M. le président. Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-72, M. Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Michel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 25, un article additionnel ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 1997, le taux du prélèvement affecté au fonds national pour le développement du sport prévu à l'article 48 de la loi de finances pour 1994 (n° 93-1352 du 30 décembre 1993) est porté à 2,6 %. »
Par amendement n° I-90, M. Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles, propose d'insérer, après l'article 25, un article additionnel ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 1997, le taux du prélèvement affecté au fonds national pour le développement du sport prévu à l'article 48 de la loi de finances pour 1994 (n° 93-1352 du 30 décembre 1993) est porté à 3 % .»
Par amendement n° I-117, M. Lesein propose d'insérer, après l'article 25, un article additionnel ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 1997, le taux du prélèvement au profit du fonds national pour le développement du sport prévu à l'article 48 de la loi de finances pour 1994 (n° 93-1352 du 30 décembre 1993) est porté à 3 %, le produit de ce prélèvement étant affecté au fond national pour le développement du sport dans la limite de 900 millions de francs. »
Par amendement n° I-222, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 25, un article additionnel ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 1997, le taux du prélèvement affecté au fonds national pour le développement du sport prévu à l'article 48 de la loi de finances pour 1994 (n° 93-1352 du 30 décembre 1993) est porté à 3 %. »
Par amendement n° I-238, M. Egu propose d'insérer, après l'article 25, un article additionnel ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 1997, le taux du prélèvement affecté au fonds national pour le développement du sport prévu à l'article 48 de la loi de finances pour 1994 (n° 93-1352 du 30 décembre 1993) est porté à 2,6 %. »
Par amendement n° I-269, MM. Dugoin, Gerbaud et Oudin proposent d'insérer, après l'article 25, un article additionnel ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 1997, l'ensemble des jeux, paris ou loteries organisés et commercialisés par la société "La Française des jeux" est soumis à un prélèvement de 3 % de la masse des enjeux constatés.
« « Les taux particuliers à chacun des prélèvements et les modalités d'utilisation des recettes ainsi dégagées sont fixés par décret. »
La parole est à M. Masseret, pour défendre l'amendement n° I-72.
M. Jean-Pierre Masseret. Monsieur le président, cet amendement va vous intéresser, vous qui présidez le groupe d'études sur le sport. En effet, il vise, à compter du 1er janvier 1997, à relever le taux du prélèvement affecté au fonds national pour le développement du sport prévu à l'article 48 de la loi de finances pour 1994, pour le porter à 2,6 %.
Nous savons tous que le budget du sport est relativement faible, en tout cas insuffisant au regard des objectifs ambitieux que nous avons dans le domaine du sport. Nous savons tous combien le sport est un facteur d'insertion sociale important. Nous connaissons les efforts faits par les collectivités territoriales, les communes, les conseils généraux et même maintenant les conseils régionaux.
Or, lorsque nous examinons les moyens qui sont mis à la disposition du FNDS, nous constatons toujours un décalage entre la théorie et la pratique, même si ce décalage tend à s'estomper au fil du temps. Un effort supplémentaire doit donc être fait.
L'amendement que je présente, au nom du groupe socialiste, n'est pas excessif, puisqu'il vise à fixer à 2,6 % le taux de prélèvement au bénéfice du FNDS, alors que d'autres amendements, déposés par des sénateurs assis de l'autre côté de l'hémicycle, prévoient de porter ce taux de prélèvement à 3 %.
Je suis sûr, monsieur le président, que vous userez de votre autorité pour faire approuver cet amendement parfaitement raisonnable. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Lesein, pour présenter l'amendement n° I-90.
M. François Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, on vient de vous lancer un appel en tant que président du groupe « sports ». J'espère que non seulement vous, mais tous nos collègues seront sensibles à la proposition de la commission des affaires culturelles.
Je tiens tout d'abord à vous dire, mes chers collègues, que la commission des affaires culturelles a décidé de pas approuver le budget du sport si le FNDS ne vient pas compenser le manque des inscriptions budgétaires. Elle propose donc de porter à 3 % le prélèvement sur les sommes misées à La Française des jeux et, pour une partie, sur le PMU.
En effet, on ne peut pas se contenter de discours sur les bienfaits du sport, ni de la manifestation d'ambitions nationales dans les grandes compétitions. Encore faut-il dégager les moyens nécessaires au développement du sport.
Par ailleurs, il faut constater que se développe actuellement une France sportive à deux vitesses : pour les uns, des ressources sans cesse croissantes, provenant des retransmissions télévisées ; pour les autres des recettes en diminution, précisément à cause de ces spectacles télévisés en augmentation.
Il convient donc, pour permettre aux clubs non professionnels de continuer à jouer leur rôle éducatif, de dégager des financements à la hauteur de ce que nous souhaitons pour le bien de notre jeunesse.
Telle est la position que j'avais à défendre, au nom de la commission des affaires culturelles, et que je soutiens fort volontiers comme les années passées. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Philippe Richert. Très bien !
M. le président. Je vous donne de nouveau la parole, monsieur Lesein, pour défendre l'amendement n° I-117.
M. François Lesein. Cet amendement, que j'ai déposé en mon nom personnel, est un amendement de repli.
Pourquoi cet amendement de repli ? Il est prévu dans le projet de budget du ministère de la jeunesse et des sports de prélever, pour assurer le maintien de l'opération sport-emploi, 50 millions de francs sur le FNDS au détriment des directions départementales et régionales des sports. Mes chers collègues, cela nous intéresse tous : ce sont les moyens dont nous disposons dans chacun de nos départements et dans chacune de nos régions qui sont en cause.
Je pense donc qu'il serait sage - et ce serait possible - de porter le taux du prélèvement au profit du FNDS à 3 % tout en limitant à 900 millions de francs le produit de ce prélèvement affecté à ce fonds. Il retrouverait ainsi les 50 millions de francs qui lui sont volés.
Le terme « volés » est peut-être excessif, monsieur le président. Pour moi, il paraît tout à fait raisonnable et j'espère, mes chers collègues, qu'il vous ira droit au coeur.
M. Jean-Louis Carrère. On a entendu pire ! On a parlé de « racket » !
M. le président. La parole est à Mme Luc, pour défendre l'amendement n° I-222. Mme Hélène Luc. Ce sont toujours les mêmes qui interviennent sur le FNDS, n'est-ce pas monsieur Lesein ?
Il est reconnu depuis fort longtemps à la pratique sportive, qu'elle soit individuelle ou collective, des vertus éducatives et éthiques indispensables au développement harmonieux de l'individu comme de la collectivité.
« Un esprit sain dans un corps sain », disaient ces Latins qui ont pourtant laissé tomber en déchéance ce grand rassemblement sportif qu'étaient les jeux Olympiques des Grecs anciens.
La transition est donc toute trouvée.
L'année 1996 restera pour le mouvement sportif et olympique français comme une année exceptionnelle.
Ainsi, le centenaire des jeux Olympiques modernes, autour desquels, hélas ! le commerce a pris une place de plus en plus envahissante, a été marqué par l'échec financier des jeux d'Atlanta. Notre pays y a conquis, dans de nombreux sports et avec des athlètes issus de toutes les couches de la population, trente-sept médailles olympiques. Nous nous en sommes félicités car ils ont fait l'honneur de la France.
Mais ce résultat ne doit pas faire oublier l'essentiel : il est obtenu en optimisant au mieux les faibles moyens dont dispose le sport de masse et notamment les treize millions de licenciés de nos clubs.
Pour être tout à fait précis, savez-vous combien le budget de la jeunesse et des sports consacre pour chaque athlète ou licencié ? Nous avons fait le calcul : dix francs par sportif, c'est-à-dire le prix de deux barres chocolatées données en signe d'encouragement au gamin qui vient de finir un cross en plein hiver ou le critérium de son club cycliste sur le tourniquet des rues de sa ville.
En 1976, en même temps que fut créé le Loto national, a été mis en place le fonds national de développement du sport, qui, grâce à un prélèvement fixe sur les enjeux, était destiné à fournir une nouvelle recette extra-budgétaire à nos clubs sportifs.
