Séance du 3 juin 1999







M. le président. Par amendement n° 143, M. Lorrain et Mme Bocandé proposent d'insérer, après l'article 37 tervicies , un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« ... Les notaires associés d'une société titulaire d'un office notarial et salariés de cette société, sauf pour les risques gérés par la section professionnelle des notaires, visée par le décret n° 48-1179 du 19 juillet 1948. »
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. S'agissant des régimes de retraite, la loi du 31 décembre 1990 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques comportait une disposition prévoyant que tous les avocats, y compris les salariés ou les dirigeants de SEL - société d'exercice libéral - continueraient à être affiliés à la Caisse nationale des barreaux français.
Faute de disposition particulière analogue, les autres professionnels libéraux, notamment les notaires associés, dirigeants salariés ou simples associés salariés, se trouvent dépendre du régime général des salariés et non plus de la caisse de retraite des notaires, relevant du régime des professions libérales. Les notaires salariés des études sont, eux, affiliés à la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires.
Cette situation nuit au développement des SEL et de l'interprofessionnalité.
Par ailleurs, un déséquilibre financier de la caisse de retraite des notaires aurait des conséquences dommageables, pouvant entraîner une remise en cause du régime de retraite des notaires qui serait particulièrement pénalisante pour les notaires retraités modestes.
Le Conseil supérieur du notariat en a entretenu le commissaire général au Plan, chargé d'une mission de réflexion sur les retraites, lequel lui a donné l'assurance que la préoccupation actuelle n'était pas de susciter des déséquilibres financiers lorsqu'un régime de retraite bien géré fonctionnait de manière satisfaisante.
La mesure proposée, simple ajustement pour les notaires, ne devrait donc pas soulever d'opposition. Elle va dans le sens de celle qui est appliquée aux avocats et de celle qui s'applique également depuis peu à la profession des agents généraux d'assurance.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Huriet, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, le Gouvernement considère que cet amendement est irrecevable aux termes de l'article 40 de la Constitution, que j'invoque donc.
M. le président. Monsieur Charasse, l'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. Michel Charasse, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Il l'est, monsieur le président.
M. le président. L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 143 n'est pas recevable.
Par amendement n° 144, M. Lorrain et Mme Bocandé proposent d'insérer, après l'article 37 tervicies , un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 611-12 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1) Les 1°, 2° et 3° sont ainsi rédigés :
« 1° Pour les deux tiers au moins de représentants élus au suffrage direct par les assurés bénéficiaires de prestations et choisis en leur sein, dont au plus un quart de représentants retraités ; dans les caisses communes à plusieurs groupes professionnels, chaque groupe sera représenté de façon égale ;
« 2° Des personnes assurées bénéficiaires de prestations désignées par les unions départementales des associations familiales ayant leur siège dans la circonscription de la caisse ;
« 3° Un ou plusieurs médecins et un ou plusieurs pharmaciens ayant leur domicile professionnel dans la circonscription de la caisse et désignés par les organisations départementales ou régionales de l'ordre des médecins ou de l'ordre des pharmaciens. »
« 2) Le septième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, aucune limite d'âge supérieure n'est applicable aux représentants retraités. »
« 3) Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : "nommés par arrêté ministériel" sont remplacés par les mots : "nommés par l'autorité compétente de l'Etat".
« II. - A titre transitoire, la limite d'âge de soixante-cinq ans fixée au premier alinéa de l'article L. 231-6 et au septième alinéa de l'article L. 611-12 du code de la sécurité sociale est portée à soixante-sept ans au plus pour les membres élus ou désignés lors du prochain renouvellement des conseils d'administration. »
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Cet amendement a pour objet de permettre aux administrateurs de plus de soixante-cinq ans de continuer à exercer leur mandat au sein d'un collège « retraités », conformément aux engagements pris par la ministre, par lettre du 3 octobre 1997, vis-à-vis de M. Ravoux, président de la CANAM.
Il vise également à alléger la charge de l'Etat dans la procédure de désignation d'autres catégories d'administrateurs : des représentants des unions départementales des associations familiales et des représentants des médecins et des pharmaciens, dont l'élection est actuellement prévue par des dispositions réglementaires du code de la sécurité sociale ;
Il tend, enfin, à déconcentrer au niveau du préfet de région la désignation des représentants des organismes conventionnés actuellement nommés par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Huriet, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 144, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 37 tervicies.
M. le président. Par amendement n° 145, M. Lorrain et Mme Bocandé proposent d'insérer, après l'article 37 tervicies, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le quatrième alinéa de l'article L. 615-20 du code de la sécurité sociale, le mot : ", modifiées" est supprimé.
« II. - Le même alinéa est complété par une seconde phrase ainsi rédigée : "Elles sont modifiées sur proposition faite par les seuls membres élus de la section professionnelle intéressée du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés". »
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. L'article L. 615-20 du code de la sécurité sociale requiert la réunion de l'assemblée des administrateurs des caisses régionales représentant le groupe professionnel intéressé pour instituer, modifier ou supprimer les prestations supplémentaires consistant en l'octroi d'indemnités journalières.
Cette procédure, qui nécessite la convocation de 250 administrateurs de la métropole et des départements d'outre-mer, pour un coût de l'ordre de 400 000 francs, semble exagérément lourde et onéreuse pour procéder aux ajustements que les élus souhaitent apporter à la prestation supplémentaire en fonction des résultats financiers observés.
Pour les modifications, nous proposons de substituer à l'assemblée des administrateurs le vote des seuls membres élus de la section porfessionnelle intéressée du conseil d'administration de la caisse nationale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Huriet, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 145.
