M. le président. Par amendement n° II-122, M. Peyronnet, Mme Pourtaud, MM. Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne et Sergent, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 61 septies, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le paragraphe I de l'article 35 de la loi de finances rectificative pour 1993 (n° 93-859 du 22 juin 1993) est complété par la phrase suivante :
« Pour les véhicules immatriculés à partir du 1er janvier 1999, dans la circulaire ministérielle n° 77-191 du 23 décembre 1977, les mots : "m vaut 1 pour l'essence et 0,7 pour le gazole" sont remplacés par les mots : "m vaut 0,85 pour l'essence et 0,85 pour le gazole". »
La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Si vous le permettez, monsieur le président, j'aimerais défendre en même temps l'amendement n° II-123, qui porte sur le même sujet.
M. le président. Je suis effectivement saisi d'un amendement n° II-123, présenté par M. Peyronnet, Mme Pourtaud, MM. Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne et Sergent, les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant à insérer, avant l'article 61 septies, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le paragraphe I de l'article 35 de la loi de finances rectificative pour 1993 (n° 93-859 du 22 juin 1993) est complété par la phrase suivante :
« Une nouvelle circulaire fixera, avant le 1er janvier 1999, un mode nouveau de calcul de la puissance administrative des véhicules légers, prenant en compte, en substitution au mode actuel, la puissance réelle des véhicules légers, exprimée en DIN ou kW, la vitesse de pointe, le taux de pollution en gaz toxiques et en poussières émises, la proportion de pièces recyclables dans la construction et la consommation exprimée en kWh en ville à 50 km/h. »
Veuillez poursuivre, monsieur Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Les deux amendements ont trait au même problème, à savoir les anomalies qui résultent d'une réglementation vieille d'une vingtaine d'années relative au calcul de la cylindrée des véhicules particuliers.
Cette dernière est en effet calculée à partir des prescriptions d'une circulaire à valeur législative qui date de 1977 et qui donne un avantage de 30 % aux véhicules diesel à cylindrée égale.
Cette réglementation, qui a vieilli, est à l'origine d'anomalies, de dérives, et, pour être clair, il est nécessaire de la revoir.
J'avais déjà présenté ces deux amendements l'an dernier à l'occasion de l'examen de la loi sur l'air - j'y reviendrai - la diésélisation excessive pouvant poser un problème de santé publique dans notre pays, qui conduit, depuis un certain nombre d'années, une politique originale dans ce domaine par rapport à ses voisins.
Mais la première raison pour laquelle ils me semblent importants est une raison de justice fiscale.
En effet, actuellement, de plus en plus de grosses voitures ont une cylindrée de plus en plus faible en raison de la diésélisation. Je reprendrai l'exemple que j'ai donné l'an dernier : la Safrance Dédicace diesel, de 2,5 litres qui vaut 207 000 francs, appartient à la catégorie des 7 chevaux, alors que la Safrane à essence, de 2,2 litres, qui vaut 203 000 francs, donc à peu près le même prix, se trouve dans le catégorie des 11 chevaux. Il faut payer, pour la première, environ 500 francs de vignette et, pour la seconde, environ 2 000 francs de vignette, selon les départements. De plus, la première voiture se trouve dans la même catégorie qu'une petite voiture de 5 chevaux ou 6 chevaux qui, elle, vaut 50 000 francs. C'est là une situation anormale.
Les départements, qui ont autant besoin de la ressource que procure la vignette que les régions ont besoin de la ressource provenant des cartes grises, sont donc conduits à augmenter le tarif de base de la vignette, ce qui a des répercussions sur l'ensemble de la chaîne, et finalement, d'une façon égale, ou presque, sur les différentes catégories, mais proportionnellement plus importantes pour les petites cylindrées que pour les grosses. Il est donc nécessaire de procéder à une révision.
Cette mesure pourrait en outre amorcer un renversement de la politique traditionnellement favorable au diesel - qui aboutit à la diésélisation du parc automobile - tout en épargnant l'essentiel des professionnels, contrairement à la mesure qui tend à augmenter le prix du gazole.
S'agissant de la santé publique, nous connaissons tous maintenant les graves inconvénients du gazole, l'émission de particules fines se révélant très inquiétante, notamment chez certains sujets.
La mesure que je propose serait donc intéressante au regard de la protection de l'environnement et de la santé publique.
Elle présente aussi un intérêt économique. J'ai eu la surprise de recevoir une lettre d'un pétrolier dans laquelle il me disait tout le bien qu'il pensait de ma proposition. Je n'ai pas d'accointances particulières avec les pétroliers, mais cela m'a permis de constater que la France devrait importer du gazole, faute d'en produire elle-même une quantité suffisante. Il y a là quelque chose de paradoxal dans la mesure où toute une série de dispositions poussent à la diésélisation, laquelle a, finalement, aussi des effets négatifs pour notre balance commerciale.
L'amendement n° II-122 vise à égaliser, en quelque sorte, le calcul de la cylindrée des véhicules particuliers.
L'amendement n° II-123 est plus précis et va plus loin. Il vise à démontrer que l'on peut utiliser différents paramètres pour la différenciation des véhicules en vue de la détermination de leur puissance fiscale : la vitesse de pointe, exprimée en DIN ou en kilowatts ; le taux de pollution par émission de gaz toxiques et de poussières ; la proportion de pièces recyclables dans la construction ; la consommation exprimée en kilowatts-heure, etc. On pourrait presque y ajouter la pointure du chauffeur ! (Sourires.)