Ainsi, 1976, l'année où Guy Drut, aujourd'hui ministre des sports, gagne la médaille d'or du 110 mètres haies aux jeux de Montréal, voit la création du FNDS.
Vingt ans plus tard, contrairement aux principes fondateurs, le FNDS a déjà été mis à contribution deux fois : la première fois pour aider à la couverture des frais d'organisation des jeux d'hiver de 1992 à Albertville ; la seconde fois - et cela dure encore - pour la mise en oeuvre des chantiers de construction ou de rénovation des stades où doivent se dérouler les matchs de la Coupe du monde de football en 1998 manifestation qui constitue un événement très attendu, notamment par notre jeunesse.
Les enfants de Saint-Denis ou d'Aubervilliers, qui vivent à l'ombre du stade de France, ont droit à ce que tout soit fait pour qu'ils puissent pratiquer le sport qu'ils souhaitent dans un club de quartier, dans le gymnase d'une cité HLM ou d'un collège ; cette observation vaut d'ailleurs pour tous les enfants.
Cela fait d'ailleurs plusieurs années que cette question se pose.
L'an dernier, notre assemblée avait d'ailleurs voté à l'unanimité - n'est-ce pas, monsieur Lesein ? - un amendement relevant le taux de prélèvement au profit du FNDS, mais le ministre des finances l'avait annulé à l'occasion de la seconde délibération.
Cette année, les données sont presque les mêmes, à une différence près, et elle n'est pas négligeable. En effet, lors du débat sur le financement de la sécurité sociale, on a étendu la CSG - après le RDS, ici encore poisson-pilote - aux enjeux récoltés par la Française des jeux. De ce fait, l'argument utilisé jusqu'ici pour réfuter tout amendement tendant à accroître les moyens du FNDS à partir de ces enjeux tombe de lui-même : on ne peut plus nous dire que cela nuit à l'attractivité des jeux.
Vaut-il mieux exonérer les entreprises de quelques-unes de leurs obligations envers la sécurité sociale que permettre au mouvement sportif de disposer des moyens nécessaires à son plein épanouissement ?
Au-delà de la polémique, il s'agit de permettre effectivement au sport français de continuer à nous émouvoir en permanence, c'est-à-dire pas seulement une fois tous les quatre ans, lors des grands événements olympiques, et de captiver nos enfants tout en les éduquant. Or le fait d'accroître le prélèvement au profit du FNDS peut y contribuer.
Nous aurons ensuite à nous interroger sur le projet de budget de la jeunesse et des sports pour 1997, qui enregistre une nouvelle régression, tandis que 1996 s'achève par l'annulation de 20 millions de francs de crédits.
Arrêtons ce processus, mes chers collègues ! Pour cela, je vous invite à adopter cet amendement n° I-222 : en le votant, vous serez fidèles à l'action que vous avez menée l'an dernier sur le même sujet.
M. le président. La parole est à M. Egu, pour défendre l'amendement n° I-238.
M. André Egu. Le budget de la jeunesse et des sports, qui avait dépassé 3 milliards de francs voilà quelques années et qui atteignait 2,998 milliards de francs en 1996, va encore diminuer de 69 millions de francs en 1997.
Dans le même temps, on demande toujours plus aux associations sportives et aux fédérations, ainsi qu'au comité olympique, qui a pourtant récemment fait, à Atlanta, la preuve de son efficacité.
Or le ministère de la jeunesse et des sports lance de nouvelles actions pour répondre à la demande sociale et sportive, pour contribuer à l'amélioration des rythmes scolaires y consacrant plus de 40 millions de francs.
Parallèlement, le monde associatif et le comité olympique lancent une grande opération nationale pour valoriser, dynamiser la vie associative et sportive, ses modes d'organisation et ses valeurs, en donnant aux associations tous les outils pour informer, former et aider les bénévoles, afin qu'ils répondent mieux à la demande sociale, sportive et éducative.
Tous les acteurs du monde sportif et du ministère ont absolument besoin de ce supplément financier.
Une légère augmentation du prélèvement affecté au FNDS n'aura qu'une petite incidence sur les résultats de la Française des jeux, qui entretient, par ailleurs, des cyclistes sportifs de haut niveau, lesquels lui coûtent très cher, alors que nous défendons le sport de masse.
C'est pourquoi, au cas où l'amendement qui vise à porter le prélèvement à 3 % n'était pas accepté, je vous invite, mes chers collègues, à le porter à 2,6 %. Pour ma part, je voterai d'abord l'amendement n° I-90, que la commission des affaires culturelles a approuvé à l'unanimité.
M. le président. La parole est à M. Dugoin, pour présenter l'amendement n° I-269.
M. Xavier Dugoin. Je voudrais ajouter quelques arguments à ceux qui ont été excellemment développés par les orateurs précédents, en particulier par M. Lesein.
En vérité, tous ces amendements procèdent de la même logique et cela pour trois raisons.
Premièrement, ce sont des amendements de continuité, car la réévaluation des sommes mises à la disposition du FNDS, qui a été créé en 1975 par M. Mazeaud, est une revendication à la fois unanime et très ancienne du mouvement sportif.
Sans remonter à la nuit des temps, il convient de rappeler qu'en 1983 celui qui présidait aux destinées du Comité national olympique français, représentant donc quelque 160 000 associations et 15 millions de licenciés, estimait que le montant minimal permettant d'assurer le fonctionnement du FNDS, au regard de ses missions, était de l'ordre du milliard de francs. Or, aujourd'hui, treize ans plus tard, le montant qui nous est proposé est de 850 millions de francs.
C'est donc, à l'évidence, pour répondre au décalage existant entre les besoins et les moyens proposés que nous avons déposé ces amendements.
Deuxièmement, tous ces amendements ont un certain caractère circonstanciel.
A cet égard, je pense d'abord aux résultats historiques du sport français aux derniers jeux Olympiques d'Atlanta, où, je le rappelle, nos sportifs ont obtenu trente-sept médailles, ce qui a situé la France au cinquième rang du concert des nations, ...
M. Jean-Louis Carrère. C'est grâce à un investissement bien antérieur !
M. Xavier Dugoin. ... démontrant par là même, dans la situation de concurrence la plus difficile, l'excellence du mouvement sportif français.
Ce sont également des amendements circonstanciels au regard de l'importance du sport en termes de cohésion sociale : nul ne peut nier son impact comme facteur d'insertion et d'intégration, en particulier dans les quartiers difficiles.
Au passage, je signale que le montant proposé pour 1997, soit 850 millions de francs, s'il est supérieur de 30 millions de francs à celui de 1996, est nettement inférieur à celui qui nous était proposé pour 1995 : 884 millions de francs.
Trosièmement, il s'agit d'amendements de cohérence avec la vocation initiale du FNDS, institution sans équivalent dans les autres pays.
Le FNDS a été créé pour fournir un financement extrabudgétaire au sport de masse, au sport amateur. Or, depuis longtemps, nous constatons que, selon une mauvaise habitude, ce fonds est sinon « volé », comme l'a dit notre collègue M. Lesein, du moins détourné vers d'autres actions, dont la liste est fort longue.
Par exemple, les déficits du comité d'organisation des jeux Olympiques d'Albertville, lesquels se sont déroulés en 1992, ont été pris en compte par le FNDS. Ainsi, plus de 27 millions de francs sont encore inscrits à ce titre pour 1997. On peut espérer que ce sera la dernière fois.
Autre exemple : le FNDS a, pendant longtemps, permis de soutenir, à grand frais, l'écurie Ligier.
C'est encore l'organisation de la Coupe du monde de football, qui a déjà coûté au FNDS 120 millions de francs en 1995 et 75,5 millions en 1996, et qui devrait de nouveau lui coûter 75 millions de francs en 1997.
Bref, au fil des années, le FNDS apparaît comme l'annexe commode, facilement ponctionnable, du budget du ministère de la jeunesse et des sports. Il se voit imputer tout ce qui n'a pu être inscrit sur les titres III et IV du budget du ministère de la jeunesse et des sports.
