M. le président. « Art. 5. _ I. _ Les personnes physiques ou morales exerçant occasionnellement l'activité d'entrepreneur de spectacle vivant peuvent procéder auprès d'un organisme habilité par arrêté des ministres chargés de l'emploi, de la sécurité sociale et de la culture, d'une part, aux déclarations obligatoires liées à l'embauche et à l'emploi sous contrat à durée déterminée d'artistes du spectacle mentionnés à l'article L. 762-1 du code du travail ainsi que des techniciens qui concourent au spectacle et, d'autre part, au versement de l'ensemble des cotisations et contributions sociales, d'origine légale ou d'origine conventionnelle imposées par la loi, s'y rapportant.
« II. _ L'organisme habilité recouvre ces cotisations et contributions pour le compte des administrations et organismes parties à la convention prévue à l'alinéa suivant. Toutefois, en ce qui concerne le recouvrement contentieux de ces cotisations et contributions, les règles propres à chaque administration ou organisme demeurent applicables.
« Une convention homologuée par les ministres chargés du travail et de la sécurité sociale définit les relations de cet organisme avec les administrations et organismes destinataires des déclarations au nom desquels les cotisations et contributions sont recouvrées.
« Sans préjudice des missions et des pouvoirs des agents des organismes signataires de la convention et des agents mentionnés à l'article L. 324-12 du code du travail, cette convention peut prévoir que les organismes mentionnés à l'article L. 243-7 du code de la sécurité sociale sont habilités à contrôler l'application par les employeurs des dispositions du présent article.
« III. _ Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'Etat.
« IV. _ Les dispositions des I et II du présent article relatives au regroupement des déclarations sociales ainsi que, le cas échéant, celles relatives au regroupement du paiement des cotisations et contributions sociales peuvent être rendues applicables, par décret en Conseil d'Etat, à d'autres catégories d'employeurs recrutant des salariés pour effectuer des tâches occasionnelles, dans les secteurs du bâtiment et des travaux publics, des hôtels, cafés et restaurants et du tourisme.
« Dans ce cas, l'arrêté visé au I est pris par les ministres chargés de l'emploi et de la sécurité sociale et par les ministres compétents. »
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 134, M. Ostermann et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent de rédiger comme suit cet article :
« Après l'article L. 143-3 du code du travail, il est inséré un article L. 143-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 143-3-1. - I. - Dans les branches où est passée à cet effet une convention entre les organismes gérants des régimes de protection sociale relevant du code de la sécurité sociale et du code rural ou visés aux articles L. 223-16 et L. 351-21 du code du travail, un arrêté conjoint du ministre chargé du travail, du ministre chargé de la sécurité sociale, et, le cas échéant, du ministre chargé de l'agriculture ou du ministre chargé des transports, autorise le recours à un instrument spécifique, dénommé "titre emploi occasionnel", pour l'accomplissement de l'ensemble des formalités d'embauche, de paie et de rupture du contrat de travail prévu par le présent code.
« II. - Nonobstant toutes dispositions législatives, réglementaires ou conventionnelles contraires, l'employeur se libère des obligations déclaratives résultant du contrat de travail établi au moyen d'un titre emploi occasionnel ainsi autorisé, par l'envoi dans les délais impartis des formulaires d'embauche et de fin de contrat de travail à l'organisme de protection sociale désigné par la convention susmentionnée, qui calcule et recouvre pour compte commun la totalité des cotisations et contributions sociales dues à raison dudit contrat de travail.
« III. - Un décret en Conseil d'Etat définit les conditions d'application du présent article, notamment la nature et la durée maximale des emplois concernés, ainsi que la liste des formalités que le titre emploi occasionnel doit permettre d'accomplir pour pouvoir prétendre à l'autorisation prévue au premier alinéa du présent article. »
Par amendement n° 188, Mme Derycke et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter le premier alinéa du II de l'article 5 par les mots suivants : « sauf lorsque les cotisations et contributions en cause peuvent être recouvrées par voie de contrainte, auquel cas les dispositions de l'article L. 351-6 du code du travail s'appliquent. En outre, les administrations et organismes ne bénéficiant pas de cette procédure peuvent confier, par convention, le recouvrement contentieux de leurs propres cotisations et contributions à l'organisme habilité ».
Par amendement n° 96, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer le paragraphe IV de l'article 5.
