Séance du 26 mai 1999







M. le président. « Art. 26. _ L'article 61 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 61 . _ L'existence des zones de revitalisation rurale est prise en compte dans les schémas de services collectifs et dans les schémas régionaux d'aménagement et de développement du territoire prévus à l'article 34 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat.
« Ces zones constituent un territoire de référence pour l'organisation des services rendus aux usagers prévue à l'article 29 de la présente loi.
« L'Etat met en place les moyens nécessaires pour que ces zones puissent bénéficier des politiques contractuelles prévues à l'article 22. »
La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Madame la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, je voulais vous interroger sur les indications fournies par la presse sur la prime d'aménagement du territoire. Heureusement qu'il y a la presse, car le Parlement n'est informé de rien ! Chacun connaît l'importance de cette prime pour les zones qui en sont bénéficiaires ou qui, au contraire, en sont exclues.
Selon un article paru dans un journal du soir que je viens de lire, une proposition faite par la France, dont nous n'avons d'ailleurs pas eu connaissance, aurait été récusée par Bruxelles, qui aurait présenté un certain nombre de demandes reconventionnelles, notamment une réduction de la population susceptible de bénéficier de la PAT.
Le Gouvernement a, indique-t-on, l'intention de privilégier les zones industrielles et de négliger l'espace rural, qui, d'après cet article, passerait à la trappe.
Enfin, il est fait état d'un certain nombre de démarches de caractère politique auprès du Premier ministre et du ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Si j'ai bien compris, la carte de la prime à l'aménagement du territoire aurait été négociée politiquement, les critères étant ensuite adaptés à la carte et non l'inverse.
Nous sommes particulièrement inquiets, d'autant que nous aurons des comptes à rendre aux populations que nous représentons. De plus, je trouve tout à fait insensé que ces négociations paraissent parfaitement suivies et connues de la presse alors que seul le Parlement est malheureusement tenu dans l'ignorance.
Je demande par conséquent à Mme la ministre de bien vouloir nous dire quelles sont les échéances et les intentions de la France.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je ne me sens pas sommée de répondre, monsieur le président, mais je le fais bien volontiers, quoique j'ai déjà abordé ce thème hier devant les sénateurs.
Monsieur le président de la commission spéciale, cette carte n'a pas été négociée politiquement, à moins que vous ne considériez comme tel l'intérêt - que je considère normal, pour ma part - du Président de la République, du président du Sénat et du président de l'Assemblée nationale, qui plaidaient d'ailleurs non pas pro domo , mais avec le souci de regarder de façon plus globale ce que fait le Gouvernement.
J'ai eu le souci constant, pour ne pas renouveler ce qui avait été si souvent le cas par le passé, à savoir, justement, des négociations à huis clos dans le bureau d'un ministre, au moment de transmettre des cartes, de débattre largement des critères qui devaient être retenus pour élaborer cette carte de la PAT. J'assume complètement ces critères, qu'il s'agisse des revenus moyens par ménage, du taux de chômage ou de la dépopulation.
En revanche, il est parfaitement exact que nous avons utilisé la marge restant disponible pour réintroduire un certain nombre de zones menacées par des suppressions massives d'emplois, même si les critères statistiques dont nous disposons actuellement ne permettent pas encore de le vérifier. Les suppressions d'emplois annoncées dans la région de Pau, à Belfort, chez Alstom ou aux Ateliers et chantiers du Havre doivent être prises en compte parce qu'elles interviendront au cours de la prochaine phase de la validation de la PAT, même si elles ne sont pas effectives aujourd'hui.
J'ai particulièrement tenu à cette transparence des critères pour éviter les spéculations. Celles-ci sont liées au fait que nous avons souhaité transmettre à Bruxelles une carte prenant en compte au maximum vos préoccupations.
Or la règle du jeu qui nous est fixée par la Commission n'est pas très facile. Nous sommes, en effet, censés transmettre des zones d'emplois homogènes, c'est-à-dire en fait le coeur des villes, alors que les emplois s'implantent plutôt en périphérie. Cela « mange » beaucoup de populations pour des perspectives d'implantation d'activités relativement modestes.
Nous avions procédé à quelques découpages afin notamment de réintroduire un certain nombre de périphéries de villes qui sont frappées par des taux élevés de chômage sans forcément réunir aujourd'hui tous les critères. Il y avait, me semble-t-il, des villes comme Toulon, Marseille - je suis désolé, monsieur le président, mais tel était le cas -, Rouen, qui ont des taux de chômage importants, souvent supérieurs à 13 %.
