M. le président. Par amendement n° 1, M. Jolibois, au nom de la commission, propose, dans la première phrase du deuxième alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 131-36-1 du code pénal, de remplacer les mots : « de surveillance et d'assistance » par les mots : « de contrôle et d'aide ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois, rapporteur. L'Assemblée nationale a souhaité utiliser les mots « surveillance » et « assistance », alors que nous avions, pour notre part, préféré les mots « contrôle » et « aide », car ce sont ceux du code pénal.
La cohérence des termes employés pour désigner la même chose étant préférable, nous vous demandons de nouveau à chaque fois, de remplacer les mots « surveillance » et « assistance » par les mots « contrôle » et « aide ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Il s'agit d'une question de rédaction pour laquelle je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 2, M. Jolibois, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit la seconde phrase du deuxième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 131-36-1 du code pénal :
« La durée du suivi socio-judiciaire ne peut excéder dix ans en cas de condamnation pour délit ou vingt ans en cas de condamnation pour crime. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois, rapporteur. L'amendement n° 2 est un amendement de fond.
Le Sénat a opté pour que le tribunal ou la cour ait la possibilité d'édicter une durée de suivi socio-judiciaire de dix ans en cas de condamnation pour délit et de vingt ans en cas de condamnation pour crime.
L'Assemblée nationale, elle, est revenue à son texte de première lecture, soit cinq ans pour les délits et dix ans pour les crimes.
Pourquoi la commission des lois a-t-elle voulu augmenter ces peines ?
D'abord parce que, hélas ! l'actualité nous donne souvent des exemples de gens qui réitèrent systématiquement leurs actes répréhensibles. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'est créé le suivi socio-judiciaire.
Ensuite, pour avoir entendu beaucoup de médecins et de psychiatres, nous savons que, malheureusement, les traitements ne sont pas curatifs et que, après leur arrêt, le risque de récidive existe. Cela a été maintes fois souligné, y compris lors d'une audition publique qui a été tenue par la commission des lois.
Par conséquent, nous pensons qu'il est plus prudent et plus sage de prévoir un suivi de dix ans ou de vingt ans, d'autant qu'il sera toujours possible d'en raccourcir la durée ; ainsi, au cours du suivi socio-judiciaire, si la juridiction s'aperçoit qu'il y a véritablement lieu de raccourcir la peine, elle pourra le faire. Mais, à l'inverse, il ne sera pas possible de l'allonger.
En revanche, il vaut mieux faire en sorte que quelqu'un ne puisse pas commettre de nouveau un acte tragique, d'autant qu'un délit ou un crime aussi terrible aurait peut-être pu être évité si la durée de la peine avait été plus longue.
Enfin, à partir du moment où la durée du suivi socio-judiciaire sera plus importante, vous obtiendrez une appréciation plus juste de la peine par les tribunaux, parce que l'optique sera différente. En effet, si une juridiction sait qu'elle peut mettre quelqu'un sous l'ombrelle pénale du suivi socio-judiciaire pendant dix ans, elle ne choisira pas une peine plus longue que ne le méritent les faits.
On évitera peut-être ainsi que des peines de prison de longueur injustifiée soient instituées uniquement en vue d'une protection, alors que la véritable protection est constituée par la peine plus le suivi socio-judiciaire.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des lois a pensé qu'elle devait vous demander d'en revenir à ce que vous aviez accepté lors de la première lecture.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Monsieur le rapporteur, j'ai eu l'occasion de dire, lors de la première lecture, que je n'étais pas hostile au principe même d'une augmentation de la durée du suivi socio-judiciaire. Je pense toutefois que des durées de dix et vingt ans poseraient un problème de proportionnalité des peines, et je vais vous donner un exemple.
En matière délictuelle, il faut avoir à l'esprit que certaines infractions sexuelles, même si elles reflètent un comportement inquiétant, sont pénalement d'une gravité relative dans la hiérarchie des peines ; je pense à l'exhibition sexuelle, qui n'est passible que d'un an d'emprisonnement et qui n'est que très rarement sanctionnée d'une peine ferme. Il semble exorbitant, dans ce cas, que cette peine puisse être accompagnée d'un suivi de dix ans, lui-même susceptible d'entraîner une réincarcération de deux ans, voire de cinq ans, comme le suggère la commission des lois.
