale. Ce système, qui met l'accent sur le nécessaire soutien à l'investissement locatif et à la construction dans le parc neuf, n'accorde d'avantages fiscaux qu'en contrepartie d'un effort social de la part du bailleur. Or, l'expérience a montré le caractère insuffisamment dynamique de ce dispositif.
D'intéressantes propositions ont été émises par nos rapporteurs pour rendre ces dispositions plus lisibles, d'une part, et plus efficaces, d'autre part. Le Sénat a d'ailleurs très largement contribué à l'amélioration de ce système d'amortissement dans la loi de finances pour 1999.
Je souhaite apporter à ce débat une réflexion : la dynamisation du nouveau statut de bailleur privé pourrait résulter de la mise en place d'une structure à deux niveaux, inspirée de ce qui existe pour les interventions de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.
En effet, une déduction d'un amortissement sur le plan fiscal inférieure à 8 % pourrait être envisagée dans le cas d'investissement locatif destiné à des locataires dont les plafonds de revenus seraient inférieurs à 120 % des plafonds PLA, avec loyers libres.
Par cette mesure, le secteur d'activité du bâtiment continuerait d'être soutenu, car il faut noter une chute importante des investissements réalisés avec votre dispositif par rapport à celui de votre prédécesseur.
Ce dispositif à double étage aurait donc deux mérites : d'une part, son efficacité serait améliorée, car il deviendrait plus incitatif, et, d'autre part, il permettrait de favoriser la mixité sociale dont on parle tant, mais dont les réalisations se font rares !
Il est maintenant acquis que le projet de loi relatif à l'urbanisme, l'habitat et les déplacements inclura les dispositions nécessaires à la mise en oeuvre d'une réforme en vue d'unifier les interventions financières sur le parc de logements privés. Une réflexion approfondie sera donc initiée à cette occasion sur ce sujet essentiel pour ce secteur.
Enfin, je ferai une suggestion relative aux problèmes posés par les surloyers dans le parc de logements HLM.
Il conviendrait de modifier les seuils de revenus à partir desquels s'enclenche le système du surloyer, afin de permettre d'augmenter le nombre de locataires successifs d'un même logement. En effet, actuellement les règles applicables n'incitent pas les locataires à sortir des logements du parc HLM pour devenir propriétaires à leur tour. Une telle modification se justifie pour des raisons de justice sociale, d'équité, et aurait pour effet de renforcer encore la mixité sociale.
Mon propos, monsieur le secrétaire d'Etat, s'inscrit dans la ligne du Sénat, qui a toujours pratiqué « l'opposition constructive ».
Je ne conteste pas le caractère positif des mesures que vous avez prises l'été dernier ; ce sont de très bonnes mesures. Leur objet n'est que d'assainir le contexte financier des organismes d'HLM, dont on connaît l'extrême fragilité et les grandes difficultés Mais elles ne règlent pas l'avenir. Je maintiens que le PLUS, par exemple, demeure un produit intrinsèquement déséquilibré qui provoquera, à terme, des effets pervers sur les budgets des organismes d'HLM.
De même, j'insiste sur l'extrême complexité des instructions de dossiers, notamment en matière de locatif social. J'y vois là l'une des causes majeures de la mauvaise consommation des crédits. L'instruction des dossiers, qui est beaucoup trop longue, crée un phénomène de file d'attente qu'on ne voit pas comment résorber autrement qu'en simplifiant considérablement les procédures.
Pour terminer, je voudrais dénoncer la pratique de l'Etat qui n'assume pas ses compétences en matière de logement et qui fait trop souvent appel aux modestes moyens des communes rurales et suburbaines les plus pauvres. Une répartition plus respectueuse des compétences dévolues par la loi aux collectivités locales s'impose d'urgence, pour que l'Etat prenne totalement ses responsabilités dans un domaine vital pour l'équilibre de notre société. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'aborderai les questions de l'habitat, qui sont primordiales pour nos concitoyens et mon ami Pierre Lefebvre interviendra sur les crédits de l'équipement au titre III.
Le logement est l'un des piliers de la vie sociale. La politique de l'Etat en sa faveur a des répercussions évidentes sur la structure économique et sociale de nos villes, de nos quartiers.
Nous nous félicitons que, pour la troisième année consécutive, le budget du logement soit l'une des priorités du Gouvernement. Ce budget augmente, en effet, de 5,6 %.
Je voudrais, en préambule, dire quelques mots des mesures votées en première partie de la loi de finances où un certain nombre de dispositions sont favorables au secteur du logement.
Ainsi, la baisse de la TVA sur les travaux dans les logements devrait permettre un renouveau des opérations de réhabilitation.
Nous approuvons également la nouvelle réduction des droits de mutation et la suppression du droit au bail, dont nous espérons qu'elle sera répercutée sur les loyers par les organismes d'HLM.
Pourriez-vous, monsieur le secrétariat d'Etat, préciser à ce sujet quels moyens le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour inciter les bailleurs à le faire ?