Si, par l'amendement n° I-269, M. Gerbaud, M. Oudin et moi-même proposons de faire passer de 2,4 % à 3 %, le prélèvement sur la masse des enjeux constatés de la Française des jeux, ce n'est par hasard : c'est tout simplement parce que cette augmentation de 0,6 point devrait rapporter un produit supplémentaire d'un peu plus de 200 millions de francs, ce qui permettrait de passer la barre du milliard de francs. M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il s'agit là de questions qui préoccupent toujours beaucoup la commission des finances. J'ai d'ailleurs consulté le compte rendu de la séance du 25 novembre 1995 pour m'assurer que notre commission n'allait pas se déjuger.
M. François Lesein. Et de 1993 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. En 1994 - je parle sous le contrôle des spécialistes qui siègent ici - le Sénat avait porté le taux de prélèvement de 2,3 % à 2,4 %. Peut-on aller plus loin ?
M. François Lesein. Oui !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il est apparu à la commission des finances que le Gouvernement pourrait l'éclairer.
Elle tient cependant à rappeler au Sénat que toute augmentation du prélèvement a pour effet de réduire soit la part de recettes qui alimentent le budget de l'Etat soit les gains, ce qui pose quelques problèmes sur le plan commercial.
Selon les informations que la commission des finances a receuillies, il faudrait, semble-t-il, redéfinir les règles de tous les jeux instantanés, les arrêter pour en créer de nouveaux, alors qu'ils constituent les deux tiers du chiffre d'affaires de la Française des jeux.
La commission des finances a, par ailleurs, constaté que les moyens financiers consacrés au sport avaient été accrus au cours des années.
En conclusion, elle a estimé que, après avoir entendu le Gouvernement, il conviendrait de s'en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Voilà un débat qui n'est pas nouveau et qui avait déjà donné lieu, l'année dernière, à une longue discussion.
Mme Hélène Luc. Très longue !
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Il peut, certes, être tentant de prélever sur les jeux pour développer les moyens du sport et, en particulier, par le biais du FNDS, du sport de masse.
Nous sommes tous attachés ici au développement du sport en France, de même que nous nous sommes tous réjouis des résultats remarquables de l'équipe de France aux derniers jeux Olympiques, fruit d'une politique menée depuis plusieurs années et financée en partie par le FNDS.
La question qui se pose est de savoir si, aujourd'hui, le FNDS a besoin de ces moyens supplémentaires et, dans l'affirmative, si c'est bien par un prélèvement sur les recettes de la Française des jeux que nous devons accorder ces moyens supplémentaires.
Je commencerai par envisager le problème tel qu'il se pose pour la Française des jeux.
Nous devons être attentifs à ne pas tuer la poule aux oeufs d'or. Or nous sommes arrivés à un niveau de prélèvement tel que c'est une crainte que nous pouvons avoir.
Les sommes qui sont misées sur les jeux se répartissent entre les gagnants, l'Etat et les organisateurs.
Pour ce qui concerne les organisateurs, leurs gains ont baissé fortement : pour 100 francs misés, la Française des jeux percevait 8,08 francs jusqu'en 1994 ; à partir de l'année prochaine, elle ne percevra plus que 6,04 francs. Il est clair que nous sommes à la limite de ce qui paraît incompressible.
Comme il n'est pas envisageable non plus de diminuer les recettes du budget général, ce qui est proposé dans ces amendements reviendrait à diminuer le taux de retour aux joueurs. Je rappelle que ce taux de retour est déjà relativement bas puisque seulement 58 % des enjeux sont redistribués aux gagnants, alors que le taux de retour est de 70 % pour les paris hippiques et de 80 % pour les casinos. Nous devons donc veiller à ne pas voir se réduire, du fait d'une réduction de l'assiette, le rendement que l'on escompterait d'une augmentation du taux.
En ce qui concerne les moyens du sport en général, je rappelle que, malgré le contexte budgétaire très difficile de l'année 1997, le chapitre 43-91, qui concerne les subventions au sport, vous est proposé à un niveau supérieur de 6 millions de francs à celui qu'il atteignait l'année dernière.
Pour ce qui est du FNDS, l'augmentation des recettes a été spectaculaire dans la période récente puisqu'on est passé de 739 millions de francs en 1993 à 769 millions de francs en 1994, puis à 823 millions de francs en 1996 et que nous prévoyons 857 millions de francs pour 1997.
M. François Lesein. Et en 1995 ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. En outre, un effort particulier a pu être réalisé en faveur du sport de masse grâce à la sortie progressive du compte des dépenses afférentes aux grands événements sportifs qui, en 1993, représentaient encore un quart des recettes, soit 170 millions de francs.
En 1996, nous avions pris en charge, dans le budget général, le financement intégral du Stade de France, afin de dégager d'autant le FNDS. Ainsi, 47 millions de francs supplémentaires ont été affectés au sport de masse grâce à ce transfert.
Je terminerai en disant que, tous financements publics confondus, la France est le pays d'Europe qui consacre, et de loin, le plus de crédits au sport, puisqu'elle y a affecté 0,4 % de son produit intérieur brut, soit le même taux que l'Allemagne, mais le double de celui du Royaume-Uni, de l'Espagne ou de l'Italie.
Compte tenu de ces éléments et des autres priorités budgétaires que nous avons dégagées, je ne puis bien évidemment être que très réservé sur l'ensemble de ces amendements. Le passage de 2,4 % à 3 % du taux de prélèvement me paraît, notamment, constituer un grave contresens. Une augmentation plus limitée pourrait peut-être être envisagée, mais je mets en garde le Sénat contre une mesure dont l'effet serait manifestement disproportionné par rapport aux résultats recherchés et qui risquerait en fait d'être contre-productive.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-72.
M. François Lesein. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein. Je tiens à apporter quelques précisions et à rappeler certains points.
S'agissant du FNDS, M. le ministre sait très bien que nous allons encore, cette année, dépenser 78 millions de francs pour mettre en état et aux normes de sécurité les stades retenus pour la Coupe du monde ; ces dépenses atteindront, l'année prochaine, 82 millions de francs. Par conséquent, le FNDS est, en partie, détourné de sa finalité.
M. le ministre sait aussi que nous devons encore payer les intérêts des sommes empruntées à l'occasion des jeux d'Albertville - il faut tout de même bien le rappeler de temps en temps - soit, cette année, 26 millions de francs.
Ainsi, le FNDS se trouve en réalité amputé.
Je ne veux pas rouvrir la polémique sur l'inscription de 53 millions de francs au titre des frais de dégazage du Stade de France.
Les crédits consacrés au sport, rapportés au produit intérieur brut, sont, selon vous, monsieur le ministre, deux fois moins élevés en Grande-Bretagne qu'en France. Mais permettez-moi de vous rappeler que, dans ce pays, le montant des bénéfices sur les paris est entièrement consacré aux jeunes, l'Etat ne prélevant rien ou quasiment rien, si ce n'est au titre des dépenses de fonctionnement.
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. J'en tiens compte dans mes chiffres !
M. François Lesein. Dans un souci de moralisation du jeu - puisque tout le monde prétend que le jeu est immoral - je souhaite qu'il soit enfin décidé une fois pour toutes de consacrer ces bénéfices à notre jeunesse, qu'il s'agisse de financer le sport de masse ou de haut niveau, la culture ou - pourquoi pas ? - d'inciter les jeunes à fréquenter les musées, l'opéra et les théâtres, et de tenter ainsi d'élever quelque peu leur niveau.
Telle est la véritable mission du législateur. Certes, me direz-vous, monsieur le ministre, la mesure que je vous propose entraînerait un manque à gagner pour l'Etat. Vous n'avez pas expliqué les raisons pour lesquelles le Gouvernement maintenait sa position. Vous avez simplement précisé que, dans le cas contraire, les parieurs y perdraient, mais non l'Etat.
