M. le président. Par amendement n° 21, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 23, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 27 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales, il est inséré un article 27-1 ainsi rédigé :
« Art. 27-1. - Chaque année, les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale, de l'action sociale, du budget et de l'économie déterminent, en fonction de l'objectif national d'évolution des dépenses d'assurance maladie voté par le Parlement, l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses des établissements ou services visés aux 2° et 5° de l'article 3 imputables aux prestations prises en charge par les régimes d'assurance maladie, et, corrélativement, le montant total annuel des dépenses prises en compte pour le calcul des dotations globales, forfaits, prix de journée et tarifs afférents aux prestations médico-sociales imputables à l'assurance maladie dans les établissements et services susmentionnés.
« Ce montant total annuel est fixé par application d'un taux d'évolution aux dépenses de l'année précédente, au plus tard dans les quinze jours qui suivent la publication de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année.
« Le montant total annuel ainsi calculé est constitué en dotations régionales. Le montant des dotations régionales, qui présente un caractère limitatif sous réserve des dispositions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 174-1-1 du code de la sécurité sociale est fixé par les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et de l'action sociale, en fonction des besoins de la population, des priorités définies au niveau national en matière de politique médico-sociale, compte tenu de l'activité et des coûts moyens des établissements ou services et d'un objectif de réduction progressive des inégalités dans l'allocation des ressources entre régions.
« L'enveloppe régionale est répartie par le représentant de l'Etat dans la région, après avis du représentant de l'Etat dans le département, pour chaque département de ladite région, et du directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation, en sous-enveloppes départementales tenant compte des priorités locales, des orientations des schémas prévus à l'article 2-2, de l'activité et des coûts moyens des établissements ou services, des objectifs fixés dans les conventions prévues au dernier alinéa du présent article et d'un objectif de réduction des inégalités entre départements et établissements ou services ; cette procédure est applicable aux établissements ou services visés aux articles 26-4 et 27 bis dont la tarification ne relève pas exclusivement du représentant de l'Etat dans le département.
« Pour chaque établissement ou service, le représentant de l'Etat dans le département compétent peut modifier le montant global des recettes et dépenses prévisionnelles visées au 5° de l'article 26-1 imputables aux prestations prises en charge par l'assurance maladie, compte tenu du montant de la dotation régionale ou départementale définie ci-dessus ; la même procédure s'applique en cas de révision, au titre du même exercice budgétaire, des dotations régionales ou départementales initiales.
« Il peut également supprimer ou diminuer les prévisions de dépenses qu'il estime injustifiées ou excessives compte tenu, d'une part, des conditions de satisfaction des besoins de la population, telles qu'elles résultent, notamment, des orientations des schémas prévus à l'article 2-2 et, d'autre part, de l'évolution de l'activité et des coûts des établissements et services appréciés par rapport au fonctionnement des autres structures comparables dans ledit département ou ladite région.
« Des conventions conclues entre le représentant de l'Etat dans le département, l'autorité compétente pour l'assurance maladie, les gestionnaires d'établissements ou de services et, le cas échéant, les groupements constitués dans les conditions prévues à l'article 2 précisent, dans une perspective pluriannuelle, les critères d'évaluation et de prévision de l'activité et des coûts des prestations imputables à l'assurance maladie dans les établissements et services concernés ».
« II. - Le dernier alinéa de l'article L. 174-7 du code de la sécurité sociale et le dernier alinéa de l'article 27 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 précitée sont supprimés.
« III. - L'article 11-1 de la même loi est ainsi modifié :
« a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il en est de même lorsqu'ils sont susceptibles d'entraîner pour les budgets des organismes de sécurité sociale ou des collectivités publiques des charges injustifiées ou excessives compte tenu du montant des enveloppes de crédits définies à l'article 27-1 ;
« b) Au deuxième alinéa, les mots : " ou des organismes de sécurité sociale " sont supprimés.
« IV. - Les dispositions du présent article sont applicables jusqu'à l'adoption d'une loi réformant la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 précitée. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cet amendement a pour objet d'encadrer les dépenses médico-sociales.
Aujourd'hui, les dépenses médicales sont encadrées pour les soins ambulatoires et pour les soins hospitaliers. Mais il y a 57 milliards de francs, selon certains, ou 70 milliards de francs, selon d'autres, qui ne sont pas encadrés. Or interviennent dans cette somme les dépenses médico-sociales, qui dérapent beaucoup. Il ne nous semble pas cohérent, par rapport aux professionnels, qui sont soumis à encadrement, de les laisser continuer à déraper.
Bien entendu, il n'est pas question de soumettre les dépenses du secteur médico-social aux mêmes objectifs que les soins ambulatoires ou hospitaliers, mais un encadrement nous paraît s'imposer.
Je tiens à souligner que nous avions présenté un amendement analogue l'année dernière, sous un autre gouvernement. Nous poursuivons et nous persévérons.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, car la méthode qui est proposée revient à transposer de manière un peu mécanique le dispositif des ordonnances sanitaires d'avril 1996, autrement dit l'opposabilité des enveloppes, à un secteur spécifique régi par une loi qui date de 1975, que nous entendons d'ailleurs modifier.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cette année ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Au plus vite. Nous y travaillons.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. En 1998.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 21.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. L'amendement n° 21 vise à une sorte de transposition des dispositions du plan Juppé à l'ensemble des établissements de la filière médico-sociale.
La commission des affaires sociales nous propose en effet de soumettre ces établissements aux mêmes règles de pénurie budgétaire que celles qui président aux destinées comptables des établissements hospitaliers ou de la médecine de ville.
La commission des finances, pour sa part, avec l'amendement n° 44 qu'elle s'apprête à nous présenter, franchit encore plus les limites de l'admissible en proposant un gel en francs courants des dépenses des structures médico-sociales.
C'est donc sans la moindre hésitation que nous rejetterons ces deux amendements.
Nous ne croyons pas plus aujourd'hui qu'hier aux vertus de la maîtrise comptable en matière de dépenses sociales, attendu que la seule régulation doit venir de l'efficacité des interventions.
Nous pensons, en particulier, que tout ce qui a pu contribuer à réduire le volume de la dépense publique en matière de prévention sanitaire, qu'il s'agisse de la médecine scolaire ou de la médecine du travail, pèse aujourd'hui sur la situation de l'assurance maladie quant à son intervention dans le domaine des dépenses hospitalières.
On nous propose, avec cet amendement, de faire en sorte que notre système de protection sociale soit un peu plus dur pour un certain nombre de personnes particulièrement vulnérables.
Je m'étonne que M. le rapporteur pour la famille, qui connaît parfaitement ces problèmes, ait pu donner quitus à cet amendement, alors que celui-ci va directement frapper les établissements accueillant les enfants ou les adultes handicapés, ou encore ceux de nos concitoyens qui rencontrent le plus de difficultés d'insertion sociale et professionnelle.
Nous avons reçu - et chacun des présidents de groupe l'a probablement reçu aussi - un courrier de M. Lenoir, qui était ministre à l'époque de la réforme de 1975 et qui est aujourd'hui président de l'Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux. Ce courrier, daté du 10 novembre, est on ne peut plus clair. Voici ce qu'on peut notamment y lire :
« L'avenir de la régulation des établissements sociaux et médico-sociaux a fait l'objet, au cours du semestre passé, d'une réflexion globale engagée avec les acteurs concernés en vue de la réforme de la loi du 30 juin 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales. Il semblerait, dans ce contexte, regrettable que la régulation soit abordée dans une perspective principalement économique à la faveur d'amendements à la loi de financement de la sécurité sociale. »
Il y a pleinement lieu, à notre avis, de suivre l'opinion pour le moins autorisée de M. Lenoir, dont la compétence sur l'ensemble de ces questions est reconnue.
Suivre la commission des affaires sociales et la commission des finances dans leur logique consisterait en fait à faire payer aux plus vulnérables de nos compatriotes le prix de la mise en oeuvre d'une conception étroite de la protection sociale, en filiation directe avec la logique du plan Juppé.
C'est donc avec détermination que nous voterons contre l'amendement n° 21, sur lequel nous demandons que le Sénat se prononce par scrutin public.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Tout le monde reconnaît, bien sûr, une très grande compétence à M. Lenoir, mais je rappelle que nous avions déposé cet amendement l'année dernière ; d'ailleurs, nous avions alors déjà reçu une lettre de M. Lenoir.
Est-ce l'effet du dépôt de notre amendement l'an passé ? Toujours est-il que la concertation s'est engagée pendant l'année au sein des établissements médico-sociaux et que le taux de dérapage des dépenses de santé, qui était de 8 % en 1996, est tombé à 3,4 % ; on ne peut que s'en réjouir.
Je ne dis pas que la peur du gendarme est le début de la sagesse, mais...
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrution est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 14:

