Séance du 29 octobre 1998







M. le président. La parole est à M. Weber.
M. Henri Weber. Bien qu'étant élu de la Haute-Normandie, je n'évoquerai pas les ACH, ce problème ayant déjà été abordé par deux fois. Je dirai seulement que j'ai bien pris note des réponses et des engagements de M. Dominique Strauss-Kahn à ce sujet.
La question que je souhaite poser à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a trait à la politique énergétique du Gouvernement.
Le nouveau gouvernement allemand a décidé d'abandonner progressivement la production d'électricité d'origine nucléaire. Dans un pays où 65 % de l'électricité est produite à partir de centrales au charbon et au gaz, une telle décision peut se comprendre.
Notre pays a fait depuis longtemps un choix différent : 80 % de notre électricité provient des centrales nucléaires, avec un coût du kilowatt bas et prévisible, une indépendance énergétique assurée, une pollution finalement nettement plus faible que celle que provoquent les centrales thermiques traditionnelles.
Compte tenu de l'apparition de nouvelles techniques, le Gouvernement français a reconnu la nécessité de diversifier davantage le mode de production d'électricité en augmentant la part produite à partir des énergies fossiles et des nouvelles énergies. Il a néanmoins clairement réaffirmé sa détermination de maintenir, en la perfectionnant, la filière nucléaire.
M. Paul Masson. Malgré Mme Voynet ?
M. Henri Weber. Comment comptez-vous, dans ces conditions, monsieur le ministre, faire face à la décision allemande de sortir du nucléaire civil, alors que nos deux pays sont liés par plusieurs accords qui pourraient donc être remis en cause ? Que va-t-il advenir en particulier du réacteur du futur, le nouveau réacteur à eau sous pression, EPR, destiné à remplacer les modèles actuels et à répondre aux besoins des marchés des pays émergents ?
M. Dominique Braye. Vive de Gaulle !
M. Henri Weber. Conçu et mis au point en commun par Framatome et Siemens, en collaboration avec EDF et les électriciens allemands, ce réacteur s'inscrit dans le cadre d'un projet franco-allemand déjà très avancé. Qu'adviendra-t-il de l'EPR si le partenaire allemand se retire ? (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Paul Masson. Demandez à Mme Voynet !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, comme vous venez de le rappeler très justement, la politique énergétique de la France est largement fondée sur le nucléaire, et c'est une bonne chose.
Cela ne signifie nullement qu'il faille s'interdire d'examiner de près d'autres sources d'énergie qui se dégageront progressivement et qui pourront améliorer leur rentabilité.
M. Alain Gournac. Le vent, par exemple ? C'est une idée de Mme Voynet ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'est dans cet esprit d'ouverture qu'il faut agir et c'est en ce sens que des travaux sont engagés. Nous savons tous que dans vingt, trente ou quarante ans, nos sources d'énergie devront être plus diversifiées qu'elle ne le sont aujourd'hui. Vous faisiez vous-même allusion au caractère actuellement assez limité de cette diversification en évoquant le fait que 80 % de l'électricité produite sont d'origine nucléaire.
L'énergie exige évidemment une longue préparation. Il reste que, pour une durée peut-être plus importante encore que je ne l'ai dit, c'est effectivement sur l'énergie nucléaire que se fondera la plus grande part de notre production électrique.
Il importe donc de faire progresser la sûreté de nos centrales. A cet égard, l'EPR, le nouveau rédacteur - dit réacteur du futur - que vous évoquiez, monsieur le sénateur, constitue un élément essentiel puisque c'est la sécurité son atout majeur.
L'EPR a effectivement été développé par Framatome et Siemens. Entreprise privée, cette dernière agit comme elle l'entend.
Bien sûr, l'ambiance actuelle en Allemagne doit plutôt l'inciter à la prudence sur ce sujet. Néanmoins, les propos du Gouvernement allemand ne l'engagent pas. Je compte toutefois bien sortir des prochains entretiens qui auront lieu dans quelques semaines avec les industriels avec la confirmation de leur intention de continuer avec nous.
M. Alain Gournac. Vous êtes bien sûr de vous !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il faut qu'ils continuent avec nous car l'EPR, projet déjà très avancé, doit être mené à son terme.
D'autres sujets méritent également notre attention ; je pense notamment aux déchets à l'égard desquels le Gouvernement manifeste l'exigence d'une plus grande transparence.
Un de vos collègues députés, M. Le Déaut, est à l'origine d'un rapport sur cette question. Je défends moi-même la thèse qu'il nous faut une agence de transparence et de sûreté nucléaire totalement indépendante des différents ministères et sans doute placée sous l'égide du Premier ministre.
Ce débat aura lieu dans quelque temps. Au-delà de l'amélioration de la sûreté elle-même, attachons-nous à promouvoir l'information et la transparence.
S'il est clair que nous devons progresser à la fois pour diversifier nos sources d'énergie et pour améliorer la fiabilité de l'outil nucléaire, le choix énergétique de la France demeure dépourvu d'ambiguïté : c'est bien à partir du nucléaire que notre électricité sera pour longtemps produite. (Applaudissements.)

SÉCURITÉ DANS LES TRANSPORTS EN COMMUN