Pour tout dire, monsieur le ministre, je suis étonné, je vous l'avoue, vous connaissant et sachant l'intérêt que vous portez à l'activité sportive dans votre région, de vous entendre tenir un tel discours.
Mes chers collègues, ce débat ne date pas d'hier. En effet, ce milliard de francs, comme notre collègue M. Xavier Dugoin l'a rappelé, est une somme symbolique, que tous nos sportifs, toutes nos associations et tous nos bénévoles attendent depuis des années. A chaque fois, ils nous reprochent avec un sourire narquois de ne pas l'avoir obtenue, sous-entendant que nous sommes bons à rien. Voilà le message que nous adressent tous ceux qui s'occupent des jeunes !
Nous demandons tous, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, que le taux du prélèvement affecté au FNDS soit porté à 3 %. J'espère, monsieur le ministre - vous nous l'avez laissé entendre, et je veux vous croire - que vous allez accepter ce taux de 3 %, le produit du prélèvement affecté au FNDS à limiter, en 1997, le montant des crédits correspondants à 900 millions de francs. Si telle est votre intention, dites-le-nous, nous pourrons ainsi nous prononcer en toute connaissance de cause.
Lors de l'examen de l'amendement « buvette », certains de mes collègues se sont déclarés hostiles à ce type de disposition mais ils ont promis de voter une augmentation du FNDS pour compenser la perte de recettes subie par les associations du fait de la non-ouverture des buvettes.
Un consensus s'est donc instauré, monsieur le ministre. Si vous proposez de couper la poire en deux, soit, mais dites-le-nous franchement. Cela éclairera le débat d'un autre jour. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE, du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.) M. Xavier Dugoin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Dugoin.
M. Xavier Dugoin. J'ai l'impression que M. le ministre n'a pas été convaincu par les arguments convergents des différents intervenants.
Vous nous avez expliqué, monsieur le ministre, la logique implacable des contraintes budgétaires. Je souhaite simplement faire un commentaire et, avant de me déterminer, formuler un souhait.
Mon commentaire est, en fait, un rappel. La Française des jeux est une poule aux oeufs d'or qui ne risque pas de mourir tout de suite, car son chiffre d'affaires entre 1989 et 1993 - je prends cette dernière année car le chiffre est incontestable - a augmenté de 70 %.
Nous savons tous que La Française des jeux n'a jamais été à court d'imagination pour créer de nouveaux jeux afin de répondre aux motivations et aux espérances des joueurs.
Nous souhaiterions être rassurés, monsieur le ministre, sur un point, certes, technique mais très important pour celles et ceux qui suivent ce dossier du FNDS depuis des années : je veux parler du recouvrement des sommes qui lui sont dues.
Ce recouvrement est un problème chronique et il est loin d'être parfait. En 1994, 768,6 millions de francs ont été recouvrés, et le Gouvernement fut obligé d'ajouter au collectif 74 millions de francs pour tenir ses engagements. En 1995, ont été recouvrés 358 millions de francs sur les 884 millions de francs prévus initialement.
Dans ces conditions, monsieur le ministre, nous souhaiterions savoir s'il vous sera possible de suivre l'exemple d'un de vos prédécesseurs, M. Sarkozy, qui s'était engagé à l'Assemblée nationale, lorsque le taux de prélèvement au profit du FNDS était passé de 2,3 % à 2,4 %, à garantir le recouvrement des sommes inscrites.
Cette année, vous proposez donc de maintenir ce taux à 2,4 %, ce qui représente pour le FNDS un produit de 850 millions de francs. Pouvez-vous en garantir le recouvrement ? En d'autres termes, abonderiez-vous, en cas de non-recouvrement, par le biais d'un collectif, le FNDS, à l'exemple de ce qui a été fait, je le rappelle, en 1994 ?
M. Jean-Pierre Masseret. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Masseret.
M. Jean-Pierre Masseret. M. le ministre a soulevé un certain nombre d'objections à l'encontre de ces amendements, mais, dans le même temps, j'ai cru comprendre que l'amendement n° I-72, qui portait le taux de prélèvement à 2,6 %, recueillait non pas son approbation mais lui semblait un moindre mal compte tenu de la situation actuelle.
Nous voulons tous donner au mouvement sportif français les moyens d'accomplir ses missions, et ce pour deux séries de raison. D'une part, le sport, je le répète, est un fabuleux moyen d'insertion et d'intégration sociale. Ensuite, il faut permettre au mouvement sportif de poursuivre ses actions en faveur de l'élite car le sport est à la fois le sport de masse, mais aussi le moyen d'exprimer ses talents.
Ces talents, nous les avons vu s'exprimer aux Jeux d'Atlanta. Les résultats obtenus par nos athlètes résultent d'une spécificité française en matière de sport puisque nous avons l'engagement de l'Etat, d'une part, et des collectivités territoriales, d'autre part, mais aussi la mise à disposition des fédérations et des ligues d'un certain nombre de cadres techniques qui permettent de développer le sport à tous les niveaux.
L'amendement n° I-72, qui fait passer le taux de prélèvement affecté au FNDS de 2,4 % à 2,6 %, permettrait d'abonder ce fonds et de lui assurer 900 millions de francs au lieu des 850 millions de francs qui sont inscrits dans le projet de loi de finances. Cet effort est relativement modeste mais il donnerait au mouvement sportif l'assurance de pouvoir bénéficier de ces 900 millions de francs.
C'est pourquoi je souhaiterais que cet amendement recueille l'accord du Sénat. Peu importe qu'il soit présenté par le groupe socialiste.
M. le président. Je vous rappelle, monsieur Masseret, que M. Egu a déposé un amendement n° I-238 allant dans le même sens.
M. Jean-Pierre Masseret. Vous avez raison de le rappeler, monsieur le président, afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté ou de prises de position quelque peu sectaires au sein de notre assemblée. Il serait utile, en effet, que l'ensemble du Sénat s'exprime de manière positive sur cette question. Pour ma part, je ne puis qu'inviter le Sénat, en écho aux propos de M. le ministre, à adopter les amendements n° I-72 et I-238, qui tendent à faire passer le taux de prélèvement affecté au FNDS de 2,4 % à 2,6 %.
M. Michel Moreigne. Très bien !
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le ministre, vous avez tout à l'heure, comme toujours, très bien répondu en employant, nous le reconnaissons, des arguments techniques solides.
Mais vous avez aussi compris à quel point nombre d'entre nous sont engagés dans cette affaire et quelle importance nous y attachons ; les différents intervenants l'ont suffisamment démontré.
Cette question n'a pas suscité de nombreuses discussions au sein de la commission des affaires culturelles. Elle a même fait l'objet d'un consensus.
Nous souhaitons, monsieur le ministre, éviter le débat rituel. Ainsi que vous l'avez rappelé, un geste a été fait en 1994 ; nous souhaiterions qu'il en soit de même cette année.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. Je tiens à répondre à la question que vous avez vous-même posée, monsieur le ministre : le FNDS a-t-il besoin de ces moyens ? Oui, monsieur le ministre, le FNDS a maintenant besoin de ces moyens, je dirai même qu'il n'en a jamais eu autant besoin parce que sa vocation première est d'aider le sport de masse. Or, à l'heure où il faut, nous dit-on, lutter contre l'exclusion et s'occuper des jeunes, tant dans les banlieues difficiles qu'en zone rurale d'ailleurs...
M. Alain Vasselle. Absolument !
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. ... nous ne pouvons pas croire un seul instant, monsieur le ministre, que vous considérez que le FNDS n'a pas besoin de ces moyens.
Monsieur le ministre, j'ajouterai, relayant ainsi ce qu'a très bien dit tout à l'heure M. le rapporteur général, que cette affaire est pour nous importante. Elle est importante : non pas parce qu'elle est symbolique, mais parce qu'elle sera l'expression de la volonté du Gouvernement d'aider encore un peu plus le sport de masse. Et ce sera d'autant plus significatif que nous admettons - je m'exprime maintenant en tant que membre de la majorité - que ce budget est difficile et qu'il faut faire des sacrifices. Mais nous savons aussi qu'il est des domaines dans lesquels il est d'autant plus nécessaire de faire des gestes que les sacrifices sont plus grands.
