Séance du 15 décembre 1998







M. le président. « Art. 16 quindecies. - Le premier alinéa du III de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« La contribution portant sur les revenus mentionnés aux I et II ci-dessus est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que l'impôt sur le revenu. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 23 est présenté par M. Marini, au nom de la commission.
L'amendement n° 10 est présenté par MM. Ballayer, Machet, Badré, Maman et les membres du groupe de l'Union centriste.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 23.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avec l'article 16 quindecies , nous sommes en présence d'une chose assez surprenante.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Ah !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet article, que nous proposons de supprimer, vise en effet à maintenir le prélèvement au profit de l'Etat au titre du recouvrement de la CSG sur les revenus du patrimoine. Or, la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, qui vient d'être votée - et, sur ce point au moins, en termes identiques par les deux assemblées - a précisément supprimé ledit prélèvement.
La commission des finances propose au Gouvernement d'être beau joueur, et donc d'accepter les votes du Parlement : ce qui a été supprimé, maintenons-le supprimé, ne le rétablissons pas à la faveur de l'examen, quelques jours après, du collectif budgétaire, qui n'est pas nécessairement fait pour cela !
La commission estime que le maintien du prélèvement au profit de l'Etat n'est pas indispensable, partageant en cela le point de vue de la commission des affaires sociales, largement exprimé lors du débat sur la loi de financement de la sécurité sociale.
Nous pensons avoir pris en compte l'ensemble des relations entre l'Etat et les organismes de sécurité sociale, considérant que ceux-ci supportent les frais de gestion des prestations qu'ils servent, en ce qui les concerne, pour le compte de l'Etat.
La commission des finances propose donc la suppression de ce prélèvement, ce qui n'allégera d'ailleurs pas, je le précise, le poids de la CSG pour le contribuable, hélas ! car le prélèvement dont il s'agit est opéré sur le produit de la contribution à taux constant pour les assujettis. Sa suppression entraîne un simple transfert de recettes de l'Etat vers la sécurité sociale.
Je précise que l'enjeu est de l'ordre de 200 millions de francs pour 1999.
En 1997, le prélèvement ne représentait que 85 millions de francs. La différence entre ces deux derniers chiffres tient à l'augmentation des taux de la CSG, et je ne pense franchement pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que les frais de recouvrement pour l'Etat aient cru^, en moins de deux ans, dans les mêmes proportions !
Raison de plus pour s'en tenir au vote que le Parlement a, volontairement et en toute conscience, exprimé lors de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale.
M. le président. La parole est à M. Machet, pour présenter l'amendement n° 10.
M. Jacques Machet. Notre amendement a également pour objet de supprimer l'article 16 quindecies.
En effet, alors que l'article 5 bis de la loi de financement de la sécurité sociale, adoptée définitivement le 3 décembre dernier, avait supprimé les prélèvements pour les frais de recouvrement de la CSG sur les revenus du patrimoine, le même jour, le Gouvernement obtenait le vote d'un amendement dans le cadre du collectif maintenant ces mêmes prélèvements.
Une telle disposition, si elle devait être confirmée, serait donc contraire au vote initial du Parlement, vote à l'unanimité au Sénat et à l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 23 et 10 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne comprend pas que M. le rapporteur général et M. Machet s'opposent à ce qui lui semble être une règle de bonne gestion.
Quel est le fond du problème ?
Les services de l'Etat recouvrent, au profit de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse, la CSG sur les revenus du patrimoine, c'est-à-dire environ 20 milliards de francs en 1998.
Les services de l'Etat fournissent une prestation de services à la sécurité sociale : de même que pour l'impôt sur le revenu, ils s'occupent de l'émission et de l'envoi des rôles nominatifs, de la tenue des fichiers des contribuables, du recouvrement et du contrôle des contributions. Cette prestation mobilise des moyens humains et matériels : elle mérite donc d'être rémunérée.
Je répondrai maintenant à la remarque sarcastique de M. le rapporteur général : l'Etat prend l'engagement de reverser intégralement à la sécurité sociale le montant des rôles.
M. Michel Charasse. Ah ! Comme pour les collectivités locales !
M. Michel Mercier. Comme pour les impôts locaux après la « révision Charasse » !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Voilà ! M. Mercier dit exactement la vérité ! (Sourires.)
M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues, un peu de discipline : nous sommes à la fin de l'année, mais pas encore en vacances ! (Nouveaux sourires.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je poursuis, monsieur le président, mon propos, qui est très sérieux.
L'Etat prend donc en charge les contributions qui ne sont pas recouvrées. En contrepartie, le prélèvement de 0,5 %, qui, de toute façon, n'est pas ressenti par la personne imposée, est à mon avis une rémunération calculée « trop juste », d'une part, au regard des services qui sont rendus à la sécurité sociale et dont je la crois satisfaite, et, d'autre part, compte tenu de la garantie apportée puisque, pour tous les rôles qui sont émis, le montant correspondant sera versé jusqu'au dernier franc.
Je ne comprends donc pas, en toute sincérité, que M. le rapporteur général soit défavorable à cette règle de bonne gestion : il est normal que l'Etat fasse payer ses prestations ; surtout, l'importante garantie de ressources qu'il assure à la sécurité sociale est sans commune mesure avec le prélèvement de 0,5 %.
Je suis donc opposé aux amendements de suppression.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 23 et 10, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 16 quindecies est supprimé.

Articles additionnels après l'article 16 quindecies