Séance du 18 mars 1999






PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ

Suite de la discussion d'une proposition de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi (n° 108, 1998-1999), adoptée par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relative au pacte civil de solidarité. [Rapport n° 258 (1998-1999) et avis n° 261 (1998-1999).]
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le débat sur le pacte civil de solidarité, le PACS, est l'un des plus médiatisés. L'éventuelle reconnaissance légale d'une union entre deux personnes du même sexe est peut-être un grand sujet de société, mais on peut s'interroger : le Gouvernement ne profite-t-il pas de ce débat polémique pour « détourner » l'attention des Français des questions fondamentales, et autrement urgentes, de l'emploi, de la sécurité et de la réforme de l'Etat ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous avez fait mieux !
M. Aymeri de Montesquiou. Ce débat sur le PACS ne laisse pas indifférent. Au contraire, il attise les passions, il échauffe les esprits. Qui n'a pas son avis sur le sujet ? Il est aussi, et c'est bien regrettable, pollué par sa politisation.
En effet, de manière systématique, la souscription au PACS est assimilée à la gauche et, inversement, l'opposition au PACS serait l'apanage de la droite.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ça, c'est vrai !
M. Aymeri de Montesquiou. L'atmosphère des débats est souvent tendue, alors que des arguments pertinents et paisibles y ont leur place.
Il faudrait faire abstraction des querelles partisanes afin d'examiner le texte qui nous est proposé avec plus de sérénité et d'engager un vrai débat de fond.
A ce titre, l'analyse faite par le rapporteur, M. Gélard, est tout à fait fouillée, rigoureuse, étayée. Elle présente de manière parfaitement objective et impartiale les enjeux du débat et elle aboutit à des solutions concrètes et raisonnables.
La société change, c'est un fait, et il est nécessaire de s'adapter aux modes de vie d'aujourd'hui, mais pas par n'importe quel moyen ni à n'importe quel prix. Il faut mesurer toutes les conséquences de cette adaptation.
Les relations entre adultes au sein d'un couple, la vie affective relèvent du libre choix de chacun. L'amour, l'affection, la tendresse ont la même qualité et la même charge émotionnelle dans tous les couples, qu'ils soient homosexuels ou hétérosexuels. Ces relations appartenant au domaine privé, il est juste de les respecter.
Le désir de vivre en couple étant le même chez les homosexuels et les hétérosexuels, pourquoi refuser à un couple stable une reconnaissance légale de sa situation de fait ? Il est possible et même souhaitable de reconnaître des droits aux couples homosexuels menant une vie commune, sans pour autant être obligé de créer un montage aussi complexe et si mal préparé. Des dispositions d'ordre matériel peuvent améliorer la situation du couple homosexuel telle qu'elle est aujourd'hui, notamment en ce qui concerne le droit au bail, la succession, la protection sociale.
La loi a vocation à s'appliquer à tous les citoyens. Elle n'est pas catégorielle. Etendre le concubinage aux couples homosexuels est donc une solution plus judicieuse que ce contrat discutable, aux appellations multiples et polémiques : « sous-mariage », « mariage du troisième type », etc.
Néanmoins, lorsqu'il est question de la vie familiale et, par voie de conséquence, des enfants, le sujet est plus problématique. Hypocrisie ou inconscience, le PACS est muet sur l'enfant alors que la question se pose déjà, et les tenants du PACS ne le nient pas.
L'article V de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose : « Tout ce qui n'est pas défendu par la Loi ne peut être empêché. »
N'interdisant pas la mise au monde ou l'adoption d'enfants par des couples homosexuels, ce texte laisse donc la porte ouverte à ces deux possibilités.
M. Jean-Luc Mélenchon. Jamais de la vie !
M. Aymeri de Montesquiou. Le texte ne les interdit pas !
La famille conçue avec deux parents de même sexe est alors sujet d'inquiétude.
« La famille est l'élément naturel et fondamental de la société...
M. Jean-Luc Mélenchon. Non !
M. Aymeri de Montesquiou. ... et a droit à la protection de la société et de l'Etat », comme l'indique l'article 16, de la Déclaration universelle des droits de l'homme.
En effet, il est de l'intérêt de la société de préserver la cohérence d'un ensemble de règles du droit de la famille plaçant au premier plan le bien de l'enfant. Les réformes que l'Etat est susceptible d'entreprendre doivent tenir compte de l'intérêt supérieur de l'enfant. De telles réformes sont à mûrir longuement avant d'introduire dans le droit positif des mesures qui pourraient avoir des conséquences non prévues à l'origine.
Or tel paraît bien être le cas du PACS. On veut reconnaître l'union entre les partenaires d'un couple homosexuel. Soit ! Mais avec quelle protection pour les enfants ? La filiation, l'adoption, l'insémination artificielle sont latentes et ne tarderont pas à se faire jour si la proposition de loi est adoptée. C'est là que réside le danger ! Il est de notre devoir de parlementaires et de notre responsabilité de parents de barrer la route à de tels risques.
Les questions juridiques soulevées par ces nouvelles formes de filiation, de paternité et de maternité seront très problématiques, car elles touchent le coeur de la société, de la structure familiale telle que nous la concevons : un homme, une femme et des enfants. Le facteur biologique est l'élément naturel et donc essentiel de la filiation. La société ne peut reconnaître qu'un enfant ait deux pères ou deux mères.
Je justifierai ma préoccupation en rappelant les propos tenus en séance publique le 9 octobre 1998 par le député Jean-Pierre Michel : « Pour ma part, je n'ai jamais entendu un seul argument convaincant selon lequel l'intérêt de l'enfant, c'est d'avoir absolument comme modèle un homme et une femme ». Or M. Michel, chacun le sait, est le « géniteur » de cette proposition de loi.
Alors, je m'interroge de nouveau : y a-t-il hypocrisie ou insconscience lorsque certains affirment que la question de la filiation n'est pas la prochaine étape ? En tout cas, à partir de cette seule interrogation, on ne peut être que défavorable à ce texte.
L'Etat se doit de préparer l'avenir. L'avenir, ce sont les enfants, et donc la famille. L'intérêt des enfants est absolument primordial, et c'est pour cela que l'Etat est habilité à intervenir afin de les protéger.
Je reviens sur les propos de M. Michel, inspirateur du texte, selon lesquels il n'est pas convaincu que l'intérêt de l'enfant soit d'avoir comme modèle un homme et une femme. Les enfants veulent avoir un père et une mère, car ils en ressentent le besoin. Ce serait aller contre cette pulsion que de reconnaître que des parents de même sexe peuvent élever un enfant. Le désir de maternité ou de paternité est compréhensible chez tout individu. Mais c'est à l'enfant qu'il faut penser, non à un désir égoïste.
M. Jean Chérioux. Tout à fait !
M. Aymeri de Montesquiou. Le droit « à » l'enfant, souvent revendiqué, ne doit pas supplanter le droit « de » l'enfant.
M. Louis de Broissia. Très bien !
M. Aymeri de Montesquiou. En effet, quel serait l'équilibre de celui-ci ? De nombreux enfants vivant au sein de familles monoparentales sont déjà perturbés, car il leur manque la présence d'un parent. Comment réagiraient des enfants avec deux papas ou deux mamans ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Franchement, ce n'est pas le problème !
M. Aymeri de Montesquiou. Si, c'est le problème, mon cher collègue !
Ce n'est que suivre la nature que reconnaître qu'un enfant a été conçu par un homme et une femme. Faut-il tenter de transformer un couple homosexuel en un couple dont la vocation serait la procréation ? Cela n'est pas « naturellement » possible. Cela n'est donc pas dans le droit fil de la nature.
M. Nicolas About. A moins d'être une amibe ! Par scissiparité !
M. Aymeri de Montesquiou. Madame la ministre, si un célibataire adopte un enfant, comme la loi l'y autorise, à partir de l'âge de vingt-huit ans, puis décide de « pacser » avec quelqu'un du même sexe, que ferez-vous ? Quel avenir offrez-vous à cet enfant ?
Mes chers collègues, les implications morales, éthiques et religieuses de ces questions sont considérables.
Institution républicaine, le mariage est un contrat conclu par deux personnes qui veulent vivre ensemble et fonder une famille. Je me réjouis ainsi que la commission des lois propose de renforcer le mariage, en précisant le caractère hétérosexuel de la notion de famille, et que vous souscriviez, madame la ministre, à cette conception.
Le PACS, ce n'est pas la famille, c'est le couple, c'est-à-dire l'association de deux personnes. Ne créons pas un pseudo-mariage qui laisserait croire, dans un premier temps, que des enfants auraient leur place dans de tels couples et, dans un second temps, autoriserait une telle évolution. Ne cherchons pas, au travers du PACS, à singer la famille. Cela ne se ferait qu'au détriment de cette dernière.
Comme une grand partie de mon groupe, je ne voterai pas la proposition de loi en l'état et suivrai les suggestions de la commission des lois. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Si l'on en juge par les différentes étapes qui ont conduit du CUCS, le contrat d'union civile et sociale, au PACS tel qu'il a été adopté le 9 décembre dernier par l'Assemblée nationale, l'objectif des auteurs de ces différents textes a toujours été le même : légitimer et solenniser l'union des homosexuels, même si, hier, Mme le garde des sceaux, effectuant un habile repli tactique, nous a affirmé qu'il s'agissait d'un simple statut intermédiaire.
M. Robert Bret. C'est ce qu'elle dit depuis le début !
M. Jean Chérioux. Prenons, par exemple, la proposition de loi n° 88 visant à créer un contrat d'union civile et sociale. Que lit-on à l'article 2 ? « Les contractants de l'union civile et sociale se doivent soutien matériel et moral. »
Et la proposition de loi que nous sommes en train d'examiner n'est pas en reste puisqu'elle prévoit l'introduction dans le livre Ier du code civil, relatif aux personnes, d'un titre XII, intitulé « Du pacte civil de solidarité », dont l'article 515-4 est ainsi rédigé : « Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'apportent une aide mutuelle et matérielle. »
On croirait entendre l'officer de l'état civil célébrant un mariage et procédant devant les époux à la lecture de l'article 212 du code civil : « Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours, assistance. »
M. Jean-Luc Mélenchon. Où est le problème ?
M. Robert Bret. C'est un couple, c'est normal !
M. Jean Chérioux. Cela n'a rien d'étonnant puisqu'à l'origine l'article 5 de la proposition de loi n° 88 prévoyait : « Le contrat d'union civile et sociale fait l'objet d'une déclaration conjointe devant un officier de l'état civil du domicile ou de la résidence d'un des deux contractants ». Cela a d'ailleurs provoqué une levée de boucliers et la constitution d'un collectif de maires refusant de prononcer de telles unions.
De plus, l'emprunt au code civil des règles relatives au mariage s'étendait même, dans le premier texte, à l'organisation du régime juridique des biens des cocontractants, puisque le texte faisait expressément référence au régime matrimonial de la communauté réduite aux acquêts des articles 1400 et suivants du code civil.
Je pourrais multiplier les exemples et passer en revue tous les projets de texte qui ont été élaborés, où l'on retrouve partout, de manière plus ou moins insidieuse ou voilée, le souci de légitimer et de solenniser l'union des homosexuels : il ne s'agissait peut-être pas de mariage, mais cela en avait toutes les apparences, sinon le goût !
Il faut reconnaître que le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale est en retrait par rapport à ces formules extrêmes, puisqu'il prévoit non pas une déclaration conjointe devant un officier de l'état civil, mais une simple déclaration devant les tribunaux d'instance.
Cependant, il est bien évident que ce texte a pour objet principal, non pas, comme on voudrait nous le faire croire - et c'est en cela que l'on peut parler, à juste titre, d'hypocrisie - de régler des problèmes patrimoniaux et fiscaux, auxquels tout le monde reconnaît la nécessité d'apporter une solution,...
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah ?
M. Jean Chérioux. ... mais d'introduire des modifications importantes dans le livre premier du code civil relatif aux personnes et à la famille.
Cette assimilation plus ou moins apparente au mariage a provoqué une vive réaction des familles.
M. Robert Bret. De certaines familles !
M. Jean Chérioux. Précisément, et je vais vous apporter une réponse à cet égard !
Celles-ci sont, en effet, opposées à toute parodie d'union solennelle reconnue par la société. Cette opposition s'est concrétisée notamment par la prise de position de l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF, dont il convient de souligner le caractère officiel et représentatif...
M. Robert Bret. ... d'une partie des familles !
M. Jean Chérioux. ... puisqu'elle est chargée par la loi - il s'agit de l'ordonnance du 3 mars 1945, confirmée par la loi du 11 juillet 1975 - de représenter l'ensemble des familles de notre pays et de défendre leurs intérêts matériels et moraux.
Cela est particulièrement important. C'est pourquoi il me paraît nécessaire - cela vous convaincra peut-être, mon cher collègue - de citer assez longuement, et je vous demande de m'en excuser, les passages importants du texte adopté par l'UNAF lors de son assemblée générale des 20 et 21 juin dernier.
