M. le président. « Art. 25. - L'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
« 1° A l'article 1er, les mots : "treize ans et un mois" sont remplacés par les mots : "dix-huit ans et un mois" ;
« 2° L'article 2 est ainsi rédigé :
« Art. 2. - La Caisse d'amortissement de la dette sociale a pour mission, d'une part, d'apurer la dette mentionnée aux I et II de l'article 4 et, d'autre part, d'effectuer les versements prévus aux III et IV du même article. » ;
« 3° L'article 4 est ainsi modifié :
« a) Le II devient le III et le III devient le IV ;
« b) Il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. - La dette de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale à l'égard de la Caisse des dépôts et consignations, correspondant, d'une part, au financement des déficits accumulés par le régime général de sécurité sociale constatés au 31 décembre 1997 dans la limite de 75 milliards de francs et, d'autre part, à celui de son déficit prévisionnel de l'exercice 1998 dans la limite de 12 milliards de francs, est transférée à la Caisse d'amortissement de la dette sociale à compter du 1er janvier 1998. » ;
« 4° L'article 10 est ainsi modifié :
« a) Le II devient le III ;
« b) Il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. - Les sommes correspondant au remboursement par la Caisse d'amortissement de la dette sociale du prêt consenti à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale par la Caisse des dépôts et consignations et mentionné au II de l'article 4 sont réparties, à compter du 1er janvier 1998, entre les fonds nationaux gérés par la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, la Caisse nationale des allocations familiales et la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés dotés d'un compte de report à nouveau négatif aux bilans arrêtés au 31 décembre 1997, et ce, au prorata des montants de ces comptes. Le montant des transferts correspondant à cette répartition est fixé dans les conditions prévues au I. » ;
« 4° bis l'article 11 est abrogé ;
« 5° Aux articles 14, 15, 16, 17 et 18, l'année : "2008" est remplacée par l'année : "2013", et l'année : "2009" est remplacée par l'année : "2014". »
Sur l'article, la parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. L'article 25 prévoit une prolongation de la durée de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, instituée par l'ordonnance n° 96-50 prise dans le cadre des dispositions du plan Juppé et dont la ratification n'a jamais été soumise au Parlement.
Il s'agit concrètement de prendre en compte le fait que la dette sociale, cantonnée dans les écritures de la CADES, la Caisse d'amortissement de la dette sociale, s'est encore accrue de 87 milliards de francs entre les exercices 1996 et 1997, majorée du déficit prévisionnel de l'exercice 1998, fixé à 12 milliards de francs.
Cette contribution présente un défaut fondamental, à savoir lier une part du financement de la protection sociale à la loi des marchés financiers, d'autant que le taux réel des titres CADES est largement supérieur à celui de la hausse des prix.
Rien ne permet d'ailleurs de penser que nous en aurons fini avec la CRDS en 2014. En effet, même si le déficit de la protection sociale disparaît - et on peut le souhaiter - il n'est pas certain qu'il ne réapparaisse pas, je pense notamment aux années 2005-2015 qui seront décisives pour notre régime d'assurance vieillesse, par exemple.
Pouvons-nous choisir une autre solution ?
Sans doute pour n'avoir pas mis en oeuvre auparavant les réformes nécessaires pour assurer le financement de la protection sociale - et je pense ici singulièrement au problème de la prise en compte des revenus financiers des ménages et des entreprises - sans doute aussi parce que la dégradation des comptes sociaux s'est accompagnée du mouvement de réduction de la part des salaires dans la valeur ajoutée et du développement de la « financiarisation » de notre économie au détriment de l'emploi, nous n'avons guère de choix aujourd'hui.
Pour autant, il nous semble indispensable de réfléchir aujourd'hui à d'autres formes de refinancement de la protection sociale que celle de la CRDS. Aussi, dans l'attente de telles dispositions, nous ne voterons pas l'article 25.
M. le président. Sur l'article 25, je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 52, M. Adnot propose de supprimer l'article 25.
Par amendement n° 47, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose de rédiger comme suit le 1° de cet article :
« 1° L'article 1er est ainsi modifié :
« a) Les mots : "treize ans et un mois" sont remplacés par les mots : "dix-huit ans et un mois" ;
« b) Il est inséré in fine un alinéa ainsi rédigé :
« Au terme de son existence prévu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, le 31 janvier 2014, la Caisse d'amortissement de la dette sociale est dissoute et son patrimoine est dévolu à l'Etat. Cette dévolution du patrimoine fait l'objet d'un arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé de l'économie et des finances. Les transferts des biens, droits et obligations de la Caisse d'amortissement de la dette sociale qu'elle suppose ne donnent lieu à aucune indemnité ou perception d'impôts, droits ou taxes. »
Par amendement n° 48, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose de compléter le 3° de l'article 25 par trois alinéas ainsi rédigés :
« c) Dans le III, les mots : "au budget général de" sont remplacés par le mot : "à".
