M. le président. Je rappelle les termes de l'article 6 :
« Art. 6. - I. - A titre expérimental, pour atteindre l'objectif de développement de la négociation collective dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux en préservant le rôle des organisations syndicales énoncé au paragraphe 2.3 de l'accord national interprofessionnel du 31 octobre 1995 relatif aux négociations collectives, des accords de branche pourront déroger aux articles L. 132-2, L. 132-19 et L. 132-20 du code du travail dans les conditions fixées ci-après.
« Ces accords devront être négociés et conclus avant le 31 octobre 1998, pour une durée ne pouvant excéder trois ans, en commission composée des représentants des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives.
« II. - Les accords de branche mentionnés au I pourront prévoir qu'en l'absence de délégués syndicaux dans l'entreprise, ou de délégués du personnel faisant fonction de délégué syndical dans les entreprises de moins de cinquante salariés, les représentants élus du personnel négocient la mise en oeuvre des mesures dont l'application est légalement subordonnée à un accord collectif.
« Les accords de branche devront fixer les thèmes ouverts à ce mode de négociation.
« Les textes ainsi négociés n'acquerront la qualité d'accords collectifs de travail qu'après leur validation par une commission paritaire de branche, prévue par l'accord de branche. Ils ne pourront entrer en application qu'après avoir été déposés auprès de l'autorité administrative dans les conditions prévues à l'article L. 132-10 du code du travail, accompagnés de l'extrait de procès-verbal de la commission paritaire compétente. Cette commission pourra se voir également confier le suivi de leur application.
« III. - Les accords de branche mentionnés au I pourront également prévoir que, dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux et dans les entreprises de moins de cinquante salariés dépourvues de délégués du personnel faisant fonction de délégué syndical, des accords collectifs peuvent être conclus par un ou plusieurs salariés expressément mandatés, pour une négociation déterminée, par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives.
« Les modalités de protection de ces salariés et les conditions d'exercice de leur mandat de négociation seront arrêtées par les accords de branche. Ces accords pourront prévoir que le licenciement des salariés mandatés ainsi que, pendant un délai qu'ils fixeront, le licenciement de ceux dont le mandat a expiré seront soumis à la procédure prévue à l'article L. 412-18 du code du travail.
« IV. - Les accords de branche prévus aux I à III détermineront également le seuil d'effectifs en deçà duquel les formules dérogatoires de négociation qu'ils retiennent seront applicables.
« V. - Pour atteindre l'objectif d'amélioration des conditions de représentation collective des salariés, notamment dans les petites et moyennes entreprises, énoncé au paragraphe 2.2 de l'accord national interprofessionnel du 31 octobre 1995 précité, des accords de branche pourront être négociés et conclus avant le 31 octobre 1998, dans les conditions prévues au I du présent article.
« Afin de permettre l'examen des dispositions législatives nécessaires à l'entrée en vigueur des clauses dérogatoires des accords de branche mentionnés à l'alinéa précédent, le Gouvernement informera le Parlement de leur conclusion, sur la base du suivi régulier prévu par le paragraphe 2.5 de l'accord national interprofessionnel du 31 octobre 1995 précité et après consultation des organisations professionnelles et syndicales représentatives au niveau interprofessionnel.
« VI. - L'entrée en vigueur des accords de branche mentionnés au présent article sera subordonnée à l'absence d'opposition de la majorité des organisations syndicales représentatives de la branche. L'opposition, qui ne pourra émaner que d'organisations non signataires desdits accords, devra être notifiée aux signataires dans les quinze jours de la signature.
« VII. - Avant le 31 décembre 1998, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport sur l'application du présent article, en tenant compte du bilan prévu par l'accord national interprofessionnel du 31 octobre 1995 précité et après consultation des organisations professionnelles et syndicales représentatives au niveau interprofessionnel. »
Au sein de cet article, nous en sommes parvenus à l'examen de l'amendement n° 96.
Par amendement n° 96, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le premier alinéa du paragraphe II de cet article, après le mot : « négocient », d'insérer les mots : « dans les conditions prévues à l'article L. 132-4 du code du travail ».
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Vous comprendrez aisément le sens de cet amendement qui est sous-tendu par la même philosophie que l'amendement n° 95 que nous avons présenté hier : nous estimons qu'aucune négociation d'accords de branche ne doit pouvoir déboucher sur des textes moins favorables aux salariés que les accords collectifs en vigueur. Les conventions collectives ne deviendraient sinon que des coquilles vides !
Le Gouvernement ne peut se cacher derrière les négociations d'accords de branche pour briser ce qui fonde en partie la stabilité du salariat.
Il ne faut pas tricher, et, à cet égard, j'aimerais vous entendre, madame le ministre, confirmer la justesse de mon analyse : ce texte n'ouvre-t-il pas la porte à des accords entre salariés et patronat en recul par rapport à ceux qui existent aujourd'hui ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur de la commission des affaires sociales. On reconnaît dans l'amendement n° 96 comme dans les propos sur la situation des « sans-papiers » qui viennent d'être tenus par Mme Demessine la générosité de leurs auteurs !
Mme Michelle Demessine. Merci !
M. Guy Fischer. C'est bien de le reconnaître !
M. Louis Souvet, rapporteur. Cependant - mes chers collègues, vous n'en serez pas surpris - l'amendement n° 96 va bien au-delà de ce qui est prévu dans l'accord du 31 octobre 1995 et la commission n'a pu, hélas ! émettre un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué pour l'emploi. Monsieur Fischer, je souligne d'abord que cette loi, qui est une loi de procédure, n'a bien évidemment pas vocation à élargir le champ d'application d'accords dérogatoires.
L'amendement n° 96 tend en fait à interdire la conclusion de tels accords par des salariés mandatés ou des représentants élus sous réserve de validation par une commission paritaire de branche. Il est donc contraire tout à la fois à l'objet et à l'esprit de l'accord interprofessionnel tel que prévu par l'article 6.
Je rappelle en effet, monsieur Fischer, que celui-ci précise qu'il appartiendra à l'accord de branche mettant en oeuvre ces modalités spécifiques de négociation de déterminer les thèmes de négociation qui en feront l'objet.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 96.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 96, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 97, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après le deuxième alinéa du paragraphe II de l'article 6, un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositifs négociés avec les représentants élus du personnel doivent être approuvés par la catégorie professionnelle concernée à l'intérieur de chaque collège concerné, à la majorité des élus du personnel. »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Nous avons déjà mis en garde la Haute Assemblée contre les effets nocifs que ne manqueront pas de produire les nouvelles procédures de négociation mises en place par l'article 6.
Sous des apparences anodines, ce texte élargit considérablement le champ des dérogations : dérogations quant aux formes de représentation des salariés ou dérogations quant au contenu des accords d'entreprise - sur le détail desquelles je ne reviens pas.