« La famille est constituée par le mariage, la filiation ou l'exercice de l'autorité parentale ;...
M. Jean-Luc Mélenchon. Hors sujet !
M. Jean Chérioux. ... en conséquence, l'UNAF considère que ne peuvent être introduites dans "le droit de la famille" les dispositions juridiques qui apparaissent nécessaires au législateur pour assurer des garanties de droit et de protection des personnes partageant d'autres modes de vie commune. Ceci implique, en particulier, et pour éviter toute confusion, qu'elle refuse pour ces situations non familiales, toute assimilation avec le mariage, notamment par l'intervention d'un officier de l'état civil... » (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Claude Estier. Il n'est pas question de cela !
M. Jean Chérioux. Je poursuis la citation du texte adopté par l'UNAF, qui semble vous gêner.
M. Claude Estier. Pas du tout !
M. Jean Chérioux. « L'UNAF refuse toute ouverture de droit à l'adoption et aux procréations médicalement assistées en ce qui concerne les couples homosexuels, parce qu'un enfant a droit à un père et à une mère. »
M. Jean-Luc Mélenchon. Mais qui dit le contraire ?
M. Jean Chérioux. « Elle refuse également toute assimilation aux règles spécifiquement familiales dans le droit social, fiscal ou successoral.
« L'UNAF, institution pluraliste, reconnaît la nécessité de mieux garantir la protection de chacun lors de ruptures de la vie commune hors mariage. Elle demeure soucieuse du respect et de la dignité du droit des personnes. Elle rejette toute proposition qui remettrait en cause les fondements de la famille. »
M. Claude Estier. Il n'est pas question de cela !
M. René-Pierre Signé. Hors sujet ! Cela ne remet pas en cause la famille !
M. Jean Chérioux. Ce texte est clair et net, et il convient d'ajouter qu'il a été adopté par 2 242 129 suffrages sur 2 548 000 suffrages exprimés. Il a donc été adopté à une majorité écrasante, et il faut le souligner ! (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. René-Pierre Signé. Ils n'ont pas lu le texte !
M. Claude Estier. Et alors ? Cela n'a rien à voir avec le PACS !
M. Jean Chérioux. Si, cela a à voir avec le PACS !
Il est bien évident que, dans ces conditions, la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale est inacceptable et que je ne me résignerai jamais à la voter.
Fort heureusement, la commission des lois a procédé à une refonte totale du texte. Il convient d'ailleurs de rendre hommage à l'importance et à la qualité de ses travaux - plus de quatre-vingts auditions - et au pragmatisme qui a inspiré notre excellent rapporteur, Patrice Gélard.
Je retiendrai notamment que celui-ci a entendu supprimer définitivement toute ambiguïté en définissant le mariage comme « l'union d'un homme et d'une femme célébrée par un officier de l'état civil. »
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous parlez d'une découverte !
M. Jean Chérioux. Il a voulu également que la liberté personnelle de chacun soit reconnue, et il a introduit la notion de concubinage dans le code civil.
Mais, surtout, il a fait adopter, par la commission, un certain nombre de dispositions...
M. Robert Bret. Il est hors sujet !
M. Jean Chérioux. ... permettant de régler les problèmes fiscaux, patrimoniaux et sociaux qui se posent effectivement pour certaines catégories de personnes.
A ce titre, il nous est proposé des mesures destinées à favoriser les solidarités privées, dont l'exemple le plus marquant est l'institution d'un legs électif en franchise du droit des successions. Ces mesures ont été retenues en collaboration avec la commission des finances et grâce au travail de son excellent rapporteur pour avis, Philippe Marini.
L'intitulé même du texte - « Proposition de loi relative au mariage, au concubinage et aux liens de solidarité » -, proposé par la commission des lois, témoigne de l'ouverture d'esprit avec lequel nos deux commissions ont entendu résoudre les vrais problèmes qui se posent aujourd'hui, sans exclusive ni a priori .
Nos collègues Patrice Gélard et Philippe Marini ont fait là oeuvre de législateur au sens le plus noble du terme et, pour ma part, je voterai ce texte tel qu'il a été modifié. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, permettez-moi, en préalable, de me féliciter des propos tenus par notre rapporteur, Patrice Gélard lorsqu'il affirme que le Sénat n'est pas hostile à l'égalité des hommes et des femmes en politique, qu'il n'est pas non plus opposé à la réforme du mode de scrutin, à commencer par celui qui le concerne, qu'il s'inscrit dans le sens de la modernité plutôt que dans celui de la « ringardise ».
Mais si l'on souhaite vraiment ne pas faire de notre assemblée le bouc émissaire des pesanteurs sociétales, encore faudrait-il donner des preuves de sa modernités.
Après les turbulences et le tintamarre larmoyant disproportionnés qui ont accompagné cette proposition de loi à l'Assemblée nationale, j'aimerais, comme vous tous, je présume, que nos débats contribuent à réhabiliter une certaine idée du travail législatif et de la représentation nationale, et qu'ils se déroulent, si possible, dans un climat apaisé et serein.
La proposition de loi qui nous conduit à examiner - parce que c'est bien de cela qu'il s'agit - le statut du couple dans notre société, nous interdit de céder à un quelconque effet de mode ou à la tentation de caricaturer les positions des uns et des autres, comme cela est souvent le cas.
Le PACS pose clairement deux questions fondamentales auxquelles la législation actuelle ne répond pas.
Tout d'abord, peut-on reconnaître à la relation amoureuse entre adultes consentants un statut différent du mariage ? Autrement dit, peut-on admettre une loi spécifique pour le couple ?
Ensuite, veut-on accorder à cette même relation amoureuse une valeur sociale, dès l'instant où les deux partenaires, quel que soit leur sexe, acceptent de responsabiliser leur liaison au travers d'un engagement civil, de la conclure par un pacte de soutien moral et matériel ?
Je suis intimement convaincu de la nécessité d'une telle loi.
Ma conviction se fonde, en premier lieu, sur une certaine idée des droits humains. Cette idée est indissociable de la conception républicaine et laïque. Je ne doute pas qu'elle soit partagée ici par un grand nombre d'entre vous, au-delà des clivages politiques.
Par ailleurs, je n'imagine pas que quiconque dans cet hémicycle souhaite maintenir dans une zone de « moindre-droit », voire de non-droit, près de cinq millions de nos concitoyens.
Enfin, c'est tout simplement une question de bon sens : entre le mariage, qui induit la responsabilité parentale, qui porte toute la symbolique familiale, et le concubinage, qui ne peut être envisagé que comme une transition entre célibat et mariage, nous devons résoudre le problème posé par celles et ceux qui ne pourront jamais se marier, et ce malgré l'évidence de leur relation amoureuse.
Si je me réfère à notre philosophie en matière de droits humains et de laïcité républicaine, il me semble que le pacte civil de solidarité nous donne l'occasion d'affirmer deux choses fondamentales.
Premièrement, les homosexuels, dont je rappelle au passage qu'ils ont payé un lourd tribut à l'intolérance et au fanatisme - il n'est pas ici nécessaire de faire de rappel historique ! - sont, peut-être pour la première fois dans l'histoire, enfin établis dans leur droit. Ce qui nous est proposé aujourd'hui, c'est d'inscrire un nouveau droit en toutes lettres et, par là-même, de faire un pas de plus vers l'universalité des droits humains.
Deuxièmement, il faut bien admettre que, dans l'opinion, il y a parfois confusion entre le sentiment religieux et le sens civique. Pour autant, nous savons tous que le renvoi dans la sphère privée du sentiment religieux est le passage obligé vers une société de liberté et d'égalité. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
Avec le PACS, il ne s'agit ni de heurter le sentiment religieux ni de réduire la symbolique familiale, il s'agit simplement de rappeler que l'amour, indépendamment de la procréation, est un facteur d'épanouissement personnel et que, à ce titre, dès l'instant où deux êtres veulent l'inscrire dans la durée, il est un bien commun qui doit être protégé. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
L'utilité de cette proposition de loi donnant un statut aux couples non mariés et non susceptibles de procréer semble posée par le rapport de la commission des lois : ne suffirait-il pas, selon elle, d'améliorer le statut du concubinage et de revoir la question des fratries pour résoudre les problèmes ?
J'observe au passage que cette proposition de loi, au travers des turbulences qu'elle a provoquées, a déjà le mérite d'avoir mis en lumière de criantes injustices.
Par ailleurs, en ce qui concerne les fratries, nous sommes bien d'accord pour reconsidérer la question dans un autre cadre.
Pour autant, je pense que le renvoi à une amélioration du statut du concubinage ne peut être la bonne solution, parce que, pour l'essentiel, cela revient encore à jeter un voile pudique sur la situation des couples homosexuels, à considérer leur relation comme un intermède de l'existence, un état de fait toléré, mais non reconnu.
Pour nous, il s'agit au contraire d'affirmer que la relation de couple donne des droits dès l'instant où les partenaires en acceptent les devoirs.
Enfin, si l'humanisme et le sens républicain sont les principales motivations de cette proposition de loi, il me semble que le bon sens le plus élémentaire plaide également en sa faveur.
Les droits ouverts pour ces personnes ne portent aucunement atteinte aux droits des autres. Le mariage n'est nullement remis en cause, pas plus que la fonction sociale de la famille.
Alors, chers collègues, il faut dire les choses clairement : le PACS concerne, bien sûr, même si ce n'est pas exclusif, les couples homosexuels.
Il ne suffit pas de se sentir outragé par l'accusation de « ringardisme ». Il ne suffit pas d'afficher un louable respect de la vie privée. Encore faut-il envisager les dispositions pratiques et concrètes qui en permettent l'exercice et la réalisation.
Avec beaucoup d'humour, monsieur le rapporteur, vous avez dit récemment que la différence entre un député et un sénateur était que le premier était myope et le second presbyte. Alors, permettez-moi de vous suivre sur ce terrain et de vous parler d'un oiseau de mes Pyrénées ariégeoises ; vous voyez, je viens, moi aussi, de la France profonde. Cet oiseau, c'est le grand tétras, aussi nommé coq de bruyère, qui, à la saison du chant, lorsqu'il se met à caqueter, devient aussitôt sourd et aveugle ; cela permet de l'approcher et le rend vulnérable.
Ainsi, chers collègues, au moment de vous exprimer sur un sujet aussi important, soyez cohérents, ne sombrez pas dans le syndrome du coq de bruyère. (Rires et applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.) Gardez les yeux ouverts et sachez rester à l'écoute des aspirations de notre société. L'occasion vous est donnée de mettre vos actes en accord avec vos proclamations, ne la manquez pas ! (Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Jean Chérioux. Le coq de bruyère est un animal assez peu répandu !
M. René-Pierre Signé. Ce ne sont plus des coqs !
M. le président. La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, le problème des couples singuliers n'est pas nouveau mais, je le dirai simplement, il n'est plus possible de l'ignorer.
Il faut donc se réjouir, et, pour ma part, c'est ce que je fais, que des parlementaires aient résolument provoqué ce débat.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah !
M. Pierre Fauchon. Attendez la suite, monsieur Mélenchon !
Mais il est permis de déplorer que le Gouvernement n'ait pas cru devoir, en la circonstance, assumer pleinement ses responsabilités.
M. Jean-Luc Mélenchon. Oh !
M. Pierre Fauchon. La demande eût été techniquement mieux assurée.
Puis-je rappeler, pour avoir connu cette période, que, leur temps, le président Giscard d'Estaing, les ministres Simone Veil et Jean Lecanuet avaient donné de meilleurs exemples de responsabilité sur des thèmes non moins difficiles et non moins périlleux comme le divorce ou l'interruption volontaire de grossesse.
M. René-Pierre Signé. Avec la gauche !
M. Pierre Fauchon. L'un des inconvénients, et non des moindres, de cette approche en quelque sorte biaisée explique et justifie largement l'ample manifestation d'incompréhension et de rejet qui accompagne ce texte, mouvement auquel M. le rapporteur a su résister et je l'en remercie.
Dès lors que l'on se soucie des questions qui touchent à la sexualité, n'ayons pas peur des mots, à l'amour, au couple, à la procréation, on ne saurait le faire en ignorant ou en contournant ce qui, dans le mariage ou hors mariage - je me réfère à ce qui a été très bien dit hier par M. Alain Lambert - est la réalité la plus vivante peut-être, la plus menacée aussi, mais sans doute la plus utile et la plus créatrice des organisations humaines de ce temps, je veux parler de la famille.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est reparti !
M. Pierre Fauchon. Organisation la plus vivante d'abord, et je dirai même vitale, parce que le premier problème d'un groupe humain c'est de veiller à sa survie, question qui est loin d'être théorique pour la France de cette fin du xxe siècle,...
M. Jacques Machet. Tout à fait !
M. Pierre Fauchon. ... mais question angoissante.
M. Jean-Luc Mélenchon. Cela n'a rien à voir avec le sujet !
M. Pierre Fauchon. Monsieur Mélenchon, vous êtes l'arbitre de beaucoup de choses, mais, s'agissant de savoir ce qui est dans le sujet et ce qui ne l'est pas, je vous en prie, laissez à chacun sa part de liberté, respectez la liberté des intervenants ! (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas la liberté, mais la licence !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Fauchon.
