M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Hoeffel, pour explication de vote.
M. Daniel Hoeffel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe de l'Union centriste votera, bien entendu, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. Dans le contexte budgétaire actuel et compte tenu de la situation présente de l'emploi, c'est le meilleur possible.
En outre - vous l'avez rappelé, monsieur le ministre - il prévoit une ouverture européenne sur le plan de la fonction publique. L'Europe se construit aussi, et surtout, à partir d'actions concrètes comme celle-là. Soyez-en remercié.
M. Pierre Laffitte. Très bien !
M. Daniel Hoeffel. L'amendement concernant la représentativité syndicale a, certes, soulevé certains problèmes. Sur la forme, notre rapporteur, dont je tiens à saluer le travail de préparation et de présentation de ce texte, a dit ce qu'il fallait. Sur le fond, nous sommes d'accord.
Vous l'avez rappelé à l'instant, monsieur le ministre, ce sont des critères réalistes et précis qui ont présidé à l'élaboration du texte sur la représentativité syndicale. C'est une raison supplémentaire, pour nous, de l'accepter.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous approuvons non seulement ce texte, mais, au-delà, monsieur le ministre, la politique réaliste que mène le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation que vous êtes.
Oserai-je ajouter qu'avec ce texte vous respectez l'esprit dans lequel d'autres ont préalablement été votés, tout cela pour le plus grand bien de la fonction publique ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire est fidèle à l'esprit qu'a entendu lui donner la commission des lois, et notamment son rapporteur, M. Blaizot, que je tiens à remercier pour l'excellence de son travail, qui a largement contribué à améliorer ce texte, et pour la prise en considération des amendements que les uns et les autres nous avons déposés pour faire en sorte que ce projet réponde à l'attente de celles et de ceux qui travaillent dans la fonction publique territoriale ou qui y sont directement ou indirectement associés.
Le texte qui nous est soumis aujourd'hui appelle de ma part une remarque sur la procédure et deux observations sur le contenu.
Ma remarque sur la procédure est de pure forme. En fait, nous n'avons pas été habitués, ni avec votre prédécesseur, M. Hoeffel, ni avec vous-même, monsieur le ministre, à ce que le Gouvernement agisse ainsi.
Avant de prendre son initiative sur la représentativité, que par ailleurs nous approuvons, il eût, en effet, été souhaitable que le Gouvernement consulte les organisations représentatives des élus, qui sont directement intéressés, et plus particulièrement l'Association des maires de France, au sein de laquelle je travaille sur la fonction publique territoriale.
Bien sûr, cela ne change rien au fond, mais respecter cette procédure eût permis de travailler mieux et eût évité des interventions inutiles en séance.
Ma première observation sur le fond concerne l'article 52 bis ajouté par l'Assemblée nationale, et qui prévoit que les stagiaires qui ne sont pas gardés par une collectivité pourront se réinscrire sur une liste d'aptitude pendant une période de deux ans. Cela n'appelle pas de remarque particulière.
Ce qui a attiré mon attention, en revanche, c'est le fait qu'ils puissent être maintenus sur cette liste d'aptitude jusqu'à l'organisation d'un prochain concours. Si ce concours a lieu dans un délai inférieur à deux ans, aucun problème. Mais s'il est organisé au-delà de cette période, le problème peut se poser vis-à-vis des autres agents qui sont sur cette liste d'aptitude, qui n'ont pas pu intégrer une collectivité - comme l'aurait fait une personne qui a été stagiaire dans une collectivité pendant un an - et qui eux, au bout de deux ans, perdent le bénéfice de l'inscription sur la liste d'aptitude.
Il y aurait ainsi deux catégories de postulants : celle des stagiaires qui ont eu la possibilité d'intégrer une collectivité et qui auront la possibilité de rester sur la liste d'aptitude jusqu'à l'organisation du prochain concours, et celle des personnes qui n'auront pas eu la chance d'intégrer une collectivité et qui, elles, au bout de deux ans, ne figureront plus sur la liste d'aptitude.
Peut-être ces situations seront-elles marginales par rapport à l'ensemble de celles que nous serons amenés à étudier. Je tenais néanmoins à attirer votre attention sur ce problème, que l'Association des maires de France, en tout cas, examinera d'un peu plus près.