Pour limiter les effets dévastateurs de tels procédés, nous proposons que les accords conclus par les représentants élus du personnel, selon le dispositif dérogatoire prévu dans le paragraphe II de l'article 6, soient approuvés par la catégorie professionnelle concernée.
Cette mesure de bon sens vise à empêcher qu'un représentant élu du personnel exerçant des fonctions de cadre dans l'entreprise puisse négocier un accord collectif dérogatoire s'appliquant exclusivement aux employés de cette même entreprise.
Prenons pour illustrer une telle aberration l'exemple d'une entreprise de soixante-dix salariés dépourvus de délégués syndicaux et dont le personnel se répartit de la façon suivante : trente ingénieurs-cadres, dix agents de maîtrise, trente ouvriers-employés. Dans ce comité, les élus cadres et agents de maîtrise auront donc la majorité et, lors de la négociation avec l'employeur, ils pourront imposer aux employés des dispositions qu'ils refuseront en revanche de se voir appliquer.
Cet exemple, qui est loin d'être un cas d'école, devrait faire réfléchir sur les formes de représentation et sur la notion de représentativité que le présent projet de loi prône.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Mme Demessine vient de donner un exemple. Extrapolons toujours, mais sur la base maintenant de l'amendement n° 97, qui prévoit, je le rappelle, que « les dispositifs négociés avec les représentants élus du personnel doivent être approuvés par la catégorie professionnelle concernée à l'intérieur de chaque collège concerné ».
Il est à craindre, s'il est adopté, qu'à certains moments de sa vie l'entreprise ne ressemble davantage à un lieu de débat et de vote qu'à un lieu de production !
M. Alain Gournac. Bien sûr !
M. Louis Souvet, rapporteur. Cela va évidemment très au-delà de l'accord.
Par ailleurs, l'amendement n° 97 tend à restreindre la liberté laissée aux partenaires sociaux.
Ce sont les raisons pour lesquelles la commission n'y est pas favorable.
MM. Alain Gournac et Jacques Machet. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour les raisons excellemment exposées par M. le rapporteur et relatives à la complexité juridique qu'il tendrait à introduire dans le déroulement des négociations.
M. Jacques Machet. Bravo !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 97, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 98, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, à la fin de la première phrase du troisième alinéa du paragraphe II de l'article 6, de remplacer les mots : « prévue par l'accord de branche » par les mots : « composée des organisations syndicales représentatives dans la branche et dont la mise en place est subordonnée à l'extension de l'accord de branche qui l'aura prévue. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. A la page 47 de son rapport, notre éminent collègue Louis Souvet écrit : « La dérogation au monopole syndical est tempérée par le fait qu'il est précisé que le rôle des organisations syndicales est préservé : les dispositifs dérogatoires devront en effet être négociés au niveau de la branche selon la procédure traditionnelle et les mesures d'application prises dans le cadre de ces nouveaux modes de négociations devront être ratifiées par la branche. »
Le paragraphe II de l'article 6 prévoit en effet que les textes négociés devront être validés par une commission paritaire de branche constituée à cet effet par l'accord de branche.
Nous estimons pour notre part que la rédaction de la première phrase du troisième alinéa de ce paragraphe est beaucoup trop imprécise étant donné l'importance de la commission. Que la présence en son sein des organisations syndicales représentatives soit garantie expressément nous paraît donc nécessaire.
Nous rejoignons là le souci de M. le rapporteur, qui, lors de son intervention en commission, le 24 septembre, exprimait ses craintes relatives à l'absence de représentativité des signataires des accords de branche et à la difficulté pour les inspecteurs du travail de contrôler ces accords en ces termes : « Je me demande si les précautions prises par les partenaires sociaux eux-mêmes seront suffisantes car, par exemple, la façon dont le droit d'opposition est organisé permet à une majorité d'organisations d'imposer un accord de branche, alors même que celles-ci ne seraient pas majoritaires en voix lors des élections professionnelles. »
Vous poursuiviez, monsieur le rapporteur, par des propos, pour le moins édifiants, concernant la commission paritaire de branche : « De même, on n'est pas sûr que la commission paritaire prévue par l'accord de branche soit réellement représentative : ne risque-t-elle pas de n'être composée que des organisations signataires de l'accord ? Dans ces conditions, l'autocontrôle sera difficile. »
Les auditions des organisations syndicales - et, n'en déplaise à certains, pas uniquement celles de la CGT ou de la CGT-FO - ont confirmé ces craintes quant au risque de voir une organisation syndicale majoritaire mise en minorité dans le cadre de l'application des dispositions du projet de loi, en raison notamment du mode de décompte des voix retenu.
S'agissant de la seconde proposition que nous formulons dans notre amendement, relative à l'extension de l'accord de branche, elle paraît tout aussi importante pour qu'un certain contrôle de l'Etat puisse être exercé, comme le faisait fort justement remarquer M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Monsieur Fischer, vous avez d'excellentes lectures ! Le rapporteur aura été abondamment cité à l'occasion de l'examen de ce texte, il vous en remercie.
Je m'étais effectivement posé beaucoup de questions ; mais vous avez omis de dire - et c'est la deuxième fois - que j'ai obtenu des réponses. Celles-ci ont été apportées par certaines organisations syndicales, ou par le ministre, y compris pour des questions que j'ai posées ici même. Mes inquiétudes ont donc été apaisées.
Le rapporteur a l'habitude de travailler dans la clarté, mais il se demande maintenant s'il doit continuer à le faire de cette manière.
M. Guy Fischer Ne changez surtout pas !
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement n'a pas reçu un avis favorable car, comme vous le savez, il est contraire à l'accord entre les partenaires sociaux, qui ne retient pas le principe de l'extension des accords de branche.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le gouvernement est défavorable à cet amendement. Le débat qui vient de s'instaurer entre M. le rapporteur et M. Fischer était suffisammement clair pour que j'y ajoute quoi que ce soit.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 98, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 100, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le troisième alinéa du paragraphe II de l'article 6, d'ajouter un alinéa ainsi rédigé :
« De même, les textes ainsi négociés n'acquerront la qualité d'accords collectifs de travail qu'après leur validation par un vote favorable des organisations syndicales de salariés disposant de la majorité absolue des voix obtenues aux dernières élections prud'homales du département concerné par le projet d'accord. »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement revient sur la question de la validation des accords collectifs d'entreprise qui pourront être contractés en application des dispositions de l'article 6, permettant en l'état actuel de la rédaction de déroger aux principes fixés en matière de représentativité syndicale dans les entreprises et dans les branches.
Les éléments fondamentaux de la définition de l'influence respective des organisations syndicales dites représentatives car, par nature et par essence, interprofessionnelles sont aujourd'hui fournis par les consultations, comme l'élection des délégués du personnel, les élections aux comités d'entreprise ou aux comités de groupe, les élections d'administrateurs dans les entreprises publiques ou encore les élections prud'homales.
Nous avons donc le souci, avec cet amendement, de prendre en compte un élément indiscutable de mesure de cette influence : le résultat des élections prud'homales.