M. Pierre Fauchon. La question de la survie de la société est angoissante pour ceux qui prennent la peine d'élever leur regard « au-dessus du guidon » et de scruter l'avenir, le proche avenir, à la lumière de données démographiques implacables. N'est-ce pas le premier devoir du Gouvernement ?
Organisation la plus menacée, dès lors que la famille a perdu les armatures juridiques, sociales, culturelles, religieuses, économiques qui en ont fait si longtemps la structure de base la plus permanente, la plus forte et la plus populaire de la société.
Mais aussi organisation la plus précieuse et la plus utile, dans la mesure où la famille reste, plus que jamais, le lieu de la plus grande solidarité,...
M. Jacques Machet. Très bien !
M. René-Pierre Signé. La famille n'est pas menacée !
M. Pierre Fauchon. ... le lieu de la plus grande convivialité,...
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Pierre Fauchon. ... le lieu de la plus grande générosité, de la plus grande responsabilité,...
M. Jacques Machet. Oui !
M. Pierre Fauchon. ... en même temps que celui d'une remarquable faculté d'adaptation. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste. - Mme Olin applaudit également.)
M. Jacques Machet. Bravo !
M. Robert Bret. Il faut faire avancer la société !
M. Pierre Fauchon. On ne saurait se passer de toutes ces valeurs si l'on veut surmonter les défis les plus grands auxquels nous sommes confrontés : le défi de l'enfance et de l'éducation, le défi du troisième âge et de la dépendance, le défi de l'exclusion et de la pauvreté, de la fracture sociale.
Ne nous y trompons pas : si nos sociétés, si notre civilisation parviennent à traverser sans trop de dommages, je veux dire en préservant leurs valeurs, la tourmente de la modernité, ce sera pour une très large part aux familles qu'elles le devront, beaucoup plus qu'à des structures administratives ou sociales empêtrées dans leurs routines.
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Pierre Fauchon. Cependant - et vous allez voir pourquoi je crois que c'est dans le sujet - le statut de la famille sous ses divers aspects appelle une réflexion actualisée et bien des redéfinitions. Sans doute, c'est par lui qu'il fallait commencer. L'ordre logique et naturel, c'est d'abord la famille, ensuite le mariage et enfin le non-mariage. En effet, une révision qui aurait commencé par la famille et le mariage aurait peut-être permis d'éclairer d'un jour nouveau le problème des couples hors mariage.
M. Louis de Broissia. Absolument !
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Pierre Fauchon. Elle n'aurait pas réglé la question de l'homosexualité, mais elle aurait apporté un éclairage nouveau et, peut-être, une solution à bien des situations de couples formés hors mariage, qui, comme l'a rappelé notre ami M. Lambert, jouent un rôle ô combien important du point de vue de la famille.
Or, on en est loin, madame le garde des sceaux, puisque l'on en est aux réflexions préparatoires des experts, et que les seuls signes adressés par le Gouvernement aux familles n'ont guère été que négatifs. Cela témoigne d'une bien fâcheuse méconnaissance de nos... de vos responsabilités.
L'expression de tels regrets ne saurait, selon moi, nous dispenser d'aborder sereinement le présent débat.
Nous le ferons, selon notre habitude, en recherchant, avec M. Gélard, les vraies solutions plus que les effets d'annonce.
Nous le ferons aussi dans un esprit humaniste. Je veux dire dans un esprit auquel rien de ce qui est humain n'est étranger, et je pense en particulier à la question de l'homosexualité, il est vrai, trop longtemps ignorée ou traitée dans un esprit d'intolérance et d'hyprocrisie, auquel il faut mettre fin.
Il faut y mettre fin non seulement pour des raisons de réalisme et de bon sens, mais davantage encore parce que, pour être juste, la loi doit être au service de tous et que, loin d'ignorer les minorités, la loi doit, dès lors que l'ordre public n'est pas menacé, faire preuve à leur égard non de complaisance, mais de ce qu'il faut de compréhension, et j'ose dire de générosité, sans pour autant en faire une priorité comme vous le faites sans vouloir l'avouer.
C'est dans cet esprit que nous aborderons ce débat, en remerciant notre ami M. Gélard de l'avoir si bien préparé. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. René-Pierre Signé. Beau plaidoyer pour la famille ! Comme si elle était menacée !
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.
M. Jean Boyer. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens, avant toute chose, à préciser que le point de vue que je vais formuler n'engage que moi. Le PACS est un sujet trop grave pour que je ne m'exprime pas en conscience.
Toute personne a droit au respect de ses choix de vie. A ce titre, toute discrimination doit être combattue. Toutefois, je suis fermement opposé au dispositif du PACS.
Ce texte est, en fait, élaboré de toutes pièces pour les couples homosexuels, dont le nombre est estimé à 60 000. Pourquoi ne pas l'admettre clairement et simplement ?
Il me paraît contradictoire de revendiquer, à travers diverses manifestations, une différence et, dans le même temps, de demander à « être comme tout le monde ».
Contrairement à ce que certains clament, les différences de situation peuvent justifier des différences de traitement.
Dans une société où le manque de repères est de plus en plus manifeste, où les actes de violence juvénile deviennent l'actualité ordinaire, quels modèles veut-on donner aux jeunes ?
M. Jean-Luc Mélenchon. La tolérance !
M. Jean Boyer. Le PACS tend à gommer toute distinction de sexe dans les rapports de couple et à légaliser cet état de fait.
Ceux qui le défendent ne cessent de rappeler que cette réforme concerne potentiellement les cinq millions de Français vivant en couple sans être mariés. En fait, qu'en est-il ?
Si un couple hétérosexuel ne souhaite pas se marier, il vit en union libre et en assume les conséquences. C'est un choix. On ne voit pas en quoi le PACS serait à proprement parler un « plus » pour eux du point de vue social. En l'occurrence, ils servent de faire-valoir et de prétexte.
En revanche, pour les couples homosexuels, il s'agit d'une véritable reconnaissance institutionnelle. Je regrette l'hypocrisie et le manque de courage qui entourent le débat sur cette proposition de loi.
On ne peut mesurer aujourd'hui les conséquences symboliques et sociologiques de cette réforme. De nombreuses mises en garde ont été exprimées en ce sens tant par des sociologues et des psychanalystes que par 20 000 maires, et, de façon plus générale, par des hommes et des femmes de tous horizons.
Au-delà de ces mesures qui visent le couple, nous savons tous qu'en filigrane se pose la question des enfants.
A l'Assemblée nationale, madame la ministre, vous avez déclaré, au début du mois de décembre dernier, me semble-t-il, que l'adoption serait impossible pour les couples homosexuels. Or deux députés socialistes vous ont contredit.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est leur droit !
M. Jean Boyer. Selon M. Jean-Pierre Michel, « le Pacs évoluera forcément un jour ou l'autre pour intégrer les aspects de l'adoption ». Quant à Jack Lang, il a jugé que la question de l'adoption se poserait fatalement.
M. Jacques Machet. Eh oui !
M. Jean Boyer. Faire le premier pas aujourd'hui dans la reconnaissance du couple homosexuel, c'est enclencher cet engrenage infernal. Chacun doit bien en prendre conscience. En la matière, nous serions coupables de nous cacher derrière notre petit doigt.
M. Jacques Machet. En effet !
M. Jean Boyer. La position retenue par notre commission des lois est pertinente. Elle consacre le mariage comme fondement essentiel de notre société. Par ailleurs, elle apporte des réponses constructives aux véritables problèmes et inégalités qui existent à l'égard des couples non mariés.
Toutefois, en ce qui concerne la définition du concubinage, je ne suis pas favorable à la non-distinction entre hétérosexuels et homosexuels.
Compte tenu des remarques que je viens d'exprimer, vous l'aurez compris, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne voterai pas cette proposition de loi. (Applaudissemnts sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, en tant que législateur, avec humilité, depuis que le Président Václav Havel a employé ce mot à cettre tribune, nous avons tous ensemble, quelle que soit nos origines géographiques, sociologiques et politiques, une tâche commune à accomplir.
Nous devons raisonner de manière simple, c'est-à-dire compréhensible par tous, car les Français sont affolés par notre société de plus en plus complexe. Chaque jour, en Côte-d'Or, mes électeurs me disent qu'ils ne comprennent plus rien à ce que nous faisons à Paris.
Nous devons raisonner de manière constructive, en constatant que la société évolue. En tant que législateur, nous devons tirer parti, pour l'intérêt général et le bien public, de cette évolution, en préparant une société de libertés individuelles qui respecte l'autre, et d'abord le plus fragile, en particulier l'enfant.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah !
M. Louis de Broissia. Nous devons raisonner de manière non idéologique. Une loi idéologique, c'est un texte qui ne recherche qu'un profit électoral, électoraliste, politicien, un texte qui chercherait plus à opposer nos compatriotes entre eux qu'à les rassembler ou à les unir. A ce titre, mes chers collègues, évitons ce qui a pu se passer à l'Assemblée nationale, à savoir une dichotomie parfois un peu pitoyable, où l'un des camps se prétend défenseur des hétérosexuels, l'autre, des homosexuels ; un camp défenseur de la famille, l'autre, de l'enfant. Nous aurons un jour des défenseurs des célibataires à un ou à deux ! A ce titre, le Sénat est là pour faire des lois.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas ce qui s'est passé !
M. Louis de Broissia. Constitutionnellement, le Sénat n'est pas là pour servir le Gouvernement, mais pour légiférer et contrôler le Gouvernement. Il a donc le devoir de réflexion, de la longue durée, de la prospective. Ainsi en est-il - M. Mélenchon m'autorisera à les citer, je suis dans le sujet - de la société, de la démographie et des équilibres sociaux. Le Sénat propose intelligemment - grâce en soit rendue à la commission des lois et à son rapporteur, notre collègue Patrice Gélard - une démarche différente de celle qui a été adoptée dans le texte déposé sur l'initiative de certains députés et auquel on peut faire les trois reproches que j'évoquais au début de mon propos.
Le PACS procède en effet - nous en sommes tous convaincus - d'une démarche complexe, peut-être due à la majorité plurielle, démarche qui divise la société et qui ne répond que très imparfaitement à l'attente de nos compatriotes.
Passons sur les conditions assez discutables de l'examen du PACS à l'Assemblée nationale ; passons sur ses avatars aux noms tous aussi stupides les uns que les autres - PIC, CUC, CUCS - passons sur son premier rejet, sur son retour et donc, madame le ministre, sur la suspicion qui entoure un texte sur lequel se sont penchés plus de furies et d'idéologues que de bonnes fées.
Tout s'est passé, dans cette première partie, chez nos collègues députés comme s'il fallait brouiller les pistes offertes à la société française, en particulier à l'heure même ou, comme tous les sondages le soulignent et comme l'a dit tout à l'heure notre collègue Jean Chérioux, tant de jeunes mettent dans leurs aspirations fondamentales la possibilité de fonder un couple, un foyer, une famille.
Par ailleurs, tout s'est passé chez nos collègues députés comme s'il fallait bousculer le bon sens issu de la nuit des temps selon lequel la famille fondée - les couples mariés - ou la famille à fonder - les couples non encore mariés - engendrait la France de demain.
Grave également est l'occasion ratée par le PACS, dans sa deuxième ou sa troisième mouture, de ne plus mettre vraiment - et c'est finalement le coeur du sujet aussi - l'homosexualité à l'écart de la société française. Mesurez-vous, madame le ministre, le désarroi de ceux que, sous prétexte de les libérer de cette vieille et antique suspicion qui les frappe, vous avez enfermés dans la logique des pacsés ? Vous imaginez, mes chers collègues, le chic qui consistera à dire que l'on s'est pacsé avec un tel ou une telle !
M. Jean-Luc Mélenchon. Alors s'il y a le chic en plus...
M. Jean Chérioux. Ça, c'est pour la gauche caviar !
M. Louis de Broissia. Vous avez donné le sentiment, dans cette affaire, de n'écouter que les voix des intégristes. Sous prétexte de banaliser, vous avez singularisé ; sous prétexte de ne plus discriminer, vous avez marginalisé.
Pour éviter les déchirement annoncés, pour que le texte du PACS ne tombe pas sous le coup d'observations dirimantes du Conseil constitutionnel - seuls l'individu et la famille sont reconnus dans le préambule de la Constitution - mieux vaudrait prévenir un recours auprès de la haute juridiction constitutionnelle qui serait fâcheux pour toute la société française. Vous avez évité habilement le Conseil d'Etat par le dépôt d'une proposition de loi, mais vous ne pourrez contourner le Conseil constitutionnel !
Pour que les Français se réconcilient enfin avec leur vie familiale - familles fondées par un mariage, familles à composer, familles fractionnées ou recomposées, familles porteuses d'un enfant ou familles non porteuses - il fallait une vision totalement différente ; c'est le texte du Sénat, véritable appel à la réconciliation de la société française. Permettez-moi de l'examiner en abordant quatre points.
