Séance du 16 février 1999







M. le président. La parole est à M. Cornu, auteur de la question n° 407, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Gérard Cornu. Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur un décret portant modification du code de la route, qui concerne le déneigement des routes par les agriculteurs et sera applicable au 1er janvier 2000.
A cette date, les agriculteurs devront, pour procéder à des opérations de déneigement sur les routes, avoir leur permis poids lourds - ils conduisent pourtant sur nos routes, aujourd'hui, des remorques chargées de grain d'un poids total de 20 tonnes sans avoir besoin de ce permis-là -, faire passer au service des mines leurs engins et mettre dans le réservoir de ces derniers du fuel taxé, alors que, actuellement, ils utilisent du fuel détaxé.
Ces trois obligations ne manqueront pas d'avoir des conséquences dramatiques pour les communes rurales, puisqu'elles auront pour effet d'empêcher les agriculteurs de procéder au déneigement des routes tant départementales que communales ; c'est d'autant plus regrettable que, bien souvent, dans les petites communes rurales, les agriculteurs, par solidarité, accomplissaient cette tâche de façon bénévole.
Les conséquences seront dramatiques, je le répète, car les entreprises privées auxquelles il faudra faire appel, nous dit-on, ne pourront jamais assurer en même temps le déneigement de toutes les communes.
Par conséquent, monsieur le ministre, les communes rurales ne seront plus désenclavées, les transports scolaires ne pourront plus assurer leur service normalement, et des personnes isolées, malades, qu'il faudrait transporter à l'hôpital, pourraient voir leur santé dramatiquement mise en danger ; en outre, les maires ne manqueront pas d'être accusés, une fois encore, de ne pas assurer la continuité des services et la sécurité des personnes dans leurs communes.
J'ai évoqué ce dossier avec le ministre de l'agriculture, lors de la discussion du projet de loi d'orientation agricole, à l'occasion de l'examen des dispositions relatives à la pluriactivité. M. Glavany est alors convenu que ce problème devait être réglé. L'ensemble des sénateurs présents ont adopté un amendement sur ce point, justement pour que ce problème soit revu. Mais si je soulève de nouveau cette question aujourd'hui, c'est parce que vous êtes le ministre des transports, de l'équipement et du logement, et que ce décret technocratique émane de votre ministère.
Monsieur le ministre, je vous en prie : essayez de soulager les maires et les responsables des petites communes. En effet, ce décret, visant sans doute, au départ, à favoriser les entreprises lors d'opérations de déneigement, va dans le mauvais sens.
J'ajoute que les agriculteurs connaissent bien les routes départementales et communales et que les collectivités locales, qu'il s'agisse des mairies ou des conseils généraux, ont souvent investi dans des lames, pour le déneigement. Ce sont donc à la fois des habitudes et des investissements au bénéfice de l'ensemble de nos concitoyens qui seraient remis en cause par ce seul décret, entraînant ainsi des conséquences néfastes pour nos communes rurales.
J'attends de votre part une réponse positive, afin que soit réglé le problème de manière pragmatique et correcte pour tout le monde.
M. le président. La parole est M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, le décret et l'arrêté auxquels vous faites allusion ont été pris sous le gouvernement précédent, je le rappelle pour mémoire !
C'est ainsi que le décret n° 96-1001, du 18 novembre 1996, a créé, dans le code de la route, la catégorie des engins de service hivernal. Ce texte a été complété par un arrêté de mon prédécesseur, qui fixe les règles relatives au poids, aux dimensions et à la signalisation de ces engins.
Ces deux textes ont permis de donner une existence réglementaire aux engins utilisés pour le service hivernal, qui, pour certains d'entre eux, circulaient auparavant dans la plus totale illégalité.
En effet, lors des interventions par temps de neige, souvent dans des conditions d'adhérence et de visibilité réduites, les engins utilisés pour le salage ou le déneigement effectuent fréquemment des manoeuvres et occupent sur la chaussée une position peu conforme avec les dispositions générales du code de la route. En outre, leur poids et leurs dimensions dérogent aux règles de ce même code, soit temporairement pour le poids, soit de façon permanente pour les dimensions des outils utilisés.
Par ailleurs, il est exact que les conducteurs de tracteurs agricoles doivent posséder un permis de conduire de catégorie B ou C, suivant le poids total autorisé en charge, lorsque ces matériels ne sont pas attachés à une exploitation agricole et utilisés exclusivement pour l'exercice d'activités agricoles.
Ces dispositions, qui figurent à l'article R. 167-2 du code de la route, n'ont pas été modifiées par les textes relatifs à la conduite des engins de service hivernal.
L'Etat lui-même ne déroge pas à cette règle. C'est ainsi que les agents des directions départementales de l'équipement sont tenus de posséder un permis de catégorie B ou C lorsqu'ils conduisent des tracteurs agricoles lors de travaux d'entretien des accotements, par exemple.
Les agents des collectivités territoriales qui sont amenés à utiliser des tracteurs équipés d'outils pour lutter contre le verglas ou la neige sont également tenus d'être en possession d'un permis de conduire de la catégorie requise.
Toutefois, à l'occasion des travaux de refonte du code de la route, une attention toute particulière sera portée à la situation des agriculteurs qui effectuent bénévolement avec leurs matériels des travaux pour le compte de collectivités territoriales.
Des adaptations de la réglementation peuvent être envisagées, sous réserve qu'elles soient compatibles avec la directive fixant les conditions de délivrance et de validité des permis de conduire, adoptée par les Etats membres de l'Union européenne.
Je sais, monsieur le sénateur, que, à l'occasion de l'examen du projet de loi d'orientation agricole, le Sénat vient d'adopter, sur votre initiative, un amendement allant dans le sens que vous indiquez. La commission mixte paritaire, qui comprend notamment deux cosignataires de cet amendement, se réunira le 4 mars prochain. Elle aura à sa disposition les éléments nécessaires pour se déterminer en toute connaissance de cause !
M. Gérard Cornu. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Cornu.
M. Gérard Cornu. Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces précisions.
La commission mixte paritaire sur le projet de loi d'orientation agricole, au sein de laquelle j'aurai l'honneur de siéger le 4 mars, débattra à nouveau, c'est vrai, de ce sujet, mais votre réponse ne me satisfait qu'à moitié, même si je comprends votre raisonnement selon lequel on pourrait appliquer un traitement particulier aux agriculteurs qui déneigent à titre bénévole. En effet, il faut aussi penser aux agriculteurs qui déneigent en bénéficiant parfois pour cela d'une toute petite rémunération.
On ne peut imaginer que les communes rurales fassent appel à des entreprises privées : outre que ces dernières seraient forcément débordées - il neige le même jour sur toute une région et il faut déneiger immédiatement pour éviter les problèmes - cela entraînerait un coût supplémentaire pour les collectivités locales, qui ne disposent, vous le savez tous, mes chers collègues, que de peu de moyens financiers.
Il faut donc faire preuve de ce bon sens auquel nous sommes accoutumés afin de rendre service à l'ensemble de nos communes rurales et dépasser le seul aspect du bénévolat des agriculteurs. En effet, souvent, des lames de déneigement ont été achetées par les communes et subventionnées par les conseils généraux. Tout cet investissement mérite d'être pris en compte !

CONSÉQUENCES DES FAILLITES D'ARMATEURS
SUR LA SITUATION DES MARINS