M. Jean-Louis Lorrain. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Dans notre esprit, cet amendement a surtout pour avantage de faire réaliser des économies. Dès lors, je ne comprends pas pourquoi M. le secrétaire d'Etat émet un avis défavorable. Peut-être cet amendement soulève-t-il des problèmes juridiques, mais j'aimerais alors les connaître.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Cet amendement vise à alléger la procédure actuellement requise pour modifier les prestations supplémentaires consistant en l'octroi d'indemnités journalières qui sont instituées, à leur demande, au profit de l'un ou de plusieurs des groupes professionnels affiliés au régime d'assurance maladie et d'assurance maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles géré par la CANAM.
Les modifications du régime des indemnités journalières relèveraient des seuls membres élus de la section professionnelle intéressée du conseil d'administration de la CANAM et non plus de l'assemblée générale des administrateurs des caisses mutuelles régionales de la métropole et des départements d'outre-mer représentant le groupe des professions intéressées, qui demeurerait compétente uniquement pour l'institution ou la suppression de ces prestations.
Le Gouvernement est conscient que la procédure actuelle, prévue par l'article L. 615-20, est lourde et coûteuse. Elle fait effectivement obstacle à l'évolution des prestations supplémentaires et elle paraît particulièrement inadaptée lorsqu'il ne s'agit que de modifier ce type de prestations pour les adapter aux besoins des assurés et aux résultats financiers observés.
Toutefois, l'objet de cet amendement est très éloigné des sujets traités dans ce projet de loi. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à son adoption, mais s'engage à proposer cette réforme dans le plus prochain texte législatif susceptible de l'accueillir.
M. Claude Huriet, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Huriet, rapporteur.
M. Claude Huriet, rapporteur. Je n'ai pas pu retenir un certain sourire, monsieur le secrétaire d'Etat, en vous entendant énoncer le dernier argument que vous avez opposé à l'auteur de cet amendement : vous avez en effet indiqué que l'objet de celui-ci était vraiment trop éloigné du texte. Etant donné le champ immense qui s'est ouvert depuis le début de la discussion de ce texte qui est relatif, peut-être convient-il de le rappeler, à la couverture maladie universelle, cet argument ne saurait suffire en lui-même ! Mais vous avez heureusement avancé, monsieur le secrétaire d'Etat, d'autres objections qui sont sans doute plus recevables.
Vous me pardonnerez d'autant plus facilement cette réaction teintée d'humour que j'ai cru en déceler une trace dans votre ton lorsque vous avez assené cet argument massue. (Sourires.)
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Parfois, on me fait dire de ces choses ! (Rires.)
M. Charles Descours. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours. Je dois dire que j'ai eu le même sourire que M. Huriet.
En écoutant le début de votre explication, monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai pensé que vous alliez indiquer que vous étiez finalement favorable à cet amendement. Mais non ! Vous avez conclu en disant que cet amendement était « trop éloigné » de l'objet du texte en discussion !
En vérité, nous avons dû être très nombreux, sur toutes les travées, à sourire en vous entendant énoncer cet argument ! (Sourires.)
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Vous avez noté, monsieur le président, que, dès qu'il s'agit de m'accabler, M. Descours est le premier à monter au créneau ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Monsieur Descours, considérez que l'atterrissage était brutal !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Ce n'était pas humanitaire du tout ! (Nouveaux sourires.)
M. Charles Descours. J'espère que le Gouvernement n'invoquera pas le même argument pour l'amendement suivant, qui, pour moi, est tout aussi éloigné du texte !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 145, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 37 tervicies .
Par amendement n° 211 rectifié bis, M. Autain et les membres du groupe socialiste proposent d'insérer, après l'article 37 tervicies, un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - L'article L. 570 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 570. - I. - Les créations, les transferts et les regroupements d'officines de pharmacie doivent permettre de répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population résidant à proximité de ces officines.
« Les créations, les transferts et les regroupements d'officines de pharmacie ne peuvent être effectués que dans un lieu qui garantit un accès permanent du public à la pharmacie et permet à celle-ci d'assurer un service de garde satisfaisant.
« II. - Toute création d'une nouvelle officine, tout transfert d'une officine d'un lieu dans un autre et tout regroupement d'officines sont subordonnés à l'octroi d'une licence délivrée par le représentant de l'Etat dans le département selon les critères prévus aux articles L. 571, L. 571-1, L. 572 et L. 573.
« Dans le cas d'un transfert d'un département à un autre au sein de la région Ile-de-France tel qu'il est prévu à l'article L. 572, la licence est délivrée par décision conjointe des représentants de l'Etat dans les deux départements.
« Dans tous les cas, la décision de création, de transfert ou de regroupement est prise par le représentant de l'Etat dans le département après avis des syndicats représentatifs de la profession et du conseil régional de l'ordre des pharmaciens ou, dans le cas des départements d'outre-mer et de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon, du conseil central de la section E de l'ordre national des pharmaciens.
« III. - Les demandes de regroupement présentées en application de l'article L. 573 bénéficient d'une priorité par rapport aux demandes de transfert et aux demandes de création. Les demandes de transfert bénéficient d'une priorité par rapport aux demandes de création.
« Parmi les demandes de création, celles qui sont présentées par des pharmaciens n'ayant jamais été titulaires d'une licence d'officine ou n'en étant plus titulaires depuis au moins trois ans à la date du dépôt de la demande bénéficient d'une priorité. Lorsque la demande de création est présentée par une société ou par plusieurs pharmaciens réunis en copropriété, le principe de priorité ne s'applique que lorsque tous les pharmaciens associés ou copropriétaires exerçant dans l'officine remplissent les conditions pour en bénéficier.
« Toute demande ayant fait l'objet du dépôt d'un dossier complet bénéficie d'un droit d'antériorité par rapport aux demandes ultérieures concurrentes, dans des conditions fixées par le décret mentionné à l'article L. 578.
« IV. - La licence fixe l'emplacement où l'officine sera exploitée.
