SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

1. Procès-verbal (p. 0 ).

Suspension et reprise de la séance (p. 1 )

2. Jugement des actes de terrorisme. - Adoption des conclusions du rapport d'une commission (p. 2 ).
Discussion générale : M. Guy Allouche, rapporteur de la commission des lois ; Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique de la proposition de loi.

Suspension et reprise de la séance (p. 3 )

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY

3. Questions d'actualité au Gouvernement (p. 4 ).

LEÇONS À TIRER DE LA GRÈVE DES ROUTIERS (p. 5 )

M. Gérard Fayolle, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

PRIVATISATION DU CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (p. 6 )

MM. Henri Weber, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

LIAISON FLUVIALE RHÔNE-RHIN (p. 7 )

MM. Jacques Rocca Serra, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

SOMMET EUROPÉEN SUR L'EMPLOI (p. 8 )

M. James Bordas, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

CRISE DE L'ÉDITION ET PROTECTION
DU DROIT D'AUTEUR (p. 9 )

M. Paul Girod, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

CONFLIT DES ROUTIERS (p. 10 )

MM. Pierre Lefebvre, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

FUSION D'AIR FRANCE ET D'AIR INTER (p. 11 )

MM. François Gerbaud, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

ÉLECTIONS PRUD'HOMALES ET FRONT NATIONAL (p. 12 )

M. Jacques Mahéas, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

PROLIFÉRATION DES NORMES (p. 13 )

MM. Jean-Paul Amoudry, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

ARRÊT DE SUPER PHÉNIX ET POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE (p. 14 )

MM. Jean Boyer, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

ALLOCATION DE RENTRÉE SCOLAIRE
ET AIDE À LA SCOLARITÉ (p. 15 )

M. Philippe Adnot, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Suspension et reprise de la séance (p. 16 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

4. Financement de la sécurité sociale pour 1998. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 17 ).

Demande de réserve (p. 18 )

Demande de réserve de l'article 1er et du rapport annexé. - M. Charles Descours, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie ; Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. - La réserve est ordonnée.

Article additionnel après l'article 1er (p. 19 )

Amendement n° 3 de la commission et sous-amendement n° 95 rectifié de M. Fischer. - M. le rapporteur, Mmes Nicole Borvo, le ministre. - Rejet du sous-amendement ; adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 2 (p. 20 )

Mmes Marie-Madeleine Dieulangard.
Amendements n°s 73 et 74 de M. Fischer. - Mme Nicole Borvo, M. le rapporteur, Mme le ministre. - Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.

Article additionnel après l'article 2 (p. 21 )

Amendement n° 30 rectifié de M. Lesein. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. - Rejet.

Articles 2 bis et 2 ter. - Adoption (p. 22 )

Article 3 (p. 23 )

MM. Roland du Luart, Mme Nicole Borvo, M. Claude Estier.
Amendements n°s 4 de la commission, 61 de M. César, 99, 98 de M. Joly, 101, 100 de M. Huriet et 50 de M. du Luart. - MM. le rapporteur, Paul Blanc, Bernard Joly, Jacques Machet, Roland du Luart, Mme le ministre, M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. - Adoption, par scrutin public, de l'amendement n° 4 supprimant l'article, les amendements n°s 61, 99, 101 98, 50 et 100 devenant sans objet.

Articles additionnels après l'article 3 (p. 24 )

Amendement n° 63 de M. César. - MM. Paul Blanc, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 31 rectifié de M. Oudin, rapporteur pour avis. - MM. Jacques Oudin, rapporteur pour avis de la commission des finances ; le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 75 de M. Fischer. - MM. Pierre Lefebvre, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Article 3 bis (p. 25 )

Amendement n° 5 de la commission et sous-amendement n° 96 de Mme Borvo. - M. le rapporteur, Mmes Nicole Borvo, le ministre. - Rejet du sous-amendement ; adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 4 (p. 26 )

Amendements identiques n°s 32 de M. Oudin, rapporteur pour avis, et 64 de M. Larcher ; amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur pour avis, Dominique Braye, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, le président de la commission. - Adoption, après une demande de priorité, de l'amendement n° 6 rédigeant l'article, les amendements n°s 32 et 64 devenant sans objet.

Article additionnel après l'article 4 (p. 27 )

Amendement n° 76 de M. Fischer. - Mme Nicole Borvo, M. le rapporteur, Mme le ministre. - Rejet.

Article 5 (p. 28 )

Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Amendements n°s 33 de M. Oudin, rapporteur pour avis, et 7 de la commission. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, le président de la commission, Roland du Luart, François Autain, Claude Huriet. - Rejet de l'amendement n° 33 ; adoption de l'amendement n° 7.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 5 (p. 29 )

Amendement n° 58 rectifié de M. Arnaud. - MM. Philippe Arnaud, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Paul Blanc. - Rejet.

Article 6 (p. 30 )

Amendement n° 8 de la commission et sous-amendement n° 102 rectifié de M. Huriet. - MM. le rapporteur, Claude Huriet, Mme le ministre. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.
Amendements n°s 77 de M. Fischer et 34 de M. Oudin, rapporteur pour avis. - MM. Pierre Lefebvre, le rapporteur pour avis, le rapporteur, Mme le ministre, MM. Philippe Marini, Alain Vasselle, le président de la commission. - Rejet des amendements n°s 77 et 34.

5. Souhaits de bienvenue à une délégation de parlementaires canadiens (p. 31 ).

6. Financement de la sécurité sociale pour 1998. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi (p. 32 ).

Article 6 (suite) (p. 33 )

Amendement n° 51 de M. du Luart. - MM. Roland du Luart, le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 6 bis. - Adoption (p. 34 )

Article 7 (p. 35 )

M. Claude Huriet, Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Amendement n° 9 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
M. le président.

Suspension et reprise de la séance (p. 36 )

PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT

Article 8 (p. 37 )

Amendements n°s 35 de M. Oudin, rapporteur pour avis, 10 de la commission et sous-amendement n° 71 rectifié de M. Vasselle ; amendement n° 78 de M. Fischer. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, Alain Vasselle, Guy Fisher, le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° 35 ; adoption du sous-amendement n° 71 rectifié et de l'amendement n° 10 modifié rédigeant l'article, l'amendement n° 78 devenant sans objet.

Article 9 (p. 38 )

Amendements identiques n°s 11 de la commission et 36 de M. Oudin, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, Mme le ministre. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Article 10 (p. 39 )

Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Amendement n° 37 rectifié bis de M. Oudin, rapporteur pour avis ; amendements identiques n°s 12 de la commission et 53 de M. Huriet. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, Claude Huriet, Mme le ministre, M. Alain Vasselle. - Retrait des amendements n°s 53 et 37 rectifié bis ; adoption de l'amendement n° 12.
Adoption de l'article modifié.

Article 11 (p. 40 )

Amendements n°s 65 de M. Ostermann, 38 de M. Oudin, rapporteur pour avis, et 13 de la commission. - MM. Paul Blanc, le rapporteur pour avis, le rapporteur, Mme le ministre. - Retrait de l'amendement n° 65 ; rejet de l'amendement n° 38 ; adoption de l'amendement n° 13.
Adoption de l'article modifié.

Articles 11 bis et 11 ter. - Adoption (p. 41 )

Article 12 (p. 42 )

Amendements identiques n°s 14 de la commission, 1 de M. Dejoie, 39 de M. Oudin, rapporteur pour avis, et 54 de M. Huriet. - MM. le rapporteur, Paul Blanc, le rapporteur pour avis, Claude Huriet, le secrétaire d'Etat, François Autain, Guy Fischer, Alain Vasselle. - Adoption des quatre amendements supprimant l'article.

Article 13 (p. 43 )

Amendement n° 57 de M. Chérioux. - MM. Jean Chérioux, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 13 (p. 44 )

Amendement n° 72 rectifié de M. Seillier. - MM. Bernard Seillier, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Paul Blanc. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 14 (p. 45 )

Amendement n° 40 rectifié de M. Oudin, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, François Autain. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Demande de réserve (p. 46 )

Demande de réserve de l'amendement n° 15 et de l'article 15. - M. le président de la commission, Mme le ministre. - La réserve est ordonnée.

Intitulé de la division avant l'article 15 (p. 47 )

Amendement n° 16 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.

Articles 16 à 18 (supprimés) (p. 48 )

Article 19 (p. 49 )

M. Gilbert Chabroux, Mme Nicole Borvo, MM. Alain Vasselle, Claude Huriet.
Amendements identiques n°s 17 de la commission, 42 de M. Oudin, rapporteur pour avis, 55 de M. Huriet et 66 de M. Gournac ; amendements n°s 79 de M. Fischer et 97 rectifié de M. Vasselle. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, Claude Huriet, Alain Gournac, Guy Fischer, Alain Vasselle, Mme le ministre, M. le président de la commission, Mmes Dinah Derycke, Nicole Borvo. - Adoption, par scrutin public, des amendements n°s 17, 42, 55 et 66 supprimant l'article, les amendements n°s 79 et 97 rectifié devenant sans objet.

Article 20 (p. 50 )

M. Gilbert Chabroux.
Amendements identiques n°s 18 de la commission, 43 de M. Oudin, rapporteur pour avis, 56 de M. Huriet et 67 de M. Braye ; amendement n° 80 de M. Fischer. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, Claude Huriet, Dominique Braye, Mmes Nicole Borvo, le ministre. - Adoption des amendements n°s 18, 43, 56 et 67 supprimant l'article, l'amendement n° 80 devenant sans objet.

Article additionnel après l'article 14 (précédemment réservé) (p. 51 )

Amendement n° 15 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 15 (précédemment réservé) (p. 52 )

Amendements n°s 104 de la commission et 41 de M. Oudin, rapporteur pour avis. - M. le rapporteur, Mme le ministre, MM. le rapporteur pour avis, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement n° 104, l'amendement n° 41 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 20 (p. 53 )

Amendement n° 59 de M. Franchis. - MM. Serge Franchis, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 68 de M. Braye. - MM. Dominique Braye, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 21 (p. 54 )

Amendement n° 19 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Guy Fischer. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 22 (p. 55 )

Amendement n° 20 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 23. - Adoption (p. 56 )

Articles additionnels après l'article 23 (p. 57 )

Amendement n° 21 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Guy Fischer. - Adoption, par scrutin public, de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 44 de M. Oudin, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Intitulé de la division avant l'article 23 bis (p. 58 )

Amendement n° 22 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.

Demande de priorité (p. 59 )

Demande de priorité de l'article. - MM. le président de la commission, le secrétaire d'Etat. - La priorité est ordonnée.

Article 23 ter ( priorité ) (p. 60 )

Mme Nicole Borvo.
Amendements n°s 46 de M. Oudin, rapporteur pour avis, et 25 de la commission. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet de l'amendement n° 46 ; adoption de l'amendement n° 25.
Adoption de l'article modifié.

Article 23 bis (p. 61 )

Amendements n°s 23 de la commission et 45 de M. Oudin, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, le secrétaire d'Etat, Claude Huriet, Guy Fischer. - Retrait de l'amendement n° 45 ; adoption de l'amendement n° 23.
Adoption de l'article modifié.

Intitulé de la division avant l'article 23 ter (p. 62 )

Amendement n° 24 de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.

Division additionnelle avant l'article 24 (p. 63 )

Amendement n° 28 de la commission. - Adoption de l'amendement insérant une division additionnelle.

Article 24. - Adoption (p. 64 )

Article 25 (p. 65 )

Mme Nicole Borvo.
Amendements n°s 52 de M. Adnot, 47 et 48 de M. Oudin, rapporteur pour avis. - MM. Philippe Adnot, le rapporteur pour avis, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet de l'amendement n° 52 ; adoption des amendements n°s 47 et 48.
Adoption de l'article modifié.

Intitulé avant l'article 26 (p. 66 )

Amendement n° 29 de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant l'intitulé.

Article 26 (p. 67 )

Amendements n°s 26 de la commission et 49 de M. Oudin, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, Mme le ministre, M. le président de la commission. - Adoption de l'amendement n° 26 ; l'amendement n° 49 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.

Article 1er (et rapport annexé)
(précédemment réservés) (p. 68 )

MM. Guy Fischer, François Autain.
Amendement n° 2 de la commission et sous-amendements n°s 81, 86, 87, 89 à 94 de Mme Borvo, 82 à 85, 88 de M. Guy Fischer et 69 rectifié bis de M. Ostermann. - MM. le rapporteur, Guy Fischer, Paul Blanc, Mmes Nicole Borvo, le ministre. - Rejet des sous-amendements n°s 81 à 93 ; adoption des sous-amendements n°s 69 rectifié bis, 94 et de l'amendement n° 2 modifié rédigeant l'article et le rapport annexé.
Renvoi de la suite de la discussion.

7. Dépôt de propositions de loi (p. 69 ).

8. Dépôt d'un rapport d'information (p. 70 ).

9. Ordre du jour (p. 71 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président

M. le président. La séance est ouverte

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
Mes chers collègues, en attendant que Mme le garde des sceaux rejoigne l'hémicycle, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures trente-cinq, est reprise à dix heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

2

JUGEMENT DES ACTES DE TERRORISME

Adoption des conclusions du rapport d'une commission

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 72, 1997-1998) de M. Guy Allouche, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sur la proposition de loi (n° 56, 1997-1998) de M. Jacques Larché, tendant à faciliter le jugement des actes de terrorisme.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Guy Allouche, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, je me trouve rapporteur au nom de la commission des lois un peu par accident. En effet, c'est mon ami Michel Dreyfus-Schmidt qui aurait dû être à ma place ; mais, indisponible pendant quelques jours, il m'a demandé de le suppléer, ce que je fais avec plaisir.
Mes chers collègues, la proposition de loi déposée par M. Jacques Larché vise à apporter une solution simple à un problème pratique, celui de méga-procès soumis aux tribunaux parisiens.
Quel est ce problème ? Quelle solution suggère M. Jacques Larché ? Que propose la commission ? Telles sont les trois questions auxquelles je voudrais répondre rapidement.
S'agissant du problème, tout d'abord, il tient - je l'ai dit et écrit - à l'existence de ce que l'on pourrait appeler les « méga-procès ».
En effet, tout particulièrement en matière de terrorisme, un procès peut conduire à mettre en présence des centaines de personnes : des victimes, fréquemment nombreuses en raison de la réitération des attentats, des accusés ou des prévenus, souvent en nombre important puisque le terrorisme est une véritable entreprise qui relève de la criminalité organisée, et des forces de l'ordre, généralement nombreuses en raison des menaces d'attentats à l'occasion de tels procès, ou, tout simplement, pour escorter les accusés.
Or, le palais de justice de Paris ne dispose pas d'une salle d'audience permettant de recevoir des centaines de personnes dans de bonnes conditions de sécurité.
On pourrait certes imaginer d'aménager ce bâtiment afin de remédier à cet inconvénient. Mais ce serait une mesure onéreuse qui se heurterait, en tout état de cause, au classement du palais de justice de Paris comme monument historique.
On pourrait également imaginer de tenir une audience foraine dans un grand bâtiment tel que Bercy ou le Parc des Princes. Mais imagine-t-on que ces locaux soient occupés pendant des mois, puisqu'il s'agit, par hypothèse, de longs procès ?
On pourrait également imaginer un renvoi à une autre juridiction, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice. Mais cela aurait pour conséquence de dessaisir les magistrats parisiens et serait donc contradictoire avec le souci de centraliser les procès terroristes à Paris.
Il convient donc de chercher une solution plus satisfaisante.
La solution proposée par M. Larché tend à permettre au président de la cour d'appel de Paris de décider, à titre exceptionnel, que l'audience de la juridiction de jugement - tribunal correctionnel, cour d'assises ou cour d'appel - se tiendra dans un autre lieu du ressort de la cour d'appel et non au palais de justice de Paris.
Il s'agit donc d'un dépaysement ; mais, à la différence de ce qui existe aujourd'hui, celui-ci concerne non seulement l'affaire elle-même, mais aussi la juridiction. Ainsi, les magistrats parisiens seraient appelés à juger un procès hors de la capitale et donc à se déplacer.
La décision de délocalisation prendrait la forme d'une ordonnance prise sur les réquisitions du procureur général après avis des chefs des juridictions intéressées. Elle constituerait une simple mesure d'organisation judiciaire et ne serait donc pas susceptible de recours.
Quelles sont donc les conclusions de la commission ?
La commission des lois a approuvé ce dispositif qui présente les avantages de la simplicité, du moindre coût et du respect de notre patrimoine culturel.
Elle lui a cependant apporté deux modifications qui ne remettent d'ailleurs aucunement en cause l'architecture générale du texte initial de M. Larché.
La première d'entre elles consiste à prévoir que la délocalisation sera prononcée après avis du bâtonnier afin que le premier président de la cour d'appel soit pleinement informé des conséquences que sa décision pourrait avoir pour l'organisation de la défense ; par « défense », nous entendons viser non seulement les personnes poursuivies, mais aussi les victimes.
La seconde modification a pour objet de bien marquer le caractère exceptionnel de la délocalisation.
A cette fin, nous avons précisé que celle-ci ne pourrait intervenir que pour des motifs de sécurité.
Je précise que cette notion de sécurité doit être entendue dans son acception large : il s'agit non seulement de la sécurité de l'ordre public, mais aussi de la sécurité matérielle des participants. Ainsi, la délocalisation sera possible si le palais de justice de Paris ne dispose tout simplement pas d'une salle ayant une capacité suffisante pour accueillir tous les participants sans risque d'accident.
Voilà, monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, brièvement présenté, le dispositif que la commission des lois vous propose d'adopter. (Applaudissements. )
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier M. Jacques Larché d'avoir déposé cette proposition de loi tendant à faciliter le jugement des crimes et des délits en matière de terrorisme.
En effet, cette proposition de loi répond à un impérieux besoin de la juridiction parisienne, qui va bientôt se trouver confrontée à une difficulté d'ordre pratique considérable, puisqu'elle sera matériellement hors d'état de juger un certain nombre d'affaires en matière de terrorisme, en raison du nombre important de prévenus ou d'accusés.
Il en sera notamment ainsi pour une affaire correctionnelle d'association de malfaiteurs de nature terroriste qui devrait passer en jugement dans quelques mois et qui nécessitera la comparution d'un nombre important de personnes, prévenus, victimes, témoins, experts, sans compter les escortes et le personnel de sécurité.
La tenue de tels procès soulève d'importantes difficultés tant pour trouver des salles d'audiences susceptibles d'accueillir un nombre aussi élevé de personnes que pour garantir la sécurité de ces dernières.
On aurait pu se poser la question de savoir s'il fallait vraiment aménager des locaux spéciaux et si tous les prévenus devaient comparaître ensemble. Mais il résulte de l'analyse du Parquet et des juges d'instruction que le procès en cause fait un tout et qu'il importe de le traiter comme tel.
Les études réalisées ont permis de montrer que l'organisation de tels procès nécessite des locaux d'une superficie au moins égale à 1 000 mètres carrés. Le palais de justice de Paris ne comporte pas de salles aussi vastes et il ne peut être transformé, compte tenu du fait qu'il est classé monument historique.
Face à ces difficultés pratiques, l'arsenal juridique existant n'est d'aucun secours. En effet, le code de l'organisation judiciaire permet bien la tenue d'audiences foraines - vous y avez fait allusion, monsieur le rapporteur - mais à l'intérieur du ressort géographique de la juridiction parisienne. Or, si le ministère de la justice dispose précisément de locaux qui permettraient la tenue de ces grands procès, ces locaux sont situés en dehors du ressort du tribunal de grande instance de Paris.
Il faut donc adopter un nouveau texte de loi pour régler ce problème. C'est la raison pour laquelle je suis totalement favorable aux dispositions proposées qui, dans les affaires de terrorisme, permettront au premier président de la cour d'appel de Paris de faire siéger, à titre exceptionnel, la cour d'assises et le tribunal correctionnel en dehors des limites de la ville de Paris ; mais dans les limites du ressort de la cour d'appel de Paris, et ce afin de respecter la compétence territoriale du premier président.
Cette proposition de loi a été sensiblement améliorée sur l'initiative de M. Dreyfus-Schmidt, initialement désigné comme rapporteur de ce texte, et de M. Allouche, qui a repris cette fonction en raison de l'hospitalisation de M. Dreyfus-Schmidt.
Je voudrais remercier l'un et l'autre pour leur travail. J'ajoute que je suis heureuse de constater queM. Dreyfus-Schmidt, aujourd'hui rétabli, siège à nouveau dans votre assemblée.
La première amélioration apportée par la commission consiste à préciser que la délocalisation du procès ne pourra être décidée qu'après avoir pris l'avis du bâtonnier de l'ordre des avocats de Paris, ce qui me paraît être, au regard des droits de la défense, une excellente précision.
La seconde amélioration vise à indiquer que cette délocalisation interviendra pour des « motifs de sécurité », ce qui précise très clairement les objectifs de la réforme.
Je vous demande donc, mesdames, messieurs les sénateurs, d'adopter cette proposition de loi dans la version qui vous est proposée par la commission des lois.
Qu'il s'agisse d'une proposition de loi émanant du Sénat marque, à mes yeux, le sentiment d'unanimité qui nous anime face au fléau du terrorisme. Nous envoyons ainsi un message empreint de détermination à la représentation nationale, et le gouvernement y est sensible. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Il est inséré, après l'article 706-17 du code de procédure pénale, un article 706-17-1 ainsi rédigé :
« Art. 706-17-1. - Pour le jugement des délits et des crimes entrant dans le champ d'application de l'article 706-16, le premier président de la cour d'appel de Paris peut, sur les réquisitions du procureur général, après avis des chefs de tribunaux de grande instance intéressés, du bâtonnier de Paris et, le cas échéant, du président de la cour d'assises de Paris, décider que l'audience du tribunal correctionnel, de la chambre des appels correctionnels de Paris ou de la cour d'assises de Paris se tiendra, à titre exceptionnel et pour des motifs de sécurité, dans tout autre lieu du ressort de la cour d'appel que celui où ces juridictions tiennent habituellement leurs audiences.
« L'ordonnance prise en application du précédent alinéa est portée à la connaissance des tribunaux intéressés par les soins du procureur général. Elle constitue une mesure d'administration judiciaire qui n'est pas susceptible de recours. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les conclusions du rapport de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi n° 56 (1997-1998).

(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. René Monory.)

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY

M. le président. La séance est reprise.

3

QUESTIONS D'ACTUALITÉ
AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Je tiens à remercier M. le Premier ministre de sa présence.

LEÇONS À TIRER DE LA GRÈVE DES ROUTIERS

M. le président. La parole est à M. Fayolle.
M. Gérard Fayolle. Ma question s'adresse à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice.
Madame le ministre, je voudrais appeler votre attention sur la grève des routiers, qui a récemment pris fin. Il convient en effet que soient tirées les leçons de ce type de manifestation.
Il n'est pas question de dénoncer la légitimité des revendications de la profession concernée. Il faut, en revanche, évoquer les entraves que de semblables mouvements causent à un principe tout aussi fondamental que le droit de grève, celui de la liberté de circulation des personnes, inscrit à l'article V du préambule de la Constitution et dont l'Etat est le garant. Il faut encore souligner les atteintes que de telles manifestations portent à la liberté du travail et, par voie de conséquence, à l'emploi.
S'agissant de la liberté de manifestation, l'Etat assume ses responsabilités. Il prend les mesures susceptibles de garantir l'ordre public et la liberté d'aller et de venir de nos concitoyens. Or, quand il s'agit d'un blocage routier, à l'occasion duquel 153 barrages se dressent, paralysent une bonne part de notre vie économique, notamment les petites entreprises de notre pays - je vous assure, madame le ministre, que cela a été le cas en Périgord - et occasionne des perturbations, parfois graves, dans la vie quotidienne des Français, l'Etat semble impuissant à faire respecter le droit.
Cette attitude paraît d'autant plus incompréhensible que c'est l'Etat, c'est-à-dire les contribuables, qui devra indemniser, au titre de la loi de 1983, les dommages résultant de ce type d'entraves.
Par surcroît, l'Etat ne devrait-il pas répondre favorablement aux demandes de nos partenaires européens en prévoyant des itinéraires de contournement, qui lui éviteraient les indemnisations ultérieures, supportées une fois de plus par nos concitoyens ?
Le Gouvernement entend légiférer sur la profession de transporteur routier. N'est-ce pas l'occasion, madame le ministre, qu'il rappelle avec force les principes que je viens d'évoquer ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. René-Pierre Signé. Le gouvernement que vous souteniez fut moins habile !
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur, la meilleure façon d'assurer la liberté de circulation, c'était justement de faire en sorte que le conflit prenne fin.
Un sénateur socialiste. Eh oui !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Et il a pris fin, cette fois-ci, après cinq jours. C'est beaucoup, mais c'est moins que les douze jours de la précédente grève. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Josselin de Rohan. Justement, vous étiez avertis !
M. René-Pierre Signé. Vous nous avez donné des leçons !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. La position du Gouvernement a consisté à favoriser ce qui est primordial, à savoir le dialogue entre les partenaires sociaux, et également à prendre les mesures qui relèvent de sa compétence afin d'assurer les conditions d'exercice de la profession.
C'est ainsi, je le rappelle, qu'un décret a été pris dès le vendredi 6 novembre et qu'un projet de loi a été examiné par le conseil des ministres lundi dernier, justement pour améliorer les conditions d'exercice de la profession de transporteur routier et faire en sorte que les accords conclus et la réglementation soient effectivement respectés.
Vous avez raison d'affirmer que le droit de grève s'exerce et qu'il est garanti par la Constitution, de même d'ailleurs que la liberté de circulation. Je crois précisément que la législation en vigueur est tout à fait adaptée à la conciliation de ces deux droits constitutionnels.
J'avais moi-même mis en place, à la Chancellerie, une cellule d'urgence, afin d'être tenue en permanence informée de l'évolution de la situation et d'être en mesure, à tout moment, de donner aux procureurs généraux, si cela s'imposait, des directives générales permettant d'avoir la même attitude sur l'ensemble du territoire.
Je crois, monsieur le sénateur, que la détermination du Gouvernement et le sens des responsabilités des partenaires sociaux nous ont permis de faire face à ce conflit avec, encore une fois, le souci de maintenir un équilibre entre ces deux droits constitutionnels que sont le droit de grève et la liberté de circulation. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

PRIVATISATION DU CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL

M. le président. La parole est à M. Weber.
M. Henri Weber. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le ministre, je voudrais vous faire part des préoccupations des personnels du Crédit industriel et commercial, le CIC, entreprise dont la privatisation est imminente, et plus particulièrement des 900 salariés du Crédit industriel de Normandie, filiale régionale du CIC et établissement cher à mon coeur.
M. Josselin de Rohan. Et le Lyonnais ?
M. Henri Weber. Le Lyonnais, c'est en grande partie votre affaire ! (Exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste. - Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Alain Gournac. Et Bernard Tapie ?
M. Henri Weber. Avec ses quatre-vingt-dix agences et ses huit sous-directions régionales, le Crédit industriel de Normandie, comme les autres banques qui forment le CIC, est une banque régionale réellement décentralisée. Sa connaissance intime de l'économie locale, de son tissu, de ses acteurs, de ses réseaux en fait un atout précieux de l'activité économique.
Le Gouvernement a obtenu, en juillet dernier, un accord de la Commission européenne sur le plan de 20 milliards de francs décidé par votre prédécesseur et par Alain Juppé au profit du GAN, dont le CIC est une filiale.
Pour des raisons industrielles et stratégiques, vous avez choisi de ne pas remettre en question les engagements de privatisation du CIC et du GAN.
Dans un contexte où les offres publiques d'achat hostiles, ou plus au moins amicales, ont tendance à se multiplier - on le voit aujourd'hui avec l'offre lancée par le groupe italien Generali sur AGF - dans un contexte où les entreprises de notre secteur bancaire et financier se révèlent être assez vulnérables face à des prédateurs qui peuvent mobiliser facilement 50 milliards de francs et plus pour faire leurs emplettes sur le marché français des entreprises, ma question est la suivante, monsieur le ministre : quelles garanties pouvez-vous donner que la privatisation que vous allez engager respectera l'intérêt patrimonial de l'Etat, celui de l'entreprise CIC et de ses salariés, et celui des régions et de leurs acteurs économiques, qui ont un besoin impérieux de banques de proximité ? (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Weber, chacun connaît ici l'attachement que vous avez pour le Crédit industriel de Normandie. Je comprends donc que cette question, qui se veut générale, fasse néanmoins référence à l'un des beaux établissements de ce groupe. (Exclamations sur les travées du RPR.)
Depuis sa formation, le Gouvernement a mis la compétitivité de notre secteur financier au coeur de ses préoccupations.
C'est en effet un secteur qui connaît de profonds bouleversements liés à ce que l'on appelle la « globalisation » de l'économie, liés aussi au fait que, dans peu de temps maintenant, l'Europe va se doter d'une monnaie unique.
Tout cela est l'origine d'un grand phénomène de concentration, qui touche - vous l'avez visé tout à l'heure sans le nommer - le secteur de l'assurance, mais aussi le secteur bancaire.
Il convient donc que les établissements français soient capables de faire face, eux aussi, à une telle concentration, qui les rendra plus forts et donc plus pérennes.
C'est avant tout pour ces raisons d'« industrie bancaire », si vous me permettez cette expression, qu'il convient de mener à bien l'opération concernant le CIC.
En outre, vous l'avez dit, des engagements ont été pris par la précédente majorité avec la Commission de Bruxelles, et nous entendons les respecter.
Comment mènerons-nous cette opération ?
D'abord par la méthode du dialogue.
Après la tentative de l'année dernière, dont je pense que, sur tous les bancs de cette assemblée, on voudra bien reconnaître qu'elle s'est soldée par un échec assez lamentable, il nous a en effet semblé que le dialogue avec l'ensemble des partenaires était la condition primordiale d'une opération réussie.
Il s'agit d'un dialogue avec les organisations syndicales, que mes services ont rencontrées plusieurs fois, avec les présidents des groupes et les dirigeants de chacune des banques régionales, avec les maires des villes dans lesquelles ces entités sont installées - je les ai moi-même reçus à déjeuner il y a quelques jours (Exclamations ironiques sur les travées du RPR.) - et, enfin, d'un dialogue avec le Parlement, que nous engageons dès aujourd'hui grâce à votre question, monsieur Weber.
Pour illustrer les modalités de ce dialogue sans entrer dans les détails, le cahier des charges, qui sera officiel à la fin du mois de novembre, a été transmis hier aux comités d'entreprise du GAN et du CIC, ce qui est une procédure complètement nouvelle, afin que ceux-ci fassent part de leurs remarques et que le Gouvernement en tienne compte, le cas échéant, dans ce cahier des charges.
C'est un exemple, mais il y en a d'autres, de la volonté du Gouvernement de mener cette action en concertation très étroite avec les salariés et les syndicats, les dirigeants du groupe, en un mot avec toutes les entités concernées.
S'ajoute au dialogue la volonté de faire de cette opération une réussite à la fois industrielle, financière et sociale.
Pour y parvenir, trois conditions sont nécessaires.
La première, c'est de garantir l'unité, la cohésion du groupe, auxquelles chacun est attaché, et son ancrage régional. Il faut donc que soit assurée la localisation des sièges des banques régionales dans les villes où ils sont installés, sans que le rachat ou l'association à une autre banque soit une manière de délocaliser ces sièges. De la même manière, nous envisageons que le capital des banques régionales s'ouvre à l'épargne régionale - cela sera inscrit dans le cahier des charges - et, par conséquent, que leur caractère de banques de proximité soit renforcé.
La deuxième condition m'amène à évoquer le volet social qui accompagne l'opération et qui est très développé. Les choses sont claires pour chacun : demain, une fois que le Crédit industriel et commercial sera dans le secteur privé, il ne faut pas que s'exerce une concurrence trop étroite avec un quelconque autre réseau, ce qui aurait comme conséquence de voir des deux côtés de la rue, dans une même ville, s'instaurer une concurrence mal venue.
J'en viens à la troisième et dernière condition, à laquelle le Gouvernement tient : les liens de banque-assurance entre le GAN et le CIC doivent demeurer afin de renforcer l'activité du Crédit industriel et commercial.
Tels sont les principaux éléments d'une opération qui va se dérouler sur plusieurs mois. Je suis convaincu que nous obtiendrons, à terme, un grand réseau français à vocation internationale, respectant la politique sociale qui a été celle du CIC jusqu'à maintenant et qui doit se poursuivre, tout en conservant ce qui constitue sans doute la caractéristique la plus heureuse de ce groupe, à savoir la mise en exergue de son caractère régional et d'une bancarisation qui est très proche des entreprises et des citoyens, et qui sera, j'en suis sûr, renforcée quand, vers les mois de mars ou d'avril, nous en aurons terminé avec cette grande opération. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

LIAISON FLUVIALE RHÔNE-RHIN

M. le président. La parole est à M. Jacques Rocca Serra.
M. Jacques Rocca Serra. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre - je suis donc très heureux qu'il soit présent dans l'hémicycle aujourd'hui - et concerne la liaison fluviale Rhône-Rhin. (Ah ! sur les travées du RPR.)
Monsieur le Premier ministre, je ne reviendrai pas sur l'intérêt stratégique, économique, touristique, écologique, comme pour le domaine de l'emploi, qu'il y a à achever le canal à grand gabarit Rhône-Rhin.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas vrai !
M. Jacques Rocca Serra. Cette liaison Nord-Sud est capitale pour notre pays. Après le voeu exprimé par tous les présidents de la Ve République, sans exception, la représentation nationale l'avait bien compris puisque, avec le consensus de tous les groupes parlementaires, elle avait décidé, dans la loi du 4 février 1995 sur l'aménagement du territoire, l'achèvement et le financement de cette liaison.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas vrai !
M. Jacques Rocca Serra. Cette décision avait été prise après une longue réflexion inspirée, en particulier, par l'exemple de la liaison Rhin-Main-Danube, qui organise, depuis 1992, toute l'Europe fluviale de Rotterdam à Constanza, isolant la France, et notamment son premier port - Marseille - des grands flux européens. La liaison Rhône-Rhin aurait permis, en outre, d'oxygéner l'Arc latin, à partir duquel la France pouvait conforter sa politique méditerranéenne.
Monsieur le Premier ministre, dans votre déclaration de politique générale, vous avez, brutalement et sans aucune concertation, annoncé l'abandon de ce projet.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'était avant les élections !
M. Jacques Rocca Serra. Le 1er novembre dernier, le Journal officiel publiait le décret abrogeant la déclaration d'utilité publique de la liaison Saône-Rhin, remettant ainsi définitivement en question ce projet et, par conséquent, la parole de l'Etat et la volonté du Parlement.
De surcroît, un engagement pris par la France au niveau européen était renié.
Mais le plus grave, outre l'absence de concertation et le mépris dans lequel fut tenu le Parlement, c'est bien le manquement à la parole de l'Etat.
Il n'est pas bon pour la démocratie que la parole de l'Etat, clairement exprimée selon les procédures légitimes de nos institutions,...
M. René-Pierre Signé. C'est la politique !
M. Jacques Rocca Serra. ... puisse être remise en cause à chaque changement de majorité. Elle ne peut être sujette à caution ni à réinterprétation permanente au gré des bouleversements politiques.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cinquante milliards de francs !
M. Jacques Rocca Serra. Monsieur le Premier ministre, j'en appelle aux responsabilités d'Etat...
M. René-Pierre Signé. On a voté, et vous avez été battus !
M. Jacques Rocca Serra. ... dont vous vous prévalez et que vous entendez pleinement assumer, pour vous demander de revenir sur votre décision (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Mesdames, messieurs les sénateurs, comme cela a été dit l'abandon du projet du canal à grand gabarit Rhin-Rhône a été décidé au terme d'une réflexion collective menée non seulement au cours de la campagne des élections législatives, qui a donné les résultats que vous savez (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes. Exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants.), mais également au cours des réflexions qui, tout au long de ces dernières années, n'ont pas manqué.
Les questions qui ont été posées sur ce projet n'émanaient pas uniquement d'un côté de l'échiquier politique. J'ai rencontré beaucoup de personnalités et d'élus de votre bord, monsieur le sénateur, qui étaient également sensibles à ce problème et qui estimaient nécessaire de chercher d'autres solutions.
Il est vrai que ce projet a été déclaré d'utilité publique en 1978 et que, par une loi de 1980, la Compagnie nationale du Rhône a été chargée de sa réalisation. Si rien n'a été entrepris depuis, c'est parce que, au fur et à mesure, réflexions et interrogations sur l'efficacité et l'utilité de ce projet n'ont pas manqué.
Du point de vue des transports, tout d'abord, la sous-utilisation des capacités actuelles du Rhône et de la Saône ne pouvait donner à penser que l'addition d'un nouveau maillon allait accroître le trafic dans des proportions en rapport avec l'investissement réalisé.
Il s'agit là d'un élément d'ordre économique, mais il ne faut pas oublier non plus l'aspect écologique du problème. (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Il faut intégrer cette dimension. En effet, ce projet, vieux de plus de vingt ans, se révélait plus destructeur que créateur dans ce domaine.
Enfin, sous l'angle économique, il est apparu que les ressources affectées à la réalisation de cet ouvrage - là encore, cette appréciation n'émane pas que d'un côté de l'échiquier politique - pouvaient être déployées en faveur d'autres usages prioritaires et qu'elles auraient un meilleur impact sur l'emploi et le développement économique du pays et des régions concernées.
Ainsi, les réflexions engagées sur le TGV Rhin-Rhône montrent bien le souci du Gouvernement de mieux relier le bassin rhodanien et le bassin rhénan, qu'il s'agisse du trafic voyageurs ou du trafic marchandises, du fait des capacités libérées sur le réseau existant par la réalisation d'infrastructures nouvelles.
Le Gouvernement ne méconnaît pas non plus l'intérêt du transport fluvial. Ainsi, j'ai engagé récemment une concertation sur le choix des fuseaux pour ce qui concerne la future liaison Seine-Nord, ainsi que des études pour la liaison Seine-Est.
Dans le même temps, les dotations budgétaires affectées à la voie d'eau en 1998 vont progresser de 23 %. Elles profiteront notamment à l'axe rhodanien, où la voie d'eau a peu progressé en matière de trafic des marchandises.
Enfin, je tiens à souligner, parce que la question a été quelquefois évoquée, que, pour la desserte terrestre du port de Marseille, qui est en effet notre premier port de Méditerranée, les initiatives prises dans le domaine ferroviaire ont, de ce point de vue, un grand intérêt.
Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, l'objectif d'une politique de transport plus équilibrée et efficace, respectueuse de l'environnement, ayant le souci du développement économique et social du pays, est au coeur de nos préoccupations. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)

SOMMET EUROPÉEN SUR L'EMPLOI

M. le président. La parole est à M. Bordas.
M. James Bordas. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.
Lors du sommet qui s'est tenu à Amsterdam au mois de juin dernier, le Gouvernement a justifié la signature du pacte de stabilité par la promesse d'un rééquilibrage social de l'Union économique et monétaire.
Le 29 octobre, devant la commission des affaires étrangères du Sénat, le ministre a lui-même rappelé que la France appuyait la mise en place de « critères de convergence sociaux ».
Qu'en est-il aujourd'hui, à quelques jours du sommet européen extraordinaire sur l'emploi prévu pour jeudi et vendredi prochains ?
Au-delà d'un optimiste de façade, il semble que le Gouvernement ait dû revoir ses objectifs à la baisse.
L'objectif des trente-cinq heures est considéré comme un « poison pour l'emploi » par le commissaire européen chargé de l'industrie et n'a obtenu le soutien ni du parlement de Strasbourg, ni de nos partenaires, hormis l'Italie.
M. Paul Loridant. Et alors ?
M. James Bordas. Les objectifs chiffrés sur la réduction du chômage en Europe ont laissé place à de simples tendances sur lesquelles les ministres des finances et des affaires sociales ont tenté de s'entendre la semaine dernière à Bruxelles.
Enfin, les propositions de la Commission européenne suscitent des réserves parmi les Etats membres qui craignent de prendre des décisions coûteuses et de susciter de faux espoirs.
N'existe-t-il pas un risque que les négociations sombrent dans une diversité qui serait une excuse pour ne rien faire, comme ce fut en partie le cas pour le traité d'Amsterdam ?
Ce sommet européen a été initié par la France. Nous craignons, pour notre part, que le Gouvernement reste sur une position de principe isolée et sans résultat concret.
Rien n'est pire que de bercer l'opinion d'illusions en fixant des objectifs intenables. Cela nourrit l'europessimisme et la défiance des citoyens envers leurs élus.
Nous reconnaissons avec vous que l'Union européenne doit passer aux actes vis-à-vis de ses dix-huit millions de chômeurs.
Je souhaite donc connaître, au nom du groupe des Républicains et Indépendants, les mesures concrètes, c'est-à-dire contraignantes, sur lesquelles le Gouvernement entend engager sa responsabilité et sa crédibilité lors du sommet extraordinaire sur l'emploi de la semaine prochaine. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le sénateur, je voudrais tout d'abord vous rassurer. Je me réjouis de la tenue à Amsterdam, les 20 et 21 novembre, de ce sommet sur l'emploi, dont l'annonce à l'époque, a été accueillie avec scepticisme.
Je rappelle, comme vous l'avez d'ailleurs fait, que l'initiative de ce sommet revient largement à la France et, plus précisément, au Premier ministre, alors nouvellement nommé, qui a effectivement obtenu, alors que nous arrivions à cette table européenne, qu'un sommet sur l'emploi puisse avoir lieu.
Ainsi que la France l'a dit dès l'abord, comme l'a indiqué ensuite M. Jean-Claude Juncker, le président en exercice du conseil des ministres de l'économie et des finances de l'Union européenne, il n'était pas question que ce sommet débouche sur des lieux communs du style : « le chômage est bien triste ; les chômeurs sont trop nombreux en Europe ; nous allons "fournir nos meilleurs efforts" - comme on dit dans le langage diplomatique - pour faire en sorte que le chômage diminue ».
Nous voulons tous faire en sorte - la Commission tout d'abord, qui a déposé un document accepté le 1er octobre, M. Juncker, le Premier ministre, l'ensemble des ministres du gouvernement français et nos collègues européens - pour que ce sommet des 20 et 21 novembre soit une première étape importante vers l'Europe sociale que nos concitoyens attendent. Je suis totalement d'accord avec vous pour dire - c'est d'ailleurs la ligne que tient le Gouvernement - qu'il nous faut avancer comme nous l'avons fait en matière monétaire et financière.
M. Charles Descours. En marche arrière !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. En marche arrière, je ne pense pas. Quand l'euro circulera, nous verrons le résultat qu'il aura sur nos économies. En tout cas, nous devons être dans le domaine social capables de nous fixer des objectifs, y compris des objectifs quantifiés, en termes de créations d'emplois, de places faites aux jeunes, aux chômeurs de longue durée, aux femmes, en termes de réduction du coût du travail, etc.
Je dois dire que, jour après jour - Dominique Strauss-Kahn peut le vérifier comme moi - ce « stress de convergence sociale », comme dit le président Juncker, avance dans le bon sens.
En tout cas, monsieur le sénateur, je peux vous dire que la France n'a jamais considéré que les trente-cinq heures devaient être un des éléments clefs de ce sommet des 20 et 21 novembre. (Ah ! sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
En revanche, la Commission a considéré qu'il était de bonne pratique européenne de travailler ensemble sur la réduction de la durée du travail, chaque pays utilisant au mieux sa culture sociale pour avancer vers la réduction de la durée du travail propre à créer des emplois et à réorganiser le travail.
C'est autour de ce thème que nous travaillons autour d'objectifs quantifiés dans des domaines qui permettent d'avancer vers une réduction du chômage global, mais aussi du chômage des catégories les plus touchées. Les moyens financiers de la banque européenne d'investissement, notamment, seront mis en perspective avec les problèmes d'emplois.
Une négociation sociale européenne importante est relancée. Dans le domaine des transports, nous aurions été heureux, ces jours derniers, qu'une grande négociation ait lieu au niveau européen.
Pour en revenir à la durée du travail, je peux vous dire que la France n'est pas isolée. Aujourd'hui, notre durée réelle de travail se situe à la moyenne de celle de nos principaux concurrents et non pas au plus bas, comme vous semblez le penser.
L'Italie s'engage vers les trente-cinq heures, l'Autriche vers les trente-quatre heures, les Pays-Bas sont déjà engagés vers les trente-cinq heures, et je dois dire que même le gouvernement espagnol a demandé, lors de réunions, que soit abaissé le seuil des heures supplémentaires en Europe.
Je le répète, la France n'est pas isolée, mais elle essaie de faire en sorte, comme vous le souhaitez, je le pense, comme nous le souhaitons tous, que l'Europe soit au plus proche de nos concitoyens et leur apporte ce qu'ils attendent depuis de nombreuses années. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

CRISE DE L'ÉDITION
ET PROTECTION DU DROIT D'AUTEUR

M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Ma question s'adressait à Mme le ministre de la culture, mais je comprends fort bien les raisons de son absence aujourd'hui. Cette question est plutôt liée à l'actualité, même si elle porte sur un problème de fond.
Aujourd'hui se tient à Hanoï la semaine de la francophonie, manifestation majeure de l'expression française et, par conséquent, de sa littérature.
Hier, ou ces tout derniers jours, ont été attribués nos grands prix littéraires, et le nombre des oeuvres témoigne de la grande vitalité de nos auteurs.
A travers tout le territoire se sont multipliées les initiatives en faveur de la lecture. L'exemple du département que j'ai l'honneur de représenter ici, où une bourgade de 185 habitants attire entre 10 000 et 15 000 personnes autour d'une journée centrée sur le livre, témoigne par son succès de l'appétit de nos concitoyens.
Et pourtant...
Les grands écrivains sont, paraît-il, des martyrs qui ne meurent pas. A tout le moins le seront-ils tant que vivra l'édition.
Or, l'édition est en crise, née d'une crise de civilisation sûrement, d'une crise de culture, mais aussi des menaces qui pèsent sur l'idée même du droit d'auteur.
Trop longtemps, le cadre de la propriété intellectuelle a ignoré l'essor et le renouvellement des techniques de diffusion, ce qui entraîne l'obsolescence de la défense collective initiée dans cette enceinte par Victor Hugo.
Il importe, dès lors, de renforcer la protection des droits fondamentaux reconnus aux auteurs depuis 1793 par le droit français.
Or le droit d'auteur, tel qu'il est conçu en France, n'a cessé d'être mis en péril sur le plan patrimonial, mais aussi sur le plan moral. Comment notre société pourrait-elle se priver de l'édition d'ouvrages de qualité en ne protégeant pas complètement ceux qui en sont les auteurs ? Comment ne pourrait-elle pas voir dans la diffusion parcellisée de leur pensée une atteinte à leur droit moral ?
Il faut bien reconnaître que la photocopie et d'autres techniques plus récentes mettent en cause le contrôle des violations de ce droit. La loi du 3 janvier 1995, qui a été adoptée, me semble-t-il, à une assez large majorité, a arrêté le principe de la gestion collective du droit de reproduction par la reprographie ainsi que celui de la cession automatique du droit de reproduction à des sociétés de perception et de répartition ayant reçu l'agrément du ministre de la culture.
Si la gestion collective s'est imposée pour renforcer la notion de défense collective, encore faut-il se donner l'ambition et les moyens de la mettre en oeuvre. Or force est de constater que le droit peine à rattraper la technique.
La crise de l'édition française trouvera sa solution dans la stricte application de la loi de 1995 : la photocopie, forme technique du plagiat moderne, mais aussi le prêt anarchique tuent le livre. C'est cette mort silencieuse que perçoivent les auteurs et les éditeurs.
Comme toujours dans notre pays, la solution est à portée de main : dans l'application rigoureuse de la loi.
La question que je veux poser au Gouvernement est donc la suivante : à une époque où l'on parle beaucoup de la réalité de la vie intellectuelle en France, aura-t-il le courage d'aller jusqu'au bout des décisions que le législateur a prises ?
Fera-t-il en outre de la Haute Assemblée, qui a toujours été au coeur de la défense de notre littérature, le haut lieu de cette entreprise ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur, le Gouvernement fait une priorité de la défense et de la promotion du livre et de l'écrit en général. Ces actions passent d'abord par l'enseignement ainsi que par le réseau des librairies et celui des bibliothèques, mais aussi par les nouvelles technologies. Bien entendu, celles-ci doivent venir s'ajouter au livre et à la presse, non les supplanter. Elles doivent être conçues comme une chance supplémentaire, non comme une façon de remplacer le support traditionnel qu'est le livre.
Il est essentiel de protéger et de soutenir la création. L'Etat continuera donc à apporter son aide aux auteurs et aux éditeurs, particulièrement dans des disciplines telles que les sciences humaines ou la poésie, où les livres se vendent un peu plus difficilement.
Le système du droit d'auteur doit être protégé car ce droit constitue une ressource indispensable au renouvellement de la création. Sur ce point, la position du Gouvernement a été clairement et fermement définie par Mme la ministre de la culture et de la communication dans la présentation de la politique du livre et de la culture qu'elle a faite au conseil des ministres du 8 octobre dernier.
Pour remédier aux méfaits économiques et intellectuels de ce que l'on appelle le « photocopillage », l'application de la loi du 3 janvier 1995 sera résolument poursuivie.
Quant à la question du droit de prêt, elle fait se confronter deux soucis également légitimes : d'une part, celui des créateurs de voir respecter leurs droits et, d'autre part, celui des professionnels des bibliothèques, attentifs à ce que ne soit pas remis en cause l'essor de la lecture publique.
Le Gouvernement a décidé d'aborder cette question de façon sereine et méthodique, de susciter une large concertation et de lancer une mission de réflexion, de médiation et de conciliation associant tous les professionnels concernés.
Vous avez évoqué Victor Hugo, monsieur le sénateur. La France peut en effet être fière de se trouver à l'origine de l'idée même de droit d'auteur. Notre pays défend aujourd'hui, face aux conceptions anglo-saxonnes, une idée originale et élevée de ce droit, qui vise à préserver le droit moral de l'auteur.
Fidèle à sa tradition, notre pays saura concilier droit de la création et liberté d'accès au savoir. (Applaudissements sur les travées socialistes. - M. Paul Girod applaudit également.)

CONFLIT DES ROUTIERS

M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre des transports, de l'équipement et du logement. (Rires et exclamations sur les travées du RPR.)
M. René-Pierre Signé. Ça se passe en famille ! (Sourires.)
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le ministre, la semaine dernière a été marquée par un nouveau conflit des routiers, ces forçats de la route qui subissent des conditions d'exploitation d'une rare dureté de la part d'un patronat particulièrement rétrograde.
M. Alain Gournac. C'est le goulag !
M. Pierre Lefebvre. Les Français ont marqué leur soutien aux grévistes, car ils approuvent la justesse de leurs revendications.
Cette lutte, porteuse de progrès et de justice sociale, a mis une nouvelle fois en évidence la situation de non-droit dans laquelle cette profession est installée depuis des dizaines d'années.
En effet, les conditions de travail sont déplorables : horaires dépassant souvent les 250 heures mensuelles ; feuilles de paie tournant autour du SMIC, saupoudrées de primes aléatoires ; absence d'un dialogue social permettant le respect des engagements pris ; concurrence sauvage plaçant les PME et les artisans, souvent sous-traitants des grands groupes, en grande difficulté économique. De telles conditions ne peuvent que créer une grande tension dans la profession.
L'accord signé vendredi dernier constitue selon vous, monsieur le ministre, une avancée indiscutable, et nous partageons cette opinion.
M. Alain Gournac. Ce n'est pas l'avis de la CGT !
M. Jean-Pierre Schosteck. Ni de M. Blondel !
M. Pierre Lefebvre. Cependant, comment allez-vous garantir les augmentations immédiates qui sont prévues et celles, plus importantes, qui devraient intervenir en l'an 2000, ainsi que la mensualisation des revenus, alors que vous indiquez vous-même que « le secteur a pris un tel retard qu'il faut vraiment poursuivre les efforts pour supprimer tout dumping économique et social » ?
Quelle réponse peut être apportée, monsieur le ministre, à l'amertume des chauffeurs qui, cette fois encore, constatent le maintien du SMIC comme salaire de départ dans la profession et l'absence d'avancée réelle quant à la prime de 3 000 francs promise en 1996, qui, bien souvent, aujourd'hui encore, n'est pas versée ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est scandaleux !
M. Pierre Lefebvre. Enfin, et peut-être est-ce là l'écueil principal, l'ouverture totale de nos frontières au 1er juillet prochain, qui risque fort de déboucher sur une déréglementation poussée des transports routiers en Europe, ne risque-t-elle pas de rendre obsolètes les décisions que le gouvernement français commence à vouloir prendre ?
M. Dominique Braye. A vouloir prendre !
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le ministre, comptez-vous contrecarrer cette offensive du libéralisme le plus sauvage en poussant les feux d'une harmonisation sociale nécessaire pour tous, salariés et usagers de la route ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Josselin de Rohan. Au camarade Gayssot ! (Sourires sur les travées du RPR.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, ce conflit opposait avant tout des patrons et des salariés à propos des salaires. Il n'impliquait donc pas directement le Gouvernement.
Néanmoins, bien entendu, avant, pendant et après le conflit, le Gouvernement - M. le Premier ministre et moi-même nous sommes exprimés à plusieurs reprises à ce sujet, ainsi que d'autres membres du Gouvernement - a tout fait pour que les discussions s'engagent et pour que les négociations entre l'ensemble des intéressés puissent se dérouler normalement, de sorte que le conflit connaisse une issue positive dans des délais relativement courts par rapport à ce que nous avons vécu voilà environ un an. (Exclamations sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. René-Pierre Signé. Eh oui !
M. Josselin de Rohan. Ne vous en glorifiez pas, ce n'est pas fini !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. En vérité, les problèmes que l'on rencontre dans cette profession ne touchent pas que la rémunération des salariés. En fait, c'est toute l'organisation économique du secteur qui exige que des réflexions soient menées et des avancées réalisées. Comment pourrait-il en être autrement, s'agissant d'une profession qui a nécessairement devant elle des perspectives de développement : tout concourt à nous montrer que, demain, les besoins d'échanges iront croissant et que les moyens d'y répondre s'amélioreront.
M. Emmanuel Hamel. Rhin-Rhône !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Or la situation qui prévaut actuellement dans le secteur des transports ne permet malheureusement pas de profiter pleinement de ces perspectives positives.
Cela étant, des avancées significatives peuvent d'ores et déjà être enregistrées.
Tout d'abord, les salaires vont augmenter de 3 % à 6 % ; il est vrai que l'on part de très bas et que le niveau des rémunérations demeure un problème. L'augmentation interviendra avec un effet rétroactif à compter du 1er octobre, ce qui entraînera le doublement de l'augmentation sur la feuille de paie de novembre.
Par ailleurs, une augmentation de 15,8 % à 21,8 % est prévue d'ici à l'an 2000.
Surtout, s'agissant de la structure même de la rémunération, est ouverte dans la convention collective la possibilité d'instaurer un salaire professionnel mensuel garanti, qui n'existait pas auparavant.
Je crois donc que l'on peut effectivement parler d'avancées sociales.
Bien sûr, comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, l'amertume subsiste chez les routiers, étant donné ce qu'ils ont vécu et vivent encore. Ils ont en effet le sentiment que les engagements qui ont pu être pris dans le passé n'ont pas été tenus.
Eh bien, ce gouvernement - et M. le Premier ministre l'a dit dernièrement avec force devant l'Assemblée nationale - est et sera celui de la parole donnée. (Exclamations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Alain Gournac. Et Vilvorde ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Oui, cette parole, nous la respecterons, nous, contrairement à ce que d'autres ont fait par le passé. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
Comment la respecterons-nous ?
M. le président. Monsieur le ministre, je me permets de vous inviter à conclure, car vous parlez maintenant depuis trois minutes et demie.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je terminerai donc en indiquant que le Gouvernement tiendra ses engagements à travers le projet de loi que le conseil des ministres vient d'adopter, à travers des dispositions réglementaires, et aussi à travers les propositions qu'il présentera à nos partenaires en vue d'une harmonisation à l'échelon européen. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)

FUSION D'AIR FRANCE ET D'AIR INTER

M. le président. La parole est à M. Gerbaud.
M. François Gerbaud. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Plusieurs sénateurs du RPR. Quel succès !
M. François Gerbaud. Je vous invite, monsieur le ministre, sauvé des eaux et des inconvénients de la route, à monter au ciel. Rassurez-vous, je parle du ciel des transports aériens ! (Sourires.)
Aujourd'hui et demain, le syndicat national des pilotes de ligne appelle l'ensemble des pilotes et mécaniciens navigants d'Air France à cesser le travail.
Les raisons comme les effets de cette grève ne sont pas forcément perceptibles pour le grand public. En effet, une fois n'est pas coutume, cette grève n'a pas pris tous les usagers du ciel en otage.
Toutefois, le mouvement d'aujourd'hui témoigne d'un malaise persistant au sein de l'ex-Air Inter et de revendications qui appellent quelques réflexions, puis une question.
La fusion est désormais acquise et irréversible. Toute opération de fusion, chacun le sait, comporte un certain nombre de difficultés. Il semblerait qu'à Air Inter les conditions d'une fusion sans heurts ne soient pas remplies.
Notamment, les personnels d'Air Inter ne se voient pas confirmés à des postes de responsabilité que leur grade, leur expérience et leur technicité devraient justifier. De surcroît, il semble qu'ils soient bien souvent, en l'absence de concertation, mis face à des changements importants dans les méthodes de travail ; c'est précisément le cas des personnels navigants.
Par exemple, en ce qui concerne la formation des pilotes, ces derniers s'étonnent des changements fondamentaux intervenus dans les méthodes de travail dans les cockpits et dans la documentation avion : chacun d'eux reçoit, pour toute instruction, une cassette vidéo de vingt minutes à étudier chez soi sur son magnétoscope !
Autre exemple : pour la rédaction du compte rendu mécanique, que tout pilote doit rédiger après chaque vol, on est revenu, contre toute logique de modernisation, à l'ère du papier carbone ! A Air Inter, depuis quinze ans, ces documents étaient apparemment traités par informatique.
Monsieur le ministre, Air Inter doit-il, oui ou non, rester l'outil d'aménagement du territoire qu'il a toujours été ? Cette vocation ne semble pas aujourd'hui confirmée : des escales et des lignes ont été abandonnées - Toulouse, Nantes, Paris-Perpignan - au profit d'autres compagnies, notamment étrangères, désormais très présentes dans le ciel français du fait de la déréglementation.
Doit-on en conclure que la réorganisation des missions de desserte domestique de l'ex-Air Inter est conçue dans le seul but d'alimenter le très important hub Air France de Roissy et qu'il y aurait un relâchement dans les missions court-courrier de l'ex-Air Inter ?
Il ne faudrait pas, monsieur le ministre, qu'Air France, pénalisée par sa non-privatisation annoncée, privée des alliances dont elle a besoin, sacrifie à sa vocation d'un transport aérien exclusivement intercontinental les missions de desserte domestique et d'aménagement du territoire.
Comment entendez-vous, avec le pragmatisme que l'on vous connaît et reconnaît, aider aux exigences d'une fusion harmonieuse ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, vous avez raison : lorsqu'il y a malaise, il faut étudier les moyens de le dissiper, notamment en contribuant à l'établissement du dialogue social.
Trop longtemps, hélas ! ce souci n'a pas prévalu chez ceux qui gouvernaient la France, et c'est pourquoi sont advenues les difficultés que vous avez évoquées. (Exclamations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Un sénateur du RPR. Et qu'en pense M. Christian Blanc ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je tenais à faire ce rappel. Vous voyez ce à quoi je fais allusion. Il n'est point besoin de m'étendre davantage sur ce sujet. En tout cas, les Français ont choisi.
J'en viens au problème précis que vous avez soulevé. Tout d'abord, je tiens à rappeler que le départ de M. Christian Blanc était dû au fait que nous ne voulions pas privatiser Air France. Le Gouvernement souhaitait laisser cette compagnie dans le secteur public en lui accordant toutefois quelques ouvertures sur lesquelles je reviendrai. La nomination, à la tête d'Air France, de M. Spinetta, qui est un ancien président-directeur général d'Air Inter, a été, vous le savez, plutôt bien accueillie par le personnel.
Cela dit, vous avez posé une question très pertinente : la taille d'Air France, qui est aujourd'hui devenue la huitième compagnie au monde et qui est la première au plan national depuis sa fusion avec Air Inter, lui permettra-t-elle de se développer non seulement sur l'axe intercontinental, grâce au hub que vous avez évoqué à juste titre, mais également sur l'axe domestique, c'est-à-dire sur les liaisons intérieures et européennes ?
Je puis vous rassurer sur ce point, monsieur le sénateur. La lettre de mission que Dominique Strauss-Kahn et moi-même avons adressée au président d'Air France va d'ailleurs tout à fait dans ce sens. Ainsi, l'effort en matière de politique commerciale et l'optimisation de l'outil de production, notamment grâce au hub, devront être poursuivis. Il devra également être veillé au renforcement de la qualité et de l'efficacité du réseau domestique, ce qui répond aux questions que vous avez soulevées, monsieur le sénateur.
Bien entendu, monsieur Gerbaud, - mais je suppose que vous partagez mon point de vue à cet égard - il n'appartient pas à l'Etat d'administrer une entreprise qui, certes, fait partie du secteur public mais qui doit bénéficier d'une autonomie de gestion. Loin de moi l'idée de vouloir étatiser quoi que ce soit (Ah ! sur les travées du RPR et de l'Union centriste), et j'espère que telle n'est pas non plus votre intention !
L'abandon des lignes que vous avez évoqué, notamment celle de Perpignan, a été décidé - je ne me souviens pas de la date précise - par le précédent gouvernement.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Enfin, le Gouvernement a pris l'engagement, dès le début, de ne pas remettre en cause les alliances potentielles à la fois avec des compagnies américaines, s'il le faut, ou avec des compagnies européennes. Au contraire, nous ferons tout pour que Air France, qui reste dans le secteur public, non seulement se maintienne mais aussi se développe et rayonne aux échelons international et national. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)

ÉLECTIONS PRUD'HOMALES ET FRONT NATIONAL

M. le président. La parole est à M. Mahéas,
M. Jacques Mahéas. Ma question s'adresse à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.
Les élections des représentants des salariés et des employeurs dans les conseils de prud'hommes vont se dérouler le 10 décembre prochain. Il est utile de rappeler ici l'importance de ces élections prud'homales et le rôle irremplaçable de cette juridiction paritaire, qui règle les litiges du travail entre les salariés et les employeurs. Cette originalité française doit être défendue et préservée. Aussi peut-on se réjouir que 15 554 358 personnes, soit 5 % de plus qu'en 1992, se soient inscrites cette année sur les listes électorales.
Mais nous pouvons aussi avoir des motifs d'inquiétude. Dans une quarantaine de départements, des listes se présentent sous le sigle CFNT dans le collège « salariés ». Il s'agit, en fait, de la Confédération française nationale des travailleurs, succédané du Front national.
Le Front national n'en est pas à son coup d'essai. Dans mon département, la Seine-Saint-Denis, le portrait de M. Le Pen, décagoulé, est utilisé dans la propagande officielle de la FNEML pour les élections à la chambre de commerce et d'industrie qui se déroulent lundi prochain.
La tactique paraît différente pour les élections prud'homales.
M. Alain Vasselle. Qui a ouvert la voie au Front national ?
M. Jacques Mahéas. Ainsi que l'ont déjà dénoncé les organisations syndicales, le Front national entend introduire un débat politique dans une instance chargée de juger les litiges du travail.
Cette dérive et cette politisation des prud'hommes sont dangereuses pour notre démocratie, et les révélations du journal Libération, ce matin, sur l'existence d'un véritable réseau de l'ombre, à savoir le département protection-sécurité, témoignent, une fois encore, des activités en marge de notre démocratie de ce groupe extrémiste.
M. Philippe François. Grâce au soutien socialiste ! (Protestations sur les travées socialistes.)
M. René-Pierre Signé. Qui négocie avec eux ?
M. Jacques Mahéas. Comme par hasard, c'est un socialiste qui dénonce effectivement la présence du Front national à ces élections prud'homales ; ce n'est pas vous ! (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Madame la ministre, ma question est très simple : que compte faire le Gouvernement pour assurer les garanties d'impartialité, d'équité et d'égalité de tous, indispensables au bon fonctionnement des conseils de prud'hommes ? (Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le sénateur, ainsi que vous l'avez rappelé, le 10 décembre prochain auront lieu, comme tous les cinq ans, les élections aux conseils de prud'hommes : l'ensemble des employeurs et des salariés de France, ainsi que les chômeurs, seront invités à élire leurs représentants. Vous avez souligné l'originalité de cette institution, qui est, en Europe, le seul tribunal - si je puis dire - paritaire à juger les litiges issus du code du travail. (Murmures sur les travées du RPR.)
Je rappelais simplement ce que sont les conseils de prud'hommes.
M. Dominique Braye. Nous les connaissons, merci !
M. Alain Gournac. Ne nous faites pas la leçon, madame le professeur ! (Rires sur les travées du RPR.)
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je ne souhaite nullement vous donner de leçons.
Si je rappelais cette originalité, monsieur le sénateur, c'était pour expliquer à quel point les préoccupations exprimées par M. Mahéas étaient importantes. En effet, pour cette institution, constituée par des organisations patronales et syndicales représentatives, il est très inquiétant, comme nous venons de le constater par le biais d'informations en provenance des préfectures, de voir qu'effectivement, dans une quarantaine de départements, des listes appartiennent non pas à ces organisations représentatives mais, à l'évidence, à une organisation proche d'un parti politique dont les valeurs, les idées et les pratiques ont bien peu de points communs avec les élections prud'homales et la défense du droit du travail dans notre pays. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Il est vrai, monsieur le sénateur, que l'élection de telles listes ferait courir un risque grave...
M. Dominique Braye. Alors, interdisez-les !
Un sénateur du RPR. Interdisez le Front national !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. ... au bon fonctionnement de ces instances, car chaque salarié a droit à un jugement équitable, sans prise en considération de son origine, de sa nationalité ou de sa religion. Or, justement, ces listes insistent sur la qualité particulière des salariés qu'ils entendent défendre.
Cette situation nous préoccupe, et je pensais que nous pouvions tous nous rejoindre sur ce sujet.
M. Dominique Braye. Nous n'avons pas, comme vous, soixante-seize députés élus grâce aux voix du Front national, madame le ministre !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. J'ai donc constaté, avec regret, que le précédent gouvernement, qui avait été, comme nous, informé par des organisations syndicales de ce risque, n'ait pas, dans les délais, c'est-à-dire avant le dépôt des listes, procédé à la modification législative qui s'imposait.
M. Josselin de Rohan. Mais vous pouviez le faire !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Non, je ne le pouvais pas, monsieur le sénateur, parce qu'il était trop tard. Des délais sont prévus pour les dépôts de listes. Nous avons consulté le Conseil d'Etat à ce sujet ; nous avons même essayé de prendre un décret. Mais nous avons été impuissants.
Un sénateur du RPR. Faites-le pour la prochaine fois !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Nous le ferons pour la prochaine fois. Dès le mois de janvier, nous modifierons la loi ; mais je regrette que le précédent gouvernement, qui aujourd'hui proteste par vos voix contre la présentation de telles listes, lesquelles ne représentent en rien les intérêts des employeurs et des salariés, n'ait rien fait pour empêcher leur dépôt.
M. Dominique Braye. Soixante-seize socialistes élus avec les voix de Le Pen !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le risque existait bien et il était tout à fait possible d'intervenir. Je tiens à souligner, par ailleurs, que les listes comportant des irrégularités ont fait l'objet de contestations. Ce cas s'est déjà produit dans cinq départements. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