Par amendement n° 135, M. Ostermann et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent de rédiger comme suit le premier alinéa du paragraphe IV de l'article 5 :
« Les dispositions des I et II du présent article relatives au regroupement des déclarations sociales ainsi que celles relatives au regroupement du paiement des cotisations et contributions sociales sont rendues applicables, par décret en Conseil d'Etat, à d'autres catégories d'employeurs recrutant des salariés pour effectuer des tâches occasionnelles dans les secteurs du bâtiment et des travaux publics, des hôtels, cafés et restaurants et du tourisme. »
Par amendement n° 38, M. Jourdain, au nom de la commission des affaires sociales, propose, au premier alinéa du paragraphe IV de l'article 5, après les mots : « peuvent être rendues applicables, », d'insérer les mots : « après la consultation préalable dans chaque secteur d'activité concerné des organisations d'employeurs visées à l'article L. 132-2 du code du travail, ».
La parole est à M. Ostermann, pour défendre l'amendement n° 134.
M. Joseph Ostermann. Avec votre permission, monsieur le président, je défendrai en même temps l'amendement n° 135, afin de répondre au souhait de concision exprimé tout à l'heure par M. le président de la commission des finances.
L'article 5 du projet de loi relève d'une démarche intéressante : simplifier les formalités administratives relatives à la gestion des emplois occasionnels. Malheureusement, tel qu'il est rédigé, il ne va pas assez loin. Il limite en effet son champ d'application au secteur du spectacle et ne fait qu'évoquer brièvement, et sans engagement de la part du Gouvernement, l'éventualité d'une extension du système aux secteurs du BTP et de l'hôtellerie-restauration.
Or, ce sont précisément ces deux secteurs qui sont les plus touchés par le fléau du travail illégal et qui doivent, par conséquent, être prioritaires.
En effet, sur l'ensemble des infractions de travail illégal relevées en 1994, le BTP représente 27 %, l'hôtellerie-cafés-restauration 15 % et le commerce 18 %.
Le secteur du spectacle est donc bien marginal dans ce domaine.
En outre, les dernières statistiques disponibles sur le travail illégal prouvent, si cela était nécessaire, qu'il est urgent de renforcer notre arsenal législatif.
En effet, en 1997, le nombre d'infractions relevées en matière de travail clandestin a progressé de 30 %, et 60 % des infractions constatées l'ont été pour dissimulation de travailleurs.
Je crois savoir, par ailleurs, que la Commission européenne, lors du sommet de Cardiff, a invité les Quinze à faire de la lutte contre le travail illégal « l'une des priorités de la politique européenne de l'emploi ».
C'est pourquoi j'ai déposé deux amendements visant à étendre le champ d'application du dispositif prévu à l'article 5.
Le premier, n° 134, vise à transposer à d'autres secteurs le titre « emploi saisonnier agricole ».
Cet outil permet non seulement de simplifier l'établissement du bulletin de paie et des déclarations de sécurité sociale, mais aussi de remplir les formalités requises par le code du travail.
Six mois après sa mise en oeuvre, le titre « emploi saisonnier agricole » présente un bilan très positif puisque, selon les témoignages recueillis par la Mutualité sociale agricole, il est reconnu comme une incitation à l'embauche et au respect des obligations liées aux emplois saisonniers. Il peut ainsi être considéré comme un outil efficace de lutte contre le travail clandestin. Face à un tel succès, il apparaît judicieux d'étendre ce titre à d'autres secteurs, notamment le BTP et l'hôtellerie - restauration, en créant un titre « emploi occasionnel ».
Le second amendement, quant à lui, vise à obtenir l'assurance que le Gouvernement procédera au regroupement des déclarations sociales et du paiement des cotisations et contributions sociales pour ces deux secteurs, le BTP et l'hôtellerie-restauration, dans les plus brefs délais.
Il est en effet important que, dans ces secteurs, la simplification administrative ne reste pas du domaine de l'éventualité, car l'enjeu, en matière de lutte contre le travail illégal, est de tout premier ordre.
M. le président. La parole est à M. Régnault, pour défendre l'amendement n° 188.
M. René Régnault. L'article, tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale, laisse subsister des procédures de recouvrement contentieux distinctes pour chacun des six organismes de recouvrement.
L'objet du présent amendement est de regrouper ces procédures par nature et de réduire ainsi, en simplifiant leur gestion, les frais à la charge des employeurs.
