Séance du 16 février 1999







M. le président. La parole est à M. Pastor, auteur de la question n° 419, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
M. Jean-Marc Pastor. Ma question, qui s'adresse plus particulièrement à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, concerne les difficultés que rencontrent les GRETA, les groupements d'établissements de l'éducation nationale, chargés de la formation continue.
Une mission de service public leur a été conférée par la loi du 16 juillet 1971 instituant la formation professionnelle continue et elle a été réaffirmée par la loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989.
Ces lois font des GRETA un dispositif de formation continue original : ils tirent l'essentiel de leurs ressources de fonds publics - en provenance de l'Etat, de la région et d'autres partenaires - affectés à la fonction publique, ainsi que de fonds affectés par les entreprises à la formation de leurs personnels dans le cadre de leurs obligations.
Exerçant une mission de service public, les GRETA fournissent notamment des services de formation par l'action de leurs réseaux d'établissement.
Ils assurent, de ce fait, l'ensemble des contraintes du service public et ne peuvent limiter leurs activités aux seules actions dites « rentables », entraînant ainsi une distorsion par rapport aux autres organismes, souvent privés, chargés de formation. L'équilibre budgétaire des GRETA s'en trouve donc particulièrement affecté, une grande majorité d'entre eux connaissant actuellement des situations de déficit. Vous comprendrez aisément que cette situation risque de compromettre leur avenir à moyen et à court terme. L'assujettisement à la taxe sur les salaires reste, notamment, un coup dur porté à ce service public.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaiterais savoir si des mesures réglementaires ne pourraient pas être prises en vue de préserver l'avenir des GRETA, ce qui paraît indispensable au maintien d'un rôle public fort dans le domaine de la formation continue.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le sénateur, le ministre de l'éducation nationale a pris connaissance avec beaucoup d'attention de la question que vous lui avez posée et voici la réponse qu'il m'a prié de vous apporter.
La formation tout au long de la vie est une des missions majeures du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
L'activité de formation d'adultes s'exerce sur le marché de la formation professionnelle continue et se développe selon des modalités spécifiques qui prennent appui sur les établissements d'enseignement du second degré - lycées, lycées professionnels, collèges - associés en groupements d'établissements, les GRETA.
Comme l'ensemble des organismes de formation publics, privés ou associatifs qui interviennent dans ce secteur concurrentiel, ce réseau a été confronté aux évolutions introduites par la régionalisation de la formation professionnelle continue des jeunes et par la réorganisation des organismes paritaires collecteurs agréés, les OPCA.
Les établissements ont dû modifier leurs modes d'intervention, adapter les modalités de gestion de leurs personnels et améliorer leur gestion financière et comptable. Ils doivent tenir compte de ces contraintes tout en respectant leur mission de service public, inscrite dans la loi d'orientation de 1989, dite loi Jospin.
Ainsi, grâce au professionnalisme de leurs acteurs, les GRETA contribuent à l'élévation du niveau de qualification de la population et de sa capacité d'adaptation aux mutations économiques et sociales. Ils concourent aussi à la satisfaction des besoins individuels dans une logique d'épanouissement personnel et de promotion professionnelle. Ils participent, par la formation, à la lutte contre les exclusions.
Chaque année, les trois cents groupements d'établissements accueillent près d'un demi-million de stagiaires. L'éducation nationale dans le second degré, à travers le réseau de ses établissements, constitue donc le premier organisme de formation d'adultes.
En 1997, cet ensemble a réalisé ainsi un volume financier de 2,4 milliards de francs, en provenance d'entreprises publiques ou privées pour 41,5 %, des services déconcentrés de l'Etat et de l'ANPE pour 21,8 % et des collectivités territoriales pour 32,4 %.
Ces financements ont permis d'accueillir dans les établissements scolaires 496 000 stagiaires adultes ou jeunes demandeurs d'emplois : 200 000 salariés, 254 000 demandeurs d'emplois et 42 000 personnes finançant leur propre formation pour une durée moyenne de 155 heures par année et par stagiaire.
Pour permettre aux établissements du second degré contribuant à la formation continue des adultes et aux personnels qui interviennent en leur sein de s'adapter à ces nouvelles données, M. Allègre a décidé de mettre en oeuvre une réflexion nationale, qui est actuellement en cours.
Elle a commencé par une table ronde, animée par le recteur de Gaudemar, qui a permis aux partenaires sociaux d'exprimer leur vision de la formation continue des adultes et du rôle que pourrait y jouer l'éducation nationale.
Le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie aura l'occasion, prochainement, d'ouvrir une large concertation sur les orientations qu'il tirera de ce rapport, en vue d'une éducation et d'une formation tout au long de la vie.
M. Jean-Marc Pastor. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Pastor.
M. Jean-Marc Pastor. Monsieur le ministre, je comprends le sens de votre réponse, qui me rassure au moins partiellement en me laissant un espoir dans l'attente des conclusions du groupe de travail qui a été mis en place.
Nous reconnaissons tous le rôle joué par les GRETA, mais nous devons constater que ces derniers ne se sont pas acquittés de la somme qu'ils devraient au titre de la taxe sur les salaires pour l'ensemble de leurs personnels. Mais personne, à aucun moment, ne les avait alertés ; ils n'ont découvert cette situation qu'à l'occasion d'un contrôle fiscal très inopportun et, surtout, très ravageur. Ils viennent ainsi de se voir imposer des rappels sur les trois dernières années, ce qui représente, pour la moitié des GRETA de notre territoire, des sommes colossales à rembourser et qui met aujourd'hui en péril ce genre de structures.
J'espère que le groupe de travail qui a été mis en place prendra en compte ce volet, qui n'est pas directement lié à la formation. Chacun d'entre nous souhaite en effet que les GRETA puissent continuer à fonctionner et à remplir leur mission de service public.
Par ailleurs, il est demandé aux GRETA d'exercer dans tous les départements certaines missions de service public, telles que l'alphabétisation. Certes, ces actions de formation ne sont pas rentables, mais elles doivent être assurées et l'Etat doit donc accepter d'accorder aux GRETA, en matière fiscale, un minimum d'avantages afin de leur permettre de demeurer concurrentiels sur le marché de la formation continue. Comme vous le savez, en effet, dans ce domaine, de nombreux organismes privés ne se préoccupent que de la formation rentable.
De surcroît, les financements locaux sont généralement liés à l'activité des entreprises. Or celles-ci ne sont installées que dans les régions riches. Ainsi, si l'on persistait dans cette voie, les régions pauvres seraient dans l'incapacité de financer ces formations par le biais de la contribution des entreprises aux GRETA. Ainsi, les budgets de ces organismes seraient, une nouvelle fois, mis en difficulté pour exercer leur mission de service public.
Je souhaite donc, monsieur le ministre, que le groupe de réflexion dont vous avez fait état permette à cette mission de service public de retrouver ses lettres de noblesse.
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions orales sans débat.

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