Premièrement, aujourd'hui, plusieurs millions de Français ont choisi de ne pas choisir tout de suite, d'essayer la vie à deux, de tenter ultérieurement d'élargir leur foyer. Le mérite du Sénat est de laisser la porte ouverte et de reconnaître que le code civil doit faire montre de générosité et de réalisme.
Si Bonaparte pouvait dire que la loi se désintéressait de ceux qui vivent ensemble sans avoir sollicité de brevet ou de manifestation publique, 195 ans passés, la France s'honorera à reconnaître 2,4 millions de couple, qui contribuent - nous l'avons dit les uns et les autres - à la natalité française, puis à la nuptialité française, et qui sont donc une partie de la société française.
Le concubinage est vécu aujourd'hui dans les faits - ne nous le cachons pas - comme le prélude du mariage républicain. C'est le sens de l'appel des 20 000 maires à voter contre le PACS...
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Ils ont eu raison ! (Mme Monique Cerisier-ben Guiga proteste.) M. Louis de Broissia. Le concubinage est donc vécu comme le prélude au mariage républicain, au contraire du PACS, conçu demain comme un succédané de mariage ou un mariage virtuel, comme un Canada dry du mariage : ça ressemble à un mariage, ça a les avantages du mariage, ça n'a pas les contraintes du mariage, donc c'est un mariage !
Pourquoi construire en dénaturant, madame le ministre, mes chers collègues ?
La proposition du Sénat est de construire du nouveau en confortant ce qui a donné satisfaction, c'est-à-dire ce qui convient à plus de 12 millions de couples mariés devant la République. N'est-ce pas là une valeur républicaine ?
Deuxièmement, le fait de civiliser, de légaliser le statut de concubin permet de ne pas tomber dans les travers sexualisés du PACS.
Les « concubins du même sexe » - cette expression, que j'ai entendue voilà un an à l'Assemblée nationale, lorsque l'on parlait du PACS pour la première fois, avait quelque peu surpris les personnes âgées de ma circonscription qui se trouvaient alors dans les tribunes ! Je l'emploie maintenant, puisqu'elle est passée dans la terminologie - les concubins du même sexe, disais-je donc, pourront bénéficier de la même reconnaissance. Sortir du ghetto est leur seule préoccupation ; pour ceux qui veulent un affichage, la formule est souple et non discriminante.
Troisièmement - j'aurais dû commencer par là, mais, dans notre société égoïste, c'est, hélas ! le troisième point - le droit pour l'enfant à disposer originellement d'un père et d'une mère est reconnu.
J'ai entendu tout à l'heure un orateur socialiste dire qu'aucun texte ne reconnaissait que l'enfant avait besoin d'un père et d'une mère. (Vives protestations sur les travées socialistes.)
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Il n'y a pas besoin de texte pour cela !
Plusieurs orateurs socialistes. Nous n'avons rien dit de tel ! Qui a dit cela ?
M. Louis de Broissia. En tant que président d'un conseil général, je suis en relation avec les travailleurs sociaux. Tous les problèmes des enfants naissent du fait qu'ils n'ont pas de mère ou de père véritablement reconnu. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
Plusieurs orateurs socialistes. Mais qui a dit cela ?
M. Louis de Broissia. Cela vous dérange que je le rappelle ? Cela a été dit ! (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Louis de Broissia. Trop d'experts, trop de parents sont sensibilisés aux manquements graves de la parentalité,...
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. Louis de Broissia. ... c'est-à-dire de la fonction de père et du rôle de mère. Trop de travailleurs sociaux dénoncent les carences affectives dont peuvent souffrir les enfants élevés sans la double référence père et mère. Tous nous disent les risques encourus par l'enfant éduqué incomplètement.
Alors, en tant que législateur, protégeons d'abord le plus faible, c'est-à-dire l'enfant, et non le couple homosexuel. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et l'Union centriste.)
M. Jean Chérioux. Et voilà !
M. Louis de Broissia. Quel regret, madame le ministre, que vous ayez proposé l'urgence sur le PACS et non sur le droit de l'enfant. Je pourrais formuler, comme je l'ai fait dans des questions écrites, de nombreuses propositions. Le texte présenté par la commission des lois dit tout cela avec intelligence et de façon ferme.
M. Jean-Luc Mélenchon. Il n'y a pas d'urgence !
M. Louis de Broissia. Il n'y a pas urgence, dites-vous ? Venez dans mon département, je vous montrerai l'urgence d'avoir des familles équilibrées, tant dans les quartiers difficiles que dans les zones rurales. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Je parlais du texte ! Le Gouvernement n'a pas déclaré l'urgence sur le texte !
M. Louis de Broissia. Enfin, quatrièmement - c'est un point d'équilibre là aussi intelligent de la proposition sénatoriale - il est proposé un dispositif fiscal et successoral qui englobe la situation de tous : les frères et soeurs, les concubins ainsi que le legs électif ou affectif, qui pourrait être appelé différemment.
Le Sénat confirme, bien entendu, qu'il ne touche pas fiscalement à l'établissement du mariage, acte fondateur de la société - vous l'avez rappelé, madame le garde des sceaux, et je vous en donne acte - qu'il ne lui porte pas atteinte, voire, comme le texte initial du PACS le prévoyait, qu'un texte de loi pouvait pénaliser ceux qui font des efforts, ceux qui s'engagent, au profit de ceux qui ont une vision plus égoïste, plus hédoniste de la vie. (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux. Exactement !
M. Louis de Broissia. Sur un texte fondamental en ce sens qu'il fondera, qu'il affirmera notre société, celle que géreront nos enfants, sur un texte sociétal - le mot est à la mode, madame le ministre - quel intérêt aurait le Gouvernement à continuer dans l'erreur ? Errare humanum est, persevare diabolicum.
Le texte du Sénat permet une avancée forte du code civil, il évite des dispositions à nouveau discriminatoires. Après beaucop de tâtonnements, madame le ministre, il nous offre l'opportunité de nous réconcilier tous ensemble avec l'esprit de cette fin de siècle, de la mixité voulue et recherchée. C'est toute la noblesse du travail parlementaire que de nous permettre de vous amender.
Par rapport au cinéaste Claude Lelouch et à son célèbre Hommes, femmes, mode d'emploi, il ajoute utilement une vision hommes, femmes, société, mode d'emploi.
Le Gouvernement a eu jusqu'à présent une approche militante de ces rapports hommes-femmes.
M. Jean-Luc Mélenchon. Très bien !
M. Louis de Broissia. En témoignent la provocation un peu puérile sur les titres et fonctions féminines - on s'y perd ! -...
Mme Dinah Derycke. C'est une provocation !
M. Louis de Broissia. ... la provocation totalement calculatrice, c'est-à-dire politicienne, sur la parité : le Sénat a montré sa sagesse sur ce sujet. (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Claude Estier. Ah oui ! Parlons-en ! Quelle sagesse !
M. Louis de Broissia. Une occasion est donnée au Gouvernement d'entreprendre une vraie réforme sociale et réconciliatrice. Saisissez-la ! Nous la saisirons ensemble. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Mélenchon. (Ah ! sur les travées socialistes.)
M. René-Pierre Signé. Pour longtemps, j'espère !
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le président, madame la ministre - il n'y a aucun inconvénient à nommer dans le genre qui convient la personne que nous interpellons, monsieur de Broissia, - ...
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. C'est votre liberté !
M. Jean-Luc Mélenchon. ... mes chers collègues, il y a eu, vous le savez, avant ce projet de PACS, d'autres propositions de loi d'origine parlementaire. Le rapporteur de la commission des lois a bien voulu rappeler - je lui en suis reconnaissant - que c'est ici même, au Sénat, qu'a été déposée la première d'entre elles par six membres du groupe socialiste, sur mon initiative, en 1991. Je le dis pour témoigner et pour rendre hommage à tous ceux qui se sont impliqués dans le patient cheminement qui nous a conduits jusqu'à la délibération de ce jour.
Une première pensée se tourne vers le mouvement associatif qui a porté ce combat, et tout autant, sinon davantage, vers ces anonymes, femmes et hommes, directement concernés, que la pandémie du sida nous a ôtés et qui avaient mis toute leur énergie - parfois la dernière dont ils disposaient - à agir pour qu'à la douleur de la séparation ne s'ajoute plus l'abîme des cruautés ordinaires auxquelles ont été voués si longtemps les couples homosexuels dans de telles circonstances.
Je vous ai entendu, hier, vous rengorger et manifester une bruyante compassion lorsque notre excellent rapporteur, M. Patrice Gélard, nous reprochait de proposer des dispositifs inapplicables : vous avez feint de le déplorer. Mais c'est le moment, alors que vous avez si fort réclamé du temps pour réfléchir, de vous poser la question suivante : depuis 1991, où sont vos textes de lois, où sont vos propositions, à quel moment vous êtes-vous souciés des misères faites aux uns et aux autres, du statut des homosexuels, du statut des concubins ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes. - M. le rapporteur manifeste son souhait d'interrompre l'orateur.)
C'est au contraire devant cette assemblée, en 1988, que l'on a vu pour la première fois être défendue l'abrogation...
M. le président. Monsieur Mélenchon, M. le rapporteur, à qui vous avez rendu hommage tout à l'heure, souhaiterait vous interrompre. L'y autorisez-vous ? (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Peut-être pourrait-il attendre que j'ai fini ma phrase ? Ensuite, je laisserai très volontiers m'interrompre qui voudra et tiens ma riposte à sa disposition !
M. Louis de Broissia. Ne coupez pas son souffle !
M. Pierre Fauchon. Laissez-le achever sa période !
M. le président. Poursuivez donc et, ensuite, M. le rapporteur interviendra.
M. Jean-Luc Mélenchon. J'achève donc ma phrase si vous le permettez, monsieur le président. (Sourires.)
J'ai dit que, contrairement à vos allégations, c'est tout au contraire devant cette assemblée que nous avons vu, en 1988, être défendue, pour le première fois, l'abrogation de ce que vous appelez « le privilège fiscal des concubins ». C'est en effet dans cet hémicycle que cela s'est passé !
Mme Dinah Derycke. Tout à fait !
M. Jean-Luc Mélenchon. Et alors était évoquée d'une manière tout à fait plaisante l'exigence morale qu'il y avait à donner au mariage la valeur de consécration suprême dont vous pensiez qu'elle était contestée par les dispositions fiscales. Il est donc clair que votre compassion en ce domaine est une pure hypocrisie !
Monsieur le rapporteur, vous souhaitiez m'interrompre ?
M. Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles de la législation du suffrage universelle, du règlement et d'administration générale. J'y renonce !
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous renoncez ? Quel dommage !
M. Patrice Gélard, rapporteur. C'est dommage, en effet !
M. Jean-Luc Mélenchon. Bref, vous n'avez bougé encore une fois que parce que nous ne vous avons pas laissé le choix ! Vous ne bougez que parce que nous vous y avons obligé, parce que vous avez peur de vous retrouver sous l'opprobre que vous ont valu vos choix à propos de la parité, et vous ne changez de posture que dans le seul but que rien ne change ! (Protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Jean Chérioux. Vous mélangez tout !
M. Dominique Braye. « Mélenchon » mélange tout !
M. Jean-Luc Mélenchon. Mais sans l'agilité intellectuelle de M. le rapporteur, Patrice Gélard, nous en serions restés à la récitation laborieuse et pétrifiée de votre catéchisme sur la famille immuable, le mariage inchangé... (Vives exclamations sur les travées du RPR.)
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Ne méprisez pas vos adversaires !
M. Jean-Luc Mélenchon. ...comme nous l'avons entendu d'orateur en orateur,...
Un sénateur du RPR. Il n'a rien écouté !
M. Jean-Luc Mélenchon. ... oubliant que le mariage et la famille ont une historicité, qu'ils n'ont pas toujours été ce que vous défendez. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
M. Jean Chérioux. Le mariage a été un progrès par rapport à ce qui existait avant ! Il a été libérateur ! La femme n'était plus esclave !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie ! Seul M. Mélenchon a la parole.
M. Alain Vasselle. C'est un provocateur !
M. Dominique Braye. Oui, la provocation, il aime ça !
M. Jean Chérioux. M. Mélenchon est pour le retour à la répudiation biblique !
M. le président. Monsieur Mélenchon, poursuivez !
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas moi qui fais entrer la Bible à coup de poing dans le code civil, ce sont plutôt les vôtres !
Je dis que le mariage, la famille ont une historicité...
M. Jean Chérioux. Ah !
M. Jean-Luc Mélenchon. ... et que, si vous cherchez un fil conducteur aux progrès que l'on a pu constater dans l'histoire, il peut tenir à quelques mots : toujours plus de liberté dans le consentement, et donc toujours plus de responsabilité, d'autonomie de la personne et, au bout du compte, toujours moins de discrimination.
M. Dominique Braye. A voir !
M. Jean-Luc Mélenchon. Et ce que nous faisons aujourd'hui, c'est seulement la poursuite de ce processus. Et nous en sommes fiers ! (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Nous n'avons pas la même idée du progrès que vous !