Il permet à l'organisme habilité d'utiliser, pour les cotisations de sécurité sociale et les contributions d'assurance chômage, une procédure unique de mise en recouvrement à l'aide de la contrainte. En effet, les URSSAF, par l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale, et les ASSEDIC, par l'article L. 351-6 du code du travail, sont les seules caisses concernées par la procédure visée au paragraphe I à être autorisées à recouvrer leurs créances par voie de contrainte.
Par ailleurs, il autorise les autres organismes à confier la gestion du recouvrement forcé de leurs cotisations et contributions à l'organisme habilité selon les modalités relatives aux procédures civiles.
Il s'agit, vous l'avez compris, de mesures d'équité et de simplification.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 96.
M. Guy Fischer. Aujourd'hui, tout le monde s'accorde sur les simplifications administratives souhaitables pour les petites et moyennes entreprises et les très petites entreprises.
Le groupe communiste républicain et citoyen et moi-même sommes nous aussi favorables aux dispositions des trois premiers paragraphes de l'article 5, étant observé qu'elles ont pour objet de réduire les contraintes administratives liées à la gestion des emplois occasionnels.
Plus précisément, il nous est proposé d'utiliser, pour les organisateurs occasionnels de spectacles vivants, un instrument qui s'inspire du TESA, le titre emploi saisonnier agricole, et qui permettra, d'une part, de centraliser en un seul lieu toutes les obligations déclaratives consécutives à l'embauche ou préalables à celle-ci, toutes les cotisations et contributions sociales et, d'autre part, de simplifier le bulletin de paie.
Le principe même du dispositif institué par cet articlea été posé après négociation avec les employeurs et les salariés du secteur spécifique du spectacle, de ce secteur « riche » en intermittents du spectacle qui goûtent amèrement les effets pervers de la précarisation dans leur profession.
Au nom de la dynamique de l'emploi, de la lutte contre le travail au noir, la tentation est forte de faire de cette expérimentation du guichet unique pour le secteur spectacle, la règle applicable dans d'autres professions, notamment dans le bâtiment, les travaux publics, l'hôtellerie-restauration et le tourisme.
Nous sommes opposés à l'extension par décret d'une telle disposition, comme le prévoit le paragraphe IV de l'article 5. Nous vous demandons donc d'approuver notre amendement tendant à supprimer le paragraphe incriminé, et ce pour trois raisons principales.
Tout d'abord, le principe de concertation et de négociation qui a prévalu dans le domaine du spectacle doit être la règle pour tous les secteurs d'activités potentiels concernés.
Ensuite, nous ne sommes pas convaincus de la pertinence de l'argument faisant de la souplesse de gestion des emplois occasionnels un outil efficace de lutte contre le travail illégal.
Enfin, nous sommes conscients que, sous couvert de simplifications administratives, on entend déstructurer, déréglementer des secteurs déjà touchés par la précarité.
Nous vous demandons donc, mes chers collègues, d'adopter notre amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 38.
M. André Jourdain, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Le paragraphe IV de l'article 5 prévoit la possibilité d'une extension par décret en Conseil d'Etat du dispositif du guichet unique pour le recouvrement des cotisations et contributions sociales prévues au paragraphe I pour les organisateurs occasionnels de spectacles vivants aux secteurs du bâtiment et des travaux publics, des hôtels, cafés et restaurants et du tourisme.
Le Gouvernement entend délibérément donner un caractère expérimental à l'établissement du guichet unique pour les organisateurs occasionnels de spectacles vivants avant d'étendre éventuellement ce procédé.
La commission des affaires sociales, comme les professionnels des secteurs concernés, n'est pas hostile à une telle extension. Elle souhaiterait toutefois qu'elle soit, le cas échéant, précédée d'une large concertation avec les organisations d'employeurs des secteurs concernés.
La commission des affaires sociales vous propose par conséquent d'adopter un amendement qui prévoit une telle concertation préalable avant l'extension du guichet unique aux trois secteurs mentionnés : bâtiment et travaux publics, hôtels, cafés-restaurants et tourisme.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 134, 188, 96, 35 et 38 ?
M. Alain Lambert, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 134 de M. Ostermann, la commission des finances - il le sait puisqu'elle a la chance de le compter dans ses rangs - a estimé qu'il était sans doute préférable de laisser s'appliquer le dispositif proposé au secteur du spectacle vivant avant de l'étendre à d'autres secteurs.