Les élections prud'homales constituent, de par la qualité du corps électoral, plus large d'ailleurs - et singulièrement du fait de la non-existence dans de trop nombreuses entreprises de représentants du personnel dûment élus - que celui des collèges convoqués pour les autres élections, un excellent moyen d'appréciation de la représentativité et de l'influence des organisations syndicales confédérées.
Fonder par conséquent la validation des accords d'entreprise sur cet élément de mesure en prenant en compte l'avis favorable des organisations les plus influentes au niveau de chaque département métropolitain procède d'une simple logique qui offrira toute garantie de validité aux nouveaux accords collectifs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Mme Demessine le sait, cet amendement va très au-delà de l'accord interprofessionnel et de la pratique actuelle. Aussi, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Madame Demessine, l'avis du Gouvernement est forcément défavorable, car cet amendement est contraire à l'esprit de l'accord interprofessionnel. Par ailleurs, cet accord a prévu d'ouvrir un droit d'opposition aux organisations non signataires représentatives au niveau de la branche.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 100, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 99, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le troisième alinéa du paragraphe II de l'article 6, d'ajouter un alinéa ainsi rédigé :
« La commission prévue à l'alinéa 8 du paragraphe 2-3 de l'accord comprend toutes les organisations syndicales représentatives de la branche, qu'elles soient ou non signataires. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Le cinquième alinéa de l'article 6 du présent projet de loi prévoit que les textes conclus entre le chef d'entreprise et les représentants élus du personnel n'acquerront la qualité d'accord collectif de travail qu'après leur validation par une commission paritaire de branche.
Face à un projet qui porte en germe l'éclatement du système juridique d'élaboration des normes du travail et qui permettra « à n'importe qui de négocier n'importe quoi », selon les termes du communiqué de l'ensemble des organisations syndicales, la validation des accords dérogatoires par une commission paritaire de branche pouvait laisser espérer la mise en place d'un contrôle minimal.
Or, cette validation n'offre aucune garantie en l'état actuel dès lors que la composition de cette commission n'est définie ni dans le projet de loi ni dans l'accord interprofessionnel de 1995.
Les syndicats représentatifs de l'inspection du travail ont d'ailleurs clairement dénoncé, lors de leur audition devant la commission des affaires sociales, le caractère purement artificiel de cette validation.
De plus, qui pourra empêcher l'application par un employeur d'un accord qu'il aura signé avec les délégués du personnel, même après un refus de validation dudit accord par la commission de branche ?
Les inspecteurs du travail ? Vous le savez très bien, madame le ministre, ils n'en auront pas les moyens.
Les prud'hommes ? Quel salarié osera saisir cette juridiction alors même qu'il signera peut-être par cet acte son licenciement ?
Il est donc indispensable d'insérer un nouvel alinéa précisant que tous les syndicats représentatifs de la branche, y compris les syndicats non signataires, feront partie de la commission paritaire d'homologation des accords collectifs dérogatoires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Monsieur Fischer, vous vous êtes fait l'écho de l'une des interrogations que le rapporteur avait exprimées à haute et intelligible voix.
Toutefois, il y a une différence entre nous : ayant interrogé M. le ministre et celui-ci ayant apporté, et en commission et en séance publique, les apaisements suffisants, personnellement, j'aurais retiré cet amendement si j'en avais été l'auteur.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Pour les raisons qui ont été précédemment exposées par M. Jacques Barrot, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 99, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 101, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer le paragraphe III de l'article 6.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. « Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son choix... Tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail, ainsi qu'à la gestion des entreprises. »
Au préambule de la Constitution de 1946 s'ajoute un second texte appartenant au bloc de constitutionnalité qui fait référence, de manière explicite, aux syndicats. Il s'agit de la Constitution elle-même, qui précise, en son article 34, que « la loi détermine les principes fondamentaux du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale. »
Du principe du respect du droit syndical découle en particulier l'exigence constitutionnelle de protection des délégués élus et des représentants syndicaux.
Cela signifie que, d'une part, la catégorie des salariés protégés est imposée par la Constitution et que, d'autre part, la loi ne pourrait réglementer l'exercice de ce principe qu'en vue de le rendre plus effectif ou de le concilier avec d'autres règles ou principes constitutionnels.
Or, le paragraphe III de cet article 6 prévoit que n'importe quel salarié - pourquoi pas celui qui serait choisi par son patron et que celui-ci aurait envoyé chercher un mandat syndical ? - pourra engager l'ensemble des travailleurs de son entreprise dans des négociations dérogatoires au droit du travail.
Il est, par ailleurs, prévu que la protection de ce salarié mandaté soit elle-même un enjeu de négociations puisqu'il est précisé que ce sont les accords de branche, et non les articles relatifs à la protection des représentants du personnel dans le code du travail, qui définiront les modalités de protection et les conditions d'exercice de leur mandat de négociation.
On le voit bien, si la relance du dialogue social est au coeur des préoccupations du Gouvernement, il ne s'agit pas de celle que nous concevons, au côté des travailleurs de notre pays.
Imaginez un instant une négociation sur la rémunération, par exemple, avec un salarié mandaté, dont l'accord de branche prévoirait - pourquoi pas ? - que sa qualité de mandaté expire dans un délai d'un mois après la conclusion de la négociation. Dans quel état d'esprit le salarié pourra-t-il intervenir ? Un dialogue entre partenaires sociaux dont l'un aurait, d'une certaine manière, une épée de Damoclès au-dessus de la tête peut-il encore être qualifié de « dialogue » ?
Vous m'objecterez que je fais un procès d'intention ; mais il n'est pas besoin d'être grand clerc pour comprendre comment certains patrons bien intentionnés, favorables à un certain type de dialogue social, auront à coeur d'utiliser ce paragraphe III, qui, je l'ai démontré, risque d'être frappé d'inconstitutionnalité tant il s'oppose aux principes fondamentaux à valeur constitutionnelle relatifs aux droits des travailleurs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer la possibilité de mandater un salarié. Il est contraire à l'accord, qui vise à encadrer la pratique de la Cour de cassation et qui repose sur la théorie du mandat.
Dans ces conditions, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour la raison évoquée à l'instant par M. le rapporteur. En effet, il s'agit d'une remise en cause du mandatement organisé par l'accord. Je rappellerai d'ailleurs à M. Fischer que le projet de loi a bien prévu le principe d'une protection des salariés concernés.
Quant au débat sur la constitutionnalité, une motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité a été débattue et repoussée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 101, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Tous les deux sont présentés par M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 102 a pour objet de remplacer le premier alinéa du paragraphe III de l'article 6 par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les accords de branche mentionnés au I pourront également prévoir que, dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux et de représentants élus du personnel ainsi que dans les entreprises de moins de cinquante salariés dépourvues de délégués du personnel faisant ou non fonction de délégué syndical, des accords collectifs peuvent être conclus par un ou plusieurs salariés expressément mandatés, pour une négociation déterminée, par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives.