Telle est la nature de mon interrogation.
C'est la raison pour laquelle je reste, comme en première lecture, défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
Mme Joëlle Dusseau. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau. Je suis hostile à cet amendement pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, il vise à porter la durée du suivi socio-judiciaire à dix ans en cas de délit et à vingt ans en cas de crime. Il faut bien avoir à l'esprit qu'en cas de crime on condamne pratiquement l'auteur à un suivi socio-judiciaire à vie !
S'agissant des délits, je reprendrai, après Mme la ministre, l'exemple des exhibitionnistes. La commission propose qu'il y ait un suivi de dix ans...
M. Charles Jolibois, rapporteur. Non ! Qu'il puisse y avoir...
Mme Joëlle Dusseau. Soit.
M. Charles Jolibois, rapporteur. C'est différent.
Mme Joëlle Dusseau. ... donc, qu'il y ait un suivi de dix ans !
Mais il existe d'autres types de délits : les attouchements, la corruption de mineurs ou la diffusion d'affiches à caractère pédophile.
Il faut, et je reprends le mot de Mme la ministre, distinguer la représentation mentale de cette catégorie de délits et de crimes de la réalité de certains faits qui n'ont pas forcément la gravité que l'on croit.
Ma deuxième remarque porte sur le traitement médical, possibilité que nous avons instituée. L'amendement consiste à le prolonger.
Sur le plan du principe, c'est excellent. Sur le plan de l'efficacité, c'est autre chose !
Je n'ai pas lu tous les comptes rendus des auditions de psychiatres auxquelles vous avez procédé, mais j'ai lu un certain nombre de documents concernant notamment des expériences au Canada. Il ressort bien qu'un certain nombre d'interrogations se posent - c'est le moins que l'on puisse dire - sur l'efficacité d'un tel traitement ! C'est la deuxième raison pour laquelle, a priori , la prolongation me paraît une erreur.
La troisième raison est d'ordre quantitatif. Contrairement à notre collègue Robert Pagès, je suis sûre que le nombre d'affaires va croître et se développer.
En effet, nous commençons à libérer la parole. Des centaines et des milliers de plaintes vont donc être déposées, car ce qui paraissait bénin à un certain nombre d'adultes va devenir insupportable pour les enfants, et ceux-ci vont dénoncer les faits.
Quand vous aurez à faire face à un nombre considérable de plaintes, et donc de condamnations, il vous faudra, pour assurer le suivi, un grand nombre de « suiveurs ». Or, je ne suis par sûre que vous pourrez assumer financièrement une telle situation.
M. Daniel Eckenspieller. Il faut savoir ce que l'on veut !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repoussé par le Gouvernement.
M. Guy Allouche. Le groupe socialiste vote contre.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 3, M. Jolibois, au nom de la commission, propose, à la fin de la deuxième phrase du troisième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 131-36-1 du code pénal, de remplacer les mots : « deux ans en cas de condamnation pour délit et cinq ans en cas de condamnation pour crime » par les mots : « cinq ans ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Il s'agit, pour assurer l'application effective du suivi socio-judiciaire, d'accroître la durée de la peine lorsque la personne qui a reçu l'injonction de se soumettre à un suivi socio-judiciaire ne s'y plie pas.
Nous proposons que, dans une telle hypothèse, une durée de cinq ans d'emprisonnement au maximum puisse être infligée, que la personne soit condamnée pour un crime ou pour un délit.
J'insiste sur le fait qu'il s'agit d'un maximum : la peine de cinq ans n'est donc pas obligatoirement prononcée.
Cependant, si l'on ne prévoit pas cinq ans, c'est-à-dire une durée relativement longue, on risque de voir des gens opter systématiquement pour la prison, afin de se libérer du suivi socio-judiciaire, qui est plus long.
Dans la mesure où nous venons d'allonger la durée du suivi socio-judiciaire, il convient, pour assurer la cohérence du dispositif, de porter le maximum de la durée d'emprisonnement de deux ans à cinq ans, dans tous les cas, pour la personne qui ne se plie pas au suivi socio-judiciaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. L'avis du Gouvernement est défavorable, pour les raisons que j'ai exposées précédemment.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 131-36-1 du code pénal.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE 131-36-1-1 DU CODE PÉNAL