« Lorsqu'il est saisi d'une demande de création, de transfert ou de regroupement, le représentant de l'Etat peut imposer une distance minimum entre l'emplacement prévu pour la future officine et l'officine existante la plus proche.
« Le représentant de l'Etat peut, en outre, en vue d'assurer une desserte optimale de la population résidant à proximité de l'emplacement de la future officine, déterminer le ou les secteurs de la commune dans lesquels l'officine devra être située.
« Lorsque le représentant de l'Etat utilise l'une ou l'autre ou les deux possibilités mentionnées aux alinéas ci-dessus, la licence ne peut être accordée que lorsque la future officine remplit les conditions fixées par le représentant de l'Etat dans un délai fixé par le décret mentionné à l'article L. 578.
« V. - L'officine dont la création, le transfert ou le regroupement a été autorisé doit être effectivement ouverte au public au plus tard à l'issue d'un délai d'un an, qui court à partir du jour de la notification de l'arrêté de licence, sauf prolongation en cas de force majeure.
« La licence ne peut être cédée par son ou ses titulaires indépendamment du fonds de commerce auquel elle se rapporte.
« De plus, et sauf le cas de force majeure constatée par le représentant de l'Etat dans le département, une officine ne peut faire l'objet d'une cession totale ou partielle, ni être transférée ou faire l'objet d'un regroupement avant l'expiration d'un délai de cinq ans, qui court à partir du jour de la notification de l'arrêté de licence. Toutefois, cette disposition n'est pas applicable aux personnes physiques ou morales détenant une partie du capital social et des droits de vote d'une société d'exercice libéral de pharmaciens d'officine, au titre des 1° à 4° de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de société des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.
« Toute fermeture définitive de l'officine entraîne la caducité de la licence, qui doit être remise à la préfecture par son dernier titulaire ou par ses héritiers.
« VI. - La population dont il est tenu compte pour l'application des articles L. 571, L. 571-1, L. 572 et L. 573 est la population municipale, telle qu'elle est issue du dernier recensement général de la population ou, le cas échéant, des recensements complémentaires.
« B. - Les articles L. 571, L. 571-1, L. 572 et L. 573 du code de la santé publique sont ainsi rédigés :
« Art. L. 571. - I. - Dans les communes d'une population égale ou supérieure à 30 000 habitants, une création d'officine ne peut être accordée que lorsque le nombre d'habitants par pharmacie est égal ou supérieur à 3 000.
« Dans ce cas, il ne peut être délivré qu'une licence par tranche entière de 3 000 habitants recensés dans les limites de la commune.
« II. - Dans les communes d'une population égale ou supérieure à 2 500 habitants et inférieure à 30 000 habitants, une création d'officine ne peut être accordée que lorsque le nombre d'habitants par pharmacie est égal ou supérieur à 2 500.
« Dans ce cas, il ne peut être délivré qu'une licence par tranche entière de 2 500 habitants recensés dans les limites de la commune.
« III. - Aucune création n'est possible dans les communes comportant une population inférieure à 2 500 habitants :
« - lorsqu'elles disposent déjà d'au moins une officine ;
« - lorsqu'elles ne disposent d'aucune officine mais que leur population a déjà été prise en compte pour la création d'une officine dans une autre commune.
« IV. - Dans les communes de moins de 2 500 habitants dépourvues d'officine et dont la population n'a pas été ou n'est plus prise en compte pour une création d'officine dans une autre commune, une création peut être accordée dans une zone géographique constituée d'un ensemble de communes contiguës, si la totalité de la population de cette zone est au moins égale à 2 500 habitants.
« Le représentant de l'Etat dans le département précise, dans sa décision, les communes prises en compte pour l'octroi de la licence. La totalité de la population de ces communes est considérée comme desservie par la nouvelle création.
« Art. L. 571-1. - Par dérogation aux articles L. 571, L. 572 et L. 573, les quotas de population de 3 000 et 2 500 habitants mentionnés à ces articles sont fixés à 3 500 habitants pour le département de la Guyane, et à 5 000 habitants pour les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle.
« Art. L. 572. - I. - A l'exception des cas de force majeure constatés par le représentant de l'Etat dans le département, ou si ces officines sont dans l'impossibilité de se conformer aux conditions minimales d'installation telles qu'elles figurent dans le décret prévu à l'article L. 578, peuvent obtenir un transfert :
« - les officines situées dans une commune d'au moins 30 000 habitants où le nombre d'habitants par pharmacie est égal ou inférieur à 3 000 ;
« - les officines situées dans une commune d'au moins 2 500 habitants et de moins de 30 00 habitants où le nombre d'habitants par pharmacie est égal ou inférieur à 2 500 ;
« - les officines situées dans une commune de moins de 2 500 habitants.
« Ce transfert peut être effectué :
« - au sein de la même commune ;
« - dans une autre commune située dans le même département ou dans une commune située dans un autre département lorsqu'il s'agit de la région Ile-de-France, à condition qu'une création soit possible dans la commune d'accueil en application de l'article L. 571.
« II. - Par dérogation, le transfert d'une officine implantée dans une zone franche urbaine, une zone urbaine sensible ou une zone de redynamisation urbaine mentionnées dans la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, ne peut être accordé lorsqu'il aurait pour effet de compromettre l'approvisionnement normal en médicaments de la population de ladite zone.
« Art. L. 573. - I. - Deux officines de pharmacie situées dans une même commune peuvent être regroupées en un lieu unique de cette commune à la demande de leurs titulaires.
« Dans les communes d'au moins 30 000 habitants, ce regroupement ne peut intervenir que si le nombre d'habitants par officine est égal ou inférieur à 3 000. Dans les communes d'au moins 2 500 habitants et de moins de 30 000 habitants, ce regroupement ne peut intervenir que si le nombre d'habitants par officine est égal ou inférieur à 2 500.