« Ils ne pourront être désignés que si le procès-verbal de carence établi par l'employeur date de moins d'un an. »
L'amendement n° 103 vise, dans le premier alinéa du paragraphe III de l'article 6, après les mots : « peuvent être conclus », à insérer les mots : « , dans les conditions prévues à l'article L. 132-4 du code du travail, ».
La parole est à Mme Demessine, pour défendre l'amendement n° 102.
Mme Michelle Demessine. L'une des raisons d'être du présent projet de loi est de favoriser la signature d'accords d'entreprise dans les entreprises qui peuvent en être dépourvues du fait de la carence dûment constatée du dialogue social et de l'absence de représentation du personnel à travers une section syndicale partie prenante de l'une de nos cinq grandes organisations confédérées.
La question qui nous est posée est en fait très simple : devons-nous donner un rôle nouveau aux représentants du personnel élus - et d'ailleurs quelquefois nommés - sur des listes non syndicales, aux nombreux élus sans étiquette que compte notre pays, en leur reconnaissant la capacité de négocier des accords sans modalité de contrôle ?
Devons-nous par conséquent confier à ces élus sans étiquette, voire, à défaut d'élections dûment organisées, à des salariés simplement désignés en l'absence de tout quorum électoral, une mission particulière dans la négociation d'accords dont on sent confusément qu'ils pourraient, sous certains aspects, remettre en cause la teneur des garanties offertes aux salariés de telle ou telle branche par la négociation collective existante et, en l'occurrence, par les textes conventionnels de branche ?
Peut-on faire porter la responsabilité de l'absence de sections syndicales confédérées dans telle ou telle entreprise aux seules organisations syndicales, alors que l'on sait très bien que c'est d'abord et avant tout l'arbitraire de la gestion d'entreprise qui est à l'origine des carences en la matière ?
Les chiffres traduisant cet arbitraire sont connus : chaque année, des milliers de délégués syndicaux et de délégués du personnel sont licenciés.
La collectivité publique, notre tradition démocratique et notre droit fiscal lui-même font pourtant toute leur place aux organisations syndicales et admettent la nécessité du développement de leurs activités.
Une part non négligeable de la cohésion sociale ne procède-t-elle pas de l'existence d'un mouvement syndical diversifié, élément de la représentation des intérêts matériels et moraux des salariés, catégorie qui regroupe, ne l'oublions pas, le plus grand nombre des travailleurs actifs de ce pays ?
C'est au vu de ces observations et interrogations, auxquelles, me semble-t-il, nous n'apportons évidemment pas les mêmes réponses, que nous vous demandons d'adopter cet amendement tendant à limiter et à encadrer strictement le recours au mandatement.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 103.
M. Guy Fischer. A ce stade du débat, dont je regrette qu'il ne suscite pas plus d'intérêt sur les travées de la majorité sénatoriale, étonnamment muette sur des questions pourtant primordiales pour le monde du travail, je présume que vous connaissez maintenant parfaitement la teneur de l'article L. 132-4 du code du travail, mes chers collègues. Je n'y reviendrai donc pas, à moins que vous le souhaitiez !
Je présume également que vous savez à quel point nous y sommes attachés.
Il ne s'agit pas, n'en déplaise à certains, d'une position d'arrière-garde, conservatrice, visant à préserver un statu quo néfaste à la nécessaire adaptation du monde du travail aux évolutions de notre temps. Bien au contraire, et nos interventions et propositions le prouvent, s'il en était besoin.
C'est pourquoi nous soumettons de nouveau au Sénat un amendement tendant à appliquer dans toute négociation d'accords collectifs le fameux article L. 132-4 du code du travail.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 102 et 103 ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 102 et 103 ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
S'agissant de l'amendement n° 103, je ne reprendrai pas les arguments du Gouvernement, car ils ont été suffisamment développés lors de l'examen de l'amendement n° 96.
Quant à l'amendement n° 102, il confond l'hypothèse dans laquelle l'employeur aurait méconnu l'obligation relative à la mise en place d'une représentation du personnel avec celle qui est précisément visée par le projet de loi et dans laquelle, aucune représentation n'étant possible, un salarié est mandaté par une organisation syndicale afin de permettre la négociation de textes conventionnels.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 102, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 103, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 104, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le premier alinéa du paragraphe III de l'article 6, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le fait pour un employeur ou son représentant de favoriser un mandatement constitue une infraction aux dispositions de l'article L. 412-2 du code du travail. »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, cet amendement a pour objet de rendre illicite le fait pour un employeur ou son représentant de favoriser un mandatement.
En effet, les patrons ne doivent en aucune façon intervenir dans un mandatement ou dans la désignation d'un salarié.
Cet amendement est d'autant plus important que l'on constate chaque jour des cas où l'employeur fait pression sur les délégués syndicaux de son entreprise. Le dernier en date est le cas d'un salarié de la RATP, fiché pour son activité militante par son supérieur. Lors de son changement d'affectation de la ligne 6 à la ligne 4, une lettre de son supérieur a été envoyée à son futur chef de service en vue d'attirer l'attention de ce dernier sur l'engagement syndical et politique de cet employé, engagement qui le place en constante opposition avec sa hiérarchie.
Cette affaire suffisamment grave de « chasse aux militants », qui est loin d'être un cas isolé, vous convaincra, j'en suis sûr, mes chers collègues, si vous ne l'étiez déjà, de l'importance et de l'utilité de l'amendement n° 104.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. L'article L. 412-2 du code du travail sanctionne très largement les comportements du type de celui que vient de décrire Mme Demessine. Par conséquent, l'amendement n° 104 est satisfait, et la commission ne peut qu'y être défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. M. le rapporteur vient de donner une réponse parfaitement exacte sur la situation actuelle de notre législation.
J'ajouterai que l'amendement n° 104 est assez regrettable dans la mesure où il témoigne d'une suspicion a priori vis-à-vis des employeurs et où il sous-estime l'indépendance des organisations syndicales à leur égard. Je pense que l'on n'en est pas là !
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 104.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 104, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 105, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après le premier alinéa du paragraphe III de l'article 6, un alinéa ainsi rédigé :
« Le mandat que l'organisation syndicale représentative sur le plan national confie à un salarié est adressé, par l'organisation syndicale, au chef d'entreprise et à l'inspection du travail, et est affiché sur les panneaux réservés aux communications syndicales, dans les conditions prévues à l'article L. 412-16 du code du travail. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise à préciser les modalités qui nous semblent nécessaires pour assurer un minimum de transparence dans la procédure de mandatement d'un salarié par une organisation syndicale représentative.
Il s'agit - vous l'aurez compris, mes chers collègues - d'un amendement de repli, puisque nous sommes opposés à la procédure de mandatement prévue par le paragraphe III de l'article 6. Mais puisque le Sénat ne nous a pas suivis dans notre demande de suppression du paragraphe III et, plus largement, de l'article 6, nous proposons d'apporter quelques précisions qui permettront, pour le moins, d'éliminer certains risques liés au recours pour la négociation d'entreprise à des salariés mandatés.