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est clair, monsieur Marini, nous n'avons pas la même idée du progrès !
M. Robert Bret. C'est une évidence !
M. Jean Chérioux. L'un agit, l'autre détruit !
M. Jean-Luc Mélenchon. Nous jugeons, pour notre part, que quelques-uns des propos qui ont été tenus ici sont insultants pour nous. (Protestations sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
Croyez-vous que nous n'ayons pas de famille ?
M. René-Pierre Signé. Bravo !
M. Jean-Luc Mélenchon. Croyez-vous que nous ne l'aimions pas ? Croyez-vous que les homosexuels n'en aient pas ?
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Ah ! elle est belle !
M. Dominique Braye. Vous n'aimez que la vôtre, pas celle des autres !
M. Jean Chérioux. Ce n'est que la vôtre !
M. Jean-Luc Mélenchon. Qu'est-ce qui nous vaut de mériter vos leçons ? Nous ne les supportons pas !
Aujourd'hui, de notre côté, nous touchons au but et, d'une façon ou d'une autre, j'estime que ceux qui ont voulu ce combat ont déjà gagné l'essentiel de la partie sur le plan moral. En effet, plus personne, hormis quelques énergumènes (Rires sur les travées des Républicains et Indépendants), n'ose dire ouvertement que le couple homosexuel est en soi condamnable, ni qu'il attente aux bonnes moeurs, à la morale ou même à l'essence de la société.
Plus personne - sauf M. Seillier, qui n'a pas manqué hier de renvoyer cette proposition de loi à l'augmentation des pathologies de la société : c'est une chose qu'il faut pouvoir oser devant une assemblée comme la nôtre ! - plus personne, dis-je, n'ose contester que de tels couples puissent avoir des droits et que les violences qui leur ont été faites sont dorénavant inadmissibles. Cela figure dans le texte !
M. Jean Chérioux. Ce ne sont pas les couples homosexuels qui ont des droits !
M. Jean-Luc Mélenchon. Dans la foulée, le code civil pourrait bientôt s'ouvrir, en partie grâce à vous, aux concubins. Il est vrai qu'ils sont les parents de 40 % des jeunes Français qui naissent ! Il y a des réalités qui finissent pas s'imposer.
C'en est donc fini, là encore, des discours moralisateurs méprisants qui condamnaient ou reléguaient il y a si peu de temps encore cette manière de vivre en dehors du mariage.
C'est, au total, autant de bonnes nouvelles pour notre société si, de cette façon, nous la débarrassons aujourd'hui de cette part de violences et de mépris que nos archaïsmes législatifs faisaient durer. (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Dominique Braye. Il faut oser le dire ! Vous prétendez débarrasser la société de ses violences ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Bien sûr, nous ne sommes toujours pas d'accord sur les moyens à mettre en oeuvre pour franchir cette nouvelle étape d'émancipation et de liberté de la personne.
M. Jean Chérioux. Assez de permissivité !
M. Dominique Braye. Venez voir s'il y a moins de violence qu'avant !
M. le président. Monsieur Braye, laissez poursuivre l'orateur !
M. Jean-Luc Mélenchon. Pas plus qu'aucun ici sur les travées de gauche, je ne serai dupe de certains contorsionnistes de la majorité sénatoriale. Ceux-là voudraient nous faire croire qu'ils veulent bien de la chose, mais surtout pas du mot qui la désigne.
Mme Dinah Derycke. Tout à fait !
M. Jean-Luc Mélenchon. Ceux-là, en vérité, ne sont prêts à céder que ce qu'il leur est impossible de défendre ouvertement, et à la stricte condition qu'aucun mot qui les fâche ne soit prononcé.
Chemin faisant, ils tentent encore de régler quelques comptes.
Mme Dinah Derycke. Exactement !
M. Jean-Luc Mélenchon. Ainsi, par exemple, vous voilà rendu au point de vouloir définir le mariage. Et pour quoi faire ? Pour le décrire comme le lien exclusivement réservé à un homme et à une femme !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Cela vous choque ?
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. C'est la parité !
M. Dominique Braye. Eh oui !
M. Jean Chérioux. C'est cela qui vous gêne !
M. Jean-Luc Mélenchon. Quelle découverte ! Il vous reste, pour finir la journée, à nous apprendre l'eau chaude... le fil à couper le beurre... et bien d'autres évidences !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Si c'est évident, admettez-le !
M. Dominique Braye. Il faut sortir ! Cela se fait ailleurs, allez voir !
M. Nicolas About. M. Mélenchon joue les faux naïfs !
M. Jean-Luc Mélenchon. Pourtant, personne ici n'a jamais défendu ou prétendu autre chose à propos du mariage.
M. Dominique Braye. Cela se fait ailleurs ! Il faut sortir !
M. Jean-Luc Mélenchon. J'en déduis que, en réalité, vous voulez rétablir en catimini des hiérarchies de dignité parmi les couples, et je nomme ce procédé pour ce qu'il est : une mesquine revanche sur ce qu'il va bien vous falloir concéder à propos des homosexuels.
Pour un peu, on vous verrait vouloir défendre, en la définissant, l'hétérosexualité. A tout prendre, ce serait plus divertissant !
M. Jean Chérioux. Provocateur, comme toujours !
M. Jean-Luc Mélenchon. Je vous rassure si c'est nécessaire, le mariage et l'hétérosexualité, qui est à sa base, ont encore de beaux jours devant eux sans votre secours !
Au demeurant, et d'une façon générale, ce ne sont ni le code civil ni le Journal officiel des débats du Sénat qui motivent le désir de s'aimer : le phénomène est d'origine plus spontanée. (Rires.)
M. Dominique Braye. C'est scabreux !
M. Jean-Luc Mélenchon. Vouloir rétablir une hiérarchie des sentiments amoureux à travers les choix de vie commune qui s'en suivent est une lamentable arquebusade d'arrière-garde.
M. Dominique Braye. Ne mélangeons pas tout !
M. Jean-Luc Mélenchon. Mesdames, messieurs, depuis la Révolution de 1789, le mariage n'est plus un sacrement, sinon pour ceux qui veulent le considérer comme tel, et c'est bien leur droit.
M. Jean Chérioux. Merci pour eux !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. C'est bien de le reconnaître !
M. Jean-Luc Mélenchon. La République, elle, se contente du consentement des époux aux droits et devoirs qui contractualisent ce mode de vie commune, qu'elle reconnaît par là même et légitime. Rien de moins, mais rien de plus.
M. Jean Chérioux. Mais c'est toute la législation canonique !
M. Jean-Luc Mélenchon. Face à d'autres modes de vie commune, face à d'autres liens amoureux, le PACS n'est, lui aussi, rien d'autre que cela, adapté aux situations auxquelles il s'applique.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Il ne sert à rien !
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est un consentement mutuel, un contrat, une légitimation sociale. Les trois marchent ensemble, parce qu'il s'agit ainsi de reconnaître un lien social construit sur un sentiment humain profondément légitime et souhaitable pour tout un chacun comme pour la société tout entière.
C'est pourquoi, mes chers collègues, on ne peut vouloir la chose sans vouloir le mot. Il ne s'agit pas de concéder que l'on « admet » l'existence de couples homosexuels à condition qu'on ne les voie pas trop, et des couples concubins qui ont le bon esprit de faire des enfants : il s'agit de les reconnaître, quand ils souhaitent que cela soit fait, parce que ces couples ne sont ni illégitimes ni indignes. Et, dans la mesure ou ils contribuent au bonheur et à l'épanouissemernt de ceux qui vivent sous cette forme, ils sont même souhaitables.
M. Louis de Broissia. Le bonheur est-il légalisable ?
M. Jean-Luc Mélenchon. De ce point de vue, pour nous, le mot, le PACS, parce qu'il est une légitimation symbolique, c'est ici autant que la chose. Nous ne vous le céderons donc pas, fût-ce au prix de quelques petites améliorations du statut des concubins.
Après cela, madame la ministre, mes chers collègues, il me reste à vous dire que le PACS lui-même me laisse une part d'insatisfaction... (Exclamations sur les travées du RPR) ... et que cette insatisfaction me fournira la matière première d'idées qui finiront bien par faire, elles aussi, leur chemin.
Je veux vous dire que, pour moi, le PACS n'est pas un horizon indépassable de la volonté de mener une vie commune et solidaire, pas plus que le mariage ou le concubinage. Et pas plus, pour être tout à fait franc, que je ne crois que le couple et la famille naturelle soient un horizon indépassable du lien affectif et des solidarités que l'on peut choisir d'assumer.
M. Louis Moinard. La famille à la poubelle !
M. Jean-Luc Mélenchon. Dans ma proposition de loi de 1991, j'avais placé les fratries parmi les bénéficiaires potentiels du contrat de « partenariat civil » que je proposais. Je connais bien les difficultés que cette idée soulève. A la vérité, ces fratries étaient pour moi emblématiques de la dissociation que je souhaitais pouvoir permettre entre le sentiment amoureux, la sexualité et le droit de vouloir mener vie commune et solidaire.
Je reste partisan de cette idée. Elle s'inspire d'une préoccupation d'universalité des droits. Je milite pour que toute personne puisse s'associer à toute autre dans un rapport de solidarité voulue et pour que la loi facilite cette solidarité, et même qu'elle l'encourage.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je conclus, monsieur le président.
Il faut que la loi encourage cette solidarité parce qu'il n'y a pas trop de solidarité dans nos sociétés.
Tout ce qui contribue à élargir le cercle du libre choix de la solidarité et de la responsabilité à l'égard d'autrui me paraît devoir être facilité et légitimé. Nous n'en sommes pas là aujourd'hui ; mais à chaque jour suffit sa peine !
Bien sûr, je ne reprocherai pas au PACS de n'être rien parce qu'il n'est pas tout. On voit déjà à quels conservatismes il se heurte ! On voit bien aussi à quelles injustices il peut remédier. Je serai donc, dans cette bataille d'idées, aux côtés de mes amis.
Ce que nous sommes en train de faire - PACS, parité, limitation du cumul des mandats - est une révolution culturelle tranquille qui fait que la gauche est bien à sa place et bien dans son rôle dans le travail qu'elle accomplit. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Dominique Braye. Qu'elle y reste !
M. René-Pierre Signé. Oui, elle est à sa place et elle y reste !
M. Jean Chérioux. Quel mélange !
Mme Nelly Olin. Ce n'est pourtant pas vous qui montrez l'exemple !
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, une discussion prématurée, sur un texte juridiquement inepte, au moment même où un groupe de travail est chargé, à la chancellerie, de proposer une réforme générale du droit de la famille. Tel est le paradoxe auquel nous nous heurtons aujourd'hui, mais le Gouvernement ne m'apparaît pas à un paradoxe près !
Les initiateurs du texte font valoir que celui-ci est « attendu avec impatience » par cinq millions de personnes. Il apparaît en fait, et je cite ici le remarquable rapport de notre collègue M. Gélard, que « cette impatience est surtout perceptible au sein d'une partie de la communauté homosexuelle dont la revendication de reconnaissance a été relayée depuis 1990 par des initiatives parlementaires ». M. Mélenchon vient d'y faire référence.
Cette précipitation a donné naissance à un monstre juridique qui met en péril le mariage, institution de référence, ainsi que l'union libre et qui ne protégera pas davantage les homosexuels qu'il entend aider.
Cette proposition de loi met en place un statut non protecteur du plus faible...
M. Jean Chérioux. Eh oui !
M. Alain Vasselle. ... puisque le PACS engage peu et ne donne aucune garantie. En effet, les devoirs qu'il implique se limitent à un aspect purement matériel, comme l'indique le rapport Gélard que je me permets de citer à nouveau : « En cas de rupture, aucune protection n'est accordée au plus faible. La rupture est possible unilatéralement à tout moment sans intervention du juge »...
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas un mariage !
M. Alain Vasselle. ... sauf vraisemblablement pour le partenaire délaissé la possibilité d'obtenir des dommages et intérêts pour rupture abusive de contrat. »
Ce texte laisse, en outre, sur le bord ceux qui ne veulent pas de PACS, de contrat.
Il n'est, bien sûr, pas question de négliger des situations de fait qui marquent aujourd'hui l'évolution de notre société ; il ne s'agit pas pour autant de tomber dans un débat opposant dogmatisme et empirisme. La multiplication des unions de fait est une donnée indiscutable : la dernière enquête de l'INSEE fait état de 2,4 millions de couples non mariés. Mais le mariage demeure encore la référence, puisque l'on dénombre 12,3 millions de couples mariés ; il est absolument nécessaire de préserver cette institution.
Le législateur n'a plus, à l'égard du concubinage, cette réticence qui le caractérisait jadis : « Les concubins ignorent la loi, proclamait Napoléon, la loi les ignore ! » Si le concubinage n'était, dans le passé, qu'une situation de fait non génératrice de droits, les choses ont changé depuis.
Certes, il était nécessaire d'améliorer le système, car notre droit civil comporte encore certains archaïsmes ; mais la solution ne peut être trouvée par la mise en place d'un statut hybride entre le mariage et l'union libre.