« Le lieu de regroupement des officines concernées est l'emplacement de l'une d'elles ou un lieu nouveau situé dans la même commune.
« II. - Le nombre total de pharmaciens de la nouvelle officine, qu'ils soient titulaires ou assistants, doit être au moins égal au total des pharmaciens titulaires et assistants des officines qui se regroupent. Cette disposition s'applique durant cinq ans à compter de l'ouverture de la nouvelle officine, sauf cas de force majeure constatée par le représentant de l'Etat dans le département.
« La nouvelle officine issue du regroupement ne pourra être effectivement ouverte au public que lorsque les officines regroupées auront été fermées. »
« C. - L'article L. 578 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 578. - Un décret en Conseil d'Etat fixe notamment :
« - les modalités de présentation et d'instruction des demandes de création, transfert et regroupement des officines de pharmacie,
« - les règles relatives à l'appréciation du droit de priorité et du droit d'antériorité,
« - les conditions minimales d'installation auxquelles doivent satisfaire les officines. »
« D. - Les dispositions des A et B du présent article sont applicables à compter de la date de publication du décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 578 du code de la santé publique pour les communes de plus de 2 500 habitants et à compter de la date de publication des arrêtés préfectoraux mentionnés au E du présent article pour les communes de moins de 2 500 habitants.
« Par dérogation aux dispositions des articles L. 570, L. 571, L. 572 et L. 573 du même code, aucune création, et aucun transfert à l'exception de ceux sollicités en raison d'une expropriation, ne peuvent être accordés pendant la période comprise :
« - entre la date de publication de la présente loi et la date de publication du décret prévu à l'article L. 578 du code de la santé publique pour les communes de plus de 2 500 habitants,
« - entre la date de publication de la présente loi et la date de publication des arrêtés préfectoraux mentionnés au E du présent article pour les communes de moins de 2 500 habitants.
« E. - Pour les communes de moins de 2 500 habitants disposant d'au moins une officine à la date de publication de la présente loi, un arrêté du représentant de l'Etat dans le département détermine, pour chacune de ces officines, la ou les communes desservies par cette officine après avis d'une commission qui comprend des représentants de l'administration et des professionnels.
« Seules peuvent être retenues les communes dont au moins 50 % des habitants sont effectivement desservis par l'officine. Dans ce cas, la totalité des habitants de la commune est considérée comme desservie par l'officine pour l'application de l'alinéa ci-dessus.
« Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 578 du code de la santé publique fixe la composition et le fonctionnement de cette commission, ainsi que le délai et les modalités de publication des arrêtés préfectoraux précités.
« F. - L'article 30 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire est abrogé.
« G. - L'article 26 de l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales est abrogé.
« H. - Au terme de deux ans d'application de la présente loi, le Gouvernement présentera un bilan au Parlement. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 223 rectifié bis , présenté par MM. Vasselle, Gérard Larcher et Delong, et tendant, dans le premier alinéa du I et dans le premier alinéa du II du texte proposé par le B de l'amendement n° 221 rectifié bis pour l'article L. 571 du code de la santé publique, à remplacer le chiffre : « 30 000 », par le chiffre : « 5 000 ».
La parole est à M. Autain, pour défendre l'amendement n° 211 rectifié bis .
M. François Autain. L'importance de cet amendement ne vous aura sans doute pas échappé ! (Sourires.) Il a pour objet de simplifier les modalités actuelles de création ou de transfert des officines de pharmacie.
Selon la législation actuelle, les arrêtés d'octroi ou de refus de création ou de transfert d'officines de pharmacie sont pris par le préfet de département après avis de la direction régionale des affaires sanitaires et sociales et des professionnels. Les créations sont accordées en fonction de critères démographiques très précis ou « quotas ». Actuellement, ce quota est fixé à 2 000 habitants.
Cependant, la loi prévoit des modalités de création par voie dérogatoire lorsque ces quotas sont atteints ou dépassés, afin de permettre de créer des officines dans les communes connaissant des déplacements de population, comme les villes nouvelles, un afflux saisonnier de population, comme les communes touristiques, ou lorsque la population est éloignée des officines existantes, comme dans les communes rurales.
Ce système de répartition, qui est en vigueur depuis 1945 et qui a fait l'objet d'un certain nombre de modifications depuis cette date, a permis d'assurer une bonne couverture en officines de l'ensemble du territoire, y compris dans les zones rurales. Il a toutefois montré ses limites. C'est en effet un travail considérable pour instruire les dossiers de demande de création par voie dérogatoire, qui exigent un examen détaillé au cas par cas. En outre, la jurisprudence est abondante et complexe, du fait des nombreux recours hiérarchiques et contentieux. Le montant des indemnités à payer en cas de créations illégales est, de surcroît, élevé et, pour les pharmacies dont la création est annulée par les tribunaux, la situation est inextricable. De plus, ce système n'a pas permis de résoudre le problème des surnombres d'officines dans certaines zones, en particulier dans les centres-villes.
Il m'a donc semblé souhaitable, dès lors que la profession, dans son ensemble, approuvait cette initiative, de remplacer ce système par un régime mieux adapté et mieux codifié.
D'une part, sont prévus deux quotas de population dans les communes de plus de 2 500 habitants - 3 000 habitants dans les communes de 30 000 habitants et plus et 2 500 habitants dans les autres communes - en se fondant sur la seule population résidente, telle qu'elle est issue du dernier recensement, général ou complémentaire, la population saisonnière, dont l'évaluation est difficile, se trouvant exclue de la population à comptabiliser. Il s'agit donc d'un critère simple à appliquer, car mathématique. Les créations sont de droit dès lors que le quota n'est pas atteint.
Un quota spécifique est toutefois maintenu pour l'Alsace-Moselle et pour la Guyane.
D'autre part, la possibilité de créer des officines par voie dérogatoire est supprimée.