Enfin, il est un dernier point qui n'a pas été réglé, ni à l'Assemblée nationale - un amendement avait été déposé en ce sens - ni au Sénat, où notre rapporteur, M. Blaizot, avait défendu un amendement, et moi-même un autre. Il s'agit du cas d'un certain nombre d'agents contractuels dont le statut n'est sorti que tardivement après la parution des lois de 1984 et de 1986.
Actuellement, en effet, aussi bien dans les régions, dans les départements que dans les communes, ces agents contractuels, donc non titulaires, connaissent depuis maintenant près de dix ans une situation de précarité, soit parce qu'ils n'ont pas réussi le concours, soit même parce qu'ils ne l'ont pas passé. Or, bien qu'ils donnent entière satisfaction aux élus, conseillers généraux, conseillers régionaux et maires, ces agents contractuels ne pourront bénéficier du présent texte.
Monsieur le ministre, vous n'avez pas souhaité résoudre ce problème, nous répondant simplement qu'une circulaire ministérielle inviterait les préfets à veiller à ce que le texte définitif tel que nous allons l'adopter ne soit pas appliqué avec trop de rigueur.
Reste que ce problème important préoccupe les élus et les agents. Je trouve donc dommage que nous n'ayons pas profité de cette occasion pour le régler, car cela correspondait à une demande forte de l'ensemble des maires de France, maires aussi bien de grandes villes que de communes moins importantes.
Cela étant, monsieur le ministre, nous n'allons pas nous arrêter à cette insatisfaction ponctuelle pour vous refuser notre suffrage. Sachez que l'ensemble du groupe du RPR approuvera ce texte, en vous remerciant des efforts que vous déployez pour développer la concertation avec l'ensemble des élus, plus particulièrement avec la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avions approuvé ce texte, en première lecture, considérant qu'il résultait d'un large accord syndical et que, par ailleurs, un certain nombre de dispositions issues de nos discussions, y compris d'amendements que nous avions proposés nous-mêmes, l'avaient amélioré d'autant.
Tel qu'il nous revient de l'Assemblée nationale, le projet de loi a subi quelques modifications, dont certaines nous semblent très positives, notamment celles qui concernent le CNFPT, le Centre national de la fonction publique territoriale, en ce qu'elles peuvent améliorer sa gestion comptable. C'est une bonne chose, et nous souscrivons tout à fait au dispositif.
Nous regrettons toutefois que la commission mixte paritaire n'ait pas retenu un amendement de notre groupe qui, rejeté par le Sénat, avait été finalement adopté par l'Assemblée nationale. Il s'agit ici, bien entendu, de l'adoption internationale et du congé non rémunéré, plutôt que de la mise en disponibilité. Je vois là un « enfantillage » du Sénat, que je trouve un peu mesquin. La Haute Assemblée n'a pas voulu, en effet, se déjuger sur ce point, à quelques mois de distance.
Tout cela n'est que broutilles et ne change en rien notre position. L'essentiel, c'est le texte introduit par le Gouvernement, qui constitue un amendement majeur et, malgré tout, subreptice, les deux mots n'allant pas, dans mon esprit, tout à fait de pair.
Majeur, en effet, cet amendement introduit des dispositions sur la représentativité syndicale qui me semblent d'une importance capitale en ce sens qu'elles risquent de geler complètement les positions actuelles. D'ailleurs, je n'ai pas été complètement convaincu par les propos de M. le ministre tout à l'heure. Je ne dis pas que les motivations de telles dispositions soient méprisables ; je ne dis pas que le souci de freiner l'émiettement d'un syndicalisme déjà fortement divisé soit irrecevable ; je ne dis pas que la crainte évoquée par certains de voir se développer de pseudo-syndicats, notamment d'extrême droite, soit une vue de l'esprit, bien au contraire. Cependant, je m'interroge sur les conséquences. A vouloir brider l'extrême droite, ce que je ne peux qu'approuver, on risque de brider aussi l'émergence de toute nouvelle forme syndicale, fût-elle parfaitement démocratique.