Certains ajustements fiscaux, financiers, contractuels, patrimoniaux ou successoraux semblent nécessaires. Cependant, ces ajustements ne seront pas réalisés par le système juridiquement inapplicable que représente le PACS. Sur ce point, les dispositions que propose la commission des lois constituent une alternative que nous pourrions considérer comme acceptable.
La commission propose une définition du concubinage qui devrait permettre de surmonter la jurisprudence de la Cour de cassation du 11 juillet 1989, récemment confirmée le 17 décembre 1997.
Je me félicite tout particulièrement de la définition claire que la commission propose du mariage, mettant ainsi un terme à une curiosité juridique du code civil.
Cette définition du mariage comme « l'union d'un homme et d'une femme célébrée par un officier de l'état civil »...
M. Claude Estier. Quelle découverte !
M. Alain Vasselle. ... permet de le distinguer de l'union libre et de marquer son caractère d'institution car, comme le souligne Irène Théry, « le mariage n'est pas un simple outil de gestion du couple, mais une institution de l'ordre symbolique dans lequel se différencient les sexes et les générations. »
Le PACS est dangereux, car il ne remplit pas les conditions du Préambule de la Constitution de 1946, dont le dixième alinéa impose à la nation d'assurer « à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ». C'est à ce principe qu'il est porté atteinte aujourd'hui.
M. Jean Chérioux. Tout à fait !
M. Alain Vasselle. Le souci légitime de trouver des solutions aux difficultés rencontrées par des individus non mariés et le respect de la liberté des personnes constituent certes une préoccupation à ne pas négliger, mais ils ne justifient pas une mise en cause de l'institution du mariage, fondement juridique de la famille.
Si l'Etat est amené à valoriser et à institutionnaliser les couples mariés, c'est uniquement parce que le couple marié est potentiellement créateur d'enfants.
A ce propos, comme le soulignait Ernest Renan : « aucune civilisation n'a été bâtie par des personnes seules nées de parents inconnus et morts célibataires ».
La famille est le socle de la société. Elle reste le niveau le plus épanouissant et structurant pour le développement de l'enfant. Parce que la famille est la promesse de survie d'une société, il semble indispensable de le revaloriser en prenant le soin de na pas y porter atteinte et, surtout, de la privilégier.
Pensons à l'enfant, comme l'a très justement dit notre collègue Louis de Broissia, à son équilibre et à son avenir. C'est lui qui devrait être au coeur de nos préoccupations et non pas la recherche d'un statut donnant du confort à des individus plus animés par leur égocentrisme que par l'abnégation de soi-même au profit du bonheur et de l'épanouissement de la famille. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
La responsabilité d'une société est d'assurer la transmission de la vie de génération en génération. Cette transmission ne peut se faire que par les couples hétérosexuels.
A ce niveau, on ne peut que déplorer la non-politique familiale du Gouvernement.
Les effets induits de cette proposition de loi sur la politique familiale n'ont pas été mesurés, je m'en étais inquiété au moment de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale au sein de la commission des affaires sociales.
Quel sera le coût financier de ce dispositif pour l'ensemble des contribuables ?
Il aurait mieux valu poursuivre les réformes engagées par le gouvernement Juppé,...
M. Louis de Broissia. Ça, c'est vrai !
M. Robert Bret. On a vu le résultat !
M. Alain Vasselle. ... que vous avez interrompues,...
Un sénateur socialiste. Non ! Ce sont les élections !
M. Alain Vasselle. ... en mettant en oeuvre la suppression de la décote et l'allégement du barème de l'impôt sur le revenu, en vue de rendre le mariage fiscalement plus attractif pour les bas revenus.
Je remercie notre collègue Philippe Marini d'y avoir veillé.
M. René-Pierre Signé. Il y a eu des élections, non ?
M. Alain Vasselle. Les mesures fiscales prises en faveur du concubinage ne doivent en aucun cas être plus attractives que celles qui sont réservées à la famille.
C'est l'institution familiale que nous devons privilégier, et je regrette, une nouvelle fois, les mesures prises lors de la dernière loi de finances et abaissant le plafond du quotient familial dans un but purement comptable.
Ainsi, avec cette proposition de loi, le Gouvernement confirme une politique familiale en trompe-l'oeil, qui consiste essentiellement à reprendre d'une main ce qu'il donne de l'autre. Cette proposition, en fragilisant l'institution familiale, fragilise notre pays.
Mais en définitive, mes chers collègues, pourquoi s'en étonner ? En effet, l'oeuvre destructrice de ce gouvernement est en route depuis 1997, sous des apparences trompeuses, dont l'effet séducteur en première approche tombera dans quelque temps, quand les Françaises et les Français en prendront conscience.
Espérons qu'il ne sera pas trop tard pour notre pays, car les mesures nécessaires qu'imposera la situation seront encore plus douloureuses que celles qu'il a fallu mettre en oeuvre en 1986 et 1993. (Applaudissements sur les bancs du RPR.)
M. Claude Estier. Ce gouvernement a été voulu par les Français !
M. Alain Vasselle. Oui, mais nous en reparlerons, monsieur Estier !
M. Jean Chérioux. Le suivant aussi sera voulu par les Français !
M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues.
Veuillez poursuivre, monsieur Vasselle.
M. Claude Estier. Il y a tout de même des choses qu'on ne peut pas laisser dire !
M. Alain Vasselle. Mes chers collègues, le Gouvernement n'avait-il pas mieux à faire que de légiférer sur des questions de société, alors que le chômage n'est pas enrayé structurellement, que l'insécurité règne encore dans nos banlieues,...
Mme Nelly Olin. Bravo !
M. Alain Vasselle. ... et que nos jeunes manquent de repères pour leur avenir ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Je conclurai en affirmant : le mariage, oui, le PACS, non ! Rejetons-le, car les Français et les Françaises, à une large majorité, n'en veulent pas. (Applaudissements sur les mêmes travées du RPR.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Travail, famille, patrie !
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il a assez parlé de son banc !
M. Dominique Braye. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, trois mois après l'adoption de cette proposition de loi sur le pacte civil de solidarité dans les conditions que nous connaissons, il revient donc maintenant au Sénat d'en débattre.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est original !
M. Dominique Braye. Ainsi, l'occasion nous est donnée de démontrer, une nouvelle fois, l'importance et l'intérêt de notre assemblée dans la vie nationale, car, sur le PACS peut-être plus que sur tout autre texte, la réflexion du Sénat est bienvenue.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Sauf quand il y a une question préalable !
M. Dominique Braye. En effet, c'est dans la précipitation la plus totale que l'Assemblée nationale a voté un texte dangereux dans ses principes - j'y reviendrai -... (Protestations sur les travées socialistes.)
Mme Danièle Pourtaud. Quelle précipitation ?
M. Dominique Braye... mais aussi mal ficelé et source d'importantes difficultés pratiques et juridiques.
M. Claude Estier. C'est n'importe quoi !
M. Dominique Braye. Je sais que cela vous a beaucoup dérangé, et tout le monde, toute la nation,...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Demandez à Mme Boutin, qui assiste à nos débats dans les tribunes, ce qu'elle en pense !
M. Dominique Braye. Et tout cela parce que, comme trop souvent, la majorité actuelle de l'Assemblée nationale n'a cherché à atteindre qu'un seul but : l'affichage politique, l'effet d'annonce, sans jamais se soucier des conséquences juridiques des textes adoptés.
M. Jean-Chérioux. Très bien !
M. Dominique Braye. Pour le PACS, l'objectif était clair, comme l'ont d'ailleurs reconnu les sénateurs socialistes membres de la commission des lois la semaine dernière il s'agissait : d'abord et avant tout d'un texte politique...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Que faites-vous toute la journée ? Ne faites-vous pas de politique ?
M. Robert Bret. Qu'êtes-vous en train de faire ?
M. Dominique Braye. ... visant à légitimer socialement l'homosexualité au nom du progrès et de l'évolution des moeurs. (M. Dreyfus-Schmidt clame son approbation.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Oui !
M. Dominique Braye. Monsieur le juge, permettez-moi de continuer.
M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, s'il vous plaît, laissez parler l'orateur.
M. Louis de Broissia. Cela les vexe beaucoup !
M. Jean Chérioux. Ils sont gênés !
M. le président. Poursuivez, monsieur Braye, et vous seul !
M. Dominique Braye. Je répète : pour les sénateurs socialistes, il s'agissait d'abord et avant tout... (M. Dreyfus-Schmit s'exclame de nouveau)... d'un texte politique visant à légitimer socialement l'homosexualité au nom du progrès et de l'évolution des moeurs.
M. Jean-Luc Mélenchon. Oui !
M. Dominique Braye. Ceux qui s'y opposeraient seraient inévitablement taxés de ringards, voire d'intégristes.
M. Jean-Luc Mélenchon. Absolument !
M. Louis de Broissia. C'est d'ailleurs ce qu'a dit M. Mélenchon !
M. Jean Chérioux. Ils sont contre le mariage républicain !
M. Dominique Braye. Je veux donc saluer ici le travail remarquable du Sénat, qui a refusé de céder à cette vision manichéenne, qui a pris le temps de la réflexion, ce qui, vous en conviendrez, était la moindre des choses pour un sujet de société d'une telle importance.
Ici donc, point de débat tronqué, étouffé, mais, au contraire, le temps laissé à la réflexion,...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est vous qui l'étouffez sans arrêt en hurlant ! (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Louis de Broissia. Apportez un verre d'eau à M. Dreyfus-Schmidt !
M. Dominique Braye. ... le temps laissé au débat, avec une très large série d'auditions de personnalités de tous bords et de tous horizons voulues par notre commission des lois, ce qui, vous le savez, n'a pas été le fait de son homologue de l'Assemblée nationale.
M. Jean Chérioux. C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Claude Estier. Mme Boutin a parlé pendant cinq heures !
M. Dominique Braye. Je parle de la commission des lois !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et vous, vous braillez sans arrêt !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. N'interrompez pas l'orateur !
M. Dominique Braye. C'est l'hôpital qui se fiche de la charité, mon cher collègue !
M. le président. Sur ces considérations hospitalières et caritatives, poursuivez, mon cher collègue !
M. Dominique Braye. Ici, à la différence de ce qui s'est passé à l'Assemblée nationale, il y a eu la volonté de dépasser les vaines querelles, les attaques excessives,...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela vous va bien !
M. Claude Estier. Vous pouvez parler !
M. Dominique Braye. ... les polémiques, pour arriver enfin à un débat apaisé, qui ne serait plus réduit...
M. René-Pierre Signé. C'est nul !
M. Dominique Braye. ... à une alternative réductrice : pour ou contre le PACS, c'est-à-dire favorable ou hostile aux couples homosexuels.
C'est tout à l'honneur de notre assemblée d'être sortie de ce piège, en allant plus loin que le simple rejet de ce texte.
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous n'en êtes pas encore sorti !
M. Dominique Braye. C'est tout à l'honneur de la commission des lois, en particulier de son rapporteur, M. Gélard,...
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Dominique Braye. ... d'avoir proposé des solutions permettant de régler les situations concrètes dans un cadre de solidarité, sans menacer l'institution familiale ni le mariage républicain.
M. Jean Chérioux. C'est bien ça qui les gêne !
M. Dominique Braye. Car tel est bien le premier danger du PACS... (Brouhaha sur les travées socialistes.)
M. le président. Poursuivez, monsieur Braye.
M. Dominique Braye. Car tel est bien le premier danger du PACS : porter atteinte à l'institution du mariage (Très bien ! et vives marques d'approbation sur les travées du RPR),...
M. Michel Dreyfus-Schmitt. Laissez parler M. Braye !
M. Claude Estier. Oui, laissez-le parler ! (Sourires sur les travées socialistes.)
M. Louis de Broissia. Pourquoi braillent-ils ainsi ?
M. Dominique Braye. ... en proposant un contrat qui offrirait des droits quasiment identiques en contrepartie d'obligations minimales.
Le PACS implique en effet des devoirs bien moins importants que ceux qui sont nés du mariage.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela n'a rien à voir !
M. Dominique Braye. Il se limite à un aspect purement matériel, l'aide mutuelle et matérielle, les modalités de cette aide pouvant d'ailleurs être très différentes d'un PACS à l'autre.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous n'avez rien compris !
M. Dominique Braye. J'ai été rapporteur du texte sur les pitbulls, j'avoue que je ne pensais pas en trouver au sein de notre assemblée ! (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste. - Protestations sur les travées socialistes.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Oh !
M. Claude Estier. Ça vous va bien, monsieur Braye, de parler de pitbulls !
M. Alain Vasselle. Un peu de sérénité !
M. le président. Oui, un peu de sérénité.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Là, c'est l'hôpital qui se moque de la charité !
M. Dominique Braye. Le PACS, disais-je, implique des devoirs bien moins importants que ceux qui sont nés du mariage. Il se limite à un aspect purement matériel, l'aide mutuelle et matérielle, les modalités de cette aide pouvant d'ailleurs être différentes...