PROLIFÉRATION DES NORMES

M. le président. La parole est à M. Amoudry.
M. Jean-Paul Amoudry. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Je voudrais me faire l'interprète de nombreux maires et responsables de petites et moyennes entreprises aujourd'hui confrontés à l'application de normes qui apparaissent et se renouvellent à un rythme toujours plus soutenu.
Dans les domaines les plus divers, les élus locaux reçoivent des injonctions les mettant dans l'obligation d'exécuter ces normes, dont ils doivent trop souvent déplorer l'instabilité et le coût exorbitant. A peine une collectivité s'est-elle conformée à une règle, qu'apparaît une nouvelle norme ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.) Quant aux investissements rendus nécessaires par cette évolution, c'est peu dire qu'ils sont considérables.
Permettez-moi d'illustrer mon propos par quelques exemples.
On évoque aujourd'hui l'adoption prochaine d'une directive qui réduirait la teneur en plomb de l'eau potable. Le coût de mise en oeuvre pour la France de cette seule mesure est approximativement estimé à 120 milliards de francs, dont 90 % pour le remplacement des canalisations privatives.
Autre exemple, l'entrée en vigueur, en juin dernier, du décret du 18 décembre 1996, relatif aux normes de sécurité applicables aux aires de jeux pour enfants (Exclamations sur certaines travées du RPR), est lourd de conséquences financières pour les communes.
Ainsi, le montant des investissements nécessaires pour respecter les prescriptions de ce texte, qui prévoit en particulier la mise en place immédiate de signalétiques spécifiques sur l'ensemble des installations de jeux, amène nombre d'élus à envisager de retirer les équipements concernés par cette réglementation.
A l'heure actuelle, les maires attendent avec inquiétude la parution d'un décret devant définir de nouvelles normes en matière de restauration scolaire ; ils craignent, en raison des investissements que nécessitera cette réglementation, d'être conduits à fermer leurs cantines municipales et à faire appel à des sociétés spécialisées.
J'ajouterai quelques exemples issus du secteur privé.
Les responsables de petites et moyennes entreprises industrielles et artisanales, engagés dans des programmes de mise aux normes, constatent parfois qu'entre le début des travaux et la mise en exploitation des équipements la réglementation a changé.
Je citerai un autre exemple dans le domaine agricole. Les exploitants agricoles, dont l'activité repose, par exemple, sur des productions fermières, doivent souvent, après deux décennies d'investissements réalisés pour améliorer la qualité alimentaire de leurs produits, se soumettre encore à de nouvelles normes. On observe que chaque semestre - ce sera encore le cas le 1er janvier prochain - voit arriver son lot de coûteuses exigences.
Loin de moi, monsieur le Premier ministre, l'idée de remettre en question les impératifs de sécurité en matière tant d'alimentaire que d'activités collectives : la sécurité doit demeurer, pour les collectivités comme pour les entreprises, la priorité. Loin de moi aussi l'idée que nos entreprises ne seraient pas aptes à assumer les nécessaires mutations que leur impose l'évolution de notre société.
Mais est-il possible, est-il même réaliste de chercher à atteindre en toute chose le « risque zéro » ? Sommes-nous bien conscients que nous risquons pour cela non seulement de faire disparaître des richesses de nos terroirs, mais aussi et surtout de mettre en péril nombre d'entreprises qui constituent, pour notre pays, le plus précieux et et plus irremplaçable tissu économique ?
Sommes-nous, enfin, conscients que nombre de nos collectivités vont se trouver dans l'impossibilité de faire face à tant et tant de contraintes ?
L'heure n'est-elle donc pas venue, pour le Gouvernement, d'appréhender globalement cette question et de se livrer à une évaluation préalable de ce vaste processus normatif ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, vous avez soulevé un vaste problème que tous les élus locaux et nombre de professionnels connaissent. Les normes européennes élaborées par le Comité européen de normalisation visent à permettre une harmonisation des normes nationales sur le territoire de l'Union européenne et doivent être reprises en France par l'Association française de normalisation, l'AFNOR. En outre, d'autres normes peuvent être fixées par des directives de la Commission européenne ou du Conseil.
L'application des normes n'est pas toujours obligatoire. En principe, celles du Comité européen de normalisation ne le sont pas. C'est dans des cas particuliers que des normes peuvent être rendues obligatoires par les autorités publiques afin de garantir notamment la sécurité, à laquelle vous n'êtes pas insensible, avez-vous dit, monsieur le sénateur, lors de l'utilisation de certains équipements, que l'utilisateur soit public ou privé.
Ainsi, je le rappelle, deux décrets ont été pris en 1996, sur l'initiative des pouvoirs publics, dans le secteur des équipements sportifs et des aires collectives de jeux, auxquelles vous avez fait allusion, monsieur le sénateur, afin d'assurer la sécurité des jeunes utilisateurs. Ces réglementations nouvelles concernent directement les collectivités locales et leur imposent un certain nombre d'obligations qui peuvent paraître, dans un premier temps, assez lourdes sur le plan financier. Vous avez également cité l'exemple d'une directive européenne récente tendant à obliger le remplacement de certaines canalisations, le montant des travaux ayant été estimé à 120 milliards de francs sur quinze ans.
M. Christian Bonnet. Comme le Crédit Lyonnais !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Vous avez cité aussi la directive sur les fromages au lait cru, qui s'applique à des entreprises agricoles et artisanales. On pourrait citer encore la directive sur lesabattoirs, etc.
Toutes ces réglementations, il faut bien le constater, ont pour objet de formaliser des exigences de sécurité ou d'entretien régulier qui incombent à tout responsable ou organisme mettant des équipements à la disposition du public.
En réalité, vous avez dit être sensible aux exigences de sécurité. Vous vous êtes demandé si l'on pouvait poursuivre l'objectif du « risque zéro ». Donc, vous avez conclu implicitement qu'il convenait de trouver un juste chemin.
Je tiens à vous dire que ces textes permettent tout de même d'éviter un certain nombre d'accidents causés par le défaut d'entretien dont la responsabilité est, vous le savez, toujours imputée par les tribunaux au propriétaire de l'équipement.
Lors de l'élaboration des textes pris dans le cadre de l'article L. 221-3 du code de la consommation, à savoir des décrets en Conseil d'Etat fixant des exigences de sécurité, les pouvoirs publics consultent toujours largement les parties intéressées, notamment les associations d'élus concernées. Par ailleurs, pour l'élaboration des normes françaises, l'AFNOR fait également appel à toutes les parties concernées pour constituer des commissions de normalisation.
Un certain nombre de responsables de services travaillant sur les équipements d'aires de jeux, les équipements sportifs ou les équipements dits de proximité participent actuellement à ces commissions.
Cette consultation est-elle satisfaisante ? On peut se poser la question. Les associations d'élus peuvent prendre contact avec l'AFNOR pour solliciter une participation plus active aux différentes commissions de normalisation qui les concernent. L'Etat a signé en 1996 un contrat d'objectifs avec l'AFNOR, qui prévoit en particulier la recherche de l'amélioration de la participation des collectivités locales au processus normatif.
Reste que tout cela coûte cher, vous l'avez dit, monsieur le sénateur, et, sur ces travées, nombreux sont ceux qui en sont parfaitement conscients.
C'est pourquoi j'ai décidé de confier à l'inspection générale de l'administration, en liaison avec la direction générale des collectivités locales, une mission en vue d'un recensement et d'une évaluation des contraintes qu'impose aux collectivités locales la mise en oeuvre des normes. Ces travaux, qui débuteront prochainement, seront bien évidemment conduits avec les associations d'élus locaux.
M. le Premier ministre a chargé Mme Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, et moi-même de procéder à une étude sur les problèmes posés par l'application de la législation et des normes en matière de politique de l'eau.
Tous ces coûts supplémentaires, souvent élevés, peuvent être allégés, dans une certaine mesure, par la mise en place de subventions nationales : mise en sécurité des écoles, élimination de l'amiante dans les établissements scolaires notamment. Cependant, M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ne me contredira pas, ces subventions ne peuvent être généralisées. (Sourires sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) Les marges financières de l'Etat sont réduites.
MM. Jean Chérioux et Charles Descours. Celles des collectivités locales aussi !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. La multiplication des subventions spécifiques se heurterait au principe de la globalisation des subventions et de la dotation globale d'équipement.
Il est donc nécessaire d'arriver à trois choses.
Tout d'abord, il faut une évaluation globale des conséquences des normes nouvelles ; comme je l'ai montré, nous nous y attachons. Ensuite, il faut peut-être une plus grande vigilance des pouvoirs publics quant aux normes qui sont décidées à Bruxelles. Je tiens d'ailleurs à souligner que les assemblées, qui sont consultées par le canal des délégations compétentes, peuvent également se manifester. Enfin, il faut respecter une saine progressivité dans l'application de ces normes, de façon non seulement à les rendre compatibles avec la pression fiscale, mais également à tenir compte d'autres priorités, telles que l'investissement nécessaire des collectivités locales dans le domaine de l'emploi. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

ARRÊT DE SUPER PHÉNIX ET POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.
M. Jean Boyer. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Au début de cette semaine, dans un entretien à un grand quotidien régional, vous vous êtes à nouveau félicité, monsieur le Premier ministre, de votre méthode de travail, en soulignant notamment que votre gouvernement « écoute avant de décider ».
M. Jacques Mahéas. Eh oui !
M. Jean Boyer. L'arrêt de Super Phénix, dans mon département de l'Isère, est, hélas ! la preuve du contraire. Six mille emplois directs et indirects sont menacés dans toute la région.
Cette décision a été prise sans aucun débat organisé au Parlement, sans aucune visite de responsables ministériels pour dialoguer avec les élus et les forces vives sur le terrain. Et vous voudriez que nous ayons foi en vos propos sur la concertation ?
En dépit des appels constants des salariés de la centrale de Creys-Malville et des représentants des activités économiques locales, en dépit de l'opposition des collectivités territoriales - conseil régional de la région Rhône-Alpes, conseil général de l'Isère, parmi lesquels les représentants de votre camp - ...
M. René-Pierre Signé. Son président M. Carignon !
M. Charles Descours. Cela n'a rien à voir !
M. Jean Boyer. ... en dépit des prises de position hostiles de la majorité des sénateurs et des recommandations du groupe des Républicains et Indépendants dans son rapport aux termes duquel l'option la plus sage serait de laisser « brûler » les deux coeurs du réacteur existants et - j'y insiste - déjà payés, vous préférez satisfaire les exigences des Verts et de Mme Voynet.
M. Josselin de Rohan. Voilà !
M. Jean Boyer. Ma question est triple.
Tout d'abord, quels sont les axes sur lesquels vous travaillez pour la reconversion du site, et s'agira-t-il, comme le cabinet de Mme Voynet l'a indiqué, de transformer Creys-Malville en une centrale thermique à gaz ?
Ensuite, si l'arrêt de Super Phénix est confirmé le 15 décembre prochain, à la suite du rapport de M. Jean-Pierre Aubert, où seront transférées les recherches sur les déchets radioactifs prévues dans ce réacteur et dont les résultats sont attendus par le Parlement en 2006 ?
Enfin, accepterez-vous l'organisation d'un débat au Parlement sur l'avenir de la politique énergétique de la France ? Nous le souhaitons, alors que M. le secrétaire d'Etat à l'industrie confirme l'engagement de notre pays dans la filière électronucléaire et que, pour la « frange dure » des organisations écologistes, arrêter Super Phénix est le premier pas pour « sortir du nucléaire ». (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Avant de répondre au point précis que vous avez évoqué dans votre question, monsieur le sénateur, je voudrais noter que, lorsqu'une majorité a un programme, que les électeurs l'approuvent et qu'elle le met en oeuvre, il est tout de même délicat de dire qu'elle ne tient compte de l'avis de personne. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
Mme Anne Heinis. Ce n'est pas cela la démocratie !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Vous êtes un élu, comme nous tous ici, et vous n'êtes pas de ceux qui souhaitez que, lorsqu'une proposition a été présentée aux électeurs et qu'ils l'ont approuvée, on ne la mette pas en oeuvre.
M. Gérard Fayolle. Vilvorde !
M. René-Pierre Signé. Ils n'ont pas encore intégré leur défaite !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Néanmoins, vous avez raison : dans les modalités de mise en oeuvre, il convient de consulter. Telle est la raison pour laquelle, comme vous le rappeliez vous-même, ce rapport a été confié à M. Jean-Pierre Aubert, qui contacte beaucoup de monde : des salariés, des dirigeants d'Electricité de France ou d'autres sociétés impliquées dans ce domaine, des élus de la région, et je pense d'ailleurs que vous avez dû le rencontrer, monsieur le sénateur. M. Jean Boyer. Pas encore !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Dans ces conditions, vous ne pouvez pas dire, me semble-t-il, que la consultation, la méthode que vous attribuiez gentiment au Premier ministre n'est pas mise en oeuvre.
Venons-en au fond. Lors de sa déclaration de politique générale, au mois de juin, M. le Premier ministre a annoncé que le Gouvernement entendait en effet arrêter l'exploitation de Super Phénix.
A cela, il y a de nombreuses raisons. La principale est que l'électricité produite par ce réacteur est, à l'évidence, hors de coût par rapport aux normes internationales.
A l'origine, sans doute, quand on pensait qu'il pourrait y avoir une pénurie de combustible un jour, le calcul n'était pas idiot. Aujourd'hui, on s'aperçoit que cette tension est très loin d'exister. Au contraire, le prix de l'uranium est plutôt décroissant, et l'on voit bien, par conséquent, que la capacité de Super Phénix à produire de l'électricité de façon compétitive est hors de toute perspective temporelle raisonnable. Il a donc été décidé d'arrêter Super Phénix.
Si j'insiste sur ce point, c'est pour bien faire remarquer à votre assemblée que ce ne sont pas des raisons de sûreté ou des craintes quant à la surêté qui conduiraient à vouloir arrêter Super Phénix, c'est simplement le fait que, aujourd'hui, cette filière à neutrons rapides n'a pas d'avenir commercial raisonnable.
Bien entendu, l'arrêt technique suppose que des études assez approfondies soient réalisées sur ce que deviendront les coeurs.
M. Charles Descours. Et le rapport Curien ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'en dirai un mot dans un instant, monsieur le sénateur.
Cela suppose aussi que de telles études soient réalisées sur les aspects juridiques - ils sont complexes - sur les aspects financiers et sur la reconversion, que vous avez bien entendu évoquée.
La première remarque que je voudrais faire, c'est que tout cela n'entraînera pas de coût pour EDF, car l'arrêt de Super Phénix a été depuis longtemps provisionné dans les comptes de l'entreprise.
Ma deuxième remarque, c'est que beaucoup reste à faire en matière de reconversion, et vous comprendrez donc que le Gouvernement attende que le missionnaire qu'il a mandaté rende son rapport pour faire des propositions. Cela étant, nous sommes bien conscients du fait que l'arrêt de Super Phénix pose, à l'évidence, des problèmes dans le nord de l'Isère, et que des efforts sont à fournir en matière de réindustrialisation.
Ma troisième remarque, c'est que l'un des objectifs était, grâce à Super Phénix - et c'est le rapport Curien - de brûler un certain nombre d'actinides et, par là même, de faire partie de l'éventail des méthodes prévues par la loi du 30 décembre 1991. Celle-ci, comme vous le savez, a prévu, d'un côté, la création de laboratoires souterrains, de l'autre, du stockage. Elle a prévu aussi la transmutation par des réacteurs à neutrons rapides.
Je pense que la recherche doit être poursuivie dans cette filière. Le Gouvernement fera donc sans doute des propositions pour que cela soit possible en dehors de Superphénix.
Enfin, l'engagement de la France en matière d'électronucléaire n'est, à l'évidence, en rien remis en cause, par l'abandon d'une filière dont tout donne aujourd'hui à croire qu'elle n'apporte pas les résultats commerciaux que l'on pouvait espérer.
Notre engagement est tel que, aujourd'hui, 80 % de l'électricité française est produite par la filière électronucléaire. C'est sans doute une très bonne chose, à la fois pour la compétitivité de nos entreprises, car cela permet de leur fournir de l'électricité peu chère, et pour les particuliers. C'est également une très bonne chose parce que, comme vous le savez, nous sommes, en Europe et hors de l'Europe, le pays qui, par tonne d'énergie produite, diffuse dans l'atmosphère le moins de CO2 et donc de carbone, soit 1,8 tonne par Français contre 5,4 tonnes en Allemagne et encore davantage aux Etats-Unis. (Merci ! sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Je suppose que ces remerciements qui émanent de vos travées s'adressent non pas à mes commentaires, mais au fait que la France soit dotée de cette politique électronucléaire. Celle-ci a été partagée par tous les gouvernements depuis plusieurs décennies et je me réjouis qu'elle continue à recueillir votre assentiment. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

ALLOCATION DE RENTRÉE SCOLAIRE
ET AIDE À LA SCOLARITÉ

M. le président. La parole est à M. Adnot.
M. Philippe Adnot. Ma question s'adresse à Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.
Madame le ministre, cette question est d'actualité dans la mesure où chacun se rend bien compte, à travers l'examen des différents textes, que les besoins dans le domaine social sont considérables et que les crédits sont difficiles à mobiliser. Il est donc particulièrement important que chacun des acteurs veille à ce que ces crédits soient parfaitement utilisés.
J'attire donc votre attention, madame le ministre, sur les difficultés d'interprétation des textes relatifs au versement de l'allocation de rentrée scolaire et de l'aide à la scolarité.
Ces difficultés d'interprétation conduisent à ce que, en l'état actuel, les parents dont l'enfant est confié à l'aide sociale à l'enfance perçoivent l'allocation de rentrée scolaire et l'aide à la scolarité alors qu'ils ne participent à aucun frais de ce type, dans la mesure où ces derniers sont pris en charge par le service départemental d'aide à l'enfance.
En effet, les textes qui régissent les conditions dans lesquelles sont transférées au service de l'aide sociale à l'enfance les différentes allocations - décret de 1986 et circulaire de 1978 - sont antérieurs aux dispositions de la loi du 6 juillet 1990 qui a instauré l'allocation de rentrée scolaire et de la loi du 25 juillet 1994 instituant l'aide à la scolarité.
Je rappelle que cette aide, mise en place depuis la rentrée scolaire 1994-1995, s'est substituée, à compter de cette période, aux bourses nationales versées par l'éducation nationale pour les enfants qui fréquentent un collège.
Or, s'il est parfaitement normal que la famille d'un enfant confié à l'aide sociale à l'enfance mais qui conserve avec lui des liens affectifs puisse conserver des droits aux prestations familiales, par exemple à l'allocation logement, en vue de faciliter son retour au foyer, il est en revanche difficilement compréhensible que les parents perçoivent l'allocation de rentrée scolaire et l'aide à la scolarité dans la mesure où ils ne participent ni aux frais de rentrée scolaire ni aux frais de cantine.
Je souligne, en outre, que le placement de l'enfant n'est pas toujours déterminé par des difficultés financières et qu'il est, hélas ! trop souvent motivé par des raisons relevant de maltraitance ou de sévices.
L'acuité des problèmes sociaux justifie que les crédits qui leur sont consacrés servent effectivement à la couverture de besoins réels.
Je vous demande donc, madame le ministre, quelles mesures vous entendez mettre en oeuvre pour remédier à cette situation, qui me paraît anormale. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le sénateur, vous posez là une vraie question : les dépenses en matière d'aide sociale sont en effet suffisamment importantes dans notre pays pour que les crédits qui y sont affectés par l'Etat ou par les conseils généraux soient utilisés avec parcimonie, et en tout cas à bon escient.
Comme vous l'avez rappelé, la règle est que, lorsque l'enfant est placé, les allocations familiales sont versées à l'organisme auprès duquel il est placé. Seule une demande du président du conseil général ou de la juridiction peut permettre de verser ces allocations aux familles, lorsqu'il s'agit, par exemple, de préserver un lien moral, de permettre à la famille d'apporter une aide à l'enfant ou encore de prévoir le retour effectif de l'enfant au foyer.
S'agissant de l'allocation de rentrée scolaire, créée en 1990, ou de l'aide à la scolarité, créée en 1994, ces règles n'ont pas été étendues.
Je considère comme vous qu'il n'est pas toujours justifié que deux règles différentes s'appliquent, l'une pour les allocations familiales, l'autre pour les autres prestations. Nous devrons étudier ce sujet à l'occasion de la refonte de la politique familiale à laquelle le Gouvernement s'est engagé et que nous allons initier dans quelques jours.
Cette refonte dépassera largement les seules allocations familiales et concernera l'ensemble des problèmes de la famille. En effet, nous en avons parlé plusieurs fois devant le Sénat, il existe des familles de toutes natures : certaines sont recomposées, d'autres ont laissé se distendre les liens avec leurs enfants.
Il s'agit donc effectivement de l'un des problèmes que nous devrons examiner, ainsi que vous l'avez souligné. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Avant d'aborder le point suivant de l'ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Jean Faure.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

4

FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
POUR 1998

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (n° 70, 1997-1998). [Rapport n° 73 (1997-1998) et avis n° 79 (1997-1998).]
Je rappelle au Sénat que la discussion générale a été close hier.
Nous passons à la discussion des articles.

TITRE Ier

ORIENTATIONS ET OBJECTIFS
DE LA POLITIQUE DE SANTÉ
ET DE SÉCURITÉ SOCIALE

Demande de réserve



M. Charles Descours,
rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme je l'ai indiqué cette nuit, à la fin de la séance, je demande la réserve de l'article 1er jusqu'après l'examen de l'article 26 : le rapport qui est annexé à cet article 1er sera en effet affecté par les décisions que nous allons être amenés à prendre au cours de la discussion du présent projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Favorable.
M. le président. La réserve est ordonnée.

Article additionnel après l'article 1er



M. le président.
Par amendement n° 3, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Avant le dépôt du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport analysant la situation des régimes spéciaux de sécurité sociale et leurs évolutions prévisibles au cours des dix prochaines années. »
Cet amendement est assorti de deux sous-amendements.
Le sous-amendement n° 70, présenté par M. Blanc, tend à compléter le texte proposé par l'amendement n° 3 pour insérer un article additionnel après l'article 1er par une phrase ainsi rédigée :
« Il étudiera tout particulièrement le système des compensations et surcompensations entre ces différents régimes spéciaux et entre le régime général et ces régimes spéciaux. »
Le sous-amendement n° 95 rectifié, déposé par M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, a pour objet de compléter le texte proposé par l'amendement n° 3 par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce rapport étudiera les conséquences des dispositifs de surcompensation et proposera des mesures tendant à favoriser la pérennité et l'intégrité de ces régimes. »
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 3.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Depuis que nous discutons des questions de sécurité sociale, l'un des problèmes qui nous préoccupent le plus est celui de la situation des régimes spéciaux et de leur évolution prévisible au cours des dix prochaines années.
Nous souhaitons donc que le Gouvernement nous adresse un rapport chaque année afin de situer ces régimes spéciaux et leur évolution.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 70 est-il soutenu ?...
La parole est à Mme Borvo, pour défendre le sous-amendement n° 95 rectifié.
Mme Nicole Borvo. On sait que l'un des éléments essentiels de notre système de protection sociale réside dans l'existence d'un certain nombre de régimes spéciaux dont la vocation est, en général, de se préoccuper de la gestion de l'assurance vieillesse, même s'il existe dans de nombreuses professions, et au premier chef dans la fonction publique, une universalité des prestations prises en charge.
Cette réalité, illustrée en particulier par l'existence de dispositions statutaires propres aux salariés concernés par ces régimes spéciaux, doit-elle aujourd'hui apparaître comme un atout ou comme un obstacle à toute politique équilibrée en matière de protection sociale ?
On ne peut oublier ici que l'on a connu, dans les derniers mois de l'année 1995, un mouvement social d'une force et d'une singularité originales contre le plan de réforme de la protection sociale de M. Juppé, plan dont l'un des éléments clés était la remise en cause de ces régimes spéciaux.
Que les choses soient claires : il ne nous échappe pas que la commission des affaires sociales, tout comme la commission des finances, ne cherche, par le biais de cet amendement n° 3, qu'à « remettre le couvert », s'agissant de cette question !
Je me dois donc de rappeler ici à nos collègues de la majorité sénatoriale que les événements que notre pays a connus à l'automne 1995 ont eu pour prolongements, entre autres, de motiver, ce printemps dernier, le rejet massif des orientations politiques choisies par le gouvernement de M. Juppé.
Qu'ont donc les régimes spéciaux qui nécessiterait que l'on procède à leur remise en cause ?
Serait-ce que la retraite des agents du secteur public est calculée selon des modalités différentes de celles qui sont imposées aux affiliés du régime général ?
Serait-ce que la couverture maladie du régime de la Régie autonome des transports parisiens inclut également des prestations de médecine du travail ?
Serait-ce que la caisse de sécurité sociale minière assure aux ayants droit une gratuité des soins ?
Serait-ce que les modalités de calcul de la cotisation employeur du régime des salariés d'Electricité de France assure, dans les faits, un excédent permanent des recettes sur les dépenses ?
Devons-nous considérer, mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, que l'existence de garanties plus élevées que celles qui sont accordées aux bénéficiaires du régime général serait un privilège à combattre pour assurer un traitement « équitable » entre tous les assurés ?
Est-ce là votre objectif ?
Nous avons, nous, une position de principe confortée par une analyse équilibrée de la situation.
On ne peut, dans l'état actuel des choses, se satisfaire, par exemple, de ce que les modalités de liquidation des retraites du régime général aient été modifiées depuis 1993 de telle sorte que le pouvoir d'achat des retraités s'en ressent douloureusement.
On ne peut pas plus se satisfaire d'une évolution des prestations qui consiste à en maintenir simplement la valeur en francs constants, ce qui n'est pas sans poser de problèmes de justice sociale, la croissance réelle de la richesse nationale étant, par nature, plus importante et devant, dans ce cadre, être plus justement répartie.
Il importe, à notre sens, de rendre à l'ensemble de ces régimes spéciaux les moyens de leur développement et de trouver les éléments d'équilibrage de leur situation.
Il est d'ailleurs à noter que, lorsqu'il s'agit des différents régimes et des diverses caisses assurant des prestations pour les non-salariés, on débouche toujours dans notre pays sur des solutions appropriées !
Pour notre part, nous estimons indispensable d'assurer la pérennité de ces régimes et de clarifier en particulier les relations qu'ils entretiennent avec les autres et le régime général, notamment.
Nous pensons en particulier que ce n'est pas par la voie de la surcompensation entre régimes spéciaux que l'on pourra répondre aux difficultés structurelles ou temporaires de tel ou tel autre régime.
Il nous faut donc des éléments d'appréciation, des orientations, des pistes à explorer, y compris dans le cadre d'une réforme des modalités de financement. C'est le sens de ce sous-amendement, que nous vous invitons à adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 95 rectifié ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. En dépit des amples commentaires de Mme Borvo, je m'en tiendrai, pour ma part, au texte du sous-amendement pour interroger le Gouvernement sur les efforts qu'il déploie afin d'assurer la pérennité des régimes spéciaux, me réservant de donner l'avis de la commission ensuite.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 3 et sur le sous-amendement n° 95 rectifié ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je l'ai déjà dit, il nous faut, avant d'arrêter une position sur les régimes spéciaux, faire un diagnostic, un état des lieux de ces régimes. Je rappelle que, pour la plupart, les régimes spéciaux ont été créés avant le régime général. Ils ont des liens extrêmement forts avec le statut des personnels, notamment avec certains avantages de ce statut.
Ce diagnostic portera sur l'état financier de ces régimes, sur les évolutions démographiques, sur le lien entre ces régimes et les différents statuts, sur les comparaisons entre les différents régimes ainsi que sur la compensation et la surcompensation, lorsqu'elles existent.
C'est à partir de cet état des lieux global que le Gouvernement fera un certain nombre de propositions. Ce travail sera donc fait, je l'ai déjà dit, raison pour laquelle je ne crois pas utile de prévoir un rapport de plus.
Par conséquent, ni l'amendement n° 3 ni le sous-amendement n° 95 rectifié ne reçoivent un avis favorable du Gouvernement.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 95 rectifié ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. J'ai cru un instant que nous allions être d'accord avec le Gouvernement sur le premier amendement venant en discussion, ce qui laissait bien augurer de la suite. Malheureusement, il n'en est rien.
Quant au sous-amendement n° 95 rectifié, j'approuve totalement ce qu'en dit Mme le ministre. On ne peut pas, en effet, s'engager aujourd'hui sans un état des lieux préalable. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 95 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

Section 1

Substitution de la contribution sociale
généralisée à la cotisation maladie

Article 2



M. le président.
« Art. 2. _ I. _ Aux 1° et 2° du III de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, les mots : "dont la cotisation d'impôt sur le revenu de l'année précédente, au sens de l'article 1417 du code général des impôts dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 1997, est inférieure au montant mentionné au 1 bis de l'article 1657 du code général des impôts" sont remplacés par les mots : "dont le montant des revenus de l'avant-dernière année tels que définis au V de l'article 1417 du code général des impôts n'excède pas les seuils déterminés en application des dispositions des I et IV du même article". »
« II. _ Au II de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, les mots : "dont la cotisation de l'année précédente définie aux I et II de l'article 1417 du code général des impôts dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 1997 est supérieure à ce même montant" sont remplacés par les mots : "dont le montant des revenus de l'avant-dernière année tels que définis au V de l'article 1417 du code général des impôts excède les seuils déterminés en application des dispositions des I et IV du même article". »
« III. _ Supprimé . »
Sur l'article, la parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. La section 1 du titre II prévoit la substitution de la CSG à la cotisation maladie. Le Gouvernement a donc opté et nous propose un basculement quasi intégral de la cotisation maladie.
Il s'y était engagé devant les Français lors de la campagne électorale ; il tient cet engagement, dès cette année, dans le cadre de ce projet de loi de financement.
Cette opération repose pour nous, socialistes, sur une exigence fondamentale : asseoir l'avenir de la sécurité sociale sur une base de financement rénovée, compte tenu des mutations structurelles de l'économie française, et qui assure une meilleure équité dans les prélèvements, de même qu'une consolidation de l'ensemble du système.
Cette contribution, proposée par les socialistes dès 1991, a connu des fortunes diverses depuis son instauration.
Elle a d'abord été censurée, puis reprise à son compte par l'opposition de droite, deux ans à peine après cette censure, et ce à deux reprises.
Ses mécanismes de mise en oeuvre ont été variés : déductibilité, puis non déductibilité, substitution ou augmentation de prélèvement. Sur ce dernier point, rappelons que la modification introduite par M. Balladur, qui n'avait pas compensé la hausse de la CSG par une baisse des cotisations maladie, s'était traduite par des prélèvements supplémentaires à hauteur de 40 milliards de francs !
Aujourd'hui, le Gouvernement fait une distinction entre les revenus du travail et de l'épargne, soumis à un taux de 4,1 %, et les revenus de remplacement, soumis à une contribution de 2,8 %.
Concrètement, ces mesures se traduiront par une augmentation de 1,1 % du pouvoir d'achat des salariés et par le maintien du niveau des pensions versées aux retraités, des allocations perçues par les chômeurs et les personnes percevant le RMI ou l'allocation aux adultes handicapés, l'AAH.
Les parlementaires de l'opposition font notament valoir que ce nouveau régime aura des répercussions sur la fiscalité de l'épargne. C'est un choix que nous assumons pleinement, car nous estimons que les produits de l'épargne doivent également concourir au financement de notre protection sociale.
Monsieur Descours, vous le précisez vous-même, pour les seuls ménages, les produits de placement représentent globalement plus de 10 % des revenus.
Je sais parfaitement que, sur cette question, il existe entre nous des divergences fondamentales. Ainsi, ceux de vos collègues qui ont participé à la rédaction de la loi sur les fonds de pension ont prévu que les versements effectués sur ces fonds permettraient justement aux employeurs d'échapper partiellement au paiement des cotisations sociales, privant de ce fait le régime général de ressources importantes ; et je ne parle ici que du régime général, mais il faudrait évoquer aussi les régimes complémentaires.
Les sénateurs socialistes approuvent la démarche novatrice, « révolutionnaire » diront certains, adoptée par le Gouvernement dans ces deux articles clés du projet de loi. Ils s'interrogent sur les véritables raisons - probablement des raisons de fond - qui, alors que la droite se déclare ici-même favorable au principe de la CSG, l'amènent pourtant à adopter une attitude dilatoire au moment même où un texte de loi vise précisément à poser le principe d'une CSG destinée à se substituer aux cotisations d'assurance maladie.
Pour ce qui nous concerne, nous, socialistes, je tiens à le redire, nous sommes tout à fait favorables à l'adoption de cette CSG.
M. le président. Sur l'article 2, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Tous deux sont déposés par M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 73 tend :
I. - A rétablir le paragraphe III de l'article 2 dans la rédaction suivante :
« III. - Par dérogation au paragraphe I, sont exonérées de cette contribution les pensions de retraite et d'invalidité, les allocations de chômage et de préretraite ainsi que les indemnités et les allocations visées au 7° du II de l'article L. 136-2. »
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du paragraphe I ci-dessus, à compléter in fine cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Les pertes de recettes résultant de l'exonération de la CSG pour pensions de retraite et d'invalidité, les allocations de chômage et de préretraite sont compensées par un relèvement à due concurrence du taux prévu à l'article 245-16 du code de la sécurité sociale. »
L'amendement n° 74 vise :
I. - A rétablir le paragraphe III de l'article 2 dans la rédaction suivante :
« III. - Les prestations susmentionnées sont exonérées de la contribution sociale généralisée lorsque leur montant est inférieur à 1,2 SMIC. »
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du paragraphe I ci-dessus, à compléter in fine cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Les pertes de recettes résultant de l'exonération de la CSG pour les prestations inférieures à 1,2 SMIC sont compensées par un relèvement à due concurrence du taux prévu à l'article 245-16 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Borvo, pour défendre ces deux amendements.
Mme Nicole Borvo. L'amendement n° 73 vise à exonérer les personnes aux ressources les plus modestes de toute CSG.
L'amendement n° 74 est un amendement de repli dans la mesure où - c'est notre position de fond - il est nécessaire de prévoir, dans le cadre de la mise en oeuvre de la contribution sociale généralisée, un champ d'exonération adapté à la situation.
Les titulaires des revenus les plus modestes doivent-ils, en effet, être soumis à la contribution sociale généralisée, dont le caractère déductible est, par nature et par essence, régressif, alors même qu'ils sont dispensés de contribuer au budget général par la voie de l'impôt sur le revenu ?
Je me permets de souligner ici une autre des différences fondamentales entre l'impôt sur le revenu et la contribution sociale généralisée. Outre le fait qu'elle ne prend pas en compte dans la même proportion les frais professionnels liés à l'activité, la CSG ignore également les charges de famille, puisqu'il s'agit d'une retenue à la source sur des revenus personnels de chaque assuré social.
Elle a donc tendanciellement un impact plus lourd sur les revenus les plus modestes, pour lesquels le quotient familial en matière d'impôt sur le revenu sert bien souvent de fait générateur de la non-imposition.
Nous vous proposons donc de faire en sorte que certaines prestations sociales de faible montant telles que les allocations de chômage ou les pensions, par exemple, soient plus nettement dispensées de contribution qu'elles ne peuvent l'être actuellement.
Cette proposition vise d'ailleurs, dans notre esprit, à alléger la part du financement de la protection sociale imputable aux revenus de transfert, dont le caractère d'éléments de solidarité nationale doit être préservé et mis en valeur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 73 et 74 ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Les amendements n°s 73 et 74 ont pour objet d'exonérer de CSG les pensions et les revenus de remplacement. Les adopter reviendrait à déséquilibrer complètement la loi de financement. Cela étant, avant de me prononcer, j'aimerais connaître l'avis du Gouvernement ! (Sourires.)
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le Gouvernement partage l'avis défavorable que vient d'exprimer M. le rapporteur. (Nouveaux sourires.)
En effet, ces deux amendements n°s 73 et 74 contredisent l'idée même d'une contribution sociale généralisée, qui vise à faire contribuer au financement de la sécurité sociale l'ensemble des revenus.
Au surplus, je rappelle que les revenus les plus modestes gagnent à ce transfert des cotisations maladies vers la CSG.
S'ils étaient adoptés, ces amendements iraient effectivement à l'encontre de la réduction du déficit que nous essayons de réaliser.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 73, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 74, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article additionnel après l'article 2



M. le président.
Par amendement n° 30 rectifié, MM. Lesein et Joly proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le III de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« ... Les retraites, les pensions d'invalidité et les allocations rattachées au statut d'anciens combattants, titulaires de la carte d'anciens combattants et des victimes de guerre, titulaires de la carte de déportés ou prisonniers résistants ou politiques. »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées par une augmentation à due concurrence du taux des contributions sociales mentionné au I de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale. »
La parole est M. Joly.
M. Bernard Joly. Cet amendement tend à exonérer les anciens combattants et victimes de guerre de toute participation à la contribution sociale généralisée. Un tel amendement est exemplaire en ce sens qu'il exprime, dans un souci d'équité, la reconnaissance de la nation à l'égard de ceux qui ont mis leur vie en péril pour elle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Le principe retenu pour les anciens combattants est intéressant, mais il s'inscrit dans le cadre d'une CSG portée à 7,5 %. A ce taux, l'exonération des pensions et des retraites constituerait, à l'évidence, une mesure de justice.
Cela étant dit, je rappelle qu'à l'article suivant la commission s'opposera au transfert massif des cotisations vers la CSG. Dans la mesure, donc, où nous restons au taux de 3,4 %, nous pouvons garder une assiette large.
Je rappelle, en outre, que certaines pensions sont déjà exonérées et que les personnes non imposables sont également exemptées du versement de la CSG.
Dans ces conditions, compte tenu de la logique de la commission, qui s'oppose au basculement important des cotisations vers la CSG, je demande aux auteurs de l'amendement, dont je comprends les motivations, de bien vouloir le retirer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement, mais pas pour les mêmes raisons que la commission.
L'amendement nous semble peu clair. S'il tend à exonérer les prestations servies au titre du code des pensions militaires, il est inutile dans la mesure où l'ensemble des pensions militaires d'invalidité des victimes de guerre attachées au statut d'ancien combattant sont déjà exemptées de la CSG.
Et s'il vise à exonérer tous les revenus de remplacement de ces personnes, y compris les pensions de retraite et d'invalidité, je rappelle que ces revenus entrent dans l'assiette des cotisations de 1991 et que, à ce titre, ils sont exonérés ou assujettis à un taux minoré, dans les mêmes conditions que les autres pensions de retraite ou d'invalidité, si leurs titulaires perçoivent un avantage non contributif ou non imposable. Un traitement spécifique serait donc inéquitable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles 2 bis et 2 ter



M. le président.
« Art. 2 bis. _ Dans le dernier alinéa (7°) du II de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, après les mots : "rentes viagères", sont insérés les mots : "et indemnités en capital". » - (Adopté.)
« Art. 2 ter. _ Le dernier alinéa du I de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale est supprimé. » - (Adopté.)

Article 3



M. le président.
« Art. 3. _ I. _ L'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Au I, le taux de "3,40 %" est remplacé par le taux de "7,50 %" ;
« 2° Le II et le III deviennent respectivement le III et le IV ;
« 3° Il est inséré un II et un II bis ainsi rédigés :
« II. _ Par dérogation au I, sont assujetties à la contribution au taux de 6,2 % les pensions de retraite et d'invalidité, les allocations de chômage et de préretraite ainsi que les indemnités et allocations visées au 7° du II de l'article L. 136-2.
« II bis. _ Compte tenu de la modification du taux de la contribution sociale généralisée prévue en application du 3° du I de l'article 3 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 (n° du ), le taux et le maximum des indemnités journalières visées à l'article L. 323-4 sont majorés à compter du septième mois de leur perception selon des modalités déterminées par décret en Conseil d'Etat. » ;
« 4° Le III est ainsi modifié :
« a) Le taux de "1 %" est remplacé par le taux de "3,8 %" ;
« b) Après les mots : "au I", sont ajoutés les mots : "et au II" ;
« 5° Au IV, les mots : "pour la part correspondant à un taux de 1 %, y compris dans le cas mentionné au II" sont remplacés par les mots : "pour la part correspondant à un taux de 5,1 % ou de 3,8 % pour les revenus visés au II et au III". »
« I bis. _ Par dérogation aux 1° à 4° du I, les revenus tirés d'une assurance vie spécifique destinée aux personnes handicapées ne sont pas assujettis à la contribution sociale généralisée. Le taux de 7,5 % mentionné au 1° du I est majoré à due concurrence.
« II. _ L'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Au I, le pourcentage de "29 %" est remplacé par le pourcentage de "23 %" ;
« 2° Au II, le pourcentage de "28 %" est remplacé par le pourcentage de "14 %" ;
« 3° Au III, les mots : "sur le produit brut des jeux automatiques des casinos" sont remplacés par les mots : "sur une fraction égale à 75 % du produit brut des jeux automatiques des casinos" et le taux de "3,40 %" est remplacé par le taux de "7,50 %". »
« III. _ Au titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est inséré un chapitre Ier ter ainsi rédigé :

« Chapitre Ier TER

« Suppression de cotisations

« Art. L. 131-7-1 . _ Les cotisations d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès à la charge des assurés qui ne sont pas dues par les personnes visées à l'alinéa suivant sont supprimées lorsque le taux de ces cotisations, en vigueur au 31 décembre 1997, est inférieur ou égal à 2,8 % pour les revenus de remplacement, à 4,75 % pour les revenus d'activité.
« Des taux particuliers de cotisations d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès à la charge des assurés sont applicables aux revenus d'activité et de remplacement perçus par les personnes qui ne remplissent pas les conditions de résidence définies à l'article L. 136-1 et qui relèvent à titre obligatoire d'un régime français d'assurance maladie. »
« III bis. _ Le I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'avoir fiscal non utilisé en application des dispositions de l'article 158 bis du code général des impôts est déduit de l'assiette de la contribution. »
« IV. _ Les dispositions des 1° à 4° du I et celles du II du présent article sont applicables :
« a) En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale, aux revenus perçus à compter du 1er janvier 1998 ou, pour les revenus professionnels visés à l'article L. 136-4 du même code, sur les revenus pris en compte pour le calcul de la contribution due à compter de l'année 1998 ;
« b) En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée à l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, à compter de l'imposition des revenus de 1997 ;
« c) En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée à l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, aux produits de placement sur lesquels est opéré à partir du 1er janvier 1998 le prélèvement prévu à l'article 125 A du code général des impôts et aux revenus assujettis en application du II de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale à compter de cette même date ;
« d) En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée au I de l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale, aux tirages, événements sportifs et émissions postérieurs au 31 décembre 1997 ;
« e) En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée au II de l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale, sur les sommes engagées à compter du 1er janvier 1998 ;
« f) En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée au III de l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale, sur le produit brut des jeux et sur les gains réalisés à compter du 1er janvier 1998.
« Les dispositions du 5° du I du présent article sont applicables à compter du 1er janvier 1998.
« Les dispositions du III du présent article sont applicables aux revenus perçus à compter du 1er janvier 1998. »
Sur l'article, la parole est à M. du Luart.
M. Roland du Luart. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme cela a été souligné dans le rapport écrit de notre collègue Jacques Oudin, le basculement des cotisations sociales maladie sur la cotisation sociale généralisée ainsi que l'élargissement de l'assiette des deux prélèvements sociaux de 1 % sur les revenus du patrimoine, que nous examinerons à l'article 6, vont bien au-delà du simple « bouclage » du déficit de la sécurité sociale et constitueraient, s'ils étaient adoptés, un événement majeur dans l'évolution de notre fiscalité directe.
C'est en effet l'institution d'un impôt sur le revenu bis que vous nous proposez, madame le ministre.
Néanmoins, ces mesures pourraient constituer une réforme d'ensemble pertinente puisque, d'une part, elles corrigent le défaut majeur de l'impôt sur le revenu, à savoir l'étroitesse de sa base, et, d'autre part, la CSG est un impôt simple, moderne - il a une assiette large et des taux bas - prélevé en grande partie à la source et relativement bien accepté par les ménages.
Toutefois, ce basculement aurait dû être opéré sans augmentation de la pression fiscale globale, ce qui supposait, d'une part, que l'on réduise les taux de l'impôt sur le revenu et, d'autre part, que l'on mette en place un système cohérent de protection sociale afin de maîtriser durablement les dépenses de santé.
Ces conditions n'étant pas réunies, la réforme que vous proposez ne nous semble pas réaliste et, comme l'a souligné avec beaucoup de justesse le président de la commission des affaires sociales, l'impact de l'aggravation sans précédent des prélèvements sur l'épargne n'a pas été mesuré.
Cette surtaxation massive de l'épargne comporte des risques récessifs non négligeables. En outre, elle aboutit à une hiérarchie fiscale des placements aux antipodes de la rationalité économique. Tout cela a été dit et fort bien dit, je n'y reviens pas.
Je veux néanmoins insister sur un point qui, me semble-t-il, a été insuffisamment souligné, à savoir la rétroactivité des mesures que nous propose le Gouvernement.
En effet, il est prévu que l'augmentation de la CSG s'appliquera, en ce qui concerne les revenus perçus par voie de rôle, dès le 1er janvier 1997.
Il n'y a pas là, à proprement parler, de rétroactivité juridique puisque l'actualisation du barème de l'impôt sur le revenu que nous votons chaque année porte également sur les revenus de l'année en cours.
Néanmoins, s'agissant d'une augmentation aussi importante non seulement du taux, qui passe du simple au double, mais aussi de l'assiette - je pense, en particulier, aux mesures de l'article 6, qui assujettissent à prélèvement des revenus qui, jusqu'à présent, ne l'étaient pas - force est de constater qu'il y a bien rétroactivité économique.
Plus exactement, et pour se replacer sur le terrain du droit, les mesures que vous nous proposez, madame le ministre, portent atteinte au principe de la « sécurité juridique » ou de la « confiance légitime », dont on comprend sans peine qu'il constitue le fondement de la crédibilité de l'Etat en matière de politique fiscale.
Or, c'est sur ce principe, qui trouve son fondement dans l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, que repose la confiance que les agents économiques mettent légitimement dans les engagements de l'Etat lorsqu'ils réalisent des opérations. Ruiner cette confiance, c'est détruire la crédibilité de l'Etat et empêcher tout calcul économique rationnel.
C'est pourquoi je défendrai, aux articles 3 et 6, deux amendements tendant à limiter l'effet rétroactif des mesures que vous nous proposez pour les cessions de titres non cotés, détenus de plus de huit ans, ce qui, vous le constatez, exclut les opérations spéculatives et évitera à des citoyens qui ont effectué des opérations en toute bonne foi de se trouver pénalisés par le brutal changement du cadre fiscal.
J'espère que le Sénat, dans sa sagesse, m'aidera ainsi à limiter les effets pervers des mesures proposées.
La présente intervention me dispensera de prendre la parole sur l'article 6, ce qui fera gagner du temps au Sénat.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'article 3 constitue de façon indubitable l'un des élements principaux du projet de financement de la sécurité sociale. Il convient donc que l'on s'attarde quelque peu sur ses attendus et sur ses conséquences.
Il s'agit de procéder de manière massive à un basculement des cotisations maladie vers la contribution sociale généralisée, en augmentant de manière particulièrement significative les taux de prélèvement de cette dernière. On fait par là même de la contribution l'un des facteurs essentiels du financement de la couverture maladie et on accentue le processus de fiscalisation de la protection sociale que l'on a connu ces dernières années - ce n'est pas nouveau ! - notamment depuis la création de la première CSG.
On pourrait d'ailleurs s'interroger sur la pertinence de ce mouvement de fiscalisation, attendu que la quasi-totalité de la dette sociale s'est précisément constituée depuis la mise en oeuvre de ce processus.
L'une des raisons invoquées pour justifier ce basculement est l'allègement des prélèvements opérés sur le travail.
Ce serait tout à fait louable si l'on ne constatait pas, en fait, que la contribution sociale généralisée a, s'agissant des salariés, une base de calcul plus large que celle des cotisations sociales traditionnelles, ce qui annule une partie essentielle des conséquences du basculement en termes de pouvoir d'achat des salariés.
La commission des affaires sociales a ainsi relevé le problème posé par le régime indemnitaire des fonctionnaires. Mais la démonstration vaut également pour le secteur privé où, par exemple, certaines primes ou encore le produit de l'intéressement, exonérés de cotisations sociales, seront, en revanche, soumis à la CSG.
On a pu calculer que de 15 % à 16 % de la rémunération d'un agent de maîtrise de l'industrie métallurgique provenait de primes exonérées de cotisations sociales mais concernées par la CSG.
Il n'y aura donc, dans le meilleur des cas, qu'un gain fort limité de pouvoir d'achat pour les salariés.
L'un des autres objectifs de la contribution sociale généralisée serait de permettre la mise en place de la cotisation maladie universelle, destinée à assurer le financement de la protection sociale des plus démunis, notamment des personnes privées de tout droit par absence d'activité professionnelle.
Cette proposition soulève deux questions.
La première, c'est que nous ne pouvons considérer comme normale et donc pérenne l'existence d'une partie de la population dont les droits sociaux seront en permanence dépendants de la solidarité nationale ou de l'assistanat.
La seconde est de se demander si la mise en place de cette assurance maladie universelle n'est pas le début d'un engrenage qui conduira inexorablement à la réduction de la qualité de la couverture des besoins collectifs par le système de protection sociale.
Si nous devons faire en sorte que pas un seul des habitants de ce pays ne se trouve dépourvu de couverture sociale, nous devons aussi nous demander comment financer cette indispensable solidarité.
Faire payer aux salariés d'abord le prix de la solidarité concernée conduit, de notre point de vue, à dédouaner les véritables responsables de la situation.
La commission des affaires sociales propose de ne pas conserver en l'état le présent article du projet de loi, afin d'inventorier plus précisément les conséquences découlant de ces dispositions.
Elle s'interroge, notamment, sur la teneur de la réforme des cotisations patronales, qu'il conviendrait, selon elle, de mettre en oeuvre de manière convergente.
Elle s'inquiète également des conséquences de l'accroissement de la contribution sociale généralisée sur les revenus financiers.
Si nous pouvons partager certaines de ces préoccupations affichées - on admettra qu'il est difficile de mettre en équivalence revenus d'actions et primes de plans d'épargne logement ! - nous ne pouvons manquer de souligner ici que l'objectif de la fiscalisation n'est pas absent des aspirations de la majorité sénatoriale, comme en témoignaient, par exemple, en leur temps, certaines propositions de M. Arthuis en matière de réforme de l'impôt sur le revenu, attendu qu'il était partisan de faire de la CSG le socle de l'impôt en question.
De surcroît, nous ne pouvons accepter l'orientation fondamentale qui sous-tend l'amendement de la commission des affaires sociales, qui propose en effet ni plus ni moins que de réduire les dépenses de santé au motif que les recettes de la protection sociale n'enregistreraient pas les effets de la hausse de la contribution sociale généralisée.
Ultime contradiction : on refuse le basculement des cotisations maladie, mais on propose ensuite la majoration de la contribution sociale généralisée acquittée essentiellement par les salariés pour la branche famille.
Nous ne voterons donc ni l'amendement de suppression de l'article ni l'article lui-même, parce que nous ne sommes pas convaincus de sa totale pertinence.
M. le président. La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier. Pour être bref, je ne reprendrai pas les arguments qu'a développés il y a quelques instants Marie-Madeleine Dieulangard sur la nécessité, aujourd'hui, de trouver d'autres formes de financement pour sauvegarder notre protection sociale, notamment en ayant recours à l'élargissement de la CSG, dont M. du Luart vient d'ailleurs de vanter les mérites et le caractère moderne.
La sécurité sociale est devenue l'objet d'un véritable débat national, et nous nous en félicitons. Malheureusement, ce débat est alimenté, aujourd'hui, par des critiques, d'ailleurs contradictoires, qui ne nous paraissent pas très constructives, compte tenu du problème posé.
Le groupe socialiste se félicite que le Gouvernement, et en particulier vous-même, madame la ministre, ait respecté les engagements pris.
Ce projet de loi opère un rééquilibrage en profondeur du financement de notre protection sociale. Il fallait du courage pour décider ce transfert massif des cotisations d'assurance maladie vers la CSG, transfert qui a aussi le mérite de donner un supplément de pouvoir d'achat aux salariés.
Je le répète, nous sommes favorables à ce texte, ce qui nous amènera, bien évidemment, à nous opposer à la suppression de l'article 3, demandé par la commission des affaires sociales, qui - M. le rapporteur Descours vient de le rappeler - se situe dans une tout autre logique que la nôtre.
M. le président. Sur l'article 3, je suis saisi de huit amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 4, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 61, MM. César, Pluchet, Alloncle, Althapé, Belcour, Bernard, Besse, Bizet, Bourges, Braconnier, Braun, Braye, Camoin, Cazalet, Debavelaere, Doublet, Fayolle, Flandre, François, Gaillard, Gérard, Gerbaud, Ginésy, Gouteyron, Gruillot, Bernard Hugo, Jean-Paul Hugot, Le Grand, Lombard, de Menou, Rigaudière, Souvet, Taugourdeau, Valade, Vasselle, Vinçon et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent :
I. De compléter in fine le I de l'article 3 par deux alinéas ainsi rédigés :
« ... Il est inséré après le III un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Par dérogation au I, et si leurs titulaires ne bénéficient pas des dispositions du 1° et du 2° du III de l'article L. 136-2, sont assujetties à la contribution sociale au taux de 2,40 % les allocations de préretraite instituées par l'article 9 de la loi n° 91-1407 du 31 décembre 1991 et prorogées par la loi n° 95-95 du 1er février 1995. Toutefois, lorsque les titulaires de ces allocations répondent aux conditions de revenu et d'imposition définies au III, celles-ci sont exonérées de la contribution sociale. »
II. Pour compenser les pertes de recettes résultant de l'application des dispositions du I ci-dessus, d'insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant de l'exonération de CSG au profit des préretraités agricoles transmettant leur exploitation à de jeunes agriculteurs sont compensées à due concurrence par l'institution de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts affectées à la Caisse d'amortissement de la dette sociale, à la Caisse nationale des allocations familiales, au fonds de solidarité vieillesse et à l'agence centrale des organismes de sécurité sociale au titre du dispositif prévu à l'article L. 139-2 du code de la sécurité sociale. »
Par amendement n° 62, MM. Lemaire, Courtois et Doublet proposent, dans le dernier alinéa (3°) du paragraphe II de l'article 3, de remplacer les mots : « sur une fraction égale à 75 % du produit brut des jeux automatiques des casinos » par les mots : « sur le produit brut des jeux automatiques des casinos diminué des prélèvements de l'Etat et des communes afférentes à ce produit ».
Par amendement n° 99, M. Joly propose :
I. - Dans le dernier alinéa (3°) du II de l'article 3, de remplacer les mots : « sur une fraction égale à 75 % du produit brut des jeux automatiques des casinos » par les mots : « sur le produit brut des jeux automatiques des casinos, diminué des prélèvements de l'Etat et des communes afférents à ce produit, fixés forfaitairement à 50 % dudit produit ».
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant de l'application du I ci-dessus, d'insérer après le II de l'article 3 un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant de la modification de l'assiette de la CSG est compensée par une augmentation à due concurrence de la taxe intérieure sur les produits pétroliers. »
Par amendement n° 101, M. Huriet et les membres du groupe de l'Union centriste proposent :
I. - Après le paragraphe II de l'article 3, d'insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les 6° et 7° du II de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale sont supprimés.
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant de l'application du I ci-dessus, d'insérer après le II un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l'exonération de cotisations sociales pour les produits et gains de l'épargne salariale est compensée par le relèvement à due concurrence de la contribution sur les jeux exploités par la Française des jeux visée à l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale. »
Par amendement n° 98, M. Joly propose :
I. - De compléter in fine le III de l'article 3 par un alinéa ainsi rédigé :
« Des dispositions spécifiques seront prises afin d'assurer aux actifs non salariés la neutralité financière du basculement de la cotisation maladie sur la contribution sociale généralisée.
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant de l'application du I ci-dessus, d'insérer après le III un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recette résultant pour les organismes de sécurité sociale de la neutralisation pour les actifs non salariés du basculement de la cotisation maladie vers la CSG est compensée par le relèvement à due concurrence de la contribution sur les jeux exploités par la Française des jeux visée à l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale. »
Par amendement n° 50, M. du Luart propose :
I. - De compléter le troisième alinéa b) du IV de l'article 3 par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, pour les gains nets visés aux articles 92 J et 160 du code général des impôts, la date d'application est fixée aux cessions réalisées à compter du 26 septembre 1997 lorsque les titres cédés sont détenus depuis plus de huit ans ; »
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, de compléter in fine cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant de la fixation au 26 septembre 1997 de la date d'application de la majoration du taux de CSG sur les gains visés aux articles 92 J et 160 du code général des impôts sont compensées à due concurrence par une cotisation additionnelle aux droits sur le tabac au bénéfice des organismes de sécurité sociale. »
Par amendement n° 100, M. Huriet et les membres du groupe de l'Union centriste proposent :
I. - Dans le quatrième alinéa c) du IV de l'article 3, après les mots : « revenus assujettis » d'insérer les mots : « et acquis ».
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant de l'application du I ci-dessus, d'ajouter après le IV de cet article un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l'application du taux de CSG aux seuls revenus et plus-values réalisés en 1998 est compensée par le relèvement à due concurrence de la contribution sur les jeux exploités par la Française des jeux visée à l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je souhaite d'abord dire à M. Estier que nous essayons de débattre aussi sereinement que possible et qu'il ne faudrait donc pas qu'il caricature l'opposition.
Nous ne sommes pas contre le transfert des cotisations vers la CSG ; nous l'avons voté sous les deux précédents gouvernements. Je veux simplement essayer de démontrer qu'aujourd'hui ce transfert pose de nombreux problèmes.
En premier lieu, ce basculement porte sur des bases financières énormes - 300 milliards de francs - et ses effets n'ont pas été mesurés, en particulier sur l'épargne, pas plus qu'a été mesurée l'ampleur des compensations promises à telle ou telle catégorie, en premier lieu aux fonctionnaires.
Je pense, bien sûr, aux fonctionnaires de l'Etat, mais aussi aux personnels de la fonction publique hospitalière et à ceux de la fonction publique territoriale. L'examen des amendements suivants nous permettra de voir que tout n'est pas réglé, loin de là.
Selon un rapide calcul de coin de table à partir des données disponibles, le basculement des cotisations de l'assurance maladie vers la CSG devrait entraîner un gain de 20 milliards de francs pour les salariés - c'est le chiffre fourni par l'Assemblée nationale - un produit net de 4,6 milliards de francs pour la sécurité sociale - c'est le Gouvernement qui le dit, et donc nous le croyons - et un prélèvement sur l'épargne de 16 milliards de francs, ce qui veut dire que le basculement se traduirait par une perte de 8,6 milliards de francs pour les autres catégories.
Or Mme la ministre a indiqué que ce basculement se traduira par une hausse du pouvoir d'achat de tous les exploitants agricoles et de 80 % des travailleurs indépendants non agricoles, et que le pouvoir d'achat des chômeurs, comme celui de la quasi-totalité des retraités, sera préservé. Qui seront donc les perdants ? C'est un jeu merveilleux puisque, aux dires du ministre, tout le monde gagne !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Non !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. C'est tout l'enjeu des négociations qui se déroulent hors du Parlement. Si des compensations doivent être accordées pour atténuer ces pertes, ce sont donc des recettes attendues qui sont menacées.
Par ailleurs, l'objectif poursuivi semble, en réalité, largement étranger à une réflexion sur le financement de la sécurité sociale.
Je l'ai dit dans la discussion générale, dans le rapport annexé au projet de loi, Mme le ministre avoue que sont « engagées dans les meilleures conditions, les négociations sur la réduction du temps de travail ». En résumé, les trente-cinq heures seront financées par les ponctions sur l'épargne.
Troisième raison - et j'ai également souligné ce point dans la discussion générale - cette fiscalisation intervient alors même qu'aucun calendrier précis n'a été arrêté pour la mise en place effective de l'assurance maladie universelle qui constitue la contrepartie du financement par la solidarité de la branche maladie et que la réflexion n'a pas avancé sur l'indispensable réforme de l'assiette des cotisations patronales.
Enfin, quatrième raison, le système pénalise de très nombreuses catégories professionnelles - les avocats, les agents des chambres de commerce et d'industrie, les retraités, les artisans, les commerçants, les libéraux - qui réclament - ils vous l'ont demandé, madame le ministre, comme à nous, quand nous les avons auditionnés - des compensations qui relèvent généralement du pouvoir réglementaire.
Madame le ministre, faut-il prévoir un dispositif propre à chacune de ces professions ?
A l'Assemblée nationale, les députés, prenant acte du taux très élevé proposé pour la CSG, ont voté en faveur de dérogations pour les titulaires d'indemnités journalières, d'assurance vie pour personnes handicapées, d'avoirs fiscaux non utilisés. Nous ne voulons pas procéder ainsi et multiplier les dérogations catégorielles, d'ailleurs le plus souvent justifiées, au risque de créer de nouvelles inégalités.
En outre, je constate que le Parlement assiste en spectateur - et encore, c'est un bien grand mot, car j'ai le sentiment que nous ne savons pas tout ! - aux négociations que mène le Gouvernement avec toutes les professions concernant ces dérogations et ces compensations.
Le Parlement entend donc l'écho d'affirmations péremptoires, de déclarations contradictoires, de simulations incompatibles. Mais il ne dispose pas des hypothèses de travail du Gouvernement.
Nous vous avons interrogée par écrit, madame le ministre, sans obtenir de réponse. Le moins que l'on puisse dire est que ce basculement massif qui porte sur 300 milliards de francs ne se fait pas dans des conditions de totale transparence. Je ne dis pas qu'il y a une volonté de dissimulation, je constate.
Il est donc indispensable que l'étude des conséquences d'un dispositif d'une aussi grande ampleur soit analysée avant que le Parlement prenne la responsabilité d'une telle décision.
C'est pourquoi nous proposons de supprimer l'article 3 du projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Blanc, pour défendre l'amendement n° 61.
M. Paul Blanc. Cet amendement vient illustrer le manque de réflexion et de concertation qui a présidé à la mise en place du dispositif de basculement des cotisations maladie vers la CSG.
Les préretraités agricoles, au nombre de 25 000, sont exonérés de cotisations sociales maladie. Pour ceux d'entre eux - un tiers environ - qui sont imposables, le basculement pose un vrai problème de respect des engagements de l'Etat. En effet, ces personnes sont parties en préretraite en abandonnant leur exploitation à des jeunes en contrepartie d'un statut qui comportait l'exonération de cotisations sociales. Le basculement vient d'annuler l'aide promise.
Il s'agit donc d'une décision de justice que de maintenir cette réduction des prélèvements de cotisations sociales.
M. le président. L'amendement n° 62 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Joly, pour présenter l'amendement n° 99.
M. Bernard Joly. Le produit brut des jeux automatiques des casinos est composé de deux masses, dont l'une est constituée des prélèvements opérés au profit de l'Etat et des communes. Asseoir la CSG sur ce produit brut en tout ou partie revient en conséquence à faire payer la CSG sur une partie qui revient à l'Etat et aux communes.
Cet amendement vise à déduire de l'assiette imposable la part de l'Etat et des communes.
M. le président. La parole est à M. Machet, pour présenter l'amendement n° 101.
M. Jacques Machet. Les produits et gains tirés de l'épargne salariale, plus précisément ceux qui sont réalisés par les salariés dans le cadre de la participation et des plans d'épargne d'entreprise, ont été, dès l'instauration des régimes, exonérés d'impôt sur le revenu et des cotisations sociales en contrepartie de l'indisponibilité des sommes correspondantes pendant cinq ans.
L'instauration de la CRDS, la contribution de remboursement de la dette sociale, en février 1996 a constitué le premier pas vers un assujettissement de ces produits et gains aux cotisations sociales. L'extension du champ d'application de la CSG en janvier 1997, l'augmentation de son taux à 7,5 % tel que cela est prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et l'instauration des prélèvements au profit de la CNAVTS, la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés, et de la CNAF, la Caisse nationale d'allocations familiales, auraient pour effet d'assujettir des produits précédemment exonérés à un taux global de prélèvements sociaux de 10 %.
Cet amendement vise à exclure du champ d'application de la CSG les produits et gains tirés de l'épargne salariale après une période d'indisponibilité de cinq ans, conformément à l'engagement d'exonération de cotisations sociales pris initialement. Ces produits et gains resteraient soumis uniquement à la CRDS.
M. le président. La parole est à M. Joly, pour présenter l'amendement n° 98.
M. Bernard Joly. Le basculement de la cotisation maladie sur la contribution sociale généralisée doit se faire dans le respect d'une exacte parité entre salariés et actifs non salariés.
Si, pour les salariés, les conditions du transfert sont connues et ne devraient pas être pénalisantes, il convient de s'assurer que, pour les artisans, les commerçants et les professions libérales, ce basculement ne sera pas non plus pénalisant.
M. le président. La parole est à M. du Luart, pour présenter l'amendement n° 50.
M. Roland du Luart. La majoration de CSG applicable aux plus-values prend effet à compter de l'imposition des revenus de 1997. Cette disposition est donc rétroactive, ce qui modifie profondément l'équilibre des opérations réalisées entre le 1er janvier et le 26 septembre 1997, date d'annonce de la majoration. Mon amendement vise donc à lisser les opérations conclues.
Cette rétroactivité n'est pas conciliable avec le principe de sécurité juridique. En effet, les contribuables, et tout particulièrement ceux qui investissent dans la durée et le risque - non liquide puisqu'il s'agit de sociétés non cotées - ont droit à la sécurité, c'est-à-dire à l'assurance que les règles sur lesquelles ils ont établi leurs relations ne peuvent être modifiées ou remises en cause de manière brutale, soudaine et sans nécessité réelle. Les conséquences peuvent d'ailleurs être très lourdes.
C'est pourquoi il est proposé de n'appliquer la majoration de CSG de 4,1 points qu'aux cessions de titres non cotés intervenues à compter de la date de publication de la loi et de préciser qu'il s'agit d'opérations qui n'ont aucun caractère spéculatif, dans la mesure où seuls les titres détenus depuis plus de huit ans sont concernés.
M. le président. La parole est à M. Machet, pour présenter l'amendement n° 100.
M. Jacques Machet. Il s'agit de n'appliquer le nouveau taux de CSG qu'aux revenus et plus-values exonérés d'impôt sur le revenu, et notamment à ceux qui proviennent de l'épargne salariale, réalisés en 1998 et portant sur des produits acquis, à compter du 1er janvier 1998. Les revenus afférents à l'année 1997 seront assujettis à la CSG au taux de 3,4 % ; ceux qui sont afférents aux années précédentes resteront exonérés de CSG, puisque le champ d'application de celle-ci n'a été étendu aux produits et gains exonérés d'impôt sur le revenu qu'à compter du 1er janvier 1997.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 61, 99, 101, 98, 50 et 100 ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Globalement, l'ensemble de ces amendements démontrent l'incertitude qui règne quant aux conséquences du basculement que le Gouvernement nous propose.
Tout d'abord, l'amendement n° 61 prouve que le caractère brutal et massif de l'augmentation de la CSG entraîne un certain désarroi chez les préretraités agricoles. Sans y être opposés sur le fond, nous considérons qu'il est satisfait par notre amendement de suppression.
Il en va de même pour l'amendement n° 99.
S'agissant de l'amendement n° 101, nous sommes évidemment tous très favorables à l'épargne salariale. Mais nous considérons que cet amendement est en partie satisfait par l'amendement de la commission.
Nous sommes favorables sur le fond à l'amendement n° 98 présenté par M. Joly. Nous estimons pourtant qu'il devient sans objet du fait que nous refusons le basculement proposé par le Gouvernement.
Enfin, les amendements n°s 50 et 100 nous paraissent également satisfaits par l'amendement n° 4.
La commission est donc défavorable à l'ensemble de ces amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 4, 61, 99, 101, 98, 50 et 100 ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Il y aurait, selon vous, monsieur le rapporteur, des contradictions, des allusions, des incertitudes en ce qui concerne la CSG. J'aimerais vous convaincre du contraire. Les choses sont très claires.
Le basculement, je le répète, rapporte effectivement quelque 4,5 milliards de francs à la sécurité sociale, car les revenus d'activités salariées et non salariées vont percevoir environ 14,1 milliards de francs et les revenus du capital, les jeux et, pour une très faible part, les revenus de remplacement vont contribuer pour un montant de 18,6 milliards de francs. Nous retrouvons donc les chiffres avancés.
Les 20 milliards de francs que vous avez cités pour les salariés figuraient en effet dans le rapport de la commission de l'Assemblée nationale ; mais cette dernière a additionné les effets de l'augmentation du taux de la CSG et de l'extension de l'assiette des prélèvements spécifiques de 1 % CNAVTS et 1 % CNAF. Il y avait donc une erreur.
Je voudrais vous répéter également que le raisonnement selon lequel le système est plus compliqué que d'habitude me paraît un peu alambiqué. Je m'explique mal l'incohérence à accepter l'année dernière cette base et ce basculement et à les refuser cette année.
Je soulignerai surtout qu'en repoussant l'article 3, donc en refusant ce basculement, vous faites perdre 1,1 % de pouvoir d'achat à l'ensemble des salariés ; vous renoncez à diminuer le coût de l'accès à l'assurance maladie pour les travailleurs indépendants modestes et à faire progresser ou maintenir en l'état le pouvoir d'achat de 80 % des travailleurs indépendants.
Je voudrais vous redire que l'Union professionnelle artisanale, l'UPA, que nous avons reçue à plusieurs reprises, ne conteste pas ces chiffres. Il est vrai que, à un moment donné, certains ont éprouvé des inquiétudes ; mais, maintenant, ce système a été expliqué.
Certes, le système est compliqué, et je comprends que vous posiez des questions. Toutefois, je relève que nous ne sommes pas à l'origine des régimes des notaires, des clercs de notaire, des médecins, des professions artisanales, etc.
Nous avons travaillé avec chacune des professions, et je peux vous assurer, comme je l'ai fait à l'Assemblée nationale, que 80 % des travailleurs indépendants non agricoles vont gagner ou, du moins, ne pas perdre du fait de ce transfert de la cotisation d'assurance maladie vers la CSG.
En revanche, les plus modestes - je pense aux artisans et aux commerçants modestes - bénéficieront d'un gain de pouvoir d'achat proche de 15 %.
Avec un tel amendement, vous renoncez aussi à l'égalité de traitement entre les revenus du travail et les revenus du capital. Ce prélèvement vise en effet - M. du Luart l'a très bien expliqué - à instaurer une assiette équilibrée et dynamique aux fonds affectés à la sécurité sociale, c'est-à-dire à préparer l'avenir.
Monsieur le rapporteur, vous parlez de brutalités. Toutefois, je vous le rappelle, l'année dernière, vous avez voté l'augmentation de la CSG de 1 % et un élargissement de l'assiette de cette contribution augmentée à 3,4 % au 1er janvier 1997.
Aujourd'hui, nous transférons du pouvoir d'achat aux actifs, à la quasi-totalité des actifs.
Quant aux autres catégories, comme vous le savez, elles contribuent moins que les actifs à la protection sociale.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Me permettez-vous de vous interrompre, madame le ministre ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je vous en prie, monsieur le rapporteur.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, avec l'autorisation de Mme le ministre.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Madame le ministre, le chiffre de 20 milliards de francs figure dans le rapport de l'Assemblée nationale. Or, j'imagine que le rapporteur de l'Assemblée nationale a accès aux meilleures sources !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. C'est ce que j'ai dit !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Vous nous dites, par ailleurs, madame le ministre, que tout va bien pour toutes les professions. J'ai pourtant en ma possession un certain nombre de lettres de protestation, notamment une de votre collègue Mme le garde des sceaux, datée du 24 octobre 1997.
Je vous en donne lecture : « Les modalités de calcul de la cotisation maladie appelée par le régime des non-salariés étant différentes de celles instituées pour les travailleurs salariés, les représentants des professions judiciaires et juridiques m'ont fait part de leurs vives inquiétudes et demandent que le mécanisme de compensation, actuellement à l'étude, garantisse une égalité de traitement entre toutes les catégories de contribuables. »
Par ailleurs, le conseil d'administration de la CANAM, la Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés, consulté le 3 novembre 1997, « s'indigne de ne pas avoir été officiellement consulté sur les propositions du Gouvernement pour la baisse du taux des cotisations d'assurance maladie des professions indépendantes.
« Il se prononce, en contrepartie du relèvement de 4,1 points de la CSG, en faveur d'une réduction des taux des cotisations fixés à 1,60 point dans la limite du plafond de la sécurité sociale et à 4 points dans la limite de cinq fois le plafond de la sécurité sociale. »
Pour la Chambre nationale des professions libérales, « le basculement de la cotisation d'assurance maladie sur la CSG aboutira à une perte de pouvoir d'achat pour tous les travailleurs indépendants dont le revenu est supérieur à 235 000 francs ».
Le Conseil supérieur du notariat estime, quant à lui, que « à partir d'un revenu de 60 000 francs, ce qui correspond au salaire de la catégorie la plus faible de nos employés, le basculement entraîne pour les notaires une aggravation du montant des cotisations qu'ils auront à payer ».
Une simulation a été réalisée, en date du 10 novembre 1997, par l'Ordre des avocats.
Par ailleurs, la Chambre de commerce et d'industrie de Paris nous écrit ceci : « Une hausse indifférenciée conduirait en effet, pour plus de 5 000 personnes, à une importante baisse de leur traitement et pension, en contradiction non seulement avec le principe même du projet de loi selon lequel la hausse de la CSG doit être neutre pour les assujettis, voire même dégager une hausse de pouvoir d'achat pour les actifs, mais également, et de ce fait, avec le principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques. »
En outre, l'Union professionnelle artisanale nous écrit : « Mme le ministre a assuré que cette opération de transfert sera neutre financièrement, voire dégagera un gain de pouvoir d'achat pour tous les non-salariés ayant un revenu inférieur ou égal à 235 000 francs par an. Seuls 20 % des travailleurs indépendants subiraient une perte de gain dans cette opération.
« Les propos rassurants de Mme le ministre ne se traduisent pas, loin s'en faut, dans les chiffres.
« Or, les travailleurs salariés, d'une part, ne bénéficieront pas, comme les salariés, d'un gain de pouvoir d'achat de 1,1 point et, d'autre part, tous ceux qui auront des revenus supérieurs à 60 000 francs par an seront pénalisés. »
La FENARA, la Fédération nationale des associations de retraités de l'artisanat, attire pour sa part notre attention « sur les graves conséquences pour les retraités de l'artisanat du transfert des cotisations d'assurance maladie sur la CSG ».
Pour l'AVA, l'assurance vieillesse des artisans, les retraités artisans assujettis à la CSG subiront « des conséquences financières plus importantes que les retraités du régime général : ainsi, par rapport aux retraites moyennes versées, les pensions diminueraient de 563 francs par an pour un retraité et de 1 272 francs par an pour un invalide ».
Plus grave, si possible encore, la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés nous écrit ceci : « Néanmoins, le problème reste entier pour les indemnités journalières des accidents du travail et pour les indemnités journalières de maladie servies pour une période inférieure à six mois. »
Veuillez m'excusez, madame le minstre, d'avoir procédé à cette énumération. Je ne voulais pas ainsi faire preuve de mauvais esprit.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Regardez les dates de ces courriers, monsieur le rapporteur !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. La lettre de Mme Guigou date du 24 octobre, et celle de la CANAM du 3 novembre !
M. le président. Veuillez poursuivre, madame le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Depuis, il y a eu des discussions à l'Assemblée nationale, monsieur le rapporteur !
De plus, sachez que, quand je prends des engagements devant le Sénat et l'Assemblée nationale, je ne tiens pas des propos qui ne sont pas exacts.
L'ensemble des organisations qui vous ont écrit m'ont écrit également, monsieur le rapporteur. Comme chaque fois que l'on modifie certains dispositifs, dans notre pays, on écrit pour dire que l'on n'est pas content. L'ensemble de ces organisations, disais-je, nous ont écrit et nous les avons reçues.
Je pourrais citer chacun des régimes, mais je me bornerai à évoquer la CIPAV, la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, qui regroupe à peu près l'ensemble des professions libérales.
Nous avons établi un tableau concernant les adhérents de cette caisse, et celui-ci montre que seules les personnes qui perçoivent un revenu individuel annuel supérieur à 823 200 francs perdent 0,5 %.
Il y a eu des inquiétudes au départ, parce qu'un certain nombre de systèmes n'étaient pas compris, ce que je peux admettre. Je peux donc vous répéter ce que je vous ai dit hier : c'est quand ils perçoivent entre 50 000 francs et 100 000 francs par mois que les avocats perdent, après impôt, 0,5 % de leur revenu.
La réalité, je le répète ici, c'est que 80 % des travailleurs indépendants non agricoles, notamment les artisans, les commerçants et les travailleurs indépendants qui viennent de s'installer, gagneront ou ne perdront pas à ce système.
Ainsi, je peux évoquer le cas des jeunes avocats : avec, par exemple, une rémunération de 175 000 francs lors de leur première année d'exercice : ils économiseront 1 000 francs par an environ, d'après le calcul que nous avons effectué avec l'ordre des avocats.
Tels sont les chiffres aujourd'hui. Je ne conteste pas vos courriers, car...
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je peux vous donner des dates !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. ... je les ai reçus aussi. Mais, après, nous avons travaillé avec les différentes organisations.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. C'était pendant le week-end, alors !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je ne sais pas ! Peut-être le courrier n'arrive-t-il pas !
En tout cas, si je m'engage sur les chiffres que je viens de citer, vous imaginez bien, monsieur le rapporteur, que ce ne sont pas des chiffres lancés en l'air, et je serai tout à fait ravie de communiquer à la commission les données régime par régime, car nous disposons de tous les tableaux correspondants. Ils vous montreront que les propos du Gouvernement correspondent à la réalité.
Pour ma part, je ne me contente pas de lire des courriers ; j'ai travaillé sur chacun des systèmes, avec les représentants de tous ces organismes.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je pourrais vous donner les dates !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Voulez-vous oui ou non la vérité, monsieur le rapporteur ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. « A chacun sa vérité », disait Pirandello !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je vois qu'en plus vous avez des lettres, monsieur le rapporteur, et je m'en réjouis. Mais nous ferons le bilan dans quelques semaines, et vous verrez que les engagements que j'ai pris, devant l'Assemblée nationale comme devant le Sénat, sont réels.
Je crois, encore une fois, que les professions concernées ne contestent pas les chiffres, ce qui ne signifie pas, bien sûr, que ceux qui y perdent soient d'accord. Mais ils sont peu nombreux. Je répète que les titulaires des revenus les plus modestes y gagnent, et, disant cela, je pense notamment aux artisans et aux commerçants.
Au fur et à mesure que ces systèmes seront mis en place, nous pourrons établir un bilan réaliste à partir des chiffres, et non pas seulement des statistiques, comme nous l'avons fait jusqu'à présent. Vous verrez alors que les engagements du Gouvernement sont réels.
L'amendement n° 61 vise, quant à lui, à créer un régime spécifique servi aux personnes non salariées des professions agricoles. Je rappelle à cette occasion que la quasi-totalité des préretraités des non-salariés agricoles sont, en toute hypothèse, exonérés de CSG, car leur préretraite est généralement inférieure au salaire minimum de croissance, seuil d'assujetissement applicable aux préretraites. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
En ce qui concerne les amendements n°s 62 et 99, qui tendent à diminuer l'assiette de la CSG sur les casinos, je dirai aux nombreux sénateurs qui se sont inquiétés de cette situation que le Gouvernement a été prudent.
Là aussi, nous avons travaillé avec les représentants des casinos, et le Gouvernement propose une augmentation de la CSG, mais plus modérée que pour les autres revenus, car l'augmentation de ce taux est compensée, pour moitié, par une réduction de l'assiette du prélèvement.
De plus, les jeux de table restent exonérés et l'assiette reste calculée sur la base d'un produit brut des jeux théorique qui est inférieur de 10 % à 15 % au produit des jeux réels.
Nous avons donc pris en compte la situation des casinos. Pour autant, leurs représentants ne sont pas nécessairement d'accord pour payer la CSG. Il n'en demeure pas moins que la situation économique des casinos a bien été prise en compte.
L'amendement n° 101 de M. Huriet, qui vise à exonérer de CSG les produits de l'épargne salariale dès lors qu'ils sont indisponibles pendant cinq ans, soulève plusieurs difficultés.
Tout d'abord, je ne pense pas que leur indisponibilité puisse, à elle seule, justifier l'exonération, car certains revenus du capital sont eux aussi indisponibles pendant une certaine période.
Par ailleurs, je rappelle que l'ensemble de l'épargne salariale est assujettie à la CSG et qu'elle est déjà soumise, étant précisément indisponible, comme l'intéressement et la participation, à un régime favorable, puisqu'elle est exonérée de toute cotisation sociale.
Je tiens enfin à rappeler que cette assiette n'a rien de nouveau et que vous l'avez votée en l'état l'année dernière.
Le Gouvernement n'est donc pas favorable à l'amendement n° 99, ni à l'amendement n° 101.
En ce qui concerne l'amendement n° 50, qui tend à reporter du 1er janvier 1997 au 26 septembre 1997 la date d'entrée en vigueur de l'assujettissement au nouveau taux de la CSG des plus-values, là aussi la solution retenue, tant lors de la création du prélèvement que lors de chacune des augmentations du taux, est celle que nous retenons aujourd'hui. Il n'y a donc pas de rétroactivité, nous appliquons ce qui s'est fait par le passé.
Enfin, pour la même raison, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 100.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Il est clair que cet article 3 est, avec l'article 19, notre principal point de divergence avec le Gouvernement.
M. Alain Gournac. En effet !
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je veux résumer la position de la commission des affaires sociales, qui n'est pas hostile au principe du transfert des cotisations maladie sur la CSG, mais qui constate - M. le rapporteur l'a amplement démontré - que vouloir faire l'opération en une seule fois, de manière globale, avec un transfert portant sur des sommes énormes, présente deux inconvénients graves.
Ce sont sur ces deux inconvénients que je veux m'arrêter, même si, hier, j'y ai déjà insisté.
Nous avions déjà plusieurs assiettes, car l'assiette du RDS, le remboursement de la dette sociale, n'est pas la même que celle de la CSG ; mais nous avions une unicité de taux. L'idée était d'avoir une contribution sociale généralisée avec un taux standard applicable à tout le monde.
A partir du moment où l'on procède à un transfert brutal portant le taux de la CSG à des chiffres astronomiques le Gouvernement est dans l'obligation, compte tenu de tous les régimes particuliers de tous les systèmes professionnels, de s'orienter vers un système à taux différents.
Certains de ces taux différents figurent déjà dans le texte, d'autres résulteront de la négociation ou de dérogations et seront inscrits dans les textes complémentaires, au fur et à mesure des besoins. Par conséquent, nous passons d'un concept simple, d'une cotisation à très faible taux frappant tous les revenus, à un système discriminatoire avec des taux différents. Or, il conviendrait de respecter l'équité entre les travailleurs salariés et les travailleurs indépendants, de respecter l'équité avec les fonctionnaires, les retraités et les chômeurs, qui bénéficieront, eux aussi, de taux particuliers.
Bref, on est en train de mettre en place un nouveau système de cotisations à taux multiples qu'il sera très difficile de gérer et qui nous entraînera, au cours des prochaines années, dans une série de modifications et de dérogations. C'est le premier inconvénient du dispositif.
Si l'on avait continué dans la voie engagée par le gouvernement précédent, si l'on avait procédé à un transfert étalé sur plusieurs années, nous aurions eu le temps de la négociation, de l'examen précis et du diagnostic.
Il aurait sans doute été possible d'essayer de conserver le concept du taux unique. Il aurait été possible d'éviter de décider dans la précipitation, comme c'est le cas aujourd'hui.
Le second inconvénient me paraît plus grave. En effet, cette précipitation et cette globalisation du transfert nous isolent par rapport à nos partenaires européens.
Deux grands systèmes coexistent en Europe : ou bien les cotisations pour l'assurance maladie sont partagées entre les employeurs et les salariés, le problème du niveau de partage étant d'ailleurs lié à chaque culture nationale, puisque, en Allemagne, ce n'est pas le même système qu'en Espagne, en Italie ou en France ; ou bien le financement de la protection sociale de la maladie est assuré uniquement par l'impôt, comme c'est le cas en Suède, au Danemark et en Finlande.
En l'occurrence, nous allons vers un système extraordinairement complexe dans lequel nous allons avoir, d'une part, une cotisation à taux variable frappant les ménages selon des taux différenciés et introduisant des éléments d'iniquité entre les travailleurs salariés et les travailleurs indépendants et, d'autre part, une cotisation frappant les entreprises, ce qui va cumuler les inconvénients des deux systèmes : le système de type nordique, dans lequel tout est soumis à fiscalité, et le système de type continental, dans lequel il y a partage des cotisations entre les employeurs et les employés.
Tout cela, pourquoi ? Parce qu'on a voulu, en une seule fois, faire un grand basculement. Or, l'expérience permet de dire qu'en matière de fiscalité les grands basculements sont des opérations dangereuses sur lesquelles on est obligé de revenir. Et c'est parce que nous sommes persuadés que le gouvernement, quel qu'il soit, sera obligé de revenir sur ce mécanisme pour retenir des taux différents et pour modifier un certain nombre d'assiettes que nous pensons qu'il vaut mieux, aujourd'hui, ne pas adopter cet article 3 et nous donner le temps de la réflexion. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
Enfin, j'ai entendu Mme Dieulangard, comme d'ailleurs Mme Derycke hier soir, parler de la droite. Je ne pensais pas que nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen se classaient à droite ! Je crois qu'il y a aujourd'hui, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, d'un côté le groupe socialiste, qui est partisan de ce basculement global en minimisant ses conséquences et, de l'autre côté, tous les autres groupes qui considèrent que c'est une aventure et que, dans ce genre d'aventure, il vaut mieux réfléchir avant d'agir ! (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Jacques Machet. Bravo !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je ne peux pas accepter les propos qui viennent d'être tenus. On peut être en désaccord, mais soyons-le sur la réalité des choses !
On ne peut pas dire, aujourd'hui, que nous partons à l'aventure. L'aventure, c'est laisser le déficit de la sécurité sociale à 37 milliards de francs ; la voilà, l'aventure ! L'aventure, c'est conserver pour la sécurité sociale une assiette dont nous savons qu'elle diminue de 1 % par an, alors que nous proposons de l'élargir, pour 20 milliards de francs, aux revenus du capital. La voilà, la vérité ! Et voilà sans doute ce qui est gênant !
Monsieur Fourcade, vous savez très bien que le régime que nous voulons mettre en place est beaucoup plus simple que le régime actuel. Vous savez aussi que, si nous nous heurtons à tant de difficultés avec les différents régimes, c'est précisément parce qu'ils sont extrêmement complexes.
Nous allons par conséquent remplacer par une cotisation unique proportionnelle les diverses cotisations existantes, qui sont souvent dégressives. C'est par exemple le cas de 1 200 000 salariés indépendants non agricoles qui, je le répète, paient 11,4 % de cotisations jusqu'au plafond de sécurité sociale, puis 9 % jusqu'à cinq fois le plafond et, enfin, ne paient plus rien au-delà.
Pour la cotisation que nous proposons, il existera deux taux : un premier de 4,1 % pour les actifs et un second de 2,8 % pour les chômeurs et les inactifs, taux qui se substitueront à des dizaines d'autres.
Nous voulons surtout aller vers plus de justice en remplaçant des systèmes dégressifs et injustes par un système proportionnel et beaucoup plus juste. Voilà la réalité de la réforme !
Vous avez le droit d'y être opposés, mesdames, messieurs les sénateurs, mais soyez-le sur les vraies raisons, celles qui, peut-être aujourd'hui, vous posent des problèmes, mais qui ne vous en posaient pas hier ! (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Alain Gournac. Et on nous dit que nous sommes agressifs !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 12:

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 317
Majorité absolue des suffrages 159
Pour l'adoption 220
Contre 97

En conséquence, l'article 3 est supprimé, et les amendements n°s 61, 99, 101, 98, 50 et 100 n'ont plus d'objet.

Articles additionnels après l'article 3



M. le président.
Par amendement n° 63, MM. César, Pluchet, Alloncle, Althapé, Belcour, Bernard, Besse, Bizet, Bourges, Braconnier, Braun, Braye, Camoin, Cazalet, Debavelaere, Doublet, Fayolle, Flandre, François, Gaillard, Gérard, Gerbaud, Ginésy, Gouteyron, Gruillot, Hugo, Hugot, Le Grand, Lombard, de Menou, Rigaudière, Souvet, Taugourdeau, Valade, Vasselle, Vinçon et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le troisième alinéa du I de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les revenus des jeunes agriculteurs répondant aux conditions posées par le décret n° 85-570 du 4 juin 1985 modifié sont réduits de 50 % le premier exercice qui suit celui où ils remplissent les conditions susmentionnées, de 40 % le second exercice et de 20 % le troisième exercice. »
« II. - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l'application des dispositions du I ci-dessus sont compensées par le relèvement à due concurrence de la contribution sur les jeux exploités par La Française des jeux visée à l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. Blanc.
M. Paul Blanc. Cet amendement, qui répond aux mêmes préoccupations que l'amendement n° 61 concernant les préretraités agricoles, vise un autre exemple parmi les problèmes pratiques que pose le basculement des cotisations d'assurance maladie sur la CSG.
Pour encourager les jeunes agriculteurs à s'installer, il existe une série d'abattements dégressifs des cotisations sociales maladie.
A partir du moment où le Gouvernement propose de substituer la CSG aux cotisations d'assurance maladie se pose le problème de l'annulation partielle de la mesure, puisqu'il n'est prévu aucun abattement dans les mêmes proportions de l'assiette sur laquelle porte la CSG.
Les exploitants agricoles verront donc augmenter considérablement leurs cotisations sociales maladie majorées de la CSG.
Par conséquent, je propose de réduire l'assiette sur laquelle est calculée la CSG dans des proportions identiques pour maintenir ainsi les aides aux jeunes agriculteurs.
Bien que nous venions d'adopter l'amendement de suppression de l'article 3, la proposition que plusieurs de mes collègues et moi-même formulons devrait, me semble-t-il, retenir l'attention de notre assemblée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Avis favorable à l'amendement pour les jeunes agriculteurs !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Défavorable, monsieur le président.
Monsieur le sénateur, l'assiette est calculée sur le revenu, plus ou moins les cotisations. Vous avez donc raison de dire que les jeunes agriculteurs bénéficient d'abattements dégressifs des cotisations sociales maladie de 50 % la première année, puis de 40 % et de 20 %.
La CSG due par les exploitants agricoles est calculée sur ces revenus professionnels majorés par les cotisations sociales. L'exonération de cotisations précitée se répercute donc naturellement, ce qui explique notre désaccord avec vous sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 63, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.
Par amendement n° 31 rectifié, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le II de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'avoir fiscal non utilisé en application des dispositions de l'article 158 bis du code général des impôts est déduit de l'assiette de la contribution. »
« II. - Le III de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du II ne sont pas applicables aux produits visés au 2° de l'article 199 septies du code général des impôts. »
« III. - Les pertes de recettes résultant du II ci-dessus sont compensées à due concurrence par une majoration des taux mentionnés aux I, II et III de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. La commission des finances partage tout à fait l'approche de la commission des affaires sociales sur l'article 3 ; je tenais à le dire, parce que c'est un élément important.
Toutefois, la commission des finances a jugé utile de retenir deux mesures d'exonération de la CSG qui ont été votées par l'Assemblée nationale et qui lui semblent pertinentes.
La première, votée sur l'initiative de la commission des finances de l'Assemblée nationale, prévoit d'exonérer de CSG la part de l'avoir fiscal qui ne sera pas restituée, en application de la mesure de plafonnement proposée par ailleurs à l'article 10 du projet de loi de finances, qui n'est d'ailleurs pas encore venu en discussion au Sénat.
La commission des finances n'est évidemment pas favorable à ce plafonnement de l'avoir fiscal. Mais elle ne peut pas préjuger l'issue de la discussion budgétaire. Au cas où ce plafonnement malheureux serait finalement voté, l'exonération de la CSG proposée ici paraît nécessaire. Toutefois, il pourrait sembler curieux, du point de vue législatif, de se prononcer sur une mesure complémentaire alors que la mesure de base n'a pas encore été adoptée ! Il est néanmoins nécessaire de prendre une telle précaution.
La seconde exonération votée par l'Assemblée nationale, sur l'initiative d'un député de l'opposition et contre l'avis du Gouvernement, porte sur les revenus de l'assurance vie réservée aux handicapés.
Cette exonération paraît en effet cohérente avec l'exonération qui existe déjà en faveur des rentes d'accidents du travail et de l'allocation aux adultes handicapés.
La rédaction que je vous propose est, je crois, un peu plus précise juridiquement que celle qui nous vient de l'Assemblée nationale. Le gage, qui n'a pas été levé par le Gouvernement, est simplement conservé.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Le paragraphe I de cet amendement nous place devant une difficulté - M. Oudin vient de le dire - dans la mesure où il fait référence à l'article 15 du projet de loi de finances qui n'a pas été voté. Nous serions donc très ennuyés d'adopter un texte induisant que l'article 15 du projet de loi de finances sera adopté dans quelques jours !
Ne sachant pas trop comment nous sortir de cette difficulté juridique, nous nous en remettons à la sagesse du Sénat sur cette partie de l'amendement.
S'agissant du paragraphe II et de la seconde exonération prévue, nous serions favorables, comme nous l'avons été pour les amendements précédents, à cette exclusion de l'assiette si le taux était porté à 7,5 %.
Nous avons expliqué tout à l'heure les problèmes qui se posaient avec un taux aussi élevé et une assiette plus large. C'est pourquoi, en cohérence avec notre position actuelle, qui est de retenir un taux de 3,4 %, nous sommes défavorables à cette disposition, même si nous en acceptons le principe.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Pour les mêmes raisons et parce que les amendements ont d'ores et déjà été votés par l'Assemblée nationale sous des rédactions différentes - je le reconnais, monsieur Oudin - le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 75, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Il est inséré dans le livre premier, titre III, chapitre 6 du code de la sécurité sociale une section 3 bis ainsi intitulée : "De la contribution sociale sur les revenus du patrimoine et les produits de placement des entreprises."
« II. - Après l'article L. 136-7, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - I. - Les produits de placement et les revenus du patrimoine des entreprises assujetties à l'impôt sur les sociétés sont soumis à une contribution sociale.
« II. - L'assiette de cette contribution est constituée par l'ensemble des revenus fonciers, des revenus de capitaux mobiliers, des plus-values, des gains en capital et profits réalisés sur les marchés à terme d'investissements financiers et de marchandises, ainsi que sur les marchés d'options négociables.
« Elle est également constituée par l'ensemble des revenus tirés de placements sur les marchés obligatoires et sur les titres inscrits à la cote officielle des Bourses de valeurs. »
« III. - Dans le I de l'article L. 136-8 du même code, après la référence : "L. 136-7" sont insérés les mots : ", article additionnel après l'article L. 136-7". »
La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Cet amendement vise à poser la question de la prise en compte des revenus financiers des entreprises dans l'assiette des prélèvements sociaux.
Ainsi proposons-nous de mettre en place une sorte de contribution sociale additionnelle sur les produits de patrimoine et de placements des entreprises.
Il s'agit ici tout à fait concrètement de mettre un terme à l'exception qui touche aujourd'hui les entreprises en matière de contribution à la protection sociale.
Comment comprendre, en effet, que les revenus financiers des ménages soient aujourd'hui soumis à des prélèvements plus importants que par le passé alors que des opérations identiques menées par des entreprises continueraient de ne pas être soumises à la moindre contribution sociale ?
C'est le sens de cet amendement de justice et d'équilibre, qui vise notamment à pénaliser celles de nos entreprises qui ont, hélas ! choisi ces dernières années la finance contre l'emploi. La démarche que nous proposons est bien entendu assez largement en contradiction avec les orientations de la majorité sénatoriale, mais elle participe de notre conception renouvelée du financement de la protection sociale et de la recherche de solutions pour assurer sa pérennité et la placer en situation de répondre aux besoins collectifs qu'elle a à connaître.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je suis étonné que nos collègues communistes, effectivement minoritaires au Sénat mais incontestablement partie intégrante de la majorité à l'Assemblée nationale, n'aient pas demandé à leurs amis du Palais-Bourbon de déposer cet amendement dans une enceinte qui leur est favorable. Sans doute cette proposition pose-t-elle quelques problèmes...
Nous sommes évidemment défavorables à l'amendement n° 75.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, vous souhaitez que la contribution des entreprises au financement de la protection sociale ne soit pas limitée exclusivement à des cotisations portant sur l'assiette masse salariale.
Le Gouvernement, qui vous le savez, partage cette préoccupation, a accepté, lors de la discussion de ce projet de loi à l'Assemblée nationale, un amendement l'engageant à déposer sur le bureau des assemblées, avant le 1er août 1998, un rapport sur les conséquences d'une modification de l'assiette des cotisations patronales appuyée notamment sur la valeur ajoutée. C'est là, sinon l'un de nos objectifs, en tout cas l'un de nos sujets d'étude pour le moment. En tout état de cause, nous nous déciderons très vite. Il s'agit de l'article 3 bis .
C'est au travers des renseignements que nous tirerons de ces travaux qu'il nous faudra appréhender le principe d'une participation différente des entreprises au financement de notre protection sociale.
Sous cet angle, le Gouvernement s'est donné pour tâche la recherche d'une base de financement dynamique. Il partage votre souci d'assurer plus de justice et d'équité et s'emploie à trouver un mode de prélèvement sur les entreprises propice au développement de l'emploi.
Mais nous ne pouvons préjuger les résultats. C'est pourquoi, si vous n'acceptez pas de retirer cet amendement, qui lui semble prématuré pour le moment, monsieur le sénateur, le Gouvernement s'y déclarera défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 75, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 3 bis



M. le président.
« Art. 3 bis . _ Le Gouvernement déposera sur le bureau des assemblées, avant le 1er août 1998, un rapport analysant les conséquences sur le financement de la sécurité sociale et sur la situation des entreprises d'une modification de l'assiette des cotisations sociales à la charge des employeurs, notamment appuyée sur la valeur ajoutée.
« Ce rapport décrira également les incidences d'une telle réforme sur l'emploi. »
Par amendement n° 5, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - Avant le 1er juin 1998, le Gouvernement déposera, sur le bureau des assemblées, un rapport dressant le bilan du basculement des cotisations d'assurance maladie vers la contribution sociale généralisée résultant de l'application de la loi n° 96-1160 du 27 décembre 1996 du financement de la sécurité sociale pour 1997.
« II. - Avant le 1er juin 1998, le Gouvernement déposera, également sur le bureau des assemblées, un rapport analysant les conséquences sur le financement de la sécurité sociale, l'emploi et la situation des entreprises d'une modification de l'assiette des cotisations sociales à la charge des employeurs, prenant notamment en compte la valeur ajoutée. »
Cet amendement est affecté d'un sous-amendement n° 96, présenté par Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et visant, dans le paragraphe II du texte proposé par l'amendement n° 5 pour l'article 3 bis , après les mots : « prenant notamment en compte », à insérer les mots : « l'utilisation de ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cet amendement vise, d'une part, à compléter l'article 3 bis par une disposition qui prévoit le dépôt d'un rapport sur le bilan du transfert CSG-cotisations maladie opéré en 1997. Ce bilan nous semble important, comme nous le disons d'ailleurs depuis le début de l'examen de ce projet de loi.
Aujourd'hui, nous ne connaissons pas le résultat de ce transfert réalisé en 1997, notamment pour ce qui concerne la partie non salariale des transferts vers la CSG.
Or la réalisation d'une telle étude aurait dû constituer un préalable au transfert massif des cotisations maladie sur la CSG tel qu'il est proposé par le Gouvernement.
En outre, cet amendement vise à rapprocher la date de dépôt du rapport sur la réforme des cotisations patronales. En effet, M. Chadelat, que nous avons auditionné, s'est vu confier une mission sur ce sujet et doit remettre un rapport d'ici à la fin de l'année. La date que nous proposons donne presque six mois au conseil d'analyse économique mentionné dans le rapport annexé pour étudier l'impact économique des propositions. Nous attendons donc les propositions du Gouvernement d'ici à cette date.
M. le président. La parole est Mme Borvo, pour défendre le sous-amendement n° 96.
Mme Nicole Borvo. L'évolution du mode de calcul des cotisations dues par les entreprises fait aujourd'hui l'objet d'un assez large consensus.
Il est en effet patent que les conditions de la production ont profondément évolué depuis la naissance de la protection sociale et que la part des salaires dans les coûts de production est en diminution tendancielle.
On sait, à l'examen des séries statistiques les plus récentes, que la part des salaires dans la valeur ajoutée créée par le travail humain ne cesse de décroître, au même rythme que les difficultés de notre système de protection sociale ont pu, elles, croître.
Si la part des salaires diminue pour des raisons qui tiennent au travail lui-même, il ne faut pas oublier qu'elle diminue aussi sous les effets conjugués de la déflation salariale, de la précarisation des conditions de travail et de la croissance du chômage ?
Pour autant, il paraît souhaitable de procéder à la mise en place d'un nouveau mode de calcul durable des cotisations dues par les entreprises.
Pour ce qui nous concerne, nous estimons indispensable de maintenir le caractère essentiel des sources de financement de la protection sociale, c'est-à-dire celui d'un prélèvement sur le lieu de création de la richesse, celui de l'entreprise.
La valeur ajoutée doit-elle devenir la nouvelle assiette des cotisations patronales ?
Ce pourrait être la première piste à explorer, ce qui aurait cependant plusieurs inconvénients ; d'une part, celui de continuer à mettre d'abord à contribution les salaires, qui continuent de constituer l'utilisation principale de la valeur ajoutée et, d'autre part, celui de limiter la stratégie de réduction des cotisations de l'entreprise à la réduction de la valeur ajoutée qu'elle produirait.
Outre cette première difficulté, on peut aussi se poser la question de savoir quelle consistance on donne à la valeur ajoutée elle-même.
Les résultats de toute simulation sur le transfert des cotisations patronales sur une base valeur ajoutée pourraient d'ailleurs différer si l'on appréhende la valeur ajoutée en tant que valeur nette comptable ou si l'on prend en compte la valeur ajoutée telle qu'elle ressort de la lecture de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, qui la définit pour ce qui concerne l'application des dispositions relatives au plafonnement de la taxe professionnelle.
Le rapport Chadelat rappelle fort opportunément ce que recouvre la définition de l'article considéré.
La valeur ajoutée dont il s'agit est constituée de la valeur ajoutée comptable, majorée des subventions d'exploitation, des loyers de biens soumis à des opérations de crédit-bail et des taxes sur le chiffre d'affaires non récupérables.
L'avantage de cette définition de la valeur ajoutée est, entre autres, de ne pas permettre d'allégement artificiel de la valeur ajoutée qui résulterait des opérations de crédit-bail.
Pour autant, demeure le problème fondamental : cette valeur ajoutée doit-elle servir d'assiette - auquel cas elle ne prendrait à notre sens qu'imparfaitement en compte les spécialités de la situation de tel ou tel secteur d'activité économique - ou doit-elle plutôt servir de variable d'ajustement des cotisations patronales, fondée par exemple sur sa prise en compte comme dénominateur d'un rapport dans lequel le numérateur serait constitué par la masse salariale ?
Devons-nous arrêter la conception que nous avons de la valeur ajoutée uniquement à ce qui englobe la définition fournie par le code général des impôts en matière de taxe professionnelle ou regarder aussi du côté des placements financiers qui constituent, qu'on le veuille ou non, une des utilisations de la valeur ajoutée créée par le travail ?
Nous estimons donc indispensable de majorer la valeur ajoutée telle que définie par l'article 1647 B sexies du code général des impôts des produits de placements financiers bruts des entreprises non financières et des produits financiers nets des banques, compagnies d'assurances et institutions financières.
La valeur ajoutée prise dans cette acception permettrait de servir de dénominateur à un rapport dont le numérateur, je l'ai dit, serait constitué par les salaires bruts.
Chaque entreprise bénéficierait, dans le cadre des prélèvements traditionnels existants, d'une remise de cotisations dès lors qu'elle consacrerait une part plus importante de la valeur ajoutée à l'emploi et aux salaires et verrait ses cotisations croître dès lors que cette part relative serait réduite.
C'est dans cet objectif que nous proposons le sous-amendement n° 96.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 96 ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Nous discuterons sur le fond quand le Gouvernement nous proposera des modifications de la contribution patronale. Pour le moment, nous émettons un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 5 et sur le sous-amendement n° 96 ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le Gouvernement ne peut qu'être favorable à l'élaboration d'un bilan du basculement des cotisations d'assurance maladie vers la contribution sociale généralisée opéré par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997. Il est d'ores et déjà prévu, puisque l'annexe B au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 transmise au Parlement répond à cette requête. Des développements sont ainsi consacrés à l'élargissement de l'assiette de la CSG, à l'augmentation du taux, à la substitution de la CSG à la cotisation d'assurance maladie et à l'affectation de la CSG et des droits de consommation sur l'alcool au régime obligatoire d'assurance maladie, en compensation notamment des pertes de cotisations.
Par conséquent, je ne vois pas l'utilité d'ajouter encore un rapport aux très nombreuses annexes existant déjà et qui, en l'occurrence, répondent particulièrement aux souhaits de M. le rapporteur.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 96, M. Bernard Kouchner a répondu sur le fond lors de l'examen de l'amendement n° 75, et je n'ai rien à ajouter. Nous souhaitons en effet - je l'ai dit à plusieurs reprises - modifier l'assiette des cotisations patronales, en espérant pouvoir, dès l'année prochaine, en faire une première étape. Il conviendra de travailler sur la notion de valeur ajoutée.
En conclusion, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 96, repoussé par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 3 bis est ainsi rédigé.

Section 2

Dispositions diverses relatives aux ressources

Article 4



M. le président.
« Art. 4. _ Le IV de l'article 7 de la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social cesse d'être applicable aux revenus perçus à compter du 1er janvier 1998. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 32 est présenté par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 64 est présenté par MM. Gérard Larcher, Braye, Gournac, Eckenspieller, Jourdain et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
Par amendement n° 6, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger ainsi l'article 4 :
« Le IV de l'article 7 de la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Cette disposition cesse d'être applicable aux revenus perçus à compter du 1er janvier 1999.
« Toutefois, à titre transitoire, pour les revenus perçus à compter du 1er janvier 1998 :
« a ) Le taux de cotisation applicable à la partie du revenu située au-dessous du plafond visé au premier alinéa du présent IV est diminué de moitié ;
« b ) En conséquence, le taux de cotisation applicable à l'intégralité du revenu est augmenté à hauteur de la moitié du taux visé au a . »
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 32.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. L'article 4 tend à supprimer le plafonnement très partiel, à hauteur de 0,5 point, qui subsiste sur l'assiette des cotisations familiales des travailleurs indépendants pour la fraction de revenu inférieure à 164 640 francs par an, 4,9 points étant ainsi prélevés sur la totalité des revenus.
Je crois que tout le monde sera d'accord pour estimer qu'il s'agit d'une mesure de pur rendement. Elle devrait rapporter 300 millions de francs, et le Gouvernement la justifie par un double argument de simplification et d'égalité par rapport aux salariés, dont les cotisations familiales sont totalement déplafonnées depuis 1990.
Toutefois, il convient de rappeler que les cotisations des salariés sont dues par leurs employeurs ; il s'agit donc de cotisations patronales.
Cette mesure fait partie d'un ensemble de dispositions proposées par le Gouvernement qui touchent de plein fouet les non-salariés, certaines d'entre elles figurant dans la loi de financement, d'autres dans la loi de finances et l'on retrouve, là encore, ce phénomène qui nous plonge dans une certaine perplexité.
En loi de financement, les non-salariés seraient les perdants de l'opération de basculement des cotisations sur la CSG - le débat a été suffisamment long tout à l'heure pour ne pas y revenir - tandis que leur régime de sécurité sociale serait spolié du produit de la C3S ; nous y viendrons ultérieurement.
En loi de finances, l'exonération des cotisations d'assurance maladie dont bénéficient pendant deux ans les non-salariés qui créent leur entreprise serait supprimée. Cela fait beaucoup !
C'est la raison pour laquelle la commission des finances propose la suppression de l'article 4, qui découle, semble-t-il, d'une attitude du Gouvernement manifestement défavorable à une catégorie sociale qui ne semble pas présenter pour lui un intérêt électoral particulier.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Exactement !
M. le président. La parole est à M. Braye, pour défendre l'amendement n° 64.
M. Dominique Braye. L'article 4 vise à supprimer brutalement, en une année, le plafonnement partiel des cotisations personnelles d'allocations familiales des employeurs et travailleurs indépendants.
Ce plafonnement partiel subsiste depuis 1990, pour la seule raison que les employeurs et travailleurs indépendants sont considérés, dans un contexte économique plus que difficile, comme une catégorie socioprofessionnelle fragile, qu'il convient de préserver. Tout le monde s'accorde à dire que le travail indépendant est indispensable à la cohérence du tissu social, au coeur de nos villes comme au fond de nos campagnes. Il représente un élément de service, de dynamisme et d'animation dans des endroits où, parfois, il ne reste plus rien.
Le déplafonnement est toujours une mesure brutale ; il devient d'une injuste rigueur quand le contexte économique est par trop détérioré.
Les employeurs et travailleurs indépendants sont souvent particulièrement exposés aux aléas de la conjoncture économique et ne sont pas les privilégiés que Mme le ministre entend pénaliser. C'est le principe même de leur activité que d'être fluctuante d'une année sur l'autre, et leurs revenus sont donc extrêmement variables : les bénéfices engrangés une année ne servent souvent qu'à compenser les effets d'une mauvaise année.
Ne plus leur permettre d'assurer cet équilibre sur plusieurs années, c'est précariser leur situation et, pour beaucoup d'entre eux, la mettre en péril.
Je crois d'ailleurs qu'il est temps de réaliser à quel point la situation de certaines catégories socioprofessionnelles est devenue précaire au cours de ces dernières années.
Avec les mesures qui nous sont proposées, nous allons vers une aggravation de la fracture sociale dans le monde du travail entre ceux dont l'emploi est garanti à vie et les droits sociaux préservés et ceux qui sont exposés à la conjoncture économique, sans aucune garantie, tandis que leur accès aux droits sociaux se restreint.
En outre, il ne s'agit pas seulement d'une suppression brutale ; elle est proposée l'année même où vous entendez mettre sous condition de ressources l'attribution des allocations familiales. C'est d'un véritable acharnement contre les travailleurs indépendants que nous sommes témoins ! Vous les frappez deux fois en un seul texte : ils cotiseront davantage pour une prestation à laquelle certains d'entre eux n'auront plus droit. L'augmentation moyenne de la charge financière sur leurs revenus est estimée à 1 000 francs et elle touchera 500 000 personnes.
L'objectif de rigueur financière, que nous défendons par ailleurs avec vigueur, tout autant que vous, madame le ministre, ne justifie pas toutes les mesures, et sûrement pas le fait de pénaliser certaines catégories socioprofessionnelles, dont les travailleurs indépendants, en creusant encore plus le fossé qui existe déjà entre ceux qui cumulent toutes les garanties et ceux que vous voulez soumettre à toutes les précarités.
Aussi, mes chers collègues, je vous demanderai de voter la suppression de l'article 4.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 32 et 64.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. La commission partage largement les inquiétudes des auteurs des amendements n°s 32 et 64 concernant l'agression dont sont victimes les professions indépendantes dans ce texte. Cependant, pour des raisons que j'exposerai dans quelques instants, il ne lui paraît pas possible de rejeter totalement le déplafonnement.
Nous reconnaissons en effet la nécessité de procéder à l'achèvement du déplafonnement des taux de cotisation d'allocations familiales des employeurs et des travailleurs indépendants, tout en constatant que ce déplafonnement se traduira par une charge supplémentaire importante pour les personnes concernées.
C'est la raison pour laquelle nous proposons une mise en place progressive du déplafonnement, ce qui permettra d'en atténuer la charge en 1998.
Je rappelle que les taux de cotisation, qui sont aujourd'hui de 4,9 % sur l'intégralité du revenu et de 0,5 % sur la part plafonnée, seraient, selon le dispositif transitoire, fixés respectivement à 5,15 % et à 0,25 % en 1998. En 1999, le déplafonnement serait total et le taux de 5,4 % porterait sur l'intégralité du revenu.
Je reviens maintenant sur les amendements n°s 32 et 64 et sur les problèmes qu'ils ont posés à la commission.
La suppression de l'article 4 entraînerait une perte de recettes de 300 millions de francs, comme l'a d'ailleurs fait remarquer M. Oudin. Bien entendu, il ne s'agit pas pour moi de donner des leçons à la commission des finances ; je veux seulement rappeler que nous avons choisi, dès le départ, de respecter le déficit de 12 milliards de francs ; aussi bien avons-nous cherché, quand nous avons supprimé des sources de recettes, à les compenser.
Or, en l'occurrence, la perte de 300 millions de francs n'est pas gagée. C'est une première raison de notre hostilité à la suppression de l'article.
Par ailleurs, il est clair que ce déplafonnement s'inscrit, pour ainsi dire, dans la logique, fût-elle douloureuse, de ce qui est prévu depuis près de dix ans.
Cela dit, ce qui me gêne le plus, intellectuellement, c'est que nous sommes, nous, contre la mise sous condition de ressources des allocations familiales. En d'autres termes, nous souhaitons que tout le monde puisse percevoir des allocations familiales.
M. Alain Gournac. Nous aussi !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je le sais bien, mon cher collègue !
Si tout le monde doit pouvoir percevoir des allocations familiales, il est clair que tout le monde doit contribuer. C'est donc aussi ce scrupule intellectuel - un scrupule que, manifestement, le Gouvernement ne partage pas - qui nous empêche d'émettre un avis favorable sur les amendements n°s 32 et 64.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 32, 64 et 6 ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Tout en étant conscients de l'inquiétude des travailleurs indépendants, voire en la comprenant, dans la mesure où ceux-ci perçoivent les mêmes prestations, nous demandons qu'ils paient les mêmes cotisations ; cela nous semble simplement normal. Par conséquent, nous ne pouvons que rejeter les amendements n°s 32 et 64.
Nous ne sommes pas favorables non plus à l'amendement n° 6, qui tend à diminuer de moitié le taux de cotisation applicable en 1998 et à ne prévoir le déplafonnement qu'en 1999.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Nous comprenons très bien, comme l'a dit notre excellent rapporteur, les motivations de M. Oudin et de M. Braye. Cependant, le point de départ du travail très approfondi de la commission des affaires sociales a été de s'en tenir au chiffre prévu par le Gouvernement concernant le déficit de 1998, et c'est seulement l'articulation interne des ressources et des dépenses que nous souhaitons modifier.
L'adoption des amendements n°s 32 et 64 se traduit par une perte de recettes de 300 millions de francs ; le nôtre induit une perte de 150 millions de francs, une somme que nous avons intégrée dans le tableau d'équilibre entre les ressources et les dépenses.
Si nous voulons respecter l'objectif que nous nous sommes fixé, c'est-à-dire aboutir au déficit prévu par le Gouvernement - le Sénat ne saurait en effet aggraver le déficit - il n'est pas possible de supprimer l'article 4.
C'est la raison pour laquelle je demande que l'amendement n° 6 soit mis aux voix par priorité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, m'étant prononcé contre les trois amendements, je n'y vois évidemment aucun inconvénient. (Sourires.)
Sur un plan purement intellectuel, il est certain que la proposition de M. Fourcade est conforme à la logique.
M. le président. La priorité est ordonnée.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Nous avons bien compris l'explication de M. Fourcade. Simplement, la commission des finances a retenu un autre cadrage puisqu'elle a opté pour un taux d'augmentation beaucoup plus bas.
C'est la raison pour laquelle, par cohérence, je m'abstiendrai sur l'amendement n° 6.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 est ainsi rédigé, et les amendements identiques n°s 32 et 64 n'ont plus d'objet.

Article additionnel après l'article 4



M. le président.
Par amendement n° 76, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - I. - Tout employeur ayant la qualité de personne morale occupant un ou plusieurs salariés doit s'assurer contre le risque de non-paiement des sommes dues dont il est redevable au titre de cotisations aux organismes du régime général de la sécurité sociale.
« II. - Le régime d'assurance est mis en oeuvre par une association créée par les organisations nationales professionnelles d'employeurs représentatives.
« Cette association passe une convention avec l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale.
« III. - L'assurance est financée par les cotisations des employeurs qui sont assises sur les rémunérations servant de base au calcul des contributions au régime d'assurance chômage défini par la section première du chapitre premier du titre IV du livre III du code du travail.
« IV. - En cas de retard supérieur à deux mois dans le paiement des cotisations, l'union de recouvrement établit les relevés des créances que l'association lui verse dans les huit jours suivant la réception des relevés.
« V. - Un décret précise, en tant que de besoin, les conditions d'application du présent article. »
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Les difficultés de trésorerie que connaissent régulièrement les organismes de protection sociale nous amènent à nous demander si toutes les pistes ont bien été explorées en matière de perception des recettes de notre sécurité sociale.
Assez régulièrement, dans notre pays, des entreprises ne s'acquittent pas de leurs obligations, et les cotisations non perçues pèsent finalement sur l'ensemble du système de protection sociale.
Nous mettrons de côté les dettes d'exploitation normales qui peuvent apparaître à la clôture du bilan d'une entreprise et qui résultent des différences de date existant entre les périodes de versement des rémunérations et celles de versement des cotisations assises sur ces rémunérations.
Demeure cependant un volume plus ou moins important de créances de la sécurité sociale qui ne sont pas recouvrées et sont même, dans de nombreux cas, finalement abandonnées.
Même si certaines proviennent d'entreprises dont les difficultés financières sont telles qu'elles ne les mettent pas en mesure de régler leurs cotisations sociales, il n'en reste pas moins qu'il y a lieu, aujourd'hui, de réfléchir à un système de mutualisation de ces dettes, comme il peut en exister en d'autres domaines.
Ainsi, d'une certaine façon, on mutualise le coût des allégements de cotisations d'impôts locaux de certains contribuables au travers de la perception des frais de rôle, même s'il apparaît que le montant perçu est inférieur au montant des allégements constatés.
En matière d'assurance, il existe une forme de compensation des sinistres par le montant des primes acquittées par l'ensemble des assurés.
Le principe même de la protection sociale est d'ailleurs de mettre en oeuvre cette compensation, les cotisations des uns permettant de prendre en charge les dépenses occasionnées par la maladie des autres ou par leur retrait de la vie active.
Il n'est donc pas inutile de prévoir un tel dispositif pour les cotisations patronales en vue d'en assurer la liquidité et de permettre à la sécurité sociale de bénéficier de tous ses moyens d'action.
Les dettes dont il est question s'élèvent chaque année à une somme comprise entre 15 milliards et 20 milliards de francs. On ne serait pas loin, si l'on résolvait ce problème particulier, de solder positivement les comptes du régime général.
Cela signifie que, dans tous les cas, il conviendrait de prévoir une majoration des cotisations patronales de 1 % à 2 %, ce qui représenterait une hausse globale de 0,4 point.
Par exemple, en matière de cotisations familiales, cela correspond à une hausse de un millième de point de la cotisation des entreprises.
La modicité de ce prélèvement permettrait, dans les faits, de modifier positivement la situation de notre régime général sans alourdir de manière inconsidérée les cotisations.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Nous souhaiterions entendre l'avis du Gouvernement, monsieur le président.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le président, je comprends bien les motivations des auteurs de cet amendement, qui vise à réduire le volume des cotisations patronales impayées. Effectivement, aujourd'hui, 2 % des cotisations qui devraient être acquittées ne le sont pas. On peut souhaiter les voir rentrer avec plus de certitude et plus promptement dans les caisses de la sécurité sociale.
Je précise que, au demeurant, ce taux, après quatre ans, durant lesquels sont menées un certain nombre d'actions de recouvrement, tombe à 0,75 %.
Cependant, sur un plan technique, je ne peux approuver la proposition défendue par Mme Borvo. En effet, la création d'un fonds de garantie pour les cotisations patronales reviendrait à faire financer par l'ensemble des entreprises les défaillances de certaines d'entre elles et entraînerait une sorte de déresponsabilisation des entreprises qui ne paient pas leurs cotisations.
Lorsqu'on poursuit certaines d'entre elles, c'est parce qu'on a de vraies raisons de le faire et non pas parce qu'elles sont en difficulté ou parce qu'elles ont été amenées à déposer leur bilan.
Il faut donc, selon moi, poursuivre les actions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale. D'ailleurs, les efforts accomplis depuis une dizaine d'années ont fait descendre d'une manière très importante le niveau des dettes auprès de la sécurité sociale.
Telles sont les raisons pour lesquelles je ne suis pas favorable à l'amendement n° 76.
M. le président. Quel est, maintenant, l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je voudrais d'abord, en tant que président du conseil de surveillance de l'ACOSS, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, qui s'est réunie la semaine dernière avec l'aimable autorisation de Mme le ministre, tordre le cou à un certain nombre d'idées reçues.
Comme vient de le dire Mme le ministre, dès l'année de référence, 98,2 % du montant des cotisations sont perçus.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Même en Corse ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cela c'est le problème des départements d'outre-mer et des îles. Nous avons lu le rapport de la Cour des comptes, mon cher collègue, et nous l'avons évoqué longuement au sein du conseil de surveillance. Nous y serons très attentifs.
Quoi qu'il en soit de la situation de ces contrées insulaires, globalement, sur l'ensemble du territoire, 98,2 % du montant des cotisations sont perçus au cours de l'année de référence, et ce n'est finalement que 0,75 % de ce montant qui est inscrit en non-valeur.
Il est certain que l'amendement n° 76 déresponsabiliserait les entreprises, et nous y sommes donc défavorables. En tout cas, même si les sommes en cause sont relativement importantes - 1,8 %, cela représente 19 milliards de francs - il faut cesser de considérer que le non-paiement des cotisations par les entreprises revêt une ampleur redoutable. Après tout, après quelques années, cela ne représente plus que 6 milliards à 7 milliards de francs de défaut de recettes, ce qui correspond à un ordre de grandeur acceptable au regard de la vie économique.
Un fonds de garantie, à l'évidence, déresponsabiliserait les entreprises, et certaines s'en remettraient simplement au fonds pour pallier leur défaillance.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 76, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 5



M. le président.
« Art. 5. _ I. _ Au chapitre V du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, il est créé une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4

« Taxe de santé publique sur les tabacs

« Art. L. 245-13 . _ Il est créé, au profit de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, une taxe de santé publique de 2,5 % sur les tabacs fabriqués en France et sur les tabacs importés ou faisant l'objet d'une acquisition intracommunautaire et une taxe additionnelle de 7 % sur les tabacs à fine coupe destinés à rouler les cigarettes. Ces taxes sont assises et perçues sous les mêmes règles que la taxe sur la valeur ajoutée.
« Un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et du budget pris après avis du conseil d'administration de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés fixe les conditions d'affectation de ces taxes aux actions de prévention et notamment de lutte contre le tabagisme. »
« II. _ Les dispositions du I s'appliquent à compter du 1er janvier 1998. »
Sur l'article, la parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Dans cet article 5, le Gouvernement propose de renforcer la taxation sur les tabacs et d'en affecter le produit à un objectif de défense de la santé publique : la prévention et la lutte contre le tabagisme.
C'est une disposition qui ne devrait pas susciter de divergences entre nous.
Que le tabac tue, cela ne fait aucun doute. Qu'il ait fallu plusieurs décennies de polémiques pour admettre officiellement l'évidence de cette causalité sur les angines de poitrine, sur certains cancers, sur l'hypertension et d'autres pathologies est particulièrement regrettable.
Aujourd'hui, l'évolution de la consommation a pris une dimension dramatique, notamment avec l'apparition de jeunes fumeurs dès l'âge de douze ou treize ans, qui deviennent dépendants avant même d'avoir atteint l'âge adulte.
Les pouvoirs publics, prenant la mesure de la gravité de cette forme de toxicomanie et dépendance, ont finalement utilisé l'arme de l'augmentation du coût du tabac comme un élément de la politique de lutte contre le tabac. Je dis « finalement », car on ne peut pas ignorer la schizophrénie de l'Etat dans cette affaire, quelle que soit d'ailleurs l'appartenance politique du Gouvernement.
On nous propose aujourd'hui à la fois d'augmenter le prix à la consommation, afin d'en faire un élément dissuasif, et de transformer le montant de cette augmentation en moyen de prévention. Il s'agit bien là d'une mesure de santé publique.
L'Assemblée nationale, se fondant sur la nocivité aggravée du tabac à rouler, a décidé fort justement d'ajouter une taxe additionnelle afin de le rendre moins attractif, démarche à laquelle nous souscrivons complètement.
Nous approuvons donc la proposition du Gouvernement.
M. le président. Sur l'article 5, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 33, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose de rédiger comme suit cet article :
« Au dernier alinéa de l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale, les mots : "pour 1997" sont supprimés. »
Par amendement n° 7, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
I. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté par le paragraphe I de l'article 5 pour l'article L. 245-13 du code de la sécurité sociale, de remplacer le taux : « 2,5 % » par le taux : « 5 % ».
II. - Dans la même phrase, de remplacer le taux : « 7 % » par le taux : « 10 % ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 33.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. La commission des finances est favorable à l'aggravation de la fiscalité du tabac et à l'affectation de son produit à la CNAM, la Caisse nationale de l'assurance maladie. Chacun sait que le tabagisme, qui est l'une des principales causes de mortalité prématurée par le cancer, occasionne des dépenses colossales pour l'assurance maladie.
Toutefois, la commission des finances n'est pas d'accord avec la méthode proposée par le Gouvernement.
En effet, la création de deux taxes additionnelles, l'une sur le tabac en général et l'autre sur le tabac à rouler, rendrait encore plus complexe une fiscalité du tabac qui l'est déjà suffisamment et qui comporte d'ores et déjà trois taxes.
Par ailleurs, ces deux taxes sont manifestement contraires au droit communautaire. En effet, celui-ci n'autorise la création de telles taxes additionnelles que si elles poursuivent une finalité spécifique.
Or la spécificité des taxes proposées n'est pas avérée puisque leur effet dissuasif sur la consommation de tabac n'est pas différent de celui des autres impositions existantes sur le tabac. Leur affectation à la CNAM n'est pas non plus une particularité, puisqu'une fraction des droits de consommation sur les tabacs a déjà été affectée à celle-ci l'an dernier par la loi de finances pour 1997.
Le Gouvernement lui-même ne semble pas très sûr de la mesure qu'il propose. En effet, devant l'Assemblée nationale, vous avez déclaré, monsieur le secrétaire d'Etat, que le Gouvernement négociait avec les producteurs afin de les conduire à majorer leurs prix. Vous avez indiqué que, une fois la négociation terminée, des conséquences en seront tirées sur le mode de taxation et que « l'article 5 ne resterait en vigueur que si la hausse globale ne pouvait être obtenue par la négociation ».
Cela m'amène à la solution préconisée par la commission des finances. Plutôt que de créer des taxes nouvelles, il lui semble plus simple de relever parallèlement les droits de consommation sur les tabacs et la fraction de leur produit qui est affecté à la CNAM. Il faut savoir que les droits de consommation s'élèvent à environ 45 milliards de francs et que cette taxe rapporterait moins de 200 millions de francs.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Pas du tout !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Le tarif de ces droits devra être également complété par une part forfaitaire sur le tabac à rouler, afin de faire disparaître l'avantage dont il bénéficie par rapport aux cigarettes.
L'amendement que vous propose la commission des finances tend simplement à préparer cette opération, qui ne pourra intervenir qu'en loi de finances s'agissant d'une ressource de l'Etat.
Il vise à modifier la rédaction de l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale relatif aux ressources de la CNAM, qui dispose que celles-ci sont constituées par une « fraction du produit du droit de consommation prévu à l'article 575 du code général des impôts, dans les conditions fixées par la loi de finances pour 1997 ».
L'amendement 33 tend à supprimer la référence à l'année 1997, de façon que cette ressource puisse être aisément ajustée dans les lois de finances ultérieures, sans qu'il soit nécessaire de modifier à chaque fois le code de la sécurité sociale.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 7.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. La commission des affaires sociales approuve la création d'une taxe de santé publique sur les tabacs. En effet, toutes les études démontrent l'élasticité de la consommation de tabac par rapport à son prix, surtout à moyen terme.
Ce débat a déjà eu lieu voilà longtemps, lors de l'examen de la loi Evin. D'ailleurs, à l'époque, la majorité du Sénat avait bien voulu suivre l'avis du rapporteur que j'étais en votant cette loi. La philosophie de ce texte reposait sur trois « p » : la publicité, les prix et la prévention.
Depuis cette date, le taux de consommation de cigarettes a baissé, baisse qui a été consécutive à la hausse du prix des cigarettes.
L'Assemblée nationale a conservé l'article 5 tel qu'il figurait dans le projet de loi, mais elle a ajouté à la taxe de 2,5 % une taxe additionnelle de 7 % sur les tabacs à rouler. Ces derniers, qui sont très prisés, notamment chez les jeunes, ont une teneur en nicotine et en goudron supérieure à celle des cigarettes.
Le professeur Tubiana, président de nombreuses associations de lutte contre le cancer, notamment contre le cancer du poumon, nous a écrit pour nous indiquer que l'augmentation réduite du prix du tabac à rouler ces dernières années avait provoqué un net accroissement de la consommation de ce tabac, notamment chez les jeunes et chez les gens de peu de moyens.
Nous connaissons les conséquences de l'association du tabac à rouler et du produit carbocancérigène du papier. Le remède est pire que le mal !
Pour éviter les effets pervers que nous connaissons actuellement, il faut donc augmenter plus le prix du tabac à rouler que celui des cigarettes.
En ce qui concerne le problème des engagements européens, je m'en remets aux spécialistes. J'ai écouté les propos qui ont été tenus à la fois par M. Kouchner, à l'Assemblée nationale, et par M. Oudin. Nous verrons bien si la conformité aux engagements européens est avérée.
La commission des affaires sociales propose d'alourdir de manière significative les taux qui sont proposés.
Elle estime, en effet, que la création d'une nouvelle taxe sur les tabacs ne saurait véritablement constituer une mesure de santé publique que si elle dissuade la consommation. Or une augmentation du prix des cigarettes de 2,5 % n'est pas dissuasive pour les consommateurs. Dans ces conditions, elle vous propose de porter les taux des deux taxes additionnelles à 5 % pour les cigarettes et à 10 % pour les tabacs à rouler.
Je tiens à dire que nous sommes favorables à une taxe de santé publique. Voilà quelques années, une taxe de un centime par cigarette a été instaurée, mais elle a été affectée au budget de l'Etat. L'assurance maladie n'en a jamais vu la couleur !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Tout à fait !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. J'éprouve donc la plus grande méfiance à l'égard du ministère des finances auquel sont versées les taxes, même si, a priori, celles-ci sont destinées à l'assurance maladie. (MM. Machet et Chérioux applaudissent.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 33 et 7 ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Les auteurs de ces amendements ont exprimé des opinions radicalement différentes. J'abonde dans le sens de Mme Dieulangard, bien sûr, et de vous-même, monsieur le rapporteur. Seulement, « chat échaudé craint l'eau froide » !
En tout cas, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 33 présenté par M. Oudin. En effet, vous avez raison, monsieur Descours : toutes les augmentations du prix du tabac, en particulier des cigarettes, ont été affectées au budget de l'Etat et jamais à la CNAM. On a mis des années à connaître le montant exact des sommes qui étaient attribuées à la CNAM.
Si mes chiffres sont exacts - cela semble être un secret ! - 54 milliards de francs ont été versés au budget de l'Etat et 2,7 milliards de francs ont été affectés à la CNAM. On discute toujours ces chiffres ! De toute façon, c'est énorme !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Il s'agit de 43 milliards de francs !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Pour ma part, je maintiens le chiffre de 54 milliards de francs. C'est le produit de la vente des cigarettes qui est affecté directement au budget de l'Etat.
Comme je l'ai dit à l'Assemblée nationale, monsieur Oudin, si nous parvenons, au travers de la négociation, à prendre des mesures qui servent non pas le budget de l'Etat, mais la santé publique, nous serons favorables, en effet, au système que vous proposez. Nous verrons quelles dispositions peuvent être considérées comme des mesures de santé publique.
Je vous répondrai maintenant très précisément sur les références à Bruxelles et sur la possibilité de relever les taxes sur les cigarettes. Nous avons demandé au Conseil d'Etat si cela était possible, en ciblant, comme nous le souhaitons, les campagnes de la CNAM sur le tabagisme de la jeunesse. La réponse est positive.
Ne croyez pas que l'augmentation du prix des cigarettes soit une mesure anodine. C'est toujours et dans tous les pays ce qui a permis de faire chuter considérablement la consommation de tabac, en particulier chez les jeunes.
Je souhaiterais comme vous, monsieur Descours, augmenter davantage le prix du tabac, mais je ne crois pas que cela soit possible, car cela provoquerait une formidable levée de boucliers. Si nous parvenons à augmenter, comme nous le proposons, de 2,5 % le prix des cigarettes et de 7 % celui du tabac à rouler, ce ne sera déjà pas si mal, car nous pourrons financer les campagnes de prévention à l'adresse de la jeunesse.
En ce qui concerne le tabac à rouler, je partage votre sentiment, monsieur Descours, et pourtant je suis défavorable à votre amendement, pour les raisons que je viens d'exposer. Le tabac à rouler est effectivement beaucoup plus chargé en nicotine que les cigarettes Passez devant les lycées, et vous verrez que les jeunes commencent à fumer à partir de douze ou treize ans, et très singulièrement du tabac à rouler, parce que c'est moins cher, c'est vrai, et aussi parce qu'une espèce de mode est apparue.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cela ressemble à un joint !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Effectivement ! Cela explique peut-être le succès de ce tabac ! En tout cas, il est très chargé en nicotine, de sorte qu'il rend encore plus dépendant que les cigarettes, ce qui est quand même très criminel.
Par conséquent, tout en partageant votre sentiment, monsieur Descours, je me vois dans l'obligation, par réalisme, d'émettre un avis défavorable sur l'amendement n° 7, avis encore plus défavorable sur l'amendement n° 33.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Hier soir, Mme la ministre nous a dit que le contre-projet que nous proposions ne prévoyait aucune économie ni aucune recette. En voilà une !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Effectivement !
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Notre suggestion de majorer de 5 % les tabacs en général et de 10 % le tabac à rouler devrait permettre de parvenir au maintien de l'objectif de déficit établi à 12 milliards de francs pour 1998.
En ce qui concerne l'amendement n° 33 présenté par M. Oudin, je tiendrai le même raisonnement que tout à l'heure.
Je comprends très bien la structure de cet amendement, mais il a un immense défaut : il ne permet pas de boucler le financement de la loi de financement de la sécurité sociale, car il reporte la décision à une discussion postérieure à la loi de finances. Par conséquent, il est absolument impossible, au Gouvernement comme au Parlement, de pouvoir arrêter le déficit pour l'année prochaine à un certain chiffre.
On s'en remet à une négociation de type féodal entre le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et la SEITA. C'est tout à fait intéressant ! Il s'agit de la survivance d'un droit qui me paraissait dépassé. Je ne crois pas que l'on puisse, dans le cadre d'un texte précis sur le financement de la sécurité sociale, dans lequel il est question de branches, d'objectifs de dépenses et de recettes ; s'en remettre à une négociation postérieure entre le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et le président de la SEITA pour instaurer une recette supplémentaire en faveur de la Caisse nationale d'assurance maladie. Cela me paraît en totale contradiction avec le mécanisme dans lequel nous nous trouvons.
Par conséquent, je vous demande, mes chers collègues, contre l'avis de M. Oudin et celui du Gouvernement, de voter l'amendement n° 7 de la commission. En effet, d'une part, il accepte le principe de la création de la taxe sanitaire sur le tabac et, d'autre part, il représente un apport à la construction générale que nous avons édifiée pour maintenir le déficit à 12 milliards de francs l'année prochaine.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je formulerai deux remarques.
En premier lieu, moi qui ai l'habitude de déchiffrer la pensée de mon ministre de tutelle, je ne crois pas, monsieur Fourcade, qu'elle vous ait reproché de ne pas proposer de recettes supplémentaires. En fait, nous estimons que l'addition de taxes ne présente pas d'avantage.
En second lieu, j'ai été finalement assez convaincu - pardonnez-moi, monsieur le président, de changer d'avis - par l'argumentation de M. le rapporteur et de M. le président de la commission des affaires sociales. Je m'en remets donc, pour l'amendement n° 7, à la sagesse du Sénat.
M. Jean Chérioux. Ah !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Ce débat est important parce que c'est un débat de principe. Alors, disons-le tout net, nous sommes favorables à l'accroissement de la taxation du tabac. Le graphique que vous trouverez dans mon rapport écrit mais aussi dans d'autres documents montre en effet parfaitement la corrélation inverse entre l'augmentation du prix et la baisse de la consommation. De ce point de vue, nous poursuivons donc le même objectif.
Toutefois, nous nous heurtons à des problèmes de cohérence fiscale et législative. Cohérence fiscale, car nous ne souhaitons pas voir se multiplier les taxes sur un même produit. Cette attitude est non seulement celle de la France mais aussi celle de l'Europe. Nous essayons donc de restreindre la multiplication des taxes sur les différents produits. Nous pouvons recourir aux droits de consommation lorsqu'ils existent.
M. le secrétaire d'Etat a déclaré tout à l'heure que, si ces recettes sont affectées au budget de l'Etat, nous n'en verrons pas la couleur. Tel a peut-être été le cas dans le passé, mais je pense que le Parlement, « surveillant » le Gouvernement, peut parfaitement se garantir contre ce risque.
A la suite du vote de l'Assemblée nationale, les droits de consommation sur les tabacs s'élèvent à 43,8 milliards de francs, la taxe de 0,75 % affectée au BAPSA, le budget annexe des prestations sociales agricoles, à 438 millions de francs, la taxe de santé publique de 2,5 % sur les tabacs à 1,3 milliard de francs, la taxe de santé publique de 7 % sur les tabacs à rouler à 130 millions de francs, soit quatre taxes.
Il est possible de poursuivre dans cette voie, mais la commission des finances n'approuve pas la multiplication des taxes.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, j'ignore de quelle façon vous avez consulté le Conseil d'Etat,...
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Par la voie habituelle, monsieur le sénateur, pas par effraction. (Sourires.)
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. ... mais la commission des finances estime qu'il semblerait - vous voyez à quel point je suis prudent - que la création de taxes additionnelles soit contraire à la directive n° 92-12/CEE du 25 février 1992.
J'en viens aux derniers propos tenus par M. le président Fourcade, qui illustrent bien la difficulté du système. Selon le président de la commission des affaires sociales, l'adoption de l'amendement n° 33 provoquerait un déséquilibre des comptes. Certes, mais l'équilibre sera rétabli dans un certain laps de temps grâce à un versement aux régimes sociaux qui sera prévu dans la loi de finances.
Pour toutes ces raisons, nous maintenons l'amendement n° 33, car il s'agit d'un problème de principe que nous avons le devoir de soulever devant la Haute Assemblée.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 33.
M. Roland du Luart. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. du Luart.
M. Roland du Luart. Après avoir écouté les différents intervenants, je dois avouer que je suis assez troublé.
Je comprends les motifs qui animent ceux qui se veulent responsables en matière de consommation excessive de tabac. Mais vous avouerez que l'on peut être étonné d'entendre un membre éminent du Gouvernement préconiser la consommation de drogues douces, tel que le cannabis.
M. Alain Gournac. Oh que oui !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je n'ai rien dit de tel !
M. Roland du Luart. Vous savez très bien de qui je veux parler.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Ce n'est pas de moi !
M. Roland du Luart. En effet, monsieur le secrétaire d'Etat. Je ne fais pas d'amalgame. Vous, vous avez parlé de joint, mais vous avez un collègue éminent au sein du Gouvernement qui, lui, a parlé de la libéralisation du cannabis.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Ah bon ! L'adjectif « éminent » ne s'appliquait donc pas à moi ? (Sourires.)
M. Roland du Luart. Je voulais simplement dire que nous sommes assez hypocrites en matière de drogue.
M. Jacques Machet. C'est très grave !
M. Roland du Luart. En revanche, je suis inquiet par la dimension économique du problème. Je comprends, certes, les raisons médicales ou de santé qui sont avancées ; mais si nous augmentons aujourd'hui très fortement les taxes, nous assisterons à un détournement de trafic : les consommateurs iront acheter leur tabac à rouler en Belgique et l'introduiront en France. Il faut donc préconiser une uniformisation des taxes à l'échelon européen, faute de quoi nous créerons des situations anormales.
Par ailleurs, M. Kouchner souhaite, pour des raisons de santé publique, et je le comprends, une chute très forte des ventes du tabac à rouler. Mais n'oublions pas qu'il existe une usine très importante de la SEITA à Metz pour laquelle le Gouvernement devra trouver des solutions économiques, sous peine d'accroître le nombre de chômeurs.
Le Gouvernement doit très rapidement trouver un dispositif global par le biais d'une négociation tendant à faire augmenter très significativement le prix des produits les moins chers dont la consommation se développe au détriment de celle des cigarettes et qui sont achetés par des jeunes ayant un pouvoir d'achat très limité.
Il ne faut pas non plus que nos décisions, telles que les mesures fiscales, favorisent les grands groupes internationaux de tabac. Il était important de le souligner. Je suis donc personnellement très réservé quant à la position à adopter. En effet, il n'est pas possible de charger la barque du déficit de la sécurité sociale mais il faut prendre garde aux répercussions économiques des mesures qui seront prises.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Les propos que vient de tenir M. du Luart sont très importants. Nous ne pourrons pas éviter ce débat sur tous les produits toxiques, légaux ou non, qui provoquent des ravages dans notre pays. J'en avais lancé voilà quelque temps et vous avez eu, mesdames, messieurs les sénateurs, la bonté d'y souscrire. Nous examinerons donc cette question ultérieurement. Mais il s'agit d'un problème très grave qui ne peut être abordé sous forme de plaisanteries - je ne parle pas des vôtres, monsieur le sénateur - ou de propos quelque peu intempestifs dans des magazines satiriques. Il est beaucoup plus important.
M. Roland du Luart. C'est certain !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Mais, à un moment donné, il faudra bien, je le répète, débattre des toxiques légaux et illégaux ainsi que de l'utilisation massive en France des psychotropes que vous avez vous-même évoquée.
Par ailleurs, monsieur le sénateur, je comprends fort bien que vous vous interrogiez sur le lien entre la santé publique et le chômage. Je suis conscient de ce problème. Pour un responsable de la santé publique, le choix est très vite fait : il existe d'autres causes de chômage. D'ailleurs, nous n'en sommes pas à fermer les usines.
Je reprends vos chiffres. Lorsque nous envisageons d'augmenter le prix du tabac - M. Descours y a fait allusion - on nous rétorque souvent que la contrebande va se développer. Sachez, monsieur le sénateur, qu'elle sévit en Espagne et en Italie, notamment où les cigarettes sont les moins chères. Peut-être est-ce dû à la culture nationale ou à des raisons géographiques ?
Par ailleurs, d'après les chiffres de la SEITA, un marché noir existerait à nos frontières. En fait, ce n'est pas un marché noir : il s'agit essentiellement des frontaliers qui vont chercher leur tabac de l'autre côté de la frontière. Cela représente 1 % ou 2 % de la consommation. Ce n'est pas beaucoup et j'en tiens largement compte. En tout cas, on ne peut pas prétendre que, pour préserver l'emploi, il faut sacrifier la santé publique. Ce fut le cas pendant très longtemps, parce que des subventions de l'Europe étaient allouées aux planteurs de tabac.
Le tabac, je vous le rappelle, est la cause directe de 60 000 morts dans notre pays. Est-il plus important d'en diminuer la consommation ou de s'interroger sur les conséquences éventuelles de celle-ci ? A mon avis, il faut reconvertir toutes ces industries, ce qui serait beaucoup plus profitable pour notre pays, pour l'emploi et pour la santé publique.
M. François Autain. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Autain.
M. François Autain. Puisque le Gouvernement nous y invite, je vais essayer de faire preuve de la sagesse bien connue de la Haute Assemblée.
Selon que la taxe sur le tabac est dévolue à l'Etat ou à la CNAM, elle obéit à deux logiques différentes. En effet, l'Etat a l'intérêt, me semble-t-il, à ce que les consommateurs fument le plus de cigarettes possible pour faire entrer le plus de taxes possible dans le budget de l'Etat afin d'équilibrer celui-ci.
En revanche, lorsqu'il s'agit de la CNAM, la situation est quelque peu différente. L'objectif alors est d'essayer de financer les dépenses supplémentaires entraînées par la consommation du tabac. Je ne sais pas si cette consommation a été chiffrée, mais elle est sans doute supérieure aux 2,7 milliards de francs qui résultent des taxes sur le tabac et qui sont affectées à la CNAM.
Si jamais les Français en venaient à ne plus fumer, ce serait une source d'économies pour la sécurité sociale mais une source de diminution de recettes pour l'Etat, ce qui lui poserait un certain nombre de problèmes, d'où ma proposition.
Je me demande s'il ne faudrait pas essayer de réfléchir à une meilleure répartition entre la part qui revient à l'Etat et celle qui est dévolue à la CNAM, sans pour autant augmenter chaque année le taux des taxes. Il existe une disproportion très importante. L'Etat a tendance à user et à abuser de ces recettes dites de poche alors que la CNAM doit faire face à des besoins urgents, tels que le financement des pathologies liées à l'excès de tabac.
En revanche, la libéralisation du cannabis - je ne me prononce pas sur le principe - aurait au moins une conséquence intéressante : nous pourrions lever une taxe sur le cannabis, ce qui permettrait d'équilibrer les comptes de la CNAM ou de l'Etat. Lorsque vous réfléchirez à cette question, mes chers collègues, vous ne devrez pas perdre de vue les conséquences qui résulteraient pour le budget de l'Etat et, éventuellement, pour celui de la sécurité sociale d'un prélèvement d'une taxe sur les ventes de cannabis, si celui-ci était dépénalisé.
M. Alain Vasselle. Vous ne manquez pas d'humour !
M. François Autain. Pour toutes ces raisons, nous voterons l'amendement n° 33, en souhaitant que le Gouvernement et le ministère des finances s'efforcent, dans les années à venir, d'assurer une répartition des taxes sur les tabacs plus favorable à la CNAM.
M. Paul Blanc. Pourquoi pas la totalité ?
M. François Autain. Ce serait effectivement l'idéal, mais je ne souhaite pas le proposer parce que ce serait difficile à réaliser, surtout dans l'immédiat.
M. Alain Gournac. Ce serait plus normal !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 7.
M. Claude Huriet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. J'ai été très attentif aux commentaires que vient de faire M. le secrétaire d'Etat à propos des conséquences de la contrebande. En effet, il a donné une information qui est en contradiction avec celle que j'ai recueillie, voilà quelques semaines, auprès d'un haut responsable des douanes de ma région.
Contrairement à ce qui ressort de nos échanges, il existe une corrélation entre l'augmentation du prix du tabac et la diminution de la consommation. Cette corrélation ne serait qu'apparente, car interviendrait, au fur et mesure de l'augmentation des prix, un accroissement des produits de contrebande.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez établi une distinction entre les différents pays de l'Union européenne en considérant - et c'est d'ailleurs très intéressant car paradoxal - que les pays qui pratiquent un prix moins élevé pour les cigarettes seraient davantage exposés aux produits de contrebande. C'est d'autant plus intéressant que, si ces observations sont avérées, la stratégie sur laquelle nous sommes d'accord en matière de politique de santé publique risquerait d'être contredite par les chiffres.
Les informations dont vous disposez et celles qui procéderaient de contacts avec le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie permettent-elles de savoir si la corrélation entre la consommation et le prix des produits comporte un biais significatif dû à la contrebande ?
Cela étant dit, quelle que soit la réponse que vous pourrez nous apporter ce soir, ou lors d'un débat ultérieur, il va de soi que je voterai l'amendement de la commission des affaires sociales.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, je suis très ferme sur ce point pour en avoir discuté voilà quelques jours encore avec M. Tubiana : il y a une corrélation absolue entre la hausse du prix des cigarettes et la baisse de la consommation, singulièrement chez les jeunes, et ce dans tous les pays.
En revanche, et c'est là un fait que je qualifierai de culturel pour être pudique dans mes appréciations, ce n'est pas dans les pays où le prix du tabac est élevé que la contrebande sévit le plus puisqu'elle est plus développée dans des pays comme l'Espagne et l'Italie où les prix du tabac sont bas.
M. Paul Blanc. C'est vrai, mais ces pays sont des plaques tournantes !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Telles sont les deux informations que je vous apporte. Il y en a bien d'autres. Ce qui est certain, c'est que l'augmentation du prix du tabac entraîne une baisse de la consommation chez les jeunes.
M. Claude Huriet. De la consommation officielle !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, ainsi modifié.