Pour ce qui concerne les communes de plus de 2 500 habitants, il est prévu que des créations sont possibles dans une zone comprenant un ensemble de communes limitrophes sans officine dont la population totale est au moins égale à 2 500 habitants, sous réserve que la population desdites communes n'ait pas été prise en compte pour la création des officines voisines. Il s'agit d'une innovation de nature à permettre de résoudre un certain nombre de problèmes qui se posent aujourd'hui.
Dans tous les cas, le préfet conserve cependant la faculté de prendre un arrêté de distance afin d'éviter que les officines ne soient trop proches les unes des autres, ou un arrêté de secteur déterminant le secteur géographique de la commune dans lequel la future officine devra être située.
En outre, des dispositions visent à faciliter les regroupements et les transferts d'officines afin de tenter de résoudre le problème des surnombres, notamment dans les centres-villes, avec la possibilité d'effectuer un regroupement dans une commune ayant un membre excédentaire d'officiers, n'importe où sur le territoire de cette commune et, de même, la possibilité d'opérer un transfert au sein de la même commune si elle est excédentaire en officines, ou vers une commune déficitaire en officines située dans le même département.
Les autres dispositions concernent la procédure et reprennent les dispositions actuellement en vigueur, avec des aménagements.
M. le président. La parole est à M. Vasselle, pour présenter le sous-amendement n° 223 rectifié bis.
M. Alain Vasselle. Pour sauvegarder dans les villes petites et moyennes l'équilibre actuel, il convient de freiner la création d'officines en relevant à 3 000 le quorum actuel pour les villes d'une population supérieure à 5 000 habitants.
Dans le texte présenté par notre collègue M. Autain, le seuil de population retenu pour l'application du quorum de 3 000 est fixé à 30 000 habitants. Nous différons sur ce point mais la proposition que je formule, avec mes collègues MM. Gérard Larcher et Jacques Delong, a reçu l'accord - je le signale, puisque M. Autain y a fait référence - de la profession.
Ce texte répond à un triple objectif.
Il s'agit, d'une part, de nous inscrire dans une politique équilibrée d'aménagement du territoire et de répondre aux attentes des habitants au regard tant du service rendu que de sa pérennité.
D'autre part, on sait que, depuis que des mesures ont été prises pour diminuer les dépenses de santé et assurer l'équilibre de la branche maladie, les marges bénéficiaires des pharmacies ont fortement diminué, ce qui, à terme, menace la viabilité économique de ces officines. Il s'agit donc de conforter les futures implantations, notamment celles de jeunes, et assurer la viabilité économique des officines. A cette fin, il convient de relever le seuil.
Il s'agit enfin d'éviter, du même coup, un phénomène de concentration qui se traduirait par la création de grandes structures dans des petites villes ou des communes de moyenne importance.
Tel est l'objet de cet amendement qui, à mon sens, conforte l'économie générale du texte présenté par M. Autain.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 211 rectifié bis ainsi que sur le sous-amendement n° 223 rectifié bis ?
M. Claude Huriet, rapporteur. Sur l'amendement n° 211 rectifié bis, présenté par M. Autain et ses collègues du groupe socialiste, la commission a émis un avis favorable.
Une discussion était intervenue en commission sur le sous-amendement n° 223 rectifié bis , son auteur avait d'ailleurs proposé d'autres amendements, mais les avait retirés. Sur ce point précis, la commission n'a pas pu se prononcer, faute d'avoir en connaissance des éléments nouveaux dont a fait état M. Vasselle.
En tant que rapporteur, je dois souligner l'importance des conséquences qu'aurait ce sous-amendement du fait de la seule modification du seuil de population. En effet, il s'agit de rendre plus difficile la création d'officines à partir du seuil de 5 000 habitants, et non plus de 30 000. Il ne faut donc pas considérer cette modification comme un simple aménagement du dispositif proposé par M. Autain. Je ne sais pas s'il faut dire que le sous-amendement va plus loin, mais la modification suggérée ne manquerait pas de jouer sur les conditions d'installation et de création de nouvelles officines.
La commission est donc favorable à l'amendement n° 221 rectifié bis mais émet un avis réservé sur le sous-amendement n° 223 rectifié bis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 211 rectifié bis et sur le sous-amendement n° 223 rectifié bis ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. L'avis du Gouvernement est défavorable sur le sous-amendement n° 223 rectifié bis et favorable sur l'amendement n° 211 rectifié bis .
L'amendement n° 211 rectifié bis de M. Autain introduit de nouvelles règles pour la création, le transfert et le regroupement des officines de pharmacie. Chacun sait que ce texte est très attendu par la profession, une profession avec laquelle les pouvoirs publics ont entrepris une démarche négociée de modernisation. Pour la première fois, nous avons signé un protocole d'accord en septembre dernier, qui a d'ailleurs été complété tout récemment.
Ce faisant, nous avons reconnu, ce qui me semble beaucoup plus important encore, le rôle d'acteurs de santé publique des pharmaciens, comme l'illustre l'action qu'ils mènent en faveur du sevrage tabagique.
La réforme des conditions de création des officines constitue l'un des éléments importants du protocole que nous avons signé en septembre dernier et je suis heureux que cet amendement vienne compléter le travail accompli.
En substituant au régime existant des règles plus simples, le nouveau dispositif favorise les regroupements d'officines. Je m'en réjouis, car ces dispositions vont dans la bonne direction.
L'amendement de M. Autain s'inscrit donc dans le droit-fil du texte négocié entre les pouvoirs publics et les syndicats.
Il n'en va pas de même pour le sous-amendement de M. Vasselle qui, outre qu'il introduit une modification d'importance par rapport à l'amendement, n'a fait l'objet d'aucune négociation avec les syndicats. C'est pourquoi j'y suis défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 223 rectifié bis .
