Séance du 26 novembre 1998







M. le président. La parole est à Mme Boyer.
Mme Yolande Boyer. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité et concerne la restructuration de la SEITA.
Le 10 novembre, la direction de la SEITA a annoncé de manière brutale une restructuration importante de l'entreprise, qui se traduit en particulier par la disparition de deux usines : Morlaix, dans le Finistère - 172 emplois - et Tonneins, dans le Tarn-et-Garonne - 282 emplois - au profit d'un regroupement sur les sites de Strasbourg et Lille.
Alors que le Gouvernement manifeste sa volonté d'un aménagement équilibré du territoire, comment accepter une telle concentration d'activités économiques sur certains régions alors que d'autres souffrent déjà de leur éloignement géographique et d'un taux de chômage élevé ?
Alors que le Gouvernement se bat pour l'emploi, comment accepter qu'une entreprise rejette ses salariés dans la précarité et le chômage ?
Je sais, bien sûr, que l'Etat ne détient plus que 5 % du capital de cette entreprise depuis sa dénationalisation, en 1995, décidée par le gouvernement précédent.
Ma question est double. Comment pouvez-vous agir pour que l'entreprise manifeste autant d'intérêt pour ses salariés que pour ses actionnaires ? Comment pouvez-vous faire prendre en compte par la direction de la SEITA la volonté d'aménagement du territoire ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville. Madame la sénatrice... (Rires et exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Philippe François. Madame la sénateuse !
Mme Hélène Luc. Nous avons le droit de nous faire appeler comme nous l'entendons !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Madame la sénatrice, vous l'avez dit, la SEITA a annoncé, au début de ce mois, la fermeture de deux de ses usines en France, l'une à Morlaix, qui emploie 170 salariés, l'autre à Tonneins, qui emploie 343 salariés au total en prenant en compte à la fois l'usine de cigarettes et la direction de la distribution.
Cette décision est prise, c'est vrai, par une entreprise privée, dont l'Etat ne détient plus les leviers de contrôle.
Elle n'en est pas moins grave, et je comprends l'émotion comme l'incompréhension qu'elle a légitimement suscitées parmi les salariés, les élus et la population des territoires concernés.
La SEITA, vous le savez, invoque la dégradation de sa situation par rapport à celle de ses principaux concurrents. Elle fait valoir que, même si elle réalise aujourd'hui des bénéfices, elle voit sa position évoluer moins favorablement que celle des opérateurs, notamment américains, qui cherchent à accroître leur part du marché français.
Pour ce qui est des cigarettes brunes, la SEITA indique que le marché, qui était de 35 milliards d'unités en 1990, n'était que de 20 milliards d'unités en 1997.
Mais ces chiffres ne permettent pas d'accepter la brutalité de l'annonce qui a été faite par la direction de la SEITA et qui a profondément ému les populations de Morlaix et de Tonneins.
Le Gouvernement s'attache, vous le savez, à explorer toutes les solutions qui permettraient de prendre des décisions moins contraires aux préoccupations d'aménagement du territoire. Il souhaite que la SEITA fasse de même et ne prenne pas de décision définitive avant d'avoir étudié en profondeur toutes les alternatives.
Même si la responsabilité finale du choix revient à l'entreprise, tous les outils disponibles, notamment au titre de la politique d'accompagnement des investissements industriels, pourront être mobilisés si cela permet de faire émerger une solution plus conforme aux impératifs de l'aménagement et de la cohésion de notre territoire. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)

ISOLEMENT INDUSTRIEL ET FINANCIER DE LA FRANCE