M. le président. « Art. 7. - I. - A l'article L. 245-1 du code de la sécurité sociale, les mots : "des entreprises de préparation des médicaments" sont remplacés par les mots : "des entreprises assurant l'exploitation en France, au sens de l'article L. 596 du code de la santé publique, d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques" .»
« II. - L'article L. 245-2 du même code est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, il est procédé sur cette assiette à un abattement forfaitaire égal à trois millions de francs et, le cas échéant, à un abattement d'un montant égal à 40 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au titre des spécialités génériques définies à l'article L. 601-6 du code de la santé publique, remboursables ou inscrites sur la liste des médicaments agréés à l'usage des collectivités. » ;
« 2° Le deuxième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :
« Le taux de la contribution due par chaque entreprise est calculé selon un barème comprenant quatre tranches qui sont fonction du rapport, au cours du dernier exercice clos, entre, d'une part, l'assiette définie à l'alinéa précédent et tenant compte, le cas échéant, de l'abattement prévu au même alinéa et, d'autre part, le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France, au titre des médicaments inscrits sur les listes mentionnées aux articles L. 162-17 du présent code et L. 618 du code de la santé publique.
« Pour chaque part de l'assiette correspondant à l'une de ces quatre tranches définies ci-après, le taux applicable est fixé comme suit :

R à 10 % 9,5 %
R égal ou à 10 % et à 12 % 15 %
R égal ou à 12 % et à 14 % 18 %
R égal ou à 14 % 21 % »

