Séance du 6 mai 1999







M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Ma question s'adresse à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.
L'avenir des retraites est l'une des premières préoccupations de l'ensemble des Français. Les réformes sont inéluctables. Elles concernent toutes les générations, en particulier les jeunes, dans la mesure où, bien évidemment, ces réformes ne remettent pas en cause les droits jusqu'ici acquis par ceux qui, d'ores et déjà, bénéficient d'une retraite.
Pour mener à bien ces futurs changements, M. le Premier ministre a tenu à disposer d'une analyse d'ensemble, aussi complète que précise, des différents régimes de retraite. Cette méthode a globalement reçu une appréciation très favorable.
Au terme de sa mission, M. Jean-Michel Charpin, chargé de cette analyse, vient de remettre un rapport qui témoigne de la qualité des travaux réalisés, et ce dans la plus grande transparence, ainsi que l'ont unanimement reconnu tous les acteurs de ce dossier.
Ce rapport, qui établit un diagnostic, a le mérite de montrer la complexité du sujet et de faire comprendre qu'il n'y a pas de solution miracle. Il ouvre des pistes de solutions laissées à l'appréciation du Gouvernement.
Comme vous le savez, les socialistes sont attachés au système par répartition. Tout doit donc être mis en oeuvre pour le consolider.
Je pense, en premier lieu, au fonds de réserve que le Gouvernement a créé l'an dernier. Concernant cette excellente initiative, que j'ai soutenue devant cette assemblée au nom du groupe socialiste, pourriez-vous nous donner toutes assurances que le fonds sera géré selon des modalités offrant toutes les garanties et qu'il associera, dans sa gestion, les représentants des salariés, des employeurs et les pouvoirs publics ?
En second lieu, s'agissant des fonds de pensions, je souhaite connaître les intentions du Gouvernement quant à l'abrogation de la loi Thomas, votée avant la dissolution de l'Assemblée nationale et qui porte atteinte au système par répartition. (Mais non ! sur les travées du RPR.)
Enfin, pouvez-vous nous donner des précisions sur le dispositif permanent de pilotage à long terme de la réforme des retraites préconisé dans le rapport Charpin et sur son articulation avec la commission des comptes de la sécurité sociale ? (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le sénateur, M. Charpin, commissaire général au Plan, nous a effectivement remis récemment un rapport qui devait à la fois faire le point sur notre système de retraites, caractérisé en France par la répartition, et parler d'avenir.
Premièrement, la répartition a été un succès pour notre pays. La retraite issue de ce système était égalitaire et permettait de passer à la période postérieure à la vie active dans de bonnes conditions. Il faut donc poursuivre ce système.
Deuxièmement, selon le rapport, à partir de 2005-2040, nous serons confrontés à l'effet de ce que l'on a appelé le baby-boom, c'est-à-dire à l'arrivée à l'âge de la retraite des classes d'âge nées après la guerre, ce qui mettra notre système de retraite dans une situation critique.
Troisièmement, il s'agit de savoir comment nous allons nous en sortir, d'autant que s'ajoute à ce changement démographique l'allongement de la vie, à raison de trois mois chaque année.
Nous ne sommes donc pas au pied du mur, même s'il nous faut réagir. C'est important, car cela veut dire qu'il n'y a pas urgence, que c'est à partir de 2005 que le problème se posera. Nous avons le temps, d'ici là, de nous concerter. (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Vasselle. Mais 2005, c'est demain !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Pour vous, 2005, c'est peut-être une urgence pour nous, cela laisse le temps de la concertation, et nous n'attendrons d'ailleurs pas 2005.
M. Alain Vasselle. Il sera trop tard !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. C'est un problème d'appréciation !
M. Jean-Louis Carrère. Ils le savent bien !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Quant à la loi Thomas, qui privilégie l'apport personnel et la retraite par capitalisation, qui suppose une démarche individuelle, le Gouvernement s'est engagé à la supprimer. Nous le ferons, en fonction du calendrier parlementaire, qui, vous le savez, est très chargé, dans un avenir extrêmement proche. Cela a déjà été dit, et je le répète.
Enfin, j'énoncerai rapidement trois principes.
Les dispositifs d'épargne retraite ne sont pas condamnés. Dans certaines circonstances, ils seront indispensables.
C'est un cadre collectif qu'il nous faut. Dans ce cadre collectif, il ne faudra pas fragiliser les systèmes par répartition, et nous ne le ferons pas.
Enfin, dans tous les cas, les partenaires sociaux seront associés à la gestion des retraites, comme d'ailleurs à la gestion du fonds de réserve auquel vous avez fait allusion, monsieur le sénateur. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

AVENIR DES RETRAITES