Monsieur le ministre, vous l'avez compris, la position qui a d'abord été défendue par M. le rapporteur général n'est pas une position absolue : il a très bien expliqué qu'il était prêt à se replier sur une position moins intransigeante. Le moment est vraiment venu que le Gouvernement fasse un geste supplémentaire, grâce auquel cette année 1996 sera pour nous une année à marquer d'une croix blanche, si je puis dire : malgré les difficultés, le Gouvernement aura ainsi montré son intérêt pour le sport de masse. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'éprouve quelques scrupules à prendre la parole après l'intervention excellente et tout à fait pertinente de M. Gouteyron. Je ferai simplement un rappel et confirmerai une demande formulée sur toutes les travées de la Haute Assemblée.
Sont ici présents d'éminents membres de la commission des affaires sociales, qui pourraient confirmer ou infirmer mes propos : un très long débat a eu lieu à la fois à l'Assemblée nationale et au Sénat en ce qui concerne les buvettes des petits stades, débat qui a débouché sur les conclusions que nous connaissons.
A l'époque, pour éviter d'avoir à adopter la solution présentée par nombre de nos collègues, la commission des affaires sociales, notamment son rapporteur, avait imaginé une formule qui consistait tout simplement à augmenter les recettes du fonds national pour le développement du sport pour favoriser le sport de masse - comme l'a dit très justement notre collègue M. Gouteyron - et pour venir en aide à ces petits clubs qui souffrent d'une insuffisance de crédits.
Toutefois, lorsque les petits clubs perçoivent ces crédits, ce sont des sommes dérisoires qu'ils ont à se partager - quelques centaines de francs - pour mener une action essentielle en faveur de notre jeunesse non seulement - cela a été souligné - en milieu urbain, au moment où l'on réfléchit à une politique un peu plus équilibrée en direction des quartiers difficiles, mais également en milieu rural.
Cette formule aurait constitué une réponse tout à fait opportune, sans mettre en difficulté l'équilibre budgétaire. En faisant un geste, qui pourrait aller jusqu'à 2,6 %, avec la garantie que demande notre collègue M. Dugoin, le Gouvernement répondrait à une attente exprimée non seulement sur toutes les travées de cette assemblée, mais également bien au-delà.
Cela représenterait également un signe en direction de la population rurale et urbaine, qui confirmerait la volonté du Gouvernement de mener, grâce au développement du sport, à la fois une politique sociale tout à fait heureuse et une politique d'aménagement du territoire qui correspondrait aux engagements et du Gouvernement et de la majorité des deux assemblées. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Jean-Philippe Lachenaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Nous soutenons la proposition de porter à 2,6 % le taux de prélèvement affecté au FNDS ; j'interviens non seulement à titre personnel, mais également au nom du groupe des Républicains et Indépendants. Cette mesure ne devrait pas pénaliser les jeux.
Nous pensons à l'équilibre budgétaire, qu'il ne s'agit de modifier en aucune manière, et au rôle du sport, à la fois créateur d'emplois et facteur d'intégration dans les villes. Nous voterons donc l'amendement n° I-238.
Mme Hélène Luc. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Je serai brève, car je me suis déjà expliquée sur le fond.
Monsieur le ministre, je souhaite, évidemment, que vous acceptiez l'amendement tendant à porter à 3 % le taux de prélèvement affecté au FNDS. Il s'agit d'un minimum ! Nous pourrions, cette année, marquer un point pour la jeunesse. En effet, il faut arrêter de tenir un double langage : vous ne pouvez prétendre vouloir faire beaucoup pour la jeunesse et ne rien faire pour le sport de masse et pour les associations.
M. Xavier Emmanuelli, qui est intervenu devant le COFRADE, le Conseil français des associations de défense de l'enfance, lors de la journée des droits de l'enfant, a expliqué toute l'importance qu'il convenait d'accorder aux associations de tout genre.
Par conséquent, c'est le minimum, je le répète, que l'on peut faire.
Je tiens également à rappeler notre position en la matière. Le Stade de France aurait dû être financé, non pas, comme il l'est, en partie sur le budget du ministère de la jeunesse et des sports et en partie sur des fonds privés, mais en totalité par des crédits d'Etat, comme cela a été le cas, par exemple, de l'Opéra Bastille et de la Bibliothèque de France.
Bien entendu, si l'amendement fixant le taux du prélèvement à 3 % était repoussé, comme nous ne sommes pas partisans du tout ou rien, nous nous prononcerions tout de même en faveur de l'autre amendement, même s'il est moins avantageux. Cela étant, j'espère vivement que c'est le taux de 3 % qui sera adopté.
M. Xavier Dugoin. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Dugoin.
M. Xavier Dugoin. Je retire l'amendement n° I-269 au profit de l'amendement de repli n° I-238 tendant à fixer à 2,6 % le taux de prélèvement garanti.
M. le président. L'amendement n° I-269 est retiré.
Monsieur Lesein, l'amendement n° I-90 est-il maintenu ?
M. François Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles. Bien évidemment, nous préférons obtenir 2,6 % que rien du tout !
Mme Hélène Luc. Votons d'abord pour le taux de 3 % !
M. François Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles. Cela étant, avant de retirer l'amendement que j'ai présenté au nom de la commission des affaires culturelles, je souhaite obtenir l'accord de M. Gouteyron, président de la commission.
M. le président. Monsieur Lesein, je vous propose de rectifier l'amendement n° I-90 de la commission des affaires culturelles en remplaçant le taux de 3 % par celui de 2,6 %. Compte tenu des propos que je viens d'entendre de la part du président de la commission des affaires culturelles, cela ne devrait pas poser de problème. (M. le président de la commission des affaires culturelles fait un signe d'approbation.)
M. Roland du Luart. Très bien !
M. François Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles. Puisque M. Gouteyron est d'accord, monsieur le président, je rectifie l'amendement n° I-90 en remplaçant le taux de 3 % par le taux de 2,6 %.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° I-90 rectifié, présenté par M. Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles, et tendant à insérer, après l'article 25, un article additionnel ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 1997, le taux du prélèvement affecté au fonds national pour le développement du sport prévu à l'article 48 de la loi de finances pour 1994 (n° 93-1352 du 30 décembre 1993) est porté à 2,6 %. »
Je vais mettre aux voix les amendements n°s I-72, I-90 rectifié et I-238, qui sont identiques.
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. A ce stade du débat, je tiens à apporter deux précisions.
Tout d'abord, en réponse à M. Dugoin, je peux garantir, naturellement, que l'Etat veillera - en particulier les services du Trésor - à l'abondement, en 1997, des recettes du FNDS par la ressource de 850 millions de francs prévue dans l'actuel projet de loi de finances.
Ensuite, après avoir entendu les orateurs de tous les groupes, je dirai que : même un ministre du budget peut ne pas être insensible à des arguments faisant appel au coeur et à la raison, surtout lorsque le budget de l'Etat n'est pas directement en jeu. (Sourires.)
M. François Lesein. Que voilà une vérité !
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Compte tenu de ce qui a été dit, il apparaît qu'un consensus impressionnant s'est dessiné sur quasiment l'ensemble des travées de la Haute Assemblée, qu'il s'agisse de la majorité ou de l'opposition, pour une mesure qui paraît relativement raisonnable par rapport à l'ensemble des amendements qui ont été déposés. Si cette mesure était votée, nous pourrions en apprécier les conséquences, l'année prochaine, sur la poule aux oeufs d'or et sur son état de santé, afin de déterminer ce qu'il y a lieu de faire.
Dans cette hypothèse, monsieur le président, le Gouvernement est prêt à s'en remettre à la sagesse du Sénat. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s I-72, I-90 rectifié et I-238, pour lesquels la commission et le Gouvernement s'en remettent à la sagesse du Sénat.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 25 et les amendements n°s I-117 et I-222 n'ont plus d'objet.
Par amendement n° I-77 rectifié, MM. Oudin, Blaizot, Doublet, du Luart, Gaillard, Hérisson, Le Grand, Cazalet, Masson et Collard proposent d'insérer, après l'article 25, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le tarif de la redevance instituée par l'article 2 du décret n° 54-982 du 1er octobre 1954 créant un fonds national pour le développement des adductions d'eau dans les communes rurales, modifié par l'article 46 de la loi de finances pour 1994 (n° 93-1352 du 30 décembre 1993), est porté, pour l'eau tarifée au mètre cube utilisée pour les besoins domestiques, de 14 centimes par mètre cube à 15 centimes par mètre cube au 1er janvier 1997, à 16 centimes par mètre cube au 1er janvier 1998, à 17 au 1er janvier 1999 et à 18 au 1er janvier 2000.
« II. - Les tarifs de la redevance par tranche de consommation pour l'eau tarifée au mètre cube utilisée pour les besoins industriels ou agricoles, sont uniformément relevés de 1 centime par mètre cube au cours des quatre prochaines années.
« III. - Les tarifs de la redevance selon les diamètres de branchement pour l'eau tarifée suivant d'autres systèmes ou ne faisant l'objet d'aucune tarification, quel qu'en soit l'usage, sont relevés dans les mêmes proportions que le tarif au mètre cube de la redevance pour les besoins domestiques ».
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Cet amendement comporte deux caractéristiques. Tout d'abord, il s'agit d'un amendement de continuité puisque, cette année, le Sénat délibère sur le taux de redevance qui alimente le fonds national pour le développement des adductions d'eau, le FNDAE. Ensuite - et j'attire l'attention de M. le ministre sur ce point - les dispositions proposées n'affectent pas directement le budget de l'Etat.
De quoi s'agit-il ?
Chacun connaît, dans cette assemblée, le FNDAE, qui a pour objet d'aider les communes rurales à financer leurs investissements en alimentation en eau potable et en assainissement. Ce fonds a été créé en 1954 et ses ressources proviennent, pour moitié, de pari mutuel urbain et, pour une autre moitié, d'une redevance sur les mètres cubes d'eau consommés. Ses ressources sont affectées à peu près pour moitié - pour 45 % - à l'eau potable et, pour le reste, à l'assainissement. D'ailleurs, les dépenses relatives cette année, à l'assainissement ont dépassé celles qui sont liées à l'eau potable.
Au cours des années récentes, il appartenait au Sénat d'ajuster le montant de la redevance qui a été, pendant de très nombreuses années, bloqué. Si nous avions suivi le taux de l'inflation, à l'heure actuelle, cette redevance s'éleverait à 24 ou 25 centimes ; elle est de 14 centimes, ayant augmenté de 2 centimes en 1994 et de 1,5 centime en 1996.
Dans le tableau que je fais figurer dans l'argumentation sous-tendant cet amendement, il apparaît que, en 1992, les recettes du FNDAE s'élevaient globalement, à 897 millions de francs, et qu'elles sont, en 1995, de 905 millions de francs. Elles sont donc stabilisées.
A l'heure actuelle, un problème se pose : les besoins des collectivités rurales en matière d'assainissement comme en matière d'eau potable sont très importants.
Des directives européennes ont renforcé les obligations tant pour l'eau potable que pour l'assainissement ; des échéances ont été fixées, qu'il importe de respecter. Vous connaissez d'ailleurs le mouvement qui incite certains de nos compatriotes à attaquer les maires dès que la pollution devient trop forte dans certains secteurs.
Le recensement effectué par le FNDAE auprès des communes rurales fait apparaître que les besoins de celles-ci pour la période 1996-2000 augmentent de 30 % par rapport à la période précédente, où ils étaient évalués à 42 milliards de francs.
La politique globale de développement des investissements dans le domaine de l'assainissement a abouti à l'approbation d'un septième programme des agences de l'eau, dans le cadre duquel les redevances de ces agences seront stabilisées.
A l'heure actuelle, les ressources du FNDAE servent essentiellement aux communes rurales : elles leur permettent de financer les extensions d'assainissement, d'eau potable et l'amélioration des installations.
Dans le projet de loi de finances pour 1997, un article 45 nouveau, qui a été voté par nos collègues de l'Assemblée nationale, à la demande du Gouvernement, étend les compétences du FNDAE au financement du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole, le PMPOA. Cette extension de compétence aboutit à un transfert de ressources du FNDAE au ministère de l'agriculture de 150 millions de francs. Ces 150 millions de francs vont, bien entendu, permettre de résorber certaines sources de pollution agricole, mais ils ne seront pas destinés aux communes rurales pour le financement de leurs investissements en eau potable ou en assainissement.
Tel est le contexte actuel : 900 millions de francs de recettes ; 150 millions de francs de moins pour les communes rurales ! Que fait-on pour ajuster les ressources affectées aux communes pour les aider ? Certes, on aurait pu compenser en demandant 5 centimes de plus ; 1 centime correspond à 30 millions de francs de recettes. Cela ne nous a pas paru raisonnable.
Mes collègues et moi avons déposé cet amendement parce que nous estimons que nous pourrions nous engager sur une période de quatre ans - jusqu'à l'an 2000 - en augmentant la redevance de 1 centime, ce qui représenterait 30 millions de francs par an. Ainsi, au terme de cette période, nous n'aurons pas récupéré le manque à gagner de 1997, année où 150 millions de francs seront affectés au PMPOA.
Il s'agit d'un amendement raisonnable et traditionnel. Il vise à financer un programme prioritaire sur lequel tout le monde s'est mis d'accord : aider les communes, en particulier les communes rurales, à résorber leurs pollutions et à faire face aux obligations qui leur sont imposées par les différentes directives européennes et par la loi sur l'eau que nous avons votée à l'unanimité, en 1992.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission a bien compris les arguments que vient de développer M. Oudin. Compte tenu de l'effet de cet amendement sur les prélèvements obligatoires, elle souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement avant de se prononcer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Je comprends tout à fait l'objet de l'amendement présenté par M. Oudin dont l'argumentation est très forte.
Le Gouvernement est très réservé sur toute mesure qui pourrait donner aux citoyens contribuables et consommateurs le sentiment que les prélèvements obligatoires augmentent, surtout pendant l'année 1997 où il souhaite, au contraire, les convaincre de la baisse de la pression fiscale, notamment à travers la diminution de l'impôt sur le revenu.
Je voudrais rappeler que la redevance perçue sur les consommations d'eau au profit du FNDAE, comme les redevances perçues par les agences de l'eau, a évidemment une incidence directe sur le prix de l'eau. La dernière enquête de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a montré que le montant moyen des factures d'eau a crû de 47 % entre 1991 et 1995. Au cours de la même période, la redevance sur les consommations d'eau perçue au profit du FNDAE a augmenté de 33 %, passant de 10,5 centimes à 14 centimes par mètre cube.
C'est pourquoi M. le Premier ministre a décidé, à l'occasion de l'élaboration du septième programme des agences de l'eau, de stabiliser l'ensemble des prélèvements obligatoires sur l'eau, afin de ne pas alourdir la charge qui pèse sur les consommateurs.
Je suis donc au regret d'indiquer que le Gouvernement ne souhaite pas l'adoption d'un amendement ainsi rédigé.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-77 rectifié.
M. Roland du Luart. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. du Luart.
M. Roland du Luart. J'ai personnellement cosigné cet amendement et je partage donc tout à fait l'analyse que M. Oudin a excellemment développée.
Je souhaitais intervenir surtout parce que j'ai été pendant dix ans administrateur du Fonds national pour le développement des adductions d'eau, en tant que rapporteur spécial du budget de l'agriculture pour la commission des finances.
Au cours de cette période, nous avons mis au point des conventions liant le FNDAE, l'Etat aux départements. Nous avons donc engagé une programmation qui court jusqu'à l'an 2000.