« III. - Les dispositions du présent article entrent en vigueur pour la détermination de la contribution due le 1er décembre 1998. »
Sur l'article, la parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à l'occasion de l'examen de cet article, je veux évoquer les préoccupations que suscite l'état actuel de la presse médicale d'information. Cet article concerne en effet la contribution assise sur les frais de prospection et d'information des praticiens.
A vrai dire, l'enjeu est modeste par rapport aux ordres de grandeur auxquels nous nous référons dans ce débat, puisqu'il s'agit de 300 millions de francs, dont environ 50 millions de francs concernent la publicité et l'information par la presse médicale.
Permettez-moi d'abord de souligner deux évidences.
En premier lieu, le taux de croissance annuel moyen des remboursements de médicaments par le régime général a connu une diminution spectaculaire au cours des dernières années, ce qui témoigne de l'efficacité des mécanismes de maîtrise des dépenses et du juste soin, la période de référence montrant d'ailleurs que cet effort a été entrepris par plusieurs gouvernements successifs.
Ce taux de croissance est en effet passé, en moins de dix ans, de 10 % en moyenne annuelle à 2 %. Ces chiffres ne sont pas suffisamment connus et c'est pourquoi je profite de l'occasion qui m'est donnée pour les évoquer devant la Haute Assemblée.
Seconde évidence : la promotion est nécessaire. Il n'y a rien d'immoral à promouvoir de bons médicaments, car cela permet que les indications en soient connues. Cette promotion est nécessaire, sauf pour des molécules nouvelles qui se trouvent, ne serait-ce que momentanément, en situation de monopole. Mais, quand il y a des produits concurrentiels sur le marché, il est indispensable que la promotion puisse s'effectuer dans des conditions de transparence, transparence dont nombre d'instances sont d'ailleurs les garantes.
La conséquence de l'évolution que j'ai dessinée à grands traits, du fait des mesures prises au cours des dernières années concernant la promotion des médicaments, c'est qu'est resté presque inchangé un des moyens importants de l'information du prescripteur, à savoir la visite médicale. En revanche, le grand perdant, dans cette évolution, c'est la presse médicale d'information. Cette constatation ne doit pas nous laisser indifférents. En effet, la presse médicale souffre plus que d'autres de la chute du marché de la publicité - de l'ordre de 50 % en quatre ans. Ses charges croissent, l'affranchissement ayant augmenté de 40 % pour la presse quotidienne. De plus, on s'attend à une hausse des salaires des journalistes dans la mesure où l'on voit poindre, parmi les dispositions du projet de loi de finances pour 1998, la suppression de leur abattement supplémentaire pour frais professionnels.
Je n'ai pas pour habitude de dramatiser une situation et je sais les critiques qui sont parfois adressées à la presse médicale. Pour autant, j'estime que l'on ne peut pas laisser dépérir un mode d'information important, même s'il demande à être contrôlé afin que les messages aient un caractère strictement informatif.
Je n'ai pas déposé d'amendement, je verrais d'ailleurs mal son contenu. J'ai tenu cependant à attirer l'attention sur l'évolution de la presse médicale d'information, évolution à laquelle nous ne saurions rester indifférents.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. La maîtrise des dépenses de santé passera, nous le savons, mes chers collègues, par une réflexion précise et sans tabou sur les mesures à prendre en ce qui concerne la consommation des médicaments.
Cette réflexion est en cours au travers d'une concertation organisée avec l'ensemble des partenaires et qui ne se limite pas, qui ne peut pas se limiter aux seuls laboratoires et pharmaciens.
Au titre de ces mesures, il paraît évident qu'il convient de faire baisser la pression promotionnelle exercée en direction des prescripteurs, tant il est évident qu'elle a pour objectif d'influencer à la hausse le volume des prescriptions.
Ainsi, ces opérations de promotion représentent en moyenne, en France, 14,5 % du chiffre d'affaires. Soulignons qu'elles viennent d'être plafonnées à 9 % en Grande-Bretagne.
Cet article vise donc à réviser le régime de la taxe, initialement fixée à 9 %, relative aux dépenses de promotion engagées par les laboratoires pharmaceutiques, tout en prévoyant des aménagements pour les plus petits d'entre eux.
Il présente l'avantage de moduler l'importance de cette taxe au regard du poids de ces dépenses promotionnelles, au sens large du terme, dans le chiffre d'affaires.
L'article 7 prévoit par ailleurs un abattement qui vise à promouvoir les médicaments génériques, dont il est souhaitable de voir se développer les prescriptions en France, en sachant qu'il serait probablement nécessaire de réexaminer le répertoire de ces médicaments génériques.
Le juste soin, le soin de qualité passe par une certaine rigueur dans la prescription du médicament, et donc par une bonne information des prescripteurs, information objective qui, bien entendu, ne saurait être assurée, mes chers collègues, par la seule presse médicale.
La formation continue des médecins prend, de ce point de vue, toute son importance. Elle est théoriquement devenue obligatoire et, monsieur le secrétaire d'Etat, je profite de l'examen de cet article pour vous demander d'être extrêmement vigilant sur la manière dont est dispensée cette formation continue du médecin.
Cela étant dit, le groupe socialiste votera l'article 7.
M. le président. Par amendement n° 9, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
A. - Dans le texte présenté par le 1° du paragraphe II de l'article 7 pour compléter le premier alinéa de l'article L. 245-2 du code de la sécurité sociale, de remplacer le taux « 40 % » par le taux « 30 % ».
B. - De rédiger comme suit le barème inséré dans le second alinéa du texte proposé par le 2° du paragraphe II de cet article pour remplacer le deuxième alinéa dudit article L. 245-2 :

R <à 12 % 9,0 %
R égal ou > à 12 % et <à 14 % 14,5 %
R égal ou > à 14 % et <à 18 % 17,5 %
R égal ou > à 18 % 20,0 %