En tout cas, il s'agit pour moi d'inciter le gouvernement actuel à poursuivre la réflexion qu'avait commencé d'engager le gouvernement précédent sur la modification du calcul de la puissance fiscale des véhicules.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s II-122 et II-123 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. M. Peyronnet vient en fait de résumer trois années de travaux de la commission des finances sur ce sujet.
L'écart de fiscalité entre le gazole et l'essence est bien connu du Sénat puisque, depuis trois ans, en effet, la commission des finances rappelle régulièrement au Gouvernement la nécessité de progresser dans ce domaine.
C'est ainsi que, l'an dernier, sur la proposition de la commission, le Sénat a demandé au Gouvernement d'établir un rapport en vue de fonder une nouvelle législation en la matière sur des données techniques et statistiques pertinentes, de manière à mettre au point les meilleures dispositions possibles.
Ce rapport devait nous être rendu le 30 juin dernier. Il ne l'a pas été, mais M. le secrétaire d'Etat a bien voulu nous donner, voilà quelques jours, des assurances en nous annonçant ce rapport pour les « prochains jours ». Peut-être en disposerons-nous donc dans les heures qui viennent ! A moins, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous ne préfériez attendre encore quelques jours pour faire de ce rapport votre cadeau de Noël, ce dont nous vous serions très reconnaissants ! (Sourires.) M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je suis un laïque !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Mais Noël est une fête qui est presque devenue laïque !
Monsieur Peyronnet, lorsqu'il nous faudra légiférer à la lumière du rapport promis, nous ne serons pas trop, majorité sénatoriale, minorité et Gouvernement, pour mettre au point les dispositions les mieux adaptées.
Car il nous faut maintenant vraiment avancer ! Voilà trois ans que nous disons, par exemple, que l'industrie automobile ne doit pas être seule prise en compte, que l'industrie du raffinage, elle aussi, commence à être en danger. Hélas ! nous n'avons absolument pas progressé sur ce dossier, quel qu'ait été le gouvernement.
Dans l'attente de ce rapport, et après que vous aurez entendu les réponses, sans doute rassurantes du Gouvernement, mon cher collègue, vous pourriez retirer vos amendements, étant entendu que le Gouvernement tiendra éventuellement compte des suggestions que vous avez formulées.
Cela dit, les amendements mériteraient, pour l'avenir, d'être rédigés différemment, car il n'est guère envisageable de modifier une circulaire par voie législative.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. Peyronnet a exposé avec une grande force de persuasion les raisons pour lesquelles il faudrait, selon lui, assurer la neutralité des formules de calcul de la puissance administrative des véhicules à partir du 1er janvier 1999, de façon à réduire ce qui constitue une distorsion entre les véhicules fonctionnant au gazole, qui ont un coefficient de 0,7, et les véhicules fonctionnant à l'essence, qui ont un coefficient de 1. Selon une approche parfaitement cartésienne, il propose de fixer un seul coefficient de 0,85.
Vous le savez, monsieur le sénateur, le Gouvernement achève sa réflexion - M. le rapporteur général y a fait allusion - sur la question de la détermination de la puissance administrative des véhicules. Mes services travaillent avec ceux du ministère de l'équipement, des transports et du logement et du ministère de l'environnement sur ce sujet. Je vous confirme que le fameux rapport prévu à l'article 117 de la loi de finances pour 1997 sera disponible à la fin de l'année, donc ni à la Saint-Nicolas ni à la Noël, mais avant la Saint-Sylvestre. (Sourires.)
Il sera ensuite possible de supprimer les distorsions de traitement fiscal qui résultent de l'actuelle formule de calcul pour chacune des trois impositions qui sont assises sur la puissance administrative ; la taxe sur les cartes grises, la vignette et la taxe sur les véhicules de société. On pourra ainsi prendre en compte les préoccupations relatives à l'environnement que vous avez exposées tout à l'heure.
Sous le bénéfice de ces explications, qui, me semble-t-il, monsieur Peyronnet, vous donnent satisfaction, ainsi qu'à beaucoup de vos collègues puisque votre démarche semble être l'aboutissement de trois années de travaux obstinés menés dans cette assemblée, je vous demande de bien vouloir retirer vos amendements, dans l'attente de ce rapport, qui sera disponible de façon imminente.
M. le président. Monsieur Peyronnet, les amendements n°s II-122 et II-123 sont-ils maintenus ?
M. Jean-Claude Peyronnet. Je voudrais d'abord dire à M. le rapporteur général que j'étais bien conscient des problèmes de forme que soulevaient mes amendements. Il s'agissait avant tout pour moi d'interpeller le Gouvernement. La réponse que j'ai obtenue me satisfait.
J'avais déjà, l'an dernier, retiré de semblables amendements sous le bénéfice de la promesse que m'avait faite Mme Lepage, alors ministre de l'environnement, quant à la présentation de ce rapport au printemps.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez pris l'engagement formel de nous remettre ledit rapport avant la fin de l'année. En conséquence, je retire ces amendements.
M. le président. Les amendements n°s II-122 et II-123 sont retirés.

Article 61 septies