M. le président. Par amendement n° 99, MM. Peyronnet, Rouquet et Delanoë, Mme Pourtaud, et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 24, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le sixième alinéa de l'article 1599 G du code général des impôts, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :
« Cette mesure ne s'applique pas aux véhicules légers à motorisation diesel pour lesquels l'âge ouvrant droit à la réduction de moitié est porté progressivement, à raison d'une année par an, de 5 à 10 ans, à compter de la période d'imposition s'ouvrant le 1er décembre 1996.
« Un décret fixera un mode nouveau de calcul de la puissance fiscale des véhicules légers mis en circulation à compter du 1er janvier 1999, prenant en compte, en substitution au mode actuel la puissance réelle des véhicules légers, exprimée en DIN ou kW, la vitesse de pointe, le taux de pollution en gaz toxiques et en poussières émises, la proportion de pièces recyclables dans la construction et la consommation exprimée en kW/h, en ville à 50 km/h ».
« II. - La perte de recettes résultant du paragraphe I est compensée à due concurrence par une majoration du tarif des droits de consommation sur les tabacs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Cet amendement constitue une autre illustration de l'application du principe de précaution.
Le caractère nocif pour la santé du diesel n'est plus à démontrer, de nombreuses études l'ont définitivement établi. Néanmoins, les pouvoirs publics s'ingénient à encourager l'utilisation de ce carburant par toute une série d'aides fiscales, qu'il s'agisse de la TIPP ou encore du calcul de la vignette, encouragement d'autant plus incompréhensible qu'il aboutit non seulement à détériorer la qualité de l'air, du fait des particules qui sont rejetées lors de l'utilisation du diesel, mais aussi à mettre en difficulté l'industrie pétrolière française, qui est obligée d'importer 20 % de la consommation intérieure de gazole et qui voit ses efforts pour adapter ses raffineries au « sans plomb » non récompensés - je rappelle que, pour ce faire, elle a investi 5 milliards de francs - en raison du maintien de la prime au gazole.
En l'occurrence, l'incohérence sanitaire se double donc d'une incohérence énergétique et industrielle. Qu'attendent les pouvoirs publics pour mettre un terme à cette situation ?
Aujourd'hui, par cet amendement, nous leur donnons la possibilité d'agir. Nous proposons d'appliquer aux véhicules légers à motorisation diesel un allongement de cinq à dix ans de la période au titre de laquelle leurs propriétaires ne peuvent bénéficier de la réduction de moitié du montant de la vignette. C'est un dispositif simple et d'application immédiate.
Je fais remarquer, par ailleurs, qu'il ne touche pas les transporteurs routiers ; on ne peut donc m'opposer les difficultés économiques que ceux-ci pourraient rencontrer.
Je soulignerai également que, pour la première fois depuis plusieurs années, la part des voitures diesel dans les ventes baisse : elle est passée sous la barre des 40 % durant les huit premiers mois de l'année, contre 47 % l'an dernier. Les Français semblent ainsi se détourner de façon naturelle du diesel ; il est donc temps d'agir !
Enfin, madame le ministre, lorsque mon collègue M. Peyronnet avait défendu cet amendement en première lecture, vous aviez reconnu que les moteurs diesel posaient un problème.
Vous aviez aussi prétexté la non-publication du rapport au Parlement, prévu par l'article 20 de la loi de finances pour 1996, sur « les conséquences de l'utilisation du gazole sur l'industrie pétrolière et automobile, la santé et l'environnement » pour refuser que nous traitions de ce sujet.
Aujourd'hui, ce rapport est paru. Je n'en ai pas été destinataire, mais la presse s'en est fait l'écho. Bien qu'il ait été édulcoré par rapport à sa version initiale - toujours selon la presse - ses conclusions n'en sont pas moins édifiantes : les effets sur la santé et l'environnement « ne justifient pas l'existence d'avantages fiscaux pour la motorisation diesel ». J'en conclus que notre amendement arrive à point nommé et qu'il ne peut être repoussé.
Le second volet de cet amendement a pour objet de demander au Gouvernement de modifier le mode de calcul de la puissance des véhicules afin de prendre en compte leur puissance réelle exprimée en DIN, mais aussi la vitesse de pointe, le taux de pollution et la proportion de pièces recyclables qui entre dans la composition du véhicule, afin d'améliorer non seulement la sécurité routière mais aussi la qualité de l'air.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe François, rapporteur. Le rapport auquel Mme Pourtaud a fait allusion précise que « la France est, avec le Portugal, le seul pays à accorder au diesel un avantage spécifique pour le calcul de la taxe annuelle frappant la possession d'un véhicule ».
En Europe, les pays dont la fiscalité est neutre par rapport au diesel sont l'Autriche, la Belgique, le Danemark, l'Espagne, le Royaume-Uni, la Grèce, l'Irlande, l'Italie et le Luxembourg. Ceux dont la fiscalité pénalise le diesel sont l'Allemagne, la Finlande, les Pays-Bas et la Suède.
Cela dit, la commission est défavorable à cet amendement dans la mesure où il ne s'agit pas, dans ce texte de loi, d'introduire des modifications de la fiscalité. C'est à une loi de finances qu'il revient de traiter cette question. Mais il ne fait aucun doute que ce problème devra bien être abordé un jour, en vue de mettre à cet égard la situation de la France en harmonie avec celle qui prévaut dans la plupart des autres pays européens.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Sur le fond, je maintiens ce que j'avais dit en première lecture : je m'étais alors engagée à ce que le rapport soit rendu public ; il l'a été. Je regrette que vous n'en ayez pas été destinataire, madame Pourtaud, mais je suis sûre que vous le recevrez rapidement. Les conclusions du rapport sont tout à fait claires.
Comme M. le rapporteur vient de l'indiquer, il paraît très difficile, dans ce texte, de remettre en cause l'ensemble de notre fiscalité en la matière, il nous faudra absolument aborder cette question un jour.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 99, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

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