Séance du 16 novembre 1998







M. le président. « Art. 19. - I. - L'article 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988 relative à la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Au I, les mots : "avant le 31 décembre 1999" sont remplacés par les mots : "avant le 31 décembre 2004" ;
« 2° Il est inséré, après le premier alinéa du I, un alinéa ainsi rédigé :
« A compter du 1er juillet 1999, l'allocation peut n'être attribuée que pour certaines zones géographiques d'exercice, qualifications de généraliste ou de spécialiste, ou spécialités compte tenu des besoins, appréciés par zone, qualification ou spécialité ; elle peut être modulée selon les mêmes critères. » ;
« 3° Le dernier alinéa du III est ainsi rédigé :
« A défaut de convention conclue dans un délai de six mois à compter de la publication de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° du ), les dispositions nécessaires à l'application du présent article, à compter du 1er juillet 1999, sont fixées par décret.
« I bis. - Une évaluation du dispositif prévu au I sera annexée au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.
« II. - Au 7° de l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale, après les mots : "la reconversion professionnelle des médecins exerçant à titre libéral et les conditions d'attribution d'une aide à la reconversion", sont insérés les mots : "dont le montant peut varier en fonction de la zone géographique et de l'exercice, par le médecin, d'une spécialité ou de la médecine générale". »
Par amendement n° 58, MM. Bernard, Taugourdeau et Leclerc proposent, dans le texte présenté par le 2° du I de cet article, pour insérer un alinéa après le premier alinéa du I de l'article 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988, de remplacer la date : « 1er juillet 1999 » par la date « 1er janvier 2000 ».
La parole est à M. Bernard.
M. Jean Bernard. Cet amendement vise à modifier la date butoir pour la mise en place du mécanisme d'incitation à la cessation d'activité, le MICA, pour les médecins.
Ce dispositif intéresse certains médecins, qui se sont fondés sur ce mécanisme pour prendre leur décision de cessation d'activité. Il serait préférable de reporter au 1er janvier 2000 l'entrée en vigueur de ces nouvelles règles. Il faut en effet préparer sa cessation d'activité. C'est notamment vrai lorsque - et ce fut mon cas - on exerce dans un cabinet de groupe il faut alors trouver un remplaçant ou un suppléant.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. La commission émet un avis tout à fait favorable sur cet amendement.
Nous comprenons très bien le souci du Gouvernement de moduler le MICA. Toutefois, il n'est pas souhaitable, pour les médecins ayant décidé de cesser leur activité, que les règles du jeu soient modifiées en cours d'année. Un tel changement risque en effet de perturber leur plan de départ à la retraite, comme ils ont été nombreux, réellement inquiets, à nous l'écrire.
Vous avez indiqué à l'Assemblée nationale, monsieur le secrétaire d'Etat, que toutes les demandes déposées en 1999 seraient traitées selon les modalités antérieures, ce qui a incité la commission à retirer l'amendement, similaire à l'amendement n° 58, qu'elle avait présenté.
Toutefois, l'article 19 n'offre sur ce point aucune garantie aux médecins.
L'amendement n° 58 ne fait qu'harmoniser le texte du projet de loi avec vos déclarations rassurantes, monsieur le secrétaire d'Etat. Je pense donc que vous pourriez l'approuver.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Comme je l'ai déjà indiqué à l'Assemblée nationale, j'affirme que tous les dossiers déposés et examinés maintenant seront traités comme auparavant. Il ne faut pas inquiéter les médecins ! Par conséquent, je maintiens que les praticiens ayant choisi de partir à la retraite ou d'exercer une autre activité - c'est tout de même un luxe important dans notre pays - seront soumis au régime ceux qui les ont précédés.
Nous avons fixé une date, celle du 1er juillet 1999, qui ne sera nullement considérée comme un couperet. Il s'agit simplement d'un souci de régionalisation et non pas du tout d'une mesure économique, bien qu'il ait fallu renflouer les caisses vides pour le MICA.
Vous nous avez vous-mêmes reproché, mesdames, messieurs les sénateurs, la déshérance de certaines spécialités. Etant donné qu'il est des régions où certains spécialistes sont en nombre insuffisant, nous n'allons pas inciter ces praticiens à cesser leur activité ! Nous allons donc considérer à la fois la spécialité et la région.
Nous avons fixé la date au 1er juillet 1999. Nous aurions pu la prévoir au 1er janvier 2000. Bref, il fallait bien en fixer une. Mais vous pouvez nous faire confiance : nous ne ferons preuve d'aucun ostracisme.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 58, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 59, MM. Bernard, Taugourdeau et Leclerc proposent, dans le texte présenté par le 3° du paragraphe I de l'article 19, pour le dernier alinéa du paragraphe III de l'article 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988, de remplacer la date : « 1er juillet 1999 », par la date : « 1er janvier 2000 ».
La parole est à M. Bernard.
