Séance du 15 décembre 1998







M. le président. « Art. 17. _ Dans le troisième alinéa de l'article 71 de la loi de finances pour 1993 (n° 92-1376 du 30 décembre 1992), après les mots : "la société Elf-Aquitaine", sont insérés les mots : ", le reversement d'avances d'actionnaires ou de dotations en capital et les produits de réduction du capital ou de liquidation". »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par l'article 17, monsieur le secrétaire d'Etat, vous proposez d'élargir le champ des recettes affectées au compte de privatisation ou, plus exactement, au compte d'affectation spéciale des produits des cessions de titres, parts et droits de sociétés.
La commission recommande l'adoption de cet article mais elle le fait sous deux réserves, l'une d'interprétation, l'autre de précision, celle-ci justifiant d'ailleurs le dépôt d'un amendement après l'article 17.
Peut-être voudrez-vous bien reconnaître, monsieur le secrétaire d'Etat, que votre texte est un peu imparfait. A le prendre à la lettre, il semble permettre d'affecter au compte d'affectation spéciale l'ensemble des avances d'actionnaire et des produits de réduction du capital ou de liquidation quel que soit le statut des entreprises concernées. Il convient donc de préciser que ces affectations ne valent que pour autant que le secteur public est concerné. Mais cela ne suffit pas.
La notion de secteur public, comme celle d'entreprise publique, peut, à certains égards, paraître floue. Il y a, dans le secteur public, des entreprises diverses : l'Etat détient directement la majorité du capital de certaines, alors qu'il ne fait qu'en contrôler indirectement d'autres. Il faudrait préciser comment sera traitée chacune de ces catégories.
Nous souhaitons, bien sûr, que l'affectation au compte ne concerne que les droits et produits que l'Etat tient de sa participation directe au capital des entreprises et établissements publics, et à hauteur de cette participation seulement. Les intérêts des tiers, autres actionnaires ou autres titulaires de droits, doivent à l'évidence être préservés. J'aurais aimé, monsieur le ministre, que vous puissiez me confirmer que telle est bien votre intention.
Cela me donne d'ailleurs l'occasion de souligner combien il peut paraître dangereux à un actionnaire de gérer une entreprise en partenariat avec l'Etat.
En effet, votre texte permet à l'Etat de récupérer des apports qui auraient pu ou qui auront pu être la condition objective sans laquelle des partenaires extérieurs ne seraient jamais entrés dans le capital de ladite entreprise.
En tout état de cause, votre texte, qui étend le champ des recettes du compte, nous a incités à nous pencher sur les dépenses du même compte. Nous y avons trouvé une ligne qui nous a fortement déplu car elle s'intitule : « Reversements au budget général ».
S'agissant d'un compte d'affectation spécial, nous estimons que l'existence d'une telle ligne est paradoxale et contestable par nature. Ici, cette ligne est particulièrement malvenue puisque le compte est censé retracer des opérations de gestion du patrimoine de l'Etat : il est alimenté par des recettes provenant de la cession d'actifs faisant partie de ce patrimoine. Quant aux dépenses, si l'on respecte la notion même de compte d'affectation spéciale, elles ne peuvent, logiquement, concerner que ce patrimoine lui-même.
Ce que nous savons, par ailleurs, des conditions de l'équilibre du budget général, avec son déficit de fonctionnement, a constitué une raison supplémentaire pour la commission des finances de proposer au Sénat la suppression de cette faculté de reversement au budget général.
Les recettes issues des cessions d'actifs au sein du secteur public doivent financer soit des investissements dans le secteur public - des augmentations de capital ou, le cas échéant, des investissements de croissance externe des entreprises du secteur public -, soit le remboursement d'éléments de la dette d'Etat.
Il s'agit d'éviter que, un jour ou l'autre, un ministre du budget quelque peu impécunieux ne cède à la tentation d'employer ces recettes à autre chose. (Protestations sur les travées socialistes.) Ce n'est pas le cas aujourd'hui, heureusement, compte tenu de la bonne conjoncture et des recettes fiscales dont vous avez la chance de bénéficier en 1998, mais demain, monsieur le secrétaire d'Etat, peut-être serez-vous plus impécunieux et aurez-vous à résister à cette tentation. Or la pire des tentations est bien de consacrer des recettes d'investissement au paiement de dépenses de fonctionnement. C'est contre cette tentation que nous voulons vous prémunir. Nous ne voulons pas qu'un tel risque puisse se présenter dans l'avenir.
Tel est, monsieur le président, l'objet de l'amendement que vous allez appeler dans quelques instants en discussion et que je n'aurai donc pas à présenter de nouveau.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 17.

(L'article 17 est adopté.)

Article additionnel après l'article 17