Cette année, le Gouvernement a décidé de demander au FNDAE de financer pour 150 millions de francs le PMPOA. C'est une mesure que l'on peut comprendre dans l'optique de la lutte générale contre la pollution et pour la défense de l'environnement. Cependant, nous sommes liés par des engagements vis-à-vis des départements, qui ont mis en place des programmes en matière d'adduction d'eau et d'assainissement, et que nous devons également honorer.
Nous avons, dans le cadre des engagements européens, des obligations de mise aux normes pour 2002. Je comprends très bien que, pour les agriculteurs, on ait choisi de recourir à cette formule pour financer le PMPOA, parce que l'on n'avait pas d'argent par ailleurs.
Je pense toutefois que si l'on veut faire les deux choses - car il est indispensable, d'une part, de ne pas revenir sur des conventions passées entre le FNDAE et les départements, donc d'honorer une signature, et, d'autre part, d'élargir le champ d'application du FNDAE au PMPOA, pour un montant de 150 millions de francs - il est nécessaire, selon moi, de relever le tarif de la redevance du FNDAE de un centime par an jusqu'à l'an 2000.
Monsieur le ministre, j'ai bien entendu vos arguments. Depuis 1990, le tarif de la redevance du FNDAE a augmenté de 33 %, avez-vous dit. Nous nous sommes battus en commission des finances depuis des années pour que cette redevance augmente, mais nous nous sommes toujours heurtés aux services du ministère du budget, au motif que cela pèserait sur les prélèvements obligatoires.
Je rappelle à notre assemblée que l'ordre de grandeur est de 1 pour 10 000. Donc, l'argument des prélèvements obligatoires, alors que l'augmentation de cette redevance permettrait de sortir de l'impasse environnementale dans laquelle nous sommes, ne me paraît pas devoir être retenu.
En outre, je rappelle que dans le domaine de l'eau, ce qui a considérablement augmenté ces dernières années sur la facture de nos concitoyens, c'est la redevance pour les agences de l'eau.
M. Henri de Raincourt. O combien !
M. Roland du Luart. Elle a beaucoup plus augmenté que celle du FNDAE. Certes, on ne peut pas nier les 33 % d'augmentation que vous avez cités, mais si on examine attentivement les factures, on constate que le poids de la redevance pour les agences de l'eau est beaucoup plus important.
Je ne veux pas gêner le Gouvernement. Cependant, je voudrais attirer son attention sur le fait que, pour la première fois depuis 1995, le montant des redevances sur l'eau dépasse celui des recettes issues des enjeux du PMU. En effet, les recettes sur les enjeux, notamment du PMU, qui représentaient la moitié du FNDAE, rentrent moins bien. Il est donc indispensable d'avoir une redevance assise sur les consommations d'eau. De surcroît, il s'agit d'une action de solidarité entre le milieu urbain et le milieu rural.
C'est la raison pour laquelle je vous rends très attentifs à cet amendement, mes chers collègues. Je souhaiterais qu'il soit adopté car une augmentation de un centime par mètre cube et par an pendant quatre ans, c'est raisonnable. Cela permettra de résoudre l'ensemble des problèmes que pose la dépollution en France.
M. Henri de Raincourt. Très bien !
M. Jean Chérioux. Excellente argumentation !
M. Michel Doublet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Doublet.
M. Michel Doublet. Je comprends que M. le ministre ne veuille pas augmenter les prélèvements obligatoires, mais je crois que c'est déplacer un peu le problème.
Que va-t-il se passer ? Même si on n'augmente pas la redevance du FNDAE, le prix de l'eau ne baissera pas, bien au contraire.
Nous avons de très fortes demandes de nos départements. Désormais, on s'oriente vers des investissements individuels qui, jusqu'à présent, n'étaient pas financés. Ce sont aussi les conséquences des engagements que nous avons pris lors de l'examen de la loi sur l'eau. Vous connaissez tous les contraintes : d'ici à 2005, tous les problèmes d'assainissement de nos collectivités devront être réglés ; ce n'est pas encore le cas. La responsabilité pénale des maires est fortement engagée. Aujourd'hui, avec le prélèvement qui va être effectué pour lutter contre les pollutions d'origine agricole, la masse budgétaire va diminuer de 110 millions de francs à 150 millions de francs par an.
La proposition que nous avons faite par cet amendement me paraît tout à fait raisonnable, monsieur le ministre. Aussi, je demande à nos collègues de bien vouloir la suivre. En effet, un centime par mètre cubve par an pendant quatre ans, ce n'est pas la mer à boire !
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Lorsque j'ai pris connaissance de cet amendement, j'ai eu, à son égard, la même réaction que M. le ministre. Ma première réaction a été de dire : voilà un amendement qui, en définitive, va à contresens des objectifs du Gouvernement puisqu'il va avoir pour résultat de contribuer à l'augmentation des prélèvements obligatoires. Après une analyse plus fine de cet amendement pour en mesurer les conséquences à terme, on constate qu'il est pertinent. Plusieurs constats peuvent être faits. Pour partie, je reprendrai ceux qui ont été dressés par mes collègues MM. du Luart et Doublet.
Premier constat : le tableau qui figure dans l'exposé des motifs de l'amendement montre qu'une des recettes du FNDAE tend à régresser d'année en année, celle qui provient des enjeux du PMU. Or, pour maintenir sa capacité d'intervention antérieure et pour qu'elle suive la progression du coût des investissements, le FNDAE doit disposer d'une recette évolutive. La seule dont il dispose, c'est celle qui est liée à la redevance sur les consommations d'eau.
Aussi convient-il, monsieur le ministre, de réfléchir à une autre recette que celle du PMU, qui accompagne celle qui provient de la redevance sur les consommations d'eau, de manière que le poids que représente cette redevance pour les ménages ne pèse pas aussi lourdement, comme vous le souhaitez vous-même.
Deuxième constat : il faudrait engager une réflexion, monsieur le ministre. Vous avez proposé, avec M. le rapporteur général, la création de quelques groupes de travail sur d'autres sujets. A l'heure actuelle, compte tenu de la situation à laquelle sont confrontés les élus locaux, le seul moyen d'assurer une véritable péréquation du prix de l'eau et du coût des investissements qui sont supportés par celui-ci, c'est une péréquation nationale. Le FNDAE est un bon outil de péréquation.
Mais les collectivités locales sont confrontées à un autre problème qui, cette fois, est d'ordre réglementaire, je veux parler de l'application de la M 49. Aujourd'hui, la M 49 ne permet pas à une commune de faire contribuer les usagers consommateurs d'eau à un fonds qui permettrait de financer, sur une population intercommunale, les investissements qui seraient réalisés dans d'autres communes que celle où se fait l'appel de contribution.
Le seul moyen de permettre à nos petites communes d'éviter une progression trop importante du prix de l'eau, et donc de peser lourdement sur les prélèvements obligatoires, consiste à mettre en place une véritable péréquation nationale. Le seul moyen pour y parvenir, c'est le fonds de péréquation. En effet, si nous n'augmentons pas la redevance de un centime, comme le propose M. Oudin, il faudra transférer le coût de la décision soit sur la redevance pour l'agence de l'eau, soit sur nos collectivités.
Aujourd'hui, nous arrivons, dans certaines communes rurales, à des prix de l'eau qui atteignent 40 francs par mètre cube, parce que le coût de l'assainissement est devenu insupportable.
Or, ce sont les normes qui ont été introduites dans la législation française qui pèsent aujourd'hui sur l'ensemble de nos collectivités. Il faudra donc très rapidement trouver une solution. En effet, les questions que vous vous posez sur le FNDAE, vous ne vous les posez pas tellement au sujet des ordures ménagères, bien que sur ce point vous ayez apporté des éléments de réponse, puisque vous avez annoncé la création d'un groupe de travail.
Le Gouvernement serait bien inspiré de mettre à plat tous les problèmes liés aux ordures ménagères et à l'eau, mais aussi aux normes qui vont s'appliquer dans nos communes aux termes de la loi sur l'air et l'utilisation rationelle de l'énergie.