(L'article 5 est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné vingt-trois amendements en deux heures vingt, soit, comme aurait dit le président Dailly, un braquet de dix amendements à l'heure. Au rythme actuel, si vous souhaitez achever l'examen des articles dans la nuit, nous en terminerons au mieux à quatre heures trente ou cinq heures.

Article additionnel après l'article 5



M. le président.
Par amendement n° 58 rectifié, MM. Arnaud, Belot, Blaizot, Bécot, Fauchon, Hoeffel, Doublet et Raffarin proposent d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le code général des impôts est ainsi modifié :
« a) Dans le premier alinéa du 1° du I de l'article 403, le tarif : "5 474 francs" est remplacé par le tarif : "5 450 francs" et dans le 2° du I du même article, le tarif : "9 510 francs" est remplacé par le tarif : "9 467 francs" ;
« b) Dans le 2° de l'article 438, le tarif : "22 francs" est remplacé par le tarif : "29,60 francs" et dans le 3° du même article, le tarif : "7,60 francs" est remplacé par le tarif : "10 francs" ;
« c) Dans le troisième alinéa du a) du I de l'article 520 A, le tarif : "17 francs" est remplacé par le tarif : "14,50 francs". »
La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud. L'an dernier, lors de l'examen par le Parlement du premier projet de loi de financement de la sécurité sociale, l'article 24 de ce texte avait été adopté, certes après discussion. Cet article visait à renforcer la lutte contre l'alcoolisme, sujet ô combien d'actualité au moment où était lancée la nouvelle campagne contre l'alcoolisme. Il visait aussi à assurer des ressources complémentaires, en particulier pour soutenir une politique de prévention.
Cet objectif a été approuvé, notamment par moi-même. Toutefois, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, de nombreuses voix se sont élevées pour contester le financement de cette politique.
En effet, 60 % des produits alcoolisés consommés en France ont été exclus de l'assiette contributive à cet effort nécessaire, qui aurait pourtant dû être un effort solidaire entre toutes les boissons alcoolisées. Ces 60 % épargnés, ce sont les vins.
Or, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, qui dit alcoolisme dit excès de consommation d'alcool sous toutes ses formes. En effet, ce qui importe, c'est non pas la quantité de liquide bue, mais la quantité d'alcool ingérée.
Certes, on ne boit pas le vin, la bière ou un alcool dit fort, c'est-à-dire un spiritueux, de la même façon. Savez-vous pourtant qu'un verre de vin contient autant d'alcool qu'un verre de cognac, d'armagnac ou de calvados, voire une chope de bière ?
Savez-vous encore qu'un verre de cognac est déjà taxé à 1,90 franc et un verre de vin à 3 centimes, alors qu'ils contiennent une quantité d'alcool identique ?
En chiffres arrondis, un litre d'alcool pur en provenance des spiritueux acquitte 120 francs, contre 1,80 franc s'il est issu du vin, c'est-à-dire soixante fois plus ! Certes, il y a l'histoire et chacun a des intérêts politico-économiques, voire des intérêts particuliers à défendre. Cependant, il n'est pas acceptable, compte tenu des objectifs que l'on poursuit, de faire perdurer ces discriminations.
L'article additionnel que je soumets au Sénat a le mérite non pas de rééquilibrer les contributions - le fossé est trop grand - mais d'appeler chacun à une contribution solidaire. En aucun cas, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, cela ne vous prive de ressources puisque, au contraire, l'assiette se trouve considérablement élargie et donc le taux de cotisation amoindri.
Il s'agit donc d'une mesure d'équité. En effet, il est tout de même paradoxal que l'on ne vise, en parlant d'alcoolisme, que les spiritueux à 40 degrés qui, tous confondus, ne représentent que 5,6 % de la consommation d'alcool pur et les bières à 5,5 degrés qui représentent 18 % de cette consommation, en ignorant les vins à 11,5 degrés qui représentent 60 % de la consommation d'alcool. Cette discrimination pourrait sans aucun doute intéresser la Cour européenne de justice.
Ayant pris conscience de cette anomalie, le Gouvernement avait, en 1997, missionné M. Denis Jacquat pour analyser ces différences de traitement entre produits alcoolisés et pour proposer des solutions tendant à une plus grande équité. Il ne semble pas que vous ayez repris ces travaux. C'est donc l'objet de cet amendement qui tend à insérer un article additionnel. Je vous demande, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, de l'approuver et vous, mes chers collègues, de l'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je voudrais rappeler un point d'histoire : si nous en sommes là, s'agissant des différences de taxation, c'est parce que l'année dernière, au moment de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, il y avait eu, à l'Assemblée nationale, une bataille mémorable. Celle-ci n'avait pas opposé la droite et la gauche. Chacun sait, en effet, que, lorsque l'on parle d'alcool en France, il y existe un transcourant ; nous l'avons souvent constaté. Le résultat de ce débat houleux et prolongé a été les taux sur les alcools forts et les vins qui sont actuellement en vigueur.
L'année dernière, nous avons refusé de revenir sur ce débat lors de l'examen du projet de loi relatif à la sécurité sociale. Je vous invite, mes chers collègues, à faire de même cette année. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement. (M. Chérioux applaudit.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement partage l'avis de M. le rapporteur : il est défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 58 rectifié.
M. Paul Blanc. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Blanc.
M. Paul Blanc. Je partage, moi aussi, l'avis de la commission. Je voudrais simplement rappeler à M. Arnaud ce que les Américains appellent le french paradox : les consommateurs de vin rouge ont 30 % de moins de risques de développer une maladie cardio-vasculaire que les personnes qui ne consomment pas de vin.
Il serait très intéressant que le Sénat constitue, peut-être à travers l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, une commission pour étudier scientifiquement quels sont les produits qui, dans le vin, protègent contre les maladies cardio-vasculaires.
M. Emmanuel Hamel. Le tanin !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. L'huile d'olive, aussi, en protège !
M. Philippe Arnaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud. Je ne surprendrai personne en disant que je voterai cet amendement. Je vous invite, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à ne plus parler de lutte contre l'alcoolisme si par une position de principe on exclut 60 % des produits alcoolisés.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 58 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 6



M. le président.
« Art. 6. _ I. _ Il est inséré, au chapitre V du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, une section 5 ainsi rédigée :

« Section 5

« Prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine
et les produits de placement

« Art. L. 245-14 . _ Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à un prélèvement sur les revenus et les sommes visés à l'article L. 136-6. Ce prélèvement est assis, contrôlé, recouvré et exigible dans les mêmes conditions que celles qui s'appliquent à la contribution visée à l'article L. 136-6.
« Art. L. 245-15 . _ Les produits de placement assujettis à la contribution prévue aux I et II de l'article L. 136-7 sont assujettis à un prélèvement social.
« Les dispositions des III, IV et V de ce même article sont applicables au prélèvement mentionné à l'alinéa précédent.
« Art. L. 245-16 . _ I. _ Le taux des prélèvements sociaux mentionnés aux articles L. 245-14 et L. 245-15 est fixé à 2 %.
« II. _ Le produit des prélèvements mentionnés au I est versé, pour la moitié de son montant à la Caisse nationale des allocations familiales et pour la moitié de son montant à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés. »
« II. _ Les dispositions du I du présent article entrent en vigueur dans les conditions fixées ci-après :
« 1° En tant qu'elles concernent le prélèvement mentionné à l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale, elles s'appliquent à compter de l'imposition des revenus de 1997 ;
« 2° En tant qu'elles concernent le prélèvement mentionné à l'article L. 245-15 du code de la sécurité sociale, elles s'appliquent aux produits de placement mentionnés au I de l'article L. 136-7 de ce code sur lesquels est opéré à partir du 1er janvier 1998 le prélèvement prévu à l'article 125 A du code général des impôts et aux revenus visés au II de l'article L. 136-7 susmentionné assujettis au prélèvement à compter de cette même date.
« III. _ Au I de l'article 24 de la loi de finances pour 1994 (n° 93-1352 du 30 décembre 1993), les mots : "des années 1993 à 1997" sont remplacés par les mots : "des années 1993 à 1996". »
« Au II du même article 24, les mots : "des années 1994 à 1998" sont remplacés par les mots : "des années 1994 à 1997".
« A l'article 106 de la loi de finances pour 1984 (n° 84-1208 du 29 décembre 1984), après les mots : "à compter du 1er janvier 1985", sont insérés les mots : "jusqu'au 31 décembre 1997". »
Par amendement n° 8, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose, dans le premier alinéa du texte présenté par le I de l'article 6 pour l'article L. 245-15 du code de la sécurité sociale, après les mots : « assujettis à la contribution prévue aux I et II de l'article L. 136-7, », d'insérer les mots : « , à l'exception des intérêts, primes et produits visés aux 1°, 2° et 3° du II de ce même article, ».
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 102 rectifié, présenté par M. Huriet et les membres du groupe de l'Union centriste, et tendant, dans le dernier alinéa de l'amendement n° 8, à remplacer, les mots : « et 3° » par les mots : «, 3°, 6° et 7° ».
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 8.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. La commission des affaires sociales admet le principe d'un certain rééquilibrage des prélèvements sociaux entre revenus du travail et revenus du capital. Elle ne s'oppose pas à une harmonisation des assiettes des prélèvements sur les revenus de l'épargne et du patrimoine affectés aux régimes sociaux dès lors qu'elle a rejeté la majoration de 4,1 points de la CSG, qui aurait pesé sans contrepartie, on l'a vu, sur un certain nombre de professionnels.
Le présent projet de loi alourdit en effet considérablement les prélèvements sur l'épargne de plus de 20 milliards de francs. Au total, l'épargne, sur laquelle pèsent déjà environ 67 milliards de francs de prélèvements, sera taxée de 23 milliards de francs supplémentaires.
Là encore, l'impact de cette mesure sur le comportement des épargnants n'a pas été évalué. Nous sommes dans un monde ouvert, dans une Europe où les capitaux circulent librement. Or, les majorations proposées de 150 % pour les produits d'épargne populaire ne peuvent rester sans conséquence. En effet, avec cet amendement, nous parlons de l'épargne populaire, des plans d'épargne logement, notamment, de l'assurance vie, que détiennent tous les Français, même les plus modestes.
Comment prendre des engagements d'épargne à long terme dès lors que le livret A, par exemple, offre une rémunération positive nette de tout prélèvement fiscal et social et se présente comme un placement totalement garanti et parfaitement liquide ?
Afin de rendre ce dispositif supportable pour les classes moyennes et d'éviter une aggravation du déficit en 1998, la commission des affaires sociales propose d'exclure de l'assiette des prélèvements destinés à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés et à la Caisse nationale des allocations familiales, les intérêts et primes des comptes et plans d'épargne logement, ainsi que les produits d'assurance vie. Il s'agit d'une épargne populaire ; ce ne sont pas des placements du grand capital.
Les plans d'épargne logement sont en effet devenus, avec l'assurance vie, les placements les plus recherchés par les ménages des classes moyennes et populaires, c'est-à-dire par tous ceux qui ont un besoin d'épargne pour acquérir leur logement. Ainsi, un ménage sur trois détient un plan d'épargne logement ou une assurance vie, cette dernière permettant de constituer un complément de retraite.
Je tiens à dire aussi que l'aide apportée par les plans d'épargne logement a un effet sur l'achat de logement neuf, donc sur la construction, et par conséquent sur l'emploi. C'est par des mesures indirectes comme celles-là que l'on affecte la construction et, ensuite, l'emploi, que l'on s'efforce pourtant de développer par la création de ce que l'on appelle les « emplois Aubry ».
M. le président. La parole est à M. Huriet, pour défendre le sous-amendement n° 102 rectifié.
M. Claude Huriet. Les revenus et plus-values tirés de l'épargne salariale ont, jusqu'à l'entrée en vigueur de la CRDS, en février 1996, et de la CSG, en janvier 1997, été totalement exonérés d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales, en contrepartie du maintien des sommes investies pendant au moins cinq ans. A la suite des augmentations successives du taux de la CSG, ces revenus et gains subiront, dès l'année 1998, un taux global de CSG de 7,5 %.
Cet alourdissement de la CSG équivaut à assujettir aux charges sociales des revenus et plus-values exonérés de celles-ci et à faire peser cet assujettissement exclusivement sur les salariés.
L'assujettissement de ces produits à deux prélèvements supplémentaires porterait le taux global de prélèvements sociaux, y compris la CRDS et la CSG, à 10 %. Le présent amendement a pour objet d'exonérer du taux des prélèvements pour la CNAVTS et la CNAF les revenus et gains tirés de l'épargne salariale à l'issue de la période d'indisponibilité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 102 rectifié ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 8 et sur le sous-amendement n° 102 rectifié ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je suis défavorable à l'amendement de la commission, pour les raisons qui, l'année dernière, ont poussé M. Descours à accepter cette même assiette. Il écrivait alors : « Comme lors de l'introduction de la CRDS, votre commission approuve globalement l'élargissement de l'assiette de la CSG aux revenus du patrimoine et de l'épargne, dès lors que demeureront exonérés les produits de l'épargne populaire - livret A, caisse d'épargne, CODEVI, livret d'épargne et livret jeunes. »
C'est exactement ce que nous proposons, et c'est pourquoi nous rejetons l'amendement n° 8.
Le Gouvernement est également opposé au sous-amendement n° 102 rectifié.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je remercie beaucoup Mme la ministre de me lire autant, puisqu'elle m'a déjà cité hier. Cependant, je voudrais lui rappeler que, en l'occurrence, il s'agit non pas de la CSG, mais des prélèvements pour la CNAF et la CNAVTS.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. L'année dernière, M. le Premier ministre a élargi l'assiette de la CSG et, sur cette assiette, vous vous êtes exprimé ainsi que je l'ai dit à l'instant.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Non !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 102 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 77, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, à la fin du I du texte présenté par le I de l'article 6 pour l'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale, de remplacer le taux : « 2 % » par le taux : « 5 % ».
Par amendement n° 34, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose de remplacer, dans le I du texte présenté par le I de l'article 6 pour l'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale, le taux : « 2 % » par le taux : « 1,5 % ».
La parole est à M. Lefebvre, pour défendre l'amendement n° 77.
M. Pierre Lefebvre. L'article 6 modifie assez remarquablement les règles en vigueur en matière de prélèvements sociaux sur les revenus du capital et du patrimoine.
Ces dispositions, déjà relativement anciennes puisqu'elles datent des lois de finances de 1983 et 1984, ne produisaient jusqu'à présent que des effets limités sur les recettes des deux régimes bénéficiaires, à savoir la branche famille et l'assurance vieillesse.
Le produit des contributions est donc majoré par l'article 6 dans des proportions non négligeables du fait d'une modification assez sensible de l'assiette du prélèvement, qui se rapproche de celle de la contribution sociale généralisée pour cette catégorie de revenus des particuliers.
Pour notre part, nous estimons qu'il s'agit là d'une option qu'il convient encore de renforcer.
Moyennant quelques aménagements souhaitables sur l'assiette éventuelle du prélèvement, il nous semble, en effet, indispensable de prévoir des mesures spécifiques de relèvement du produit des prélèvements sociaux sur les revenus du capital dans le but de dégager les ressources susceptibles de financer les interventions de la sécurité sociale.
Nous proposons donc, avec le présent amendement, de porter le taux de prélèvement de 2 % à 5 %, en vue de mettre à la disposition de la protection sociale, et de deux de ses branches en particulier, de nouveaux moyens d'action.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 34.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. S'agissant de la politique générale de taxation de l'épargne, la commission des finances préfère un taux plus faible sur une base plus large à un taux plus élevé sur une base dont on retirerait un certain nombre de tiroirs ou de compartiments.
C'est la raison pour laquelle elle vous propose, avec l'amendement n° 34, de réduire de 0,5 point le taux prévu pour le nouveau prélèvement social sur les revenus du capital.
L'extension de l'assiette du nouveau prélèvement devrait, en effet, faire peser 4,5 milliards de francs de prélèvements supplémentaires sur les revenus de l'épargne.
En réduisant le taux du nouveau prélèvement de 2 % à 1,5 %, taux que nous proposons, on accepte l'extension d'assiette mais on réduit ses effets sur les contribuables. En effet, le cumul des prélèvements opérés devait rapporter 3,7 milliards de francs en 1998 à droits constants, et 8,2 milliards de francs avec la modification proposée, soit un surcroît d'imposition de 4,5 milliards de francs.
La réduction du taux de 2 % à 1,5 % ramènerait le rendement de l'impôt à 6,1 milliards de francs, soit un surcroît d'imposition de 2,4 milliards de francs seulement, lequel permettrait de financer et au-delà la déductibilité du nouveau prélèvement que la commission des finances juge souhaitable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 77 et 34 ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Pour ce qui est de l'amendement n° 77, nous considérons déjà que le prélèvement opéré sur l'épargne dans le projet de loi que présente le Gouvernement est excessif. Or cet amendement vise à l'alourdir encore. Nous y sommes donc défavorables.
La logique exprimée par notre collègue M. Oudin dans l'amendement n° 34 est juste. Soit nous avons des taux faibles appliqués sur une assiette large, soit nous avons des taux plus élevés appliqués sur une assiette étroite.
Mais, au-delà de cette logique, nous voulons faire passer un message : l'épargne populaire que constituent les plans d'épargne logement et l'assurance vie doit être taxée le moins possible. Quand il s'agit d'autres modes d'épargne, le message n'est évidemment pas le même !
C'est la raison pour laquelle nous sommes défavorables à l'amendement n° 34. Nous proposons, en effet, une assiette un peu plus étroite, puisque nous retirons le plan d'épargne logement et l'assurance vie.
La commission des finances propose une assiette un peu plus large avec un taux un peu plus bas, mais, comme il faut qu'à la sortie nous ayons 12 milliards de francs de déficit, le produit doit être le même.
Le Gouvernement impose les plans d'épargne logement et l'assurance vie, et nous considérons que ce n'est pas convenable s'agissant d'une épargne populaire. Au-delà des chiffres secs, la moindre taxation de l'épargne populaire tend à faire passer un message au pays, notamment aux couches moyennes de la population.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le Gouvernement est défavorable aux amendements n°s 77 et 34.
Je rappelle simplement que l'épargne populaire, c'est-à-dire les revenus du livret A, du livret bleu, du livret jeunes et du livret d'épargne populaire, est bien évidemment exonérée de la CSG.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 77, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 34.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, sur la notion d'épargne populaire et sur ce qu'elle contient, les appréciations peuvent effectivement varier. Ce n'est pas une notion mathématique ou exacte.
Je me permettrai de dire à notre excellent collègue Charles Descours que, des plans d'assurance vie, il en est de toutes natures et de tous montants et que l'on ne peut pas qualifier de manière systématique d'épargne populaire l'assurance vie qui, en effet, est un mode de placement extrêmement usité dans notre pays et qui, d'ailleurs, permet de financer pour une large part les titres de la dette publique issue d'un déficit excessif des comptes publics.
Je me situe donc - cela ne surprendra pas mes collègues - dans la logique de notre commission des finances. Pour des raisons qui sont presque des raisons de principe, je préfère, moi aussi, une assiette large et un taux faible, c'est-à-dire le plus de neutralité possible et le moins d'effets pervers possibles sur les comportements, notamment en matière de délocalisation de notre épargne.
C'est la raison pour laquelle je voterai, bien entendu, l'amendement n° 34.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explications de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je comprends bien l'argumentation développée par mon collègue Philippe Marini, même si elle me semble discutable s'agissant de l'assurance vie.
M. le rapporteur a cependant tout à fait raison en ce qui concerne les plans d'épargne logement. A ce propos, je regrette, madame le ministre, que le Gouvernement, qui se veut le défenseur de l'épargne populaire, n'ait pas ajouté à la liste des épargnes exonérées de la taxation les plans d'épargne logement. S'il est, en effet, une épargne qui est contractée par de nombreuses personnes, c'est bien le PEL, qui permet l'acquisition de son logement. De plus, la taxation du PEL portera préjudice à ceux qui contribuent à l'activité du bâtiment dans ce pays.
C'est la raison pour laquelle, pour ce qui me concerne - mon collègue Philippe Marini le comprendra - je n'adopterai pas la même position que lui et je suivrai M. le rapporteur.
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je souhaite apporter deux précisions.
Tout d'abord, il s'agit non pas ici de la CSG, mais d'un prélèvement social payé par les contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu. Tous ceux qui, dans cette assemblée, acquittent l'impôt sur le revenu et qui perçoivent quelques revenus de placements, ont la joie de recevoir, en fin d'année, une feuille spéciale par laquelle le percepteur se rappelle à leur bon souvenir en leur demandant de payer ce prélèvement social. Il s'agit donc ici d'un prélèvement additionnel dont le taux s'établissait, l'an dernier, à 1 %.
Le Gouvernement propose de porter ce taux à 2 % et de l'étendre à d'autres catégories de placements et d'intérêts.
Deux logiques sont possibles face à cette situation. La première, celle de M. Oudin, vise à ne pas modifier l'assiette nouvelle proposée par le Gouvernement, qui inclut, entre autres, l'assurance vie et les plans d'épargne logement, en portant le taux de 1 % à 1,5 % ; la seconde, celle de la commission des affaires sociales, consiste à garder le taux de 2 %, puisque seront frappés un certain nombre d'autres placements, notamment ceux des revenus mobiliers et les produits des actions et obligations, et à exclure de l'assiette les plans d'épargne logement et les contrats d'assurance vie.
Qu'il me soit permis de rappeler, chiffres à l'appui, que, par rapport au projet du Gouvernement, la position de la commission des finances se traduit par une perte de 2 milliards de francs tandis que la perte générée par la commission des affaires sociales n'atteint que 1,8 million de francs. Les deux ne sont donc guère éloignées, mais les conséquences et la cible ne sont pas les mêmes.
Cela dit, j'en viens à ma seconde précision : comme le Sénat vient de retenir la position de la commission des affaires sociales en réduisant l'assiette, s'il vote l'amendement de la commission des finances, ce n'est plus 1,8 milliard de francs - que nous avions équilibré par d'autres ressources - qui serait perdu : ce serait plus de 2 milliards de francs, et nous tomberions alors dans l'incohérence.
Comme je souhaite que nous soyons cohérents et que nous fixions un chiffre décent, je demande au Sénat de repousser l'amendement de la commission des finances. (M. Machet applaudit.)
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Pour éviter toute ambiguïté, je précise que nous proposons d'aligner cette année l'assiette de ces 1 % sur celle de la CSG telle qu'elle avait été retenue l'année dernière dans son assiette large. Le taux de 2 % sur une assiette plus large résulte donc de l'addition de deux fois 1 %.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. C'est deux fois 1 %, mais le résultat est le même !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Oui !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 34, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

5

SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION DE PARLEMENTAIRES CANADIENS

M. le président. J'ai l'honneur de saluer la présence dans notre tribune d'une délégation de parlementaires canadiens qui effectuent une visite de travail dans le cadre de l'Association interparlementaire France-Canada. Cette délégation est accompagnée par le président JeanDelaneau, président du groupe d'amitié France-Canada.
Je souhaite la bienvenue au Sénat à cette délégation, conduite par M. Yves Charbonneau, et forme des voeux de plein succès pour la mission de coopération amicale qu'elle accomplit dans notre pays. (Mme le ministre, M. le secrétaire d'Etat, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)

6

FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
POUR 1998

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale.

Article 6 (suite)



M. le président.
Par amendement n° 51, M. du Luart propose :
I. - De compléter le deuxième alinéa 1° du II de l'article 6 par une phrase ainsi libellée :
« Toutefois, pour les gains nets visés aux articles 92 J et 160 du code général des impôts, la date d'application est fixée aux cessions réalisées à compter du 26 septembre 1997 lorsque les titres cédés sont détenus depuis plus de huit ans ; »
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, après le paragraphe II de l'article 6, d'insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Les pertes de recettes résultant de la fixation au 26 septembre 1997 de la date d'application des prélèvements sociaux sur les gains visés aux articles 92 J et 160 du code général des impôts sont compensées à due concurrence par une cotisation additionnelle aux droits sur le tabac au bénéfice des organismes de sécurité sociale. »
La parole est à M. du Luart.
M. Roland du Luart. Je me suis longuement expliqué sur l'article 3, mais cet article 6 a les mêmes conséquences s'agissant des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et les produits de placement.
Je considère qu'il est choquant que ces mesures, qui peuvent avoir des conséquences lourdes, s'appliquent à des contrats déjà conclus. Lorsqu'il s'agit de cessions de titres non cotés à l'époque de l'annonce de la majoration, les opérations visées n'ont aucun caractère spéculatif, les titres étant, de plus, détenus depuis plus de huit ans.
Etant donné que l'article 3 a été supprimé par le Sénat sur proposition de sa commission des affaires sociales, je présente ici la mesure que je souhaitais introduire tout à l'heure, avec cependant un objet plus réduit.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. La commission, qui comprend fort bien le souhait de M. du Luart de ne pas voir la mesure s'appliquer de façon rétroactive, s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 51, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Article 6 bis



M. le président.
« Art. 6 bis. - I. - Dans le troisième alinéa du III de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, les mots : "lorsque son montant est inférieur à 80 francs" sont remplacés par les mots : "lorsque le montant total par article de rôle est inférieur à 160 francs".
« II. - A la fin de la dernière phrase du II de l'article 15 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, la somme : "80 francs" est remplacée par la somme : "160 francs". » - ( Adopté. )

Article 7



M. le président.
« Art. 7. - I. - A l'article L. 245-1 du code de la sécurité sociale, les mots : "des entreprises de préparation des médicaments" sont remplacés par les mots : "des entreprises assurant l'exploitation en France, au sens de l'article L. 596 du code de la santé publique, d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques" .»
« II. - L'article L. 245-2 du même code est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, il est procédé sur cette assiette à un abattement forfaitaire égal à trois millions de francs et, le cas échéant, à un abattement d'un montant égal à 40 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au titre des spécialités génériques définies à l'article L. 601-6 du code de la santé publique, remboursables ou inscrites sur la liste des médicaments agréés à l'usage des collectivités. » ;
« 2° Le deuxième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :
« Le taux de la contribution due par chaque entreprise est calculé selon un barème comprenant quatre tranches qui sont fonction du rapport, au cours du dernier exercice clos, entre, d'une part, l'assiette définie à l'alinéa précédent et tenant compte, le cas échéant, de l'abattement prévu au même alinéa et, d'autre part, le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France, au titre des médicaments inscrits sur les listes mentionnées aux articles L. 162-17 du présent code et L. 618 du code de la santé publique.
« Pour chaque part de l'assiette correspondant à l'une de ces quatre tranches définies ci-après, le taux applicable est fixé comme suit :

R à 10 % 9,5 %
R égal ou à 10 % et à 12 % 15 %
R égal ou à 12 % et à 14 % 18 %
R égal ou à 14 % 21 % »

« III. - Les dispositions du présent article entrent en vigueur pour la détermination de la contribution due le 1er décembre 1998. »
Sur l'article, la parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à l'occasion de l'examen de cet article, je veux évoquer les préoccupations que suscite l'état actuel de la presse médicale d'information. Cet article concerne en effet la contribution assise sur les frais de prospection et d'information des praticiens.
A vrai dire, l'enjeu est modeste par rapport aux ordres de grandeur auxquels nous nous référons dans ce débat, puisqu'il s'agit de 300 millions de francs, dont environ 50 millions de francs concernent la publicité et l'information par la presse médicale.
Permettez-moi d'abord de souligner deux évidences.
En premier lieu, le taux de croissance annuel moyen des remboursements de médicaments par le régime général a connu une diminution spectaculaire au cours des dernières années, ce qui témoigne de l'efficacité des mécanismes de maîtrise des dépenses et du juste soin, la période de référence montrant d'ailleurs que cet effort a été entrepris par plusieurs gouvernements successifs.
Ce taux de croissance est en effet passé, en moins de dix ans, de 10 % en moyenne annuelle à 2 %. Ces chiffres ne sont pas suffisamment connus et c'est pourquoi je profite de l'occasion qui m'est donnée pour les évoquer devant la Haute Assemblée.
Seconde évidence : la promotion est nécessaire. Il n'y a rien d'immoral à promouvoir de bons médicaments, car cela permet que les indications en soient connues. Cette promotion est nécessaire, sauf pour des molécules nouvelles qui se trouvent, ne serait-ce que momentanément, en situation de monopole. Mais, quand il y a des produits concurrentiels sur le marché, il est indispensable que la promotion puisse s'effectuer dans des conditions de transparence, transparence dont nombre d'instances sont d'ailleurs les garantes.
La conséquence de l'évolution que j'ai dessinée à grands traits, du fait des mesures prises au cours des dernières années concernant la promotion des médicaments, c'est qu'est resté presque inchangé un des moyens importants de l'information du prescripteur, à savoir la visite médicale. En revanche, le grand perdant, dans cette évolution, c'est la presse médicale d'information. Cette constatation ne doit pas nous laisser indifférents. En effet, la presse médicale souffre plus que d'autres de la chute du marché de la publicité - de l'ordre de 50 % en quatre ans. Ses charges croissent, l'affranchissement ayant augmenté de 40 % pour la presse quotidienne. De plus, on s'attend à une hausse des salaires des journalistes dans la mesure où l'on voit poindre, parmi les dispositions du projet de loi de finances pour 1998, la suppression de leur abattement supplémentaire pour frais professionnels.
Je n'ai pas pour habitude de dramatiser une situation et je sais les critiques qui sont parfois adressées à la presse médicale. Pour autant, j'estime que l'on ne peut pas laisser dépérir un mode d'information important, même s'il demande à être contrôlé afin que les messages aient un caractère strictement informatif.
Je n'ai pas déposé d'amendement, je verrais d'ailleurs mal son contenu. J'ai tenu cependant à attirer l'attention sur l'évolution de la presse médicale d'information, évolution à laquelle nous ne saurions rester indifférents.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. La maîtrise des dépenses de santé passera, nous le savons, mes chers collègues, par une réflexion précise et sans tabou sur les mesures à prendre en ce qui concerne la consommation des médicaments.
Cette réflexion est en cours au travers d'une concertation organisée avec l'ensemble des partenaires et qui ne se limite pas, qui ne peut pas se limiter aux seuls laboratoires et pharmaciens.
Au titre de ces mesures, il paraît évident qu'il convient de faire baisser la pression promotionnelle exercée en direction des prescripteurs, tant il est évident qu'elle a pour objectif d'influencer à la hausse le volume des prescriptions.
Ainsi, ces opérations de promotion représentent en moyenne, en France, 14,5 % du chiffre d'affaires. Soulignons qu'elles viennent d'être plafonnées à 9 % en Grande-Bretagne.
Cet article vise donc à réviser le régime de la taxe, initialement fixée à 9 %, relative aux dépenses de promotion engagées par les laboratoires pharmaceutiques, tout en prévoyant des aménagements pour les plus petits d'entre eux.
Il présente l'avantage de moduler l'importance de cette taxe au regard du poids de ces dépenses promotionnelles, au sens large du terme, dans le chiffre d'affaires.
L'article 7 prévoit par ailleurs un abattement qui vise à promouvoir les médicaments génériques, dont il est souhaitable de voir se développer les prescriptions en France, en sachant qu'il serait probablement nécessaire de réexaminer le répertoire de ces médicaments génériques.
Le juste soin, le soin de qualité passe par une certaine rigueur dans la prescription du médicament, et donc par une bonne information des prescripteurs, information objective qui, bien entendu, ne saurait être assurée, mes chers collègues, par la seule presse médicale.
La formation continue des médecins prend, de ce point de vue, toute son importance. Elle est théoriquement devenue obligatoire et, monsieur le secrétaire d'Etat, je profite de l'examen de cet article pour vous demander d'être extrêmement vigilant sur la manière dont est dispensée cette formation continue du médecin.
Cela étant dit, le groupe socialiste votera l'article 7.
M. le président. Par amendement n° 9, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
A. - Dans le texte présenté par le 1° du paragraphe II de l'article 7 pour compléter le premier alinéa de l'article L. 245-2 du code de la sécurité sociale, de remplacer le taux « 40 % » par le taux « 30 % ».
B. - De rédiger comme suit le barème inséré dans le second alinéa du texte proposé par le 2° du paragraphe II de cet article pour remplacer le deuxième alinéa dudit article L. 245-2 :

R <à 12 % 9,0 %
R égal ou > à 12 % et <à 14 % 14,5 %
R égal ou > à 14 % et <à 18 % 17,5 %
R égal ou > à 18 % 20,0 %


C. - Après le paragraphe II de cet article, d'insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« II bis . - L'avant-dernier alinéa de l'article L. 162-18 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elles peuvent notamment contribuer au respect d'objectifs relatifs aux dépenses de promotion des spécialités pharmaceutiques remboursables ou des médicaments agréés à l'usage des collectivités. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Qu'on me permette de dire d'abord que je fais miens les propos qu'a tenus notre collègue Claude Huriet sur la presse médicale.
L'article 7 du projet augmente d'un tiers la taxation des dépenses de promotion des laboratoires, au mépris de la politique conventionnelle entre l'Etat et l'industrie, dont l'un des objets majeurs est le « désarmement promotionnel ».
C'est un sujet très complexe sur lequel bien des gouvernements ont planché avec des succès divers. Plutôt que de taxer, au détour d'une loi de financement de la sécurité sociale, tel ou tel maillon de cette chaîne qui existe entre l'industriel et le pharmacien, mieux vaudrait, selon moi, soutenir la politique conventionnelle.
A l'article 7, la commission propose de modifier sur trois points le dispositif qui a été adopté par l'Assemblée nationale.
D'abord, nous proposons de réduire de 40 % à 30 % l'abattement institué par l'Assemblée nationale au profit des médicaments génériques. En effet, la liste de médicaments génériques prévue par le projet de loi est très étroite, car elle correspond aux médicaments strictement substituables. En outre, en l'état actuel, il n'est pas possible de se référer utilement à une autre définition. Un taux de 40 % pénaliserait donc tous les médicaments pouvant être considérés comme génériques, mais qui ne figurent pas sur la liste, car, par exemple, ils sont délivrés dans une boîte plus grande que celle du médicament de référence.
Ce sujet a donné lieu, au cours des auditions en commission, à de nombreux débats que je ne veux pas rouvrir ici - je sais que M. le secrétaire d'Etat est entouré d'hommes particulièrement compétents.
Ensuite, nous proposons un barème de taxation plus respectueux de l'existence d'une politique conventionnelle du médicament. En fait, nous n'augmentons le taux actuel qu'à partir de 12 % de dépenses promotionnelles, ce qui paraît plus raisonnable.
Enfin, nous entendons gager cette modification du barème par un renvoi à la politique conventionnelle, les accords entre le comité économique du médicament et les laboratoires pouvant prévoir des remises versées au profit de l'assurance maladie en cas de dépenses promotionnelles excessives. Je ne crois pas trahir, en l'espèce, l'avis du président du SNIP, le Syndicat national des industries pharmaceutiques.
Le recours à la politique conventionnelle est, en outre, plus souple qu'un mécanisme de taxation, notamment parce qu'il permet d'isoler, au sein des dépenses promotionnelles, les publicités faites dans la presse médicale. La taxation prévue dans le projet de loi constituerait en effet un coup dur pour la presse médicale - Claude Huriet vient de le dire - dont le rôle dans la formation continue des médecins est reconnu, même s'il n'est pas exclusif.
Vous avez d'ailleurs déclaré voilà quelques jours, monsieur le secrétaire d'Etat, alors que nous remettions ensemble les prix du MEDEC, que les publications médicales seraient reconnues comme étant partie intégrante de la formation médicale continue.
Enfin, je préciseque l'amendement est neutre sur le plan financier et qu'il est équilibré : nous désirons défendre la politique conventionnelle et refusons une taxation que nous considérons comme aveugle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les deux intervenants sur l'article et M. le rapporteur.
Je serais presque d'accord avec M. le rapporteur si nous ne divergions sur les chiffres. Il m'apparaît en effet que l'adoption de l'amendement diminuerait le rendement de la mesure de 165 millions de francs, perte qui n'est pas compensée par la réduction de 40 % à 30 % de l'abattement consenti. C'est une raison, parmi d'autres, de m'opposer à l'amendement.
Je ferai d'autres remarques très brèves.
Monsieur le rapporteur, nous n'abandonnons pas la politique conventionnelle. Au contraire, nous l'encadrons et nous l'institutionnalisons. Une lettre de cadrage sur les rapports avec les orientations sera envoyée au comité économique du médicament, auquel Mme Aubry et moi-même avons attribué des tâches très précises.
S'agissant de la presse médicale, je ne retirerai pas ce que j'ai dit voilà quelques jours, monsieur le rapporteur. D'abord, si cette presse se conduisait comme toutes les presses, c'est-à-dire si elle fonctionnait par abonnement, elle aurait mon entier soutien. Il faut qu'elle se conforme au fonctionnement général de la presse dans notre pays.
S'agissant de la formation médicale continue, je suis d'accord pour voir si le contenu de la presse médicale est sérieux, s'il informe, s'il forme, s'il suit le mouvement scientifique. Si c'est le cas, il faudra en tenir compte.
En tout état de cause, monsieur Huriet, nous ne méconnaissons pas les préoccupations de la presse.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Nous maintenons que notre amendement est neutre sur le plan financier et nous espérons que l'Assemblée nationale, après avoir fait de nouveaux calculs, nous soutiendra.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, ainsi modifié.

(L'article 7 est adopté.)
M. le président. J'informe le Sénat que la commission des affaires sociales m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur le projet de loi actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Michel Dreyfus-Schmidt.)

PRÉSIDENCE DE
M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 8.

Article 8



M. le président.
« Art. 8. - I. - Au chapitre V du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, la section 2 devient la section 3.
« II. - Au même chapitre, il est inséré une section 2 ainsi rédigée :

« Section 2


« Contribution à la charge des entreprises assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques
« Art. L. 245-6-1. - Une contribution assise sur le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France auprès des pharmacies d'officine, des pharmacies mutualistes et des pharmacies de sociétés de secours minières, au titre des ventes en gros de spécialités inscrites sur la liste mentionnée à l'article L. 162-17, à l'exception des spécialités génériques définies à l'article L. 601-6 du code de la santé publique, est due par les entreprises assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques au sens de l'article L. 596 du code de la santé publique.
« Le taux de cette contribution est fixé à 2,5 %.
« Art. L. 245-6-2 . - La contribution due par chaque entreprise est recouvrée et contrôlée par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, dans les conditions prévues à l'article L. 138-3.
« Les déclarations servant de base au calcul de la contribution sont celles prévues à l'article L. 138-5.
« Lorsqu'une entreprise n'a pas produit la déclaration prévue à l'alinéa précédent dans les délais prescrits ou a produit une déclaration manifestement erronée, le taux de sa contribution est fixé à titre provisionnel d'office à 10 %, la contribution étant appelée sur une assiette constituée par le montant du dernier chiffre d'affaires connu ou à défaut déterminée par tous autres moyens.
« Lorsque l'entreprise produit ultérieurement la déclaration du trimestre considéré, le montant de sa contribution dû au titre de ce trimestre est majoré de 10 %. Les entreprises peuvent formuler une demande gracieuse en réduction de cette majoration en cas de bonne foi dûment prouvée.
« Art. L. 245-6-3 . - La contribution est versée de façon provisionnelle au plus tard le dernier jour de chaque trimestre civil sur la base du chiffre d'affaires réalisé au cours du trimestre civil précédent.
« Au titre d'une année civile, l'ensemble des contributions versées fait l'objet d'une régularisation annuelle au plus tard le dernier jour du trimestre civil suivant l'année civile concernée.
« Si le montant des contributions définitives est différent du montant des contributions versées à titre provisionnel, le solde est imputé lors de l'échéance suivante de la contribution.
« Art. L. 245-6-4 . - Le produit de la contribution est affecté à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés. »
« III. - Les dispositions du présent article s'appliquent au chiffre d'affaires réalisé à compter du 1er janvier 1998.
« IV. - L'article L. 138-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Au a , le pourcentage de "1,5 %" est remplacé par le pourcentage de "1,72 %" »;
« 2° Au b , le pourcentage de "1,35 %" est remplacé par le pourcentage de "1,57 %" » ;
« 3° Au c , le pourcentage de « 1,2 %" est remplacé par le pourcentage de "1,42 %" » ;
« 4° Au d , le pourcentage de " 1 %" est remplacé par le pourcentage de "1,22 %" » ;
« 5° Au e , le pourcentage de "0,75 %" est remplacé par le pourcentage de "0,97 %" » ;
« 6° Au f , le pourcentage de "0,5 %" est remplacé par le pourcentage de "0,72 %". »
Sur cet article, je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 35, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 10, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit l'article 8 :
« Avant le dépôt du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement présentera un rapport au Parlement sur la distribution des médicaments remboursables par l'assurance maladie, le rôle et la marge des pharmaciens d'officine, la production et la promotion des médicaments génériques et l'automédication. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 71 rectifié, présenté par MM. Vasselle, Blanc etGournac, et tendant à compléter le texte proposé par l'amendement n° 10 pour l'article 8 par une phrase ainsi rédigée :
« Ce rapport devra tenir compte du rôle respectif des dépositaires des fabricants et des grossistes répartiteurs, eu égard à la qualité du service de santé publique qu'ils doivent assurer. »
Par amendement n° 27, M. Michel Mercier propose, dans le texte présenté par le II de l'article 8 pour l'article L. 245-6-1 du code de la sécurité sociale :
I. - Après les mots : « des spécialités », d'insérer les mots : « homéopathiques et » ;
II. - De remplacer les mots : « à l'article L. 601-6 », par les mots : « aux articles L. 601-3 et L. 601-6 ».
Par amendement n° 78, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - A la fin du second alinéa du texte présenté par le II de l'article 8 pour l'article L. 245-6-1 du code de la sécurité sociale, de remplacer le taux : « 2,50 % », par le taux : « 1 % ».
II. - De rédiger comme suit le paragraphe IV de l'article 8 :
« IV. - L'article L. 138-2 du code de la sécurité sociale est modifié comme suit :
« 1° Au a, le pourcentage de "1,5 %" est remplacé par le pourcentage de "1,90 %".
« 2° Au b, le pourcentage de "1,35 %" est remplacé par le pourcentage de "1,75%".
« 3° Au c, le pourcentage de "1,2 %" est remplacé par le pourcentage de "1,60 %".
« 4° Au d, le pourcentage de "1 %" est remplacé par le pourcentage de "1,40 %".
« 5° Au e, le pourcentage de "0,75 %" est remplacé par le pourcentage de "1,05 %".
« 6° Au f, le pourcentage de "0,5 %" est remplacé par le pourcentage de "0,90 %". »
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 35.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. La commission des finances propose de supprimer l'article 8. En effet, bien que son objectif d'égalisation des conditions de concurrence entre les laboratoires et les grossistes-répartiteurs soit louable, cet article paraît très maladroit.
Les taux de la nouvelle contribution avaient d'abord été fixés au niveau assez excessif de 6,63 %, ce qui aboutissait à supprimer quasiment toute possibilité de marge commerciale sur les ventes directes de médicaments.
L'Assemblée nationale a démontré au Gouvernement l'absurdité de sa mesure et elle a adopté la contribution avec un taux nettement inférieur, soit 2,5 %. Ce taux semble avoir été toutefois fixé de manière relativement aléatoire, sans évaluation objective du coût réel, résultant pour les grossistes-répartiteurs de leurs obligations de service public.
Par ailleurs, afin de compenser le coût de la diminution de la contribution sur les ventes directes, les députés ont relevé parallèlement les taux de la contribution sur les ventes en gros de médicaments. Cela semble parfaitement contradictoire avec l'objectif visé au départ puisque cette contribution pèse principalement sur les grossistes-répartiteurs que l'on cherchait précisément à protéger d'une concurrence déloyale.
La commission des finances est donc d'avis de supprimer l'article 8 et approuve sans réserve l'initiative de la commission des affaires sociales tendant à la présentation par le Gouvernement d'un rapport au Parlement sur la distribution des médicaments remboursables.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 10.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. M. Oudin vient d'expliquer pourquoi, à la commission des finances comme à la commission des affaires sociales, nous étions contre l'instauration de cette taxe.
L'amendement que nous présentons maintenant vise à ce que le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la distribution des médicaments remboursables par l'assurance maladie, le rôle et la marge des pharmaciens d'officines, la production et la promotion des médicaments génériques et l'automédication.
Nous proposons non pas de supprimer l'article 8, à l'instar de la commission des finances, mais de substituer au texte de cet article celui de l'amendement n° 10.
M. le président. La parole est à M. Vasselle, pour défendre le sous-amendement n° 71 rectifié.
M. Alain Vasselle. Ce sous-amendement a pour objet de conforter le texte de l'amendement qui vient d'être présenté par M. Descours.
Il vise notamment à préciser que le rapport du Gouvernement devra expressément tenir compte du rôle respectif des dépositaires, des fabricants et des grossistes-répartiteurs eu égard à la qualité du service de santé publique qu'ils doivent assurer.
En effet, deux systèmes complémentaires de distribution existent en France : d'une part, les ventes directes assurées par les dépositaires et, d'autre part, les ventes aux grossistes qui sont assurées par les grossistes-répartiteurs. Ces deux filières de distribution sont taxées de manière homogène aux termes des dispositions de l'article L. 138-2 du code de la sécurité sociale. Cette taxe représente environ en moyenne 1 % du chiffre d'affaires du médicament remboursé.
Pour montrer la proportion de ce que représentent l'un et l'autre, je dirai que les grossistes-répartiteurs font 1 milliard de francs de bénéfices contre 66 millions de francs pour les dépositaires assurant des ventes directes.
Il faut donc maintenir un système équilibré entre les interventions de ces deux fournisseurs. Pour des raisons de santé publique, il paraît souhaitable d'étudier spécifiquement les deux filières de distribution du médicament et les rôles respectifs des intervenants afin que les mesures qui s'imposeront ne soient pas prises au détriment de l'une des deux filières.
Mon sous-amendement a pour objet de préciser les dispositions qui sont prévues dans le rapport souhaité par la commission des affaires sociales.
M. le président. L'amendement n° 27 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 78.
M. Guy Fischer. Cet amendement porte sur la mise en place d'une contribution sur le produit de l'activité des entreprises assurant, pour le compte des laboratoires pharmaceutiques, des ventes directes de médicaments remboursables.
Nous avons été saisis, comme d'ailleurs un certain nombre de nos collègues, je suppose, de nombreux courriers sur cette question qui méritait, à tout le moins, un examen attentif.
J'observe d'ailleurs que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale a jugé utile de modifier partiellement le texte du projet de loi initial dans le sens souhaité par les professionnels de ce secteur, sans toutefois aller jusqu'au bout de leurs propositions, propositions, d'ailleurs, tout à fait mesurées.
Nous tirons en effet de ces propositions la conclusion que les entreprises de vente directe de médicaments ne sont pas opposées à la mise en place d'une contribution mais celle-ci nécessite un certain nombre d'aménagements eu égard, notamment, à leur part, toute relative, sur le marché de la distribution de médicaments au regard, en particulier de la place occupée par les grossistes-répartiteurs.
Nous comprenons le souci qui les anime d'éviter que cette contribution ne finisse par réduire toujours plus la part de marché qu'ils occupent au profit des grossistes-répartiteurs qui pourraient, dès lors, asseoir encore mieux leur position prépondérante, allant d'ailleurs jusqu'à peser sur le niveau des prix des produits concernés avec les conséquences néfastes sur l'emploi en France.
C'est pour ces raisons de bon sens que nous proposons donc à la Haute Assemblée d'adopter cet amendement n° 78 portant sur l'article 8.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 35, sur le sous-amendement n° 71 rectifié et sur l'amendement n° 78 ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. S'agissant de l'amendement n° 35 présenté par M. Oudin, j'ai dit tout à l'heure qu'il avait le même objet que l'amendement n° 10 de la commission des affaires sociales. Ce dernier nous paraît toutefois plus complet puisqu'il prévoit le dépôt d'un rapport. Nous considérons donc que l'amendement n° 35 est satisfait par l'amendement n° 10.
La commission des affaires sociales est favorable au sous-amendement n° 71 rectifié.
Je regrette que l'amendement n° 27, proposé par M. Mercier, n'ait pas été défendu. En effet, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, il y a un problème pour les médicaments homéopathiques qui sont distribués directement.
M. le président. La commission peut toujours reprendre un amendement !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Certes, monsieur le président, mais il est un peu contradictoire avec l'amendement de la commission. (Sourires.)
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Très légèrement !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Le Gouvernement, qui, madame le ministre, a tous les pouvoirs, lui, peut, au cours de la navette, réparer l'injustice dont il est l'auteur en matière de distribution des médicaments homéopathiques.
J'en viens à l'amendement n° 78. Le texte initial du Gouvernement prévoyait une taxe de 6,6 %. Cela ne satisfaisait personne. La commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale a proposé une autre répartition des taxes ; maintenant, nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen en proposent une troisième. Nous le disons dans notre amendement : cela relève de la politique conventionnelle entre les professionnels.
On s'amuse : le Gouvernement propose une taxe, l'Assemblée nationale une autre, le groupe communiste républicain et citoyen du Sénat une troisième. Il faut réunir les grossistes-répartiteurs, les pharmaciens d'officine et les industriels autour d'une table, leur exposer les besoins et leur demander comment ils répartissent. Le Gouvernement, je l'espère, et le Parlement entérineront, mais on n'impose pas ainsi des taxes. En huit jours, trois taux différents ont été proposés ! Nous sommes donc hostiles à l'amendement n° 78.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 35 et 10, sur le sous-amendement n° 71 rectifié et sur l'amendement n° 78 ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Ma position est nette : le Gouvernement, pour des raisons différentes, est défavorable à l'ensemble de ces amendements.
Les amendements n°s 35 et 10 se ressemblent, parce qu'ils visent, d'une certaine manière, à supprimer les dispositions de l'article 8. Je reconnais que le dépôt d'un rapport est intéressant ; mais puisque nous allons le faire pour l'examen du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, pourquoi prévoir un rapport supplémentaire ?
Quel est notre objectif ?
Les grossistes ont pour tâche - c'est un service public - de rendre, dans les vingt-quatre heures, service à la population en fournissant tous les médicaments à toutes les pharmacies de tous les endroits de France, et, pour cela, ils sont rétribués. Quand la vente directe intervient pour certains médicaments de certains laboratoires, dans certaines pharmacies, elle se partage avec le pharmacien 10,74 %.
Cela ne me paraît pas complètement normal, il me semble que nous devons privilégier les grossistes répartiteurs, qui assurent un service public, je le répète. Comme nous avons le sentiment que c'est juste, nous avons accepté en effet la diminution de la taxe qui a été proposée à l'Assemblée nationale.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Et tout le monde est mécontent !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Non, tout le monde n'est pas mécontent ! Finalement, nous avons un budget en équilibre.
Quant à l'homéopathie, monsieur le rapporteur, il faut qu'elle fasse un nouveau petit sacrifice. En 1996, elle a coûté à la sécurité sociale, 800 millions de francs. Je reconnais qu'il s'agit d'une industrie très spécifiquement française dont nous sommes tout à fait contents ; mais 800 millions de francs, cela me paraît suffisant.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 78, qui vise au contraire à augmenter la taxe. Il nous semble en effet que le dispositif est équilibré.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 35.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Je le retire au profit de l'amendement n° 10, monsieur le président.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je vous en remercie, monsieur le rapporteur pour avis.
M. le président. L'amendement n° 35 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 71 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 8 est ainsi rédigé, et l'amendement n° 78 n'a plus d'objet.

Article 9



M. le président.
« Art. 9. - I. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les décisions prises sur le fondement de l'arrêté du 27 décembre 1996 fixant les majorations visées à l'article D. 242-6-4 du code de la sécurité sociale pour l'année 1997 sont validées, en tant que leur légalité serait contestée par le motif tiré de l'incompétence des auteurs de cet arrêté.
« II. - Le 2° de l'article L. 221-1 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : "et dans le respect de la loi de financement de la sécurité sociale".
« III. - L'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, après les mots : "d'après les règles fixées par décret", sont insérés les mots : "dans le respect de la loi de financement de la sécurité sociale";
« 2° Au quatrième alinéa, après les mots : "charges de gestion", sont insérés les mots : "dans le respect des conditions générales de l'équilibre financier déterminé par la loi de financement de la sécurité sociale".
« IV. - Les cinquième et sixième alinéas de l'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Dans des conditions fixées par décret, la Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles fixe les éléments de calcul des cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles conformément aux conditions de l'équilibre financier de la sécurité sociale telles qu'elles sont déterminées par la loi de financement de la sécurité sociale.
« La délibération de la commission est transmise au ministre chargé de la sécurité sociale avant le 31 janvier de chaque année.
« Si la commission n'a pas délibéré à cette date ou n'a pas retenu des éléments de calcul conformes aux dispositions du cinquième alinéa, l'autorité compétente de l'Etat les détermine par arrêté. »
« V. - Les dispositions du IV du présent article prennent effet pour la fixation des cotisations dues au titre de l'année 1998. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 11 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 36 est déposé par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 11.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cet article introduit subrepticement est une mauvaise action, si j'ose dire. En effet, la validation demandée au Parlement de l'arrêté du 27 décembre 1996 fixant les majorations de cotisations dues au titre des accidents du travail pour l'année 1997 est contestable pour plusieurs raisons de fond.
La loi du 25 juillet 1994 a instauré la séparation des branches au sein du régime général c'était là une demande que nous formulions depuis longtemps.
Cette loi a aussi créé une commission paritaire chargée de gérer la branche des accidents du travail, notamment en proposant des taux de cotisations applicables pour chaque exercice.
Ceux qui, comme moi, siègent à la Commission des comptes de la sécurité sociale se souviennent que cette branche des accidents du travail faisait l'objet d'empoignades à chaque réunion. Or la loi du 25 juillet 1994 et cette gestion paritaire ont permis de calmer le jeu.
La validation qui nous est proposée aujourd'hui va à l'encontre du paritarisme auquel, je l'espère, nous sommes tous attachés. Elle compromet également les réformes mises en place depuis 1994 pour clarifier les responsabilités de gestion entre l'Etat et les partenaires sociaux au sein des caisses.
Par ailleurs, il faut rappeler que l'article 30 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 a prévu la création d'une commission pour arbitrer les contestations entre la Caisse nationale d'assurance maladie et la branche des accidents du travail. Cette commission est chargée de fixer les modalités du versement de un milliard de francs à la branche maladie, d'évaluer à son juste niveau le reversement de la branche des accidents du travail à la branche maladie.
Enfin, les amendements de l'Assemblée nationale ne sont pas acceptables. En effet, les prévisions du projet de loi de financement de la sécurité sociale envisagent un excédent de la branche accidents du travail de 1,4 milliard de francs en 1998, y compris le versement de un milliard de francs. Or je rappelle que la vocation de cette branche des accidents du travail est d'être équilibrée, les excédents devant permettre de diminuer les taux des cotisations des employeurs. Cette branche n'a en aucun cas vocation à générer des excédents servant, par un biais que je n'ose qualifier de « subtil », à équilibrer la branche assurance maladie.
Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer cet article, qui n'aurait jamais dû voir le jour.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 36.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. La commission des finances considère, elle aussi, qu'il faut supprimer cet article qui lui paraît mauvais dans ses deux aspects.
La demande de validation des taux des cotisations dues au titre des accidents du travail et fixés autoritairement pour 1997 n'est pas justifiée, même si je dois à la vérité de reconnaître que ces taux avaient été déterminés par le Gouvernement précédent.
Par ailleurs, cette demande de validation constitue - M. Descours l'a parfaitement expliqué - une violation flagrante du principe de l'autonomie de gestion des quatre branches de la sécurité sociale. En outre, elle crée, aux dépens de la branche accidents du travail, une charge indue, en l'obligeant à dégager des excédents dans le seul but d'afficher une diminution optique du déficit de la sécurité sociale.
Madame la ministre, je remarque d'ailleurs, que, dans les documents présentés en annexe du projet de loi de financement, vous avez soigneusement veillé à confondre la branche maladie, qui est lourdement déficitaire, et la branche accidents du travail, qui est artificiellement excédentaire.
Le gouvernement actuel se propose de continuer dans cette voie, puisque, selon ses prévisions fondées sur l'hypothèse de taux de cotisations au titre des accidents du travail inchangés par rapport à l'an dernier, l'année 1998 se caractérisera par un nouvel excédent pour la branche, qui devrait s'élever 1,4 milliard de francs.
Cette politique, qui privilégie les excédents au lieu de diminuer les cotisations, risque de décourager les entreprises qui s'impliquent dans le renforcement de la prévention des risques des accidents du travail.
En outre, le montant des cotisations dues au titre des accidents du travail se répercute automatiquement sur le coût du travail et pénalise l'emploi. Il est temps de mettre un terme à cette politique de facilité.
Par ailleurs, et je crois que les deux commissions sont d'accord pour estimer que les modifications apportées par l'Assemblée nationale quant au rôle de la Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles sont à la fois superfétatoires et inefficaces.
Ces précisions sont superfétatoires parce que le principe de la hiérarchie des normes impose déjà à la Commission de respecter la loi de financement de la sécurité sociale, comme toute autre loi, lorsqu'elle fixe les taux de majoration des cotisations.
Elles sont en outre inefficaces parce qu'elles n'apportent pas de solution de fond à ce problème. La question est, en effet, de savoir ce que la commission est censée faire lorsqu'elle est partagée entre l'application de l'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale, qui lui impose de viser le strict équilibre de la branche, et la loi de financement de l'année, qui lui impose de dégager un excédent annuel.
La réponse de la commission des finances est simple : il suffit que la loi de financement ne prévoie pas d'excédent pour la branche accidents du travail. Je défendrai d'ailleurs tout à l'heure, en son nom, un amendement tendant à cette fin.
Dans l'immédiat, comme la commission des affaires sociales, nous vous demandons, mes chers collègues, de supprimer cet article de validation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 11 et 36 ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. L'avis du Gouvernement est défavorable.
Monsieur le rapporteur, le Gouvernement n'essaie pas de mêler deux branches, celle des accidents du travail et celle de la maladie.
Je suis en effet la première à reconnaître - je l'ai d'ailleurs déjà dit devant l'Assemblée nationale - qu'il est malsain, lorsque les dépenses au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles diminuent, que les cotisations ne diminuent pas.
Mais, aujourd'hui, la situation est difficile : nous sommes confrontés au déficit de la sécurité sociale. Par ailleurs, si les décisions individuelles qui ont été prises par le précédent gouvernement et qui sont aujourd'hui attaquées devant les tribunaux devaient être annulées, l'incidence serait de 1,7 milliard de francs de déficit supplémentaire.
Dans ces conditions, ou bien nous validions ces décisions individuelles prises, je le répète, par l'ancien gouvernement, ou bien nous mettions en place d'autres dispositions.
Nous aurions pu augmenter les cotisations vieillesse des entreprises, qui n'ont pas été revalorisées depuis 1982 et dont on pense qu'elles devraient l'être. Nous en avons discuté avec les organisations patronales, et nous avons adopté la solution que nous vous présentons aujourd'hui. Il est vrai que, structurellement et à moyen terme, il ne s'agit pas d'une bonne solution, mais nous sommes dans une période de crise.
J'ajoute - c'est un sujet que nous avons également abordé avec les chefs d'entreprise et les représentants des branches - qu'aujourd'hui beaucoup d'accidents du travail ne sont pas déclarés, que leur nombre est sous-estimé, tant par les entreprises que par les branches, afin d'éviter l'augmentation du taux des cotisations et les reversements vers l'assurance maladie.
Par conséquent, aujourd'hui, le système des cotisations des accidents du travail comporte des effets pervers. Tant que ne régnera pas une très grande diversité au sein des branches et dans les entreprises pour que soient effectivement déclarés les maladies professionnelles et les accidents du travail, j'éprouverai moins de scrupules pour demander, comme je l'ai fait cette année, à la branche accidents du travail de contribuer pour 1,7 milliard de francs au financement de la branche maladie.
Cependant, sur le moyen terme, ce n'est pas là une bonne politique, je le reconnais avec vous, messieurs les rapporteurs.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Cela fait dix ans que cela dure !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Non, cela fait deux ans !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 11 et 36, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 9 est supprimé.