En effet, dans l'état actuel du texte, rien n'empêche l'employeur de choisir un salarié qu'il chargera de contacter une organisation syndicale qu'il indiquera, et ce sans que l'ensemble des salariés de son entreprise soient le moins du monde informés.
Certains considéreront peut-être qu'il s'agit d'un procès d'intention de notre part. En aucun cas ! Mais nous préférons que les choses soient dites clairement. L'amendement n° 105, en prévoyant une information obligatoire des salariés, vise à éviter l'écueil que je viens d'évoquer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 105, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 106, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger ainsi le second alinéa du paragraphe III de l'article 6 :
« Le salarié mandaté par une organisation syndicale représentative au niveau national bénéficie des dispositions des articles L. 412-1 à L. 412-21 du code du travail. »
Par amendement n° 26, Mme Dieulangard,M. Mélenchon et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le second alinéa du paragraphe III de l'article 6 :
« Les modalités de protection de ces salariés et les conditions d'exercice de leur mandat de négociation seront fixées conformément aux dispositions des articles L. 412-17 à L. 412-20 du code du travail. »
Les quatre amendements suivants sont présentés par M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 107 vise, dans la seconde phrase du second alinéa du paragraphe III de l'article 6, à supprimer les mots : « Ces accords pourront prévoir que » et les mots : « , pendant un délai qu'ils fixeront, ».
L'amendement n° 108 a pour objet, dans la seconde phrase du second alinéa du paragraphe III de l'article 6, de remplacer le mot : « pourront » par le mot : « devront ».
L'amendement n° 109 tend, dans la seconde phrase du second alinéa du paragraphe III de l'article 6, après les mots : « salariés mandatés », à insérer les mots : « par une organisation syndicale représentative sur le plan national, dans les entreprises où des délégués syndicaux ne peuvent être désignés ».
Enfin, l'amendement n° 110 rectifié vise, dans la seconde phrase du second alinéa du paragraphe III de l'article 6, à remplacer les mots : un délai qu'ils fixeront » par les mots : « le délai prévu à l'article L. 412-18, alinéa 3, du code du travail ».
La parole est à Mme Demessine, pour défendre l'amendement n° 106.
Mme Michelle Demessine. Nous avons eu et nous aurons sans doute encore l'occasion de revenir sur la question essentielle de la protection des salariés mandatés.
Je souhaite insister sur le fait qu'il est très dangereux d'organiser la possibilité de conclure des accords collectifs sur n'importe quel sujet - je vous renvoie à la formulation extrêmement vague du projet de loi, mes chers collègues - avec n'importe quel salarié disposant de n'importe quelle protection.
Le deuxième alinéa du paragraphe III renvoie en effet aux accords de branche la fixation de modalités de protection de ces salariés mandatés et les conditions d'exercice de leur mandat. Le texte suggère, et suggère seulement - c'est bien cela qui est scandaleux - d'appliquer la procédure générale de protection contre les licenciements des délégués syndicaux de l'article L. 412-18 du code du travail.
Sauf à vouloir conférer aux salariés mandatés un statut particulier tout à fait précaire, permettant ainsi à leurs interlocuteurs employeurs d'exercer une pression sur eux, aucune raison ne justifie le fait que ces salariés, mandatés pour négocier, ne puissent disposer de la protection régie par le code du travail qui s'applique aux représentants du personnel et qui découle du principe du respect du droit syndical reconnu par la Constitution.
Voilà pourquoi nous souhaitons que les articles L. 412-1 à L. 412-21 du code du travail, relatifs à l'exercice du droit syndical, puissent s'appliquer aux salariés mandatés par une organisation syndicale représentative au plan national.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter l'amendement n° 26.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Cet amendement a aussi pour objet d'assurer la protection de cette nouvelle catégorie de salariés négociateurs dans l'entreprise.
En toute hypothèse, nous souhaitons que les salariés qui se trouveront dans la difficile situation d'être les interlocuteurs du patron dans de pareilles circonstances bénéficient pleinement de la protection prévue pour les délégués syndicaux.
C'est un grave retour en arrière que de laisser à la discrétion des accords de branche la protection de ces salariés, alors que ces règles de protection font partie de l'ordre public social.
Il est simplement inimaginable que le licenciement éventuel de ces salariés ne soit pas obligatoirement assorti de l'autorisation administrative de licenciement, et ce pendant un délai suffisant après la signature de l'accord.
Nous vous demandons en conséquence de renforcer cette protection, et ce - oserai-je l'ajouter ? - si vous voulez trouver des salariés assez téméraires pour se lancer dans cette aventure périlleuse.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 107.
M. Guy Fischer. L'article 6 du projet de loi vise à permettre aux chefs d'entreprise de négocier des accords collectifs de travail avec de simples salariés, accords d'autant plus importants, à notre sens, qu'ils seront conclus pour revenir essentiellement sur certains droits des salariés.
Ce rôle, réservé jusqu'ici aux syndicats, garantissait l'indépendance des représentants des salariés et assurait l'équilibre de la négociation.
Quel sera le poids des salariés négociateurs face à leur patron, dès lors que leur protection sociale sera conventionnelle et non légale ?
Lors des auditions auxquelles a procédé la commission des affaires sociales, cette question de la protection des salariés négociateurs contre le licenciement a été soulevée à plusieurs reprises. Elle est, en effet, extrêmement importante si l'on ne veut pas que la négociation soit un exercice de pure forme. En effet, avec une protection conventionnelle allégée, quel salarié serait prêt à s'opposer à son chef d'entreprise ?
Le septième alinéa de l'article 6 vise à prévoir que les accords de branche établiront les modalités de protection des salariés mandatés, avec la possibilité de renvoyer à celles qui sont prévues par le code du travail pour les délégués syndicaux. Mais - j'insiste sur ce point - il ne s'agit là que d'une possibilité.
De plus, même dans cette hypothèse, des dérogations sont encore possibles : les anciens salariés mandatés pourront être soumis à la procédure prévue à l'article L. 412-18 du code du travail, avec cependant la possibilité de modifier le délai de protection contre le licenciement.
Un tel bricolage est inadmissible ! Les salariés mandatés qui sont destinés, par ce projet de loi, à remplacer les délégués syndicaux dans les négociations collectives doivent bénéficier de la même protection légale que ces derniers. Cela doit être non pas un choix, mais une obligation !
Voilà pourquoi, mes chers collègues, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen vous proposent d'adopter cet amendement, qui vise à prévoir que le licenciement des anciens salariés mandatés doit respecter le délai fixé par le code du travail pour le licenciement des anciens délégués syndicaux.
