M. le président. La parole et à M. Foy, auteur de la question n° 194, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Alfred Foy. Monsieur le ministre, j'appelle votre attention sur la situation des effectifs de police dans le département du Nord. Celui-ci a un ratio police-population moins élevé que la moyenne nationale. En effet, on compte un fonctionnaire de police pour 477 habitants du Nord résidant en zone étatisée, contre un pour 435 habitants sur le plan national.
Cette réalité est pour le moins paradoxale dans la mesure où le Nord est le premier département de France pour le nombre de délits et de crimes. Il concentre, à lui seul, 10 % des délits nationaux, dus en grande partie à la drogue. D'ailleurs, l'année 1997 aura été marquée par une augmentation de la délinquance générale de 1,6 % par rapport à 1996.
Certes, des efforts ont été accomplis entre janvier 1993 et janvier 1998. Ainsi, les effectifs ont augmenté durant cette période de 194 fonctionnaires et de 117 policiers auxiliaires, auxquels s'ajoutent des adjoints de sécurité recrutés depuis novembre 1997. Il est prévu l'affectation de 546 adjoints de sécurité pour 1998, un grand nombre d'entre eux étant plus spécifiquement chargé de la surveillance des transports en commun de l'agglomération lilloise.
Il n'en demeure pas moins que ces efforts restent insuffisants pour deux raisons. D'abord, la mission des adjoints de sécurité ne peut se comparer à celle des fonctionnaires de police, qui disposent d'une formation et de pouvoirs différents. Ensuite, l'augmentation des effectifs profite essentiellement aux circonscriptions de Lille-Roubaix-Tourcoing-Armentières, qui doivent faire face, il est vrai, à une forte délinquance. Cette hausse des effectifs en fonctionnaires de police doit être poursuivie, en faveur non seulement du district de Lille, mais aussi des autres districts du département, car on constate un glissement de la délinquance de l'agglomération lilloise vers les autres secteurs, notamment celui de Flandre-Lys. Certaines circonscriptions sont largement en état de sous-effectif. A titre d'exemple, la circonscription d'Hazebrouck dispose d'un policier pour 571 habitants, ce qui la situe nettement en dessous de la moyenne départementale. Il est donc important de pallier l'insuffisance du nombre de policiers.
Par ailleurs, la carte des circonscriptions policières ne correspond plus à celle des délits. Comme l'a signalé M. André Ventre, secrétaire général des commissaires et hauts fonctionnaires, il y a autant de policiers dans le Jura que dans les Alpes-Maritimes et pourtant, dans ce dernier département, le taux de criminalité est trois fois plus élevé que dans le Jura.
La solution consisterait, d'une part, à effectuer un redéploiement très important des forces de police en fonction d'une géographie prioritaire - solution d'ailleurs préconisée par le député-maire d'Epinay-sur-Seine, dans son rapport du mois de septembre 1997 - dans lequel le Nord doit figurer en première place. Elle consisterait, d'autre part, à affecter massivement dans ce département de jeunes gardiens de la paix sortis des écoles de police nationale.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, j'ai écouté votre question avec attention. Je veille à faire en sorte que les effectifs des services de police soient en effet répartis au mieux des besoins. Cela n'est pas facile. En effet, les policiers sont des fonctionnaires qui ont un conjoint et des attaches locales. Naturellement, toute une politique doit être mise en oeuvre pour mettre à profit, notamment, les départs en retraite. Ceux-ci s'élèveront à 25 000 au cours des six prochaines années. J'ai obtenu des recrutements par anticipation. Tout cela permettra des redéploiements, qui sont nécessaires.
Dans le même temps, il sera utile de revoir la répartition des zones entre la police nationale et la gendarmerie. C'est l'objet, vous le savez, d'une mission parlementaire qui a été confiée conjointement à un sénateur, M. Hyest, et à un député, M. Carraz. Tout cela est en cours, mais nécessite bien sûr un peu de temps.
Vous m'avez d'abord interrogé sur le département du Nord, qui est sans doute votre principale préoccupation. Si j'ai bien compris votre exposé, vous êtes plus particulièrement préoccupé par la circonscription d'Hazebrouck. Je vais donc essayer de vous répondre sur ces deux points particuliers.
Le 1er janvier 1998, les effectifs de police de sécurité publique affectés dans le département du Nord étaient de 4 081 fonctionnaires. Ce chiffre est supérieur de 4,78 % à celui du 1er janvier 1993, soit 3 895 fonctionnaires. Pour la même période de référence, le potentiel en gradés et en gardiens de la paix a été augmenté de 115 fonctionnaires et le nombre de policiers auxiliaires est passé de 161 à 278.
Comme vous l'avez vous-même relevé, le département du Nord bénéficiera en 1998 de l'affectation de 531 adjoints de sécurité, ce qui représente, vous me l'accorderez, monsieur le sénateur, une augmentation sensible de potentiel par rapport au nombre des fonctionnaires actifs que je viens d'évoquer, à savoir 4 081.
Ce n'est pas pour rien que le Nord figure au nombre des vingt-six départements prioritaires, qui vont recevoir 80 % de la ressource nouvelle sous forme d'adjoints de sécurité.
L'apport de cette nouvelle catégorie de personnels, s'il ne remplace pas les actifs, permet un redéploiement des fonctionnaires du corps de maîtrise et d'application sur la voie publique, et le renforcement de la police de proximité, dont le développement est la priorité du Gouvernement.
Les adjoints de sécurité participent également aux divers dispositifs mis en place dans les transports en commun et dans les gares, vous l'avez évoqué, dans cette grande agglomération de Lille-Roubaix-Tourcoing qui représente la moitié de la population du département du Nord.
Ils doivent aussi intervenir en complément de l'activité déployée par les agents locaux de médiation sociale, qui doivent être recrutés dans le cadre des contrats locaux de sécurité par les sociétés de transport en commun, par les bailleurs sociaux et par les municipalités. J'attends naturellement des collectivités locales qu'elles prennent aussi leurs responsabilités puisque le Gouvernement a annoncé que, sur 35 000 emplois-jeunes qu'il allait créer au titre de la sécurité, 20 000 le seraient sous forme d'agents de sécurité et 15 000 sous forme d'agents locaux de médiation sociale.
Dans le cadre des mesures de renforcement de la capacité opérationnelle du Nord et du redéploiement en faveur des zones sensibles, objectif affirmé du Gouvernement, des mesures immédiates vont intervenir ou sont intervenues voilà peu. Ainsi, trois gardiens de la paix stagiaires, issus de la 146e promotion, ont été affectés à compter du 5 janvier 1998 à Lille, deux à Tourcoing, trois à Valenciennes ; trente et un gardiens de la paix ont été affectés sur le plan départemental dans le cadre du mouvement ponctuel de mutation de gardiens de la paix avec prise de poste le 2 février 1998. Je ne citerai pas toutes les affectations qui sont prises mois après mois et qui visent à renforcer les effectifs dans le département du Nord.
Pour ce qui concerne la circonscription de sécurité publique de Hazebrouck, elle a enregistré un gain de trois fonctionnaires entre le 1er janvier 1993 et le 1er janvier 1998, les effectifs étant passés de trente-six à trente-neuf. Cette circonscription va, elle aussi, obtenir des postes d'adjoints de sécurité.
Par ailleurs, des unités départementales et des brigades spécialisées ont été développées, qui interviennent sur l'ensemble des communes du département, y compris la vôtre. De plus, les effectifs en fonction dans chaque circonscription bénéficient du soutien de forces mobiles. A ce titre, en 1997, les compagnies républicaines de sécurité ont accompli 295 jours de mission de sécurisation, et, depuis le 1er janvier 1998, une compagnie républicaine de sécurité, soit 80 fonctionnaires, est en permanence en mission de sécurisation dans le département du Nord.
Bien évidemment, je m'en suis tenu jusqu'à présent aux moyens, mais tout n'est pas seulement une question de moyens, monsieur le sénateur. Il faut aussi agir au niveau des contrats locaux de sécurité. Je pense, par exemple, à celui que je suis allé signer à Tourcoing. D'autres sont en cours d'élaboration à Roubaix, à Lille, à Armentières et, je l'espère, à Hazebrouck. Si je puis vous donner un conseil, je vous suggère de faire un bon diagnostic des problèmes de l'insécurité dans la circonscription d'Hazebrouck afin de définir clairement les priorités. Ainsi pourront être mis en oeuvre les moyens adaptés tels que le partenariat, l'explication, l'action coordonnée entre la police, le cas échéant la gendarmerie, et la justice.
Bref, compte tenu de la situation qui prévaut dans le Nord, mon attention est en permanence requise. Ce département, par sa taille et sa population - il compte 2 500 000 habitants - mérite une attention toute particulière. Elle n'a pas fait défaut, croyez-le, dans les choix qui sont intervenus jusqu'à présent et qui interviendront encore. Je pense, en effet, que nous allons créer l'année prochaine plus de 10 000 emplois d'adjoints de sécurité. Cela se traduira aussi dans le Nord et dans la circonscription de police qui vous intéresse tout particulièrement, et c'est fort légitime.
M. Alfred Foy. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Foy.
M. Alfred Foy. Je voudrais tout simplement vous remercier, monsieur le ministre, de vos propos. J'ai bien noté que le département du Nord, plus particulièrement la circonscription d'Hazebrouck, était l'objet d'une certaine sollicitude de votre part.

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