M. Charles Descours. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours. Je souhaite m'expliquer à la fois sur le sous-amendement et sur l'amendement, car ils traitent du même sujet.
M. le secrétaire d'Etat vient de dire qu'il acceptait l'amendement n° 211 rectifié bis parce qu'il correspond à un accord négocié entre la profession et le ministère. Soit ! Nous le savons, d'ailleurs parfaitement, car le lobby des pharmaciens est extrêmement actif. Il n'est pas représenté ce matin dans les tribunes, mais il l'était avant-hier ! (Sourires.) Cela étant, le téléphone a dû bien fonctionner depuis et il apparaît aujourd'hui que la profession serait également favorable au sous-amendement n° 223 rectifié bis de M. Vasselle.
Ces dispositions sont, il est vrai, très attendues, et nous concernent tous. Nous savons très bien l'importance des pharmacies pour l'aménagement du territoire. Mais nous savons aussi que, compte tenu des dispositions qui ont été prises par les pouvoirs publics, un certain nombre de pharmacies enregistrent des chiffres d'affaires déjà trop faibles pour qu'il soit toujours opportun de favoriser la création de nouvelles officines.
Cela étant, dans la procédure suivie, la commission n'a entendu officiellement ni les syndicats de pharmaciens ni le conseil de l'ordre des pharmaciens. Deux des organisations qui étaient représentées avant-hier nous ont assurés de leur accord sur le texte présenté par M. Autain, ajoutant que l'autre syndicat et le conseil de l'ordre y seraient également favorables. Mais est-il vraiment normal que nous légiférions de la sorte ? Je sais très bien que, si les pharmaciens sont impatients de voir ce texte entrer en vigueur, le Gouvernement est tout aussi impatient parce que les pharmaciens lui ont fait savoir qu'ils liaient les accords précédemment signés à la mise en oeuvre de ces nouvelles règles relatives à la création d'officines. Mais le Parlement, dans ce véritable marchandage, n'a pas eu réellement l'occasion d'entendre les parties prenantes, et je ne peux que le déplorer.
Je vais donc voter l'amendement n° 211 rectifié bis de M. Autain. Je connais en effet, le point de vue de la profession pour avoir été, comme M. Kouchner, invité à Biarritz, le week-end de la Pentecôte, au congrès des pharmaciens.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Puissant lobby !
M. Charles Descours, rapporteur. J'ai passé le dimanche avec eux. M. Kouchner est arrivé le lundi à treize heures. Il voudra bien me pardonner de ne pas avoir écouté compte tenu du beau temps - c'était le seul jour de beau temps - tout ce qu'il a pu dire d'intéressant.
Mais j'ai passé le dimanche avec les pharmaciens. Je connais bien leurs problèmes.
Je dirai tout simplement que la commission n'a pas entendu les représentants de la profession sur ce sujet. Nous allons voter l'amendement parce que nous avons pris connaissance des avis qui ont été exprimés par des personnes sûrement compétentes. Sans vouloir mettre en cause ce que dit M. Autain, je tiens à souligner que la procédure n'est pas bonne.
Pour montrer mon accord avec les pharmaciens mais mon désaccord sur la procédure, je voterai et l'amendement et le sous-amendement !
M. Jean Huchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huchon.
M. Jean Huchon. Je découvre cet amendement puisque je ne suis pas membre de la commission des affaires sociales. Mais pour avoir travaillé sur ce sujet dans le cadre de l'aménagement du territoire, je suis tout à fait surpris de constater que, par l'intermédiaire d'un cavalier, j'allais dire d'un char Leclerc (Sourires) , - on arrive à réintroduire un thème auquel nous sommes sensibles. On a beaucoup parlé. La profession est d'accord. Le ministère est d'accord. Bref, tout le monde est d'accord... sauf les usagers !
Je vous invite à venir sur place dans un milieu rural diffus, mais bien vivant où, dans des communes de 1 200, 1 500 ou 1 800 habitants, on attend une pharmacie depuis longtemps.
Certes, on obtient des dérogations de temps en temps, en suppliant le préfet. Mais une action est alors engagée devant le tribunal administratif et le dossier est bien sûr repoussé.
Ces pharmacies qui ont été obtenues par dérogation fonctionnent bien, sont parfaitement rentables et n'entraînent pas une surconsommation de médicaments. Monsieur le secrétaire d'Etat, l'accroissement du nombre de pharmacies n'entraîne pas une augmentation de la vente de médicaments. C'est l'accroissement du nombre de médecins qui peut être à l'origine de ce phénomène. En effet, les médecins peuvent s'installer librement partout, ce qui n'est pas le cas des pharmaciens.
Je ne voterai pas cet amendement tout simplement parce que je pense au service des usagers, élément qui doit autant compter que les privilèges des pharmaciens. Il s'agit d'un amendement contre l'aménagement du territoire ! (La sonnerie du téléphone cellulaire de l'orateur retentit.)
M. le président. Monsieur Huchon, les téléphones cellulaires sont interdits dans l'hémicycle !
M. Jean Huchon. Veuillez m'excuser, monsieur le président, je le désactive.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je rejoins les remarques faites par notre collègue Charles Descours sur l'amendement et le sous-amendement. Je me permettrai d'insister sur deux points.
Tout d'abord, monsieur le secrétaire d'Etat, l'argumentation que vous avez développée pour vous opposer au sous-amendement et pour approuver l'amendement présenté par M. Autain - M. Charles Descours l'a souligné mais je me permets d'y revenir - s'appuie sur le fait que vous avez négocié un accord avec la profession et que c'est en raison de l'obtention de cet accord que nous légiférons aujourd'hui. Cela me semble particulièrement choquant.