M. le président. La parole est à Mme Demessine, pour présenter l'amendement n° 108.
Mme Michelle Demessine. Par cet amendement, c'est un point crucial de démocratie que nous souhaitons mettre en avant.
En effet, la protection des salariés mandatés nous paraît constituer une condition essentielle du bon exercice de leur mandat. Or la rédaction du deuxième alinéa du paragraphe III de l'article 6 n'est pas de nature à rassurer les salariés et à favoriser leur expression, leur participation.
Certes, le Gouvernement propose de laisser la possibilité d'une protection au moins égale à celle qui est prévue par le code du travail pour les délégués syndicaux.
Mais, honnêtement, qui peut croire que le patronat va s'orienter dans cette direction ? L'expérience nous prouve le contraire : là où il n'y a pas d'obligation, le choix est vite fait, et les négociations sur ce type de problème débouchent sur des accords a minima.
Or on ne peut pas dénoncer, voire regretter l'insuffisante représentativité des organisations syndicales dans les entreprises et tout faire pour rogner des droits acquis de longue lutte. Il y a là une contradiction notoire, sauf à croire que les salariés mandatés doivent, en quelque sorte, relayer le choix de la direction.
La protection des représentants des salariés n'est pas un quelconque privilège ; c'est le moyen de traiter, de négocier, sinon sur un pied d'égalité, tout au moins dans des conditions acceptables. Toute volonté de réduire cette protection, et donc d'accentuer la pression sur ces salariés, ne peut que traduire une volonté de faire accepter des choix stratégiques et économiques, bien souvent contraires à l'intérêt général.
Il n'est guère surprenant que ce soit dans une période de forte contestation des choix économiques effectués tant dans l'entreprise que par le Gouvernement que l'on tente de corseter l'expression des salariés.
Bien entendu, mes chers collègues, cette attitude du patronat et du Gouvernement ne peut nous surprendre. Mais réduire de tels acquis est à mon avis un mauvais calcul pour l'avenir.
C'est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen tient particulièrement à ce qu'obligation soit faite de conférer aux salariés mandatés une protection au moins égale à celle qui est prévue par le code du travail pour les délégués syndicaux.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour présenter l'amendement n° 109.
M. Guy Fischer. Le mandatement de salariés doit être réservé aux organisations syndicales représentatives sur le plan national et ne doit avoir lieu que dans le cas où il est impossible de désigner des délégués syndicaux.
Tel est le sens de cet amendement, qui a pour objet de compléter la seconde phrase du second alinéa du paragraphe III de l'article 6.
Il est en effet essentiel de garantir la représentativité des organisations syndicales qui procèdent à un mandatement.
Outre le fait que le salarié pourrait être incité par son employeur à requérir un mandatement, il ne faudrait pas, en plus, qu'il puisse s'adresser pour ce faire à n'importe quel syndicat ayant ou non une dimension nationale reconnue.
Telles sont les raisons pour lesquelles je vous propose d'adopter cet amendement, qui, vous l'aurez compris, est un amendement de repli par rapport à notre position de fond de rejet intégral du paragraphe III, et plus largement de l'article 6.
M. le président. La parole est à Mme Demessine, pour défendre l'amendement n° 110 rectifié.
Mme Michelle Demessine. Les argumentations que nous avons développées à l'appui de nos autres amendements s'appliquent également à celui-ci, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 106, 26, 107, 108, 109 et 110 rectifié ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Sur l'amendement n° 106, la commission émet un avis défavorable. Cet amendement est en effet contraire à la souplesse prévue par l'accord interprofessionnel. On doit observer que le salarié qui est mandaté l'est à titre temporaire, pour une négociation précise. Il paraît donc disproportionné de demander l'application de tout le chapitre du code du travail consacré à l'exercice du droit syndical dans les entreprises privées.
S'agissant de l'amendement n° 26, la commission émet un avis défavorable. La protection des salariés doit être assurée, c'est une évidence, et le texte le prévoit. Cette protection peut être soit légale en application des dispositions traditionnelles, soit conventionnelle si les partenaires sociaux eux-mêmes le décident. Ceux-ci ont en effet pensé qu'une protection conventionnelle pouvait, dans certains cas, être plus adaptée que le recours à l'autorisation administrative de licenciement. Au demeurant, rien n'empêche, me semble-t-il, de cumuler les deux procédures. Cette façon de concevoir la protection des salariés me paraît aller de pair avec les négociations prévues à l'article 2 de l'accord interprofessionnel en vue de développer la représentation des salariés.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 108. Le verbe « pourront » ne signifie pas que la protection des salariés est facultative, mais au contraire que les partenaires sociaux ont le choix du mode de protection : ils peuvent opter entre plusieurs solutions. Je crois qu'il faut leur faire confiance, la crédibilité de l'accord conclu au niveau de la branche en dépend.
La commission est aussi défavorable à l'amendement n° 109.
Quant à l'amendement n° 110 rectifié, il est contraire à l'accord, qui laisse ouverte une protection conventionnelle. Celle-ci pourrait d'ailleurs être préférable, car la protection mentionnée par l'amendement n'intervient que si la fonction a été exercée au moins pendant un an. Que se passerait-il donc si la négociation durait moins d'un an ? C'est pourquoi une protection conventionnelle peut se révéler plus efficace.
La commission est donc défavorable à ces différents amendements.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Le minimum n'est pas garanti !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. L'amendement n° 106 tend à restreindre l'accès au mandatement. Or ni l'accord interprofessionnel, qui ouvre la possibilité de mandater aux organisations représentatives, ni le présent texte n'ont entendu apporter de telles restrictions. Ils n'ont pas davantage entendu conférer aux salariés mandatés la plénitude des missions dont bénéficient les délégués syndicaux. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Les amendements n°s 26, 107 et 108 ont pour vocation d'améliorer le fonctionnement du dialogue social, mais ils n'atteignent pas véritablement cet objectif, malheureusement. Ils sont d'ailleurs contraires à l'esprit du présent texte. Les partenaires sociaux ont réservé aux accords de branche la possibilité d'opter pour la protection légale ou pour une protection conventionnelle présentant des garanties équivalentes. Le projet de loi vise donc à rendre possible le recours par les partenaires sociaux à cette protection légale et non à en imposer l'usage. Aussi le Gouvernement s'oppose-t-il à ces trois amendements.
Je suis au regret de constater que l'amendement n° 109 restreint le champ d'application des dispositions qui fixent les conditions de négociation avec un salarié mandaté en les limitant aux seules entreprises dans lesquelles un délégué syndical ne peut être désigné. Cet amendement est également contraire à l'esprit du texte de l'accord interprofessionnel, qui ne prévoit pas un seuil de ce type. Par conséquent, il ne peut être accueilli favorablement.
Enfin, s'agissant de l'amendement n° 110 rectifié, il n'y a pas lieu de figer le délai pendant lequel le salarié mandaté peut continuer à bénéficier de la protection après l'expiration du mandat qui lui a été confié par une organisation syndicale pour négocier. Le maintien de la liberté accordée sur ce point aux partenaires sociaux de la branche, dans l'esprit de l'accord national interprofessionnel, s'impose de toute évidence. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 106, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 107, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 108, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 109, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?
