Séance du 18 mai 1999







M. le président. « Art. 1er bis. - I. - L'ensemble des organisations syndicales d'exploitants agricoles qui remplissent les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ont vocation à être représentées au sein des commissions ainsi que dans les comités professionnels ou organismes de toute nature investis d'une mission de service public, ou assurant la gestion de fonds publics ou assimilés, où siègent des représentants des exploitants agricoles.
« La présente disposition n'est pas applicable aux organisations interprofessionnelles reconnues, établissements et organismes intervenant dans le secteur des produits à appellation d'origine.
« II. _ Non modifié . »
Par amendement n° 1, M. Souplet, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le I de cet article :
« I. - Sont habilitées à siéger au sein des commissions ou organismes agricoles dont la liste est fixée par décret les organisations syndicales d'exploitants agricoles qui satisfont aux conditions suivantes :
« 1° Justifier d'un fonctionnement indépendant, régulier et effectif depuis cinq ans au moins ;
« 2° Avoir obtenu dans le département plus de 15 % des suffrages exprimés lors des élections à la chambre d'agriculture (collèges des chefs d'exploitation et assimilés). Lorsque deux organisations syndicales ont constitué une liste d'union ayant obtenu plus de 30 % des suffrages, elles sont réputées satisfaire à l'une et l'autre des conditions.
« Sont représentées au niveau régional les organisations syndicales qui ont été habilitées dans la moitié au moins des départements de la région.
« Sont représentées au plan national les organisations syndicales qui ont été habilitées dans au moins vingt-cinq départements.
« La présente disposition n'est pas applicable aux organisations interprofessionnelles reconnues. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Souplet, rapporteur. La rédaction adoptée en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale constitue une amélioration par rapport au dispositif, difficilement applicable, qu'elle a retenu en première lecture.
En effet, M. François Patriat, rapporteur du projet de loi au Palais-Bourbon, a souhaité, d'une part, exclure du champ d'application de ce dispositif les organisations interprofessionnelles intervenant dans le secteur des appellations d'origine contrôlée, et, d'autre part, préciser que les organisations syndicales considérées comme représentatives ne sont pas systématiquement représentées mais ont vocation à l'être.
Par ailleurs, M. le ministre a confirmé en séance publique que les dispositions du décret de 1990 seraient maintenues et que le critère de 15 % ne serait pas abaissé.
Je rappelle que, si le respect du pluralisme est l'un des corollaires fondamentaux de la démocratie, le respect du fait majoritaire n'en demeure pas moins essentiel. Je me félicite de l'avancée réelle que constitue le nouveau texte de l'Assemblée nationale.
Ayant adopté un texte dogmatique en première lecture, l'Assemblée nationale a pris en compte les observations du Sénat, mais seulement au stade de la nouvelle lecture. L'utilisation de la procédure d'urgence souhaitée par le Gouvernement a ainsi cristallisé les désaccords.
Ce fait démontre a posteriori l'utilité des deux lectures avant que ne s'engage le processus de la commission mixte paritaire.
La commission vous propose néanmoins un amendement tendant à rétablir la rédaction du Sénat.
Elle souhaite, en effet, que le ministre de l'agriculture et de la pêche confirme devant la Haute Assemblée que les dispositions du décret de 1990 seront maintenues, que le critère de 15 % ne sera pas abaissé et que toutes les organisations interprofessionnelles reconnues seront bien exclues de ce dispositif.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Cet amendement reprend le texte adopté par le Sénat, contre l'avis du Gouvernement, en première lecture.
D'une part, il limite le champ d'application du pluralisme syndical en le restreignant à une liste qui serait fixée par décret, alors que le texte proposé par l'Assemblée nationale permet, lui, le respect du pluralisme pour les organismes investis d'une mission de service public ou assurant la gestion de fonds publics ou assimilés. D'autre part, en transposant dans la loi les termes du décret du 28 février 1990, il empiète sur le domaine réglementaire.
S'il appartient au législateur de définir le principe de la représentativité, il revient au pouvoir réglementaire d'en fixer les conditions d'application.
Pour ces deux raisons, je souhaite que le Sénat rejette cet amendement et que l'on s'en tienne au texte adopté par l'Assemblée nationale.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Gérard Le Cam. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement proposé par la commission est tout à fait caractéristique du refus qui anime la majorité sénatoriale de toute ouverture en direction des organismes agricoles pour assurer le pluralisme démocratique.
Il apparaît plus que nécessaire aujourd'hui de dépasser les motivations d'un décret qui date de 1990 pour l'adapter au nouveau contexte syndical agricole.
N'en déplaise à certains dans cet hémicycle, la FNSEA ne peut représenter en 1999 à elle seule la diversité des opinions des agriculteurs.
C'est pourquoi non seulement notre groupe, comme en première lecture, votera contre l'amendement n° 1, mais il vous suggère également, monsieur le ministre, de réviser dès que possible le décret Nallet...
M. Hilaire Flandre. C'était pourtant un bon ministre !
M. Gérard Le Cam. ... pour, enfin, donner toute la place qu'elles méritent aux organisations professionnelles qui ont émergé dans le paysage agricole durant ces dix dernières années.
Monsieur le ministre, alors que j'avais proposé, en première lecture, de ramener le seuil de représentativité de 15 % à 5 %, vous nous aviez laissé entendre qu'une telle hypothèse n'était pas à rejeter a priori. Or j'observe que, lors des débats à l'Assemblée nationale, vous avez, et de façon catégorique, exclu cette possibilité avant les prochaines élections.
Dès lors, monsieur le ministre, je doute de l'efficacité du dispositif prévu à l'article 1er bis, puisque l'on déclare vouloir admettre la pleine représentation des organisations syndicales tout en refusant à certaines d'entre elles les conditions de leur accès dans les instances où se décident l'avenir de notre agriculture, mais aussi, pour partie, l'application de ce texte.
Aussi, monsieur le ministre, je souhaiterais connaître vos intentions dans ce domaine.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. A l'issue des débats à l'Assemblée nationale et après examen des conséquences d'un dispositif différent pour un certain nombre de structures, il est apparu que le critère de 15 % devait être maintenu. Il ne faut pas, en effet, que l'émiettement de la représentation aboutisse à rendre les structures ingérables.
Autant nous voulons accentuer le principe du pluralisme - et l'objet même de cet article est d'instaurer le pluralisme partout, dans toutes les instances investies d'une mission de service public - autant aller trop loin serait rendre ces instances ingérables. C'est la raison pour laquelle - je m'adresse ici en particulier à M. le rapporteur et à M. Le Cam - nous maintiendrons le critère de 15 %.
Par la même occasion, monsieur le rapporteur, je précise que nous excluons les interprofessions de ce pluralisme. En effet, les interprofessions sont, elles, engagées non pas dans une mission de service public au sens strict, mais dans une gestion de politique des filières, ce qui est un cas bien particulier.
M. Michel Souplet, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Souplet, rapporteur. Monsieur Le Cam, si la commission était très attachée au critère de 15 %, c'est parce qu'elle reconnaissait l'utilité du pluralisme et de sa représentation. Mais nous ne voulions pas tomber dans le ridicule pour autant.
La commission avait souhaité reprendre le texte de première lecture, sauf si M. le ministre répondait positivement aux questions que j'ai posées à l'instant. Or nous avons obtenu une réponse sur l'interprofession et sur le seuil de 15 %. En conséquence, je peux retirer l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 1 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er bis.

(L'article 1er bis est adopté.)

Article additionnel avant l'article 1er ter