M. Guy Allouche. Mon cher collègue, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Dominique Braye. Je vous en prie, monsieur Allouche. Peut-être ferez-vous revenir la sérénité au sein de votre groupe !
M. le président. La parole est à M. Allouche, avec l'autorisation de l'orateur.
M. Guy Allouche. Monsieur Braye, je suis de ceux qui revendiquent la liberté, pour un opposant, de dire ce qu'il a envie de dire, et je comprends mes amis et collègues qui protestent quand vous interrompez sans cesse de votre place.
Mais, en la circonstance, je ne peux pas vous laisser dire que, parce que nous protestons, nous sommes des pitbulls. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
Je vous demande donc de retirer votre propos ou, au moins, de présenter des excuses à ceux de nos collègues qui ont pu se sentir visés par cette remarque. (Applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Braye.
M. Dominique Braye. J'ai dit que j'avais été le rapporteur de la loi relative aux pitbulls et que je ne pensais pas trouver des faciès équivalents à ceux de ces chiens de banlieue. (Vives protestations sur les travées socialistes.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Regardez-vous !
M. Jean-Luc Mélenchon. Il persiste et signe !
M. Dominique Braye. Que ceux qui manifestement se sentent visés veuillent bien se désigner, auquel cas je pourrai prononcer des excuses.
M. le président. Nous pouvons considérer que l'incident est clos.
M. Guy Allouche. Non ! Il a même été aggravé, et, en guise de protestation, nous sortons. (Mmes et MM. les sénateurs socialistes quittent l'hémicycle.)
M. Dominique Braye. Nous allons pouvoir poursuivre dans la sérénité !
Les devoirs du PACS - j'y reviens - se limitent à un aspect purement matériel : l'aide mutuelle et matérielle, les modalités de cette aide pouvant d'ailleurs être très différentes d'un PACS à l'autre puisque fixées par le pacte lui-même. La vie commune, par exemple, ne semble pas exiger, comme pour les époux, une communauté de vie impliquant le choix d'une résidence commune.
Rien n'est prévu non plus concernant les devoirs des partenaires à l'égard de leurs enfants, alors que ce contrat est ouvert à des couples susceptibles de procréer.
En cas de rupture, enfin, aucune protection n'est accordée au plus faible puisque la rupture est possible unilatéralement, à tout moment, et sans intervention du juge.
Rien que pour cela, mes chers collègues, le PACS méritait d'être combattu, parce que le mariage demeure et doit demeurer, surtout en période de crise, la structure la plus protectrice pour les deux conjoints et pour les enfants qui en sont issus.
Mme Nelly Olin. Très bien !
M. Dominique Braye. C'est un facteur de stabilité pour la société, et le législateur se doit de la protéger.
Il est donc impensable d'institutionnaliser et de mettre sur un pied d'égalité toutes les formes de vie affective.
Si l'Etat s'intéresse aux couples mariés, c'est non pas parce qu'ils entretiennent des relations affectives et sentimentales, mais parce qu'ils ont vocation à devenir parents.
Au travers du mariage, ce sont donc les enfants qu'il veut aider, et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle l'Etat intervient également lors de la naissance d'enfants dans des couples de concubins. Les droits accordés à tous les couples avec enfants sont la compensation de charges de famille.
L'Etat ne réglemente donc pas arbitrairement et inégalement les rapports relevant de la sphère privée. Il se préoccupe simplement de la pérennité de la société, notamment par le biais de la politique familiale.
Le rapport de M. Patrice Gélard rappelle heureusement le dixième alinéa du préambule de la Constitution actuelle : « La nation doit assurer à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. »
Quelle pourrait être la justification d'un tel contrat dans le cas de couples homosexuels ? Quelle serait la contrepartie attendue par la société ? Aucune, dès lors qu'il n'y a pas d'enfant.
Je le redis, si la société s'intéresse aux couples hétérosexuels, c'est toujours en raison de l'enfant qu'ils peuvent porter, car il y va de son intérêt vital.
Dans le cas de l'homosexualité, ce contrat social devient impossible, sauf à céder à la revendication ultime des mouvements qui sont à l'origine du contrat d'union sociale puis du PACS, c'est-à-dire l'accès égalitaire des homosexuels au droit à l'adoption et aux techniques d'assistance médicale à la procréation.
Alors là, le débat change de nature. Il ne s'agit plus uniquement de légitimer socialement l'homosexualité. Nous changeons radicalement de société.
M. Alain Vasselle. C'est exact !
M. Dominique Braye. C'est le droit à l'enfant qui prendrait alors le pas sur les droits de l'enfant. (MM. de Broissia et Vasselle applaudissent.)
Or, pour l'instant, notre société a le devoir de protéger l'enfant. Et les travaux des pédiatres et des psychologues montrent tous que celui-ci a besoin, pour son épanouissement, de la double référence que représentent les deux parents de sexe opposé.
Il n'y a qu'à voir, aujourd'hui, les ravages des relations monoparentales, de l'absence du père ou des divorces sur la psychologie des adolescents pour ne pas vouloir créer de nouveaux problèmes en validant comme modèle social des situations qui s'écartent de tous les modèles naturels de l'anthropologie.
Voilà donc la double justification du refus de ce pacte civil de solidarité.
Ce que nous disons, c'est « non » à un sous-mariage, qui, en plus, serait la première étape vers le droit pour des couples non hétérosexuels, qui trouveraient là le seul moyen de satisfaire leur envie, d'être, à terme, parents et d'élever des enfants.
Mais ce que nous disons aussi, c'est « oui » à l'application aux couples homosexuels qui le désirent des règles existantes pour les couples hétérosexuels non mariés.
Car nous ne nions pas qu'il existe aujourd'hui des situations juridiques insatisfaisantes pour de nombreux couples vivant hors mariage, qu'ils soient d'ailleurs homosexuels ou hétérosexuels.
Voilà pourquoi je suis tout à fait favorable à la proposition de la commission des lois de transférer le droit au bail au partenaire survivant en cas de décès du titulaire du bail, comme je suis favorable à l'adoption de mesures fiscales et successorales spécifiques, ou encore à l'assimilation des partenaires à des personnes mariées pour ce qui concerne le droit à un congé en cas de décès du partenaire, ou même pour le choix des dates de congés payés.
En revanche, mes chers collègues, je trouve qu'il est extrêmement choquant d'envisager, par l'intermédiaire de l'imposition commune, de permettre à des partenaires de bénéficier du quotient conjugal, dont l'avantage fiscal n'est pas plafonné, alors que le Gouvernement n'a pas hésité, dans la loi de finances pour 1999, à diminuer, à hauteur de 4,5 milliards de francs, les avantages en faveur des familles, notamment en baissant le plafond de l'avantage procuré par un enfant à charge.
Mais toutes ces revendications, pour certaines parfaitement légitimes, auraient très bien pu être satisfaites dans une loi de finances, ou dans une loi portant diverses mesures d'ordre social, comme ce fut le cas en 1993, lorsque le législateur accorda au concubin homosexuel de l'assuré social la qualité d'ayant droit pour l'assurance maladie en tant que personne à charge.
La reconnaissance de ces nouveaux droits était d'ailleurs préconisée dans deux rapports qui vous ont été transmis, madame le ministre, l'un de Irène Théry sur l'extension des droits sociaux à tous les concubins, même homosexuels, l'autre du professeur Jean Hauser, qui s'attachait plutôt aux problèmes patrimoniaux.
Cette approche présentait tous les avantages. Elle réglait les problèmes pratiques et les discriminations dans l'accès aux droits sociaux, sans pour autant apporter une réponse idéologique, symbolique.
En effet, une chose est de permettre à des personnes qui ne peuvent pas se marier de vivre ensemble et en sécurité juridique - nous reconnaissons tous aujourd'hui que ces personnes ont droit à la dignité et à la considération - mais une autre est de jouer de la force symbolique de la loi pour institutionnaliser une assimilation des couples homosexuels aux couples hétérosexuels.
Madame le ministre, les couples hétérosexuels ont fait le monde et continuent à le forger par l'acte de nature, le plus beau qui soit : la procéation. De cela, il convient de se souvenir, mes chers collègues, les pieds campés sur terre et la tête suivant le fil législatif qui en découle.
C'est en tout cas ce que la majorité sénatoriale entend faire aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. Mes chers collègues, nos débats ont été vifs. Mais je pense que, selon la tradition du Sénat, aucun des orateurs n'a souhaité porter atteinte ni à la dignité de la Haute Assemblée ni à celle de l'un d'entre nous.
Je vous invite, toutefois, mes chers collègues, à faire preuve de tolérance mutuelle dans la suite de nos débats. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je souhaitais intervenir dans le sens des propos que vous venez de tenir à l'instant même, monsieur le président.
Je m'étonne d'avoir été interrompu hier par la présidence alors que je n'avais pas épuisé mon temps de parole. Je déplore cette attitude, qui ne me paraît conforme ni aux pratiques de notre assemblée, ni à la lettre de notre règlement.
Ayant entendu M. Allouche protester tout à l'heure contre un propos qui était tenu par M. Braye, je voudrais très cordialement lui faire remarquer que, si l'on veut que la sérénité règne dans les débats, il vaut mieux respecter les règles formelles auxquelles nous sommes tous astreints.
M. Louis de Broissia. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. Madame le ministre, moi qui ai appartenu à une autre assemblée, j'ai été quelque peu choqué de constater que, chaque fois qu'un membre de la majorité sénatoriale intervenait, on montrait de façon un peu ostentatoire au banc du Gouvernement que ses propos n'intéressaient pas, alors que chaque fois qu'un membre de l'opposition sénatoriale prenait la parole, on l'écoutait avec intérêt !
J'aimerais que, dans la suite des débats, l'indifférence marquée à l'égard de nos propos ne soit plus aussi ostensible. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'attention, cela se mérite ! (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Louis de Broissia. Ce n'est pas bien ce que vous dites là, monsieur Dreyfus-Schmidt.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d'abord dire à M. de Broissia que j'ai écouté avec beaucoup d'attention M. de Montesquiou,...
M. Aymeri de Montesquiou. Je suis votre serviteur !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... qui m'a paru présenter ses arguments de façon modérée.
Cela dit, il est vrai que je préfère quelquefois, vis-à-vis d'autres orateurs, ne pas nécessairement accorder une attention assidue à telle ou telle remarque.
Croyez bien cependant que j'entends tout.
Je vais d'ailleurs, sans revenir sur l'ensemble des arguments qui ont été longuement développés par les uns et par les autres, vous faire maintenant part de quelques remarques que m'ont inspirées les orateurs qui se sont exprimés depuis hier.
M. René-Pierre Sigué. Ce n'était pas brillant !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. D'abord, je suis frappée par le réel refus de certains de regarder en face la réalité du PACS.
Il est vrai, mesdames, messieurs les sénateurs, que nombre d'entre vous jouent les coqs de bruyère et veulent être sourds et aveugles face à la réalité du PACS. (Approbations sur les travées socialistes.)
La réalité du PACS, c'est la reconnaissance des liens matériels et affectifs pour l'ensemble des couples qui ne sont pas mariés, qu'ils soient hétérosexuels ou homosexuels, Bertrand Delanoë nous l'a rappelé à juste titre hier, avec beaucoup de pudeur et d'émotion.
Le PACS intéresse ceux qui veulent être reconnus par un statut.
Cela dit, les concubins qui ne veulent être encadrés par aucun statut juridique restent évidemment libres de ne pas l'être.
Le PACS offre la possibilité à ceux des concubins, hétérosexuels ou homosexuels - je le dis une fois encore - qui veulent cette reconnaissance de leurs liens affectifs, de leur amour, de leur tendresse, de leur engagement matériel et moral, de l'obtenir.
Tel est le premier point.
Autre réalité du PACS : ce statut apporte plus de droits - mais il impose aussi des obligations - que ceux qui sont actuellement reconnus aux couples de concubins hétérosexuels.
Je vais brièvement dresser la liste des apports du PACS, parce que ces apports ont été contestés par plusieurs orateurs.
Tout d'abord, on pourra faire la preuve de ce pacte, puisque celui-ci est enregistré. Un nouveau statut existe et il peut être prouvé à l'égard des tiers.
Ensuite, ce pacte engage ses membres à la solidarité pour les dettes.
Par ailleurs, les partenaires ont obligation de contribuer aux charges de la vie commune.
Le PACS ouvre aussi la possibilité aux partenaires de bénéficier de l'attribution préférentielle pour certains biens, dont le logement. Voilà un « plus » extrêmement important par rapport à ce que la jurisprudence et le droit reconnaissent aujourd'hui aux concubins uniquement hétérosexuels.
Le PACS accorde également les droits suivants : l'impossibilité de rompre sans informer l'autre, l'imposition commune après délai, des abattements fiscaux et des droits d'enregistrement inférieurs, le rapprochement professionnel dans la fonction publique, des périodes de congés payés et de congés pour événements affectifs ou familiaux.
Le PACS apporte donc un « plus » et certaines de ses dispositions, croyez-moi, intéresseront des concubins hétérosexuels qui souhaiteront voir leur statut reconnu.