Article 10



M. le président.
« Art. 10. - I. - L'article L. 137-1 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, ne sont pas assujettis à la taxe les employeurs occupant neuf salariés au plus tels que définis pour les règles de recouvrement des cotisations de sécurité sociale.
« Les dispositions du présent I sont applicables aux contributions versées à compter du 1er janvier 1996.
« II. - A l'article L. 137-2 du même code, le taux : "6 %" est remplacé par le taux : "8 %".
« Les dispositions du présent II sont applicables aux contributions versées à compter du 1er janvier 1998.
« III. - Aux articles L. 137-3 et L. 137-4 du même code, les mots : "à la date de publication de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996" sont remplacés par les mots : "à la date de la publication de la dernière loi de financement de la sécurité sociale". »
Sur l'article, la parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Monsieur le président, le groupe socialiste voterait l'article 10 tel qu'il est présenté par le Gouvernement.
Cet article tend à porter le taux de la taxe relative au financement de garanties de prévoyance complémentaire de 6 % à 8 % sur les contributions patronales versées à compter du 1er janvier 1998. En outre, il vise à donner une base légale à l'exonération de cette taxe dont bénéficient les entreprises occupant au plus neuf salariés.
Nous ne contestons ni l'intérêt ni l'utilité des contrats de prévoyance, car ces derniers permettent de servir aux salariés des prestations tout à fait appréciables.
Les contributions patronales destinées au financement de prestations complémentaires de prévoyance constituent, pour le salarié, un avantage résultant de sa relation de travail. En tant que tel, cet avantage devrait être assujetti aux cotisations de sécurité sociale dès le premier franc. Il en est cependant exonéré pour la fraction n'excédant pas 19 % du plafond, soit 31 281 francs par an et par salarié, aux termes du décret du 23 juillet 1985 pris en application de l'article 16 de la loi du 28 décembre 1979.
L'assujettissement de ces contributions à cette taxe, dont le taux est porté par cet article à 8 %, ne compense donc que très partiellement l'exonération dont elles bénéficient largement, le taux des cotisations de sécurité sociale - parts salariale et patronale - applicable en 1998 devant être de plus de 37 %.
Il convient de préciser que ces contributions sont assujetties à CRDS et, depuis le 1er janvier 1997, à la CSG, dès le premier franc.
L'impact financier au titre de l'année 1998 est évalué à 500 millions de francs. Cette somme est destinée à abonder le fonds de solidarité vieillesse.
M. le président. Sur l'article 10, je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 37 rectifié bis, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose :
I. - De supprimer le paragraphe II de l'article 10.
II. - Après le paragraphe II de cet article, d'insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - A l'article L. 137-1 du même code, après les mots : "Il est institué", sont insérés les mots : ", jusqu'au 31 décembre 1998,". »
III. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du II ci-dessus, après le paragraphe II de cet article, d'insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant de la suppression, à compter du 1er janvier 1999, de la taxe sur la prévoyance sont compensées par le relèvement à due concurrence des taux des droits prévus aux articles 402 bis, 403, 406 A, 438 et 520 A du code général des impôts. »
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 12 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 53 est déposé par M. Huriet et les membres du groupe de l'Union centriste.
Tous deux tendent à supprimer le paragraphe II de l'article 10.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 37 rectifié bis.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Mes chers collègues, la commission des finances vous propose de voter la suppression pure et simple de la taxe sur la prévoyance à compter du 1er janvier 1999.
J'appelle votre attention sur le fait qu'ayant été instituée par l'ordonnance de 1996, cette taxe sur la prévoyance complémentaire n'a jamais fait l'objet d'une délibération du Parlement.
L'adoption du présent article, outre les modifications proposées, constituerait donc, en quelque sorte, une ratification de la création de cette taxe.
Cet article 10 nous offre donc l'occasion de nous prononcer explicitement non seulement sur les modalités, mais aussi sur les principes mêmes de la taxe, et, de ce point de vue, la commission des finances exprime les plus vives réserves tant sur la régularité juridique de cette taxe que sur ses justifications économiques.
J'observe en effet que la définition de l'assiette donnée par l'article 8 de l'ordonnance de 1996 est particulièrement imprécise. En effet, cet article vise « les contributions des employeurs et des organismes de représentation collective du personnel versées, à compter du 1er janvier 1996, au bénéfice des salariés pour le financement des prestations complémentaires de prévoyance ». Or - j'insiste sur ce point - il n'existe pas de définition précise des prestations complémentaires de prévoyance.
La justification économique de cette taxe est absurde. Le fondement théorique de cette taxe repose en effet sur deux considérations : d'une part, l'inégalité de traitement entre les salariés des entreprises ayant mis en place une prévoyance complémentaire et ceux des entreprises ne l'ayant pas fait, ainsi que, d'autre part, l'encouragement que constitue la prévoyance complémentaire à la consommation des biens médicaux.
En fait, quand les entreprises versent une partie des rémunérations sous forme d'avantages de prévoyance et de retraite, il ne s'agit en aucune façon, comme certains le prétendent, de rémunérations déguisées, de salaires déguisés.
Les arguments en faveur de cette taxe ne nous paraissent donc pas valables.
Dans ces conditions, la taxation des entreprises les plus prévoyantes apparaît plutôt absurde.
Par ailleurs, l'argument consistant à dénoncer l'impact inflationniste des dépenses de prévoyance complémentaire sur la consommation des biens médicaux ne semble pas plus convaincant.
Par conséquent, nous pensons que le taux de la taxe relative au financement de la prévoyance ne doit pas augmenter ; nous souhaitons même que celle-ci soit supprimée à compter de l'année 1999.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 12 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 37 rectifié bis.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Toute taxe est dissuasive pour ceux qu'elle frappe.
Nous pensons donc que l'augmentation de la taxe sur la prévoyance prévue par le projet de loi risque, au détriment des salariés, de freiner le développement des contrats de prévoyance. Comme nous sommes attentifs au sort des salariés, nous nous opposons à cette augmentation, car les contrats de prévoyance permettent aux salariés de compenser la baisse du taux de remboursement des dépenses d'assurance maladie, que M. le secrétaire d'Etat déplorait hier en indiquant qu'il n'était plus que de 74 % - il est même bien inférieur dans certains cas.
Nous proposons donc de supprimer l'augmentation prévue de cette taxe.
En revanche, nous sommes favorables au maintien du paragraphe I de l'article, qui donne une base légale à l'exonération de la taxe pour les entreprises de moins de dix salariés.
Evidemment, la commission est favorable à l'amendement n° 53, qui est identique au sein.
Quant à l'amendement n° 37 rectifié bis, elle estime qu'il est pour partie satisfait par le sien ; pour l'autre partie, qui vise à supprimer la taxe à partir de 1999, j'invoquerai l'annualité budgétaire, et je suis sûr que M. le rapporteur de la commission des finances me comprendra.
M. le président. La parole est à M. Huriet, pour défendre l'amendement n° 53.
M. Claude Huriet. Comme vient de le souligner M. le rapporteur, l'amendement que je présente au nom de mon groupe a le même objet que celui de la commission. J'ajouterai à son explication un argument supplémentaire, déjà évoqué à plusieurs reprises, à savoir que les dispositions prévues par le projet de loi entraînent une charge supplémentaire sur le secteur productif que l'on peut estimer à 60 milliards de francs. Alors, n'en ajoutons pas !
Néanmoins, l'objet des deux amendements étant le même, c'est très volontiers que je retire le mien, même si M. le rapporteur ne m'y a pas invité ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 53 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 37 rectifié bis et sur l'amendement n° 12 ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. L'avis du Gouvernement est défavorable sur ces deux amendements, l'assujettissement des contributions de prévoyance à cette taxe de 8 % ne compensant que très partiellement l'exonération dont elles bénéficient largement, le taux des cotisations de sécurité sociale applicable en 1998 étant de plus de 28 %. La majoration du taux de la taxe représente 600 millions de francs en année pleine.
M. le président. Monsieur Oudin, l'amendement 37 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Je me rallie à l'amendement de la commission des affaires sociales et je retire donc l'amendement n° 37 rectifié bis.
M. le président. L'amendement n° 37 rectifié bis est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 12.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Vous permettrez au président du comité de surveillance du fonds de solidarité vieillesse d'appeler l'attention du Parlement et du Gouvernement sur le problème de l'équilibre à terme de ce fonds.
Ce problème n'est pas lié à l'amendement n° 12, que j'approuve et que je voterai, mais découle de mesures déjà adoptées précédemment.
Ainsi, l'augmentation de la CSG décidée par le précédent gouvernement a entraîné un transfert du produit des droits sur les alcools au profit de la branche maladie et au détriment du fonds de solidarité vieillesse, ce qui, à moyen terme, mettra ce dernier en déséquilibre.
Je veux simplement attirer l'attention du Gouvernement sur ce point afin qu'au moment où il sera appelé à revoir la situation du fonds il veille à ce que l'on en revienne à des dispositions conformes à la fois à l'esprit et à la lettre du texte adopté à l'origine par le Parlement.
Certes, cette mesure, si elle était adoptée, permettrait d'apporter 600 millions de francs supplémentaires au fonds ; mais elle pose d'autres problèmes de la nature de ceux qui ont été développés par M. le rapporteur.
C'est la raison pour laquelle il me paraît sage de suivre les propositions de la commission, celles-ci devant être accompagnées d'une réflexion sur l'équilibre du fonds à terme.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10, ainsi modifié.

(L'article 10 est adopté.)

Article 11



M. le président.
« Art. 11. - I. - A titre exceptionnel, les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale ne sont pas applicables au solde du produit de la contribution sociale de solidarité des sociétés résultant de l'application du premier alinéa de cet article, constaté pour l'exercice 1997.
« II. - Pour l'application de l'article L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale, les déficits pris en compte pour l'exercice 1997 sont établis en rattachant les recettes à l'exercice au cours duquel elles ont été encaissées et les dépenses à l'exercice au cours duquel elles ont été payées.
« III. - A titre exceptionnel, la Caisse nationale de l'organisation autonome d'assurance vieillesse des travailleurs non salariés des professions industrielles et commerciales et la Caisse nationale de l'organisation autonome d'assurance vieillesse des travailleurs non salariés des professions artisanales versent respectivement 700 millions et 500 millions de francs au profit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés. Les modalités de ces versements sont fixées par arrêté.
« IV. - Le 2° de l'article L. 139-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« 2° Pour la fraction restant après la répartition visée au 1° :
« a) En priorité au régime d'assurance maladie des travailleurs salariés, dans la limite de son déficit comptable ;
« b) Puis, le cas échéant, avant affectation de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés, au prorata du déficit comptable des autres régimes obligatoires d'assurance maladie. »
« Les dispositions du présent IV entrent en vigueur à compter du 1er janvier 1998. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 65, MM. Ostermann, Jean-Jacques Robert, Doublet, Fayolle, Gérard, Flandre et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent de supprimer cet article.
Par amendement n° 38, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose de supprimer les paragraphes III et IV de l'article 11.
Par amendement n° 13, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit le IV de l'article 11 :
« IV. - A titre exceptionnel, le solde du produit de la contribution sociale de solidarité des sociétés, constaté après application des dispositions visées aux I, II et III du présent article, est affecté, à hauteur d'un milliard de francs, au régime d'assurance maladie des travailleurs salariés. »
La parole est à M. Blanc, pour défendre l'amendement n° 65.
M. Paul Blanc. Il paraît inacceptable de prélever une partie de la C 3 S pour des affectations qui n'étaient pas prévues initialement.
En effet, parmi les trois régimes qui doivent être normalement alimentés par cette taxe, l'ORGANIC, l'Organisation autonome nationale d'assurance vieillesse de l'industrie et du commerce, et la CANAM, la Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés, seraient tous deux déficitaires, l'un à concurrence de 400 millions de francs, l'autre à hauteur de 1,7 milliard de francs. Pourquoi priver de 2 milliards de francs des régimes à qui cette somme va justement manquer pour être en équilibre ? Cette mesure paraît particulièrement inopportune au moment où le Gouvernement propose le basculement des cotisations d'assurance maladie sur la CSG, ce qui va fortement pénaliser les travailleurs indépendants.
Telle est la raison d'être de notre amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 38.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. L'article 11 tend, d'une part, à affecter à titre exceptionnel au régime général l'excédent de la contribution sociale de solidarité pour les sociétés, ce qu'on appelle la C 3 S et, d'autre part, à priver la CANAM d'une partie de ses ressources issues de la CSG et des droits sur les alcools.
La commission des finances rappelle que la C 3 S a été créée pour financer les régimes de l'assurance maladie et de l'assurance vieillesse des non-salariés en compensation de la perte de ressources induite pour ces régimes par l'exercice croissant des professions indépendantes sous forme sociétaire.
Il convient, en effet, de ne pas perdre de vue que la diminution tendancielle des professions non salariées dans la population active a eu pour corollaire un accroissement du nombre des salariés qui cotisent au régime général.
Une telle tendance a amélioré l'équilibre démographique du régime général et a accru ses ressources aux dépens des régimes des non-salariés.
La commission des finances propose donc de refuser l'affectation au régime général des excédents de C 3 S de l'exercice 1997 pour les mettre en réserve afin que les régimes qui en sont les attributaires légaux puissent faire face à leurs déficits, qui réapparaîtront dès 1999.
En effet, les prévisions fournies par le Gouvernement en annexe au projet de loi des finances mettent en évidence que les trois principaux régimes bénéficiaires de la C 3 S seront dans le rouge en 1999 et que, en 2000, le montant de leurs déficits additionnés devraient s'élever à 2,35 milliards de francs, soit une somme légèrement supérieure au produit de la C 3 S que le présent article propose d'attribuer au régime général. Vous constaterez qu'il y a là une incohérence majeure.
La commission des finances est, en outre, tout à fait opposée à ce que la CANAM soit privée de ses ressources au titre de la répartition du produit de la CSG et des droits sur les alcools. Le Gouvernement entend mettre en oeuvre, là encore, une politique qui nous semble par trop défavorable aux non-salariés.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 13 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 65 et 38.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. La commission souhaite, par cet amendement, opérer une distinction entre les réserves non utilisées de la C 3 S et les flux qui apparaîtront à compter de 1998.
S'agissant des réserves, qui font l'objet des trois premiers paragraphes de l'article, elle consent, certes à regret, au dispositif proposé, étant souligné que cette opération est considérée comme exceptionnelle.
Je voudrais insister sur le fait que, si des prélèvements ne sont pas opérés sur l'excédent de C 3 S, les sommes correspondantes iront au régime agricole, ce qui soulagera d'autant le budget de l'Etat.
Par cet artifice, celui-ci se désengagera du budget des prestations sociales agricoles et se dispensera de ce qui lui est imposé par la loi, c'est-à-dire le financement des prestations sociales agricoles. Il s'agirait, en quelque sorte, d'une opération à double détente que nous ne pouvons tolérer.
Si nous sommes favorables pour cette année au dispositif proposé, en revanche, nous ne pouvons pas l'accepter pour l'avenir.
En effet, il remet en cause le dispositif adopté l'an dernier dans la loi de financement de la sécurité sociale et privera la CANAM d'une partie de la CSG à laquelle elle a droit au moment même où le produit de la CSG sera multiplié par deux.
Aussi, la commission des affaires sociales propose de supprimer le paragraphe IV de l'article 11. Elle rappelle que la C 3 S a été créée pour compenser la perte de certains cotisants dans les régimes de non-salariés. Si la C 3 S continuait à produire des excédents, il faudrait prévoir non une affectation desdits excédents, mais la diminution du taux de cette contribution.
La commission est donc défavorable aux amendements n°s 38 et 65.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 65, 38 et 13 ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je ne reprendrai pas les propos que vient de tenir M. le rapporteur pour justifier l'opposition du Gouvernement à ces amendements. Je réaffirme seulement qu'en aucun cas l'ORGANIC, la CANCAVA, la Caisse autonome nationale de compensation de l'assurance vieillesse agricole, et la CANAM ne seront en difficulté puisque, par définition, ces caisses sont équilibrées. C'est précisément parce qu'elles sont équilibrées que la C3S dégage un excédent qu'il est préférable d'affecter à la protection sociale plutôt qu'au budget de l'Etat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 65.
M. Paul Blanc. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 65 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11, ainsi modifié.

(L'article 11 est adopté.)

Articles 11 bis et 11 ter



M. le président.
« Art. 11 bis. - I. - Au premier alinéa de l'article L. 134-3 du code de la sécurité sociale, les mots : "aux prestations en nature des assurances maladie, maternité et invalidité prévues au livre III" sont remplacés par les mots : "aux prestations en nature des assurances maladie et maternité prévues au livre III".
« II. - Au premier alinéa de l'article L. 134-4 du code de la sécurité sociale, les mots : "aux prestations en nature des assurances maladie, maternité et invalidité prévues au livre III" sont remplacés par les mots : "aux prestations en nature des assurances maladie et maternité prévues au livre III". » - (Adopté.)
« Art. 11 ter. - Dans l'intitulé de la section 3 du chapitre IV du titre III du livre 1er du code de la sécurité sociale, les mots : "des militaires de carrière," sont supprimés. » - (Adopté.)

Article 12



M. le président.
« Art. 12. - A la section 3 du chapitre IV du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 134-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 134-5-1 . - La Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés prend en charge la partie des risques donnant lieu aux prestations en nature des assurances maladie et maternité prévues au livre III, pour l'ensemble des travailleurs salariés en activité et des retraités relevant des régimes des clercs et employés de notaires et de la Banque de France.
« La gestion des risques mentionnés au premier alinéa demeure assurée par les organismes propres aux régimes spéciaux en cause auxquels les intéressés restent affiliés.
« Le taux des cotisations dues au régime général par les régimes des clercs et employés de notaires et de la Banque de France au titre des travailleurs salariés en activité et des retraités est fixé compte tenu des charges d'action sanitaire et sociale, de gestion administrative et de contrôle médical que ces régimes continuent à assumer. Dans les limites de la couverture prévue au premier alinéa, la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés rembourse à la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires et à la Caisse de prévoyance maladie de la Banque de France les dépenses afférentes aux soins et aux prestations en nature.
« Les soldes qui en résultent entre ces régimes spéciaux et la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés sont fixés dans les conditions définies par le dernier alinéa de l'article L. 134-1.
« Des décrets fixent, pour chaque régime spécial, les conditions d'application du présent article. »
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 14 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 1 est déposé par MM. Dejoie, Rufin et les membres du groupe du RPR.
L'amendement n° 39 est présenté par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 54 est déposé par M. Huriet et les membres du groupe de l'Union centriste.
Tous quatre tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 14.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. On peut constater qu'une quasi-unanimité se fait pour demander la suppression de cet article, qui prévoit un prélèvement de 210 millions de francs à la charge de la caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires.
Une telle mesure est en effet de nature à pénaliser un régime qui est déjà fragilisé puisqu'il affiche, avant toute nouvelle mesure, un déficit prévisionnel pour 1998 de 64 millions de francs et que les réserves de sa branche maladie s'élèvent à seulement 148 millions de francs.
Ce prélèvement va donc contraindre le régime en question à augmenter ses cotisations ou à puiser dans ses réserves d'assurance vieillesse.
Il s'agit en outre d'une mesure élaborée sans concertation, et l'importance du courrier que nous avons reçu des personnes concernées...
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Ça, c'est vrai !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. ... montre bien que la concertation dont le Gouvernement nous a tant parlé n'a sans doute pas eu lieu avec les clercs de notaires.
Nous proposons donc la suppression de cette mesure, qui nous paraît discriminatoire.
M. le président. La parole est à M. Blanc, pour défendre l'amendement n° 1.
M. Paul Blanc. J'ajouterai simplement à ce qu'a dit M. le rapporteur que, en raison de l'évolution démographique, ce régime risque de connaître des difficultés financières croissantes, et cela assez rapidement.
Ce dispositif a été imaginé par le Gouvernement dans une optique purement comptable, qui n'aboutit en réalité qu'à déplacer les difficultés.
Il serait plutôt nécessaire de laisser les responsables de ce régime poursuivre leur réflexion sur l'avenir de cette caisse, afin de trouver des solutions permettant d'assurer son équilibre financier.
MM. Alain Gournac et Alain Vasselle. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 39.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Les arguments qui viennent d'être présentés recueillent notre approbation. Nous sommes tous d'accord pour dire que cette mesure, prise sans concertation, est tout à fait inique.
M. le président. La parole est à M. Huriet, pour défendre l'amendement n° 54.
M. Claude Huriet. Je me bornerai à préciser qui, dans l'attente, d'une part, de la conclusion des négociations en cours entre les partenaires sociaux concernés sur l'avenir du régime et, d'autre part, de la présentation au Parlement d'un projet de loi sur l'assurance maladie universelle, nous souhaitons voir maintenues les règles actuelles.
Non seulement cette mesure est injuste, comme cela vient d'être dit, mais, elle est prématurée puisque le Gouvernement a annoncé une mise à plat de l'ensemble de ces régimes dans le cadre du futur débat relatif à l'assurance maladie universelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 14, 1, 39 et 54 ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. L'avis du Gouvernement est défavorable.
Nous n'avons rien, je vous l'assure, contre les clercs de notaires (Rires et exclamations sur les travées du RPR.) Je ne sais pas pourquoi je déchaîne l'hilarité chaque fois que je vous assure de mon sentiment à l'égard des clercs de notaires. ( Nouveaux rires. )
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Qu'est-ce que ce serait si vous aviez quelque chose contre eux !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Il faut simplement que les gens contribuent en fonction de leur salaire. Les clercs de notaires avaient un statut dérogatoire par rapport aux autres régimes, à ceux des marins, des mineurs, etc. Nous leur demandons de verser, sur une réserve de 3,4 milliards de francs, 200 millions de francs par an. Cela ne nous paraît pas excessif.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 14, 1, 39 et 54.
M. François Autain. Je demande la parole contre les amendements.
M. le président. La parole est à M. Autain.
M. François Autain. Je n'avais pas l'intention d'intervenir dans la discussion de cet article mais, ayant entendu M. le rapporteur évoquer la quasi-unanimité du Sénat, il me paraît absolument nécessaire de préciser que le groupe socialiste soutient le Gouvernement en cette affaire et qu'il votera donc contre les amendements de suppression.
M. Alain Gournac. Quelle surprise !
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet article 12 pose un certain nombre de questions de principe qu'il ne faudrait pas éluder dans cette discussion.
La commission des affaires sociales, la commission des finances et les sénateurs du groupe du RPR, ainsi que ceux du groupe de l'Union centriste, nous invitent à supprimer cet article, ce qui, en soi, à s'en tenir aux apparences, pourrait être admissible.
Cela pose toutefois un problème quand on connaît la position de fond de la majorité sénatoriale sur la question des régimes spéciaux.
Toute cette discussion l'a montré, la majorité sénatoriale ne peut pas supporter que certains régimes de protection sociale - et singulièrement des régimes d'assurance vieillesse - proposent à leurs assurés des garanties supérieures à celles qui sont accordées aux bénéficiaires de prestations du régime général. Je ne fais pas de procès d'intention, je constate.
De plus, quand on garde à l'esprit la philosophie générale de ce que l'on a appelé le « contre-projet de loi de financement », on ne peut oublier que les clercs et employés de notaires - et je fais la différence - dont on fait mine de défendre les intérêts, sont eux aussi soumis à la révision à la baisse de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie prônée par ailleurs.
Nous devons donc replacer ce débat dans ses termes exacts.
La majorité sénatoriale défend des positions que je qualifierai de positions de classe.
M. Alain Gournac. C'est la lutte !
M. Jean Chérioux. C'est un peu désuet !
M. Guy Fischer. Mais c'est la réalité ! On peut appeler cela autrement mais, faites-nous confiance, c'est la réalité !
Peu importe que la majorité sénatoriale masque la défense de ces positions derrière celle des intérêts des salariés, comme elle le fait en d'autres domaines.
Sur le fond - et nous aurons l'occasion d'en reparler - ce sont sans doute aussi ces positions, plutôt que le souci de l'intérêt des familles, qui motivent aujourd'hui son rejet de la réforme des prestations familiales.
Pour ce qui est de l'article 12, nous sommes quelque peu dubitatif quant à la procédure.
Nous avons fait l'expérience « grandeur nature » - voyez la CNRACL, la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales - des problèmes de compensation généralisée et de surcompensation. Nous ne pouvons, dans ces conditions, admettre qu'au détour d'un projet de loi de financement des dispositions soient prises sans que tous les intéressés aient été consultés.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Eh oui ! Il a raison : il est moins mauvais qu'il n'y paraît !
M. Dominique Braye. Exactement !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. C'est cela qu'il fallait dire tout de suite !
M. Guy Fischer. Je dis des choses qui vous déplaisent, mais je dis des vérités.
Certes, on nous indique que la caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires jouit d'une forme de dérogation en ce qui concerne les processus de compensation. Cependant, nous inclinons à penser que ce à quoi il convient de s'intéresser, c'est non à un régime particulier, mais à l'ensemble des régimes spéciaux ainsi qu'à leurs rapports avec le régime général et à leurs rapports entre eux.
C'est dans l'attente de cette nécessaire remise à plat que nous ne voterons pas cet article 12. (Ah ! sur les travées du RPR.)
Nous nous abstiendrons donc sur les amendements tendant à sa suppression.
M. Dominique Braye. Que d'explications pour arriver à cela !
M. Guy Fischer. Mon cher collègue, il s'agissait simplement de mettre les points sur les « i ». Et nous aurons certainement l'occasion de revenir sur votre contre-projet au cours de cette séance !
Mme Nicole Borvo. Très bien !
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Mes chers collègues, nous ne pouvons rester insensibles devant la position du groupe communiste républicain et citoyen sur cet article.
Je dirai à M. Fischer que la contradiction ou l'incohérence qu'il croit pouvoir déceler dans la position adoptée par notre groupe n'est pas réelle.
En fait, tout ce que nous voulons montrer c'est que, tant sur le fond que sur la forme, c'est-à-dire sur la manière de procéder, nous sommes en complet désaccord avec le Gouvernement.
Je me suis plu à rappeler, en qualité de rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse, qu'il nous paraissait souhaitable d'engager un examen en profondeur, selon une approche structurelle, de la situation des régimes spéciaux. J'ai dit que ce n'était sûrement pas en prenant des mesures ponctuelles, selon une approche purement comptable qui ne vise qu'à économiser quelques millions de francs par-ci, par-là, pour parvenir au chiffre de 4,3 milliards de francs, qu'on résoudra les problèmes de fond qui se posent et vont se poser.
Mais ce qui, en l'espèce, est particulièrement contestable dans la démarche du Gouvernement, c'est que cette mesure a été inscrite dans le projet de loi sans aucune concertation avec les intéressés. Nous verrons d'ailleurs tout à l'heure, lorsque nous examinerons l'article 19, qu'il en a été de même en ce qui concerne la branche famille.
Cela a d'ailleurs été confirmé par le courrier qu'ont récemment reçu de M. Probst l'ensemble des parlementaires. C'est donc une sorte de constante dans la démarche du Gouvernement : nous constatons une telle façon de procéder avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais aussi à propos d'autres textes, et notamment du projet de loi de finances.
Sur la méthode, il y au moins un point d'accord avec le groupe communiste républicain et citoyen. Simplement, nous, nous prenons nos responsabilités : nous voterons la suppression de l'article 12, quand le groupe communiste républicain et citoyen, sans doute mal à l'aise, se réfugiera dans l'absention. Peut-être des échéances électorales proches l'amènent-elles à prendre cette position.
Mme Nicole Borvo. C'est surtout que nous ne voulons pas voter avec vous !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 14, 1, 39 et 54, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 12 est supprimé.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !

Article 13



M. le président.
« Art. 13. - I. - L'article L. 721-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 721-3 . - I. - Les charges résultant des dispositions de la présente section et de la section 4 sont couvertes par :
« 1° Des cotisations à la charge des assurés, assises sur une base forfaitaire ou sur la pension mentionnée à l'article L. 721-9 ;
« 2° Des cotisations à la charge des associations, des congrégations ou collectivités religieuses dont relèvent les assurés, assises sur une base forfaitaire ;
« 3° Les recettes résultant de l'application de l'article L. 134-14 ;
« 4° Une contribution du fonds institué par l'article L. 135-1 dans les conditions fixées par l'article L. 135-2 ;
« 5° Des recettes diverses ;
« 6° En tant que de besoin, une contribution de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés.
« II. - Les taux des cotisations et les bases forfaitaires mentionnés au I ci-dessus sont fixés par décret, après avis du conseil d'administration de l'organisme mentionné à l'article L. 721-2.
« Sur la demande des administrateurs représentant chacun des cultes, le conseil d'administration de l'organisme mentionné à l'article L. 721-2 peut répartir entre les associations, congrégations et collectivités religieuses les montants des cotisations que celles-ci doivent verser compte tenu des capacités contributives de chacune d'elles et des charges que le régime supporte de leur fait. »
« II. - L'article L. 721-6 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 721-6 . - Sous réserve des dispositions de l'article L. 721-5, la pension de vieillesse est calculée, liquidée et servie dans les conditions définies aux deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article L. 351-1, au premier alinéa de l'article L. 351-2, aux 4°, 5° et 6° de l'article L. 351-3, aux articles L. 351-4, L. 351-8 à L. 351-13, L. 352-1, L. 353-1 à L. 353-5 et L. 355-1 à L. 355-3.
« Les prestations afférentes aux périodes d'assurance antérieures au 1er janvier 1998 sont liquidées dans les conditions législatives et réglementaires en vigueur au 31 décembre 1997. Le minimum et le maximum mentionnés à l'article L. 721-6 dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 1998 sont revalorisés dans les conditions prévues à l'article L. 351-11. »
« III. - La sous-section 5 de la section 2 du chapitre 1er du titre II du livre VII du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 721-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 721-8-1 . - Une convention conclue entre l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés et la Caisse mutuelle d'assurance vieillesse des cultes détermine les conditions dans lesquelles les sommes nécessaires au paiement des prestations, à la gestion administrative et à l'action sanitaire et sociale sont mises à la disposition de la Caisse mutuelle d'assurance vieillesse des cultes par le régime général ainsi que les conditions dans lesquelles les cotisations mentionnées à l'article L. 721-3 du code de la sécurité sociale sont reversées par cet organisme au régime général. Cette convention est soumise à l'approbation des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget. »
« IV. - L'article L. 721-10 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 721-10 . - Le montant de la pension d'invalidité est forfaitaire. Un décret détermine les modalités de calcul de ce montant, qui ne peut être inférieur à celui de l'allocation aux vieux travailleurs salariés. »
« V. - A l'article L. 721-11 du même code, les mots : "la pension d'invalidité à laquelle elle se substitue" sont remplacés par les mots : "l'allocation aux vieux travailleurs salariés".
« VI. - L'article L. 721-4 et la deuxième phrase de l'article L. 721-18 du même code sont abrogés.
« VII. - Les disponibilités figurant au bilan de l'exercice 1997 de la Caisse mutuelle d'assurance vieillesse des cultes font l'objet d'un versement à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale pour le compte de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés. Un arrêté pris par les ministres chargés de la sécurité sociale et du budget fixe le montant et les modalités du versement, qui interviendra au plus tard le 31 mars 1998.
« VIII. - Sous réserve des dispositions du VII, les dispositions du présent article prennent effet au 1er janvier 1998. »
Par amendement n° 57, M. Chérioux propose de compléter le premier alinéa du II du texte présenté par le I de cet article pour l'article L. 721-3 du code de la sécurité sociale par une phrase ainsi rédigée :
« Ce décret détermine également les modalités de la diminution des taux des cotisations visées à l'article L. 381-13 du code de la sécurité sociale mise en oeuvre conjointement à l'augmentation des cotisations mentionnées aux 1° et 2° du présent article. »
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Par cet article, il est proposé de procéder à l'intégration financière au régime général du régime d'assurance vieillesse des ministres des cultes et membres des congrégations religieuses.
La situation financière du régime vieillesse des ministres des cultes et membres des congrégations religieuses s'est fortement dégradée depuis 1994. Du fait de son rapport démographique - on dénombre trois retraités pour un cotisant - ce régime connaît des déficits croissants qui ont entamé ses réserves. Pour 1997 et 1998, les prévisions de déficit s'établissent respectivement à 84 millions de francs et à 105 millions de francs.
Il est donc proposé d'intégrer la CAMAVIC, la Caisse mutuelle d'assurance vieillesse des cultes, au régime général. En conséquence, ses réserves, qui atteignent 310 millions de francs, seront versées à celui-ci. Je ne pense pas que ce soit cette seule perspective qui ait amené le Gouvernement à nous proposer cette intégration mais, en tout cas, les cotisations et les prestations de cette caisse seront alignées sur le régime général.
Les cotisations versées à la CAMAVIC sont actuellement de 8 569 francs par an - 3 072 francs pour l'assuré et 5 497 francs pour l'institution - et passeront, après la réforme, à 13 075 francs par an - 5 238 francs pour l'assuré et 7 387 francs pour l'institution - soit une augmentation de 4 506 francs, ce qui est très important.
En contrepartie, le montant de la pension, qui est actuellement de 23 449 francs par an pour cent cinquante trimestres de cotisations, sera progressivement revalorisé, mais pour les seuls droits acquis après le 1er janvier 1998. Autrement dit, les pensions déjà liquidées ne seront pas augmentées, et les effets de la réforme ne se feront sentir que très progressivement, en fonction des droits acquis à compter de 1998.
L'augmentation des cotisations vieillesse aura donc un impact considérable. Si les collectivités religieuses peuvent moduler, par le jeu de la solidarité, leur taux de cotisations, il n'en va pas de même pour les assurés, qui subiront de plein fouet cette hausse.
Il semble que la réforme de la CAMAVIC ait, elle, fait l'objet d'une concertation, je vous en donne acte, monsieur le secrétaire d'Etat. Mais ne vous réjouissez pas trop vite : l'exception ne fait sans doute que confirmer la règle ! (Sourires.)
Lorsque la réforme de la CAMAVIC a été négociée, il avait été prévu que celle-ci interviendrait conjointement à celle du régime d'assurance maladie des ministres des cultes géré par la CAMAC, et dont le montant des cotisations est supérieur à celui du régime général : 13 026 francs par an pour les actifs et 6 513 francs par an pour les pensionnés.
Pour que la hausse des cotisations d'assurance vieillesse soit supportable, le présent amendement tend à lier, comme cela avait été prévu lors des négociations, l'augmentation des cotisations vieillesse visées à l'article L. 721-3 à la baisse des cotisations maladie prévues à l'article L. 381-13 du code de la sécurité sociale.
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Notre collègue Jean Chérioux a défendu avec tellement de foi (Sourires)...
M. Jean Chérioux. C'est le moment de le dire, monsieur le rapporteur !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. ... cet amendement relatif au régime d'assurance maladie des ministres des cultes que nous émettons un avis favorable.
M. Alain Gournac. Il faut avoir la foi !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je me trouve dans une situation terrible ! Monsieur Chérioux, je crois à votre bonne foi (sourires.) , mais les ministres des cultes sont plutôt d'accord avec les mesures que nous leur proposons.
M. Jean Chérioux. Je ne l'ai pas inventé !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je reconnais qu'il faut poursuivre la discussion concernant le régime d'assurance maladie. Vous souhaitez que la hausse des cotisations vieillesse soit compensée par la baisse des cotisations maladie. La réforme est en cours ! Toutefois, une telle orientation, certes intéressante, ne devra pas conduire à un alourdissement des charges du régime général qui, depuis 1987, finance le régime particulier des cultes. Le transfert financier dont bénéficie à ce titre le régime particulier des cultes s'est élevé à 501 millions de francs en 1996, soit 52 % des ressources.
Par conséquent, laissez-nous poursuivre la discussion et nous verrons comment cela s'arrangera au mieux avec le ciel.
M. Jean Chérioux. Que le ciel vous entende !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est donc défavorable, à regret - je le confesse - à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 57, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13, ainsi modifié.

(L'article 13 est adopté.)

Article additionnel après l'article 13



M. le président.
Par amendement n° 72 rectifié, MM. Seillier et Blanc proposent d'insérer, après l'article 13, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Il est ajouté après l'article L. 723-6-2 du code de la sécurité sociale un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les statuts de la CNBF peuvent prévoir l'exonération du paiement des cotisations pendant les premières années d'exercice de la profession.
« La durée d'exonération ne peut excéder trois ans.
« Ils peuvent également dispenser du paiement des cotisations les personnes ayant atteint l'âge à partir duquel elles peuvent bénéficier d'un droit à pension à taux plein.
« II. - L'article L. 723-16 du code de la sécurité sociale est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce règlement peut prévoir que sont exonérés du paiement des cotisations les avocats exonérés dans les conditions prévues à l'article L. 723-6-3. »
La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier. Cet amendement tend à harmoniser les dispositions qui régissent les cotisations aux régimes de retraite obligatoires et complémentaire de la Caisse nationale des barreaux français avec les autres régimes libéraux.
A l'heure actuelle, les régimes de retraite obligatoire et complémentaire des avocats ne permettent pas de bénéficier des allégements en début de carrière qui sont prévus dans les autres régimes libéraux - pendant au maximum trois ans - et, en fin de carrière, quand les avocats ont atteint l'âge auquel ils peuvent bénéficier d'un droit à pension à taux plein.
Ceux-ci sont encore soumis à des cotisations à taux plein, alors que d'autres régimes libéraux prévoient des allégements de cotisations. Il s'agit donc d'harmoniser le régime du barreau avec les autres régimes libéraux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Après les cultes, nous nous prononcerons en faveur des avocats. Par conséquent, nous émettons un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Le dispositif proposé existe déjà, me semble-t-il. Il permet non pas une exonération, mais une baisse importante des cotisations.
Par ailleurs, je m'interroge quant aux effets induits d'un tel dispositif d'exonération, qui pourrait modifier la participation de la Caisse nationale du barreau français aux mécanismes de solidarité financière entre les régimes.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 72 rectifié.
M. Paul Blanc. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Blanc, pour explication de vote.
M. Paul Blanc. Je souhaite simplement rassurer le Gouvernement. Cette mesure ne lui coûtera pas un sou. Les avocats ont eux-mêmes demandé que les jeunes puissent bénéficier des mêmes dispositions que celles qui s'appliquent à d'autres professions libérales.
M. Emmanuel Hamel. On pourrait demander son avis au président de séance ! Qu'en pensez-vous, monsieur le bâtonnier ? (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 72 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13.

Article 14



M. le président.
« Art. 14. - I. - A compter du 1er janvier 1998, les salariés et les anciens salariés de l'ancienne chambre de commerce et d'industrie de Roubaix et leurs ayants droit qui relevaient antérieurement, pour les risques invalidité et vieillesse, du régime spécial de cette chambre sont affiliés ou pris en charge, pour ces risques, par le régime général de sécurité sociale. Il est mis fin à ce régime spécial à compter de la même date.
« II. - Les obligations contractées, au titre de ce régime spécial, par la chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing à l'égard des salariés de l'ancienne chambre de commerce et d'industrie de Roubaix, ses anciens salariés et leurs ayants droit bénéficiaires au 31 décembre 1997 dudit régime spécial sont transférées au régime général de sécurité sociale dans la limite des règles qui sont propres à celui-ci concernant l'âge de l'ouverture du droit, la durée maximale d'assurance et le montant maximal de la pension. Un décret apportera aux règles définies par les articles L. 341-1 à L. 341-4, le 1° de l'article L. 341-6, les deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article L. 351-1 et le 1° de l'article L. 351-11 du code de la sécurité sociale les adaptations rendues nécessaires par ce transfert.
« Un décret fixe la contribution au régime général de sécurité sociale incombant à la chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing au titre du transfert de droits défini à l'alinéa précédent.
« III. - Pour celles des obligations mentionnées au II ci-dessus qui ne sont pas prises en charge par le régime général de sécurité sociale, la chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing pourvoit, à compter du 1er janvier 1998, aux couvertures complémentaires nécessaires en application des titres Ier et II du livre IX du code de la sécurité sociale. »
Par amendement n° 40 rectifié, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose de compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - A l'appui du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, le Gouvernement présente un rapport :
« - analysant la situation de chacun des régimes spéciaux de retraite en voie d'extinction ;
« - déterminant des règles communes pour leur éventuelle absorption par un autre régime de sécurité sociale ;
« - et évaluant, pour chacun des régimes concernés, les incidences financières de leur absorption éventuelle. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Le régime de la caisse de retraite de la chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing est cher, nous semble-t-il, au coeur de certains,
Initialement, nous étions un peu réticents à l'égard de cet article, qui ressemblait plutôt à un cavalier budgétaire dont on ne connaissait pas très exactement l'équilibre financier.
Le montant de la contribution au régime général s'élevait à environ 30 millions de francs, mais sur cinq ans seulement. En outre, au vu des précautions qui ont été prises - M. Jean Chérioux l'a rappelé - pour l'intégration financière de la CAMAVIC, cette mesure nous paraissait un peu hâtive.
Quoi qu'il en soit, pour ne faire de peine à personne et alors que se manifeste un peu d'unanimisme dans cette affaire, nous demandons simplement, par cet amendement, que le Gouvernement examine la situation de l'ensemble des régimes de sécurité sociale en voie d'extinction, notamment lorsqu'ils ont aussi peu d'adhérents que celui qui est concerné par l'article 14.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Pour les six actifs, les cent dix-sept retraités et les cent dix-neuf futurs retraités, nous sommes favorables à l'amendement présenté par la commission des finances.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Compte tenu du nombre d'assurés dont vous faites état, nous pouvons très bien nous informer sans établir un énième rapport.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 40 rectifié.
M. François Autain. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Autain.
M. François Autain. Je tiens à insister à mon tour sur le fait que nous sommes submergés par les rapports. Nous n'arrivons pas à les lire tous, sauf ceux d'entre nous qui ont suffisamment de collaborateurs pour que ceux-ci les lisent à leur place.
Par conséquent, le groupe socialiste est délibérément défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 40 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14, ainsi modifié.

(L'article 14 est adopté.)

Demande de réserve



M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Nous abordons maintenant des dispositions très controversées du projet de loi, qui concernent la famille. De manière à pouvoir les examiner tranquillement, je demande la réserve de l'amendement n° 15, tendant à insérer un article additionnel après l'article 14, et de l'article 15, jusqu'après l'examen de l'article 20.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Favorable.
M. le président. La réserve est ordonnée.

TITRE III

M. le président. La division « Titre III » et son intitulé ont été supprimés par l'Assemblée nationale.

Prévisions de recettes

M. le président. Par amendement n° 16 rectifié, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit l'intitulé de cette division, avant l'article 15 :

« Section 3
« Prévisions de recettes ».
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé de la divison avant l'article 15 est ainsi rédigé.

Articles 16 à 18



M. le président.
Les articles 16 à 18 ont été supprimés par l'Assemblée nationale.

TITRE IV

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES
ET À LA TRÉSORERIE

Section 1

Branche famille

Article 19



M. le président.
« Art. 19. - I. - L'article L. 521-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 521-1 . - Les allocations familiales sont attribuées à partir du deuxième enfant à charge.
« Ces allocations, ainsi que les majorations pour âge mentionnées à l'article L. 521-3, sont attribuées au ménage ou à la personne dont les ressources n'excèdent pas un plafond qui varie en fonction du nombre des enfants à charge.
« Ce plafond est majoré lorsque chaque membre du couple dispose d'un revenu professionnel ou lorsque la charge des enfants est assumée par une seule personne.
« Les événements susceptibles de modifier le revenu professionnel, tels que divorce, décès ou chômage sont, dans les meilleurs délais, pris en compte pour l'attribution de ces allocations.
« Le niveau du plafond de ressources varie conformément à l'évolution des prix à la consommation hors tabac, dans des conditions prévues par voie réglementaire.
« Des allocations familiales différentielles sont dues lorsque les ressources excèdent le plafond d'un montant inférieur à une somme déterminée. »
« II. - Après le premier alinéa de l'article L. 755-11 du même code, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :
« Les allocations visées à l'article L. 755-12 ainsi que leurs majorations pour âge sont attribuées au ménage ou à la personne dont les ressources n'excèdent pas un plafond déterminé.
« Les dispositions des troisième, cinquième et sixième alinéas de l'article L. 521-1 sont applicables dans le cas visé à l'alinéa précédent. »
« III. - Supprimé .
« IV. - L'article L. 755-10 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de l'article L. 521-1 sont applicables aux personnels mentionnés au présent article. »
« V. - La mise en oeuvre d'un plafond de ressources pour le versement des allocations familiales prévue au présent article est transitoire.
« Elle s'appliquera jusqu'à ce que soit décidée une réforme d'ensemble des prestations et des aides fiscales aux familles, que le Gouvernement mettra en oeuvre, dans un objectif de justice et de solidarité, après avoir réorienté le système existant. »
Sur l'article, la parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec cet article 19, nous abordons la branche famille de la sécurité sociale et la mise sous condition de ressources des allocations familiales.
Il convient d'abord de rappeler que le Gouvernement a hérité d'une branche famille lourdement déficitaire : plus de 13 milliards de francs en 1997. Le déficit pour 1998 serait à peine inférieur - 12 milliards de francs - si des dispositions n'étaient pas prises dès maintenant pour enrayer cette dérive.
Depuis 1994, les déficits se succèdent : ils sont dus, pour une large part, à la loi sur la famille, qui a été financée à crédit.
Confronté à une situation financière très préoccupante et aux difficultés de nombreuses familles modestes, le Gouvernement a eu le courage de faire des choix qui vont dans le sens de la solidarité. Ainsi, il nous est proposé, pour 1998, la mise sous condition de ressources des allocations familiales. Cette mesure permet de maintenir les allocations familiales à plus de 92 % des familles qui en bénéficient,...
M. Alain Gournac. Ce n'est pas assez !
M. Gilbert Chabroux. ... mais il est vrai qu'un petit nombre de familles - les plus aisées - seront touchées par cette disposition.
Il convient d'abord de souligner que, dans un contexte de déficit qui ne permet pas de faire n'importe quoi, les mesures indispensables aux familles les plus démunies seront préservées. Il en sera ainsi, je le répète, pour 92 % des familles.
Il faut ajouter à cela la mesure qui permettra de prolonger le versement des allocations familiales jusqu'à dix-neuf ans et qui apportera une aide appréciable aux familles qui soutiennent leurs enfants en recherche d'emploi. Cette disposition sera prolongée en 1999 pour les enfants âgés de dix-neuf à vingt ans.
Depuis 1970, époque à laquelle 14 % seulement des prestations étaient versées sous condition de ressources, la solidarité est devenue une composante importante de la politique familiale.
En raison de l'évolution économique et de la modification des structures familiales, les familles qui ont le plus besoin d'aide ne sont pas toujours des familles nombreuses, comme par le passé. Il s'agit souvent de familles monoparentales en situation d'emploi précaire ou qui, simplement, ne disposent que de revenus modestes.
Souvent, c'est l'accueil du premier enfant qui pose un problème. A l'avenir, il faudrait pouvoir envisager une aide pour le premier enfant.
La mise sous condition de ressources des allocations familiales doit contribuer à ramener le déficit de la branche famille de la sécurité sociale à moins de 3 milliards de francs et à maintenir les prestations au plus grand nombre de bénéficiaires, et ce de façon équitable.
Il faut rappeler que, contrairement à ce qui a été dit par certains elle ne constitue pas le prélude à un dispositif de même nature pour ce qui concerne l'assurance maladie. En outre, elle ne préjuge en rien les conclusions qui pourraient être tirées de la concertation qui sera prochainement engagée avec les organisations syndicales et familiales pour parvenir à la redéfinition de la politique familiale.
Quand on parle de l'universalité des allocations comme principe fondateur de la politique familiale, telle qu'elle avait été définie après la guerre, il faut rappeler que les mises sous condition de ressources de l'allocation de rentrée scolaire en 1974, de l'allocation de parent isolé en 1976, du complément familial en 1977, de l'allocation jeune enfant en 1987 et de l'allocation d'adoption en 1996 ont été décidées par des gouvernements de droite.
La politique familiale a été conçue, à l'origine, avec une visée nataliste, comme un moyen de compenser partiellement la charge qui résulte de la présence des enfants au sein d'une famille.
Cette politique a profondément évolué au cours des années. Vers les années soixante-dix, en raison des difficultés économiques et de l'évolution structurelle des familles, le système de protection a pris en compte les besoins spécifiques des familles les plus modestes, les plus fragiles. Cet impératif s'est imposé à tout le monde et a recueilli l'unanimité.
Ainsi, au fil du temps, la politique familiale a rempli une fonction redistributive envers les plus défavorisés pour assurer un niveau de vie minimal à l'enfant.
La politique familiale est devenue de plus en plus une politique de solidarité. Cette solidarité doit être encore renforcée et, à cet égard, il faut s'interroger sur la fiscalité qui s'applique aux revenus des familles.
Le principe du quotient familial devrait tendre à égaliser, pour un revenu donné, le poids de l'impôt entre les familles avec enfants et celles qui n'en n'ont pas. Or, l'effet du quotient familial croît assez rapidement avec le revenu des familles. Cela représente des aides publiques importantes, qui ne peuvent être corrigées que partiellement par la mise sous condition de ressources des allocations familiales.
Nous avons noté avec intérêt que le Gouvernement reste ouvert aux solutions alternatives que constituerait une fiscalisation des allocations familiales ou une modification du quotient familial et qu'il est prêt à réexaminer cette question dans le cadre d'une réflexion d'ensemble sur la famille.
En attendant cette remise à plat, le groupe socialiste salue les efforts accomplis et le courage du Gouvernement, qui fait des choix allant dans le sens de la solidarité. (Exclamations sur plusieurs travées du RPR.) Nous approuvons pleinement les dispositions du présent projet de loi, entre autres celles qui sont relatives à la branche famille de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet du Gouvernement visant à mettre sous condition de ressources les allocations familiales rencontre, comme par le passé, le rejet des associations familiales.
J'ai rappelé, dans mon intervention du 4 novembre dernier, combien me paraissaient démagogiques ceux qui, aujourd'hui, se présentent comme les défenseurs de la famille et qui, hier encore, ont saccagé la politique familiale.
Pas plus tard que lors de la première lecture de ce projet de loi à l'Assemblée nationale, M. Jegou a proposé de mettre toutes les prestations de la sécurité sociale sous condition de ressources, révélant par là même le véritable visage de la droite.
Cette mise en pièces de la politique familiale, accompagnée de reculs en matière d'emplois, de salaire et de justice sociale, a provoqué un rejet pleinement justifié de la majorité de droite qui l'a mise en oeuvre. Parallèlement, l'exigence de justice sociale s'est renforcée.
Notre opposition à la mise sous condition de ressources des allocations familiales n'a pas pour objectif, je tiens à le souligner, de défendre les familles les plus aisées au détriment des autres ; elle vise à préserver l'un des principes fondateurs de la politique familiale...
M. Alain Gournac. Ah ! Voilà ! C'est la majorité plurielle !
Mme Nicole Borvo. ... et, par conséquent, de la sécurité sociale : celui de la solidarité nationale.
Dans le même temps, il est évidemment nécessaire de remettre à plat la politique familiale dans son ensemble et de revoir le système actuel du quotient familial qui bénéficie aux familles les plus fortunées.
En outre, nous considérons que les problèmes actuels de la branche famille, en particulier, et de la sécurité sociale, en général, ne sont pas en premier lieu un problème de dépenses, mais sont surtout un problème de recettes.
Au fil de l'histoire, la branche famille est passée d'un financement exclusivement patronal - 16 % dans les années cinquante - à un désengagement des responsabilités financières du patronat à cet égard. Ainsi, la cotisation patronale est descendue à 5,4 % aujourd'hui et elle est allégée pour les salaires inférieurs à 1,33 fois le SMIC.
Nous proposons une augmentation et une modulation des cotisations patronales fondées sur le rapport entre salaire et valeur ajoutée, visant à pénaliser les entreprises qui suppriment les emplois pour spéculer et à favoriser celles qui créent des emplois.
Ces mesures apporteraient largement les recettes nécessaires pour mettre en oeuvre une autre politique familiale et sociale, issue de la remise à plat annoncée pour l'année prochaine. Par ailleurs, la mise sous condition de ressources des allocations familiales présente deux autres inconvénients : faire un premier pas dans la direction de la mise sous condition de ressources d'autres prestations, comme celles qui concernent la santé, et rompre la confiance, pourtant absolument nécessaire en ce domaine, en une politique familiale durable.
M. Dominique Braye. Très juste !
Mme Nicole Borvo. De plus, l'expérience démontre que bien vite le plafond devient plancher à tel ou tel moment des choix budgétaires. Plutôt que les revenus élevés, ce seront les revenus moyens, voire les petits revenus, qui seront affectés, jusqu'à en faire une prestation réservée aux personnes les plus pauvres.
M. Dominique Braye. Absolument !
Mme Nicole Borvo. Le meilleur moyen d'éviter cette dérive, c'est de surseoir à cette mesure, qui, de toute façon, devra être discutée à nouveau l'année prochaine.
Voilà ce que je comptais dire au seuil de la discussion de l'article 19, sur lequel nous présentons un amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur plusieurs travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de dire quelques mots sur cet article 19. Je note tout de suite, au passage, que l'intervention de notre collègue du groupe socialiste est assez révélatrice de l'état d'esprit dans lequel se trouvent la majorité et le Gouvernement à l'égard de la politique familiale.
M. Alain Gournac. Elle est typique !
M. Alain Vasselle. On voit bien que l'on dévie complètement du fondement de la politique familiale qui a toujours été celle de notre pays. Celle-ci, qui a été d'abord défendue par le général de Gaulle, n'a jamais été remise en cause - je l'ai dit lors du débat sur la politique familiale - par le président Mitterrand lorsqu'il était à l'Elysée.
M. François Autain. Mitterrand était un très bon Président !
M. Alain Vasselle. Il a fallu attendre aujourd'hui, c'est-à-dire les années quatre-vingt-dix, pour que les socialistes découvrent qu'il faut changer complètement et radicalement la politique qui doit être menée en faveur de la famille, en passant d'une politique familiale à une politique de solidarité, à une politique sociale. On se soucie donc peu des conséquences qui pourront en résulter tant au regard de la natalité et sur le plan national que pour la famille.
L'approche, en général, est mauvaise ; on le voit d'ailleurs bien à travers le projet de loi sur le financement de la sécurité sociale, mais également à l'occasion de l'examen d'autres textes. En effet, on ne cherche pas à diminuer le poids des dépenses qui pèsent sur les prélèvements obligatoires, lesquels freinent l'activité économique du pays. Au contraire, on adopte la solution de facilité, qui consiste à augmenter toutes les taxes, à accroître le poids de la fiscalité, les impôts, les prélèvements,...
M. Claude Estier. Vous n'avez jamais fait cela ?
M. Charles Ceccaldi-Raynaud. Pas autant que vous !
M. Alain Vasselle. ... sans se soucier des conséquences qui en résultent pour les familles et pour le pays sur le plan économique. S'agissant de la politique familiale, je voudrais rappeler trois convictions fortes qui ont été mentionnées dans une lettre de M. Jean-Pierre Probst, président de la CNAF. Je ne doute pas que le Gouvernement en ait eu connaissance. Ces convictions expriment, selon moi, l'essentiel de ce qui résultera de cette disposition, si elle est adoptée par le Parlement.
Je dois rappeler l'opposition unanime des organisations familiales, patronales et syndicales à la mise sous condition de ressources des allocations familiales.
La première conviction, que nous partageons avec la CNAF, est que le déficit de la branche famille renvoie à un faisceau de causes complexes : la volonté de tous les gouvernements d'augmenter, depuis près de vingt ans, les prestations familiales, en particulier dans le secteur clé de la petite enfance ; le poids du chômage sur les dépenses de la branche famille, qui explique notamment la très forte croissance de l'allocation parentale d'éducation, laquelle est pour une large part un transfert de l'assurance chômage - cette mesure a été prise pour l'emploi d'abord, il faut le rappeler, et ensuite pour aider les familles - et, enfin, le poids de la minoration des recettes et de l'aggravation des charges intervenues tout au long de l'histoire de la branche en fonction de ses excédents.
Procéder à une réforme structurelle de la politique familiale du seul fait du déficit de la branche famille, alors que les causes de ce déficit ne font pas l'objet d'une analyse objective, n'est pas une bonne décision.
Un sénateur du RPR. Très bien ! M. Alain Vasselle. La deuxième conviction est que, à tous les niveaux de revenus, la venue d'enfants, vous le savez, fait baisser le niveau de vie, que, à tous les niveaux de revenus, une famille supporte des charges au bénéfice de toute la collectivité et que, à tous les niveaux de revenus, une famille acquitte des cotisations d'allocations familiales. Afficher, au contraire, qu'une partie des familles n'a droit à aucune reconnaissance de la collectivité et à aucun retour de son effort contributif nous paraît grave pour l'avenir de la famille et grave pour l'avenir de notre système de protection sociale. D'autres déficits ou d'autres contraintes externes pourront justifier demain de mêmes mesures dans les autres branches de la sécurité sociale...
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Alain Vasselle. ... nous l'avons rappelé au moment du débat sur la politique familiale - créant les conditions d'une contestation de fond de tous les mécanismes de solidarité.
Qu'on veuille ou non, un couple avec deux enfants dont chacun des membres gagne 16 000 francs ne se considère pas comme riche, et rien ne dit que ce seuil à la discrétion du Gouvernement ne sera pas gelé ou baissé à terme. Un curseur a été mis en place. Il sera facile ensuite de le faire bouger.
Bien sûr, les familles modestes rencontrent, pour élever leurs enfants, plus de difficultés que les autres familles. Mais on ne saurait oublier que près de la moitié des prestations familiales sont déjà sous condition de ressources - notre collègue du groupe socialiste l'a rappelé tout à l'heure - et que la mesure relative aux allocations familiales n'entraîne aucune redistribution en faveur des familles modestes, puisqu'il s'agit de faire des économies.
La troisième conviction, enfin, concerne la méthode de la réforme. Celle-ci a été annoncée - je le rappelle - sans concertation et sans débat démocratique préalable. Par ailleurs, le Gouvernement a récemment suggéré que la mesure pourrait n'être que provisoire dans l'attente d'un réexamen d'ensemble de la politique familiale d'ici à 1998. Dès lors, il nous semble que la réforme menée l'est à contretemps, une telle réflexion générale devant précéder et non suivre des mesures structurelles sur lesquelles il sera impossible de revenir.
M. Emmanuel Hamel. Très bien ! M. Alain Vasselle. Il est bien beau de faire de belles déclarations d'intention, il est bien beau, pour faire plaisir au groupe communiste républicain et citoyen qui va se réfugier dans l'abstention pour faire preuve de solidarité avec le Gouvernement, de dire que l'on remettra à plat l'ensemble de la politique familiale, que l'on prend la mesure, aujourd'hui seulement, pour des raisons comptables, pour des questions d'équilibre de la branche famille, et que, l'année prochaine, on reviendra sur cette disposition. Mais c'est vraiment de la gestion à la petite semaine, et ce n'est pas très sérieux de la part du Gouvernement ni de la majorité qui le soutient !
M. Guy Fischer. Vous, vous en avez fait de la politique à la petite semaine !
M. Alain Vasselle. Permettez-moi de relever un dernier point.
Dans sa déclaration liminaire, madame le ministre a dit : « Je pense que le PDG qui gagne 100 000 francs par mois n'est pas dans la même situation que le smicard. »
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. J'ai cité M. Juppé !
M. Alain Vasselle. « Il n'est pas normal d'aider tout le monde de la même façon. »
Madame le ministre, quelle position adopterez-vous à l'égard, notamment, de l'allocation spéciale qui est accordée pour les enfants handicapés ? A partir du moment où l'on s'en tient au principe que vous avez affirmé, cela signifie que l'on remet en cause toutes les allocations, de quelque nature qu'elles soient, qui sont accordées à la famille !
M. Alain Gournac. Et voilà !
M. Alain Vasselle. Que ferez-vous en ce qui concerne l'allocation de parent d'enfant handicapé ? Instaurerez-vous des conditions de ressources pour l'octroi de l'allocation d'éducation spéciale et de ses différents compléments ? Ce serait un énorme retour en arrière, qui serait très mal compris par l'opinion. J'aimerais que, au moins sur ce point, vous nous rassuriez, madame le ministre. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. Emmanuel Hamel. Rassurez-nous, madame !
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Je souhaiterais simplement répondre sur quatre points aux arguments que viennent d'avancer nos collègues de l'opposition sénatoriale.
Premier point : en 1994, nous aurions financé à crédit la loi sur la famille, dites-vous, mes chers collègues. Je vous rappelle quel a été le vote de votre groupe en 1994 : en première lecture et lors des conclusions de la commission mixte paritaire, vous avez voté contre, en dénonçant les insuffisances du texte. (Sourires sur les travées du RPR.)
Le deuxième point concerne les conditions de ressources. Vous avez tenté de nous mettre en contradiction, en évoquant le fait qu'un certain nombre de dispositions de la politique familiale sont accordées sous condition de ressources. Or, c'est tout à fait logique. En effet, toute politique familiale comporte deux volets : en premier lieu, un volet social, expression de la solidarité, à laquelle répondent les prestations accordées sous condition de ressources, et, en second lieu, les allocations familiales, qui traduisent la reconnaissance à l'égard des familles qui contribuent à l'avenir de la nation par les enfants qu'elles ont mis au monde ; cela ayant été maintes fois répété, n'essayez pas de nous mettre en porte-à-faux s'agissant d'un équilibre qui a été voulu et que vous remettez fondamentalement en cause, ce qui n'est pas sans grave conséquence.
Troisième point : vous voulez résumer et caricaturer notre débat en le résumant à une opposition droite-gauche. Mes chers collègues, c'est un peu simple ! J'ai sous les yeux les résultats du vote intervenu lors du conseil d'administration exceptionnel de la Caisse nationale d'allocations familiales, le 30 septembre. Sur les trente voix contre, on compte trois voix CGT - s'agit-il de CGTistes de droite ? -...
M. Alain Gournac. Ce serait nouveau !
M. Claude Huriet. ... trois voix CGT-FO - s'agit-il de CGTistes-FO de droite ? - deux voix CFTC, deux voix CGC, deux voix de personnes qualifiées. Bref, à part trois voix pour, de la CFDT - sans doute de gauche - s'est exprimée une très large majorité, qui transcendait à l'évidence l'opposition droite-gauche. Alors, n'utilisez plus cet argument, qui est quelque peu éculé.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Très bien !
M. Claude Huriet. Le dernier point concerne le risque d'extension de la mise sous condition de ressources.
Madame la ministre, je vous ai interrogée lors de mon intervention dans la discussion générale. Je renouvelle ma question : si vous avez la conviction que ce principe va dans le sens de l'équité, pourquoi en restez-vous à son application aux seules prestations familiales ?
Et quelle attitude allez-vous adopter à l'égard des fonctionnaires pour le supplément familial de traitement ? J'ai rappelé dans mon intervention que non seulement il n'était pas attribué sous condition de ressources, mais qu'il était, en outre, plus élevé pour les salaires plus importants. Est-ce équitable à vos yeux ?
Telles sont les questions auxquelles, jusqu'à présent, vous n'avez pas voulu apporter de réponse. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président. Sur l'article 19, je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les quatre premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 17 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 42 est déposé par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 55 est présenté par M. Huriet et les membres du groupe de l'Union centriste.
L'amendement n° 66 est déposé par MM. Gournac, Braye, Gérard Larcher, Eckenspieller, Jourdain, Gouteyron, Vasselle et les membres du groupe du Rassemblement pour la République
Tous quatre tendent à supprimer cet article.
Par amendement n° 79, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - A la fin du premier alinéa du texte présenté par le I de l'article 19 pour l'article L. 521-1 du code de la sécurité sociale, de remplacer les mots : « du deuxième enfant à charge » par les mots : « du premier enfant à charge résidant en France » ;
II. - Pour compenser l'application du I ci-dessus, d'insérer après le I de l'article 19 un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Le coût de l'attribution dès le premier enfant des allocations familiales est compensé, à due concurrence, par un relèvement du taux de la cotisation prévu à l'article D. 242-7 du code de la sécurité sociale. »
Par amendement n° 97 rectifié, M. Vasselle propose, dans le troisième alinéa du texte présenté par le I de l'article 19 pour l'article L. 521-1 du code de la sécurité sociale, après les mots : « dispose d'un revenu professionnel », d'insérer les mots : « , lorsque le nombre d'enfants à charge est supérieur ou égal à trois et si un seul des membres du couple dispose d'un revenu professionnel ».
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 17.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Qu'il me soit tout d'abord permis de rappeler que nous avons déjà eu huit heures de discussion sur la famille, dont les quatre heures que nous avons passées ensemble la semaine dernière au cours d'un débat où nous nous sommes expliqués de façon...
M. François Autain. Courtoise !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. ... convaincante.
Par ailleurs, il est vingt-trois heures, et nous devons achever l'examen de ce texte cette nuit.
Voilà pourquoi je vais rappeler d'une façon un peu brutale, sans trop m'étendre, notre position sur ce point, sans toutefois que notre conviction en soit diminuée.
Je regrette que, malgré l'importance des discussions et la pertinence des arguments, nous n'ayons pas pu convaincre le Gouvernement et une partie de la majorité qui le soutient de la justesse de nos positions.
Nous vous proposons, par cet amendement, de supprimer l'article 19, qui prévoit le versement sous condition de ressources des allocations familiales.
C'est vrai que cette mesure sape les fondements de notre politique familiale, qu'elle est inacceptable pour plusieurs raisons. C'est vrai qu'elle n'a fait l'objet d'aucune concertation, comme beaucoup des orateurs qui m'ont précédé l'ont rappelé et comme le mouvement familial l'a clairement dénoncé. C'est vrai qu'elle intervient au moment même où le Gouvernement annonce - mais trop tard ! - le lancement d'une réflexion de fond sur la politique familiale alors qu'il s'apprête à prendre des dispositions...
M. Alain Gournac. Graves !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. ... lourdes.
Enfin, c'est vrai que cette mesure obéit à des considérations d'économies financières qui remettent en cause l'universalité des allocations familiales, principe fondateur de notre politique familiale.
Les allocations familiales sont un droit qui vise à compenser les charges liées à la présence d'enfants, elles symbolisent le soutien dont peut bénéficier chaque famille parce qu'elles assurent l'avenir de la collectivité nationale.
Nous ne sommes pas pour cette mesure parce qu'elle transforme la politique familiale en une simple politique redistributive. Or la redistribution est du domaine de la fiscalité, non du domaine de la protection sociale. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
Enfin, cette mesure ouvre la voie à l'instauration de conditions de ressources pour d'autres branches de la sécurité sociale, nous l'avons dit et redit. Je me répète, mais il vaut mieux se répéter que se contredire !
Cette mesure risque de conduire des parts croissantes de la population à se détourner d'une protection sociale dont elles ne percevraient plus les prestations mais dont elles seraient seulement les payeurs, en n'apercevant plus le bien-fondé d'une protection sociale qui est pourtant un lien fort qui unit les Français de toutes conditions.
C'est au nom de l'unité nationale que je vous demande de supprimer cet article. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 42.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Nous allons répondre à l'appel à l'union formulé par M. Charles Descours : notre amendement va dans le même sens.
M. François Autain. C'est la première fois !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Je ferai un simple rappel, madame le ministre. Vous avez cité Alain Juppé dans votre propos liminaire. Nous reconnaissons le déficit de la branche famille, mais la fiscalisation des allocations familiales qui a été envisagée par le gouvernement précédent nous paraissait nettement plus cohérente, notamment lorsqu'elle était liée à la réforme de l'impôt sur le revenu, qui tendait à en élargir l'assiette mais à en diminuer le taux.
Vous avez abandonné la réforme de l'impôt sur le revenu, vous avez abandonné la possibilité de la fiscalisation des allocations familiales et vous avez finalement retenu la plus mauvaise des solutions, celle de la mise sous condition de ressources.
Dans ces conditions, nous partageons pleinement les propos qui viennent d'être tenus, en proposant la suppression de cet article. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. Alain Gournac. Bonne suggestion !
M. le président. La parole est à M. Huriet, pour défendre l'amendement n° 55.
M. Claude Huriet. Cet amendement a le même objet que l'amendement précédent, et nous aurions développé les mêmes arguments que ceux qu'a développés M. le rapporteur.
M. Emmanuel Hamel. Brièveté remarquable !
M. le président. La parole est à M. Gournac, pour défendre l'amendement n° 66.
M. Alain Gournac. Je demande moi aussi la suppression de l'article 19.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Qui l'eût cru ?
M. Alain Gournac. Etant donné que, contrairement à ce qui a été avancé par le Gouvernement, cette mise sous condition de ressources des allocations familiales ne servira en rien à augmenter celles des familles les plus fragiles et qu'elle n'est donc pas une mesure de solidarité ;...
M. Claude Estier. Et le déficit ?
M. Alain Gournac. Pas sur le dos des familles !
... étant donné, par ailleurs, que mettre les allocations familiales sous condition de ressources, c'est remettre en cause le principe d'universalité de la sécurité sociale, ce qui est anticonstitutionnel, comme notre excellent collègue M. Jacques Larché l'a ici même démontré ; étant donné, enfin, que cette prestation a été conçue pour compenser en partie la charge entraînée par l'éducation d'un enfant et qu'elle est liée à celui-ci en tant que tel, sans considération de son origine sociale mais en tant qu'il contribue à l'avenir de la nation, il convient, mes chers collègues, de supprimer cet article.
J'ajoute que, sixième d'une famille de neuf enfants, j'ai été élevé dans le creuset de la famille. Dans ces conditions, ce soir, je trahirais la chance que m'a donnée ma famille si je votais l'article 19. Moi, j'aime la famille, et je la défends. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 79.
M. Guy Fischer. Cet amendement, qui vise à tenir compte de la réalité des situations familiales en attribuant les allocations familiales à partir du premier enfant à charge résidant en France, s'inscrit à l'encontre de la politique de la droite. (Exclamations sur les travées du RPR.)
Celle-ci, en mettant sous condition de ressources le versement de l'allocation « jeune enfant », a porté un coup dur à la politique familiale.
Notre amendement permettrait de participer à la compensation des charges et des contraintes spécifiques attachées au premier enfant.
Que les familles puissent avoir un enfant au moment où elles le souhaitent et ne soient pas obligées de reculer la naissance de celui-ci, voilà les objectifs de cet amendement.
Le recul de la première naissance est une des causes de l'écart entre le désir d'enfant, qui est de 2,5 enfants par famille, et le taux de naissance, qui se situe autour de 1,7. Notons au passage que le renouvellement des générations se situe à environ 2,1.
Mais d'autres facteurs expliquent aussi cet écart. Le chômage, la précarité, le manque de pouvoir d'achat, le manque de crèches collectives et familiales - surtout en Ile-de-France - et les horaires de travail trop chargés rendent difficile la conciliation de la vie familiale et professionnelle des couples.
L'attribution des allocations familiales dès le premier enfant, combinée à une politique d'emploi ambitieuse, de relance du pouvoir d'achat, de baisse du temps de travail et de création de crèches, contribuerait à créer les conditions pour que les couples aient le choix d'avoir autant d'enfants qu'ils le souhaitent.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Guy Fischer. Le Gouvernement a déjà fait quelques pas dans cette direction...
M. Jean Chérioux. De petits pas !
M. Guy Fischer. ... qui tranchent avec ce que la droite avait imposé au peuple, non sans mal d'ailleurs, comme en a témoigné le mouvement de novembre-décembre. Vous avez la mémoire courte !
M. Charles Ceccaldi-Raynaud. Pas du tout ! Et l'Union soviétique ?
M. François Autain. Laissez M. Fischer s'exprimer !
M. Guy Fischer. Oh ! vous ne me démonterez pas, monsieur Ceccaldi-Raynaud ! Vous pouvez dire ce que vous voulez, cela ne m'empêchera pas de dire ce que je veux.
M. Alain Gournac. Le principal, c'est que vous soyez avec nous !
M. Dominique Braye. Laissez parler M. Fischer ! Cela va lui être difficile d'expliquer pourquoi il vote comme nous, mais il a le droit de s'exprimer !
M. Guy Fischer. La mesure que nous proposons d'introduire avec cet amendement coûterait, au niveau actuel des allocations, 14 milliards de francs. Cette somme est à mettre en parallèle avec les déductions et exonérations dont bénéficie le grand patronat pour la cotisation familiale, qui représentent, selon les comptes de la sécurité sociale, 20 milliards de francs.
La disposition que nous proposons serait financée par une taxation des revenus financiers, y compris ceux des entreprises, à un taux de 14,6 %. Ce ne serait que justice, à notre sens, quand on sait que les profits sont en augmentation, que les dettes patronales à la sécurité sociale s'élèvent à plusieurs dizaines de milliards de francs, alors que le pouvoir d'achat des salariés stagne, voire régresse.
D'autres pistes peuvent être explorées, comme la réforme du quotient familial, que j'évoquais tout à l'heure, ou une modulation des cotisations patronales en fonction des créations d'emplois réelles.
Ainsi serait mis en place un système de financement pour la branche famille et les autres branches de la sécurité sociale qui assurerait la pérennité et le développement nécessaire de celles-ci.
C'est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen vous demande d'adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Vasselle, pour défendre l'amendement n° 97 rectifié.
M. Alain Vasselle. Cet amendement a pour objet unique d'appeler l'attention du Gouvernement, de notre commission et des membres de la Haute Assemblée sur les conséquences qui pourraient résulter des dispositions du troisième alinéa de l'article 19, dans l'hypothèse où ce dernier serait adopté par le Parlement après le passage du présent projet de loi devant les deux assemblées.
Sans doute ne devons-nous pas nous bercer de trop d'illusions... Quoi qu'il en soit, je ne doute pas que les représentants de la Haute Assemblée au sein de la commission mixte paritaire sauront faire preuve de conviction pour tenter de persuader nos collègues de l'Assemblée nationale de la justesse du dispositif que nous proposons tout en adhérant aux objectifs du Gouvernement en matière de déficit de la sécurité sociale.
Il est évident que je voterai l'amendement de la commission. Toutefois, si les dispositions de l'article 19 venaient à être malencontreusement adoptées, il s'ensuivrait une situation d'injustice préjudiciable aux familles nombreuses.
Le Gouvernement a l'intention de retenir comme plafond des ressources mensuelles de 25 000 francs. Les allocations familiales seraient donc placées sous condition de ressources, c'est-à-dire que seraient exclus du bénéfice des allocations familiales des ménages dont les ressources seraient supérieures à 25 000 francs par mois. Cependant, ce plafond serait majoré de 7 000 francs lorsque les deux membres du couple travaillent.
De la sorte, une famille dont la mère aura décidé d'emblée de ne pas exercer d'activité professionnelle pour se consacrer totalement à l'éducation de ses enfants se trouvera pénalisée au regard du même ménage à configuration identique et disposant des mêmes revenus mais dont les deux membres travaillent.
Cette remarque vaut même si une majoration intervient en fonction du nombre d'enfants :...
M. Jean Chérioux. C'est l'inverse !
M. Alain Vasselle. ... cette majoration jouera de la même manière, que les deux membres du couple travaillent ou qu'un seul des membres du couple travaille.
Aussi allons-nous pénaliser la mère de famille qui aura décidé de faire le choix dès le départ de se consacrer uniquement à l'éducation de ses enfants. Or cette mère de famille, en contribuant à l'éducation de ses enfants, en s'y consacrant complètement, fait oeuvre utile non seulement pour sa famille, mais également pour la nation tout entière.
M. Alain Gournac. Exactement !
M. Dominique Braye. Et pour la société !
M. Alain Vasselle. De plus, vous savez bien qu'en se consacrant à l'éducation de ses enfants elle laisse libre un emploi pour d'autres couples qui ont fait le choix de travailler et pour ceux qui sont demandeurs d'emploi.
Par conséquent, cette disposition serait particulièrement injuste si elle était adoptée en l'état.
M. Alain Gournac. Très injuste !
M. Alain Vasselle. C'est la raison pour laquelle je propose cet amendement de repli, dans l'hypothèse où l'amendement de la commission ne serait pas retenu.
Toutefois, je demande à la commission de défendre, lors de la commission mixte paritaire, la disposition que je propose afin qu'il n'existe pas un traitement différent entre les mères de famille qui ont fait le choix de travailler - nous ne contestons pas ce choix ! - et celles qui ont décidé de se consacrer entièrement à l'éducation de leurs enfants. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 79 et 97 rectifié ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je suis surpris que, dans l'amendement n° 79, il ne soit pas fait mention de la suppression de la mise sous condition de ressources des allocations familiales. Cela étant dit, je souhaite d'abord connaître l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
S'agissant de l'amendement n° 97 rectifié, M. Vasselle a raison sur le fond : le modèle familial qui a été choisi par le Gouvernement est effectivement celui où les deux conjoints travaillent. Il y a là non pas un problème de choix de la personne, mais bien un problème de société.
Cela étant, si l'amendement de la commission, comme je le souhaite, est adopté, cet amendement n'aura plus d'objet.
M. Alain Vasselle. J'en suis bien conscient !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 17, 42, 55, 66, 79 et 97 rectifié ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je ne veux pas rouvrir un débat que nous avons déjà eu plusieurs fois.
Personne ne sera étonné que je m'oppose aux amendements n°s 17, 42, 55 et 66, qui visent à supprimer le plafonnement des allocations familiales.
Monsieur Vasselle, lorsque je disais dans mon discours introductif que le PDG qui gagne 100 000 francs par mois n'est pas dans la même situation que le smicard, je ne faisais que citer des propos qu'Alain Juppé avait tenus en 1996. C'est donc à lui qu'il faut en attribuer la paternité ; je ne me permettrais pas de me les approprier.
C'est la raison pour laquelle il estimait qu'il y avait deux solutions pour les allocations familiales : ou bien mettre sous condition de ressources les prestations qui ne le sont pas - c'est ce que nous faisons aujourd'hui - ou bien corriger les inégalités par l'impôt en réintroduisant les allocations dans la base taxable.
Je constate donc qu'il y a aussi des majorités plurielles au sein d'un même parti d'opposition !
En ce qui concerne l'amendement n° 79, j'ai déjà dit, effectivement, que, lors du réexamen d'ensemble de la politique familiale, nous étudierons les conditions d'un versement des allocations dès le premier enfant.
A cet égard, il faut avoir en tête quelques chiffres : l'attribution des allocations familiales pour le premier enfant aurait un coût de 8 milliards de francs avec un plafond de ressources fixé à 12 500 francs nets par mois. Cela donne une idée des ressources qu'il faudrait dégager si nous souhaitions, avec un plafond de ressources - et peut être n'est-ce pas celui que j'ai cité qu'il faudrait retenir - accorder des allocations familiales à ceux qui en ont le plus besoin, car, là aussi, n'en déplaise à M. Vasselle, ce serait pour aider les familles les plus fragiles.
Lorsque nous réduisons le déficit de la branche famille, qui est aujourd'hui de 13 milliards de francs - ce déficit, ce n'est pas nous qui l'avons créé ! - c'est d'abord pour porter, dès cette année, de dix-huit à dix-neuf ans l'âge qui ouvre droit à allocations familiales, y compris lorsque les enfants ne sont pas scolarisés, quand ils sont sans travail, mais aussi sans doute pour pouvoir retrouver une situation meilleure dès l'année prochaine et mettre en place une réforme de la branche famille qui accroisse encore la solidarité.
En ce qui concerne l'amendement n° 97 rectifié, il faut, là aussi, faire preuve de cohérence. Il y a quelques jours, lors du débat sur la famille, M. Vasselle prétendait que le Gouvernement avait choisi de renvoyer les femmes à la maison ; aujourd'hui, il nous dit que le Gouvernement a choisi les familles dont les deux parents travaillent.
En fait, nous n'avons rien choisi, nous avons simplement tenu compte de la réalité : lorsque les deux parents travaillent, nous revalorisons de 7 000 francs le plafond de ressources qui donne droit aux allocations familiales.
Je rappelle qu'aujourd'hui, pour des familles avec quatre enfants dont un seul des parents travaille, ce plafond est de 35 000 francs nets par mois, et qu'il est de 40 000 francs lorsqu'il y a cinq enfants à charge.
En conséquence, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 97 rectifié.
M. Alain Vasselle. Et quand les deux parents travaillent, le plafond est à combien ?
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, nous voici arrivés à un point très important du débat que nous poursuivons depuis plusieurs semaines avec le Gouvernement sur ce problème du plafonnement des allocations familiales.
J'ai eu l'occasion de m'exprimer longuement à ce sujet. J'ai indiqué que c'était la mesure la plus grave des cinq mesures concernant la famille que le Gouvernement actuel nous propose.
M. Alain Gournac. Très grave !
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je pensais qu'il y en avait quatre ; j'en ai découvert une cinquième en examinant le projet de loi de financement de la sécurité sociale, à savoir l'inclusion dans l'assiette de la CSG de la majoration de retraite pour les familles ayant eu plus de trois enfants.
M. Alain Gournac. Vive la famille !
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Il y a donc cinq mesures, et c'est, à l'évidence, madame le ministre, l'accumulation de ces mesures concernant toujours les mêmes familles qui crée le grand malaise que tout le monde ressent et qui a fait tant de remous.
On ne peut pas dire que c'est un problème d'opposition droite-gauche ; c'est un démantèlement de la politique familiale, et ce démantèlement, à nos yeux, est très grave.
Madame le ministre, vous avez déclaré à plusieurs reprises - je vous en donne acte - que vous étiez prête à reconsidérer l'ensemble de la situation par une large concertation - elle aurait dû avoir lieu, mais cela n'a pas été possible - avec les associations familiales et les partenaires sociaux.
Pour la commission des affaires sociales, c'est une bien mauvaise méthode que de commencer par supprimer les allocations familiales à 350 000 familles pour, ensuite, discuter et envisager de les rétablir moyennant telle ou telle compensation fiscale.
La méthode proposée par la commission des affaires sociales, qui consiste à majorer très légèrement le taux de la CSG versée à la caisse d'allocations familiales pour éviter cette suppression et permettre d'entamer, en toute tranquillité, la discussion avec l'ensemble des partenaires, est bien meilleure que celle qui consiste à supprimer d'abord et à discuter ensuite.
M. Alain Gournac. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Comme nous nous fondons, en l'espèce, sur l'avis quasi unanime du conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales, nous estimons que la suppression de l'article 19 marque le tournant de la discussion de ce projet de loi, et c'est pour bien marquer la solennité de la position du Sénat qu'au nom de la commission je demande un scrutin public sur les amendements de suppression de l'article 19. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. D'un mot, je veux préciser à M. le président Fourcade que les majorations de retraite de 10 % pour les familles ayant trois enfants et plus ont toujours été incluses dans l'assiette de la CSG ; de ce point de vue, il n'y a donc pas d'innovation cette année.
M. Alain Gournac. On n'est plus au détail près !
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 17, 42, 55 et 66.
Mme Dinah Derycke. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Je ne veux pas, moi non plus, revenir sur un débat qui nous a effectivement occupés de longues heures depuis la semaine dernière, au risque de tenir des propos redondants et de répéter ce que j'ai eu l'occasion par deux fois d'exprimer à la tribune et qu'a rappelé excellemment, tout à l'heure, mon collègue Gilbert Chabroux.
Je dirai simplement, en prélude à ce vote, dont on sait, bien entendu, ce qu'il sera, que j'ai tout de même été choquée d'entendre, tout au long de ce débat, que l'enfant, c'était un coût, c'était une charge, c'était un investissement, c'était un devoir, qui ouvrirait donc des droits.
M. Jean Chérioux. C'est un sacrifice, un sacrifice consenti !
Mme Dinah Derycke. Non, ce n'est pas un sacrifice consenti. Un enfant, c'est la chose la plus heureuse qui puisse arriver au monde. Ce n'est jamais un sacrifice, et si l'on veut y voir un investissement, c'est simplement parce que, quand on a un enfant, on a la chance de pouvoir se dire que, lorsqu'on vieillira, on aura, pour être épaulé, pour être aidé dans la vie, celui que l'on aura accompagné quand il était tout petit. (Exclamations sur les travées du RPR.)
C'est ainsi que, pour ma part, je considère l'enfant et je suis sûre que la plupart des femmes et des hommes de ce pays, la plupart des familles considèrent également qu'un enfant, c'est cela, c'est une chance dans la vie, c'est le plus grand bonheur qu'elle puisse nous apporter. Un enfant, c'est un cadeau !
M. Jean Chérioux. Vous ne nous apprenez rien !
Mme Dinah Derycke. On a parlé de la reconnaissance de la collectivité et du retour contributif, en nous citant la Constitution. La Constitution dit que chaque enfant a des droits et, à cet égard, je rappellerai sommairement ce que j'ai dit hier : si chaque enfant a des droits, si donc le principe d'universalité s'applique, que faites-vous des 3 300 000 enfants qui sont enfants uniques, parfois le temps que la fratrie se constitue ? Vous n'en parlez jamais !
Je rappelle également que le plafonnement existe par le bas avec les minima sociaux. Je l'ai dit à cette tribune, mais je vois que je n'ai guère été entendue.
Je comprends que l'on puisse défendre un principe quand on y croit sincèrement, mais je constate que les accusations selon lesquelles le Gouvernement assassinait la famille ont créé une polémique qui a empêché un véritable débat. Ce débat, j'espère qu'il aura lieu plus sereinement dans quelque temps.
Il y a non pas une famille mais une diversité de familles, chacune ayant son histoire, ses conditions de vie, sa propre réalité. Ne créez pas une famille mythique, idéalisée, idéale. Regardez la réalité ! Voyez la multiplicité des familles qui nous entourent ! Elles ont des aspirations, des modes de vie différents ; elles peuvent également avoir des cultures différentes. C'est tout cela qu'il faut prendre en considération.
M. Dominique Braye. C'est Evelyne Sullerot qui dit que l'on assassine la famille, ce n'est pas nous !
Mme Dinah Derycke. Mais vous l'avez répété !
M. Alain Vasselle. C'est une femme de gauche !
Mme Dinah Derycke. Vous avez dit qu'un enfant était une charge qu'il fallait compenser. Si vous pensez que 671 francs d'allocations familiales compensent le fait d'avoir des enfants, vous êtes loin de la réalité, vous ne savez pas ce que vivent les familles !
M. Dominique Braye. Elles ne sont certainement pas à cela près, mais cela les aide !
Mme Dinah Derycke. Cela aide surtout les familles qui n'ont pas de revenu ou un revenu très bas, ou encore le RMI. Pour celles-là, je le concède, c'est indispensable, c'est une question de survie. C'est la somme qui permet simplement de donner à manger aux enfants à midi.
Venez dans le Nord, venez à Roubaix, vous verrez des familles où les enfants ne mangent que des pâtes et des pommes de terre,...
M. Dominique Braye. Je connais cela dans ma région aussi !
Mme Dinah Derycke. ... où la viande ne figure pas au menu. Ça, c'est la réalité !
Vous prétendez que vous étiez prêts à revoir la redistribution par la fiscalité, le quotient familial, etc. Mme la ministre l'a bien dit, il n'y aura pas de tabou mais cessons de croire qu'il est si facile de toucher à la fiscalité, de toucher au quotient familial. Vous le savez, c'est un mécanisme d'une grande complexité, qui nécessitera des aménagements, car, qui dit économie, c'est-à-dire gain sur le quotient familial, devra dire également comment on affecte ce gain à la sécurité sociale, aux allocations familiales.
On ne peut donc pas déclarer qu'il suffit de toucher à la fiscalité, comme si, par un coup de baguette magique, cela pouvait se faire en quelques instants.
M. Jean Chérioux. Cela n'a pas posé de problème pour les veuves !
Mme Dinah Derycke. Pour toutes ces raisons, nous voterons le plafonnement,...
M. Alain Gournac. Pas nous !
Mme Dinah Derycke. ... qui sera transitoire, en attendant une réforme en profondeur de la politique familiale qui prendra en compte tous les aspects de ce qui fait aujourd'hui la réalité de la vie de l'immense majorité des familles. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Alain Gournac. Vive la famille ! Défendons-la !
Mme Nicole Borvo. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Nous n'allons pas rouvrir, en cet instant, le large débat que nous avons eu sur la politique familiale. J'ai eu l'occasion d'exprimer mon point de vue, en précisant qu'il se différenciait de celui de la majorité sénatoriale. (Exclamations amusées sur les travées du RPR.)
Les débats à l'Assemblée nationale et, en particulier, les interventions du groupe communiste ont contribué à l'adoption d'un amendement qui confère un caractère transitoire à la mise sous condition de ressources des allocations familiales.
Nous aurions souhaité qu'il soit également précisé qu'elle ne s'applique qu'à la loi de financement de 1998.
En effet, il nous semble urgent qu'à défaut de surseoir à cette mesure on la limite dans le temps de façon précise, car il n'est pas souhaitable que la confusion entre politique familiale et politique sociale s'installe définitivement dans les esprits.
M. Jean Chérioux. Très bien !
Mme Nicole Borvo. La politique familiale en France combine deux aspects.
Il s'agit d'abord d'offrir à tous les enfants un niveau de vie minimal à l'aide de l'école et des allocations familiales, et je rappellerai tout de même que celles-ci sont rattachées à l'enfant, selon la convention internationale des droits de l'enfant ; il s'agit ensuite de compléter ce niveau de vie minimal par des allocations sous conditions de ressources. La crise a eu pour conséquence de renforcer ce second aspect.
Mettre sous condition de ressources les allocations familiales, c'est, à notre avis, conforter une logique d'assistanat et ne pas contribuer à la lutte contre les causes de la crise dans notre pays.
Il est évident que cette politique familiale au sens large doit s'imbriquer dans une politique de progrès et de justice sociale, qui suppose une taxation des revenus financiers et d'autres mesures que le groupe communiste républicain et citoyen a exposé dans le débat sur la politique familiale - je n'y reviens pas. Cette politique va à l'opposé de celle à laquelle la droite nous a habituées.
Messieurs de la majorité sénatoriale, sans doute aimez-vous la famille, mais bien portante...
M. François Autain. Et riche !
Mme Nicole Borvo. ... et riche, puisque vous proposez de diminuer les dépenses de santé.
M. Dominique Braye. Il ne faut pas déséquilibrer la branche maladie !
Mme Nicole Borvo. En vue d'une véritable remise à plat de la politique familiale à laquelle notre groupe participera de manière constructive, aujourd'hui, ce dernier ne participera pas au vote sur les amendements de la droite.
M. Alain Gournac. Vive la famille !
M. Emmanuel Hamel. C'est un progrès important !
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je ne serais pas intervenu si Mme Derycke n'avait pas tenu les propos qui sont les siens voilà quelques instants.
La minorité du Sénat veut faire en sorte que ce débat soit d'une grande stérilité.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Pour la famille, c'est un peu embêtant !
M. Alain Vasselle. Les positions sont figées.
Malgré les avancées tout à fait importantes qui ont été faites, de manière très constructive par le président de la commission des affaires sociales, M. Fourcade, et par M. Charles Descours, rapporteur, qui a effectué un travail considérable au sein de cette commission pour apporter des solutions de nature à atteindre les objectifs que s'est fixés le Gouvernement en matière de maîtrise du déficit de la branche famille tout en respectant des principes fondamentaux qui ont toujours été ceux de la France à l'égard de la famille, le débat reste stérile et les positions hermétiques tant de la part du Gouvernement que de la majorité qui le soutient.
Madame le ministre, lorsque vous caricaturez les propos qui ont été tenus par les membres de l'opposition nationale au Sénat, et particulièrement ceux des membres du groupe auquel j'appartiens, cela me fait mal ! Cela fera mal également à nombre de mères de famille ou de couples qui reliront les débats de la Haute Assemblée.
M. Alain Gournac. On les leur fera lire !
M. Alain Vasselle. Je suis père d'une famille de six enfants ; mes six enfants sont le fruit de l'amour que j'éprouve pour mon épouse. Ce que je souhaite, c'est leur donner une éducation et leur offrir un niveau de vie qui soient dignes d'une société moderne, pour leur assurer demain une place totale et entière dans cette nation que nous devons construire ensemble.
Ce débat consiste à faire glisser une politique familiale à laquelle la France a été toujours attachée vers une politique de solidarité.
Vous savez pourtant, madame Derycke, que tous les gouvernements qui se sont succédé ont bien pris conscience, au-delà de ce qu'apportaient les allocations familiales aux familles, quel que soit leur niveau de revenus, de la situation des familles les plus défavorisées, comme celles de ces familles du département du Nord que vous évoquiez.
Ainsi, tout un arsenal de dispositions vient compléter le dispositif d'allocations familiales. Ces importantes dispositions vont bien au-delà de ces 671 francs ; elles permettent à certains de doubler, voire de tripler les revenus qu'ils perçoivent, soit à travers le RMI, soit à travers le SMIC.
Je connais, dans ma commune, une mère de famille seule avec cinq enfants qui ne bénéficie que du RMI, c'est-à-dire des quelque 2 000 francs, auxquels s'ajoute le complément apporté pour ses enfants. Avec le produit des allocations familiales et l'allocation pour parent isolé, elle parvient à avoir un revenu qui dépasse les 10 000 francs ou 12 000 francs par mois.
Ainsi, grâce à l'arsenal des dispositifs de la solidarité, nous pouvons assurer à cette mère de famille, qui est dans une situation difficile, un niveau de revenus qui, non seulement compense la charge que représente l'éducation de ses enfants, mais qui va bien au-delà, pour tenir compte de la situation difficile dans laquelle elle se trouve.
Aux autres familles, les allocations familiales n'apportent qu'une compensation partielle qui représente 30 % à 50 % de ce que coûte l'éducation d'un enfant, sans bénéficier d'aucune mesure de solidarité.
Quand on a compris cela, on a compris que la politique qui a été celle de la France depuis des décennies était une politique équilibrée qui ne souffrait d'aucune difficulté. Si l'on fait le constat qu'il faut attribuer une aide plus importante aux familles, prenons des mesures de solidarité supplémentaires, mais ne remettons pas en cause ce droit universel qui a été créé pour la famille. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 17, 42, 55 et 66, repoussés par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 13:

Nombre de votants 302
Nombre de suffrages exprimés 301
Majorité absolue des suffrages 151
Pour l'adoption 221
Contre 80

M. Emmanuel Hamel. Vive la famille !
M. le président. En conséquence, l'article 19 est supprimé et les amendements n°s 79 et 97 rectifié n'ont plus d'objet.

Article 20



M. le président.
« Art. 20. - I. - L'article L. 842-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« l° Le I est ainsi rédigé :
« I. - Le montant de l'allocation est égal à une fraction, fixée par décret, du montant des cotisations patronales et salariales d'origine légale ou conventionnelle imposées par la loi et de la participation au développement de la formation professionnelle continue, dues pour l'emploi mentionné au premier alinéa de l'article L. 842-1, dans la limite d'un plafond fixé par décret. » ;
« 2° a) Il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. - Le montant de la fraction et du plafond visés au I sont majorés, dans des conditions fixées par décret, pour le ménage ou la personne dont les ressources sont inférieures à un plafond fixé par décret, lorsque l'allocation de garde d'enfant à domicile est due au titre d'un enfant dont l'âge est inférieur à un âge déterminé. » ;
« b) Le II devient le III ;
« 3° Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. - Les plafonds mentionnés aux I, II et III sont revalorisés conformément à l'évolution des prix à la consommation hors tabac, dans des conditions prévues par décret. »
« II. - Les dispositions du I entrent en vigueur à compter du 1er janvier 1998, pour les périodes d'emploi postérieures à cette date. »
Sur l'article, la parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous abordons maintenant l'article 20 relatif à l'AGED, l'allocation de garde d'enfant à domicile.
Pour que le débat soit clair, il faut rappeler quelques chiffres.
La France compte 4,4 millions d'enfants de moins de six ans dont 2,2 millions de moins de trois ans.
La moitié sont gardés à la maison par l'un des deux parents, 480 000 fréquentent les équipements d'accueil collectifs, 400 000 sont gardés par une assistante maternelle, 250 000 âgés de deux à trois ans sont à l'école maternelle et 90 000 sont gardés à domicile grâce à l'AGED.
Cette diversité du mode de garde, qui est tout à fait exceptionnelle, mérite d'être encouragée et développée.
Cependant, il faut tout de même constater que l'AGED profite à 66 000 familles et que ce mode de garde est le plus lourd financièrement pour la collectivité, le plus aidé, alors qu'il n'est accessible qu'à un petit nombre de familles.
La Cour des comptes vient de le montrer du doigt dans son rapport. C'est un avantage considéré comme trop coûteux et réservé à certaines familles. L'aide apportée s'élève, pour un temps plein d'emploi à domicile, à 80 00 francs par an.
Si la diversité du mode de garde, je le répète, doit être confortée, ce type de garde que concerne l'AGED n'est certainement pas à supprimer, car il répond à un besoin d'une certaine couche de population. La proposition qui nous est faite consiste simplement à le ramener à une plus juste proportion du taux dans la prise en charge et à se rapprocher du niveau des aides apportées pour les autres dispositifs existants.
Il faut rappeler que le coût pour la collectivité, aujourd'hui, d'une garde à domicile est de 80 000 francs par an - j'y insiste - alors qu'il est de 54 000 francs au maximum pour une place en crèche collective, de 41 500 francs pour les crèches familiales et de 31 000 francs pour une assistante maternelle agréée.
La proposition du Gouvernement de réduire l'aide à un taux compris entre 40 % à 60 % au lieu de 100 % pour la garde à domicile ramènerait le coût à un peu moins de 50 000 francs. Voilà qui est un juste milieu par rapport aux autres prestations offertes pour la garde des enfants. Et même après cette réforme, le taux d'aide reste sans équivalent dans aucun autre pays dans le monde.
L'AGED a pour vocation essentielle de concilier la vie professionnelle et la vie familiale des femmes - il ne faudrait d'ailleurs pas oublier les hommes ! - ce qui semble vrai pour un certain nombre de femmes, c'est évident. Mais qu'en est-il pour l'employée de maison ? Comment font toutes ces femmes qui ne gagnent que le SMIC, comment font la majorité de ces mères de famille qui perçoivent un salaire modeste et dont nombre d'entre elles sont contraintes à des horaires discontinus ?
Avoir un employé à domicile est un choix individuel et rien ne justifie que notre collectivité fasse davantage pour ce type de garde par rapport à d'autres, collectifs.
Il y a peu de lien entre l'aide apportée à la famille et la décision d'avoir un enfant. Pour que les familles puissent avoir des enfants, il n'y a pas mieux que la lutte contre le chômage et pour l'emploi des jeunes.
Quand on parle de classe moyenne, comme cela a été fait encore ce soir, on ne vise pas un couple dont les deux membres perçoivent un salaire de 12 000 francs chacun ; il faut savoir à quoi cela se rapporte : le revenu moyen d'une famille en France est de 13 700 francs par mois. Le salaire moyen est de 11 000 francs.
Les familles sont aujourd'hui fragilisées par la crise économique et sociale. Elles craignent l'échec scolaire, le chômage, la pauvreté. Il faut leur offrir davantage de sécurité pour qu'elles retrouvent leur capacité à exercer leurs responsabilités dans l'éducation des adultes de demain.
Comme le disait le Premier ministre, M. Lionel Jospin, faire attention aux familles, c'est faire attention à toutes les familles et non pas seulement aux plus privilégiées. Le souhait primordial des familles dans leur ensemble, c'est de disposer de plus de pouvoir d'achat, de meilleures conditions de logement et d'assurer d'abord l'avenir de leurs enfants.
Certains, ici ou là, ont dit, ou vont dire, que les mesures liées à l'AGED ou aux allocations familiales rompent l'égalité entre enfants. L'inégalité n'est-elle pas d'abord entre les foyers riches et les foyers pauvres ?
Il faut le constater sans esprit de polémique, certains défenseurs de la famille qui se sont exprimés sur les bancs de la droite lors du débat qui a eu lieu il y a quelques jours, dans cette enceinte, se sont particulièrement préoccupés des familles appartenant à la catégorie des plus aisées, celles dont le revenu est supérieur à 300 000 francs, alors qu'ils s'étaient peu préoccupés, ces dernières années, du sort de celles qui ont un revenu deux ou trois fois plus faible.
La diminution de l'allocation de garde d'enfant à domicile est-elle une atteinte insoutenable au droit des familles ? Est-il normal que les personnes qui ont les ressources les plus élevées soient les plus aidées ? Est-il normal que les personnes qui ont les ressources les plus faibles bénéficient d'une aide publique inférieure et soient contraintes de payer un prix élevé pour la garde de leurs enfants ?
Il faut aller vers plus d'équité ; il ne faut pas avoir peur de ce mot. La proposition du Gouvernement relative à l'AGED va dans ce sens. Là encore, le groupe socialiste apprécie le courage dont fait preuve le gouvernement qu'il soutient. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Sur l'article 20, je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les quatre premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 18 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 43 est déposé par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 56 est présenté par M. Huriet et les membres du groupe de l'Union centriste.
L'amendement n° 67 est déposé par MM. Braye, Gournac, Gérard Larcher, Eckenspieller, Jourdain et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
Tous quatre tendent à supprimer cet article.
Par amendement n° 80, M. Fisher, Mme Borvo et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit l'article 20 :
« L'article L. 842-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 842-2. - I. - Le montant de l'allocation est égal à une fraction dégressive des cotisations patronales et salariales d'origine légale ou conventionnelle imposée par la loi, dues pour l'emploi mentionné au premier alinéa de l'article L. 842-1 et calculées sur le salaire dans la limite d'un montant maximal fixé par décret.
« II. - Le montant de l'allocation est réduit dans les conditions fixées par décret, lorsque :
« 1° L'allocation de garde d'enfant à domicile est cumulée avec l'allocation parentale d'éducation à taux partiel ;
« 2° L'allocation de garde d'enfant à domicile est due au titre d'un enfant dont l'âge est supérieur à celui qui est fixé en application du premier alinéa de l'article L. 842-1 mais inférieur à un âge déterminé. »
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 18.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Monsieur le président, comme tout à l'heure à l'article 19, compte tenu des débats qui ont eu lieu, la semaine dernière et hier, sur la politique que, dans notre très grande majorité, nous voulons pour la famille, je serai très bref, ce qui n'enlèvera rien à ma force de conviction.
Nous vous proposons donc, mes chers collègues, de supprimer l'article 20, qui tend à réduire le taux de prise en charge des cotisations sociales par l'allocation de garde d'enfant à domicile.
L'AGED ouvre droit, dans la limite d'un montant maximal, à la prise en charge des cotisations patronales et salariales dues pour l'emploi d'une personne assurant la garde d'au moins un enfant au domicile de ses parents lorsque ceux-ci travaillent.
Cette allocation est particulièrement utile pour de nombreuses femmes qui travaillent, notamment pour les cadres, à qui elle permet de mieux concilier vie professionnelle et vie familiale.
Par ailleurs, cette allocation supplée au manque de places en crèches, qui est particulièrement flagrant dans certaines agglomérations.
Elle offre également une alternative appréciable aux femmes pour qui les horaires des crèches sont inadaptés, ces dernières fermant trop tôt.
En diminuant de moitié le taux de la prise en charge par l'AGED, le Gouvernement va détruire une partie des emplois créés et favoriser le développement du travail au noir. La diminution de l'AGED se traduira in fine par une baisse des rentrées des cotisations sociales, ce qui ira contre le but que le Gouvernement cherche à atteindre.
En outre, il paraît inopportun de procéder de manière si précipitée, sans aucune concertation, à une révision de ce dispositif, alors que le Gouvernement annone parallèlement un réexamen d'ensemble de la politique de la famille.
Le dispositif transitoire voté par l'Assemblée nationale et aménageant la réduction du taux introduit en outre une condition de ressources inacceptable.
Le Gouvernement dit : nous supprimons, et après nous discuterons. Nous, nous aurions aimé dire : nous discutons, et après nous verrons.
M. Jean Chérioux. C'est une prise d'otages !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 43.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Je serai très bref, car nous partageons les mêmes convictions et faisons la même analyse.
L'augmentation des dépenses liées à l'octroi de l'AGED montre que cette allocation répond à un besoin spécifique,...
M. Jean Chérioux. Exactement !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. ... et le pas en arrière que nous faisons avec cet article nuira à une catégorie de femmes, à ces femmes actives qui avaient particulièrement besoin de cette allocation.
C'est la raison pour laquelle nous soutenons totalement la démarche de la commission des affaires sociales.
M. le président. La parole est à M. Huriet, pour déffendre l'amendement n° 56.
M. Claude Huriet. Cet amendement est identique aux deux précédents. Je me bornerai donc à dire que je soutiens les arguments qui viennent d'être développés par les deux rapporteurs.
M. le président. La parole est à M. Braye, pour défendre l'amendement n° 67.
M. Dominique Braye. Cette diminution brutale de l'AGED, à laquelle va s'ajouter la réduction du crédit d'impôt pour ces emplois, aura des conséquences très négatives sur l'emploi et sur les conditions de vie des familles.
En effet, nous savons tous qu'avant l'instauration de ces deux mesures la plupart des jeunes ménages qui utilisent les services d'une garde d'enfant à domicile n'auraient jamais imaginé pouvoir un jour devenir des employeurs. C'est donc bien à la suppression de milliers d'emplois familiaux que nous allons assister, emplois qui concernent, dans l'immense majorité des cas, des jeunes femmes sans qualification et n'ayant jamais auparavant eu accès au marché du travail.
La garde d'enfant à domicile représente à mes yeux l'exemple type de l'emploi de proximité ayant une grande utilité sociale et constituant l'une des solutions d'avenir au problème du chômage des personnes non qualifiées.
Ces travailleurs, nous le savons bien, auront le choix, demain, entre chômage et travail au noir, comme viennent de le rappeler mes collègues. Cela signifie moins de recettes pour les caisses de sécurité sociale, ce qui, convenez-en, est un comble quand on sait que ce projet de loi a un objectif prétendument inverse.
Nous assisterons donc à une fragilisation des emplois que l'AGED et le crédit d'impôt avaient contribué à pérenniser, à stabiliser et, j'ose le dire, à moraliser.
Cette diminution de l'AGED est d'autant moins justifiable qu'elle ne s'accompagne d'aucune augmentation significative du nombre des places de crèche, pour laquelle l'AGED constituait une solution de rechange. Il n'existe aujourd'hui, je vous le rappelle, que 195 000 lits de crèche, alors que la CNAF estime qu'il en faudrait trois fois plus.
En rognant l'AGED et l'aide fiscale, c'est en fait aux familles et aux femmes qui travaillent que s'attaque le Gouvernement. En effet, comme l'ont rappelé tous mes collègues ici présents, ces aides sont le moyen, pour de nombreuses femmes, de concilier vie professionnelle et vie familiale sans que les enfants en pâtissent trop. Les supprimer, c'est obliger toutes les femmes, quel que soit leur niveau de qualification, soit à choisir entre travail et enfants, soit à travailler sans éduquer convenablement ceux-ci.
L'AGED est un bon système : il est bon pour les enfants, bon pour les parents et bon pour l'emploi. J'estime qu'il a fait toutes ses preuves en vue de faciliter la vie des enfants et des parents, tout en assainissant un gisement d'emplois prometteur. Il doit donc être sauvegardé et même amélioré.
C'est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de voter la suppression de l'article 20. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 80.
Mme Nicole Borvo. Bien évidemment, chaque famille ayant à charge un enfant qui n'est pas encore scolarisé doit pouvoir choisir le mode de garde qui lui convient. Il nous importe simplement de rétablir une certaine égalité entre les aides octroyées aux familles, et l'on peut dire que l'AGED est vraiment exorbitante.
Notre groupe est en même temps tout à fait conscient du fait que, pour les couples avec enfants vivant dans les grandes villes, les équipements collectifs de garde peuvent être insuffisants ou inadaptés aux besoins de chacun. Je note au passage que développer ces infrastructures permettrait de créer des emplois.
Pour palier la carence en infrastructures ou l'inadaptation des horaires des crèches aux contraintes de travail des parents, un certain nombre de familles optent pour la garde à domicile et bénéficient de l'AGED.
Réservée aux couples biactifs pour la garde de leurs enfants de moins de six ans, cette aide se traduit par la prise en charge totale par l'Etat des cotisations sociales dues par l'employeur. En outre, le ménage bénéficie d'une réduction fiscale.
Le coût de ce mode de garde est, de fait, très élevé pour la collectivité, la caisse d'allocations familiales payant, par trimestre, jusqu'à 12 836 francs pour un enfant de moins de trois ans et 6 418 francs pour un enfant de trois à six ans.
En France, le système d'aide aux familles se révèle ainsi plus favorable pour les personnes bénéficiant de revenus très élevés.
A l'instar de la Cour des comptes qui, dans son rapport, pointe du doigt l'AGED qui est qualifiée d'avantage trop coûteux et réservé à certains, en l'occurrence les ménages aisés,...
M. Jean Chérioux. Elle sort de son rôle !
Mme Nicole Borvo. ... nous pensons qu'il importe de mettre fin au paradoxe actuel.
Notre amendement prend en compte la réalité - des familles sont effectivement obligées de recourir à la garde à domicile - mais il tend à réduire les avantages disproportionnés qu'elle procure.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 80 ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 18, 43, 56, 67 et 80 ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 18, 43, 56 et 67, repoussés par le Gouvernement.

(Ces amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 20 est supprimé, et l'amendement n° 80 n'a plus d'objet.
Nous en revenons à l'examen de l'amendement n° 15, tendant à insérer un article additionnel après l'article 14, et de l'article 15, qui ont été précédemment réservés.

Article additionnel après l'article 14
(précédemment réservé)



M. le président.
Par amendement n° 15, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 14, un article additionnel ainsi rédigé :
« A titre exceptionnel et pour les contributions dues au titre de l'année 1998, le taux mentionné au I de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale et le taux de 1,1 % mentionné au III de ce même article, sont majorés de 0,1 point. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. En conséquence des amendements portant sur les articles 19 et 20 que nous venons de voter, pour ne pas remettre en cause, même pour un an, les principes fondateurs de la sécurité sociale, afin aussi de ne pas aggraver les déficits, nous proposons de majorer pour un an le taux de la CSG versée à la branche famille de 0,1 point. (Exclamations sur les travées socialistes.)
Je rappelle qu'il s'agit d'une mesure exceptionnelle, limitée à l'année 1998, dans l'attente d'une réflexion d'ensemble sur la politique familiale que le Gouvernement nous a promise, à plusieurs reprises, depuis quelques semaines.
J'ajoute qu'il convient de préserver l'équilibre des branches. De ce fait, s'agissant du financement de la branche famille, nous n'avions pas d'autre solution que d'augmenter le taux de la CSG.
Je me félicite d'ailleurs que la commission des finances ait intégré le produit de cette augmentation dans son propre tableau d'équilibre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14.

Article 15
(précédemment réservé)



M. le président.
« Art. 15. _ Pour 1998, les prévisions de recettes, par catégorie, de l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour concourir à leur financement sont fixées aux montants suivants :

(en milliards de francs)
« Cotisations effectives 1 034,1
« Cotisations fictives 186,9
« Contributions publiques 62,0
« Impôts et taxes affectés 403,0
« Transferts reçus 4,6
« Revenus des capitaux 1,3
« Autres ressources 31,1


« Total des recettes 1 723,0. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 104, présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, tend à rédiger comme suit le tableau figurant à cet article :

(en milliards de francs)

« Cotisations effectives 1 188,6
« Cotisations fictives 186,9
« Contributions publiques 62,0
« Impôts et taxes affectés 246,9
« Transferts reçus 4,6
« Revenus des capitaux 1,3
« Autres ressources 31,1

« Total des recettes 1 721,4. »
L'amendement n° 41, déposé par M. Oudin, au nom de la commission des finances, vise, dans la première ligne du tableau de l'article 15, à remplacer le montant : « 1 034,1 » par le montant : « 1 032,7 ».
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 104.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Il s'agit d'un amendement de coordination, qui tire la conséquence des votes intervenus sur les recettes.
Il s'agit de coordinations arithmétiques résultant de l'adoption des amendements n°s 4, 6, 7, 8 9, 10, 11, 12, 13 et 15 de la commission des affaires sociales, ainsi que de l'adoption des amendements n°s 63, 102 rectifié et n° 61.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement n° 104 ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Avis défavorable, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 41.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Cet amendement est en cohérence avec notre amendement de suppression de l'article 9, qui validait des décisions règlementaires de fixation des cotisations en matière d'accidents du travail.
Les comptes de la branche des accidents du travail doivent être équilibrés. Or, nous avons constaté, en 1997, un suréquilibre parce que les cotisations étaient trop élevées.
On constate le même phénomène pour 1998, puisque cette branche serait excédentaire de 1,4 milliard de francs.
Cet amendement vise donc à rétablir l'équilibre de cette branche, c'est-à-dire à diminuer le montant prévisionnel des cotisations sociales de 1,4 milliard de francs, faute de quoi les entreprises supporteront une charge indue, et la présentation des comptes de cette branche ne sera pas conforme au principe posé par le code de la sécurité sociale, qui prévoit l'équilibre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 41 ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Comme l'a montré M. le rapporteur pour avis, cet amendement est fondé.
En effet, les comptes de la branche accidents du travail sont excédentaires de 1,4 milliard de francs - nous en avons parlé longuement tout à l'heure - alors qu'ils devraient être en équilibre. Mais, si nous acceptions cet amendement, nous aggraverions le déficit de la sécurité sociale de 1,4 milliard de francs alors que nous nous sommes fixé comme objectif de limiter ce déficit à 12 milliards de francs.
Je suis donc obligé de me déclarer défavorable à cet amendement, bien que j'en comprenne la logique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est contre cet amendement dont il ne comprend pas la logique.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 104, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 41 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 15, modifié.

(L'article 15 est adopté.)
M. le président. Nous en revenons aux amendements visant à introduire des articles additionnels après l'article 20.

Articles additionnels après l'article 20



M. le président.
Par amendement n° 59, MM. Franchis, Bimbenet et Seillier proposent d'insérer, après l'article 20, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le début de l'article L. 351-4 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 351-4. - Les femmes et les hommes assurés ayant élevé... (le reste sans changement). »
« II. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée par le relèvement à due concurrence de la contribution sur les jeux exploités par la Française des jeux visée à l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. Franchis.
M. Serge Franchis. Cet amendement a pour objet d'accorder les mêmes droits aux veufs ayant élevé seuls leurs enfants qu'aux veuves. Le traitement entre les femmes et les hommes est à cet égard inéquitable.
En effet, la situation dans laquelle se trouvent placés des pères ayant élevé seuls leurs enfants n'est fréquemment pas plus favorable que celle de femmes dans la même situation. En outre, le nombre de bénéficiaires de cette mesure ne serait pas très important.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cet amendement est fondé sur le fait que les femmes, dans notre législation actuelle, bénéficient d'une majoration de deux ans de la durée d'assurance vieillesse par enfant élevé. Il s'agit des femmes et non pas seulement des veuves.
Etendre cette disposition aux hommes, ce à quoi nous serions favorables, représenterait un coût de 18 milliards de francs. Malgré notre souhait de parvenir à la parité entre hommes et femmes, nous sommes, à notre grand regret, obligés d'émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 59, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 68, M. Braye propose d'insérer, après l'article 20, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 842-1 du code de la sécurité sociale est complété in fine par un alinéa additionnel ainsi rédigé :
« Les personnes qui assurent la garde d'au moins un enfant permettant de bénéficier des dispositions du présent article ont droit à une formation adaptée à cet emploi selon des modalités définies par décret. »
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Cet amendement vise à ouvrir de façon tout à fait souple le droit à une formation adaptée aux gardes d'enfants dont les employeurs bénéficient de l'AGED.
En effet, les employeurs des gardes d'enfants à domicile acquittent le 1 % formation, comme tous les employeurs. Dans les faits, par manque d'information, bien peu de ces employeurs en bénéficient.
Grâce à cet amendement, les gardes d'enfants à domicile pourraient recevoir une formation adaptée à leur emploi afin d'améliorer leurs compétences et de valoriser leur emploi.
Cette formation serait un gage de sécurité pour les parents et apporterait une garantie d'emploi aux gardes d'enfants au moment de leur retour sur le marché du travail.
Je tiens à préciser que cet amendement ne vise absolument pas à donner un quelconque statut à ces personnes : ce n'est pas nécessaire et ce serait même nuisible à la souplesse du dispositif, souplesse qui en a jusqu'à maintenant assuré le succès.
Il s'agit uniquement de prouver que ces emplois ne sont pas des emplois au rabais, qu'au contraire ils ont une réelle utilité sociale, et ce non pas seulement au bénéfice de la famille employeur puisque, en contribuant à l'éducation des jeunes enfants, la personne assurant la garde d'enfants travaille au profit de l'ensemble de la société.
Les modalités de mise en oeuvre de ce droit pourraient commencer par l'envoi d'une notice d'information par les caisses d'allocations familiales aux parents bénéficiaires de l'AGED. Cette notice présenterait les formations proposées par la Croix-Rouge en matière de soins d'urgence ou d'hygiène ou des formations en pédagogie et psychologie infantile, comme celles qui sont dispensées aux auxiliaires de puériculture.
La formation continue étant un droit légitime, je propose de l'inscrire dans le projet de loi en faveur de la personne assurant la garde d'enfants.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cet amendement, qui ouvre le droit à une formation adaptée, me semble tout à fait intéressant. Aussi, la commission y est très favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Cette disposition existe déjà dans le code du travail. Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 68, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 20.

Section 2

Branche maladie

Article 21



M. le président.
« Art. 21. _ I. _ Il est créé, pour une durée de cinq ans à compter du 1er janvier 1998, un fonds d'accompagnement social pour la modernisation des établissements de santé. Ce fonds est géré par la Caisse des dépôts et consignations.
« II. _ Le fonds finance, par la prise en charge d'aides destinées à favoriser la mobilité et l'adaptation des personnels, l'accompagnement social des opérations de modernisation des établissements mentionnés au premier alinéa de l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale. Les établissements de santé non visés par cet article peuvent également bénéficier de ces aides dans le cadre d'opérations de regroupement mentionnées par l'article L. 712-8 du code de la santé publique entre l'un ou plusieurs de ces établissements et un ou plusieurs établissements visés par l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale, dans la limite de la dotation du fonds. Sont éligibles aux aides du fonds d'accompagnement social pour la modernisation des établissements de santé les opérations agréées par le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation compétent dans le respect du schéma régional d'organisation sanitaire.
« III. _ Les ressources du fonds d'accompagnement social pour la modernisation des établissements de santé sont constituées par une contribution des régimes obligatoires d'assurance maladie, dont le montant est fixé chaque année par décret.
« IV. _ La répartition entre les différents régimes est effectuée dans les conditions définies à l'article L. 174-2 du code de la sécurité sociale.
« V. _ Les modalités d'application du présent article sont déterminées par voie réglementaire ; un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'intervention du fonds.
« VI. _ Pour l'information du Parlement, le Gouvernement lui présente, chaque année, pendant six ans, un rapport rattaché à l'annexe visée au b du II de l'article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale sur l'utilisation du fonds. »
Par amendement n° 19, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
I - Dans la première phrase du paragraphe I de cet article, de remplacer les mots : « cinq ans » par les mots : « sept ans ».
II - De rédiger comme suit la fin de la première phrase du paragraphe II de cet article : « ... établissements de santé publics et privés ».
III - De supprimer la deuxième phrase dudit paragraphe II dudit article.
La parole est M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cet amendement vise à instituer un fonds d'accompagnement social pour la modernisation des hôpitaux, alimenté par une contribution d'assurance maladie de 300 millions de francs hors ONDAM, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie.
M. Kouchner nous a dit à de nombreuses reprises que le processus de restructuration des hôpitaux serait long et qu'il ne fallait brutaliser personne, ni les élus ni les personnels...
Comme il nous a convaincus, nous pensons que la durée de vie de ce fonds, initialement prévue pour cinq ans, est insuffisante et doit donc être portée à sept ans.
Contrairement à une innovation qui semble avoir été apportée par l'Assemblée nationale, il faut prévoir que les personnels des établissements privés pourront également en bénéficier en dehors des cas de fusion avec l'hôpital public. Nous considérons qu'il n'y a pas lieu de distinguer deux sortes d'employés des hôpitaux : ceux qui travaillent dans le secteur public et ceux qui travaillent dans le secteur privé.
Nous réaffirmons le principe d'égalité de tous nos concitoyens.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 19.
Monsieur le rapporteur, nous sommes évidemment favorable à l'utilisation du fonds dans le cas d'une restructuration qui concerne à la fois un hôpital public et un hôpital privé. Mais lorsqu'il ne s'agit que d'établissements privés, le fonds ne peut entrer en jeu.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Pourquoi ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Parce qu'il existe d'autres fonds prévus à cet effet.
Dans le cas de Lillebonne, que j'ai cité récemment, les deux restructurations étaient conçues ensemble.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 19.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. L'examen de l'article 21 portant création d'un fonds d'accompagnement social pour la modernisation des hôpitaux est l'occasion pour nous de mettre en exergue certaines situations dangereuses susceptibles d'être engendrées par l'existence de cette structure.
Doté de 300 millions de francs, c'est par l'octroi d'aides aux personnels médicaux et non médicaux que le fonds entend remplir sa mission. Il est fait référence en l'occurrence à des aides en faveur de la mobilité, de l'adaptation des personnels et à des mesures d'accompagnement social.
Ainsi vont être financés des indemnités exceptionnelles d'aide à la mobilité, des primes au départ de la fonction publique hospitalière, le congé spécial, qui doit inciter les médecins à partir à la retraite, ou encore les formations demandées au personnel lors d'un changement d'activité.
Il est aussi prévu que ce fonds prenne en charge le coût de cellules d'aide au reclassement. Dans le secteur privé, l'existence d'une telle structure accompagne toujours un plan social préalable à la fermeture de l'entreprise et au licenciement des salariés.
Sans vouloir faire de procès d'intention, nous nous demandons ce qui se cache derrière ces mesures. Le service hopitalier manque de moyens et aspire à plus de démocratie dans sa gestion. Il n'a nullement besoin d'être démantelé. Pourtant, à terme, ce qui est visé, c'est une mobilité excessive des personnels, la fermeture des hôpitaux « de campagne », la transformation de services de jour en service de gérontologie...
Toutefois, Mme la ministre nous a fourni un certain nombre d'éléments qui remettraient en cause ce schéma, je pense à la réforme des SROSS.
Interlocuteur unique des établissements, le directeur d'agence régionale dispose d'eux comme il l'entend : fermant, fusionnant les hôpitaux, mutant le personnel ou supprimant des postes ! Certes, la vision peut être caricaturale, mais le risque existe.
Il est responsable du redécoupage de la carte sanitaire régionale, qui se traduit bien souvent par la création de réseaux de soins entre public privé, médecine de ville et hospitalière, donc corrélativement parfois par la disparition de services de proximité.
La rationalisation des structures de soins ne doit en aucun cas se faire au détriment du progrès technique ni toucher au coeur même de l'obligation de soins et de sécurité.
Nous ne sommes pas des adeptes de l'immobilisme à tout prix ; nous voulons seulement éviter que le changement des structures ne se fasse contre l'intérêt des malades, des personnels et des médecins.
Voilà pourquoi nous sommes très attachés à une hausse de l'enveloppe hospitalière supérieure à l'inflation, et très réservés quant au contenu de cet article 21. Je pense que Mme la ministre ou M. le secrétaire d'Etat pourront nous rassurer. Quoi qu'il en soit nous nous abstiendrons sur cet article.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, j'ai déjà dit plusieurs fois qu'il n'est pas question de fermer pour des raisons comptables un service qui serait utile. Ce fonds social est destiné à la formation et, lorsque je parle de « mobilité », c'est de mobilité d'un service à l'autre dans l'hôpital qu'il s'agit. J'ai déjà donné l'exemple d'un lit de long séjour qui pourrait être disposé à la place ou à côté d'un service de médecine.
Notre politique est claire : il s'agit de répondre aux besoins des personnes, de donner à tous les mêmes chances d'être traités en urgence ou pour des maladies chroniques. C'est à cela que servira ce fonds de formation.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 21, ainsi modifié.

(L'article 21 est adopté.)

Article 22



M. le président.
« Art. 22. _ I. _ L'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« a) Le 1° est ainsi rédigé :
« 1° La répartition en montants régionaux du montant total annuel arrêté par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en fonction de l'objectif national d'évolution des dépenses d'assurance maladie voté par le Parlement, des frais d'hospitalisation pris en charge par les régimes d'assurance maladie des établissements ayant passé contrat avec les agences régionales de l'hospitalisation en application des articles L. 710-16 et L. 710-16-2 du code de la santé publique ; en vue de résorber progressivement les inégalités de dotations entre régions, la fixation de ces montants tient compte des besoins de la population, des orientations des schémas régionaux d'organisation sanitaire et des priorités nationales ou locales en matière de politique sanitaire, ainsi que des informations sur l'activité des établissements mentionnés aux articles L. 710-6 et L. 710-7 du code de la santé publique ; les montants régionaux sont répartis par discipline par les agences régionales de l'hospitalisation ; »
« b) Au 2° , les mots : "le montant total annuel mentionné au 1°" sont remplacés par les mots : "le montant total annuel et les montants régionaux mentionnés au 1°" ;
« c) Le 3° est abrogé et le 4° , le 5° et le 6° deviennent respectivement le 3° , le 4° et le 5° .
« II. _ Au 4° de l'article L. 162-22-1 du même code, les mots : "définis au 3°" sont remplacés par les mots : "définis au 1°".
« II bis. _ Le 4° de l'article L. 162-22-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le contrat national tripartite fixe, en particulier, les modalités selon lesquelles, chaque année, sont déterminées les mesures, notamment les ajustements des tarifs des prestations, rendues nécessaires par le constat d'un écart entre les montants régionaux, visés au 1° de l'article L. 162-22-2, toutes disciplines confondues et par discipline, et les dépenses réalisées au niveau de chaque région, toutes disciplines confondues et par discipline. A défaut de dispositions contractuelles, ces modalités sont fixées par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale après information de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés et des organisations syndicales les plus représentatives des établissements de santé privés. »
« III. _ Au dernier alinéa de l'article L. 162-22-2 du même code, les mots : "le contenu des 1° à 6° ci-dessus" sont remplacés par les mots : "le contenu des 1° à 5° ci-dessus".
« IV. _ Les dispositions du présent article sont applicables à compter du 1er janvier 1998. »
Par amendement n° 20, M. Descours au nom de la commission des affaires sociales, propose :
A. - Dans le texte présenté par le a du paragraphe I de cet article pour le 1° de l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale de remplacer les mots : « établissements ayant passé contrat avec les agences régionales de l'hospitalisation en application des articles L. 710-16 et L. 710-16-2 du code de la santé publique ; » par les mots : « établissements de santé privés mentionnés à l'article L. 710-16-2 du code de la santé publique ; ».
B. - A la fin du texte proposé par le a du paragraphe I de cet article pour le 1° de l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale de remplacer les mots : « les montants régionaux sont répartis par discipline par les agences régionales de l'hospitalisation ; » par les mots : « les montants régionaux sont opposables dans le cas où le montant total annuel susmentionné est dépassé ; ».
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Il existe, pour les cliniques privées, une enveloppe nationale que l'on se propose de décliner en enveloppes régionales. La commission ne pense pas qu'il soit utile de créer des enveloppes régionales par discipline autrement qu'indicatives. En effet, avec les professionnels, nous craignons, en créant des enveloppes régionales contraignantes, de risquer de créer des disparités insupportables d'une région à l'autre.
Lorsque l'objectif national est respecté, les objectifs régionaux ne doivent pas être opposables. C'est une question de bon sens.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, car nous ne disposons pas des éléments suffisants pour nous déterminer. Nous avons fourni tous les chiffres de l'ONDAM, sauf ceux des cliniques privées, dont nous ne disposerons qu'à la fin de l'année.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 22, ainsi modifié.

(L'article 22 est adopté.)

Article 23



M. le président.
« Art. 23. _ Sont validés, sous réserve de décisions de justice passées en force de chose jugée, les actes pris sur le fondement :
« _ de l'arrêté du 11 juillet 1991 modifiant la Nomenclature générale des actes professionnels et portant abrogation des dispositions de l'arrêté du 16 mars 1978 complétant la Nomenclature générale des actes professionnels des médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et auxiliaires médicaux,
« _ de la lettre interministérielle en date du 11 juillet 1991 portant cotation provisoire des actes de scanographie,
« _ de la circulaire interministérielle en date du 30 mars 1992 portant cotation provisoire des actes de scanographie,
« _ de l'arrêté du 1er février 1993 modifié, modifiant la Nomenclature générale des actes professionnels des médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et auxiliaires médicaux et portant cotation provisoire des actes de scanographie,
« _ de l'arrêté du 14 février 1994 modifié, modifiant la Nomenclature générale des actes professionnels des médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et auxiliaires médicaux et portant cotation provisoire des actes de scanographie,
« _ de l'arrêté du 22 février 1995 modifié, modifiant la Nomenclature générale des actes professionnels des médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et auxiliaires médicaux et portant cotation provisoire des actes de scanographie,
« en tant que leur légalité serait contestée pour un motif tiré de l'incompétence des auteurs de ces arrêtés et circulaires ministérielles. » - ( Adopté. )

Articles additionnels après l'article 23



M. le président.
Par amendement n° 21, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 23, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 27 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales, il est inséré un article 27-1 ainsi rédigé :
« Art. 27-1. - Chaque année, les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale, de l'action sociale, du budget et de l'économie déterminent, en fonction de l'objectif national d'évolution des dépenses d'assurance maladie voté par le Parlement, l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses des établissements ou services visés aux 2° et 5° de l'article 3 imputables aux prestations prises en charge par les régimes d'assurance maladie, et, corrélativement, le montant total annuel des dépenses prises en compte pour le calcul des dotations globales, forfaits, prix de journée et tarifs afférents aux prestations médico-sociales imputables à l'assurance maladie dans les établissements et services susmentionnés.
« Ce montant total annuel est fixé par application d'un taux d'évolution aux dépenses de l'année précédente, au plus tard dans les quinze jours qui suivent la publication de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année.
« Le montant total annuel ainsi calculé est constitué en dotations régionales. Le montant des dotations régionales, qui présente un caractère limitatif sous réserve des dispositions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 174-1-1 du code de la sécurité sociale est fixé par les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et de l'action sociale, en fonction des besoins de la population, des priorités définies au niveau national en matière de politique médico-sociale, compte tenu de l'activité et des coûts moyens des établissements ou services et d'un objectif de réduction progressive des inégalités dans l'allocation des ressources entre régions.
« L'enveloppe régionale est répartie par le représentant de l'Etat dans la région, après avis du représentant de l'Etat dans le département, pour chaque département de ladite région, et du directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation, en sous-enveloppes départementales tenant compte des priorités locales, des orientations des schémas prévus à l'article 2-2, de l'activité et des coûts moyens des établissements ou services, des objectifs fixés dans les conventions prévues au dernier alinéa du présent article et d'un objectif de réduction des inégalités entre départements et établissements ou services ; cette procédure est applicable aux établissements ou services visés aux articles 26-4 et 27 bis dont la tarification ne relève pas exclusivement du représentant de l'Etat dans le département.
« Pour chaque établissement ou service, le représentant de l'Etat dans le département compétent peut modifier le montant global des recettes et dépenses prévisionnelles visées au 5° de l'article 26-1 imputables aux prestations prises en charge par l'assurance maladie, compte tenu du montant de la dotation régionale ou départementale définie ci-dessus ; la même procédure s'applique en cas de révision, au titre du même exercice budgétaire, des dotations régionales ou départementales initiales.
« Il peut également supprimer ou diminuer les prévisions de dépenses qu'il estime injustifiées ou excessives compte tenu, d'une part, des conditions de satisfaction des besoins de la population, telles qu'elles résultent, notamment, des orientations des schémas prévus à l'article 2-2 et, d'autre part, de l'évolution de l'activité et des coûts des établissements et services appréciés par rapport au fonctionnement des autres structures comparables dans ledit département ou ladite région.
« Des conventions conclues entre le représentant de l'Etat dans le département, l'autorité compétente pour l'assurance maladie, les gestionnaires d'établissements ou de services et, le cas échéant, les groupements constitués dans les conditions prévues à l'article 2 précisent, dans une perspective pluriannuelle, les critères d'évaluation et de prévision de l'activité et des coûts des prestations imputables à l'assurance maladie dans les établissements et services concernés ».
« II. - Le dernier alinéa de l'article L. 174-7 du code de la sécurité sociale et le dernier alinéa de l'article 27 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 précitée sont supprimés.
« III. - L'article 11-1 de la même loi est ainsi modifié :
« a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il en est de même lorsqu'ils sont susceptibles d'entraîner pour les budgets des organismes de sécurité sociale ou des collectivités publiques des charges injustifiées ou excessives compte tenu du montant des enveloppes de crédits définies à l'article 27-1 ;
« b) Au deuxième alinéa, les mots : " ou des organismes de sécurité sociale " sont supprimés.
« IV. - Les dispositions du présent article sont applicables jusqu'à l'adoption d'une loi réformant la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 précitée. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cet amendement a pour objet d'encadrer les dépenses médico-sociales.
Aujourd'hui, les dépenses médicales sont encadrées pour les soins ambulatoires et pour les soins hospitaliers. Mais il y a 57 milliards de francs, selon certains, ou 70 milliards de francs, selon d'autres, qui ne sont pas encadrés. Or interviennent dans cette somme les dépenses médico-sociales, qui dérapent beaucoup. Il ne nous semble pas cohérent, par rapport aux professionnels, qui sont soumis à encadrement, de les laisser continuer à déraper.
Bien entendu, il n'est pas question de soumettre les dépenses du secteur médico-social aux mêmes objectifs que les soins ambulatoires ou hospitaliers, mais un encadrement nous paraît s'imposer.
Je tiens à souligner que nous avions présenté un amendement analogue l'année dernière, sous un autre gouvernement. Nous poursuivons et nous persévérons.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, car la méthode qui est proposée revient à transposer de manière un peu mécanique le dispositif des ordonnances sanitaires d'avril 1996, autrement dit l'opposabilité des enveloppes, à un secteur spécifique régi par une loi qui date de 1975, que nous entendons d'ailleurs modifier.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cette année ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Au plus vite. Nous y travaillons.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. En 1998.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 21.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. L'amendement n° 21 vise à une sorte de transposition des dispositions du plan Juppé à l'ensemble des établissements de la filière médico-sociale.
La commission des affaires sociales nous propose en effet de soumettre ces établissements aux mêmes règles de pénurie budgétaire que celles qui président aux destinées comptables des établissements hospitaliers ou de la médecine de ville.
La commission des finances, pour sa part, avec l'amendement n° 44 qu'elle s'apprête à nous présenter, franchit encore plus les limites de l'admissible en proposant un gel en francs courants des dépenses des structures médico-sociales.
C'est donc sans la moindre hésitation que nous rejetterons ces deux amendements.
Nous ne croyons pas plus aujourd'hui qu'hier aux vertus de la maîtrise comptable en matière de dépenses sociales, attendu que la seule régulation doit venir de l'efficacité des interventions.
Nous pensons, en particulier, que tout ce qui a pu contribuer à réduire le volume de la dépense publique en matière de prévention sanitaire, qu'il s'agisse de la médecine scolaire ou de la médecine du travail, pèse aujourd'hui sur la situation de l'assurance maladie quant à son intervention dans le domaine des dépenses hospitalières.
On nous propose, avec cet amendement, de faire en sorte que notre système de protection sociale soit un peu plus dur pour un certain nombre de personnes particulièrement vulnérables.
Je m'étonne que M. le rapporteur pour la famille, qui connaît parfaitement ces problèmes, ait pu donner quitus à cet amendement, alors que celui-ci va directement frapper les établissements accueillant les enfants ou les adultes handicapés, ou encore ceux de nos concitoyens qui rencontrent le plus de difficultés d'insertion sociale et professionnelle.
Nous avons reçu - et chacun des présidents de groupe l'a probablement reçu aussi - un courrier de M. Lenoir, qui était ministre à l'époque de la réforme de 1975 et qui est aujourd'hui président de l'Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux. Ce courrier, daté du 10 novembre, est on ne peut plus clair. Voici ce qu'on peut notamment y lire :
« L'avenir de la régulation des établissements sociaux et médico-sociaux a fait l'objet, au cours du semestre passé, d'une réflexion globale engagée avec les acteurs concernés en vue de la réforme de la loi du 30 juin 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales. Il semblerait, dans ce contexte, regrettable que la régulation soit abordée dans une perspective principalement économique à la faveur d'amendements à la loi de financement de la sécurité sociale. »
Il y a pleinement lieu, à notre avis, de suivre l'opinion pour le moins autorisée de M. Lenoir, dont la compétence sur l'ensemble de ces questions est reconnue.
Suivre la commission des affaires sociales et la commission des finances dans leur logique consisterait en fait à faire payer aux plus vulnérables de nos compatriotes le prix de la mise en oeuvre d'une conception étroite de la protection sociale, en filiation directe avec la logique du plan Juppé.
C'est donc avec détermination que nous voterons contre l'amendement n° 21, sur lequel nous demandons que le Sénat se prononce par scrutin public.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Tout le monde reconnaît, bien sûr, une très grande compétence à M. Lenoir, mais je rappelle que nous avions déposé cet amendement l'année dernière ; d'ailleurs, nous avions alors déjà reçu une lettre de M. Lenoir.
Est-ce l'effet du dépôt de notre amendement l'an passé ? Toujours est-il que la concertation s'est engagée pendant l'année au sein des établissements médico-sociaux et que le taux de dérapage des dépenses de santé, qui était de 8 % en 1996, est tombé à 3,4 % ; on ne peut que s'en réjouir.
Je ne dis pas que la peur du gendarme est le début de la sagesse, mais...
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrution est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 14:

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 316
Majorité absolue des suffrages 159219
Contre 97

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 23.
Par amendement n° 44, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 23, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les budgets de gestion administrative des organismes de sécurité sociale visés à l'article L. 227-1 du code de la sécurité sociale sont limités pour 1998 aux montants atteints en 1997. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Il s'agit de la rigueur dans la gestion des caisses.
Dans le plan de redressement financier de novembre 1995, des économies sur les coûts de gestion étaient prévues : elles devaient porter sur 1,5 milliard de francs en 1996 et sur 2 milliards de francs en 1997. Ne pensez pas que ces objectifs ont été respectés ! Les dépassements se sont en effet élevés à 1,6 milliard de francs en 1996 et à 1,2 milliard de francs en 1997.
D'ailleurs, la Cour des comptes, dans ses différentes analyses, a bien montré qu'il y avait quelques anomalies dans cette évolution des frais de gestion.
Comme Mme le ministre nous l'a rappelé dans ses propos antérieurs, l'ordonnance du 24 avril 1996 pose le principe de l'encadrement des budgets pluriannuels de gestion administrative des trois caisses par les conventions d'objectifs et de gestion passées entre celles-ci et l'Etat.
Cependant, les lois de financement de la sécurité sociale sont là pour fixer des orientations et des limites. Il est d'ailleurs prévu que des avenants peuvent faire évoluer ces conventions d'encadrement de manière que soient atteints les objectifs arrêtés par les lois de financement.
Dans ces conditions, nous proposons que les économies soient de 1,2 milliard de francs, ce qui signifie que les dépenses de gestion passeraient de 48,3 milliards à 47,1 milliards de francs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Nous comprenons parfaitement l'exigence de rigueur et, à travers les propositions que nous présenterons dans la suite du débat, nous inviterons également les caisses à diminuer leurs budgets de gestion administrative. Toutefois, il nous paraît quelque peu excessif de vouloir bloquer, pour 1998, ces budgets aux montants atteints en 1997.
Au demeurant, comme M. le rapporteur pour avis l'a dit lui-même, cet amendement va à l'encontre de l'ordonnance du 24 avril 1996, qui prévoit la conclusion de conventions d'objectifs et de gestion.
C'est pourquoi nous émettons un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement suit l'avis du rapporteur, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Objectifs de dépenses par branche

M. le président. Par amendement n° 22, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit l'intitulé de cette division, avant l'article 23 bis :
« Section 3
« Objectifs de dépenses par branche ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. C'est un amendement de forme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Sagesse.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé de la division avant l'article 23 bis est ainsi rédigé.

Demande de priorité



M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commisison des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Etant donné que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, l'ONDAM, est inclus dans l'objectif global des dépenses du régime maladie-maternité-invalidité-décès et qu'il y a, comme je l'ai déjà expliqué, un écart de 64,7 milliards de francs entre l'un et l'autre, il est plus rationnel d'examiner d'abord l'article concernant l'ONDAM, puis l'objectif global.
C'est pourquoi je demande la discussion par priorité de l'article 23 ter, avant la discussion de l'article 23 bis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Favorable.
M. le président. La priorité est ordonnée.