« d) Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A compter de l'année 1998 et jusqu'à l'année 2008, la part de cette somme correspondant aux remboursements en capital de la dette visée à l'article 105 de la loi de finances pour 1994 est versée au Trésor, sans qu'elle puisse faire l'objet d'un versement au budget général. »
La parole est à M. Adnot, pour défendre l'amendement n° 52.
M. Philippe Adnot. Madame le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, j'en suis bien conscient, la disposition que je propose n'a aucune chance d'être adoptée. Il s'agit donc d'un amendement de témoignage.
Quelle entreprise, quel particulier ou quelle collectivité locale qui, constatant une augmentation de ses charges, pourrait allonger la durée de ses remboursements sans proposer à son banquier un plan d'accompagnement comportant des mesures précisant comment sera maîtrisée la dépense et la manière dont sera résolu le problème ?
Ce que nous sommes en train de faire est extrêmement grave. En effet, l'année prochaine, il y aura encore une dérive, l'année suivante également, et il faudra consolider la dette. Ainsi, la durée de remboursement passera de treize ans à dix-huit ans, puis à vingt-cinq ans, voire à trente ans. Un jour, nos enfants seront confrontés à une charge insupportable.
Personnellement, je ne peux cautionner une telle solution. Aussi, je voudrais attirer solennellement votre attention, tout en étant très conscient de la limite de mon propos, sur le fait que la seule manière de résoudre ce problème consiste à proposer à la fois une augmentation des prélèvements, pour couvrir une dépense qui nous concerne tous, et une réduction des dépenses.
Ne doit-on pas la vérité à nos concitoyens et à nos enfants ? Ce que nous allons faire, c'est renvoyer la solution à plus tard. C'est extrêmement grave !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre les amendements n°s 47 et 48.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. M. Philippe Adnot a parfaitement raison.
M. Emmanuel Hamel. Vous allez donc voter son amendement !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. En bonne logique, nous devrions équilibrer nos comptes et éviter d'accumuler les déficits en reportant, comme nous le faisons, la charge que représentent nos errements actuels sur nos enfants et nos petits-enfants. Cependant, nécessité fait loi, car tous les amendements de plus grande rigueur proposés par la commission des finances ont été rejetés.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Pas tous !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. La quasi-totalité !
Dans ces conditions, nous ne pouvons que constater l'existence d'une différence d'approche. Nous nous infligeons, si je puis m'exprimer ainsi, une très grande rigueur en ce qui concerne les dépenses budgétaires. En revanche, s'agissant des dépenses sociales, compte tenu du caractère sentimental qu'elles comportent toutes, nous ne parvenons pas à nous imposer la même rigueur. Pourtant, le montant global des dépenses - plus de 1 700 milliards de francs - devrait, comme nous l'avons dit, couvrir la totalité des dépenses concernant la solidarité nationale.
Bref, au regard des déficits cumulés - d'abord 110 milliards de francs, puis 140 milliards de francs et maintenant 87 milliards de francs - la CADES, la Caisse d'amortissement de la dette sociale, est un bon outil.
M. François Autain. Très bien !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Techniquement, pas sur le principe ! Il s'agit effectivement d'un bon outil technique. Elle cantonne la dette, elle la limite dans le temps et elle lui affecte une recette fiscale. De ce fait, la CADES est une bonne signature sur la place internationale, et c'est notre seule satisfaction.
Pour le reste, elle est le résultat d'une politique que la commission des finances ne peut approuver.
Cela étant dit, s'agissant de la CADES, deux solutions étaient possibles : ou bien augmenter la CRDS de 0,5 % à 0,7 % - la position de la commission des finances consiste, à l'heure actuelle, plutôt à maintenir les prélèvements obligatoires qu'à les accroître - ou bien prolonger la durée de vie de la CADES.
Nous nous sommes résolus, la mort dans l'âme, en ayant par ailleurs le souci d'une plus grande rigueur financière, à accepter de prolonger de cinq ans la durée de vie de la caisse, mais à condition qu'au 31 décembre 2014 elle cesse d'exister et que cela soit inscrit dans la loi.
Certes, comme je l'ai dit lors de la discussion générale, ce qu'une loi fait, une autre peut le défaire. Cela dit, nous aurons pris date, nous aussi, devant la nation. Il est indispensable de faire un effort de redressement et d'équilibre.
Je vous propose donc, par cet amendement, d'accepter de prolonger de cinq ans la durée de vie de la CADES, mais d'en fixer le terme au 31 décembre 2014, date à laquelle tous ses biens seront dévolus à l'Etat.
L'amendement n° 48 est un amendement de sincérité comptable. En effet, le paragraphe III de l'article 4 de l'ordonnance du 24 janvier 1996 a mis à la charge de la CADES un versement au budget général de 12,5 milliards de francs.
Que représente cette somme ? Elle vise à dédommager l'Etat des charges qu'il supporte du fait de la reprise de la dette des 110 milliards de francs du régime général intervenue en 1994. Comme je l'ai dit, 110 milliards de francs, puis 140 milliards de francs et, aujourd'hui, 87 milliards de francs, voilà les dettes que nous avons accumulées au cours des dernières années.