Il me semble, par ailleurs - ce sera ma deuxième observation - que les critiques que j'ai entendues ici ne portent pas sur la réalité du PACS et qu'il s'agissait en fait de critiques virtuelles.
En effet, le PACS ne porte pas atteinte au mariage. Il est absolument neutre par rapport au mariage et à la famille. Or, tout d'un coup, 200 ans après que Portalis, qui nous regarde, je crois, avec une certaine ironie, a rédigé le code civil et défini ce qu'était le mariage, on s'avise qu'il faut définir le mariage dans le code civil, alors que ledit code n'est fondé que sur le mariage !
M. Jean Chérioux. C'est vous que Portalis regarde avec ironie !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. J'ai beaucoup de respect pour Portalis et je constate - voyez sa statue ! - qu'il vous regarde, vous, en particulier, messieurs de la majorité sénatoriale, parce qu'il a les yeux fixés de ce côté-ci de l'hémicycle. (Sourires et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Alain Vasselle. Il ne regarde pas seulement de ce côté-ci !
M. Jean Chérioux. En fait, il se voile la face ! (Nouveaux sourires.)
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le PACS ne porte en aucune façon atteinte au mariage et à la famille, disais-je, et il n'a aucune conséquence sur les législations concernant la procréation médicalement assistée ou l'adoption.
Par ailleurs, puisque je me suis exprimée très en détail sur la famille devant l'Assemblée nationale et que cela ne me gêne en aucun cas de me répéter, je redis que, oui, un enfant a le droit d'avoir un père et une mère.
M. Alain Vasselle. Il ne manquerait plus qu'il en soit autrement !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement n'acceptera jamais qu'un couple homosexuel puisse avoir le droit d'adopter, en tant que tel, des enfants.
Un enfant a droit à son père et à sa mère, disais-je. L'autorité parentale, comme la responsabilité parentale, doit s'exercer à l'égard des enfants de la part des deux parents.
A ce point du débat, je vous poserai donc deux questions, messieurs de la majorité du Sénat.
S'il était si urgent de légiférer sur la famille, pourquoi ne l'avez-vous pas fait lorsque vous en aviez le pouvoir ? (M. Chérioux proteste vivement.)
M. Louis de Broissia. Parce que nous avons été interrompus !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Ensuite, messieurs de la majorité sénatoriale, comment se fait-il que, lorsque la loi de 1993 a prévu que l'autorité parentale devait être exercée par les deux parents, vous ayez posé une condition restrictive, celle qui consistait à préciser qu'il fallait, pour que ce soit le cas, que les deux parents aient vécu ensemble pendant au moins un an ? (Applaudissements sur les travées socialistes. - Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. Faux !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Ne croyez-vous pas que, c'est justement là une négation du droit des enfants à avoir leur deux parents, quelle que soit la situation juridique du couple que forment ces parents ? (Applaudissements sur les mêmes travées. - M. Chérioux proteste énergiquement.)
M. le président. S'il vous plaît, monsieur Chérioux ! La parole est à Mme le ministre.
M. Louis de Broissia. Ce ne sont pas des parents de passage que nous voulons !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Les parents sont des parents ! (Applaudissements sur les través socialistes.)
Je relève enfin qu'en réalité la majorité sénatoriale ne veut pas du PACS. Selon elle - nous l'avons entendu ! - le PACS est inutile. Or j'ai démontré ce qu'il apportait, et je n'y reviendrai pas, par rapport à la situation des concubins.
M. Gélard, pour contourner avec habilité cette difficulté, propose une définition du concubinage. Mais, en même temps, il refuse de manifester clairement que nous rejetons désormais toute discrimination à l'encontre des concubins homosexuels.
Si l'idée est d'inscrire dans la loi, parce que l'on n'a pas suffisamment confiance dans l'évolution possible de la jurisprudence de la Cour de cassation après l'instauration du PACS, qu'il ne doit plus y avoir de discrimination, alors, écrivons-le clairement et nettement ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
Le PACS serait, selon vous, dangereux. Mais je viens de dire en quoi il n'a aucune conséquence sur le mariage et sur la famille, et en quoi il apporte au contraire un « plus », à savoir de la solidarité.
A cet égard, je voudrais répondre à M. de Montesquiou, dont j'ai écouté l'exposé très attentivement et avec beaucoup d'intérêt, comme toujours.
Comme je lui faisais remarquer qu'il avait axé son intervention sur le mariage et la famille alors que ce n'est pas le sujet, il m'a répondu : « Si, parce que tout ce qui n'est pas interdit est permis. » Permettez-moi, monsieur de Montesquiou, de vous rappeler que, s'agissant de l'adoption et de la procréation médicalement assistée, le code civil ne procède pas ainsi. Il procède par affirmations positives. Il dit qui et dans quelles conditions a le droit d'adopter des enfants ; mais il n'interdit rien. Je vous conseille, à ce propos, de revoir l'article 343 du code civil.
Bref, le Sénat refuse de voir la réalité du PACS, qui apporte plus que le concubinage et qui ne menace ni la famille ni le mariage.
La majorité sénatoriale refuse le principe même du PACS et, ce faisant, fait obstruction au PACS.
Certes, une obstruction plus habile que celle de l'Assemblée nationale, plus en finesse, dirai-je. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. C'est gentil !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Mais, finalement, cette obstruction ressemble tout de même à une finasserie... (Oh ! sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. Très réfléchie !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... et à une ruse, pour éviter d'avoir à affronter les vrais problèmes ! (Applaudissements sur les travées socialistes. - Exclamations sur les travées du RPR.)
Je terminerai en remerciant les orateurs des groupes de gauche, qui ont apporté leur soutien à cette démarche progressiste. Je les remercie aussi d'avoir poursuivi la réflexion en proposant des amendements au texte adopté par l'Assemblée nationale, preuve que c'était possible. Je veillerai à ce que ces propositions soient examinées lors de la nouvelle lecture de cette proposition de loi à l'Assemblée nationale.
Le Gouvernement accueillera avec bienveillance tout ce qui permettra de mettre fin aux discriminations entre couples homosexuels et couples hétérosexuels, et il fera sienne toute proposition visant à améliorer ce texte, car loin de lui l'idée qu'après une première lecture à l'Assemblée nationale cette proposition de loi ne mérite pas d'être améliorée. Je regrette que la majorité sénatoriale n'ait pas voulu s'engager dans cette voie ! (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jean Chérioux. Vous n'avez pas écouté ! Vous avez passé votre temps à écrire !
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Madame la ministre, madame le garde des sceaux, je dois dire que, une fois de plus - et c'est l'habitude - votre propos m'a vivement intéressé, car tout au long de votre intervention nous avons senti une contradiction.
Vous êtes très gênée d'être obligée de reconnaître l'habileté du Sénat et, forçant un peu vos propos, de reconnaître que, sans le moindre esprit de discrimination, nous avons voulu résoudre les problèmes sans pour autant porter atteinte aux principes. Vous ne l'avez pas dit clairement, mais vous êtes bien obligée de le reconnaitre. Vous vous attendiez, ainsi que mon ami Patrice Gélard l'a excellement expliqué, à une manifestation supplémentaire de ringardise ! Je m'interroge sur le point de savoir de quel côté, pour l'instant, la ringardise se situe... (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.
Ayant entendu nos suggestions, excellemment exposées par nos rapporteurs, vous êtes bien obligée, en outre, de reconnaître au fond de vous-même - car nous connaissons votre honnêteté intellectuelle - que nous avons résolu des problèmes.
Mais il y a derrière vous ce fameux vote de l'Assemblée nationale quelque peu... aux forceps - j'hésitais à employer l'expression. En effet, dans un premier temps, la moitié du groupe socialiste n'était pas présente - on se demande pourquoi - et, dans un second temps, le groupe s'est finalement rassemblé dans les conditions que nous connaissons, et la pression de ce lobby auquel vous croyez devoir obéir a pu se manifester pleinement.
Madame la ministre, pour l'instant, vous avez la majorité, c'est un fait. Pour combien de temps ? Nous n'en savons rien. Vous pouvez donc faire ce que vous voulez. Contrairement à ce que vous avez dit, nous savons très bien que, quelle que soit la qualité des observations que nous vous avons présentées, vous n'en tiendrez aucun compte.
Alors, je vous mets en garde.
Une majorité peut juridiquement tout faire. Mais, dans un certain nombre de cas, lorsqu'elle impose à un pays des dispositions qui vont à l'encontre de principes fondamentaux de la société auxquels nous tenons, attention au choc en retour !
M. René-Pierre Signé. Des menaces ?
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. C'est ainsi que vous avez cru pouvoir imposer, dans les matières qui sont traitées au sein de ce gouvernement - mais tant d'autres sont laissées de côté que l'on ne sait plus très bien à quoi vous vous attachez - un certain nombre de choses, et vous avez réussi ! Mais s'agissant de ce texte, vous avez dépassé les bornes ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, et sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. Louis de Broissia. Cela fait longtemps qu'elles sont franchies !
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Vous parviendrez à faire adopter cette proposition de loi, nous le savons, par une majorité qui vous obéit parce qu'elle n'ose pas vous désobéir ! (M. Claude Estier s'insurge.)
Monsieur Estier, interrogez la moitié de députés socialistes qui n'est pas venue voter !
M. Claude Estier. C'est blessant pour les députés, ce que vous dites là !
M. Jean Chérioux. C'est pourtant la vérité !
M. Dominique Braye. La vérité vous dérange !
M. Michel Caldaguès. Oui, ça les dérange !
Mme Nelly Olin. Les familles s'en souviendront !
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Demandez à ces députés pourquoi ils ne sont pas venus voter ! (Vives protestations sur les travées socialistes.)
M. Claude Estier. Vous assistez toujours à tous les débats, vous ?
M. le président. Poursuivez, monsieur le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Sur ce point, vous êtes gênés, je le sais bien, tout comme Mme le garde des sceaux est gênée par la qualité du travail que nous avons présenté !
M. Claude Estier. Pas du tout !
M. René-Pierre Signé. C'est honteux ce que vous dites !
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. De plus, elle sait très bien que nos propositions correspondent aux voeux de la société et que nous sommes parvenus à résoudre des problèmes concrets sans porter atteinte aux principes.
Vous voulez aller plus loin ? Eh bien, faites-le, et nous verrons quel sera le résultat final ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou. garde des sceaux. Monsieur le président de la commission des lois, bien entendu, c'est votre droit de ne pas approuver le PACS et de vouloir le refuser. C'est votre conviction, je la respecte. Mais alors, respectez la mienne ! Je ne peux pas vous laisser dire que je suis gênée ! Je défends un texte auquel je crois. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Vous êtes obligée de le rappeler.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je ne peux pas non plus vous laisser dire que nous subissons des intimidations ! Mais qu'est-ce que cela signifie ?
M. René-Pierre Signé. Ce sont des menaces !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Chacun est libre et responsable !
J'ai dit ce que je pensais de ce texte. Selon moi, il apporte un « plus », et je ne puis admettre qu'on dise que j'ai agi contrainte et forcée. Je suis une femme libre, monsieur le président de la commission des lois ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
Comme vous - je l'ai dit hier et je le répète volontiers aujourd'hui - et bien que la majorité sénatoriale refuse de façon claire et nette le PACS - et vous en avez le droit puisque, ici, vous avez justement la majorité ! - je pense que ce débat aura au moins eu un mérite : celui de faire admettre par certains membres de cette majorité qu'il existe en effet des discriminations à l'égard des couples homosexuels et qu'elles doivent être corrigées, ce que je suis prête à faire.
Si l'on estime que le PACS ne sera pas suffisant pour faire évoluer la jurisprudence de la Cour de cassation, alors écrivons-le dans la loi, mais à condition, je le répète, de trouver une formule très claire et ne prêtant à aucune ambiguïté. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. « Et pourtant elle tourne », disait Copernic.
M. Robert Bret. Il y avait déjà des ringards à l'époque !
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est Galilée qui a dit cela, et non Copernic ! Ne vous trompez pas d'auteur !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Effectivement ! C'est de Galilée qu'il s'agit.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est toujours gênant de se tromper sur l'auteur d'une citation !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Madame le ministre, avec beaucoup d'habileté, vous avez repris une définition que l'un de vos prédécesseurs avait utilisée à l'Assemblée nationale et qui lui avait valu à l'époque de nombreuses critiques. « Vous avez, disait-il, juridiquement tort parce que vous êtes politiquement minoritaire. » Vous recommencez aujourd'hui. Mais nous avons juridiquement raison, et vous le savez !
M. Guy Allouche. Non !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Le PACS n'est pas défendable ! Si vous voulez le défendre - et tous les amendements qui ont été déposés vont dans ce sens - vous vous rapprochez du mariage.
En fait, on a assisté à un dialogue de sourds. Vous n'avez pas voulu nous écouter et, pourtant, comme le disait Galilée, la terre tourne ! (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Robert Bret. Quelle découverte !
M. René-Pierre Signé. C'est faible !
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

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