A Bruxelles, on nous a fait remarquer qu'il fallait ne retenir que des zones d'emplois homogènes, complètes, et ne pas procéder à des découpages en leur sein. Nous devons donc revoir cette carte. J'ai bien l'intention de continuer à l'assumer. Je n'ai pas du tout honte du travail qui a été fait, même si le petit retard apporté à la communication de cette carte nourrit des spéculations que je déplore et que je ne reprends pas à mon compte.
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
Pourrons-nous être informés, à la commission des affaires économiques, des indications que le Gouvernement transmettra à Bruxelles ? Sur quel degré de transparence pouvons-nous compter ?
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le président, j'ai reçu régulièrement les élus qui m'ont sollicitée pour examiner avec eux les conditions dans lesquelles les territoires qui les intéressaient pouvaient bénéficier des dispositifs de solidarité européens ou nationaux. Je pense notamment aux présidents du conseil régional et des conseils généraux de Bretagne, qui sont venus ensemble pour essayer de trouver un accord sur l'évolution de ces zonages, nécessaire en raison de la diminution drastique des populations couvertes par ces zonages, ce qui n'est pas mon choix, vous vous en doutez. Il est évidemment plus difficile de faire des cartes quand on doit procéder à une réduction des territoires couverts que lorsque l'on doit procéder à une augmentation !
Ce partage du fardeau doit évidemment être fait de façon fine, en fonction de la souffrance réelle des territoires.
Par ailleurs, j'ai manifesté à plusieurs reprises ma disponibilité pour « plancher » devant vos commissions, que ce soit à l'Assemblée nationale ou au Sénat, qui sont des enceintes très adaptées à ce travail, surtout si vous disposez du matériel adéquat pour projeter des cartes et en discuter.
M. le président. Je vous signale, madame la ministre, que votre prédécesseur n'a jamais transmis de cartes sans les avoir soumises au Parlement.
Vingt ans de vie parlementaire m'ont appris un certain nombre de règles élémentaires !
Par amendement n° 44, MM. Gérard Larcher, Belot et Revet, au nom de la commission spéciale, proposent de rédiger comme suit l'article 26 :
« L'article 61 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 précitée est ainsi modifié :
« 1° Avant le premier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« L'existence de zones de revitalisation rurale est prise en compte dans les schémas directeurs prévus par l'article 2 de la présente loi et dans les schémas régionaux d'aménagement et de développement du territoire prévus à l'article 34 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat.
« Ces zones constituent un territoire de référence pour l'organisation des services rendus aux usagers prévue à l'article 29 de la présente loi.
« L'Etat met en place les moyens nécessaires pour que ces zones puissent bénéficier des politiques contractuelles prévues à l'article 22. » ;
« 2° Dans le premier alinéa, les mots : "et la loi de modernisation agricole," sont supprimés ;
« 3° Après le septième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Elle prévoira une modernisation du droit de l'urbanisme. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur de la commission spéciale. Je ne parlerai pas de cartomancie, nouveau syndrome lié aux cartes qui apparaissent et disparaissent, mais dont le Parlement n'a jamais communication avant qu'elles soient envoyées et qu'elles reviennent !
J'en reviens à ces 3 millions d'habitants qui vont se voir privés de prime d'aménagement du territoire, puisque c'est ce qui résulte de la première transmission de carte de la PAT. Ce sont principalement les zones rurales qui vont être touchées.
Plus que jamais le territoire rural va donc avoir besoin que des dispositions soient prises, notamment par le biais d'un texte, pour sa revitalisation. Voilà pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de soutenir cet amendement n° 44, qui rétablit le texte dans la rédaction initialement proposée par le Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je ne répondrai pas à l'introduction de M. Gérard Larcher, car je ne souhaite pas polémiquer.
En revanche, je souhaite qu'on arrête de légiférer à crédit. L'expérience de la loi que nous révisons devrait nous inciter à faire preuve de prudence : l'annonce d'une loi ne fait pas la loi.
Ce n'est pas ce Gouvernement qui n'a pas présenté au Parlement le projet prévu par l'article 26 du texte voté en 1995. Si nos prédécesseurs ne l'ont pas fait, alors qu'ils avaient voté ce texte, c'est sans doute parce que l'entreprise était plus difficile à conduire qu'à annoncer. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement n° 44.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 26 est ainsi rédigé.

Article 26 bis