M. le président. La parole est à M. Balarello, auteur de la question n° 150, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
La parole est à M. Balarello.
M. José Balarello. Madame le ministre, lorsque, le 30 décembre 1997, j'ai interrogé M. le ministre de l'intérieur sur le problème des réfugiés kurdes à la frontière franco-italienne de Vintimille, notre presse nationale ne s'en était point encore fait l'écho.
Depuis, de nombreux articles ont été publiés, tant dans la presse française que dans la presse internationale, et la presse locale des Alpes-Maritimes a fait état des instructions données par le ministère de l'intérieur afin qu'une compagnie de la CRS 6, forte d'une centaine de fonctionnaires, vienne à Menton afin de renforcer les effectifs de la direction centrale du contrôle de l'immigration et de la lutte contre l'emploi des clandestins, la DICCILEC.
J'avais également demandé à M. le ministre de l'intérieur s'il ne lui semblait pas urgent de saisir INTERPOL afin que tous les pays de l'espace Schengen recherchent les filières mafieuses qui rackettent ces réfugiés pour organiser leur transfert en masse depuis la Turquie ou l'Irak vers l'Europe occidentale.
En effet, d'après les renseignements obtenus auprès des autorités italiennes, pour la seule année 1997, ce sont 4 500 Kurdes qui ont été refoulés de la frontière française en territoire italien d'où ils arrivaient. Et le phénomène va en s'amplifiant.
Les Kurdes étant en conflit ouvert tant avec les autorités de la Turquie, pays dont ils représentent un cinquième de la population, soit 12 millions d'habitants, qu'avec les autorités de l'Irak, où l'on en dénombre 4 millions, j'avais demandé en outre à M. le ministre de l'intérieur s'il ne lui apparaissait pas urgent de définir une politique commune de l'Union européenne, tout au moins des pays appartenant à l'espace Schengen, au regard des flux migratoires, sans attendre la réalisation des recommandations du traité d'Amsterdam.
Par ailleurs - c'est une question importante, au vu de l'article 31 du projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France, tel qu'il vient d'être adopté par l'Assemblée nationale - ces populations seront-elles considérées comme devant bénéficier de l'asile politique ?
Cette question me paraît d'autant plus d'actualité que, voilà quelques jours, lors de la réunion de la commission d'enquête parlementaire sur la régularisation des étrangers en situation irrégulière, dont je suis le rapporteur, j'ai fait part à M. Chevènement de la décision rendue le 13 janvier 1998 par le tribunal administratif de Nice annulant l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière d'un Algérien, au motif que celui-ci, exerçant la profession d'agriculteur dans la région de Relizane, où un massacre important vient de se produire, pouvait invoquer l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945.
Or, ce qui vient de se passer pour un Algérien peut être appliqué à un Kurde. Aussi ai-je interrogé M. le ministre de l'intérieur afin de savoir s'il ne lui paraissait pas opportun de saisir les instances internationales, particulièrement l'Organisation des Nations unies, afin de faire pression sur la Turquie et sur l'Irak pour obliger ces pays à cesser les actes militaires qu'ils exercent contre ces populations et à engager le dialogue avec leurs représentants modérés. Il est bon, en effet, de rappeler que les Kurdes représentent une population de 25 millions d'habitants partagés entre la Turquie, l'Irak, la Syrie et les Républiques du Caucase.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, l'immigration irrégulière kurde concerne des ressortissants de nationalités turque, iranienne et principalement irakienne. Elle a connu depuis le second semestre de 1996 une forte poussée. L'augmentation a été particulièrement sensible au cours des onze premiers mois de 1997, au cours desquels 5 088 Irakiens ont été non admis, et 4 300 irréguliers ont été interpellés sur le territoire contre respectivement 538 et 285 durant la même période de l'année 1996.
Ce flux, particulièrement observé à la frontière franco-italienne et sur l'axe ferroviaire Vintimille-Strasbourg, se manifeste de plus en plus comme un exode massif de populations.
La réponse apportée par les services de police à ce phénomène se situe à deux niveaux.
Elle se situe tout d'abord au niveau national, grâce à l'accentuation des efforts portés par les services spécialisés dans la lutte contre l'immigration irrégulière, et au premier titre par l'Office central pour la répression de l'immigration irrégulière et de l'emploi des étrangers sans titre, de la DICCILEC. C'est ainsi que, sur le plan national, de janvier à octobre 1997, soixante-dix passeurs et logeurs ont fait l'objet de procédures judiciaires et vingt et un d'entre eux ont été écroués.
Parallèlement, la coordination des actions a été développée au niveau international, tant sous l'angle judiciaire, notamment dans le cadre de commissions rogatoires internationales, que sous celui de la maîtrise des flux, grâce à un meilleur échange d'informations entre les partenaires européens.
Dans ce cadre, une réunion s'est tenue à Rome le 8 janvier 1998 entre les directeurs généraux des services de police de six pays européens : Allemagne, Autriche, Grèce, Italie, Turquie et France. Les décisions prises faciliteront la circulation des renseignements permettant d'accentuer la lutte contre les réseaux et les filières.
Le comité exécutif Schengen, qui s'est réuni à Vienne le 15 décembre dernier, a par ailleurs adopté une décision comportant une série de mesures concrètes destinées à remplacer la coopération entre les Etats membres en vue de mieux surveiller les frontières extérieures.
Un groupe opérationnel a été constitué pour veiller à la mise en oeuvre de ces mesures ; il s'est réuni dès le 13 janvier dernier.
Les services de police compétents sont pleinement mobilisés pour faire face à ce problème sur le plan national et pour appliquer sans délai les résolutions prises au plan international.
La France compte naturellement sur un engagement de même ampleur de la part des pays adhérant à la convention de Schengen les plus concernés, à savoir l'Italie et la Grèce. Il importe, enfin, que la Turquie s'associe complètement à l'action internationale ainsi mise en oeuvre, comme elle a commencé à le faire à Rome.
M. José Balarello. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Balarello.
M. José Balarello. Madame le ministre, je vous remercie de votre réponse très détaillée.
Je suis inquiet des disparités de réglementation et de législation au niveau européen, disparités que vous connaissez puisque vous êtes l'élue d'une commune qui est voisine de l'Allemagne, alors que, pour ma part, je suis maire d'une ville située à la frontière italienne ; nos deux communes sont donc particulièrement touchées par l'axe ferroviaire Vintimille-Strasbourg que vous avez évoqué.
Vous savez mieux que quiconque que, en 1993, l'Allemagne a réformé sa législation sur le droit d'asile, excluant, aux termes de l'article 16-a-II de la loi fondamentale, les demandeurs ayant transité dans un pays sûr.
L'Italie, pour sa part, est en voie d'adopter les mêmes mesures, alors que les Pays-Bas l'ont déjà fait.
Je crains, en réalité, que les Kurdes, dont l'Italie ne veut pas et dont elle se débarrasse vers la France, ne soient interdits d'accès en Allemagne, c'est-à-dire qu'une immigration importante kurde ne se stabilise sur notre territoire.

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