C'est pourquoi elle lui demandera, après que le Gouvernement lui aura donné toutes explications et tous encouragements sur sa volonté de poursuivre son action dans ce sens, de bien vouloir retirer son amendement. A défaut, l'avis de la commission serait défavorable.
Sur l'amendement n° 188, soutenu tout à l'heure par M. Régnault, et qui vise à simplifier des procédures de recouvrement, la commission des finances, qui n'a pas une capacité d'expertise aussi spontanée que M. Régnault, a souhaité obtenir l'avis du Gouvernement. Il lui a cependant semblé que, peut-être, le Gouvernement serait favorable à cet amendement et, dans cette hypothèse, elle a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat.
Pour ce qui est de l'amendement n° 96, la commission des finances a cru percevoir une différence entre le point de vue de Mme Beaudeau et celui du Gouvernement.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cela peut arriver !
M. Alain Lambert, rapporteur. La solution du Gouvernement lui étant apparue préférable, elle a émis un avis défavorable sur cet amendement.
S'agissant de l'amendement n° 135 de M. Ostermann, il nous semble que la proposition formulée par la commission des affaires sociales est préférable. Je demande donc à M. Ostermann de bien vouloir retirer son amendement.
En revanche, la commission des finances est favorable à l'amendement n° 38 de M. Jourdain, présenté au nom de la commission des affaires sociales, qui lui est apparu tout à fait utile.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je vais essayer de rivaliser de clarté, ce qui sera très difficile, avec M. le rapporteur général.
S'agissant de l'amendement n° 134 de M. Ostermann, je tiens à indiquer qu'en la matière il est prévu un dispositif en deux temps.
Tout d'abord, une négociation a été organisée avec les professions du spectacle. Cette négociation a abouti et elle fait l'objet de l'article 5.
Pour les autres secteurs, ensuite, qu'il s'agisse du bâtiment et travaux publics, d'une part, de l'hôtellerie, de la restauration et du tourisme, d'autre part, la négociation doit intervenir de façon à dégager les formes les plus adaptées pour ces professions.
Je demande donc, comme M. le rapporteur, le retrait de l'amendement n° 134, dont le dépôt me semble prématuré.
L'amendement n° 188 présenté par M. Régnault va dans le sens de la clarté et de la simplification. Le Gouvernement ne peut donc qu'y être favorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 96 défendu par M. Fischer, il est très important de souligner que le Gouvernement est animé comme vous l'avez souhaité, par une volonté, d'organiser la concertation, la négociation avec les professionnels, les organisations de salariés et les organismes sociaux, de façon à mettre en place des dispositions qui soient à la fois simples et sûres.
Le Gouvernement cherche à aller dans le sens de la protection des droits des salariés occasionnels. Vous savez d'ailleurs peut-être que M. Anicet Le Pors a été chargé de mettre au point les dispositifs adéquats dans le secteur du tourisme.
Cet amendement me paraît donc prématuré. Je n'ai rien contre, mais il anticipe sur une négociation qui va avoir lieu et qui doit se dérouler. Je vous demande donc de le retirer.
Monsieur Ostermann, par souci de cohérence, je vous demande de retirer également l'amendement n° 135. Il anticipe en effet sur des concertations qui sont indispensables.
J'en viens à l'amendement n° 38.
Il est clair que le Gouvernement entend négocier au préalable avec les intéressés et non procéder autoritairement par décrets. De ce fait, l'amendement n'est pas nécessaire. Mais, si vous jugez utile de le maintenir, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Monsieur Osterman, l'amendement n° 134 est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. Je pourrais éventuellement faire un effort sur l'amendement n° 135, mais ce n'est pas le cas pour l'amendement n° 134.
Comme je l'ai déjà dit, le secteur du spectacle est marginal et il ne permet pas de tester correctement un tel dispositif de simplification. Je souhaite donc maintenir cet amendement n° 134. Il n'empêche que la négociation pourra intervenir tant avec les professionnels du bâtiment et des travaux publics qu'avec ceux de l'hôtellerie et de la restauration.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 134, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 5 est ainsi rédigé et les amendements n°s 188, 96, 135 et 38 n'ont plus d'objet.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Jacques Valade.)