Article 23 ter (priorité)



M. le président.
« Art. 23 ter . - L'objectif national de dépenses d'assurance maladie de l'ensemble des régimes obligatoires de base est fixé à 613,8 milliards de francs pour l'année 1998. »
Sur l'article, la parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi, dans mon intervention sur l'article 16, qui fixe l'objectif national de dépenses maladie, d'attirer votre attention sur la situation de l'Assistance publique de Paris.
Si la nouvelle rédaction de l'Assemblée nationale concernant la partie de l'article 1er qui traitait de l'Assistance publique ne pouvait que nous satisfaire, la manière dont la majorité sénatoriale traite le système hospitalier en proposant un plan Juppé bis nous inquiète.
Nous sommes favorables à la transparence et à la démocratie, qui permettent une meilleure répartition sanitaire entre les régions. Celle-ci ne doit pas pour autant justifier que soit tirée vers le bas la qualité des soins dispensés dans les hôpitaux parisiens.
Ce n'est pas avec la « supermaîtrise comptable » proposée par la droite que ces objectifs nécessaires pour le système hospitalier de Paris et des autres villes seront remplis.
Il est nécessaire, à Paris comme ailleurs, d'inverser la logique enclenchée précédemment et de considérer l'hôpital, non pas exclusivement à l'aune d'impératifs comptables, mais comme un investissement social et humain essentiel.
La diminution drastique des dotations l'an dernier a conduit de nombreux hôpitaux, en Ile-de-France comme ailleurs, au bord de l'asphyxie, avec les conséquences que l'on connaît : réduction de postes, suppression de lits et de services, aggravation sensible des conditions de travail du personnel.
Personnels et usagers attendent des signes forts du nouveau gouvernement en ce domaine.
Il est réjouissant de constater qu'après que la droite eut limité à 1,25 % les moyens financiers mis à la disposition de l'ensemble du système hospitalier, le Gouvernement décide de pratiquement doubler cette dotation, en la fixant à 2,3 %.
Toutefois, il est préoccupant que l'on en revienne à une logique selon laquelle certaines régions ou certains départements sont surdotés, alors que nombre d'établissements hospitaliers oeuvrent déjà dans des conditions limites et que ceux qui fonctionnent mieux font bénéficier les villes environnantes de cette situation, comme c'est le cas pour le système hospitalier de Paris.
Avant toute décision hâtive, il faut ouvrir le débat quant à l'avenir de la protection sociale en France et permettre aux états généraux de la santé qui débuteront en 1998 d'être l'intervention démocratique des citoyens, afin de pousser plus loin la réflexion sur une question aussi essentielle pour le pays.
Placer l'Assistance publique sous la tutelle de l'agence régionale de l'hospitalisation de l'Ile-de-France, qui constitue une structure que chacun s'accorde à reconnaître comme étant trop technocratique, n'est pas une solution et je remercie le Gouvernement d'avoir apporté à ce sujet les précisions nécessaires.
L'unicité de l'assistance publique doit être maintenue ; elle ne constitue nullement un obstacle au développement du partenariat avec d'autres établissements hospitaliers et avec la médecine libérale.
Le diagnostic accablant des généralistes qui exercent dans les arrondissements populaires du nord-est de la capitale sur la dégradation de l'état de santé de nombreux Parisiens montre combien il est nécessaire que les partenariats entre les établissements hospitaliers et la médecine libérale se développent.
Qu'il me soit permis, dans le cadre parisien, de soulever la question des hôpitaux de jour en psychiatrie infanto-juvénile. Nombre d'entre eux craignent que la réduction imposée depuis deux ans par la tutelle, en particulier à la dotation des établissements parisiens, ne conduise à court terme la plupart de ces institutions à cesser leurs activités.
Ce serait d'autant plus dommageable que ces établissements assurent des soins, la scolarisation et le maintien en milieu familial de plusieurs centaines d'enfants et d'adolescents qui souffrent de troubles mentaux graves. Il semble qu'il n'y ait aucune alternative à leur action qui puisse donner à ces enfants et adolescents la possibilité de se développer et de s'insérer dans la société.
Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, au cours de ce débat, nous révéler les intentions du Gouvernement à ce sujet ?
Il semble que l'incidence budgétaire de mesures plus favorables envers ces établissements soit faible.
Je vous remercie de m'avoir permis, dans le cadre de l'intervention sur l'article 23 ter, de soulever ces questions parisiennes qui me tiennent à coeur.
M. le président. Sur l'article 23 ter, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 46, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose, dans cet article, de remplacer la somme : « 613,8 milliards de francs » par la somme : « 608 milliards de francs ».
Par amendement n° 25, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose, dans ce même article, de remplacer la somme : « 613,8 milliards de francs » par la somme : « 610,3 milliards de francs ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 46.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. On a beaucoup débattu de l'ONDAM dans la présentation de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Les chiffres sont clairs : en 1996, l'ONDAM s'élevait à 590 milliards de francs ; l'augmentation que nous avions votée l'avait porté à 600,2 milliards de francs, soit une augmentation de 1,7 %.
La commission des comptes de la sécurité sociale a fait apparaître que, tendanciellement, les dépenses d'assurance maladie de l'ONDAM progresseraient de 2,1 %. Or le Gouvernement nous propose une augmentation de 2,2 %, laquelle se situe donc au-delà de la tendance prévue par la commission des comptes.
La commission des affaires sociales, estimant que ce taux est trop élevé, propose de le ramener à 1,8 %, soit 610,3 milliards de francs.
Tout à l'heure, nous avons souhaité la reconduction des frais de gestion en francs courants pour réaliser une réelle économie, alors même que, deux ans auparavant, nous demandions une diminution des masses de l'ONDAM.
En l'occurrence, nous essayons d'adopter une position de principe : l'évolution de l'ONDAM doit être « calée » sur le taux de l'inflation, ce qui représente une augmentation de 1,3 %, puisque tel est le taux d'inflation qui est prévu par le Gouvernement. Ce taux est rigoureux, c'est exact, mais la rigueur est nécessaire, même dans ce domaine.
Je vous rappelle que la commission des finances demande la stabilisation en francs courants de l'évolution des dépenses budgétaires, c'est-à-dire une augmentation inférieure au taux de l'inflation.
C'est la raison pour laquelle elle vous propose cette mesure de grande rigueur, qui lui paraît nécessaire pour l'avenir. Si nous ne sommes pas suivis, nous aurons au moins pris date pour les années futures.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 25 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 46.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Comme l'a indiqué M. le rapporteur pour avis, en proposant de fixer à 2,2 % le taux de progression de l'ONDAM, le Gouvernement va au-delà de l'évolution définie par la commission des comptes de la sécurité sociale.
Cela ne me paraît pas raisonnable. En effet, il faut adresser des signes forts à tous les acteurs du système de santé, de façon qu'ils comprennent la nécessité de procéder à des restructurations et de s'imposer une certaine rigueur.
Toutefois, parallèlement, nous avons toujours été défavorables à une maîtrise comptable des dépenses. Or se « caler » sur l'inflation est une maîtrise purement comptable.
Je rappelle que, dans l'année à venir, des nouveaux médicaments anticancéreux extrêmement chers vont apparaître. Même si la trithérapie, qui coûtera environ un milliard de francs, est exclue de l'ONDAM, d'autres médicaments de ce type y figureront.
D'ailleurs, comme nous l'a expliqué le président de la conférence nationale de santé, les progrès thérapeutiques ne nous permettent pas de tenir un raisonnement purement comptable. Nous proposons donc de fixer l'ONDAM à 610 milliards de francs.
Nous ne sommes pas aussi laxistes que le Gouvernement, mais nous tenons à inciter les acteurs de santé à poursuivre leurs efforts - ils ont été très importants cette année - notamment pour les hôpitaux.
Conscients des progrès techniques réalisés par la médecine, nous proposons que le taux de progression de l'ONDAM soit supérieur au taux de l'inflation, soit 1,7 %-1,8 %.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 46 et 25 ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
L'un propose une progression de 1,3 %, l'autre une augmentation de 1,7 %. Le taux de 1,7 % nous paraît préférable, mais il faut rattraper les erreurs qui ont été commises l'an dernier, en particulier dans les hôpitaux, erreurs qui ont été préjudiciables aussi bien au personnel qu'aux malades.
M. Emmanuel Hamel. Vous avez raison !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 46, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 23 ter, ainsi modifié.

(L'article 23 ter est adopté.)

Article 23 bis



M. le président.
« Art. 23 bis. - Pour 1998, les objectifs de dépenses par branche de l'ensemble des régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres sont fixés aux montants suivants :

(en milliards de francs)
« Maladie-maternité-invalidité-décès 678,5
« Vieillesse-veuvage 755,0
« Accidents du travail 50,8
« Famille 246,9
« Total des dépenses 1 731,2. »

Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 23, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit le tableau figurant à cet article :

(en milliards de francs)
« Maladie-maternité-invalidité-décès 674,0
« Vieillesse-veuvage 754,7
« Accidents du travail 50,8
« Famille 250,5
« Total des dépenses 1 730,0. »

Par amendement n° 45, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose :
« I. - A la première ligne du tableau figurant à cet article, de remplacer le montant : "678,5" par le montant "677,7".
« II. - A la seconde ligne dudit tableau, de remplacer le montant : "755,0" par le montant : "754,7".
« III. - A la troisième ligne dudit tableau, de remplacer le montant : "50,8" par le montant "50,7".
« IV. - A la quatrième ligne dudit tableau, de remplacer le montant "246,9" par le montant : "246,7". »
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 23. M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cet amendement a pour objet, d'une part, de tirer les conséquences, dans les objectifs de dépenses par branche, des amendements réduisant l'ONDAM et supprimant les articles concernant les prestations familiales et, d'autre part, de prévoir, pour chacune des branches et dans le respect des conventions d'objectifs et de gestion, des économies de gestion calculées au prorata de leurs dépenses.
Ainsi, pour la maladie, nous avons déjà 3,5 milliards de francs à déduire en raison de la limitation de l'ONDAM. En outre, nous proposons de réduire de 1 milliard de francs les dépenses de gestion des caisses d'assurance maladie - je dis bien « des caisses », et non pas seulement de la CNAM.
En ce qui concerne la maladie, je tiens à rappeler que des moyens devraient être affectés au fonds d'orientation et de modernisation de la médecine libérale, le FORMEL, en vue de favoriser le départ ou la réorientation des médecins libéraux qui le souhaitent.
En effet, le dispositif mis en place avec le plan Juppé est un succès, mais il n'est plus financé, monsieur le secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement a prévu la création d'un fonds de modernisation des hôpitaux doté de 300 millions de francs, mais il n'a pas pris les mesures nécessaires pour financer les dispositifs existants en faveur de la médecine libérale.
Cela prouve que, pour le Gouvernement, il y aurait des bons et des mauvais médecins, selon qu'ils exercent dans le secteur privé ou dans le secteur public. (Protestations sur les travées socialistes.) J'espère que ce n'est pas ce qui motive le Gouvernement.
S'agissant des autres branches, il est proposé de procéder également à un abattement sur les dépenses de gestion à hauteur de 250 millions de francs pour la branche vieillesse-veuvage et de 150 millions de francs pour la branche famille.
En outre, il est suggéré d'alléger la CNAF d'une partie des charges indues au titre de la gestion d'un certain nombre de prestations sans lien avec sa vocation au service de la politique familiale.
Ainsi, le coût de la gestion et du contrôle du nombre croissant des bénéficiaires du RMI s'élève à 1 milliard de francs. C'est cette somme qu'il vous est proposé de supprimer.
Il est en effet paradoxal que la gestion et le contrôle du RMI soient financés par la branche famille et que le budget de l'Etat, qui s'élève à près de 1 600 milliards de francs, dont 574 milliards de francs au titre des seuls moyens des services civils, soit dans l'impossibilité d'assurer cette charge par redéploiement de ses moyens, alors qu'il en a le devoir.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 45.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Il est satisfait par l'amendement de la commission des affaires sociales. En conséquence, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 45 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 23 ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, mais je pense qu'un jour nous nous entendrons sur ces chiffres compliqués.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 23.
M. Claude Huriet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. En qualité de président du Conseil de surveillance de la caisse nationale d'allocations familiales, j'apprécie beaucoup l'argument que vient de développer notre collègue Charles Descours en ce qui concerne la gestion du RMI.
Je m'interroge sur les possibilités de réaliser des économies en matière de gestion dans la mesure où, en tant que membres et présidents des conseils de surveillance, nous avons pour mission de nous assurer de la bonne fin des contrats d'objectifs et de moyens, ce qui, en principe, doit nous donner des garanties en matière de rigueur de gestion.
Toutefois, je souscris tout à fait à la remarque formulée par Charles Descours, car le coût très important de la gestion du RMI ne doit pas peser sur le budget de la branche famille. Il s'agit d'une anomalie sur laquelle le Gouvernement devrait porter son attention, de façon que ces dépenses indues ne viennent pas grever le budget de l'organisme national chargé des prestations familiales.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 23.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. L'amendement n° 23 de la commission des affaires sociales solde, en quelque sorte, les comptes de la protection sociale tels qu'ils résultent des dispositions de ce projet de loi amendé par la majorité du Sénat.
Il traduit, en particulier, les orientations prises en matière de dépenses d'assurance maladie, au travers, notamment, de la fixation du taux directeur comme de l'imposition de ce taux directeur aux structures de la filière médico-sociale.
Permettez-moi toutefois de poser quelques questions fondamentales à ceux qui, parmi les membres de la majorité sénatoriale, souhaitent une telle programmation des dépenses.
Combien de fermetures de services et de suppression de lits d'hôpitaux sont-elles conditionnées par l'adoption des dispositions qui sont préconisées ?
Suivre la commission des affaires sociales du Sénat signifie-t-il qu'il faut renoncer à un fonctionnement normal de l'hôpital de Pithiviers et accepter la fermeture définitive de la maternité de Moûtiers ?
Cela signifie-t-il, monsieur le rapporteur, que les habitants du plateau matheysin - que vous devez probablement soutenir dans l'action qu'ils mènent avec leurs élus locaux - doivent faire définitivement une croix sur l'existence d'une maternité à La Mure ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Etant donné l'heure avancée, je n'insisterai pas sur le caractère démagogique des arguments de M. Fischer.
M. Guy Fischer. Je n'ai pas l'habitude de faire de la démagogie !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cependant, je voudrais souligner que le problème des restructurations hospitalières ne consiste pas uniquement en des fermetures de lits et des licenciements de personnels. Je connais les hôpitaux, comme vous, monsieur Fischer, et je sais que, dans un certain nombre d'entre eux et dans certains services ouverts, les personnels ne sont pas en nombre suffisant.
Cela est vrai, mais la raison en est que certains services restent ouverts et mobilisent vingt ou trente infirmières, alors que, si nous regroupions les services, cela permettrait de les faire fonctionner avec un nombre normal de personnels infirmiers et d'aides-soignantes. Là est le problème.
En effet, l'éparpillement des lits hospitaliers fait que de plus en plus d'hôpitaux ne fonctionnent pas avec un effectif convenable, ni même avec des moyens suffisants du point de vue technique. C'est parce qu'il faut doter les hôpitaux de moyens techniques de bon niveau que nous affirmons qu'il est nécessaire de procéder à des restructurations hospitalières. Il faut que, dans les services qui susbsisteront, les personnels infirmiers et les aides-soignantes soient plus nombreux que c'est le cas actuellement en moyenne dans notre pays. Les enquêtes montrent des différences considérables en termes de personnels entre les régions et entre les hôpitaux - les effectifs varient du simple au triple.
Je n'ai jamais entendu dire que, quelque part, les soins étaient mauvais parce qu'il y avait de mauvais personnels. Dans les hôpitaux où l'on dénombre trois fois plus de personnels, les malades ne sont pas soignés trois fois mieux. En ce domaine, comme dans d'autres, et c'est bien normal puisqu'il s'agit d'une société humaine, il y a des efforts à faire ; il faut rendre aux établissements le nombre de personnels correspondant au nombre de malades. Là aussi, des ratios doivent être respectés. Cependant, cela passera effectivement par un certain nombre de fermetures.
S'agissant des fermetures de maternité, j'ai été défendre, comme vous bien entendu, tel ou tel élu. Toutefois - je l'ai constaté non seulement à La Mure, mais aussi dans d'autres hôpitaux de ma région - les maires qui sont mes amis et, surtout, mes grands électeurs défendent, ce que je comprends, tel ou tel hôpital, mais, lorsque leur femme ou leur fille est malade, ils la font soigner dans un hôpital voisin.
M. Claude Huriet. Eh oui !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 23 bis, ainsi modifié.

(L'article 23 bis est adopté.)

Objectif national de dépenses d'assurance maladie

M. le président. Par amendement n° 24, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit l'intitulé de cette division, avant l'article 23 ter :
« Section 4. - Objectif national de dépenses d'assurance maladie. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Il s'agit d'un amendement de forme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé de la division avant l'article 23 ter est ainsi rédigé.

TITRE V

M. le président. L'Assemblée nationale a supprimé la division « Titre V » et son intitulé.

Division additionnelle avant l'article 24



M. le président.
Par amendement n° 28, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, avant l'article 24, une division additionnelle ainsi rédigée :
« Section 5. - Mesures relatives à la dette et aux plafonds d'avances de trésorerie. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Il s'agit, là aussi, d'un amendement de forme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, une division additionnelle ainsi rédigée est insérée dans le projet de loi, avant l'article 24.

Article 24



M. le président.
« Art. 24. - Est ratifié le relèvement, par le décret n° 97-918 du 8 octobre 1997, du montant dans la limite duquel les besoins de trésorerie du régime général peuvent être couverts par des ressources non permanentes. » - (Adopté.)

Article 25



M. le président.
« Art. 25. - L'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
« 1° A l'article 1er, les mots : "treize ans et un mois" sont remplacés par les mots : "dix-huit ans et un mois" ;
« 2° L'article 2 est ainsi rédigé :
« Art. 2. - La Caisse d'amortissement de la dette sociale a pour mission, d'une part, d'apurer la dette mentionnée aux I et II de l'article 4 et, d'autre part, d'effectuer les versements prévus aux III et IV du même article. » ;
« 3° L'article 4 est ainsi modifié :
« a) Le II devient le III et le III devient le IV ;
« b) Il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. - La dette de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale à l'égard de la Caisse des dépôts et consignations, correspondant, d'une part, au financement des déficits accumulés par le régime général de sécurité sociale constatés au 31 décembre 1997 dans la limite de 75 milliards de francs et, d'autre part, à celui de son déficit prévisionnel de l'exercice 1998 dans la limite de 12 milliards de francs, est transférée à la Caisse d'amortissement de la dette sociale à compter du 1er janvier 1998. » ;
« 4° L'article 10 est ainsi modifié :
« a) Le II devient le III ;
« b) Il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. - Les sommes correspondant au remboursement par la Caisse d'amortissement de la dette sociale du prêt consenti à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale par la Caisse des dépôts et consignations et mentionné au II de l'article 4 sont réparties, à compter du 1er janvier 1998, entre les fonds nationaux gérés par la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, la Caisse nationale des allocations familiales et la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés dotés d'un compte de report à nouveau négatif aux bilans arrêtés au 31 décembre 1997, et ce, au prorata des montants de ces comptes. Le montant des transferts correspondant à cette répartition est fixé dans les conditions prévues au I. » ;
« 4° bis l'article 11 est abrogé ;
« 5° Aux articles 14, 15, 16, 17 et 18, l'année : "2008" est remplacée par l'année : "2013", et l'année : "2009" est remplacée par l'année : "2014". »
Sur l'article, la parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. L'article 25 prévoit une prolongation de la durée de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, instituée par l'ordonnance n° 96-50 prise dans le cadre des dispositions du plan Juppé et dont la ratification n'a jamais été soumise au Parlement.
Il s'agit concrètement de prendre en compte le fait que la dette sociale, cantonnée dans les écritures de la CADES, la Caisse d'amortissement de la dette sociale, s'est encore accrue de 87 milliards de francs entre les exercices 1996 et 1997, majorée du déficit prévisionnel de l'exercice 1998, fixé à 12 milliards de francs.
Cette contribution présente un défaut fondamental, à savoir lier une part du financement de la protection sociale à la loi des marchés financiers, d'autant que le taux réel des titres CADES est largement supérieur à celui de la hausse des prix.
Rien ne permet d'ailleurs de penser que nous en aurons fini avec la CRDS en 2014. En effet, même si le déficit de la protection sociale disparaît - et on peut le souhaiter - il n'est pas certain qu'il ne réapparaisse pas, je pense notamment aux années 2005-2015 qui seront décisives pour notre régime d'assurance vieillesse, par exemple.
Pouvons-nous choisir une autre solution ?
Sans doute pour n'avoir pas mis en oeuvre auparavant les réformes nécessaires pour assurer le financement de la protection sociale - et je pense ici singulièrement au problème de la prise en compte des revenus financiers des ménages et des entreprises - sans doute aussi parce que la dégradation des comptes sociaux s'est accompagnée du mouvement de réduction de la part des salaires dans la valeur ajoutée et du développement de la « financiarisation » de notre économie au détriment de l'emploi, nous n'avons guère de choix aujourd'hui.
Pour autant, il nous semble indispensable de réfléchir aujourd'hui à d'autres formes de refinancement de la protection sociale que celle de la CRDS. Aussi, dans l'attente de telles dispositions, nous ne voterons pas l'article 25.
M. le président. Sur l'article 25, je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 52, M. Adnot propose de supprimer l'article 25.
Par amendement n° 47, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose de rédiger comme suit le 1° de cet article :
« 1° L'article 1er est ainsi modifié :
« a) Les mots : "treize ans et un mois" sont remplacés par les mots : "dix-huit ans et un mois" ;
« b) Il est inséré in fine un alinéa ainsi rédigé :
« Au terme de son existence prévu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, le 31 janvier 2014, la Caisse d'amortissement de la dette sociale est dissoute et son patrimoine est dévolu à l'Etat. Cette dévolution du patrimoine fait l'objet d'un arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé de l'économie et des finances. Les transferts des biens, droits et obligations de la Caisse d'amortissement de la dette sociale qu'elle suppose ne donnent lieu à aucune indemnité ou perception d'impôts, droits ou taxes. »
Par amendement n° 48, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose de compléter le 3° de l'article 25 par trois alinéas ainsi rédigés :
« c) Dans le III, les mots : "au budget général de" sont remplacés par le mot : "à".
« d) Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A compter de l'année 1998 et jusqu'à l'année 2008, la part de cette somme correspondant aux remboursements en capital de la dette visée à l'article 105 de la loi de finances pour 1994 est versée au Trésor, sans qu'elle puisse faire l'objet d'un versement au budget général. »
La parole est à M. Adnot, pour défendre l'amendement n° 52.
M. Philippe Adnot. Madame le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, j'en suis bien conscient, la disposition que je propose n'a aucune chance d'être adoptée. Il s'agit donc d'un amendement de témoignage.
Quelle entreprise, quel particulier ou quelle collectivité locale qui, constatant une augmentation de ses charges, pourrait allonger la durée de ses remboursements sans proposer à son banquier un plan d'accompagnement comportant des mesures précisant comment sera maîtrisée la dépense et la manière dont sera résolu le problème ?
Ce que nous sommes en train de faire est extrêmement grave. En effet, l'année prochaine, il y aura encore une dérive, l'année suivante également, et il faudra consolider la dette. Ainsi, la durée de remboursement passera de treize ans à dix-huit ans, puis à vingt-cinq ans, voire à trente ans. Un jour, nos enfants seront confrontés à une charge insupportable.
Personnellement, je ne peux cautionner une telle solution. Aussi, je voudrais attirer solennellement votre attention, tout en étant très conscient de la limite de mon propos, sur le fait que la seule manière de résoudre ce problème consiste à proposer à la fois une augmentation des prélèvements, pour couvrir une dépense qui nous concerne tous, et une réduction des dépenses.
Ne doit-on pas la vérité à nos concitoyens et à nos enfants ? Ce que nous allons faire, c'est renvoyer la solution à plus tard. C'est extrêmement grave !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre les amendements n°s 47 et 48.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. M. Philippe Adnot a parfaitement raison.
M. Emmanuel Hamel. Vous allez donc voter son amendement !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. En bonne logique, nous devrions équilibrer nos comptes et éviter d'accumuler les déficits en reportant, comme nous le faisons, la charge que représentent nos errements actuels sur nos enfants et nos petits-enfants. Cependant, nécessité fait loi, car tous les amendements de plus grande rigueur proposés par la commission des finances ont été rejetés.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Pas tous !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. La quasi-totalité !
Dans ces conditions, nous ne pouvons que constater l'existence d'une différence d'approche. Nous nous infligeons, si je puis m'exprimer ainsi, une très grande rigueur en ce qui concerne les dépenses budgétaires. En revanche, s'agissant des dépenses sociales, compte tenu du caractère sentimental qu'elles comportent toutes, nous ne parvenons pas à nous imposer la même rigueur. Pourtant, le montant global des dépenses - plus de 1 700 milliards de francs - devrait, comme nous l'avons dit, couvrir la totalité des dépenses concernant la solidarité nationale.
Bref, au regard des déficits cumulés - d'abord 110 milliards de francs, puis 140 milliards de francs et maintenant 87 milliards de francs - la CADES, la Caisse d'amortissement de la dette sociale, est un bon outil.
M. François Autain. Très bien !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Techniquement, pas sur le principe ! Il s'agit effectivement d'un bon outil technique. Elle cantonne la dette, elle la limite dans le temps et elle lui affecte une recette fiscale. De ce fait, la CADES est une bonne signature sur la place internationale, et c'est notre seule satisfaction.
Pour le reste, elle est le résultat d'une politique que la commission des finances ne peut approuver.
Cela étant dit, s'agissant de la CADES, deux solutions étaient possibles : ou bien augmenter la CRDS de 0,5 % à 0,7 % - la position de la commission des finances consiste, à l'heure actuelle, plutôt à maintenir les prélèvements obligatoires qu'à les accroître - ou bien prolonger la durée de vie de la CADES.
Nous nous sommes résolus, la mort dans l'âme, en ayant par ailleurs le souci d'une plus grande rigueur financière, à accepter de prolonger de cinq ans la durée de vie de la caisse, mais à condition qu'au 31 décembre 2014 elle cesse d'exister et que cela soit inscrit dans la loi.
Certes, comme je l'ai dit lors de la discussion générale, ce qu'une loi fait, une autre peut le défaire. Cela dit, nous aurons pris date, nous aussi, devant la nation. Il est indispensable de faire un effort de redressement et d'équilibre.
Je vous propose donc, par cet amendement, d'accepter de prolonger de cinq ans la durée de vie de la CADES, mais d'en fixer le terme au 31 décembre 2014, date à laquelle tous ses biens seront dévolus à l'Etat.
L'amendement n° 48 est un amendement de sincérité comptable. En effet, le paragraphe III de l'article 4 de l'ordonnance du 24 janvier 1996 a mis à la charge de la CADES un versement au budget général de 12,5 milliards de francs.
Que représente cette somme ? Elle vise à dédommager l'Etat des charges qu'il supporte du fait de la reprise de la dette des 110 milliards de francs du régime général intervenue en 1994. Comme je l'ai dit, 110 milliards de francs, puis 140 milliards de francs et, aujourd'hui, 87 milliards de francs, voilà les dettes que nous avons accumulées au cours des dernières années.
L'obligation de verser à l'Etat 12,5 milliards de francs qui pesait initialement sur le Fonds de solidarité vieillesse a été transmise à la CADES. En dépit de ce changement, la contrepartie économique et financière de ce versement reste toujours cette dette de 110 milliards de francs. Mais le versement de la CADES est traité comme une recette non fiscale du budget de l'Etat.
A plusieurs reprises, la Cour des comptes a fait valoir qu'une telle procédure comptable consistait à minorer artificiellement le déficit budgétaire. Les comptables nationaux partagent ce sentiment. La commission des finances propose donc que, à compter de 1998, seule la partie du versement de 12,5 milliards de francs correspondant aux charges d'intérêts supportées par le budget de l'Etat au titre de la dette de 110 milliards de francs puisse faire l'objet d'un versement au budget général. Le reste, c'est-à-dire la partie du versement correspondant au remboursement du capital de la dette, sera bien versé au Trésor, mais ne sera pas susceptible d'être inscrit au budget de l'Etat. Il sera versé au compte de trésorerie distinct visé à l'article 30 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant la loi organique relative aux lois de finances.
Notre assemblée doit adopter cet amendement. Il s'agit, je le répète, d'un amendement de sincérité comptable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 52, 47 et 48 ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. En ce qui concerne l'amendement n° 52, je partage votre raisonnement, monsieur Adnot, et j'allais dire votre souci de pureté. Cependant, je comprends le point de vue de l'exécutif. S'agissant d'une dette qui a été accumulée par l'ensemble de nos concitoyens, on ne peut en laisser la charge aux organismes de sécurité sociale, comme cela a été le cas l'année dernière où l'ACOSS a enregistré 3 milliards de francs de frais financiers. En effet, si nous ne la transférons pas à la CADES, cela se traduira nécessairement par un emprunt...
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Bien sûr !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. ... qui pèsera pour 3 milliards de francs sur les comptes de la sécurité sociale et qui ne permettra ni de mieux soigner les malades, ni d'aider davantage les familles, ni d'accorder un supplément de retraite, puisqu'il s'agit de frais financiers.
Il importe, comme à la SNCF - excusez-moi de la comparaison - de dégager les caisses de sécurité sociale de ces charges, qui sont purement financières, pour leur permettre de se concentrer sur leur métier qui est d'aider les familles, de soigner les malades et d'aider les personnes âgées.
Je crois que c'est effectivement une très mauvaise solution, mais, malheureusement, nous n'en avons pas d'autre et je suis tout à fait conscient - ce que vous avez dit est exact - que nous mettons des bombes à retardement sous les pieds de nos enfants.
Il faudra nous montrer très attentifs pour ne pas recommencer dans les prochaines années des opérations de ce style ; mais, dans l'état actuel des choses, je ne peux qu'être défavorable à votre amendement n° 52, monsieur Adnot.
C'est d'ailleurs pourquoi je suis favorable à l'amendement n° 47 de M. Oudin. De la sorte, ce dernier ne pourra pas dire que, jusqu'à la fin du débat, les amendements de la commission des finances auront été repoussés par la commission des affaires sociales !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. C'est le lot de consolation !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Mais il n'est pas si mal !
Nous sommes d'ailleurs prévoyants au point d'imaginer ce qui se passera en 2014. Vous voyez, monsieur Adnot, que nous pouvons être préservés de l'accusation d'imprévoyance !
Nous sommes également favorables à l'amendement n° 48. Certes, il comporte des difficultés techniques : dans la mesure où la reprise d'une dette contractée en 1993 ne s'analyse pas comme une opération en capital, les remboursements de cette dette ne peuvent être analysés de cette sorte. Sans méconnaître ces obstacles techniques, je fais cependant tout à fait confiance à la commission des finances pour les surmonter.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 52, 47 et 48 ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable aux trois amendements.
Je pense que M. Adnot a bien compris que nous partageons les sentiments de M. le rapporteur sur l'amendement n° 52.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur pour avis, vos amendements n°s 47 et 48 sont sans objet puisque la liquidation de la CADES est déjà prévue.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. La liquidation n'est pas prévue dans la loi !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Mais si, elle l'est !
Nous estimons, de surcroît, que cet argent devrait revenir aux caisses et non pas au budget de l'Etat.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Bien sûr ! C'est tout à fait vrai !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 52.

M. Philippe Adnot. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Adnot.
M. Philippe Adnot. Je maintiens, bien sûr, mon amendement : imaginons une dette dont l'annuité est de 12,5 milliards de francs. Cette dette augmenterait d'un peu plus de 80 milliards de francs et nous ferions passer l'annuité à 12 milliards de francs ? Quel gestionnaire, constatant une augmentation de sa dette, diminuerait son annuité en pensant que cela apporterait une solution à ses problèmes ? C'est très grave !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 52, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 47, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 48, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 25, modifié.

(L'article 25 est adopté.)

Plafonds d'avances de trésorerie

M. le président. Par amendement n° 29, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet intitulé, avant l'article 26.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Il s'agit d'un amendement de forme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé avant l'article 26 est supprimé.

Article 26



M. le président.
« Art. 26. _ Les besoins de trésorerie des régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres et des organismes ayant pour mission de concourir à leur financement peuvent être couverts par des ressources non permanentes dans les limites suivantes :

(en milliards de francs)
« Régime général 20,0
« Régime des exploitants agricoles 8,5

« Caisse nationale de retraite des agents des

collectivités locales 2,5

« Caisse autonome nationale de sécurité sociale

dans les mines 2,3

« Fonds spécial des pensions des ouvriers des

établissements industriels de l'Etat 0,5

« Les autres régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres, lorsqu'ils disposent d'une trésorerie autonome, ne sont pas autorisés à recourir à des ressources non permanentes. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 26, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
A. - De rédiger comme suit la première ligne du tableau figurant à cet article :
« Régime général, 15. »
B. - De supprimer la troisième ligne de ce même tableau.
Par amendement n° 49, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose de supprimer la troisième ligne du tableau figurant à l'article 26.
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 26.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. J'espère que le dernier amendement présenté par la commission - je ne parle pas de l'article 1er, dont nous allons discuter dans un instant - va réveiller ceux de nos collègues qui ont bien voulu rester aussi tard (Exclamations sur de nombreuses travées.)...
M. Guy Fischer. Nous ne sommes pas endormis !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. ... puisqu'il concerne la CNRACL, caisse à laquelle le Sénat a toujours été extrêmement attentif.
La commission des affaires sociales vous propose de rétablir au niveau fixé par le projet initial le plafond des avances de trésorerie du régime général et de supprimer celui qui est prévu pour la CNRACL.
S'agissant du régime général, il est anormal d'accorder des marges aussi élevées par rapport au déficit prévisionnel de 12 milliards de francs. D'ailleurs, je ne comprends pas pourquoi on a évoqué des marges aussi élevées, car tout dépassement devra être clairement justifié devant le Parlement.
Je vous prie, madame le ministre, de bien vouloir m'excuser de faire des procès d'intention, mais on a le sentiment qu'en autorisant des marges aussi élevées on donne une sorte d'autorisation de mauvaise gestion aux gestionnaires des caisses. Je sais que ce n'est pas ce que vous voulez faire, mais c'est comme cela que des mauvais esprits pourraient l'interpréter.
Nous sommes donc totalement contre le niveau fixé pour ces marges.
L'amendement adopté à l'Assemblée nationale visait à prendre en considération le coût du basculement des cotisations maladie vers la CSG. Nous voudrions savoir une nouvelle fois, madame le ministre, si ce coût a été évalué.
En ce qui concerne la CNRACL, la mesure visant à lui permettre de recourir à des avances de trésorerie à hauteur de 2,5 milliards de francs est inacceptable.
Chacun le sait, le régime est structurellement excédentaire : trois cotisants pour un retraité. Il est déséquilibré essentiellement en raison des versements de surcompensation effectués à concurrence de 10 milliards de francs chaque année. C'est donc ce régime de surcompensation qui doit être remis à plat en priorité.
Par ailleurs, 2,5 milliards de francs représentent un trimestre d'acomptes de surcompensation. Autrement dit, la CNRACL pourrait parfaitement différer d'un trimestre ses versements sans être obligée d'emprunter dans des conditions forcément défavorables sur le marché, ce qui génère des frais financiers. En effet, la Caisse des dépôts et consignations, qui est le gestionnaire de ce régime, ne peut être à la fois son banquier, et la CNRACL ne bénéficiera donc pas des conditions les plus favorables, le président de cette caisse nous l'a dit lui-même.
Enfin, il s'agit d'une mesure ponctuelle et non concertée, qui est tout à fait insatisfaisante. Le président de la CNRACL, qui n'est pourtant pas un de vos adversaires politiques, nous a dit qu'il n'avait pas du tout été consulté dans cette affaire.
La CNRACL attend depuis plusieurs années une réforme structurelle de son financement qui lui garantisse l'équilibre financier.
Je crois qu'au moins sur la deuxième partie de cet amendement, concernant la CNRACL, nous pourrions obtenir l'unanimité du Sénat.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 49.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Monsieur le président, cet amendement est satisfait par l'amendement n° 26.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 26 et 49 ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Défavorable.
Je me suis déjà longuement exprimée sur la CNRACL. D'ores et déjà et pour cette année, le Gouvernement a décidé de repousser une partie des acomptes de compensation sur le début de l'année 1999.
Pour le reste, nous travaillons, vous le savez, sur ce régime comme sur les autres.
Je n'aurais pas eu d'objections à ramener le plafond d'avances de trésorerie du régime général à 15 milliards de francs - je l'avais demandé, d'ailleurs, à l'Assemblée nationale - si les mesures proposées par le Gouvernement avaient été adoptées ; mais, compte tenu de l'accroissement du déficit prévisionnel pour 1998, conséquence des amendements que vous avez adoptés, je pense qu'un plafond de 15 milliards de francs pourrait être insuffisant. Je m'oppose donc également à cet aspect de votre amendement.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je tiens à préciser de manière claire que ni la commission des affaires sociales du Sénat ni les sénateurs n'ont aggravé le déficit prévu pour 1998.
M. François Autain. Mais si !
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Le Sénat a bien voulu voter la majoration de la CSG affectée à la branche famille pour compenser la non-suppression des allocations familiales en direction des ménages aisés et, en contrepartie, nous avons fait des économies, réduit l'ONDAM et majoré la taxe sur les tabacs. Il n'y a donc pas d'aggravation du déficit.
Je m'inscris en faux contre ce que vient de dire Mme la ministre : à l'issue du débat au Sénat, le déficit est de 12,7 milliards de francs, c'est-à-dire qu'il est analogue à celui qui figure dans le texte adopté par l'Assemblée nationale. Je défie le Gouvernement de m'apporter la preuve du contraire !
Quant à la CNRACL, il a fallu un estomac formidable aux acteurs financiers de ce pays pour avoir, depuis dix ans, vidé consciencieusement tous les excédents de cette caisse de retraite - pour financer, par exemple, le déficit de la caisse de retraite de la SNCF - et pour nous proposer aujourd'hui d'autoriser cette caisse à emprunter alors que le seul problème auquel elle est confrontée est le respect du calendrier des versements de compensation démographique et de surcompensation.
Il faut vraiment avoir l'esprit tordu pour inventer des mécanismes de cette nature, je tiens à le dire de la manière la plus claire en ma qualité de président du comité des finances locales.
M. Paul Blanc. C'est pour enrichir les banquiers !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur Fourcade, il doit y avoir beaucoup d'esprits tordus dans le monde politique auquel nous appartenons les uns et les autres, puisque ce régime fonctionne de cette manière-là depuis, comme vous l'avez dit, une bonne dizaine d'années. Mais ce n'est pas pour cela qu'il ne faut pas essayer d'affronter cette réalité, et c'est ce que nous allons essayer de faire.
Dès mon intervention liminaire, j'ai dit que je craignais que, par vos propositions, le déficit ne s'accroisse si celles-ci devaient être retenues. Et je n'ai toujours pas obtenu les réponses aux questions que j'avais posées.
Sur quoi allez-vous prendre les économies de gestion de 1,4 milliard de francs de la CNAM ? Où va-t-on réaliser les 3,5 milliards de francs d'économies sur l'ONDAM ? Comment va-t-on financer le transfert du RMI de l'Etat de 1 milliard de francs ?
Ce sont des questions parmi d'autres parce que, par exemple, vous considérez aussi que le 0,1 % de CSG va vous rapporter 4,6 milliards de francs alors qu'en fait il ne va pas être appliqué en année pleine.
Vous comprendrez que, si j'additionne un certain nombre de mesures de cette nature, je me pose un certain nombre de questions sur la façon dont ces économies pourraient être réalisées. Je suis perplexe sur le résultat du déficit que vous affichez !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. A la suite de l'intervention de Mme le ministre, je formulerai quelques remarques.
Cette discussion sur la réalité des comptes aurait été moins confuse si vous aviez répondu, vous et vos services, madame le ministre, aux demandes d'information que nous vous avons adressées par écrit le 24 octobre. En effet, nous n'avons reçu aucune réponse à ce jour sur le rendement que vous escomptez de votre dispositif.
Vous nous faites des procès d'intention sur ce que rapportera telle ou telle mesure. Eh bien, madame le ministre, quand on bascule plus de quatre points de cotisations d'assurance maladie vers la CSG, en ignorant aujourd'hui ce que rapportera toute la partie non salariale,...
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je l'ai dit : 500 millions de francs !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. ... c'est que l'on a bien des incertitudes sur un budget qui est beaucoup plus global que le nôtre. Et ces incertudes sont bien plus fortes que les nôtres, qui portent peut-être sur 1 milliard de francs, alors que vous vous fondez sur une masse considérable : 300 milliards de francs. Et vous nous indiquez que votre budget est équilibré à 500 millions de francs près ?
Alors, madame le ministre, je dois vous dire très sincèrement, incertitudes contre incertitudes, que nous ne saurons sans doute pas ce que notre budget aurait donné à la fin de l'année puisque, probablement, au terme de la navette, il ne sera pas adopté ; mais je prends le pari que, à la fin de l'année, nous mesurerons les écarts avec les prévisions que vous avez faites aujourd'hui.
M. Paul Blanc. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 49 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 26, ainsi modifié.

(L'article 26 est adopté.)
M. le président. Nous en revenons à l'article 1er et au rapport annexé, qui ont été précédemment réservés.

APPROBATION DU RAPPORT

Article 1er et rapport annexé
(précédemment réservés)



M. le président.
« Art. 1er. _ Est approuvé le rapport annexé à la présente loi relatif aux orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et aux objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale pour l'année 1998. »
Je donne lecture du rapport annexé :

« Rapport du Gouvernement
présentant les orientations de la politique de santé
et de sécurité sociale et les objectifs
qui déterminent les conditions générales
de l'équilibre financier

« La loi organique du 22 juillet 1996 a prévu que la loi de financement de la sécurité sociale approuverait chaque année un rapport définissant les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les conditions générales de l'équilibre de la sécurité sociale.
« Préserver, améliorer, renforcer notre système de protection sociale, donner à chacun la meilleure chance de garder la santé, tels sont les objectifs du Gouvernement à l'occasion de cette loi de financement. Ils s'expriment dans trois priorités :
« _ améliorer la santé : l'objectif de la politique de santé, c'est d'identifier au mieux les besoins de santé des populations, de développer et d'organiser au mieux les moyens de prévention comme de soins pour y répondre ;
« _ réduire les inégalités et prêter une attention particulière aux plus fragiles, tout en consolidant l'universalité de la sécurité sociale ;
« _ retrouver l'équilibre financier de la sécurité sociale, condition de sa pérennité, à la fois par un financement plus assuré et plus équitable et par une maîtrise des dépenses au service de l'impératif de meilleure utilisation des ressources.
« Condition de la cohésion sociale, élément essentiel de la garantie des droits fondamentaux, outil majeur de solidarité, la protection sociale concerne tous les citoyens. C'est à eux qu'il appartient, en définitive, de définir les priorités de la protection sociale et le volume global de moyens que la collectivité entend y consacrer. C'est le sens de l'intervention du Parlement, essentielle pour débattre et fixer les objectifs de la protection sociale. Cette exigence de démocratie doit se retrouver sur le terrain, dans la construction des priorités concrètes de l'action, en particulier dans le domaine de la santé. Elle se traduit aussi dans le rôle des caisses de sécurité sociale et de leurs conseils d'administration. Elle suppose une plus grande transparence sur l'état sanitaire et social de notre pays et le fonctionnement de notre système de protection sociale.
« 1. Une politique de santé au service des populations :
« Au regard des indications très synthétiques que sont l'espérance de vie totale et l'espérance de vie sans incapacité, l'état de santé de la population française apparaît satisfaisant, que ce soit par référence à des pays comparables ou que ce soit en termes d'évolution. L'espérance de vie s'allonge et les années de vie gagnées sont des années de vie en bonne santé.
« Il subsiste cependant un écart très important entre l'espérance de vie à la naissance des femmes _ 81,9 ans _ et celle des hommes _ 74,0 ans _ en 1996 (données provisoires). La mortalité prématurée est importante par rapport aux autres pays. Elle est notamment liée à l'alcoolisme, au tabagisme, mais aussi aux accidents et morts violentes. De nouvelles maladies iatrogènes ou transmissibles se développent. En outre, demeurent des inégalités importantes entre groupes sociaux et entre régions. En 1993, l'espérance de vie des hommes est de 70,4 ans dans le Nord - Pas-de-Calais et de 75,1 ans en Midi-Pyrénées ; pour les femmes, respectivement, 79,4 et 82,4 années. Et l'on constate une accentuation de ces disparités dans les années récentes. Certains groupes sociaux sont de plus en plus vulnérables.
« Ces situations sont, pour partie, la conséquence de l'évolution des conditions socio-économiques, et notamment de la montée du chômage, de la précarité et de l'exclusion. Elles appellent aussi une politique de santé publique renforcée, qui tire le meilleur parti de l'ensemble des moyens de santé, au service des populations.
« 1.1. L'impératif de la participation :
« La politique de santé concerne tout le monde, professionnels de santé, élus, associations et, en définitive, chaque citoyen. Leur participation à la construction des priorités de santé est une condition pour atteindre les objectifs de la politique de santé : une meilleure réponse aux besoins de la population, une plus grande efficacité du système de soins et de tout ce qui peut concourir à une meilleure utilisation des masses financières affectées à la couverture maladie, une amélioration de la qualité, une meilleure adhésion des populations à ces choix. C'est pourquoi le Gouvernement mettra en oeuvre des Etats généraux de la santé, en liaison avec la Conférence nationale de santé, qui se concluront à l'automne prochain. Il s'agit de permettre l'organisation d'un très large débat public autour des objectifs de santé, des droits des patients et de l'organisation du système de soins. Ces Etats généraux comporteront une première étape, au niveau régional, à laquelle seront associées les conférences régionales de santé. Par ailleurs, le Gouvernement étudiera la possibilité de doter, d'une part, la Conférence nationale de santé de moyens lui permettant de définir des orientations précises pour la prise en charge des soins et, d'autre part, les conférences régionales de santé de moyens et de structures permanentes afin de suivre, en liaison avec les observatoires régionaux de santé, l'évolution des besoins de santé et de la situation sanitaire des populations et de mieux préparer leurs travaux.
« Dans le même esprit, et en liaison étroite avec ces démarches, afin de disposer rapidement de documents d'orientation servant de base à la nécessaire recomposition des établissements de santé, les schémas régionaux d'organisation sanitaire seront remis en chantier avec un double objectif : partir des besoins de santé des populations et impliquer, dans leur élaboration, toutes les parties concernées, dès l'amont de celle-ci.
« Par ailleurs, la création, en 1998, au sein du ministère, dans le champ de la santé et des affaires sociales, d'une direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques devrait permettre de disposer de données d'ensemble cohérentes à partir des productions des systèmes d'information existants dans le domaine de la santé et, plus largement, du social.
« Son action favorisera la mise en cohérence, la transparence des différents éléments d'information disponibles, la production de nouveaux matériaux et la recherche, au service des pouvoirs publics, des décideurs de toute nature, des professionnels, de la population, et, en définitive, du débat public. Elle s'appliquera en particulier à mettre en place, en liaison avec les caisses nationales de la sécurité sociale, un outil de suivi des objectifs de dépenses par branche de l'ensemble des régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants votés par le Parlement.
« 1.2. Une politique de la santé publique renforcée :
« Réunie les 30 juin, 1er et 2 juillet 1997 à Lille, la Conférence nationale de santé a souligné la permanence des orientations qu'elle avait exprimées en 1996 et mis l'accent sur quatre objectifs :
« _ renforcer la prévention et la promotion de la santé des enfants, des adolescents et des jeunes ;
« _ améliorer la prévention, le dépistage et la prise en charge des cancers ;
« _ diminuer l'incidence des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ;
« _ réduire les inégalités de santé inter et intrarégionales.
« Le Gouvernement partage les priorités de la Conférence nationale de santé. Il agira, en particulier, dans les directions suivantes :
« 1.2.1. L'impératif de prévention :
« 1.2.1.1. Renforcer l'action à l'égard de l'alcoolisme et du tabagisme qui sont responsables de plus de 20 % des décès :
« A cet égard, le Gouvernement confirme sa volonté d'appliquer intégralement la loi Evin et son opposition à toute dérogation concernant la publicité en faveur de l'alcool, même lorsqu'il s'agit de la Coupe du monde de football en 1998. Les taxes sur le tabac sont relevées de 1,3 milliard de francs, qui serviront à financer des actions de prévention et d'éducation sanitaire concernant, notamment, la lutte contre l'alcoolisme, le tabagisme et la toxicomanie.
« Le dispositif spécialisé de lutte contre l'alcoolisme (centres d'hygiène alimentaire et d'alcoologie), qui pratique une prise en charge globale, à la fois sanitaire et sociale, sera renforcé. Le Gouvernement entend améliorer, en 1998, sa reconnaissance juridique et la prise en charge financière des soins qu'il administre.
« 1.2.1.2. Développer la promotion de la santé des enfants, des adolescents et des jeunes :
« Cette priorité s'insère dans l'objectif plus large d'un renforcement des actions auprès de la jeunesse, dans le cadre scolaire et extrascolaire.
« La promotion de la santé en milieu scolaire sera renforcée en développant d'une part l'éducation sanitaire qui relève de l'enseignement et, d'autre part, les services de santé scolaire qui relèvent de la médecine scolaire. Le Gouvernement développera les services de médecine scolaire, en particulier en facilitant des reconversions de médecins libéraux dans la médecine scolaire et en favorisant l'accès des médecins de ville en milieu scolaire. Les services de médecine scolaire devront organiser, en lien avec les chefs d'établissement, l'éducation à la santé dès le primaire.
« Le Gouvernement entend simplifier les dispositifs et améliorer la coordination des intervenants en matière de santé des enfants et des adolescents. Des expériences pilotes seront menées dès 1998, et notamment dans le cadre des programmes régionaux de santé. Le problème de l'accueil, de la prise en charge et du suivi des jeunes en souffrance sera prioritairement examiné.
« La prévention du saturnisme infantile sera renforcée. Un programme systématique de dépistage des intoxications au plomb sera mis en place en 1998. Parallèlement, le dépistage des immeubles à risque et le programme de réhabilitation seront étendus à l'ensemble du territoire national.
« Un programme de prévention bucco-dentaire est mis en place par la CNAMTS (Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés) dans le cadre d'un accord entre celle-ci et l'Etat.
« 1.2.1.3. Améliorer la prévention et le dépistage des cancers :
« Outre les mesures contre l'alcoolisme et le tabagisme, qui sont une cause essentielle de surmortalité par le cancer dans notre pays, sera développé, dans le cadre d'un accord entre l'Etat et la CNAMTS, un programme renforcé de dépistage. En particulier, le dispositif de dépistage systématique des cancers du sein et du col de l'utérus sera renforcé afin de couvrir l'ensemble du territoire, d'ici à l'an 2000.
« Pour garantir la chaîne de qualité dans le dépistage, sera créé, d'ici à la fin de cette année, un comité national de pilotage du dépistage.
« 1.2.2. Le renforcement des actions de santé publique :
« 1.2.2.1. Lutter contre les infections nosocomiales et les affections iatrogènes :
« Dans ces domaines, notre pays a un effort particulier à faire. Le Gouvernement a décidé d'accélérer la mise en place des équipes opérationnelles d'hygiène hospitalière, ce qui implique des engagements supplémentaires de 182 millions de francs sur trois ans. De même, sera engagée la généralisation de ce processus dans les établissements privés. En particulier, sera étendue l'obligation de mise en place des comités de lutte contre les infections nosocomiales. En outre, l'INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) entame une expertise collective sur les maladies et accidents dus aux médicaments et à leurs modalités de prescription.
« 1.2.2.2. Renforcer la lutte contre les maladies transmissibles :
« Le sida : au cours de l'année 1997, la lutte contre l'infection VIH s'est caractérisée notamment par l'efficacité des associations thérapeutiques antirétrovirales. Même si ces traitements comportent des limites (effets secondaires, résistances, incertitude sur l'efficacité à long terme), on a constaté une diminution importante des nouveaux cas de sida depuis un an. Cependant, on estime de 4 à 5 000 par an les nouvelles contaminations. Et l'accès au dépistage n'est pas suffisant puisqu'un tiers des personnes atteintes ne connaissent leur infection qu'au stade de la maladie. Plus que jamais, l'attention doit être portée sur la prévention. L'information du public et la formation des professionnels seront renforcées en 1998, de façon coordonnée, en prenant en compte ces éléments. Enfin, la prise en charge du VIH par la médecine de ville et la mise en place des réseaux de soins seront développées dès la fin 1997 et en 1998.
« L'hépatite C est une infection grave. Sa prévalence dans la population générale est estimée à environ un demi-million de personnes, dont un quart seulement connaît son statut sérologique. Le Gouvernement mènera en 1998 une politique active d'incitation au dépistage de l'hépatite C, à travers un élargissement des missions des centres de dépistage anonymes et gratuits, le développement d'une stratégie de dépistage, fondée sur le volontariat, notamment en milieu pénitentiaire, un développement des réseaux ville-hôpital " hépatite C ".
« l.2.2.3. Poursuivre la lutte contre la toxicomanie et la politique de réduction des risques en direction des usagers de drogues :
« Le Gouvernement renforcera les stratégies de prévention en direction des plus jeunes avec le souci d'une approche globale. Les lieux de prévention et d'orientation vers des prises en charge sanitaires et sociales, notamment en direction des toxicomanes sortant de prison et des plus marginalisés, seront augmentés. La coordination entre la médecine de ville, l'hôpital et les centres spécialisés sera renforcée. Les crédits de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et la toxicomanie seront renforcés en 1998.
« 1.2.2.3. bis. Lutter plus efficacement contre le dopage en matière sportive :
« La prévention et le contrôle des substances dopantes seront renforcés. La recherche contre le dopage sera accrue, notamment en vue de permettre le dépistage de substances actuellement indétectables.
« 1.2.2.4. Développer une politique active des soins palliatifs. Faire de la lutte contre la douleur une priorité de santé publique :
« Un premier plan d'action sera mis en oeuvre en 1998 comportant une information large du public, un renforcement de la formation initiale et continue des médecins et une amélioration de l'organisation des soins. Par ailleurs, le Gouvernement établira, avant la fin de l'année 1998, un bilan de l'application des dispositions de la loi hospitalière du 31 juillet 1991 prévoyant que les établissements de santé mettent en oeuvre les moyens, définis dans leur projet d'établissement, propres à prendre en charge la douleur des patients qu'ils accueillent et ont l'obligation de leur dispenser les soins palliatifs que requiert leur état.
« 1.2.2.5. Prévenir, reconnaître et traiter en tant que tels les maladies professionnelles et les accidents du travail :
« Une politique forte s'avère nécessaire dans ce domaine, avec un dispositif de reconnaissance des maladies professionnelles et des accidents du travail. Il conviendra de renforcer le rôle et les moyens de la médecine du travail et des comités d'hygiène et de sécurité. Un rapport sera présenté sur ces points au Parlement à l'appui de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999.
« 1.2.3. Une nouvelle impulsion à la veille et à la sécurité sanitaire :
« Après la réforme de l'organisation sanitaire en 1992 et au début de l'année 1993 _ qui a vu notamment la création du Réseau national de santé publique, de l'Agence du médicament et de l'Agence française du sang _, le Gouvernement souhaite franchir une nouvelle étape pour tenir compte de l'évolution de notre système de santé et pour que l'Etat s'organise afin de conduire une politique active de prévention du risque.
« Le renforcement de la veille et de la sécurité sanitaire passe d'abord par la mise en place de trois institutions nouvelles :
« _ l'Institut de veille épidémiologique aura en charge l'observation et la surveillance permanentes de l'état de santé de la population et un rôle d'information et d'alerte des pouvoirs publics à partir des données épidémiologiques recueillies. La création de cet établissement public, par transformation du Réseau national de santé publique, répond à la nécessité de remédier à la dispersion de l'information sur les maladies qui nuit à l'efficacité de la politique de santé publique dans notre pays ;
« _ une agence chargée de la sécurité sanitaire assurera l'évaluation et le contrôle de l'ensemble des produits de santé. Elle assurera des missions, qui sont aujourd'hui réparties entre plusieurs administrations, ou qui ne sont pas suffisamment assurées. Elle sera dotée d'une forte capacité d'expertise interne et externe pour mener à bien ses missions ;
« _ la création d'une agence chargée de la sécurité alimentaire répond à l'impératif d'une politique active dans le domaine de la protection de la santé au regard des risques d'origine alimentaire, dont la crise de l'encéphalopathie spongiforme bovine a montré l'importance.
« L'efficacité de la sécurité sanitaire _ au-delà des responsabilités fondamentales que l'Etat doit assumer _ repose aussi sur la participation de tous, en particulier des professionnels de santé. Le Gouvernement s'emploiera à ce que celle-ci soit une composante importante des actions de formation, des projets d'établissement et de la politique d'évaluation et de recherche. L'évaluation des pratiques professionnelles, la diffusion de recommandations doivent s'inscrire dans cette perspective.
« Un crédit de 80 millions de francs est prévu en loi de finances pour renforcer les moyens des institutions en charge de la sécurité sanitaire. Au total, les programmes et dispositifs de l'Etat en faveur de la protection sanitaire de la population (hors programme spécifique de lutte contre l'alcoolisme, le tabagisme, la toxicomanie et le SIDA) se montent à 490 millions de francs, en augmentation sensible par rapport à 1997 (430 millions de francs).
« En outre, la convention entre l'Etat et la CNAMTS permettra de dégager 300 millions de francs pour de nouvelles actions de prévention respectant les priorités de santé publique retenues par la Conférence nationale de santé et le Parlement dans la loi de financement de la sécurité sociale. Enfin, le renforcement de l'implication des généralistes dans la prévention et leur participation aux actions de santé publique décidées dans le cadre de l'option conventionnelle devraient également favoriser cette nouvelle impulsion de la politique de santé publique.
« 1.3. Un système de soins plus efficace et tourné vers les besoins de santé :
« L'engagement et la compétence des personnels, à la ville et à l'hôpital, le haut niveau technique des installations permettent à notre système de soins de dispenser, globalement, des soins de haute qualité. En même temps, il subsiste des pertes d'efficience, des gaspillages, conjointement à des besoins mal satisfaits. Les difficultés d'accès aux soins des plus démunis, comme les fortes inégalités inter et intrarégionales et entre catégories sociales, sont des illustrations de cet état de fait. Parallèlement, le vieillissement durable de la population réclame, à l'évidence, le développement de capacités de soins spécifiques.
« Les comparaisons menées avec les pays voisins montrent que la dépense de santé est relativement élevée dans notre pays malgré un taux de remboursement moyen parmi les plus bas. Il existe, à l'évidence, des marges de manoeuvre pour que, tout à la fois, notre système de santé réponde, dans les meilleures conditions, à des besoins croissants de la population, tout en améliorant son efficience globale. C'est la volonté forte du Gouvernement de mener à bien ce double objectif en s'appuyant sur l'engagement des professionnels et des populations, sans lequel rien de profond ni de durable n'est possible.
« 1.3.1. Dégager les priorités des systèmes de soins, à partir des besoins de santé :
Si on veut tout à la fois maîtriser les dépenses de santé, améliorer la qualité des soins et répondre aux besoins légitimes et croissants de la population, une recomposition progressive de notre système de soins, appuyée sur les besoins de santé, est indispensable. La définition de ces besoins doit s'appuyer naturellement sur les comparaisons statistiques, les données épidémiologiques, les travaux d'experts, mais aussi sur les points de vue des professionnels et les attentes des populations. C'est dans cet esprit que le Gouvernement va lancer les Etats généraux de la santé. C'est avec la même préoccupation que le Gouvernement met en place un nouveau processus d'élaboration des SROS (schémas régionaux d'organisation sanitaire), qui se mettra en oeuvre dès la fin 1997, pour la construction d'une nouvelle génération de ces schémas, selon une méthode d'élaboration interactive, avant la fin de l'année 1998. Le point de départ de la démarche sera la prise en compte des besoins de santé et des conditions de vie et de déplacement des populations. A partir de ces éléments, les nouveaux SROS définiront la part qui revient à l'hospitalisation dans la satisfaction de ces besoins et, corrélativement, éclaireront la place de la médecine de ville et les liens entre le sanitaire et le médico-social. L'implication des professionnels, des élus et de la population sera effective à toutes les étapes et pas seulement en fin de parcours. Les conférences régionales de santé seront étroitement associées à ce processus. L'animation de cette démarche reposera à la fois sur les agences régionales de l'hospitalisation (ARH), appuyées par les directions régionales d'administration sanitaire et sociale et les caisses régionales d'assurance maladie, et sur l'engagement de professionnels et de personnalités ayant une légitimité dans le domaine de la santé. Ces démarches doivent tout à la fois améliorer la pertinence des schémas, asseoir leur légitimité aux yeux des élus et des populations et renforcer leur opérabilité.
« 1.3.2. Consolider le rôle de l'hôpital par une recomposition progressive du tissu hospitalier et une amélioration de son organisation interne . »
« L'hôpital est une composante centrale de notre système de soins. Développant les technologies les plus modernes, il est en même temps ouvert à toutes les catégories sociales. S'appuyant sur un personnel mobilisé et de haute qualification, il rend de grands services à la population. Cet apport est essentiel. Le Gouvernement tient à le souligner. Il se traduira, en 1998, dans l'évolution des budgets hospitaliers, sensiblement supérieure à celle que nous avons connue en 1997.
« En s'appuyant sur les nouveaux SROS, les ARH mèneront une politique active de recomposition du tissu hospitalier, avec le souci du décloisonnement des différentes composantes de l'offre de soins et des découpages actuels des secteurs sanitaires et du développement de réseaux. A partir d'une vision d'ensemble des enjeux de santé sur leur territoire, et avec le souci d'une légitimité démocratique renforcée, les ARH passeront avec les hôpitaux des contrats pluriannuels, qui traduiront leurs priorités stratégiques, telles qu'elles doivent ressortir des SROS, en prenant en compte leur projet d'établissement.
« La recomposition du tissu hospitalier reposera sur trois critères indissociables : le besoin, la qualité et l'efficience. L'hôpital doit en priorité répondre aux besoins de la population, qui évoluent dans leur nature, dans leur ampleur et dans leur localisation. L'hôpital doit, en outre, offrir des prestations de qualité conformes aux exigences professionnelles et dans le respect des normes de sécurité. L'hôpital, enfin, doit être une organisation efficiente.
« Les inégalités à l'intérieur du système hospitalier seront combattues. Le Gouvernement veillera à assurer une plus grande transparence dans les procédures relatives aux relations entre l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et l'agence régionale de l'hospitalisation d'Ile-de-France. La politique de réduction des inégalités entre régions sera poursuivie, à partir de critères affinés comme le recommande la Conférence nationale de santé, en s'appuyant notamment sur les travaux du Haut Comité de la santé publique. En outre, les inégalités entre établissements seront également réduites en tenant compte de la disparité qui peut exister entre la zone d'influence d'un établissement et le découpage administratif auquel il est soumis. Enfin, l'objectif des cliniques privées sera régionalisé, comme le prévoit la loi, afin de rapprocher les modes de régulation des deux secteurs de l'hospitalisation.
« Pour faciliter ces évolutions, l'Etat met en place un fonds de modernisation hospitalière, doté de 500 millions de francs (en autorisations de programme), dès 1998, destiné à financer des investissements nécessaires à la recomposition. Parallèlement, un fonds de 300 millions de francs financé par l'assurance maladie facilitera les adaptations sociales liées à ces évolutions.
« Une impulsion aux actions de réorganisation interne des hôpitaux sera donnée dans le triple souci de l'amélioration de la qualité des soins, du renforcement de l'efficience et de l'amélioration des conditions de travail du personnel. Dans le même esprit, seront étudiés les moyens d'améliorer les modes de gestion interne de l'hôpital. Sur la base des observations de la Cour des comptes relatives à l'activité libérale des praticiens hospitaliers, une attention particulière sera portée à l'évolution des règles d'encadrement de cette activité libérale et à leur contrôle.
« L'objectif de qualité des soins sera renforcé, grâce au développement des procédures d'accréditation et de l'évaluation des pratiques, outils au service de l'hôpital, des professionnels et, en définitive, des patients. C'est dans cet esprit que l'ANAES (Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé) développera son activité, en lançant, dès réception des premières demandes, les premières procédures d'accréditation des établissements de santé.
« 1.3.3. Impliquer les professionnels dans la régulation de la médecine de ville :
« Les dépenses de médecine de ville sont le résultat de millions d'actes et de prescriptions réalisés par de très nombreux professionnels. L'évolution des connaissances, des techniques, des médicaments conduit à une évolution des pratiques. La diversité des patients et de leurs modes de vie rend inévitable une multiplicité des pratiques médicales.
« C'est dans ce contexte qu'il faut concevoir la régulation des dépenses de médecine de ville. Celle-ci s'appuie sur deux types de dispositifs, tous deux nécessaires, tous deux, en eux-mêmes, insuffisants :
« _ la régulation globale qui s'articule autour d'objectifs, d'enveloppes et de mécanismes propres à assurer leur mise en oeuvre. Fixer ainsi un cadre général à l'évolution des dépenses est nécessaire pour assurer la pérennité de notre système de couverture maladie, qui ne survivrait ni au déficit permanent ni à la hausse constante de cotisations ou à la diminution des remboursements. Pour autant, ces objectifs ne garantissent pas en eux-mêmes la qualité des soins ni l'adéquation des ressources aux besoins ;
« _ la maîtrise médicalisée qui vise à bannir les pratiques dangereuses et inutiles, mais plus largement à améliorer, en continu, les interventions des professionnels. Personne ne conteste la nécessité d'éviter des gaspillages. Mais cela ne passe pas seulement par des normes car l'acte médical ne peut s'enfermer dans des protocoles uniformes, et la relation entre un patient et son médecin ou d'autres professionnels de santé n'obéit pas à des standards. Et il ne s'agit pas seulement de combattre les fautes et les déviances, mais aussi de permettre une amélioration permanente des pratiques professionnelles.
« Le Gouvernement entend donc mener une politique de régulation des dépenses de médecine de ville, en s'appuyant sur ces deux types de dispositifs, qui sont complémentaires. Cela passe par une implication plus grande des professionnels dans les dispositifs de régulation, qui ne peuvent fonctionner qu'avec leur adhésion et leur participation. Cette perspective repose sur la conviction que les intérêts des professionnels et de la protection sociale, loin d'être antagonistes, sont convergents.
« Le Gouvernement est prêt au dialogue sur les moyens d'améliorer les dispositifs de régulation globale, avec le souci, sauf événement particulier et inattendu, d'assurer le respect des enveloppes fixées en début d'année en fonction de l'objectif national d'évolution des dépenses d'assurance maladie voté par le Parlement dans la loi de financement de la sécurité sociale. Il a indiqué aux représentants des professions qu'il était prêt à étudier leurs propositions. La maîtrise médicalisée doit également évoluer. Organisée aujourd'hui autour des références médicales opposables (RMO), elle doit s'enrichir par la diffusion de recommandations de bonne pratique. C'est, d'ailleurs, un enjeu central de l'option conventionnelle. Le Gouvernement souhaite prendre, en lien avec la profession, des initiatives pour dynamiser l'activité des unions régionales de médecins libéraux en faveur de l'évaluation des pratiques professionnelles, en vue de l'amélioration des soins, d'une participation active à l'informatisation et aux systèmes d'information de santé et, plus largement, de renforcer leur place dans le système de soins et dans les actions en faveur de la santé publique. Il favorisera également le développement d'expérimentations de réseaux de soins, avec le souci de la qualité des soins, de la non-sélectivité des patients, de la coordination des intervenants et de l'économie des moyens mis en oeuvre. Dans ce contexte, la coopération ville-hôpital constitue un objectif essentiel. Le Gouvernement s'emploiera à étudier la situation des infirmières et infirmiers libéraux. Il s'attachera à prendre en compte les spécificités de l'exercice de cette profession, notamment en milieu urbain.
« L'informatisation de notre système de santé peut être un levier majeur pour les progrès de notre système de soins libéral. Provoqué par la volonté d'automatiser les remboursements, il est important que ce projet acquière une dimension plus large au service des professionnels et de la qualité des soins : volet d'information médicale de la future carte d'assuré social, développement des échanges d'informations entre praticiens pour une meilleure cohérence du suivi des patients, diffusion de logiciels d'aide à la prescription et de référentiels de bonnes pratiques, production d'informations à partir des codages des actes et des pathologies à destination tant des praticiens que des caisses et des organismes publics tels que l'Institut de veille épidémiologique.
« Le Gouvernement donnera une impulsion nouvelle à l'informatisation du système de santé, avec le double souci de mettre en place un pilotage cohérent de l'ensemble du projet et de construire un dispositif au service des assurés sociaux, des professionnels et de la qualité des soins.
« Il s'engage à accélérer la révision de la nomenclature.
« 1.3.4. Une attention soutenue à la formation des professionnels de santé :
« Le Gouvernement a engagé une réflexion sur la réforme des études médicales, tenant compte du changement profond du contexte scientifique et culturel de la médecine et de la santé. Cette indispensable rénovation des études médicales doit permettre de prendre en compte les besoins non satisfaits en matière de prévention, de santé publique, et d'encourager l'orientation des étudiants dans des disciplines pour lesquelles se fait jour une pénurie, comme l'anesthésie, l'obstétrique et la psychiatrie. Elle doit s'attacher à promouvoir le rôle des médecins généralistes. Compte tenu de l'urgence de la situation, le Gouvernement présentera au Parlement, au cours de l'année 1998, des propositions en vue d'améliorer les conditions d'exercice des spécialités mentionnées ci-dessus dans les établissements participant au service public hospitalier.
« La formation médicale continue, consacrée comme un devoir professionnel par le code de déontologie, a été rendue obligatoire par les ordonnances du 24 avril 1996. Le caractère obligatoire est rendu indispensable par la rapidité de l'évolution des connaissances.
« Le Gouvernement définira un cadre qui permette au dispositif de la formation médicale continue de fonctionner correctement en répondant aux impératifs de qualité, d'indépendance, de transparence qui, seuls, peuvent garantir son efficacité et son adéquation aux objectifs généraux de la politique de santé. L'organisation de la formation continue doit, en outre, favoriser les échanges entre les différents modes d'exercice professionnel et non pas consacrer les cloisonnements dont souffre notre système de santé.
« La même attention sera portée à la formation des autres professions médicales et des professions paramédicales ainsi qu'à la formation médicale continue hospitalière.
« 1.3.5. Une politique du médicament qui favorise l'innovation et évite les surconsommations :
« Les dépenses de médicaments représentent 15 % des dépenses de santé, soit un niveau élevé à l'intérieur de l'Union européenne, principalement du fait des consommations très élevées de certains produits.
« Pour de nombreuses classes de médicaments, les comparaisons internationales semblent indiquer une surconsommation de médicaments en France. L'Observatoire des prescriptions établira un bilan de l'adéquation entre les prescriptions et les besoins pour les principales classes thérapeutiques, et des objectifs seront définis pour chacune d'elles.
« Sur cette base, sera développée la politique conventionnelle avec les industriels, avec l'objectif global de réduction des volumes d'unités vendues, tout en favorisant la recherche de nouvelles molécules. En outre, le Comité économique du médicament fera appliquer, lors de l'inscription ou de la réinscription des médicaments au remboursement, les règles de conditionnement qui viennent d'être redéfinies par la Commission de transparence. De même, l'objectif de limitation des dépenses promotionnelles sera poursuivi avec une vigueur renforcée, dans le cadre de la politique conventionnelle. La taxe sur la publicité pharmaceutique sera aménagée : son taux sera croissant en fonction de la part des dépenses de promotion dans le chiffre d'affaires ; mais la promotion des médicaments génériques bénéficiera d'un abattement. Le rendement de cette mesure est de 300 millions de francs.
« Parallèlement, l'utilisation de génériques et de médicaments essentiellement comparables sera encouragée. L'option conventionnelle ouvre également, à cet égard, des perspectives qu'il faudra consolider. Enfin, le Gouvernement mettra à l'étude la mise en oeuvre d'un droit de substitution des pharmaciens tenant compte de la nécessaire adhésion des prescripteurs.
« Enfin, la qualité de la prescription pharmaceutique sera améliorée, dans le cadre de l'action globale auprès des prescripteurs, de promotion des « bonnes pratiques ». C'est un enjeu essentiel que d'améliorer l'information des prescripteurs. Il y a là un rôle central pour l'action publique, dans lequel la CNAMTS doit prendre une place déterminante.
« 1.3.6. L'assurance maladie ouverte à tous avec une attention particulière aux plus modestes :
« Le Gouvernement présentera au Parlement, en 1998, un projet de loi permettant la mise en place d'une assurance maladie universelle. Cette réforme, en rupture avec l'organisation actuelle de la Sécurité sociale, vise à offrir à l'ensemble des personnes résidant en France un dispositif garantissant le droit aux prestations en nature de l'assurance maladie. Le système actuel, constitué au fil du temps, est d'une extrême complexité, qui ne garantit pas la sécurité des droits accordés et ne permet pas aux plus défavorisés d'y accéder facilement.
« La réforme mise en place garantira à tous les résidents l'accès à la sécurité sociale et, pour les plus démunis, la prise en charge du ticket modérateur. La prochaine mise en oeuvre de l'assurance maladie universelle a pour corollaire la généralisation de la contribution des résidents à son financement. C'est le sens de la substitution de la CSG à la cotisation maladie.
« 2. Une politique de sécurité sociale axée sur l'approfondissement des solidarités :
« 2.1. Une politique familiale davantage tournée vers les familles modestes :
« L'effort de notre pays en matière de politique familiale, sous forme de prestations sociales et d'aides sociales et fiscales, est important en regard de ce que font les autres pays européens. Il est cependant inégalement réparti. Le Gouvernement souhaite mettre davantage de justice dans les transferts financiers vers les familles, avec le souci d'une appréhension globale de la politique familiale et la volonté de restaurer l'équilibre financier, gravement compromis aujourd'hui, de la branche famille.
« 2.1.1. Des transferts financiers plus justes :
« Aujourd'hui, les allocations familiales ne sont distribuées entre dix-huit et vingt ans que si l'enfant est étudiant ou suit une formation en alternance, sous certaines conditions. Elles ne sont pas attribuées à des familles, souvent modestes, qui conservent des enfants à charge, chômeurs ou sans activité particulière. Le Gouvernement a décidé de corriger cette situation pour les jeunes de dix-huit à dix-neuf ans. A l'inverse, les allocations familiales ne seront plus versées pour les familles qui disposent d'un revenu net supérieur à 25 000 francs. Ce plafond est majoré de 7 000 francs pour les biactifs et les familles monoparentales et de 5 000 francs par enfant à partir du troisième. Le Gouvernement veillera à ce que les caisses d'allocations familiales puissent faire face aux évolutions de la situation des ménages concernés. Cela touche 350 000 familles sur un total de 4 500 000 qui perçoivent les allocations familiales. Et, aujourd'hui, ce sont les familles les plus favorisées qui bénéficient des aides les plus importantes. Un couple avec deux enfants qui gagne 700 000 francs nets par an reçoit 40 500 francs. S'il gagne 100 francs, il reçoit 9 200 francs. Cette mesure sera réexaminée en 1998 à l'occasion de la redéfinition de l'ensemble des aides à la famille.
« Par ailleurs, les aides au logement, qui concernent des familles modestes et très modestes (le niveau moyen des ressources annuelles par ménage est estimé à 49 160 francs en 1995), ont été revalorisées au 1er juillet 1997, après trois ans de stagnation, ce qui représente un coût, pour la CNAF (Caisse nationale des allocations familiales) de 650 millions de francs. Le Gouvernement entend poursuivre cet effort avec le souci de rapprocher progressivement l'allocation de logement familiale (ALF) et l'aide personnalisée au logement (APL). L'implication des caisses d'allocations familiales dans les fonds de solidarité pour le logement sera généralisée et amplifiée.
« 2.1.2. Des aides à la garde d'enfants plus justes et mieux orientées :
« Aujourd'hui, outre les 250 000 enfants de moins de trois ans accueillis à l'école maternelle, près de 500 000 enfants bénéficient d'un accueil aidé ; plus de la moitié est gardée par une assistante maternelle, ce qui induit le bénéfice de l'AFEAMA (Aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée) ; plus de 40 % sont en crèche et environ 7 % sont gardés à domicile par un salarié, leurs parents bénéficiant de l'AGED (Allocation de garde d'enfant à domicile). Il existe des différences très importantes dans les aides publiques aux différents modes de garde, qui privilégient la garde individuelle (le cumul de l'AGED et de la réduction d'impôt pour emplois familiaux peut représenter une aide publique dépassant 80 000 francs par an), au détriment des modes de garde en crèche familiale ou collective.
« Le Gouvernement rééquilibrera l'aide aux différents modes de garde. Le taux de prise en charge des cotisations sociales par l'AGED passera de 100 % à 50 %. Ce taux sera toutefois de 75 % et le montant maximal majoré en conséquence pour la garde d'un enfant de moins de trois ans lorsque les ressources du ménage sont inférieures à un plafond annuel de 300 000 francs.
« Plus largement, le Gouvernement engagera une réflexion sur les conditions d'accueil des petits enfants, afin de favoriser les prises en charge collectives qui assurent un meilleur éveil des enfants et une plus grande mixité sociale.
« 2.1.3. Une politique de la famille repensée :
« Au-delà de ses évolutions, la famille reste la cellule de base de l'éducation et de la cohésion sociale. Le Gouvernement entend promouvoir une politique d'aide aux familles, qui prenne en compte la globalité des situations auxquelles elles sont confrontées et des problèmes auxquels elles doivent faire face.
« C'est dans cette optique que le Gouvernement a souhaité améliorer les aides au logement qui touchent un aspect essentiel de la vie quotidienne de l'enfant et de sa famille.
« La politique de la famille ne se réduit pas à des aides financières. C'est pourquoi, plus largement, le Gouvernement souhaite soutenir les familles dans leur rôle éducatif : accompagnement parental, médiation familiale, aménagement du temps de l'enfant et développement des activités extrascolaires, aide aux devoirs... Le Gouvernement attache une importance toute particulière à une augmentation et une meilleure adaptation des réponses aux besoins des six-seize ans, en particulier dans les quartiers en difficulté. Un programme spécifique dans ces domaines sera présenté en 1998. Les politiques publiques devront particulièrement prendre en compte cet objectif.
« La fonction de médiateur sera développée dans tous les organismes dispensateurs de prestations.
« Le Gouvernement mettra en place un délégué interministériel à la famille.
« Plus largement, le Gouvernement souhaite que la politique à l'égard des familles fasse l'objet d'un réexamen d'ensemble, en ce qui concerne tant la fiscalité, notamment par l'étude de la révision du quotient familial et de l'intégration des allocations familiales dans le revenu imposable, que les prestations familiales et l'ensemble des actions publiques qui y concourent. Dans cette perspective, la question de l'attribution des allocations familiales dès le premier enfant sera examinée. Il s'agit à la fois de tirer les leçons des évolutions qui se produisent dans la société et de proposer une politique efficace et active au service des familles. Le Gouvernement réunira la Conférence de la famille et présentera au Parlement, avant la fin de l'année prochaine, les lignes d'action d'une politique familiale ambitieuse adaptée aux réalités de notre temps.
« 2.2. Une politique de la vieillesse, au service des plus fragiles, qui tire les conséquences des évolutions démographiques :
« La situation financière de la branche vieillesse reste déséquilibrée. Cette situation devrait perdurer dans les années à venir à législation constante, sans connaître cependant une aggravation significative jusqu'en 2005. Cette situation appelle une réflexion approfondie sur l'évolution des prestations et des ressources des systèmes de retraite que le Gouvernement entend conduire en prenant en compte l'évolution des conditions du vieillissement, de la durée et du mode de vie. L'observation continue de la situation et des perspectives du système de retraite n'est aujourd'hui pas possible. Pour disposer d'une projection à long terme des régimes de retraite, une réflexion sera engagée sur la mise en place d'un observatoire des retraites. Les mesures financières que le Gouvernement propose au Parlement pour 1998 devraient cependant réduire le déficit du régime général vieillesse de plus de moitié par rapport à son évolution tendancielle. En tout état de cause, le Gouvernement réaffirme sa volonté absolue de sauvegarder le socle de solidarité que constitue le mécanisme de répartition.
« La loi instaurant une prestation spécifique dépendance a été votée sous la précédente législature et sa mise en oeuvre est largement engagée. Elle comporte des avancées (développement de la coordination gérontologique, élaboration d'un plan d'action personnalisée au domicile du demandeur...), mais aussi des risques, notamment du fait des inégalités de traitement sur le territoire. Un suivi attentif sera assuré avec le Comité national de coordination gérontologique. Au vu des informations recueillies sur les conditions d'application de la loi, il conviendra d'apporter au dispositif en vigueur les améliorations et les réformes nécessaires.
« Le Gouvernement a également décidé de proposer au Parlement de créer 7 000 lits de section de cure médicale et 2 000 places nouvelles de services de soins infirmiers à domicile, qui n'ont pas été ouverts faute de financements. L'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) pour 1998 intègre les moyens financiers destinés à cet effort supplémentaire. En outre, le Gouvernement souhaite mener en 1998 l'indispensable réforme de la tarification des établissements accueillant les personnes âgées.
« 2.3. Le développement d'actions en faveur des personnes particulièrement vulnérables :
« 2.3.1. Les personnes handicapées :
« Le Gouvernement renforcera les programmes d'action en faveur des personnes handicapées. Son objectif est de leur apporter des réponses adaptées et diversifiées, conjuguant harmonieusement le respect de leur citoyenneté et de leurs droits, l'exigence d'égalisation des chances et la prise en compte de leurs souhaits légitimes d'une meilleure intégration et vie sociale.
« Dans cet esprit, la couverture du territoire en centres d'action médico-sociale précoce sera améliorée par la création de cinq nouveaux centres. L'intérêt de ces structures est manifeste, à travers leurs fonctions de prévention, de dépistage et de diagnostic précoce mais aussi d'aide et d'accompagnement du jeune enfant handicapé et de sa famille, dans le cadre de réseaux coordonnés associant en aval les services d'éducation spécialisés et de soins à domicile et les instituts médico-éducatifs.
« Les insuffisances de places pour adultes handicapés ont engendré le dispositif issu de l'amendement Creton, lequel a généré, au fil des ans, des difficultés de gestion de plus en plus importantes. C'est pourquoi un plan d'action sera mis en place à partir de 1998 et, dès le prochain exercice, des moyens nouveaux seront dégagés afin de développer la création de places nouvelles pour l'accueil de ces jeunes adultes, soit en maisons d'accueil spécialisées, soit en foyers à double tarification dont le statut juridique sera conforté.
« Par ailleurs, un plan d'action sera initié pour améliorer la prise en charge des personnes atteintes d'un handicap rare (sourds-aveugles, aveugles ou sourds multi handicapés, dysphasiques, personnes handicapées porteuses d'une affection somatique grave). En outre, le programme de création de places médico-sociales adaptées aux traumatisés crâniens sera poursuivi à hauteur de 50 millions de francs.
« Enfin, l'accent sera mis sur le développement de la possibilité, pour les personnes handicapées, d'exercer le libre choix de leurs lieu et mode de vie, en rendant possible le maintien ou le retour, dans leur cadre de vie ordinaire, si elles le souhaitent, grâce au développement des services d'aide à domicile par des formules complémentaires de celles déjà existantes et grâce à un meilleur recours aux aides techniques qui fait l'objet d'une expérimentation en cours dans cinq départements.
« 3. Un redressement financier très important et un financement plus assuré qui consolident la protection sociale.
« En 1997, le régime général connaîtra un déficit d'environ 37 milliards de francs. Le Gouvernement entend arrêter l'hémorragie qui touche notre système de protection sociale depuis 1993 et prendre les mesures qui permettent un équilibre financier durable. Par rapport à une évolution tendancielle qui conduirait à un déficit de 33 milliards de francs, le Gouvernement entend faire un effort net supérieur à 20 milliards de francs, à travers des économies et des recettes nouvelles, qui prenne également en compte les dépenses nouvelles déjà présentées. Sur la base des hypothèses économiques disponibles aujourd'hui, le Gouvernement entend parvenir à l'équilibre des comptes en 1999.
« 3.1. Une évolution maîtrisée des dépenses de santé.
« L'ONDAM est fixé pour 1998 à 613,6 milliards de francs, soit une augmentation de 2,2 % par rapport à l'année 1997, sensiblement plus importante que celle de l'année dernière (1,7 %). Cette évolution, qui reste rigoureuse, traduit une double volonté : d'une part, notre système de santé doit être à même de répondre, dans les meilleures conditions, aux besoins croissants de la population ; d'autre part, il faut en améliorer l'efficience globale.
« L'évolution des dépenses est moins rapide que celle des prévisions de recettes spontanées, ce qui induit une économie implicite de 9 milliards de francs. La politique de santé contribue également à l'équilibre financier de l'assurance maladie, sans nouveaux déremboursements.
« Cette évolution de l'ONDAM est cohérente avec l'évolution globale des dépenses de santé. Expression de la solidarité devant la maladie, le niveau de prise en charge des soins par le système de protection sociale doit, en effet, être maintenu et, dans la mesure du possible, amélioré. Comparé aux autres pays développés, il est relativement faible en France où il se situe à 73,5 %. La fixation d'un objectif de dépenses d'assurance maladie ne conduira pas à une diminution du taux de couverture.
« 3.2. Une réforme en profondeur du financement de la protection sociale qui élargit l'assiette des cotisations sociales et consolide le financement de la protection sociale :
« Le financement de la protection sociale en France repose de façon dominante sur la masse salariale, sensiblement plus que dans la plupart des autres pays européens. Cette situation fragilise les comptes de la Sécurité sociale, compte tenu de la sensibilité de la masse salariale à la conjoncture, alors que l'évolution des dépenses y est beaucoup moins liée. En outre, elle ne correspond pas, du moins en ce qui concerne les branches famille et maladie, à l'économie des régimes qui visent à toucher tous les résidents. La mise en place de l'assurance maladie universelle en est d'ailleurs la confirmation, en ce qui concerne cette branche.
« C'est pourquoi le Gouvernement entend élargir l'assiette du financement de la protection sociale, en particulier par la substitution de la CSG à la cotisation maladie, et conforter ainsi les ressources du régime.
« La CSG sera augmentée de 4,1 points sur les revenus d'activité et ceux tirés de l'épargne et de 2,8 points sur les revenus de remplacement. Les cotisations maladie des actifs salariés seront fortement réduites. L'augmentation de la CSG prélevée sur les revenus d'activité, de remplacement et du patrimoine soumis à l'impôt sur le revenu au barème progressif sera en totalité déductible du revenu imposable.
« Ce transfert a pour objectif :
« _ de rééquilibrer les prélèvements sociaux entre revenus du travail et du capital. Il est, en effet, équitable que l'ensemble des revenus contribue à un système d'assurance maladie qui vise à s'adresser à tous. Ce rééquilibrage entre les divers types de revenus sera prolongé par l'extension de l'assiette des prélèvements de 1 %, sur les revenus du capital, actuellement affectés à la CNAF et la CNAVTS (Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés), à l'ensemble des revenus du capital concernés par la CSG ;
« _ d'accroître substantiellement le pouvoir d'achat des actifs salariés et d'une grande part des autres actifs, ce qui contribuera à la relance de la consommation et permettra d'engager, dans les meilleures conditions, les négociations sur la réduction du temps de travail.
« Le Gouvernement souhaite, par ailleurs, voir évoluer progressivement l'assiette des cotisations patronales, afin de consolider le financement de la protection sociale. Dans cet esprit, seront poursuivies les réflexions sur les modifications d'assiette, notamment en référence à la valeur ajoutée. L'impact économique des scénarios envisagés sera étudié parallèlement par le Conseil d'analyse économique placé auprès du Premier ministre. Le Gouvernement disposera ainsi de l'ensemble des éléments nécessaires pour engager la réforme.
« 3.3. Des mesures complémentaires qui consolident le redressement financier :
« Le projet de loi de financement prévoit de transférer à la CADES la dette du régime général, à nouveau constatée depuis 1996, en dehors de 17 milliards de francs déjà provisionnés au titre de l'année 1996. En conséquence, la perception du RDS sera prolongée de cinq ans. Le taux du RDS restera inchangé. Le Gouvernement présentera à l'appui de la loi de financement pour 1999 un rapport étudiant les possibilités d'harmonisation des assiettes du RDS et de la CSG.
« La cotisation d'allocations familiales des travailleurs indépendants non agricoles est aujourd'hui plafonnée pour une part (0,5 point sur un taux global de 5,4 points), alors qu'ils perçoivent les mêmes prestations que les autres résidents. Le déplafonnement du 0,5 point restant permettra d'aligner les contributions des différentes catégories d'actifs. Un gain de 300 MF en 1998 et 450 MF en année pleine est attendu de cette mesure.
« La taxe sur les contrats de prévoyance passera de 6 à 8 %, ce qui procure une recette supplémentaire de 500 millions de francs.
« Les grossistes de distribution pharmaceutiques exercent une fonction de service public en assurant la livraison de médicaments sans délai sur l'ensemble du territoire national. Le développement des ventes directes des laboratoires pharmaceutiques aux pharmacies, fragilise ce système de distribution. C'est pourquoi il est proposé de taxer les ventes directes, qui représentent environ 10 % du marché, pour un rendement attendu de 300 millions de francs.
« Diverses mesures d'intégration de caisses vieillesse (CCI de Roubaix, Cultes) procureront 300 millions de francs de recettes au régime général en 1998, mais pèseront sur les comptes futurs, compte tenu des déséquilibres démographiques. L'application de la règle commune à la compensation bilatérale entre la CNAMTS et la Caisse de retraite et de prévoyance des employés et clercs de notaires procure un supplément de ressources de 230 millions de francs au régime général. Elle ne remet en cause ni l'existence de ce régime spécial ni sa pérennité.
« Enfin, le régime général bénéficiera d'une affectation partielle de l'excédent de la contribution sociale de solidarité des sociétés pour un montant de 2,2 milliards de francs. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'un des défauts inhérents aux lois de financement de la sécurité sociale a été de limiter la capacité d'intervention et de proposition des parlementaires en matière de dépenses de protection sociale, l'essentiel de la politique de santé et de protection sociale étant, en fait, uniquement défini dans le cadre du rapport annexé à l'article 1er et confié, dans son application concrète, à des organismes de contrôle non élus, depuis les ordonnances du plan Juppé.
Cette interrogation initiale a toute sa place quand on se demande, en particulier, s'il est admissible de ne laisser au Parlement que le droit d'encadrer les dépenses de protection sociale et de donner, par exemple, à ces super - préfets des dépenses de santé que sont les directeurs des ARH, les agences régionales de l'hospitalisation, toute latitude pour imposer des choix de gestion pour le moins discutables.
On ne peut en effet admettre que des dépenses d'un montant supérieur à celui que représentent les dépenses du budget de l'Etat ne soient pas soumises à un contrôle plus démocratique de leur élaboration et de leur ordonnancement.
Concevez qu'il y a quelque anomalie à permettre aux agents affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales d'élire démocratiquement leurs représentants au conseil d'administration de la caisse et de priver de ce droit élémentaire les affiliés du régime général !
L'un des objectifs de la protection sociale doit donc être bel et bien constitué par la mise en oeuvre d'une véritable démocratie sociale, qui manque cruellement aujourd'hui et dont la renaissance passe notamment par l'abrogation de l'ordonnance Juppé relative à la composition des conseils d'administration des organismes de sécurité sociale.
L'article 1er du projet de loi précise donc - nous ne nous en satisfaisons pas totalement, ainsi que je viens de le souligner - les orientations de la politique mise en oeuvre en matière de protection sociale.
Nous partageons un certain nombre des préoccupations et des orientations qu'il contient, ces finalités rompant quelque peu avec ce que nous avons été accoutumés à lire ces dernières années, comme nous l'avons dit à plusieurs reprises.
Pour autant, la discussion générale l'a montré, d'autres propositions ne nous satisfont pas, nous l'avons dit en toute loyauté. Nous estimons donc nécessaire de recadrer ces propositions dans une nouvelle dynamique tant sur les ressources que sur les dépenses du système de protection sociale.
Nous ne partageons pas, par exemple, la volonté de faire de la contribution sociale généralisée l'élément principal du financement par les assurés de l'assurance maladie. De même, pour des raisons de principe que nous avons soulignées, nous ne sommes pas partisans de la mise sous plafond des allocations familiales.
Nous nous interrogeons également sur la portée et l'efficacité de la logique comptable qui nous semble encore aujourd'hui trop présider à la définition des orientations de notre système de protection sociale, au détriment, notamment, des facultés d'intervention de l'hôpital public, des moyens consacrés à la prévention ou encore à l'action sociale des caisses d'allocations familiales en direction des modes de garde collectifs.
Les aspects contradictoires du rapport nous auraient conduits à ne pas le voter.
Cela étant, la commission des affaires sociales a décidé de transformer ce rapport pour en faire un contre-projet.
Il n'y a plus d'éléments, dans ce rapport, concernant la question cruciale de la prévention en matière de santé publique.
Il n'y a plus de développement sur la question de l'assurance vieillesse, même pas l'affirmation, par exemple, de la consolidation du régime par répartition.
Toute évolution future des cotisations patronales y est liée à un processus de réduction de ces cotisations, alors même que cette évolution doit, à notre sens, recouvrir un objectif de redistribution globale de l'effort de financement qui préserve les entreprises de main-d'oeuvre et mette à contribution celles de nos entreprises qui choisissent la finance plutôt que l'emploi.
Le texte de l'amendement proposé par la commission inclut même des dispositions en matière d'encadrement des dépenses de protection sociale qui risquent de priver l'hôpital public de ses capacités d'action et encadrent les moyens des structures médico-sociales, dont l'intervention est pourtant cruciale en ces temps d'exclusion sociale accélérée.
Pour tous les sous-amendements que nous présentons, nous avions préparé un argumentaire détaillé. Cependant, compte tenu de l'heure, conscients aussi qu'au cours des débats qui ont été organisés ici même nous avons largement pu développer notre point de vue, nous nous contenterons d'en exposer les idées-forces, afin que la présente discussion s'achève dans de bonnes conditions. (Très bien ! sur de nombreuses travées.)
M. le président. La parole est à M. Autain.
M. François Autain. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il est rare qu'un rapport annexé à un projet de loi puisse être amendé et soumis à un vote. Je me demande même s'il existe d'autres exemples.
Certes, chaque texte de loi est précédé d'un exposé des motifs, mais celui-ci ne donne jamais lieu à un vote, et encore moins à des amendements.
Si l'on se réfère à la loi organique, il est dit à l'article L.O. 111-3 : « Chaque année la loi de financement de la sécurité sociale approuve les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale. »
Quant à l'article L.O. 111-4, il est ainsi conçu : « Le projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'année est accompagné d'un rapport présentant les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale. »
Vous avez pu le remarquer, à aucun moment il n'est indiqué que ce rapport doit être soumis à un vote du Parlement. C'est seulement l'interprétation qui a été retenue l'an dernier qui nous impose cet exercice auquel nous allons nous livrer dans quelques instants.
Pour ma part, il me semble paradoxal d'amender un rapport qui n'a aucune portée normative. D'où mes questions : est-il vraiment indispensable d'intégrer au corps de la loi un rapport qui n'est, en fait, qu'un rapport de présentation ? Dans ces conditions, ne serait-il pas possible de revoir l'interprétation très originale du texte de la loi organique, qui nous conduit chaque année à nous livrer à cet exercice sur la nécessité et la portée duquel on peut s'interroger ? Ne conviendrait-il pas d'en revenir à une interprétation beaucoup plus respectueuse du texte de la loi organique ?
M. le président. Le vote sur l'article 1er est réservé jusqu'après l'examen du rapport annexé.
Par amendement n° 2, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit le rapport annexé à l'article 1er :