L'obligation de verser à l'Etat 12,5 milliards de francs qui pesait initialement sur le Fonds de solidarité vieillesse a été transmise à la CADES. En dépit de ce changement, la contrepartie économique et financière de ce versement reste toujours cette dette de 110 milliards de francs. Mais le versement de la CADES est traité comme une recette non fiscale du budget de l'Etat.
A plusieurs reprises, la Cour des comptes a fait valoir qu'une telle procédure comptable consistait à minorer artificiellement le déficit budgétaire. Les comptables nationaux partagent ce sentiment. La commission des finances propose donc que, à compter de 1998, seule la partie du versement de 12,5 milliards de francs correspondant aux charges d'intérêts supportées par le budget de l'Etat au titre de la dette de 110 milliards de francs puisse faire l'objet d'un versement au budget général. Le reste, c'est-à-dire la partie du versement correspondant au remboursement du capital de la dette, sera bien versé au Trésor, mais ne sera pas susceptible d'être inscrit au budget de l'Etat. Il sera versé au compte de trésorerie distinct visé à l'article 30 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant la loi organique relative aux lois de finances.
Notre assemblée doit adopter cet amendement. Il s'agit, je le répète, d'un amendement de sincérité comptable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 52, 47 et 48 ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. En ce qui concerne l'amendement n° 52, je partage votre raisonnement, monsieur Adnot, et j'allais dire votre souci de pureté. Cependant, je comprends le point de vue de l'exécutif. S'agissant d'une dette qui a été accumulée par l'ensemble de nos concitoyens, on ne peut en laisser la charge aux organismes de sécurité sociale, comme cela a été le cas l'année dernière où l'ACOSS a enregistré 3 milliards de francs de frais financiers. En effet, si nous ne la transférons pas à la CADES, cela se traduira nécessairement par un emprunt...
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Bien sûr !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. ... qui pèsera pour 3 milliards de francs sur les comptes de la sécurité sociale et qui ne permettra ni de mieux soigner les malades, ni d'aider davantage les familles, ni d'accorder un supplément de retraite, puisqu'il s'agit de frais financiers.
Il importe, comme à la SNCF - excusez-moi de la comparaison - de dégager les caisses de sécurité sociale de ces charges, qui sont purement financières, pour leur permettre de se concentrer sur leur métier qui est d'aider les familles, de soigner les malades et d'aider les personnes âgées.
Je crois que c'est effectivement une très mauvaise solution, mais, malheureusement, nous n'en avons pas d'autre et je suis tout à fait conscient - ce que vous avez dit est exact - que nous mettons des bombes à retardement sous les pieds de nos enfants.
Il faudra nous montrer très attentifs pour ne pas recommencer dans les prochaines années des opérations de ce style ; mais, dans l'état actuel des choses, je ne peux qu'être défavorable à votre amendement n° 52, monsieur Adnot.
C'est d'ailleurs pourquoi je suis favorable à l'amendement n° 47 de M. Oudin. De la sorte, ce dernier ne pourra pas dire que, jusqu'à la fin du débat, les amendements de la commission des finances auront été repoussés par la commission des affaires sociales !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. C'est le lot de consolation !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Mais il n'est pas si mal !
Nous sommes d'ailleurs prévoyants au point d'imaginer ce qui se passera en 2014. Vous voyez, monsieur Adnot, que nous pouvons être préservés de l'accusation d'imprévoyance !
Nous sommes également favorables à l'amendement n° 48. Certes, il comporte des difficultés techniques : dans la mesure où la reprise d'une dette contractée en 1993 ne s'analyse pas comme une opération en capital, les remboursements de cette dette ne peuvent être analysés de cette sorte. Sans méconnaître ces obstacles techniques, je fais cependant tout à fait confiance à la commission des finances pour les surmonter.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 52, 47 et 48 ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable aux trois amendements.
Je pense que M. Adnot a bien compris que nous partageons les sentiments de M. le rapporteur sur l'amendement n° 52.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur pour avis, vos amendements n°s 47 et 48 sont sans objet puisque la liquidation de la CADES est déjà prévue.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. La liquidation n'est pas prévue dans la loi !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Mais si, elle l'est !
Nous estimons, de surcroît, que cet argent devrait revenir aux caisses et non pas au budget de l'Etat.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Bien sûr ! C'est tout à fait vrai !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 52.

M. Philippe Adnot. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Adnot.
M. Philippe Adnot. Je maintiens, bien sûr, mon amendement : imaginons une dette dont l'annuité est de 12,5 milliards de francs. Cette dette augmenterait d'un peu plus de 80 milliards de francs et nous ferions passer l'annuité à 12 milliards de francs ? Quel gestionnaire, constatant une augmentation de sa dette, diminuerait son annuité en pensant que cela apporterait une solution à ses problèmes ? C'est très grave !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 52, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 47, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 48, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 25, modifié.

(L'article 25 est adopté.)

Plafonds d'avances de trésorerie

M. le président. Par amendement n° 29, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet intitulé, avant l'article 26.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Il s'agit d'un amendement de forme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé avant l'article 26 est supprimé.