A tout le moins, une étude d'impact sur les conséquences possibles des dispositions proposées par le Gouvernement était nécessaire.
On ne devrait pas légiférer dans l'urgence, monsieur le président, et même, dans le cas présent, dans la précipitation, sur un sujet qui touche les libertés fondamentales. Il faudrait une réflexion sereine. Cette réflexion ne semble pas du tout avoir prévalu pour l'article 70 nouveau.
Voilà pourquoi, malgré l'intérêt que présente le texte dans ses autres dispositions, nous nous abstiendrons sur l'ensemble. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les explications de M. le ministre. Permettez-moi une explication de vote peut-être un peu plus concrète, sous forme de question, maladroite sans doute, mais directe : une grande fédération de syndicats d'enseignants récemment constituée, syndicats ayant, par ailleurs, une très large représentativité, puisqu'ils sont même majoritaires dans un certain nombre d'élections, sera-t-elle considérée comme représentative pour la fonction publique ?
M. Jean-Claude Peyronnet. Très bonne question ! C'est un vrai problème !
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. S'agissant, monsieur Vasselle, de l'article 52 bis, le texte tel qu'il est rédigé est conforme à la régle générale. En réalité, même si nous n'y pensons pas parce que, souvent, les concours sont plus fréquents, la règle générale, c'est deux ans ou le prochain concours. Il n'y aura donc pas de disparité entre les deux catégories de personnes, comme vous le craigniez tout à l'heure.
Sur les consultations, je tiens, pour l'information du Sénat, à préciser que, lorsque la décision a été prise d'introduire l'amendement relatif à la représentativité syndicale, j'ai fait porter le jour même un courrier aux trois organisations d'élus : l'Association des présidents de conseils régionaux, l'APCR, l'Association des présidents de conseils généraux, l'APCG, et l'Association des maires de France, l'AMF. J'ai reçu une lettre d'accord explicite de M. le président Giscard d'Estaing, un coup de téléphone très explicite et très favorable de M. le président de l'AMF, mais je n'ai toujours rien reçu de l'APCG !
A la question posée par M. Pagès, je réponds : oui. J'ai déjà expliqué à M. Laffitte quel était le dispositif. S'agissant de la FSU, la fédération syndicale unitaire - soyons clairs : c'est bien d'elle qu'il est question - effectivement, j'ai rencontré à plusieurs reprises, ainsi d'ailleurs que mon directeur de cabinet, M. Deschamps. Une ultime réunion a eu lieu quelques jours avant le débat au Parlement, mais nous nous étions vus depuis plusieurs mois. Cette affaire a mis simplement du temps à mûrir.
Les choses sont claires : lorsque la FSU aura des représentants dans l'ensemble des conseils supérieurs, elle sera considérée comme représentative au titre du premier alinéa. Mais, d'ores et déjà, compte tenu de l'activité de cette fédération-là où elle est déjà implantée, elle est bien évidemment représentative. Quand elle voudra s'implanter ailleurs aussi, j'imagine qu'elle se montrera particulièrement active. Il n'est pas dans mon rôle d'expliquer par le menu comment procèdent les syndicats, mais je sais que, lorsqu'un syndicat digne de ce nom veut s'implanter quelque part, il prend des contacts, recrute des militants, commence à avoir une activité, distribue un certain nombre d'informations, de journaux, de tracts, prévoit des réunions, que sais-je encore ?
A partir de là, la représentativité peut être constatée et il devient possible à ce syndicat de se présenter pour la première fois à une élection.
En cas de contentieux et de contestation sur la représentativité, on peut se référer à une jurisprudence constante, très riche et très claire, pour le secteur privé : le tribunal, statuant dans les quinze jours, décide, au vu d'un certain nombre d'éléments de fait, qu'il y a effectivement représentativité. Donc, cela ne pose pas de problème quant à la présentation effective de la liste à l'élection. Aussi je crois que, pour ce type d'organisation syndicale, il n'y a vraiment aucune espèce d'inquiétude à avoir.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
M. Robert Pagès. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
M. Jean-Claude Peyronnet. Le groupe socialiste également.

(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à seize heures trente-cinq.)