M. Jean Bernard. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 59, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 17, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de compléter l'article 19 par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - Le nombre des étudiants de première année du premier cycle des études médicales autorisés à poursuivre leurs études en médecine à la suite des épreuves terminales de l'année universitaire 1998-1999 est fixé à 3 583. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. M. le secrétaire d'Etat vient de nous dire que le Gouvernement propose, par l'article 19 du projet de loi, de moduler le MICA en fonction des zones géographiques et des spécialités. Nous le félicitons de cette déclaration.
Toutefois, cette mesure nous semble incohérente avec la volonté affichée par le Gouvernement de relever parallèlement, comme on nous l'a annoncé, le numerus clausus . En effet, on ne peut à la fois favoriser le départ anticipé des médecins - certes, d'une façon modulée du point de vue tant de la géographie que des spécialités - et ouvrir les vannes à l'entrée en formant toujours plus de nouveaux médecins.
C'est pourquoi nous proposons au Sénat de compléter l'article 19 par un paragraphe additionnel fixant exceptionnellement dans la loi le numerus clausus à 3 583 étudiants pour 1999, soit le même chiffre que pour 1998.
Vous m'objecterez, monsieur le secrétaire d'Etat, que le relèvement du numerus clausus a pour objet de permettre le recrutement de médecins dans trois spécialités déficitaires ; mais ne pourrait-on pas plutôt réduire le nombre des médecins formés dans les spécialités très largement représentées dans le corps médical et sur l'ensemble du territoire ? De même qu'il y a la veuve de Carpentras et la coiffeuse de Valence, il y a le dermatologue de Nice. Il y a trop de dermatologues à Nice ! Et je voudrais, à cet égard, vous lire un extrait d'une annexe aux orientations stratégiques de la CNAMTS adoptées par son conseil d'administration, il y a quelques semaines.
« Numerus clausus et démographie : ... il n'existe aucune "pénurie" à attendre dans les dix ans. (...) Tout au contraire, l'augmentation attendue de 12 000 médecins repousse à 2015 le retour aux effectifs existants et donc, si c'est l'objectif, à 2005 une hausse du numerus clausus.
« La hausse du numerus clausus annoncée - plus 200 l'an prochain et plus 400 en trois ans - met inévitablement en cause la cohérence des différentes actions publiques déjà entreprises ou envisagées :
« - compatibilité avec l'usage coûteux et le renforcement, prévue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, d'un MICA ;
« - développement de la coordination des soins ;
« - restructuration de l'offre hospitalière. »
Dans ces conditions, il me paraît bon de fixer par la loi le numerus clausus. On sait bien, en effet, que l'augmentation de ce dernier résulte de la pression exercée par les médecins hospitaliers, qui n'arrivent pas à faire tourner leur service hospitalier autrement qu'avec des médecins étrangers plus ou moins diplômés. Le numerus clausus est augmenté sans se préoccuper de ce qu'il adviendra ensuite de ces nouveaux médecins, lorsqu'ils seront amenés à quitter l'hôpital.
Il nous faut donc essayer, bien modestement, par cet amendement, de gérer la totalité de la carrière des médecins, depuis le début de leurs études jusqu'à la fin de leur carrière, avec le MICA, sans être poussés par une espèce d'urgence à augmenter le numerus clausus sans savoir ce qui se passera après : je me réfère à la CNAM, et M. Spaeth est un homme tout à fait compétent dans ce domaine.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, monsieur le président.
Tout d'abord, on ne fixe pas, selon lui, le chiffre du numerus clausus dans la loi.
M. Charles Descours, rapporteur. Je le sais bien !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Tel n'est pas son objectif, en effet. Par ailleurs, c'est évidemment évolutif, et c'est en discussion.
M. le rapporteur a cité la CNAM. Bien sûr, si l'on écoute la CNAM, moins il y a de médecins, moins il y a de dépenses, c'est vrai ! Simplement, il se trouve que, dans les hôpitaux, dont les uns et les autres, mesdames, messieurs les sénateurs - j'attire votre attention là-dessus - vous venez me parler un par un quand il s'agit de vos circonscriptions, il faut des médecins pour faire fonctionner les services !
Or les chiffres, monsieur le rapporteur, je les récuse. Ils ont été publiés très différemment dans deux séries, dont la dernière d'ailleurs dans un quotidien que vous connaissez, la semaine dernière. Ils sont extrêmement inquiétants dans les disciplines telles que l'anesthésie, la gynécologie-obstétrique, la cardiologie, etc.
M. Charles Descours, rapporteur. Nous sommes d'accord sur ce point.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Il faut que les hôpitaux soient opérationnels. Evidemment, il y a aussi une bonne façon d'harmoniser les hôpitaux français : qu'ils ne puissent plus fonctionner quand il n'y aura plus de médecins !
M. Dominique Leclerc. Il a raison !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 19, modifié.

(L'article 19 est adopté.)

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