Séance du 14 mai 1998







M. le président. La parole est à M. About.
M. Nicolas About. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, bien qu'elle concerne également mon confrère secrétaire d'Etat à la santé.
Madame le ministre, l'indice de qualité de l'air calculé hier en Ile-de-France était de 8, c'est-à-dire mauvais. La concentration d'ozone et de dioxyde d'azote a atteint le niveau 1 sous l'effet cumulé de la chaleur et de l'ensoleillement, d'une part, et de la grève dans une partie des transports publics, d'autre part.
Aucun texte législatif d'ensemble ne réglemente le droit de grève dans les services publics, alors même que le préambule de la Constitution de 1946 y incitait le législateur. Ce texte dispose en effet que « le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent ».
En raison de cette « carence législative », il appartient à l'autorité administrative compétente d'édicter, sous le contrôle du juge, les restrictions à l'exercice de ce droit nécessaires à la préservation de la santé publique, de l'ordre public et à la continuité du service public.
La loi se révèlerait bien impuissante face aux aléas météorologiques ! Il serait donc utile de poser, au nom de la préservation de l'intérêt général, le principe d'un service minimal dans tout service public de transport, dès lors qu'un certain niveau de pollution atmosphérique est atteint.
Au mois de février dernier, vous avez présenté, madame le ministre, une série de mesures destinées à lutter contre cette pollution, notamment en réduisant le trafic automobile en zone urbaine ; mais aucune mesure ne visait à garantir le transport collectif.
Dans ces conditions, que deviennent les usagers les jours de pollution et de grève des transports publics ?
Etes-vous dès lors favorable au fait d'inscrire ce principe de service minimal dans la loi ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, vous l'avez souligné, l'un des acquis principaux de la loi sur l'air est le développement d'une stratégie complète et cohérente d'information du public afin qu'aussi souvent que possible soient mises en place des stratégies de prévention de la dégradation de la qualité de l'air. La prévention doit en effet être privilégiée par rapport à la réparation, qui demande beaucoup plus d'efforts aux usagers en cas de « pics de pollution » - expression que je mets entre guillemets car il s'agit, en fait, non pas de pics mais de dépassements des normes conventionnelles.
Vous aurez noté aussi qu'il n'y a rien de commun entre l'échelle de qualité de l'air commodément et pédagogiquement adoptée par Airparif et les niveaux de qualité qui ont été retenus par la loi - niveaux 1, 2 ou 3 - et qui sont parfois également appelés seuils d'alerte.
M. Philippe François. C'est une bonne loi !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Au cours des jours précédents, un niveau médiocre de qualité de l'air a été constaté qui ne justifiait pas vraiment que l'on prenne des mesures d'urgence mais qui pouvait inciter les usagers à recourir aussi souvent que possible à d'autres moyens de locomotion qu'à leur voiture.
M. Nicolas About. Il n'y en avait pas !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je vous rappelle que la moitié des déplacements en zone urbaine représentent moins de trois kilomètres et qu'il existe de nombreuses alternatives et à la voiture et aux transports collectifs.
M. Nicolas About. Ce n'est pas ce que je constate sur l'autoroute chaque matin !
M. Alain Gournac. La moto ?
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Si la situation avait été très dégradée, si nous avions eu des raisons de penser que nous allions atteindre le seuil d'alerte qui génère le passage à la circulation alternée et à l'usage de la pastille verte, nous aurions évidemment engagé le dialogue avec les organisations syndicales. Mais nous n'avions aucune raison de le craindre.
Engagés dans une stratégie de long terme de reconquête de la qualité de l'air, nous travaillons beaucoup à la revalorisation des transports collectifs.
Quoi qu'il en soit, rien, dans le contexte de ces derniers jours, ne permettait de remettre en cause une liberté fondamentale des salariés, le droit de grève (Très bien ! sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen), auquel ils sont attachés et qu'ils choisissent d'utiliser en fonction de leur liberté et de leur sens des responsabilités. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Protestations sur les travers du RPR.)
M. Jean Chérioux. C'est de la dérobade !
M. Philippe François. C'est le ministre de la grève !

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