Je mets aux voix l'amendement n° 110 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 111, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le second alinéa du paragraphe III de l'article 6, d'ajouter un alinéa ainsi rédigé :
« Le salarié mandaté dispose des moyens de fonctionnement prévus aux articles L. 424-2 et L. 424-3 du code du travail. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Vous l'aurez compris, il s'agit encore une fois d'un amendement de repli.
Je vous ferai grâce de l'ensemble des raisons qui nous amènent à nous opposer à l'article 6, et en particulier à la possibilité offerte à un salarié mandaté de négocier un accord d'entreprise dérogatoire. Mais, puisque la majorité du Sénat ne nous a pas suivis dans nos propositions de suppression de ces dispositions, nous suggérons pour le moins d'assurer un minimum de protection des salariés mandatés.
Nous proposons en particulier, avec cet amendement, que ces derniers bénéficient des moyens de fonctionnement prévus aux articles L. 424-2 et L. 424-3 du code du travail pour les délégués du personnel.
Permettez-moi de vous rappelez que l'article L. 424-2 prévoit en particulier que le chef d'établissement est tenu de mettre à la disposition du délégué du personnel le local nécessaire pour lui permettre de remplir sa mission et, notamment, de disposer d'un lieu de réunion.
L'article L. 424-3, quant à lui, prévoit, en résumé, que, pour l'exercice de leur fonction, les délégués du personnel peuvent, durant les heures de délégation, se déplacer hors de l'entreprise. Ils peuvent également circuler librement dans l'entreprise et y prendre tout contact nécessaire à l'accomplissement de leur mission, notamment auprès d'un salarié à son poste de travail.
Ces droits nous paraissent pour le moins nécessaires au salarié mandaté pour négocier un accord d'entreprise. En effet, comment celui-ci pourrait-il valablement refléter les demandes des salariés s'il n'a pas les moyens d'en avoir connaissance ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La fonction du salarié mandaté n'est pas permanente. Il ne semble donc pas nécessaire de donner à ce dernier les mêmes moyens matériels qu'au délégué du personnel. En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement émet également un avis défavorable, monsieur le président. S'il lui semble tout à fait nécessaire de prévoir des conditions pratiques d'exercice du mandat, il lui semble également tout à fait raisonnable de laisser aux accords de branche le soin de définir de façon adaptée les dispositions applicables en la matière, comme le prévoit d'ailleurs l'accord interprofessionnel.
M. Guy Fischer. Nous allons être tirés vers le bas !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 111, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 112, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le second alinéa du paragraphe III de l'article 6, d'ajouter un alinéa ainsi rédigé :
« L'article L. 432-4-2, du code du travail est abrogé. »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Nous proposons d'abroger l'article L. 432-4-2 qui a été introduit dans le code du travail par la loi quinquennale.
Cet article a eu pour effet, je le rappelle, de supprimer l'obligation qui était auparavant faite aux patrons des entreprises de moins de 300 salariés d'informer de manière régulière leur comité d'entreprise sur la situation économique de l'entreprise.
C'est là, à notre avis, une chose grave qui porte atteinte à la cohésion des acteurs de la vie de l'entreprise, à laquelle le patronat, le Gouvernement et l'actuelle majorité parlementaire prétendent pourtant tenir.
Cela témoigne également d'une certaine suspicion malsaine à l'égard des salariés, à qui l'on dénie le droit d'être informés sur leur avenir et sur celui de leur famille, qui dépendent pourtant de manière importante de la bonne marche de l'entreprise où ils travaillent.
Alors que l'on sait l'importance de plus en plus déterminante que prend la circulation de l'information dans les processus de production, comment peut-on, à quelques mois de l'an 2000, estimer suffisante une simple information annuelle donnée au comité d'entreprise, en une seule fois et en bloc, en un seul et unique rapport ?
Cela procède d'une volonté d'écarter les salariés et leurs représentants au comité d'entreprise d'une information complète et régulière sur les résultats et les éventuelles difficultés que peut rencontrer l'entreprise.
Entre deux rapports annuels simplifiés, les salariés devraient continuer à être confinés dans le secret, la direction étant seule à même de connaître les données économiques et sociales de la situation de l'entreprise.
Nous souhaitons qu'il soit mis un terme à cette situation afin que les salariés des entreprises puissent être régulièrement et complètement informés pour qu'ils puissent intervenir sur des choix de gestion qui trop souvent vont à l'encontre de la politique d'emploi et de progrès social qu'il conviendrait de mener à l'échelle du pays tout entier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, qui est sans rapport avec l'objet du projet de loi en discussion.
Par ailleurs, votre proposition, madame Demessine, va dans le sens d'une plus grande complexité, sans apporter une amélioration quelconque à l'information des salariés.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 112, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 113, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après les paragraphe III de l'article 6, un paragraphe nouveau rédigé comme suit :
« ... - Les élus du personnel ou le salarié mandaté reçoivent du chef d'entreprise, ou de son représentant, un document écrit contenant toutes les informations utiles pour la négociation à venir, dans un délai d'au moins quinze jours avant la première réunion. La négociation a lieu selon les dispositions des articles L. 132-27, L. 132-28 et L. 132-29 du code du travail. Un accord ne peut être conclu qu'à l'issue d'au moins deux réunions espacées par un délai d'au moins quinze jours, à peine de nullité.
« Le non-respect de ces dispositions constitue une infraction aux prescriptions du code du travail en matière de droit syndical et est puni des peines prévues à l'article L. 481-2 du code du travail. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement revêt, à nos yeux, une très grande importance.
Sans revenir sur les motivations de fond qui justifient notre opposition à l'économie globale de ce texte, il a pour objet d'encadrer les négociations collectives afin de leur assurer un minimum de calme et de sérénité.
Il est, en effet, primordial que les élus du personnel ou le salarié mandaté soient conduits à contracter en pleine connaissance de cause, car il en va de l'intérêt collectif de l'ensemble des salariés des entreprises considérées.
Nous suggérons, par conséquent, qu'ils reçoivent de la direction une information la plus complète possible au moins quinze jours avant la première réunion.
Ce délai leur permettrait de consulter les syndicats ou toute personne compétente afin d'éclairer leur jugement et de préparer au mieux la négociation et, surtout, de consulter les salariés de l'entreprise pour recueillir leur sentiment sur les objectifs à atteindre.
De la même manière, nous souhaitons qu'un accord ne puisse être conclu qu'après au moins deux réunions espacées d'un nouveau délai d'au moins quinze jours, toujours pour permettre les consultations nécessaires portant sur les premiers résultats de la négociation.
Il nous semble également important de définir des modalités précises pour que la négociation se déroule dans de bonnes conditions.