C. - Après le paragraphe II de cet article, d'insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« II bis . - L'avant-dernier alinéa de l'article L. 162-18 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elles peuvent notamment contribuer au respect d'objectifs relatifs aux dépenses de promotion des spécialités pharmaceutiques remboursables ou des médicaments agréés à l'usage des collectivités. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Qu'on me permette de dire d'abord que je fais miens les propos qu'a tenus notre collègue Claude Huriet sur la presse médicale.
L'article 7 du projet augmente d'un tiers la taxation des dépenses de promotion des laboratoires, au mépris de la politique conventionnelle entre l'Etat et l'industrie, dont l'un des objets majeurs est le « désarmement promotionnel ».
C'est un sujet très complexe sur lequel bien des gouvernements ont planché avec des succès divers. Plutôt que de taxer, au détour d'une loi de financement de la sécurité sociale, tel ou tel maillon de cette chaîne qui existe entre l'industriel et le pharmacien, mieux vaudrait, selon moi, soutenir la politique conventionnelle.
A l'article 7, la commission propose de modifier sur trois points le dispositif qui a été adopté par l'Assemblée nationale.
D'abord, nous proposons de réduire de 40 % à 30 % l'abattement institué par l'Assemblée nationale au profit des médicaments génériques. En effet, la liste de médicaments génériques prévue par le projet de loi est très étroite, car elle correspond aux médicaments strictement substituables. En outre, en l'état actuel, il n'est pas possible de se référer utilement à une autre définition. Un taux de 40 % pénaliserait donc tous les médicaments pouvant être considérés comme génériques, mais qui ne figurent pas sur la liste, car, par exemple, ils sont délivrés dans une boîte plus grande que celle du médicament de référence.
Ce sujet a donné lieu, au cours des auditions en commission, à de nombreux débats que je ne veux pas rouvrir ici - je sais que M. le secrétaire d'Etat est entouré d'hommes particulièrement compétents.
Ensuite, nous proposons un barème de taxation plus respectueux de l'existence d'une politique conventionnelle du médicament. En fait, nous n'augmentons le taux actuel qu'à partir de 12 % de dépenses promotionnelles, ce qui paraît plus raisonnable.
Enfin, nous entendons gager cette modification du barème par un renvoi à la politique conventionnelle, les accords entre le comité économique du médicament et les laboratoires pouvant prévoir des remises versées au profit de l'assurance maladie en cas de dépenses promotionnelles excessives. Je ne crois pas trahir, en l'espèce, l'avis du président du SNIP, le Syndicat national des industries pharmaceutiques.
Le recours à la politique conventionnelle est, en outre, plus souple qu'un mécanisme de taxation, notamment parce qu'il permet d'isoler, au sein des dépenses promotionnelles, les publicités faites dans la presse médicale. La taxation prévue dans le projet de loi constituerait en effet un coup dur pour la presse médicale - Claude Huriet vient de le dire - dont le rôle dans la formation continue des médecins est reconnu, même s'il n'est pas exclusif.
Vous avez d'ailleurs déclaré voilà quelques jours, monsieur le secrétaire d'Etat, alors que nous remettions ensemble les prix du MEDEC, que les publications médicales seraient reconnues comme étant partie intégrante de la formation médicale continue.
Enfin, je préciseque l'amendement est neutre sur le plan financier et qu'il est équilibré : nous désirons défendre la politique conventionnelle et refusons une taxation que nous considérons comme aveugle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les deux intervenants sur l'article et M. le rapporteur.
Je serais presque d'accord avec M. le rapporteur si nous ne divergions sur les chiffres. Il m'apparaît en effet que l'adoption de l'amendement diminuerait le rendement de la mesure de 165 millions de francs, perte qui n'est pas compensée par la réduction de 40 % à 30 % de l'abattement consenti. C'est une raison, parmi d'autres, de m'opposer à l'amendement.
Je ferai d'autres remarques très brèves.
Monsieur le rapporteur, nous n'abandonnons pas la politique conventionnelle. Au contraire, nous l'encadrons et nous l'institutionnalisons. Une lettre de cadrage sur les rapports avec les orientations sera envoyée au comité économique du médicament, auquel Mme Aubry et moi-même avons attribué des tâches très précises.
S'agissant de la presse médicale, je ne retirerai pas ce que j'ai dit voilà quelques jours, monsieur le rapporteur. D'abord, si cette presse se conduisait comme toutes les presses, c'est-à-dire si elle fonctionnait par abonnement, elle aurait mon entier soutien. Il faut qu'elle se conforme au fonctionnement général de la presse dans notre pays.
S'agissant de la formation médicale continue, je suis d'accord pour voir si le contenu de la presse médicale est sérieux, s'il informe, s'il forme, s'il suit le mouvement scientifique. Si c'est le cas, il faudra en tenir compte.
En tout état de cause, monsieur Huriet, nous ne méconnaissons pas les préoccupations de la presse.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Nous maintenons que notre amendement est neutre sur le plan financier et nous espérons que l'Assemblée nationale, après avoir fait de nouveaux calculs, nous soutiendra.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, ainsi modifié.

(L'article 7 est adopté.)
M. le président. J'informe le Sénat que la commission des affaires sociales m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur le projet de loi actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Michel Dreyfus-Schmidt.)