Tels sont les éléments qui me conduisent à dire que nous n'avons pas d'autre solution que d'accéder à la demande des auteurs de l'amendement. Je pense que la commission des finances a eu raison de s'en remettre à la sagesse de notre assemblée.
M. Blaizot. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. François Blaizot.
M. François Blaizot. J'approuve tous les arguments qui ont été présentés par nos collègues pour appuyer l'amendement que nous examinons. Je voudrais en ajouter un.
Tout à l'heure, M. le ministre a dit que le Gouvernement craignait que l'accroissement de la redevance pour le FNDAE ne vienne peser sur le prix de l'eau. Bien sûr, elle pèse sur le prix de l'eau. Cependant, par ailleurs, elle libère le prix de l'eau. En effet, si les collectivités que nous représentons tous ici ne reçoivent plus ou reçoivent moins de subventions du FNDAE, que devront-elles faire ? Elles devront nécessairement emprunter encore. Elles chargeront donc leur budget non seulement de l'emprunt, mais aussi, bien entendu, des intérêts de l'emprunt.
Par conséquent, le refus qui serait opposé à l'augmentation de la redevance pour le FNDAE n'aboutirait qu'à augmenter encore le prix de l'eau, et non à le diminuer. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. François Gerbaud. Très bien !
M. Yann Gaillard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Si je souhaite intervenir, après tant d'orateurs aussi compétents, c'est en ma qualité de rapporteur spécial des comptes spéciaux du Trésor.
Je confirme la très grande inquiétude que nous avons, cette année, en ce qui concerne l'équilibre du FNDAE. L'an dernier déjà, lorsque nous avions augmenté la redevance d'un centime et demi, la négociation avait été très difficile en commission mixte paritaire avec nos collègues de l'Assemblée nationale. Cependant, ce sont eux qui ont lancé, en quelque sorte, l'offensive, en mettant à notre charge le financement des pollutions d'origine agricole, ce qui, en toute logique, n'est d'ailleurs pas absurde, mais change complètement l'équilibre de l'opération, sans quoi nous en serions peut-être restés où nous en étions.
En dépit de l'avis réservé de notre commission, avec laquelle, pour une fois, je suis en désaccord, je considère qu'il faut régler ce problème, sous peine d'arriver à un point d'équilibre tout à fait catastrophique pour le FNDAE.
J'ignore quel sera le résultat de la prochaine commission mixte paritaire.
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. J'ai écouté très attentivement tous les orateurs, et j'ai bien saisi quel état d'esprit commun les animait.
Je comprends donc qu'une très grande majorité se dégage, au sein du Sénat, en faveur de cette mesure. Le Gouvernement, lui, n'y est pas favorable, mais nous dialoguons, comme nous l'avons fait tout à l'heure pour le FNDS.
L'argument qui me paraît le plus fort dans ce qui a été exprimé, notamment par le premier signataire de l'amendement, M. Oudin, c'est qu'il est demandé désormais au FNDAE de contribuer au financement de la maîtrise des pollutions d'origine agricole dans le cadre d'une politique d'ensemble à laquelle participent aussi, indirectement par ailleurs, les agences de bassin. On peut donc comprendre que, à partir du moment où une participation au financement d'actions nouvelles est demandée à un fonds, des ressources supplémentaires soient nécessaires.
En sens inverse, ce qui me paraît le plus gênant dans cet amendement, c'est le fait que la majorité du Sénat envisage de décider, dans un domaine certes limité mais sensible - la facture du prix de l'eau - une augmentation du prix de l'eau, et donc une certaine forme de progression des prélèvements obligatoires, sur les quatre ans qui viennent, et ce l'année même où le Gouvernement propose au Sénat de baisser les prélèvements obligatoires sur les cinq prochaines années.
La disposition envisagée par le Sénat pourrait sans doute être plus compatible avec la nécessité de financer des actions nouvelles et avec notre souhait de baisser les prélèvements obligatoires dans les prochaines années si elle était limitée à la seule année 1997. Naturellement, nous referions le point à la fin de 1997.
Je ne suis pas un ministre très chevronné, mais j'ai cru comprendre, à la lecture du compte rendu de vos travaux antérieurs, que cette discussion revenait fréquemment et que, dans ce débat, le Sénat l'emportait souvent (Sourires sur les travées du RPR.)
Telle est la remarque que je souhaitais faire, remarque qui pourrait peut-être conduire à une solution permettant de mieux prendre en compte toutes les exigences, même si elle sont difficiles à concilier.
M. Jacques Oudin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. J'ai bien entendu les propos que vient de tenir M. le ministre, et je souhaiterais faire deux remarques.
Premièrement, nous tous ici avons voté la loi sur l'eau et approuvé les lourdes contraintes pesant sur les communes urbaines ou rurales et leurs maires en matière de lutte contre les pollutions.
Vous avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre, que la facture de l'eau a augmenté de 44 %. Ce n'est pas pour le plaisir de l'augmenter ! Mais compte tenu de nos engagements sur le plan européen, l'ensemble des investissements liés au sixième programme des agences de l'eau se sont établis à 90 milliards de francs, alors qu'ils étaient de 41 milliards de francs dans le programme précédent et qu'ils s'établiront à 105 milliards de francs dans le prochain.
Lorsqu'un engagement est pris sur le plan international, il faut bien le respecter en finançant les investissements correspondants. Si nous ne le faisions pas, en fonction de ces mêmes contraintes que l'on impose aux maires, le premier contribuable venu qui serait mécontent de la qualité de l'eau - qu'il s'agisse de l'eau potable ou du rejet des eaux usées - attaquerait le maire. Combien de condamnations ne sont-elles pas tombées !
Vous ne pouvez pas dire que les élus augmentent le prix de l'eau par plaisir, monsieur le ministre ! Ils sont confrontés à des obligations européennes et nationales. C'est là un fait incontestable.
Deuxièmement, en rédigeant l'amendement n° I-77 rectifié, mes collègues et moi-même avons bien réfléchi au problème. On enlève 150 millions de francs à un budget qui n'est pas énorme, puisqu'il s'élève à 900 millions de francs. Vous prenez donc la mesure de la ponction ! Ces 150 millions de francs iront non pas aux communes rurales, qui continuent cependant à supporter les obligations, mais aux agriculteurs, et donc, certes, au milieu rural.
Peut-on compenser la ponction de 150 millions de francs ? L'une des solutions consistait à demander cinq centimes de plus : 5 fois 30, cela fait 150 millions.
Nous avons considéré que ce n'était pas raisonnable et qu'il fallait une augmentation progressive, en ayant la garantie de la résorption, et qu'il fallait donc passer de moins 150 millions de francs cette année à moins 30 millions de francs en l'an 2000. En effet, même en l'an 2000, la compensation n'est pas totale : en augmentant quatre fois de 30 millions de francs, on obtient seulement 120 millions de francs, alors qu'on a enlevé 150 millions de francs.
Monsieur le ministre, vous nous proposez de voter un centime d'augmentation pour 1997. Bien entendu, mes collègues et moi-même pourrions nous rallier à cette position du Gouvernement. Cependant, nous voulions justement éviter la répétition chaque année de ce débat. Comment comprendre que l'on impose des obligations, des normes, des contraintes, sans donner les moyens d'y satisfaire ?
C'est la raison pour laquelle, pour ma part, j'attends les explications de vote de mes collègues.
Je veux bien rectifier l'amendement afin de ne prévoir qu'un centime d'augmentation en 1997. Nous reprendrions alors le débat en 1998. Pourquoi pas ? Ce n'est pas dépourvu d'une certaine logique. De surcroît, comme M. du Luart l'a dit, un centime d'augmentation correspond à 1/10 000e de l'indice des prix : 1/10 000e !
Donc, sachons raison garder et admettre que nous ne proposons pas un accroissement considérable des prélèvements obligatoires.
Je comprends votre position, monsieur le ministre. Mais je vous demande de comprendre celle des élus qui sont confrontés quotidiennement à ce problème.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-77 rectifié, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 25.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous propose de suspendre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante, est reprise à dix-huit heures dix.)