Le Parlement devra-t-il connaître demain de nouvelles conditions de travail, c'est-à-dire ne légiférer qu'à partir du moment où vous aurez négocié avec tous les acteurs de la vie économique, par filière ou par domaine d'action ? Le Parlement ne sera-t-il là que pour entériner ce qui aura été décidé par le Gouvernement et par les professionnels ?
Cela me paraît un peu surprenant comme fonctionnement de la démocratie, comme nouvelle méthode de travail pour le Parlement. Cela me paraît également très choquant - mais peut-être allez-vous considérer mon propos comme une caricature - pour l'opinion. En effet, quel rôle fait-on jouer ainsi aux parlementaires ?
Seconde remarque : bien que le Gouvernement ait déclaré l'urgence sur ce texte, il accepte des amendements visant à insérer des dispositions qui auraient dû faire l'objet d'un projet de loi à part entière ou figurer dans un DMOS. Or le présent projet de loi portant création d'une CMU comporte nombre de dispositions qui auraient dû relever d'un DMOS. Cela aussi est particulièrement choquant pour le Parlement et pour tous ceux qui ont travaillé sur ces sujets.
S'agissant de la présente disposition, la commission n'a même pas eu le temps de procéder aux auditions nécessaires. Or, comme l'a fait remarquer à juste titre M. Huchon, cette disposition importante a des implications fortes en termes d'aménagement du territoire. Je me souviens, pour avoir participé aux travaux de la commission spéciale, des nombreuses auditions auxquelles nous avions procédé et du temps que nous avions consacré à la définition de la politique qui devrait être celle de la France s'agissant des officines.
Dans l'amendement présenté par M. Autain, on traite d'une manière quasi identique l'implantation des pharmacies dans des communes de moins de 2 500 habitants et dans des communes comprenant entre 2 500 et 30 000 habitants. Les ratios et les références sont pratiquement les mêmes. On ne fait une différence qu'à partir de 30 000 habitants.
En termes d'aménagement du territoire, il faut sans aucun doute prévoir des dispositions particulières pour le milieu rural, car il faut en effet parcourir des distances importantes pour accéder aux services. Les seuils de population ne peuvent donc pas être identiques à ceux que l'on retient pour des villes moyennes ou des petites villes, a fortiori pour des villes beaucoup plus importantes.
Il faut, notamment dans les villes comprenant entre 5 000 et 30 000 habitants, préserver le service de proximité, sans aboutir à un niveau de concentration préjudiciable à la proximité du service telle qu'elle existe actuellement.
En outre, se greffe sur ce problème la question de la viabilité économique des officines que l'on implante. Il faut donc instituer un seuil et un niveau pertinents.
Pour toutes ces raisons, je voterai cet amendement, en souhaitant que le sous-amendement que j'ai présenté soit également adopté.
L'argument invoqué concerne les négociations. Comme l'a dit à juste titre M. Descours, l'avis de la profession a évolué depuis le moment où des négociations ont été menées par le Gouvernement avec elle et les auteurs de l'amendement de M. Autain. En effet, aujourd'hui, la profession considère que le sous-amendement que je présente est tout à fait pertinent.
Si on avait travaillé dans des conditions autres que celles qui ont prévalu jusqu'à aujourd'hui, nous aurions certainement évité la confusion que nous connaissons et légiférerions sans doute de manière beaucoup plus convenable.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il est vraiment dommage que nous soyons dans cette situation. En effet, la méthode utilisée est, à mes yeux, détestable ; c'est la négation du travail du Parlement !
Je ne reviendrai pas sur ce que j'ai dit au cours de mon intervention dans la discussion générale, à savoir sur les circonstances qui nous ont été imposées pour examiner un texte important qui est suivi, dans le titre IV, d'un certain nombre d'articles dont chacun aurait pu faire en lui-même l'objet d'un projet de loi. Le dispositif qui nous est présenté en est une illustration particulièrement éclatante, compte tenu du nombre d'articles du code qui sont modifiés ou supprimés et de leur importance, non seulement en termes de santé publique, du fait de la profession concernée, mais également, comme l'a souligné notre collègue Jean Huchon, au regard de l'aménagement du territoire. Par sa vocation même, de par la Constitution, le Sénat est bien sûr très attentif à ces questions.
Le dispositif qui nous est soumis en cet instant comporte quatre ou cinq pages. Certes, nous percevons les raisons qui ont conduit à l'ouverture de ce tiroir, mais ce n'est pas non plus le rôle de notre assemblée d'accepter forcément les choses en l'état. La commission n'a effectivement pas pu travailler dans des conditions normales. Nous avons examiné les amendements extérieurs entre la suspension de la séance en fin d'après-midi et la reprise du soir.
Je rappelle également que, aux termes de l'article 27 de la Constitution, tout mandat impératif est nul, et que nous n'avons pas à subir des textes sur lesquels nous n'avons pas le temps de réfléchir.
C'est pourquoi, à titre personnel, je ne prendrai pas part au vote ni sur cet amendement ni sur le sous-amendement.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je ne crois pas que trop de véhémence s'impose sur ce sujet. Le rôle du Parlement est tout à fait éminent, et il n'est pas remis en question.
Vous me reprochez, et c'est un sérieux paradoxe, le fait que la concertation ait précédé l'élaboration de la loi. Mais c'est tout de même ainsi que fonctionne la démocratie ! Je vous rappelle à cet égard quelques précédents peu éloignés de nous : lorsqu'une profession n'est pas vraiment en accord avec ce qui se passe, cela entraîne des conséquences politiques dont vous vous souvenez, mesdames, messieurs de la majorité sénatoriale.
Les pharmaciens, c'est comme les médecins : il est bon de les consulter ; le milieu rural, il est bon de le consulter ; les usagers, il est bon de les consulter. C'est ce que nous avons fait !
