M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 48 est présenté par M. Jolibois, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 105 est déposé par MM. Pagès, Dérian, Duffour et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent à remplacer la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 19 pour l'article 706-51 du code de procédure pénale par deux phrases ainsi rédigées : « Le procureur de la République ou le juge d'instruction, saisi de faits commis volontairement à l'encontre d'un mineur, désigne un administrateur ad hoc lorsque la protection des intérêts de celui-ci n'est pas assurée par ses représentants légaux ou par l'un d'entre eux. L'administrateur ad hoc assure la protection des intérêts du mineur et exerce, s'il y a lieu, au nom de celui-ci, les droits reconnus à la partie civile. »
Par amendement n° 89 rectifié, MM. Gournac et Gélard proposent, dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 19 pour l'article 706-51 à insérer dans le code de procédure pénale, de remplacer les mots : « saisi de faits commis volontairement à l'encontre d'un enfant mineur, procède » par les mots ; « dès qu'il est saisi de faits commis volontairement à l'encontre d'un enfant mineur, doit procéder d'office ou à la demande du parquet ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 48.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser que l'administrateur ad hoc pourra être désigné dès le stade de l'enquête.
Par ailleurs, cet amendement tend à préciser que l'administrateur ad hoc devra assurer la protection des intérêts du mineur dans leur ensemble, et non pas seulement exercer les droits de la partie civile.
M. le président. La parole est à M. Pagès, pour défendre l'amendement n° 105.
M. Robert Pagès. Notre proposition est identique à celle de M. le rapporteur.
Il peut arriver que la protection des intérêts de la victime ne soit pas assurée, au cours de la procédure, par les représentants légaux. Comme dans 80 % des cas les infractions sexuelles commises sur un mineur le sont par des membres de leur famille, les parents sont donc responsables soit directement, soit indirectement du fait de la complicité, et ne peuvent pas défendre les intérêts de l'enfant victime. La seule personne qui peut alors agir est l'administrateur ad hoc.
Comme la commission, nous proposons d'aller un peu plus loin que le projet de loi, afin que l'administrateur en question puisse être désigné dès le début de l'enquête et assurer la protection des intérêts du mineur.
Les personnes intéressées à ce problème, que nous avons consultées, sont à l'unanimité favorables à une telle proposition.
M. le président. La parole est à M. Gélard, pour défendre l'amendement n° 89 rectifié.
M. Patrice Gélard. Cet amendement vise tout d'abord à adopter une rédaction plus ferme, avec la substitution des mots « doit procéder » au mot « procède ». Mais le présent de l'indicatif valant impératif en droit, cette modification n'est peut-être pas utile, et je suis donc prêt à conserver l'ancienne rédaction sur ce point.
Par ailleurs, cet amendement tend à ouvrir la possibilité au parquet de demander au juge en charge du dossier de désigner un administrateur ad hoc pour exercer les droits civils de l'enfant.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 89 rectifié ?
M. Charles Jolibois, rapporteur. L'amendement n° 89 rectifié serait à mon avis satisfait par l'adoption des amendements n°s 48 et 105.
M. Patrice Gélard. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard. Compte tenu des propos de M. le rapporteur, je retire l'amendement n° 89 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 89 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 48 et 105 ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je suis réservée sur ces amendements, car la procédure présentée dans le projet de loi nous permettra à mon avis d'aller plus vite que si l'intervention du procureur est prévue nécessairement.
Si le juge des tutelles peut procéder à la désignation de l'administrateur ad hoc soit sur requête du procureur - cela peut toujours être possible - soit d'office, nous pourrons alors mieux agir dans l'urgence. N'oublions pas que l'ordonnance visant l'urgence peut être rendue dans la journée, voire dans un délai de deux heures, et qu'elle est susceptible d'appel, alors que la décision du procureur de la République ne l'est pas.
C'est donc dans un souci de rapidité que je préférerais que l'on en reste au texte actuel.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 48 et 105.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole contre les amendements.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je constate que tant la commission que nos collègues Pagès et Gélard ont recopié le texte qui nous est transmis par l'Assemblée nationale et qui évoque le procureur de la République ou le juge d'instruction « saisi de faits commis volontairement à l'encontre d'un mineur ».
Je ne comprends pas très bien ce que cela veut dire ! On commet non pas des faits, mais des infractions.
En outre, je voudrais savoir s'il s'agit, dans ce cas, de crimes et de délits, seulement de délits ou seulement de crimes, et s'il s'agit de tous crimes et de tous délits ou seulement d'infractions sexuelles. Le moins que l'on puisse dire est que tout cela a besoin d'être précisé.
Il n'est en tout cas pas question que nous votions en l'état ces amendements, puisque nous ne savons pas de quelles infractions il s'agit. Il n'est pas même évident qu'il s'agisse d'infractions, puisqu'il n'est question que de faits !
M. Charles Jolibois, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Je ferai remarquer à M. Dreyfus-Schmidt, dont la remarque est fort intéressante, que, si le texte a été rédigé de cette manière, c'est parce que c'est le texte de la loi du 10 juillet 1889.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas une raison pour recopier éternellement des bêtises !
M. Charles Jolibois, rapporteur. Ce n'est pas une bêtise ; c'est, de votre point de vue, une rédaction inélégante ! (Sourires.)
M. Robert Pagès. Il fallait déposer un amendement, mon cher collègue !
M. le président. Un texte de loi déjà promulgué ne peut pas être une bêtise puisqu'il résulte du vote du Parlement ! (Nouveaux sourires.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il devait y avoir urgence !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 48 et 105, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article 706-51 du code de procédure pénale.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE 706-51-1 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE