M. le président. M. Philippe Marini attire l'attention de M. le ministre délégué aux anciens combattants et victimes de guerre sur la prise en compte, pour le calcul des droits à la retraite, des services accomplis dans la Résistance avant l'âge de seize ans.
En premier lieu, il lui rappelle qu'il était intervenu à maintes reprises auprès de ses prédécesseurs sans obtenir d'autre réponse que l'annonce d'une « réflexion interministérielle en cours ».
En l'absence d'homologation des services de la Résistance par l'autorité militaire, forclose depuis 1951, cette mesure ne pourrait se concevoir que pour la tranche d'âge comprise entre quatorze et seize ans puisque, à l'époque, l'obligation de scolarité était fixée à l'âge de quatorze ans. Par conséquent, cette mesure ne concerne qu'un nombre limité de personnes.
En effet, on estime entre 100 et 200 le nombre des personnes qui ont pu se trouver dans l'impossibilité d'exercer une activité professionnelle en raison de leur engagement au sein de la Résistance et ne peuvent actuellement justifier d'une attestation de durée de services établie par l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, qui ne délivre ce document que pour la partie des services de résistance accomplie à partir de l'âge de seize ans. Ce chiffre doit d'ailleurs être comparé à celui des cartes de combattants volontaires de la Résistance délivrées à ce jour, soit un peu plus de 260 000. Tous les titulaires de ce titre ont bénéficié, depuis l'origine, de tous les avantages édictés par le législateur en faveur des combattants volontaires de la Résistance. Seule une poignée restante des plus jeunes combattants se heurte depuis cinquante ans au refus de leur accorder les mêmes droits, alors que les bénéficiaires sont âgés maintenant presque tous de soixante-cinq ans.
En conséquence, il souhaiterait connaître les perspectives de son action en ce domaine, s'agissant de personnes qui, dès leur prime jeunesse, ont tant risqué pour la liberté de notre pays. Cette mesure constituerait un juste témoignage de reconnaissance pour le courage qu'ils ont manifesté. (N° 432.)
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question traite d'un sujet sur lequel j'ai appelé l'attention des gouvernements successifs depuis déjà quelques années.
En fait, nous nous trouvons dans un cas d'incompréhension administrative, qui concerne un certain nombre de jeunes gens qui se sont engagés dans la Résistance alors qu'ils n'avaient pas encore seize ans et dont les actes sont attestés par de nombreux témoins et répertoriés.
Ces jeunes gens d'alors, qui ont été particulièrement courageux - un ouvrage récent retrace leurs expériences individuelles - arrivent aujourd'hui à l'âge de la retraite. Or voilà qu'ils ont la surprise de constater que l'administration refuse de prendre en compte dans le calcul de leurs droits les services de résistance qu'ils ont accomplis entre quatorze et seize ans.
Sont concernées entre 100 et 200 personnes qui, lorsqu'elles se sont engagées, n'ont fait aucun calcul, n'ont écouté que leur coeur, que leur sens du devoir.
Voilà le problème que je vous soumets, monsieur le ministre. Je vous fais confiance car, comme chacun d'entre nous, je connais votre engagement personnel, et je sais qu'à l'égard de telles situations vous ne pouvez qu'éprouver une réelle sympathie.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Pasquini, ministre délégué aux anciens combattants et victimes de guerre. Monsieur le sénateur, je crains fort que, pour le moment, il ne soit pas possible de vous donner satisfaction sur une question que vous soulevez depuis pourtant fort longtemps, ce dont je vous rends hommage.
Vous évoquez la prise en compte pour le calcul des droits à la retraite des services rendus à la Résistance par de jeunes garçons - j'allais dire des enfants - qui n'avaient pas seize ans.
On ne peut que regretter que les intéressés aient attendu si longtemps pour faire valider ces périodes. En effet, si l'administration dont j'ai la charge ne peut délivrer d'attestation que pour des services accomplis à partir de l'âge de seize ans, l'autorité militaire pouvait parfaitement homologuer les titres que vous évoquez, mais ce jusqu'en 1951 seulement, puisque la forclusion est intervenue à cette date. A supposer que ces jeunes aient eu quinze ou seize ans à la fin de la guerre, en 1951, ils avaient plus de vingt ans et étaient donc à même de demander cette homologation.
Vous indiquez, monsieur le sénateur, que vous êtes intervenu à maintes reprises auprès de mes prédécesseurs sans obtenir d'autre réponse que l'annonce d'une réflexion interministérielle. J'ai fait rechercher, puisque je ne suis en fonctions que depuis quelques mois, quel avait pu être l'aboutissement de cette réflexion interministérielle et je me suis aperçu que les interventions que vous avez faites, notamment en 1995, avaient déjà fait l'objet d'une réponse, réponse dont il est possible que vous n'ayez pas eu connaissance.
Ainsi, j'ai trouvé dans les archives de mon ministère une note du ministère des affaires sociales dont je me permets de vous lire un extrait : « Pour les personnes qui auraient accompli entre quatorze ans et seize ans des services de Résistance n'ayant pas fait l'objet d'une homologation par l'autorité militaire, la validation de ces services ne peut être envisagée, dans un souci d'équité entre retraités, que si elle est compatible avec les règles propres aux différents régimes de retraite. »
Le ministère du budget a rappelé de son côté que « c'est dans un souci d'équité entre les ressortissants des divers régimes qu'ont été harmonisées les règles de prise en compte des périodes de Résistance ». L'unité de réglementation dans l'instruction des dossiers a pour principal objet de servir l'intérêt des anciens Résistants.
Il est peu vraisemblable que, compte tenu de leur situation financière, les régimes de retraite acceptent de s'engager dans cette voie, même si les effectifs en cause sont peu nombreux. Il n'est donc pas possible de répondre favorablement à votre demande.
M. Philippe Marini. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le ministre, vous venez de rappeler, avec beaucoup d'honnêteté et de vérité, les derniers actes de cette affaire.
Si je me suis permis de poser cette question, c'est qu'elle me semble tout à fait emblématique et significative.
Il s'agissait d'enfants, dites-vous. Mais, en situation de guerre, à quatorze ans, on est un homme. Dans l'histoire, que de grandes choses ont été faites par des personnes de quatorze ans !
Il s'agit donc de jeunes gens qui n'ont rien calculé avant de s'engager, qui ont pris leurs responsabilités, et on ne peut que les remercier de l'avoir fait.
Après la guerre, bien entendu, ils étaient encore relativement jeunes : l'administration et la paperasserie ne faisaient certainement pas partie de leur univers quotidien, d'autant qu'il s'agissait de gens qui avaient un certain goût du risque ; or goût du risque et démarches administrative sont plutôt antinomiques...
Bien sûr, il y a des règlements, et je comprends ce qui fonde la réponse des administrations concernées. Mais deux années de droit à retraite pour quelques centaines de personnes, on ne va pas me dire que cela met en péril l'équilibre des régimes !
Quant à l'effet de précédent, on peut le limiter en mettant l'accent sur le caractère très particulier des situations en cause.
Monsieur le ministre, j'ose espérer que, avec la passion qui vous caractérise, vous saurez être un avocat de ces quelques centaines de personnes qui attendent ce signe de reconnaissance.
M. François Giacobbi. Reportez-vous au Chant du départ : Bara et Viala, voilà des précédents historiques connus !

SITUATION DE DEUX FILLETTES FRANÇAISES
SÉQUESTRÉES EN ÉGYPTE