Il y a autre chose que l'installation en fonction d'un nombre d'habitants. Monsieur Huchon, permettez-moi de vous dire - nous sommes bien entendu tout à fait d'accord pour préserver le milieu rural - que la majorité de nos concitoyens vivent en ville. Il faut donc aussi tenir compte de cet élément.
Nous devons, bien entendu, essayer de tenir compte des mesures qui sont proposées et dont nous avons également débattu avec M. Vasselle. Mais nous avons un autre point dans cet accord avec les pharmaciens, qui concerne la santé publique, monsieur Descours, à savoir cette réforme des médicaments génériques que la France a mis vingt-cinq ans de plus que ses voisins à proposer.
C'était lourd, mais nous l'avons fait avec les pharmaciens, bien entendu, comme nous avons voulu le faire avec les médecins, et petit à petit, nous parviendrons, je l'espère, à mener d'autres transformations. Vous avez, s'agissant de cet accord, un rôle éminent à jouer. Je ne dis pas cela par démogagie, je le pense depuis longtemps. Je l'avais dit à propos de la toxicomanie, en ce qui concerne le couple pharmacien-médecin, qui me semblait être aux premières loges.
C'est, encore une fois, ce que nous voulons faire par rapport à des démarches de santé publique que le pharmacien peut prendre en compte, bien sûr, avec le médecin. Ce n'est pas autre chose.
Nous n'avons pas décrété des mesures concernant uniquement les finances des pharmaciens et, à cet égard, je songe de nouveau à un précédent fâcheux et récent. Nous avons voulu, avec eux, aménager la profession en fonction des exigences de santé publique de notre pays. C'est tout ! Il n'y avait donc aucun piège.
La discussion ici de cette disposition était évidente, en raison de l'urgence, mais aussi parce que vous avez un rôle majeur à jouer s'agissant de toutes les décisions éclairées. Je souhaite, moi aussi, disposer de plus de temps. En effet, nous n'en avons pas tellement, nous non plus, d'autant que, à chaque fois, vous nous présentez de nouvelles demandes. On l'a vu tout à l'heure avec la demande de M. Descours concernant la réforme de la bioéthique. Là aussi, nous allons évidemment trop vite, mais c'est peut-être que, en cette législature, nous avons beaucoup à faire.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. J'entends bien tout ce qui est dit. Mais à ce moment là, que tout le monde prenne ses responsabilités, que le gouvernement actuel procède par ordonnances et présente ensuite ses méditations au Parlement : nous saurons alors qui fait quoi et comment il le fait !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 223 rectifié bis , repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 211 rectifié bis .
M. François Autain. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Autain.
M. François Autain. Je voudrais faire part de mon étonnement face à la position adoptée à l'instant par M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est une position personnelle !
M. François Autain. C'est justement parce qu'elle est personnelle qu'elle m'étonne, et je ne vise pas ici les critiques que vous avez pu formuler sur les conditions dans lesquelles la commission a été saisie de ce texte, même s'il convient de préciser qu'il s'agit non pas d'un texte de loi mais d'un amendement.
Certes, c'est un amendement d'une certaine ampleur, mais le sujet le méritait et ce n'est pas la première fois que nous sommes amenés à légiférer sur des textes qui ont déjà fait l'objet d'un accord avec les professionnels concernés. Il nous reste tout de même la liberté de les amender ! Je constate d'ailleurs que M. Vasselle a exercé ce droit d'amendement, et avec succès. Nous sommes là tout à fait dans notre rôle, et nous n'avons à cet égard aucune raison de nous sentir dépossédés des prérogatives qui sont les nôtres.
Mais l'attitude adoptée aujourd'hui par M. le président de la commission des affaires sociales me laisse perplexe, car elle est en contradiction totale avec celle qu'il avait adoptée lors de l'examen en commission de cet amendement, avant-hier soir.
Que s'est-il passé depuis, monsieur le président de la commission ? Avez-vous rencontré des pharmaciens ou certains de leurs représentants ?
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Je n'ai rencontré personne !
M. François Autain. C'est encore plus grave !
Il m'a semblé qu'avant-hier soir vous étiez tout à fait favorable à ce texte. Aujourd'hui, vous ne l'êtes plus. Je me permets de trouver cette attitude changeante particulièrement regrettable !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Mon désaccord porte non sur le texte mais sur la méthode !
M. Jean Huchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huchon.
M. Jean Huchon. Je ne peux que répéter ce que j'ai dit tout à l'heure : les conditions de l'examen de cet amendement n'ont pas satisfait les membres de la commission des affaires sociales, mais c'est encore pis pour nous qui n'avons eu le texte qu'hier !
Cette rédaction va rendre encore plus rigoureuses les conditions d'installation des pharmacies puisque le quotient augmentera de 500 personnes. Je voterai donc contre l'amendement n° 211 rectifié bis.
M. Jean-Louis Lorrain. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. En l'état de nos conditions de travail, je ne me sens pas la capacité d'assumer les conséquences pour notre pays, et plus particulièrement pour l'Alsace-Lorraine, de l'adoption de cet amendement.
J'avoue ne pas bien saisir la portée de ce texte sur le droit local. Et en matière d'aménagement du territoire, comment savoir, compte tenu de la difficulté à se faire une opinion à cet égard, dans quelle mesure les dispositions de cet amendement interfèrent avec les intérêts professionnels ?
Par conséquent, ne pouvant m'engager, je ne voterai pas l'amendement n° 211 rectifié bis.
Mme Nicole Borvo. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Je ne prendrai pas part au vote, car il ne me paraît pas cohérent de régler, au travers d'un débat sur la CMU, les relations du Gouvernement et des pharmaciens. J'en suis désolée dans la mesure où je soutiens l'effort accompli par le Gouvernement pour essayer d'associer les pharmaciens à une politique de santé. Mais ce marchandage ne me paraît pas adapté.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 211 rectifié bis , accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 37 tervicies.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)