Un pas important a également été franchi en attendant la nouvelle réforme structurelle de la taxe d'habitation. En effet, sur proposition de la commission et des députés communistes, l'Assemblée nationale a abaissé de 1 500 francs à 1 200 francs le montant au-delà duquel les contribuables à revenus modestes sont dégrevés d'office de la taxe d'habitation.
De plus, un rapport devra, avant le 30 avril 2000, déterminer les modalités de réforme de la taxe d'habitation. Cette réforme est très attendue, car cette taxe reste l'un des impôts les plus injustes, malgré les exonérations et les dégrèvements successifs consentis aux familles les plus modestes.
Incontestablement, les mesures votées en première lecteur témoignent de l'engagement fort du Gouvernement en faveur du logement.
Cette année devrait être marquée, dans le secteur du logement et de l'habitat, par la discussion d'un projet de loi présenté par M. Gayssot relatif à l'urbanisme, à l'habitat et aux déplacements. Nous aurions aimé être associés à l'élaboration de ce projet, sur lequel nous n'avons encore aucune information, sinon celle diffusée par la presse.
Vous avez indiqué, lors des débats en commission à l'Assemblée nationale, que ce texte serait l'occasion d'évoquer les financements du 1 %, mais aussi les questions de mixité sociale, notamment la répartition équilibrée des différents types d'habitat dans toutes les communes et sur l'ensemble du territoire. Nous avions déjà eu l'occasion, lors des débats sur la loi relative à la lutte contre les exclusions, d'amorcer des solutions pour contraindre l'ensemble des collectivités locales à construire des logements sociaux et prendre ainsi leur part de responsabilité. Cette démarche devrait être partagée entre tous les partenaires.
Il est nécessaire de mettre en place une politique foncière équilibrée. Mais comment concilier le cas des villes qui ont déjà beaucoup fait et ne peuvent plus accueillir de public dit « défavorisé », en raison de l'accompagnement social important que cela suppose, et celui des villes qui n'ont jamais, ou très peu, contribué au logement social, si ce n'est en payant des pénalités de non-construction ?
Ce constat doit nous conduire à pousser plus avant notre réflexion sur le logement social. Doit-on réserver ce type de logements exclusivement aux plus démunis ? Quel type de mixité sociale souhaitons-nous mettre effectivement en place ? Comment travailler à restaurer l'image des quartiers d'HLM ? Il nous faut travailler à des programmes locatifs très intégrés dans l'ensemble du tissu urbain et rompre avec la logique de quartiers spécifiques à l'habitat social, sur lesquels pèse très vite une image négative.
Ces questions doivent être appréhendées globalement dans le cadre de la politique de la ville et des programmes de rénovation urbaine, dans le cadre d'une politique incluant les problématiques de transports, de commerces, de bassin d'emploi ou encore de proximité des services publics.
Nous sommes encore loin d'avoir atteint ces objectifs.
La mixité sociale est aujourd'hui battue en brèche. Nombre de quartier dits « sensibles » se paupérisent encore un peu plus. On assiste au départ de familles de classe moyenne, y compris depuis peu, de familles engagées dans la vie associative et sociale de la cité.
Les taux de vacance dans les organismes HLM atteignent souvent des niveaux inacceptables, au regard du nombre de personnes sans toit. Certains organismes publics vont même jusqu'à passer des petites annonces dans la presse pour remplir leurs parcs d'HLM !
Les parlementaires communistes souhaitent, depuis plusieurs années, la suppression du supplément de loyer de solidarité, qui, en majorant le loyer des personnes à revenu moyen, les poussent à quitter leur logement HLM. Nous n'ignorons pas que le Gouvernement a apporté des correctifs sensibles sur ce point puisque le produit global de la taxe sur les surloyers a été réduit de pratiquement 60 %. Il semble, par ailleurs, que le produit du supplément de loyer de solidarité soit désormais inférieur au coût de son recouvrement. Voilà pourquoi nous avons présenté, mercredi, un amendement tendant à sa suppression : même si ce n'est pas le même avis qui a été exprimé tout à l'heure à cette tribune, nous pensons, nous, qu'il va à l'encontre de cette mixité sociale que nous appelons tous de nos voeux. Nous regrettons donc que cet amendement ait été rejeté.
Vous avez indiqué, monsieur le secrétaire d'Etat, que la direction générale de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction travaillait encore à l'amélioration du dispositif d'application de la loi relative à la lutte contre les exclusions.
Nous nous en félicitons, tout comme nous apprécions les mesures reconduites dans votre projet de budget en faveur des personnes les plus modestes. Je pense notamment à l'engagement de l'Etat aux côtés des associations logeant, à titre temporaire, des personnes défavorisées ou à la reconduction des crédits consacrés par l'Etat au Fonds de solidarité pour le logement.
Je tiens d'ailleurs à souligner que la totalité des crédits du FSL a été consommée. L'augmentation de 44 % votée l'an dernier était donc bien nécessaire !
La loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions impose aux propriétaires la réalisation de travaux palliatifs dès lors qu'un cas de saturnisme infantile est signalé ou qu'un risque de contamination au plomb dans un immeuble est porté à la connaissance des préfets. Ces derniers doivent, en cas de carence des propriétaires, se substituer à eux. Jusqu'à présent, ils n'ont pu exercer ce devoir dans la mesure où ils ne disposaient d'aucun moyen. Le budget du secrétariat d'Etat au logement pallie cette année cette anomalie, en consacrant 75 millions de francs à la lutte contre le saturnisme. Ces crédits ont vocation à couvrir l'ensemble des dépenses, à savoir les dépenses de diagnostic, de contrôle, de réalisation de travaux et d'hébergement.
Parallèlement à l'effort poursuivi par le Gouvernement pour aider les plus démunis, le budget du logement amorce, cette année, et ce pour la première fois, un retour à l'aide à la pierre.
Ce changement de cap est, à nos yeux, majeur.
Vous le savez, depuis de nombreuses années, les parlementaires communistes appellent de leurs voeux cette reprise de l'aide à la pierre. Il nous semble, en effet, que seule cette logique s'avère efficace en matière de baisse du prix des loyers, à laquelle il est urgent d'arriver.
Si nous regrettons que les aides à la pierre n'atteignent pas tout à fait les 13 milliards de francs, il s'agit néanmoins d'une amorce non négligeable et encourageante pour les années à venir. Cette augmentation est due essentiellement aux mesures décidées en juillet 1999 : baisse du taux de rémunération du livret A ; maintien d'un taux de TVA réduit à 5,5 % ; subvention de 5 % dans le neuf et de 10 % sur les opérations d'acquisition-amélioration ; fusion des différents PLA en un produit unique, dénommé prêt locatif à usage social ou PLUS.
Les parlementaires communistes souhaitent, de longue date, l'uniformatisation des prêts locatifs. Le PLUS nous satisfait, car c'est un élément favorable à la mixité sociale. En revanche, nous ne pensons pas que la décision de majorer les loyers en fonction du dépassement ou non des plafonds de ressources soit une bonne chose. Cela conduirait, de fait, à nouveau, à l'instauration d'une sorte de surloyer.
Le projet de budget prévoit la construction de 70 000 logements aidés. Nous espérons que cet objectif sera atteint. La simplification du mode de financement devrait y contribuer.
Les mesures de juillet 1999 ont permis, et je voudrais saluer cette mesure, un gel des loyers sur deux ans. Si nous trouvons normal que l'amélioration des conditions de financement pour les organismes soit répercutée sur les loyers, nous nous interrogeons sur la traduction réelle, en faveur des locataires, s'agissant notamment des organismes en difficulté du fait de leur gestion sociale. Les organismes d'HLM de Marseille, de Bordeaux et de Metz ont, paraît-il, déjà fait savoir qu'ils ne pratiqueraient pas ce gel. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous informer plus précisément sur ce point ?
Si nous nous réjouissons de l'amorce d'une reprise des aides à la pierre, force est de constater que la majorité des moyens qui y sont consacrés vont au secteur privé.
De ce strict point de vue, monsieur le secrétaire d'Etat, on n'a pas suffisamment rompu avec la logique qui prévalait avant votre arrivée.
Ce déséquilibre en faveur du secteur privé a certes été atténué par le statut du bailleur privé, qui instaure, en contrepartie des subventions, un engagement sur le montant des loyers pour neuf ans.
Toutefois, n'aurait-il pas fallu assortir cet engagement d'une obligation, pour les propriétaires bailleurs, de laisser à la disposition du préfet quelques logements de leur parc, afin qu'ils concourent, au même titre que le secteur public, à la mixité sociale ?
Ne pensez-vous pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que la politique en faveur du logement devrait affirmer plus fortement la priorité du public sur le privé ?
Le second volet important du projet de budget du logement comprend les crédits consacrés aux aides à la personne.
Elles accusent une légère baisse, de 249 millions de francs sur plus de 35 milliards de francs. Cette baisse est expliquée comme la conséquence conjuguée du gel des loyers et de l'amélioration de la conjoncture économique. Peut-être aurions-nous pu profiter de cet « effet de ciseaux » pour revaloriser le niveau de l'allocation logement et de l'APL, ou procéder au paiement des allocations logement en dessous de 100 francs ?
En effet, faute de rendre possible des loyers de sortie dans le secteur public significativement plus bas, l'Etat doit consacrer aux aides à la personne des sommes à la hauteur des difficultés que connaissent nos concitoyens les plus défavorisés.
Une nouvelle fois, nous constatons combien une priorité donnée aux aides à la pierre permettrait de diminuer celles qui sont réservées aux personnes.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez informé mes collègues députés de la volonté du Gouvernement de procéder à un « rapprochement progressif des barèmes de l'allocation logement et de l'APL et des barèmes applicables dans le secteur locatif social et le secteur privé ». Quand pensez-vous pouvoir mettre en place ce rapprochement ?
Pour l'heure, considérant que votre budget va dans le bon sens, nous l'approuvons, en souhaitant que l'effort accompli cette année soit poursuivi. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures.)