Séance du 24 juin 1999







M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre de la jeunesse et des sports.
Nous assistons ces jours-ci à une bataille à coups de milliards entre Canal Plus et TPS en vue d'obtenir l'exclusivité des droits de retransmission télévisée du championnat de France de football de première division pour la période 2000-2004.
Cet épisode de la guerre des droits de retransmission des événements sportifs, qu'ils soient mondiaux, comme les jeux Olympiques, européens ou nationaux, comme le championnat de France de football, me semble révélateur d'une série de problèmes qui inquiètent légitimement nos concitoyens.
Le premier problème, c'est qu'il existe un risque réel de voir la très grande majorité des Français ne plus avoir accès à l'essentiel des manifestations sportives, les droits de retransmission de celles-ci étant achetés par les chaînes cryptées, à péage. Le projet de loi sur l'audiovisuel transposant la directive européenne qui répond au joli nom de « Télévision sans frontière » met heureusement des garde-fous à cette dérive. Espérons que ceux-ci seront suffisants.
Le deuxième problème est celui de l'inflation généralisée du coût de ces droits, qui suscite l'inquiétude des producteurs audiovisuels français. Les chaînes sont en effet obligées de dépenser de plus en plus d'argent pour ces programmes, et l'on peut craindre que cela ne se fasse au détriment des autres programmes, en particulier des investissements dans la production de films, de téléfilms ou de documentaires français. Catherine Trautmann a d'ailleurs réagi, voilà deux jours, en demandant aux chaînes cryptées de revoir à la hausse leurs engagements en faveur de la création française.
Le troisième problème, qui fera l'objet de ma question, madame la ministre, est le suivant : cette manne financière ne va-t-elle pas accentuer les déséquilibres, d'abord entre les clubs de football eux-mêmes, ensuite entre ce sport et les autres, dont les médias se détourneront ?
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports. Il est vrai, madame la sénatrice, que les droits de retransmission en exclusivité des événements sportifs donnent lieu à une véritable surenchère : ils ont été multipliés par six entre deux coupes du monde.
Vous avez bien fait ressortir les problèmes qui découlent de cette dérive inflationniste, à commencer par un certain appauvrissement de la retransmission télévisée des pratiques sportives au regard de leur diversité. Ainsi, en ce moment, se déroule une fabuleuse compétition européenne de basket, l'Euro 99. Hélas, les personnes qui ne sont pas abonnées à des chaînes cryptées ne pourront pas en voir un seul match !
En outre, on arrive à une situation d'inaccessibilité. Au train où vont les choses, des pays entiers seront privés des jeux Olympiques de Sydney et de la prochaine coupe du monde de football.
En effet, les droits de retransmission atteignent de telles sommes que les chaînes nationales de ces pays ne pourront pas les payer. D'ailleurs, en France même, dans l'état actuel des choses, une seule chaîne, une chaîne publique, a accepté de payer les droits pour les jeux Olympiques de Sydney, les chaînes privées ayant, au moins pour le moment, renoncé à toute retransmission.
Face à cela, la solution passe d'abord par une maîtrise de l'utilisation de l'argent que procurent ces contrats aux chaînes de télévision. Nous devons nous préoccuper de la situation du sport associatif, dans toutes ses composantes. C'est pourquoi j'ai fait deux propositions qui figureront dans le projet de loi sur le sport.
D'une part, il s'agit de taxer les contrats conclus entre les chaînes de télévision et les fédérations sportives pour alimenter un fonds d'aide aux clubs associatifs.
M. Jacques Mahéas. Très bien !
Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports. D'autre part, et pour répondre très précisément à votre question, je confirme que, comme le prévoyait déjà la loi de 1984, ce sont les fédérations qui négocieront les droits de retransmission, et non pas les clubs, alors que certains clubs le demandent aujourd'hui. Cela assure une certaine redistribution, même si celle-ci reste très insuffisante, comme j'aurai l'occasion de le dire demain devant des responsables du football. En effet, à l'heure actuelle, les clubs amateurs bénéficient très peu de l'argent ainsi redistribué, la deuxième division à peine plus, les clubs de première division se partageant l'essentiel de la somme.
S'agissant du problème de la retransmission des grands événements sportifs, il sera résolu par la loi sur l'audiovisuel élaborée par Mme Trautmann. En effet, dans le cadre de la mise en oeuvre de la directive « Télévision sans frontière », nous allons établir une liste des événements sportifs - notamment les finales de championnats, peut-être la future coupe européenne de basket, etc. - qui devront obligatoirement être retransmis sur des chaînes accessibles à tous. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)

PROPOSITION DE LOI SÉNATORIALE SUR LA CHASSE