Séance du 13 octobre 1999







M. le président. Par amendement n° 30, MM. Bret, Duffour et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Au début de la deuxième phrase du quatrième alinéa de l'article L. 252-1 du code rural, les mots : "Il peut être retiré" sont remplacés par les mots : "Il est retiré". »
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Cet amendement tire les conséquences des débats que nous avions eus ici même en première lecture, mais également des débats à l'Assemblée nationale, concernant le droit des associations à ester en justice.
Vous savez que seules les associations ayant reçu un agrément ministériel peuvent former un recours contre une décision administrative.
Mes chers collègues de la majorité sénatoriale, lors de la première lecture - vous le proposez à nouveau dans l'amendement n° 4, qui nous ne tarderons pas à examiner - vous aviez voulu conditionner le recours des associations de protection de l'environnement au dépôt d'une caution par lesdites associations.
Cette solution ne nous paraît pas opportune. Elle est trop sévère et discriminatoire.
Aussi, par souci de tenir effectivement compte de la multiplication des recours et parfois de leur caractère abusif, nous vous proposons de modifier l'article L. 252-1 du code rural, qui détermine les conditions d'agrément, en rendant le retrait de l'agrément systématique dès que l'association ne répond plus au but d'intérêt général qui lui a permis de bénéficier de l'agrément.
Cette solution nous semble plus raisonnable. Elle concilie le droit d'ester en justice de tout citoyen et les interrogations que vous souleviez pendant les débats.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, qu'elle considère comme étant le complément de l'article 5 bis proposé par le Sénat et dont nous débattrons dans un instant.
L'article L. 252-4 du code rural prévoit que les associations agréées ont un accès privilégié à la justice, d'où la nécessité que cet agrément soit justifié et régulièrement validé.
S'agissant de la possibilité pour l'administration d'apprécier la réunion des conditions de l'agrément, il faut noter qu'elle a les moyens de contrôler puisqu'elle reçoit, chaque année, un rapport moral et financier prévu par l'article R. 252-19 du code rural.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, dont l'objet est proche de celui de l'amendement n° 4, que nous examinerons dans quelques instants.
Je comprends la préoccupation qui anime les auteurs de l'amendement n° 30, tout comme je comprends, je l'ai dit dans mon propos initial, celle qui sous-tend l'amendement n° 4. Mais, pour les mêmes raisons, j'émettrai un avis défavorable sur ces deux amendements.
En effet, on ne voit pas quel lien ils peuvent avoir avec le présent projet de loi ; on comprend mal en quoi le retrait de l'agrément d'une association améliorerait le droit des citoyens.
Si la question de l'abus de droit est effectivement importante, elle doit être abordée dans son ensemble et non pas à l'occasion d'une mesure spécifique, qui risque d'apparaître comme discriminatoire.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 30.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Nous sommes en train d'évoquer un grave problème : celui de l'entrave à l'intérêt général occasionnée par la multiplication des recours aux procédures de justice. Mais, qu'il s'agisse de cet amendement n° 30 ou de l'amendement n° 4 à l'article 5 bis, nous prendrions, me semble-t-il, un mauvais chemin si nous voulions résoudre ce problème par le moyen envisagé.
Nous donnerions même le sentiment de légiférer en opposition à l'esprit qui a présidé à l'élaboration du projet de loi, lequel, vous me l'accorderez, mon cher collègue, va dans le sens d'une plus grande liberté, d'une plus grande transparence et d'un accès plus aisé aux voies de recours.
Aussi, tout en comprenant le souci qui anime ses auteurs, je ne voterai pas cet amendement n° 30.
Au demeurant, je souhaiterais que M. le ministre nous indique comment ce problème de la solitude de l'élu face à la multiplication des recours abusifs sera traité dans les mois qui viennent.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Monsieur le président, je sollicite une courte suspension de séance.
M. le président. Le Sénat va bien sûr accéder à votre demande, monsieur le ministre.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.)