« Annexe

« Rapport sur les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier.
« La loi organique du 22 juillet 1996 a prévu que la loi de financement de la sécurité sociale approuverait chaque année un rapport définissant les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les conditions générales de l'équilibre de la sécurité sociale.
« Conforter le retour à l'équilibre de la sécurité sociale avec un déficit du régime général ramené à 12 milliards de francs (moins de 1 % des dépenses) ;
« Réaffirmer les principes qui fondent notre système de protection sociale dans le domaine de la famille et quant à l'évolution de son financement ;
« Compte tenu des légitimes priorités de santé définies par la conférence nationale de santé, rétablir une véritable maîtrise des dépenses, car le rôle d'une loi de financement de la sécurité sociale n'est pas de constater une évolution tendancielle, mais d'arrêter des orientations.
« Tels sont les trois objectifs que doit poursuivre le présent projet de loi.
« Ces objectifs se traduisent par trois axes principaux :
« 1. Sauvegarder la politique familiale.
« La famille ne doit pas être la seule branche pour laquelle des "économies" soient décrétées. Car une telle démarche conduirait à une remise en cause des fondements de notre politique familiale qui est en réalité un investissement pour l'avenir.
« Le maintien de l'universalité des allocations familiales et de l'aide à la création d'emplois familiaux à travers l'AGED est donc impératif.
« L'équilibre des comptes de la branche famille doit être recherché par une analyse objective et approfondie des causes de son déficit. Les charges indues qui pèsent sur cet équilibre doivent être notamment examinées de même que les missions qui ont été confiées à cette branche par le passé et dans une autre conjoncture et qui ne correspondent en rien à la vocation d'une politique familiale.
« Dans l'attente d'une telle analyse qui doit orienter la définition d'une politique pour la famille à laquelle le Gouvernement entend lui-même réfléchir, des ressources exceptionnelles et proposées à titre transitoire doivent être dégagées en faveur de cette branche. C'est la raison pour laquelle est proposée une majoration, temporaire et limitée à 1998, de 0,1 point du taux de la CSG famille.
« 2. Préserver la cohérence du financement de la protection sociale.
« Clarifier les comptes, asseoir les ressources sur une assiette plus diversifiée et dynamique que la seule masse salariale, identifier ce qui relève de l'assurance ou de la solidarité, assainir les relations financières avec l'Etat, tels sont les enjeux d'une réforme du financement de la sécurité sociale qui doit être poursuivie.
« En revanche, un basculement massif et inconsidéré des cotisations d'assurance maladie vers la CSG ne serait pas acceptable :
« - les effets réels de ce basculement qui porterait sur des masses financières énormes (300 milliards de francs, soit plus de 3 points de PIB) doivent être précisément mesurés, de même que l'ampleur des "compensations" qui pourraient être accordées à telle ou telle catégorie et, en premier lieu, aux fonctionnaires ;
« - de même, doit être préalablement évalué l'impact sur le comportement des ménages de l'aggravation sans précédent des prélèvements sur l'épargne qu'entraînerait un tel basculement ;
« - en outre, l'objectif poursuivi, au travers des taux choisis pour un tel transfert, ne saurait être totalement étranger au financement de la sécurité sociale. Il en serait ainsi si ce transfert visait à distribuer du pouvoir d'achat aux actifs salariés financé par une ponction sur les autres catégories dans le seul but de faciliter la réduction de la durée du travail que le Gouvernement souhaite imposer aux partenaires sociaux ;
« - enfin, cette fiscalisation ne pourrait intervenir qu'au vu d'un calendrier précis pour la mise en place de l'assurance maladie universelle, qui constitue la contrepartie du financement par la solidarité de la branche maladie, et d'une réflexion achevée sur l'indispensable réforme de l'assiette des cotisations patronales.
« 3. Rétablir un véritable objectif de maîtrise des dépenses.
« Le présent projet de loi ne doit pas constater l'évolution tendancielle pour 1998 des dépenses dans le domaine de l'assurance maladie. L'intervention du Parlement, au travers des lois de financement de la sécurité sociale, doit avoir au contraire pour vocation d'indiquer clairement des orientations.
« Aussi, l'objectif de maîtrise des dépenses doit être réaffirmé sans ambiguïté.
« Il est donc proposé de contenir la progression de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie dans des proportions comparables à celles fixées pour 1997.
« Mais, pour qu'un tel objectif arrêté par le Parlement ait un sens, il est normal et il est nécessaire que toutes les dépenses qui y figurent soient encadrées et se plient dans leur évolution à la même discipline que celle acceptée par la médecine de ville et les établissements hospitaliers.
« En outre, il est indispensable que soient confirmés des objectifs ambitieux en matière d'économies de gestion au sein des caisses de sécurité sociale dans le cadre d'une clarification des missions et des tâches qui leur sont confiées. »
Cet amendement est assorti de quinze sous-amendements.
Par sous-amendement n° 81, Mme Borvo, M. Fischer, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - Après le quatrième alinéa du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Consolider notre système d'assurance vieillesse.
II. - De compléter in fine le même texte par cinq alinéas ainsi rédigés :
« 4. Une politique équilibrée de l'assurance vieillesse.
« En 1998, il sera procédé à une analyse critique des dispositions actuellement en vigueur en matière de retraités et personnes, et notamment des modalités de liquidation des droits définis dans le cadre de la loi "retraités" de 1993.
« Il sera également analysé la situation résultant de l'application de la loi portant création de la prestation spécifique dépendance.
« Par ailleurs, une étude d'impact sera établie sur les effets d'une modification des critères d'indexation des personnes et retraités.
« Enfin, un effort particulier sera accompli pour la remise à niveau des retraites du régime agricole. »
Par sous-amendement n° 82, M. Fischer, Mme Borvo, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - Après le quatrième alinéa du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Renforcer la transparence et la démocratie dans la gestion des organismes sociaux.
II. - Dans les cinquième et sixième alinéas du même texte, de remplacer le mot : « trois » par le mot : « cinq ».
III. - De compléter in fine le même texte par un alinéa ainsi rédigé :
« 5. Renforcer la transparence et la démocratie dans la gestion des organismes sociaux, ce qui implique notamment, et à brève échéance, qu'il soit procédé à l'organisation d'élections des membres de ces conseils d'administration par les assurés sociaux eux-mêmes. »
Par sous-amendement n° 83, M. Fischer, Mme Borvo, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de remplacer le troisième alinéa du 1 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le Gouvernement rééquilibrera l'aide aux différents modes de garde.
« A cette fin, le Gouvernement engagera une réflexion sur les conditions d'accueil des petits enfants, afin de favoriser les prises en charge collectives qui assurent un meilleur éveil des enfants et une plus grande mixité sociale, notamment au travers d'un soutien aux initiatives d'innovation sociale des entreprises. »
Par sous-amendement n° 85, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit le dernier alinéa du 1 du texte proposé par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé :
« Plus largement, le Gouvernement souhaite que la politique à l'égard des familles fasse l'objet d'un réexamen d'ensemble, notamment par l'analyse critique de la loi famille de 1994, celle de l'évolution des prestations familiales et de l'ensemble des actions publiques qui y concourent. Dans cette perspective, la question de l'attribution des allocations familiales dès le premier enfant sera examinée. Il s'agit à la fois de tirer les leçons des évolutions qui se produisent dans la société et de proposer une politique efficace et active au service des familles. Le Gouvernement réunira la conférence de la famille et présentera au Parlement, avant la fin de l'année prochaine, les lignes d'action d'une politique familiale ambitieuse adaptée aux réalités de notre temps, prenant notamment en compte la question de son financement. »
Par sous-amendement n° 84, M. Fischer, Mme Borvo, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans la seconde phrase du quatrième alinéa du 1 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé, de remplacer les mots : « , temporaire et limitée à 1998, de 0,1 point des taux de la CSG famille » par les mots : « des cotisations dues par les entreprises. »
Par sous-amendement n° 86, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine le 1 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé par un alinéa ainsi rédigé :
« En 1998, sera engagée une réflexion sur le devenir du revenu minimum d'insertion, tendant notamment à établir le caractère personnel et non plus différentiel de cette prestation. »
Par sous-amendement n° 87, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger ainsi le 2 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé :
« Le financement de notre système de protection sociale doit évoluer, en vue de répondre aux besoins collectifs à satisfaire en matière de santé, de politique familiale, de retraites et d'action en faveur des plus démunis.
« S'appuyant sur des cotisations sociales aux niveaux adaptés pour dégager les ressources nécessaires, et tendra, dès 1998, à mettre plus directement à contribution les revenus financiers des particuliers comme des entreprises, qui demeurent aujourd'hui largement exonérés de toute participation.
« Cette contribution plus équilibrée des revenus financiers visera à répondre également à un objectif de réduction des cotisations acquittées sur les revenus d'activité salariée ou non. »
Par sous-amendement n° 69 rectifié bis , MM. Ostermann, Jean-Jacques Robert, Doublet, Fayolle, Gérard, Flandre, Lemaire et Blanc proposent, après le troisième alinéa du 2 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - En outre, ce basculement devrait être neutre financièrement pour les actifs non salariés et les retraités non salariés. » Par sous-amendement n° 88, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter le sixième alinéa du 2 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé par les mots : « notamment par référence à l'utilisation de la valeur ajoutée ».
Par sous-amendement n° 89, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - De rédiger ainsi l'intitulé du 3 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé :
« 3. Promouvoir une véritable politique de santé publique »
II. - De rédiger comme suit le premier alinéa du 3 du texte proposé par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé :
« L'intervention du Parlement, au travers des lois de financement de la sécurité sociale, a pour vocation d'indiquer clairement des orientations. »
Par sous-amendement n° 91, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - De rédiger comme suit le quatrième alinéa du 3 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé :
« Une politique de prévention sanitaire ambitieuse doit être développée. »
II. - De rédiger comme suit le cinquième alinéa du 3 du texte proposé par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé :
« Elle passe notamment par une action spécifique sur certaines affections faisant l'objet d'un dépistage précoce, comme les cancers du sein et du col de l'utérus, le saturnisme infantile, l'hépatite C, le sida, la tuberculose. »
Par sous-amendement n° 90, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - De supprimer le dernier alinéa du 3 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé.
II. - De rédiger comme suit le troisième alinéa du même texte :
« La progression de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie doit permettre de répondre aux besoins de santé publique, de prévention sanitaire et de renforcement du tissu hospitalier du pays. »
Par sous-amendement n° 92, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine le 3 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé par un alinéa ainsi rédigé :
« La progression de l'enveloppe globale des établissements hospitaliers tendra à faciliter la réduction des inégalités de couverture hospitalière des différentes régions du pays tout en renforçant l'efficience des équipements existants. »
Par sous-amendement n° 93, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine le 3 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé par un alinéa ainsi rédigé :
« Elle passe aussi par la prévention des affections liées aux conditions d'activité professionnelle. »
Par sous-amendement n° 94, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine le 3 du texte présenté par l'amendement n° 2 pour le rapport annexé par deux alinéas ainsi rédigé :
« La médecine scolaire, dans le cadre de la loi de finances et dans un souci de couverture des besoins sanitaires de la jeunesse, verra ses moyens renforcés.
« De même, une évaluation des moyens et des objectifs de la médecine universitaire sera réalisée en vue notamment de faciliter et promouvoir la spécificité de la prévention en milieu étudiant. »
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 2.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Avec votre permission, monsieur le président, je souhaite d'abord répondre à notre collègue M. Autain, qui s'est demandé s'il convenait ou non d'amender le rapport.
L'année dernière, monsieur Autain, le Sénat ne souhaitait pas amender le rapport ; mais, vous le savez, c'est l'Assemblée nationale qui a le dernier mot et, cette année, vous vous en trouvez bien. Eh bien, l'année dernière aussi, l'Assemblée nationale avait eu le dernier mot ! Vous le voyez, ce qui était mauvais l'année dernière est bon pour vous cette année !
M. François Autain. Je me pose des questions, c'est tout !
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Mais si vous voulez, mon cher collègue, que le Sénat ait le dernier mot sur la loi de financement de la sécurité sociale, nous en sommes d'accord ! ( Sourires. ) Plus sérieusement, le rapport du Gouvernement s'analyse comme l'exposé des motifs des dispositions que nous avons considérées comme contestables tout au long de ce débat et qui ont été introduites dans le projet de loi, et, pour le reste, comme une démarche tendant à remettre à plus tard la définition de véritables orientations dans le domaine de la santé : pour ce qui est de la famille, on attend les états généraux, on attend la conférence sur la famille, qui permettra de mettre en place une nouvelle politique familiale ; pour ce qui est de la vieillesse, référence est faite à une réflexion qui doit s'engager.
La commission des affaires sociales propose de faire figurer en annexe à l'article 1er les principales orientations qu'elle a proposées et que le Sénat a bien voulu adopter pour le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998.
Elle renvoie, naturellement, pour le détail de ces orientations, aux nombreuses observations et propositions fort intéressantes qui figurent dans les trois premiers tomes de son rapport consacrés à la santé, à l'assurance maladie, à la famille et à l'assurance vieillesse.
Elle propose d'adopter, en conséquence, l'article 1er tel que le Sénat l'a amendé.
Nous avons donc, en réalité, trois rapports : le rapport qui émane du Gouvernement, dans lequel celui-ci défend sa politique ; le rapport que nous avons réécrit et dans lequel nous défendons les grandes orientations que le Sénat a bien voulu retenir avec nous ; enfin, nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen réécrivent un troisième rapport, en présentant une série de sous-amendements sur lesquels j'argumenterai assez peu puisqu'il y a trois écritures bien distinctes et que chacun a évidemment le droit de mettre par écrit ce à quoi il croit.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour présenter les sous-amendements n°s 81, 82, 83, 85, 84, 86 et 87.
M. Guy Fischer. Le sous-amendement n° 81 tend à clarifier les orientations de la politique suivie en matière d'assurance vieillesse. A cette fin, nous proposons de compléter le texte par cinq alinéas.
Le sous-amendement n° 82 vise à renforcer la transparence et la démocratie dans la gestion des organismes sociaux, ce qui implique notamment, et à brève échéance, qu'il soit procédé à l'organisation d'élections des membres des conseils d'administration par les assurés sociaux eux-mêmes. C'est un point auquel nous tenons.
Le sous-amendement n° 83 ouvre des pistes de réflexion pour la mise en oeuvre d'une nouvelle politique de la petite enfance, politique qui nous semble indispensable dans cette période où les familles vivent cruellement la crise.
Le sous-amendement n° 85 vise à resituer les objectifs de la politique familiale. Nous nous sommes largement exprimés à ce sujet, notamment lors du débat consécutif à la déclaration du Gouvernement.
Le sous-amendement n° 84 a pour objet de compléter la réflexion sur les modes et sources de financement de la protection sociale. Il aurait mérité d'être développé.
Le sous-amendement n° 86 vise à resituer certains des objectifs de la politique familiale.
Enfin, le sous-amendement n° 87 se justifie par son texte même.
M. le président. La parole est à M. Blanc, pour défendre le sous-amendement n° 69 rectifié bis.
M. Paul Blanc. L'amendement de suppression du basculement des cotisations maladie sur la CSG de la commission a été adopté par le Sénat. Cependant, l'amendement que j'ai déposé avec plusieurs de mes collègues garde tout son intérêt.
Après différents calculs des organisations professionnelles des travailleurs indépendants non salariés non agricoles, il semblerait que ce basculement ne soit pas neutre à leur égard, contrairement à ce qui nous a été indiqué hier.
Je tiens à votre disposition un tableau comparatif des conséquences de ce basculement sur les salariés et sur les professions indépendantes, tableau qui montre pour ces derniers, en fonction des ressources, une progression croissante de la perte de pouvoir d'achat qu'ils subiraient à la suite de ce transfert.
En effet, à titre d'exemple, les chefs d'entreprise individuelle doivent réintégrer dans leur bénéfice 40 % des charges sociales alors que, dans le même temps, les salariés n'en reportent que 2 % dans leur rémunération brute, qui est, en outre, diminuée de 5 %.
Il me paraît donc indispensable qu'une réflexion soit menée sur l'assiette actuelle de la CSG pour les non-salariés avant que l'on procède à tout basculement.
De même, il semble important que les retraités non salariés ne soient pas non plus pénalisés par ce transfert, ce qui est le cas dans le dispositif que souhaite mettre en place le Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Borvo, pour défendre les sous-amendements n°s 88, 89, 91, 90, 92, 93 et 94.
Mme Nicole Borvo. Le sous-amendement n° 88, qui consiste à faire référence à l'utilisation de la valeur ajoutée, est un amendement de cohérence.
Le sous-amendement n° 89 tend à clarifier les objectifs de la politique de santé du pays.
Le sous-amendement n° 91 vise à caractériser certaines des priorités de la politique de prévention sanitaire en accord avec les orientations proposées par le Gouvernement.
Le sous-amendement n° 90 vise à favoriser un recentrage des orientations de la politique de santé, notamment en renforçant le tissu hospitalier de notre pays.
Le sous-amendement n° 92 vise à caractériser la politique choisie en matière hospitalière, dans la suite logique de ce que j'ai dit tout à l'heure.
Le sous-amendement n° 93 vise à caractériser les facteurs conduisant à la persistance d'inégalités devant la santé, en particulier celles qui sont liées à l'activité professionnelle.
Enfin, le sous-amendement n° 94, qui pourrait peut-être faire l'objet d'un consensus, car je crois qu'il obtiendra l'accord de la commission des affaires sociales, vise à préciser les objectifs de la politique sanitaire, notamment en ce qui concerne la médecine scolaire et universitaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des sous-amendements ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je l'ai dit voilà quelques instants, trois logiques s'opposent : celle du Gouvernement, celle de la commission des affaires sociales, qui est désormais celle du Sénat, et celle de nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen.
La manière dont ils abordent le financement de la sécurité sociale n'est pas la nôtre. Nous sommes en total désaccord sur le fond. En conséquence, la commission est défavorable aux sous-amendements n°s 81, 82, 83, 84, 85, 86, 87, 88, 89, 90, 91, 92 et 93.
En revanche, la commission est favorable au sous-amendement n° 69 rectifié bis, défendu par M. Blanc, même s'il est en partie satisfait puisque nous avons supprimé le basculement des cotisations vers la CSG.
La commission est également favorable au sous-amendement n° 94. En effet, nous n'avons pas suffisamment précisé les politiques de prévention sanitaire, notamment la médecine scolaire, qui est très importante et, malheureusement, très insuffisante dans notre pays. Nous approuvons totalement le sous-amendement n° 94 présenté par le groupe communiste républicain et citoyen.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 2 et sur les sous-amendements qui l'affectent ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Comme M. le rapporteur l'a indiqué à juste titre, il y a plusieurs logiques dans ce rapport, logiques qui reprennent d'ailleurs les débats que nous avons eus ces dernières heures.
Le Gouvernement ne peut accepter l'amendement n° 2, qui traduit une logique différente de la sienne et, pour des raisons évidentes, il ne peut pas davantage accepter les sous-amendements qui l'assortissent.
Cela dit, je tiens à dire que, sur le fond comme sur la forme, le Gouvernement était favorable à un certain nombre de sous-amendements du groupe communiste républicain et citoyen, notamment le sous-amendement n° 81, le sous-amendement n° 83, relatif à la petite enfance, le sous-amendement n° 85, le sous-amendement n° 89 sur la politique de santé, le sous-amendement n° 91 concernant la politique de prévention sanitaire, le sous-amendement n° 90, le sous-amendement n° 92 relatif à l'hospitalisation, le sous-amendement n° 93 et aussi le sous-amendement n° 94 sur la médecine scolaire, que vous avez retenu vous aussi, monsieur le rapporteur.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 81, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 82, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 83, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 85, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 84, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 86, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 87, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 69 rectifié bis , accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 88, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 89, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 91, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 90, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 92, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 93, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 94, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 2, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 1er et le rapport annexé, modifié.

(L'article 1er et le rapport annexé sont adoptés.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que, conformément à la décision de la conférence des présidents, les explications de vote et le vote sur l'ensemble du projet de loi sont renvoyés au mardi 18 novembre 1997, à dix-huit heures trente.

7

DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. Pierre Laffitte une proposition de loi tendant à créer des entreprises à partenariat évolutif caractérisées par la libre négociation entre apporteurs de compétences et de capitaux.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 80, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de MM. Michel Barnier, Jean Bernard, Roger Besse, Jean Bizet, Gérard Braun, Mme Paulette Brisepierre, MM. Gérard César, Jacques Chaumont, Désiré Debavelaere, Charles Descours, Michel Doublet, Daniel Eckenspieller, Gérard Fayolle, Hilaire Flandre, Yann Gaillard, Patrice Gélard, Alain Gérard, Daniel Goulet, Georges Gruillot, Bernard Hugo, Roger Husson, André Jourdain, Alain Joyandet, Gérard Larcher, Dominique Leclerc, Jacques Legendre, Jean-François Le Grand, Pierre Martin, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Paul d'Ornano, Joseph Ostermann, Victor Reux, Roger Rigaudière une proposition de loi relative à l'élection des membres français du Parlement européen.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 81, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

8

DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Alain Lambert un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur la fiscalité de l'épargne.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 82 et distribué.

9

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 18 novembre 1997 :
A neuf heures trente :
1. Questions orales sans débat suivantes :
I. - M. Jean-Paul Amoudry appelle l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation sur les intentions du Gouvernement en matière de simplification administrative et de réforme de l'Etat.
Il rappelle qu'en dépit des réformes entreprises depuis une vingtaine d'années pour décentraliser et déconcentrer la prise de décision et améliorer les relations entre le citoyen et l'administration, l'Etat conserve, dans notre pays, la profonde empreinte de deux siècles de centralisation.
Or les innovations apparues en moins d'une décennie, dans les techniques de traitement de l'information et de télécommunications ont fait de la rapidité de la décision un enjeu essentiel dans l'ensemble des sociétés occidentales.
Dans ce contexte, la complexité et la lenteur de nos procédures administratives contrastent au point de devenir un facteur de dégradation des relations entre le citoyen et l'administration et de contrainte pénalisante pour les entreprises.
C'est pourquoi de nouvelles avancées dans la modernisation de notre système administratif et de ses procédures de décision et l'allégement des contraintes qui pèsent sur les particuliers et sur les entreprises s'imposent, afin de libérer, notamment, les initiatives propres à favoriser le développement économique et l'emploi. L'Etat, pour sa part, gagnerait beaucoup en efficacité par de nouvelles déconcentrations de ses procédures de décision.
Le précédent gouvernement avait, poursuivant un objectif de simplification administrative, élaboré un projet de loi, voté en première lecture par l'Assemblée nationale le 16 janvier 1997, puis le 24 février par le Sénat et, en seconde lecture, le 27 mars dernier par les députés.
Le changement de majorité gouvernementale n'a pas permis l'adoption définitive de ce texte en deuxième lecture au Sénat.
Aussi, souhaiterait-il connaître ses intentions à l'égard des mesures contenues dans ce projet de loi, et plus particulièrement en matière de réforme de l'Etat. (N° 86.)
II. - M. Francis Grignon attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation sur le problème du versement d'un complément de rémunération sous forme de prime de fin d'année aux agents titulaires des collectivités territoriales.
La plupart des communes du Bas-Rhin ont adhéré au groupement d'action sociale du Bas-Rhin - GAS - afin d'offrir à leurs agents des avantages liés aux adhérents du GAS, notamment le versement d'une prime de fin d'année.
Or, il semble que seules les collectivités ayant institué un complément de rémunération avant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 peuvent effectuer les versements correspondants, en application de l'alinéa 2 de l'article 111 de la loi précitée.
Ainsi, de nombreuses communes rurales, qui ont adhéré au GAS après 1984, se trouvent dans l'impossibilité d'accorder à leur personnel un avantage qui vient en complément de rémunérations modestes. Or les agents concernés exercent leurs fonctions le plus souvent dans des conditions difficiles, avec des responsabilités plus importantes que dans les grandes collectivités.
Il lui demande ce qu'il entend faire afin de mettre un terme à une situation qui pénalise fortement les communes et leurs personnels, et en particulier les petites communes rurales. (N° 88.)
III. - M. Bernard Dussaut appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la disparité des taux de taxe sur la valeur ajoutée applicables au secteur de la restauration. En effet, actuellement, les ventes à consommer sur place, qui caractérisent essentiellement la restauration classique - libre-service ou traditionnelle - sont assujetties au taux normal de 20,6 % alors que les ventes à emporter, majoritairement réalisées par la restauration rapide, sont assujetties au taux de 5,5 %. Ces distorsions fiscales ont des conséquences multiples : au niveau de la concurrence européenne, puisque huit Etats de l'Union européenne appliquent déjà un taux réduit unique ; au niveau de l'emploi, puisque cette disposition freine le potentiel de développement de ces petites entreprises, qui sont pourtant les plus utilisatrices de main-d'oeuvre ; mais également au niveau culturel, puisque c'est la restauration classique, composante à part entière de notre patrimoine culturel et touristique, qui est directement touchée. Il lui demande s'il envisage de remédier à cette regrettable situation. (N° 51.)
IV. - Au moment où la priorité du Gouvernement est à l'emploi des jeunes, M. Hubert Durand-Chastel attire l'attention de M. le Premier ministre sur le fait qu'à la suite de la suppression du service national obligatoire les coopérants du service national vont disparaître. Ces formules, en favorisant une première expérience professionnelle à l'étranger, représentaient un puissant facteur d'intégration des jeunes dans la vie active et constituaient en outre un vivier intéressant pour l'expatriation et l'implantation des entreprises françaises à l'étranger. Le texte de réforme du service national présenté par le gouvernement de M. Alain Juppé et qui avait été voté par les deux assemblées, prévoyait, en remplacement des CSN, des formules de volontariat civil, dont une pour la coopération internationale et l'aide humanitaire.
Or, le texte de la réforme qui vient d'être examiné se limite au volontariat militaire dans les armées, renvoyant éventuellement à un texte ultérieur le volontariat civil.
Par ailleurs, lors de la discussion du projet de loi relatif à l'emploi des jeunes, l'extension du dispositif pour les emplois à l'étranger a été refusée malgré l'adoption par le Sénat d'un amendement à ce sujet. De fait, le développement de l'emploi des jeunes à l'étranger n'est plus pris en compte, alors même que les besoins existent, en particulier auprès des petites et moyennes entreprises désirant exporter, des chambres de commerce et d'industrie françaises à l'étranger, ainsi que des comités consulaires pour l'emploi et la formation professionnelle.
La mondialisation réclamant une ouverture de nos forces de production et de services vers l'extérieur, il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement à ce sujet. (N° 83.)
V. - M. Claude Huriet souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les conséquences de l'accord conclu entre La Poste et le groupe d'assurances Assurances générales de France, relatif à la distribution de produits d'assurance dommages.
Selon les informations disponibles, l'accord concerné prévoit que la responsabilité de la formation des personnels chargés de gérer les contrats d'assurance reviendrait aux AGF. Quant à La Poste, elle serait chargée d'assurer la commercialisation de ces nouveaux produits.
Le Gouvernement s'est engagé à examiner la compatibilité de cet accord avec les règles du droit de la concurrence dans le cadre de la négociation du contrat de plan avec La Poste.
Il lui demande ce qu'il entend faire afin de protéger les mutuelles et les compagnies d'assurance d'une atteinte à la libre concurrence qui pourrait découler de l'intervention d'un opérateur public sur le marché de l'assurance dommages. (N° 106.)
VI. - M. Jean-Pierre Raffarin attire l'attention de M. le ministre délégué chargé des affaires européennes sur la réforme des fonds structurels communautaires.
La Commission européenne va formuler dans les prochaines semaines ses propositions pour la réforme des fonds structurels pour la période 2000-2006.
Il lui demande de lui indiquer les positions de la France :
- sur le montant de la politique régionale européenne ;
- sur le rapprochement de l'objectif 2 et 5 B ;
- sur l'introduction de mesures spécifiques en faveur des régions ultra-périphériques ;
- sur le nouveau programme d'initiative communautaire pour la coopération interrégionale. (N° 91.)
VII. - M. Serge Vinçon demande à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes de bien vouloir lui expliquer les raisons pour lesquelles la directive 96/67/CE du Conseil du 15 octobre 1996 (concernant l'accès au marché de l'assistance en escale dans les aéroports de la Communauté) jugée de nature législative lors de l'examen du projet par le Conseil d'Etat le 14 avril 1995 et, par conséquent, rentrant dans le champ d'application de l'article 88-4 de la Constitution, fait l'objet d'un projet de décret, afin de procéder à sa transposition en droit interne sans l'examen du Parlement.
L'examen du Parlement apparaît d'autant plus nécessaire que cette directive semble poser des questions de fond, eu égard au droit de la concurrence et notamment à l'ordonnance de 1986. (N° 102.)
VIII. - M. Adrien Gouteyron attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur l'inadaptation de la RN 102 au trafic routier et sur les graves conséquences que cette situation entraîne. Il lui rappelle la cruauté des chiffres des accidents mortels : depuis le 1er janvier 1997, à la fin du premier semestre, neuf accidents sont ainsi à déplorer (seize en tout pour l'année 1996).
Il tient à lui rappeler que la RN 102 est désormais sous-dimensionnée et devient dangereuse en raison de la croissance du trafic routier due à son rôle de liaison entre Le Puy et l'autoroute A 75, qui, à Lempdes, relie la Haute-Loire à la capitale (axe Clermont-Paris).
Il rappelle également que cette route est vitale sur le plan économique comme liaison d'aménagement du territoire et qu'elle devrait être classée comme telle.
Face à cette situation, des mesures urgentes doivent être prises et surtout un projet et un programme d'investissement pour cet axe sont à envisager pour éviter de nouvelles hécatombes. Citons par exemple le passage à quatre voies du tronçon Brioude-Lempdes compte tenu de l'importance de son trafic, le classement de ce segment en bretelle d'autoroute pour en faire une pénétrante. Il souhaiterait sur tous ces points connaître sa position et, le cas échéant, les mesures qu'il entend mettre en oeuvre pour mettre fin à cette préoccupante situation. (N° 64.)
IX. - M. Jacques Oudin appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les incertitudes qui pèsent actuellement sur l'ensemble de la politique autoroutière du Gouvernement et l'inquiétude des élus et des responsables professionnels.
Compte tenu de sa situation géographique, la France se doit d'être la « plaque tournante » du réseau autoroutier européen.
L'importance de la politique des grandes infrastructures a été confirmée par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire n° 95-115 du 4 février 1995.
Les élus et les professionnels de toutes les régions attendent l'aménagement des nouvelles sections autoroutières avec d'autant plus d'impatience qu'aucune entreprise ne souhaite s'implanter ou se développer loin d'un échangeur autoroutier.
Actuellement, plusieurs centaines de kilomètres d'autoroutes attendent leur inscription au schéma autoroutier national ou leur financement. Or certaines informations récentes sur les modifications éventuelles de la politique autoroutière sont profondément inquiétantes.
Dans ces conditions, il lui demande de lui indiquer :
- tout d'abord, si le Gouvernement compte actualiser rapidement le schéma autoroutier national en y intégrant toutes les sections autoroutières en attente et, si oui, dans quel délai ;
- dans le cas où le Gouvernement entendrait définir une nouvelle politique autoroutière, s'il envisage d'engager un débat national devant le Parlement, tant il est vrai que les élus nationaux ont, à la quasi-unanimité, souhaité l'achèvement aussi rapide que possible du schéma autoroutier national ;
- enfin, de quelle manière le prochain comité des investissements économiques et sociaux affectera les crédits au réseau autoroutier pour la fin de 1997 et l'année 1998. A cet égard, l'assemblée générale de la route des estuaires, qui s'est tenue au Sénat le 7 octobre 1997, s'est particulièrement émue des retards constatés pour la réalisation des autoroutes A 28 entre Rouen et Alençon, A 831 entre La Rochelle-Rochefort et Fontenay-le-Comte, A 65 entre Bordeaux et Pau, et de l'aménagement de la RN 10 sur l'axe Bordeaux-Bayonne. Or il lui rappelle que cet axe a été jugé comme la première priorité d'aménagement du territoire lors du comité interministériel d'aménagement du territoire de Mende le 12 juillet 1993. (N° 93.)
X. - M. Jean Boyer appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur sa décision, en date du 10 juin 1997, de suspendre l'ouverture de l'enquête publique relative à la section médiane de l'autoroute A 51 Grenoble-Sisteron, entre le col du Fau et La Saulce, conformément au tracé retenu en 1991 passant par l'est de Gap. Il lui rappelle que ce tracé complète le dispositif mis en place par les sections Grenoble-col du Fau et Sisteron-La Saulce, déclarées d'utilité publique respectivement le 31 décembre 1993 et le 20 juin 1994.
Il souligne que ce tracé a été approuvé par sept de ses prédécesseurs et qu'il offre, par rapport au tracé passant par Lus, des avantages sensiblement comparables en termes de coût, d'économie d'infrastructures à réaliser, de rapidité de mise en service en raison de l'extrême précision des études confirmées par une mission géologique internationale, de réponses aux impératifs d'aménagement du territoire (ouverture vers l'Italie, désenclavement des Hautes-Alpes et du sud de l'Isère, desserte touristique et de protection de l'environnement).
Il insiste sur l'urgence de réaliser une liaison autoroutière Alpes du Nord-Alpes du Sud pour l'est de Gap, d'économiser le temps et l'argent nécessaires pour des études et la réalisation de solutions de rechange de mise à deux fois deux voies de routes nationales, et lui demande de bien vouloir préciser ses intentions concernant le règlement de ce dossier. (N° 95.)
XI. - M. Fernand Tardy rappelle à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement que lors du changement de gouvernement, certains grands travaux ont été abandonnés ou gelés.
C'est le cas de l'autoroute A 51 qui doit relier Marseille à Grenoble. Les travaux de cette autoroute sont programmés jusqu'à La Saulce (Hautes-Alpes) et commencés sur une portion à partir de Grenoble.
Le gel des travaux, initialement prévus sur la partie médiane, inquiète les élus des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes.
En effet, on ne saurait concevoir un axe routier important s'arrêtant à La Saulce et, de ce fait, ne remplissant pas les services attendus : doublement de l'axe rhodanien et débouché rapide et direct sur Nice par le barreau Peyruis-Digne et la GLAT N 85-D 202.
Il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement en ce qui concerne la reprise et la finition de l'autoroute A 51 et, subsidiairement, quelles sont les intentions du Gouvernement en ce qui concerne la réalisation du barreau autoroutier Peyruis-Digne. (N° 98.)
XII. - Alors que le climat social dans le domaine des transports routiers semble se dégrader, M. Gérard Roujas souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur l'importance toujours croissante du transport routier de marchandises, et plus particulièrement de matières dangereuses.
L'accroissement de ce mode de transport fait peser un risque majeur au niveau tant de la sécurité routière que de l'environnement.
Ces dernières semaines, des accidents tragiques ont mis en cause des poids lourds. Il est à craindre que, malgré l'amélioration constante des infrastructures routières, des accidents de ce type ne se multiplient, d'une part en raison du nombre croissant de poids lourds en circulation, d'autre part en raison des conditions de travail des salariés de ce secteur d'activité.
Il lui demande donc quelles sont les mesures qu'il entend prendre, premièrement afin de favoriser d'autres modes de transport de marchandises (rail, association rail-route, etc.), deuxièmement afin d'assurer un strict respect de la réglementation du travail dans ce secteur d'activité. (N° 100.)
XIII. - M. Jean-Marie Poirier souhaite appeler l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences dommageables pour l'intérêt général et sur les risques financiers que font peser sur les collectivités locales les abus de recours contentieux en matière d'urbanisme.
Sans qu'il soit question de faire supporter au juge le poids de l'insécurité dans l'application qui est faite du droit de l'urbanisme, ni même d'accuser le développement constant du recours contentieux qui manifeste la participation active et l'intérêt légitime des citoyens pour leur cadre de vie, force est de constater la lourdeur et les limites de la voie contentieuse lorsqu'il s'agit de trancher certains différends.
Certains recours, où l'on distingue d'ailleurs l'expression d'intérêts particuliers qui se drapent d'intentions environnementales pour se faire reconnaître le droit à agir, peuvent avoir des conséquences économiques et financières particulièrement graves pour les aménageurs, les constructeurs et, naturellement, les collectivités locales engagés ensemble dans une opération.
Même lorsque le recours en cause n'est pas assorti de sursis à exécution, les délais d'instance et l'insécurité qui pèsent sur une opération sont largement dommageables à l'économie du programme concerné. Deux risques majeurs pèsent en effet sur la collectivité locale engagée dans une opération. D'une part, les partenaires de la collectivité d'accueil peuvent se retirer de l'opération en s'appuyant sur les clauses de non-recours parfois incluses au contrat de concession. D'autre part, les délais imposés par l'instruction de l'affaire allongent la durée de portage du programme et peuvent ainsi entraîner les concessionnaires dans de graves difficultés financières. Dans les deux cas, la collectivité locale hérite de la lourde charge d'assumer les conséquences financières du litige.
Depuis quelques années, des propositions ont été faites pour rendre plus efficace le droit de l'urbanisme et pour rechercher les voies de régler autrement les conflits, par la conciliation, la médiation ou l'arbitrage en matière administrative. Cela permettrait de limiter l'inflation contentieuse, source d'encombrement des tribunaux, et d'éviter que des recours juridiquement injustifiés ne viennent mettre à mal des initiatives porteuses pour le développement local. Par ailleurs, compte tenu des masses financières en cause, la question d'un dédommagement de la collectivité abusivement attaquée se pose avec acuité.
Il lui demande donc de bien vouloir lui préciser les intentions du Gouvernement en matière de lutte contre les recours abusifs en matière d'urbanisme. (N° 97.)
XIV. - M. Philippe Marini appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les problèmes d'éligibilité au fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée - FCTVA - des investissements effectués par les communes et leurs groupements dans le domaine du traitement des ordures ménagères.
Dans un domaine où les collectivités locales doivent assumer les conséquences des prescriptions législatives issues de la loi n° 92-646 du 13 juillet 1992 relative à l'élimination des déchets et mettre en oeuvre d'ici au 1er juillet 2002 les obligations de mise en extinction des décharges et de valorisation des déchets, il semble anormal que le régime de l'éligibilité au FCTVA des investissements effectués dans ce domaine puisse comporter les importantes incertitudes qui le caractérisent actuellement.
Les équipements de traitement des déchets construits par les communes ou leurs groupements intègrent en effet souvent un objectif de valorisation des déchets, ce qui constitue à la fois une stricte application de la loi du 13 juillet 1992 et un moyen de financer une partie du coût du traitement, limitant de la sorte le recours à la fiscalité locale.
La part de cette activité de valorisation des déchets est, très logiquement, soumise à la TVA, la récupération de celle-ci s'effectuant par la voie fiscale de droit commun au prorata des recettes de valorisation sur la totalité des recettes.
Pour le reste, les communes ou leurs groupements peuvent prétendre à l'éligibilité de leurs dépenses d'investissement au FCTVA. Or, l'éligibilité de ces dépenses d'investissement n'est admise qu'à la condition que la part de l'activité assujettie à la TVA reste « accessoire », c'est-à-dire en pratique inférieure à 20 % du chiffre d'affaires.
Cette situation fait non seulement peser une lourde incertitude sur les plans de financement des projets de construction d'usines d'incinération d'ordures ménagères, mais fait en outre ressortir une contradiction avec l'objectif de valorisation des déchets de la loi du 13 juillet 1992, puisque l'éligibilité au FCTVA est d'autant plus assurée que la part de la valorisation dans l'activité est faible.
C'est pourquoi il lui demande d'adapter ces règles afin que la partie de la TVA non récupérée par la voie fiscale, supportée sur les investissements relatifs aux installations de traitement des déchets puisse ouvrir droit aux attributions du FCTVA, et ce quelle que soit l'importance de la part des recettes de valorisation dans le chiffre d'affaires. (N° 82.)
XV. - M. Jacques de Menou alerte Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur le projet de plafonnement des aides à l'investissement touristique dans les zones éligibles à la prime à l'aménagement du territoire (PAT) et ses conséquences sur les zones hors PAT. La notification initiale du régime d'aide cadre dans le secteur du tourisme désavantagerait gravement les zones hors PAT (aides plafonnées à 15 %, voire 7,5 %, contre 30 % en zones PAT), dont l'activité touristique s'avère pourtant si nécessaire à leur développement. Il semble aussi injuste qu'inadapté à un aménagement harmonieux de notre territoire que les zones hors PAT, qui déjà ne bénéficient pas de grands projets industriels, soient écartées également des aides aux emplois touristiques.
Au cas où cette mesure serait confirmée, il souhaiterait connaître les dispositions qu'envisage le Gouvernement pour pallier ce cumul de handicaps dans les zones hors PAT. A la suite du Comité interministériel d'aménagement du territoire (CIAT) d'Auch, ces zones hors PAT devaient pouvoir bénéficier à nouveau des aides aux bâtiments industriels. Il lui demande si cette disposition est confirmée. (N° 56.)
XVI. - Mme Marie-Claude Beaudeau attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur l'insuffisance et l'injustice des conditions d'attribution des pensions de réversion (cumul, plafond, âge).
Elle lui fait remarquer que les bénéficiaires de ce droit, généralement des femmes, doivent vivre avec la seule pension de réversion de leur conjoint(e) décédé(e) et que si, pour le régime général, le taux de réversion est de 54 %, il demeure toujours fixé à 50 % dans la fonction publique et dans la plupart des régimes spéciaux.
Elle lui fait remarquer également que le passage à cinquante-cinq ans de l'ouverture des droits de réversion de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) et de l'Association des régimes de retraite complémentaire (ARRCO) crée une situation financière de plus en plus difficile pour les bénéficiaires entre cinquante et cinquante-cinq ans.
Elle lui demande quelles mesures elle envisage pour fixer à cinquante ans le bénéfice de la pension de réversion avec, dans l'immédiat, un passage du taux à 60 % et à plus long terme à 75 % de la retraite du conjoint(e) décédé(e).
Elle lui demande enfin quelles mesures elle envisage pour réparer l'injustice due au non-cumul de la pension de réversion et d'une retraite professionnelle, en permettant désormais le cumul des deux. (N° 18.)
XVII. - M. Franck Sérusclat attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé sur sa volonté de mettre en oeuvre une politique globale de prévention en matière d'alcool au volant, mais aussi d'accidents liés aux médicaments.
Ces derniers sont nombreux et meurtriers, dans la mesure où les Français figurent parmi les plus grands consommateurs de psychotropes et détiennent le triste record pour les médicaments antidépresseurs.
Cette consommation, alliée à celle de l'alcool, entraîne une polytoxicomanie qui a des conséquences importantes sur la vigilance au volant jusqu'à être à l'origine d'accidents mortels.
Ne devrait-il pas être envisagé de mener une grande campagne d'information et de prévention, à l'instar de celles réalisées dans les pays nordiques, afin que nos concitoyens soient réellement conscients des dangers qu'ils font courir aux autres, mais également à eux-mêmes ?
Par ailleurs, il semble indispensable d'accentuer la formation des médecins qui prescrivent ces médicaments et n'informent pas assez leurs patients des dangers encourus.
Enfin, une modification du conditionnement des produits neuroleptiques avec une mise en garde claire et forte pourrait également s'avérer une mesure efficace.
Il demande au secrétaire d'Etat à la santé s'il compte prochainement engager une politique dans ces directions, afin de continuer à faire baisser le nombre d'accidents de la circulation. (N° 34.)
XVIII. - M. Philippe Madrelle appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la situation des retraitées agricoles conjointes qui doivent se contenter d'une retraite de 1 400 francs par mois pour une moyenne de cinquante années de travail.
Il lui rappelle que ces agricultrices ont souvent commencé à travailler dès l'adolescence pour aider leurs parents à relever les exploitations. Dans la période des années soixante, les agriculteurs ont dû investir pour acheter les terres, construire les bâtiments agricoles et acquérir du matériel agricole.
Il souligne que tous ces efforts ont permis au secteur agroalimentaire de réaliser d'énormes profits et qu'aujourd'hui les terres et les bâtiments agricoles ne représentent plus aucune valeur, faute de repreneur.
En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser les mesures qu'il compte prendre afin que les retraitées agricoles conjointes d'exploitant puissent bénéficier d'une retraite agricole égale au moins à 75 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance. (N° 47.)
A dix-huit heures trente :
2. Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (n° 70, 1997-1998).
Rapport (n° 73, 1997-1998) de MM. Charles Descours, Jacques Machet et Alain Vasselle, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Avis (n° 79, 1997-1998) de M. Jacques Oudin, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Aucun amendement n'est plus recevable.
Explications de vote et vote sur l'ensemble.

Délai limite pour les inscriptions de parole
dans la discussion générale
du projet de loi de finances pour 1998

Le délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale du projet de loi de finances pour 1998 est fixé au mercredi 19 novembre 1997, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements
aux articles de la première partie
du projet de loi de finances pour 1998

Le délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la première partie du projet de loi de finances pour 1998 est fixé au jeudi 20 novembre 1997, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 14 novembre 1997, à une heure quarante.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





MODIFICATION DE LA COMPOSITION
D'UNE COMMISSION AD HOC

M. Guy Allouche, démissionnaire, est remplacé par M. Robert Badinter pour siéger au sein de la commission chargée d'examiner la proposition de résolution n° 15 (1997-1998) tendant à requérir la suspension des poursuites engagées contre un membre du Sénat.
Ce remplacement prend effet dès la présente publication.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON

ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du jeudi 13 novembre 1997


SCRUTIN (n° 12)



sur l'amendement n° 4, présenté par M. Charles Descours au nom de la commission des affaires sociales, tendant à supprimer l'article 3 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (taux de la CSG et suppression des cotisations d'assurance maladie).

Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages exprimés : 317
Pour : 220
Contre : 97

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 15.
Contre : 6. - MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.
Abstention : 1. - M. Pierre Jeambrun.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (94) :

Pour : 94.

GROUPE SOCIALISTE (75) :

Contre : 75.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Pour : 57.
N'ont pas pris part au vote : 2. - MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :

Pour : 45.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :

Pour : 9.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra


Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin

Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier


Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau

Henri Torre
René Trégouët
François Trucy


Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau


Jean-Pierre Demerliat
Jean Derian
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Aubert Garcia
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Pierre Lefebvre
Guy Lèguevaques
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars


Jean-Luc Mélenchon
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Régnault
Ivan Renar
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
Odette Terrade
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Henri Weber

Abstention


M. Pierre Jeambrun.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.

SCRUTIN (n° 13)



sur les amendements n° 17, présenté par M. Charles Descours au nom de la commission des affaires sociales, n° 42, présenté par M. Jacques Oudin au nom de la commission des finances, n° 55, présenté par M. Claude Huriet et les membres du groupe de l'Union centriste, et n° 66, présenté par M. Alain Gournac et les membres du groupe du Rassemblement pour la République, tendant à supprimer l'article 19 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (mise sous condition de ressources des allocations familiales).



Nombre de votants : 302
Nombre de suffrages exprimés : 301
Pour : 221
Contre : 80

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
N'ont pas pris part au vote : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :
Pour : 15.
Contre : 6. - MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.
Abstention : 1. - M. Pierre Jeambrun.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (94) :

Pour : 94.

GROUPE SOCIALISTE (75) :

Contre : 74.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Pour : 58.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :

Pour : 45.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :

Pour : 9.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët


François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Marcel Bony
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Aubert Garcia
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Claude Lise
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Paul Raoult
René Régnault
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Henri Weber

Abstention


M. Pierre Jeambrun.

N'ont pas pris part au vote


Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Danielle Bidard-Reydet
Nicole Borvo
Jean Derian


Michel Duffour
Guy Fischer

Pierre Lefebvre
Paul Loridant
Hélène Luc
Louis Minetti


Robert Pagès
Jack Ralite
Ivan Renar

Odette Terrade
Paul Vergès

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.

SCRUTIN (n° 14)



sur l'amendement n° 21, présenté par M. Charles Descours au nom de la commission des affaires sociales, tendant à insérer un article additionnel après l'article 23 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (encadrement de l'évolution des dépenses du secteur médico-social).



Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages exprimés : 316
Pour : 219
Contre : 97

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 15.
Contre : 6. - MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.
Abstention : 1. - M. Pierre Jeambrun.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (94) :

Pour : 93.
Contre : 1. - M. Emmanuel Hamel.

GROUPE SOCIALISTE (75) :

Contre : 74.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Pour : 58.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :

Pour : 44.
Abstention : 1. - M. Bernard Seillier.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :

Pour : 9.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët


François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Jean Derian
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Aubert Garcia
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Pierre Lefebvre
Guy Lèguevaques
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Régnault
Ivan Renar
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
Odette Terrade
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Henri Weber

Abstentions


MM. Pierre Jeambrun et Bernard Seillier.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.