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 316
Majorité absolue des suffrages 159219
Contre 97

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 23.
Par amendement n° 44, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 23, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les budgets de gestion administrative des organismes de sécurité sociale visés à l'article L. 227-1 du code de la sécurité sociale sont limités pour 1998 aux montants atteints en 1997. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Il s'agit de la rigueur dans la gestion des caisses.
Dans le plan de redressement financier de novembre 1995, des économies sur les coûts de gestion étaient prévues : elles devaient porter sur 1,5 milliard de francs en 1996 et sur 2 milliards de francs en 1997. Ne pensez pas que ces objectifs ont été respectés ! Les dépassements se sont en effet élevés à 1,6 milliard de francs en 1996 et à 1,2 milliard de francs en 1997.
D'ailleurs, la Cour des comptes, dans ses différentes analyses, a bien montré qu'il y avait quelques anomalies dans cette évolution des frais de gestion.
Comme Mme le ministre nous l'a rappelé dans ses propos antérieurs, l'ordonnance du 24 avril 1996 pose le principe de l'encadrement des budgets pluriannuels de gestion administrative des trois caisses par les conventions d'objectifs et de gestion passées entre celles-ci et l'Etat.
Cependant, les lois de financement de la sécurité sociale sont là pour fixer des orientations et des limites. Il est d'ailleurs prévu que des avenants peuvent faire évoluer ces conventions d'encadrement de manière que soient atteints les objectifs arrêtés par les lois de financement.
Dans ces conditions, nous proposons que les économies soient de 1,2 milliard de francs, ce qui signifie que les dépenses de gestion passeraient de 48,3 milliards à 47,1 milliards de francs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Nous comprenons parfaitement l'exigence de rigueur et, à travers les propositions que nous présenterons dans la suite du débat, nous inviterons également les caisses à diminuer leurs budgets de gestion administrative. Toutefois, il nous paraît quelque peu excessif de vouloir bloquer, pour 1998, ces budgets aux montants atteints en 1997.
Au demeurant, comme M. le rapporteur pour avis l'a dit lui-même, cet amendement va à l'encontre de l'ordonnance du 24 avril 1996, qui prévoit la conclusion de conventions d'objectifs et de gestion.
C'est pourquoi nous émettons un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement suit l'avis du rapporteur, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Objectifs de dépenses par branche

M. le président. Par amendement n° 22, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit l'intitulé de cette division, avant l'article 23 bis :
« Section 3
« Objectifs de dépenses par branche ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. C'est un amendement de forme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Sagesse.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé de la division avant l'article 23 bis est ainsi rédigé.