A cet effet, et pour éviter d'alourdir inconsidérément le code du travail, mieux vaudrait alors s'aligner sur les modalités qui président à la négociation annuelle obligatoire portant sur les salaires, les effectifs, la durée et l'organisation du temps de travail, qui, je le rappelle est définie dans un certain nombre d'articles du code du travail.
Cependant, nous ne faisons pas de ces modalités une affaire de principe et nous sommes ouverts à toute autre proposition, pourvu qu'elle permettre de garantir l'indispensable sérénité de la négociation.
Il serait, en effet, tout à fait anormal que la négociation se déroule à la sauvette, sous la pression patronale et sans que l'élu du personnel ou le salarié mandaté soit mis en situation d'agir en connaissance de cause.
Bien que nous ne croyions pas à une quelconque génération spontanée de salariés cherchant à se faire mandater pour négocier, nous estimons qu'il convient également que ces salariés ne soient pas conduits a posteriori à avoir déclarer été abusés du fait de la rapidité de négociations menées au pas de charge par les représentants de la direction.
Je vous demande, enfin, mes chers collègues, de considérer que notre amendement, en donnant du temps pour la consultation des salariés, aurait, en outre, le mérite de protéger les négociateurs salariés de l'éventuelle vindicte de leurs collègues de travail mécontents des résultats obtenus. Cet aspect du problème n'est certainement pas à négliger !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.
L'amendement va bien au-delà de ce que fixe le code du travail. En outre, la procédure nous paraît bien rigide. Il ne s'agit pas, ici, de la négociation annuelle qui est imposée aux grandes entreprises ; il ne faut pas faire de confusion.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. S'il est vrai que ces questions sont d'importance, il me paraît indispensable de rappeler que, en dehors du caractère expérimental de la négociation avec des salariés mandatés, il n'est aucunement dérogé aux dispositions du code du travail encadrant le processus de négociation.
Par conséquent, dès lors que les garanties procédurales issues des dispositions du code du travail qui sont susceptibles de recevoir application dans l'hypothèse du mandatement doivent être respectées, il n'y a pas lieu, de toute évidence, d'accueillir favorablement un amendement qui assortit cette négociation de règles spécifiques.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 113, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 114, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le paragraphe III de l'article 6, d'insérer un nouveau paragraphe rédigé comme suit :
« ... - Le salarié mandaté ou les élus du personnel ont le droit et les moyens de réunir pendant le temps de travail, dans un local adapté dans l'enceinte de l'entreprise ou dans un local mis à la disposition par l'entreprise, les salariés avant et après les réunions de négociation avec l'employeur, en vue de recueillir les souhaits des salariés et de les informer. Le temps de réunion est de plein droit considéré comme temps de travail effectif. Les réunions ont lieu en l'absence de l'employeur et un représentant d'une organisation syndicale représentative sur le plan national peut y participer. »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. L'amendement que nous proposons maintenant tend à introduire un alinéa supplémentaire prévoyant que les représentants élus du personnel et les salariés mandatés chargés de négocier et de conclure des accords dérogatoires consultent et informent les autres salariés.
Reconnaissez, madame le ministre, qu'il est tout à fait anormal que des salariés dont le sort est placé entre les mains de négociateurs novices en la matière n'aient pas au moins le droit d'être consultés puis informés !
Un tel amendement permettrait aussi de conférer aux représentants élus du personnel et aux salariés mandatés un minimum de légitimité puisque ces derniers se feraient ainsi l'écho des revendications des autres salariés.
En ne prévoyant aucun droit de regard des salariés sur la négociation qui pourtant les concerne et en mettant hors jeu les organisations syndicales, le présent projet de loi valide une conception pour le moins étrange du dialogue social et de la négociation collective.
De quel soutien les représentants élus du personnel et les salariés mandatés pourront-ils se prévaloir ?
Quelle autonomie et quelle marge de manoeuvre auront-ils pour faire entendre les intérêts des salariés ?
Il faut, à cet égard, rappeler que la protection des salariés mandatés fera elle-même l'objet d'une négociation lors des accords de branche.
Dans de telles conditions, quel rôle pourront jouer les « représentants des salariés », si ce n'est celui qui consiste à parapher le bon vouloir de leur patron ?
Si vous souhaitez réellement remédier aux défaillances du dialogue social dans les entreprises, mes chers collègues, vous n'hésiterez pas à adopter cet amendement, qui aménage un droit de consultation et d'information pour tous les salariés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable. On nous propose un formalisme qui va bien au-delà de l'accord.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
L'amendement tend à prévoir des moyens pour l'exercice de la mission du salarié mandaté, mais il ne limite pas le temps de réunion, ce qui est de nature à alourdir à l'excès les charges des petites et moyennes entreprises concernées.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 114, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 115, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le paragraphe III de l'article 6, d'insérer un paragraphe nouveau rédigé comme suit :
« ... - Les élus du personnel et le salarié mandaté ne peuvent négocier et conclure des accords collectifs prévus au paragraphe 2-3 de l'accord interprofessionnel du 31 octobre 1995 précité que pour la catégorie professionnelle à laquelle ils appartiennent. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Vous l'aurez compris, mes chers collègues, nos amendements visent à reconstruire un code du travail qui semble se défaire au fil de l'étude de ce projet de loi.
Encore une fois, il s'agit d'un amendement de repli. Nous proposons que les élus du personnel et les salariés mandatés ne puissent négocier et conclure des accords collectifs prévus au paragraphe 2-3 de l'accord interprofessionnel du 31 octobre sur les négociations collectives que pour la catégorie à laquelle ils appartiennent.
En effet, si le texte du projet de loi était adopté, les élus au comité d'entreprise du collège « maîtrise et cadres » pourraient imposer, par exemple, le non-paiement des majorations légales pour heures supplémentaires au collège « ouvriers et employés » et donc aux salariés qui n'auront pas participé à leur élection au sein du comité d'entreprise. Le problème, croyez-moi, va devenir d'actualité.
Nous avons déjà développé plus longuement ces arguments à propos d'un amendement de même nature.
On voit les risques que contient cette possibilité ouverte par les imprécisions du texte. Notre amendement tend pour le moins à écarter ce danger. Compte tenu de votre souci d'avancer en matière de protection sociale, vous n'aurez, je pense, aucune difficulté, mes chers collègues, à approuver cet amendement de précision !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Cette disposition compliquerait terriblement la négociation. Il est en effet question de la catégorie professionnelle à laquelle appartiennent les élus du personnel et les salariés mandatés. Soucieuse de ne pas compliquer les choses, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, notamment en raison de la complexité juridique que vient d'évoquer à l'instant M. le rapporteur. Nous avions d'ailleurs développé une argumentation en ce sens lors de l'examen de l'amendement n° 97.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 115, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 27, MM. Carle et Poirieux proposent de compléter le paragraphe IV de l'article 6 par deux alinéas ainsi rédigés :
« Afin de favoriser l'emploi dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux et dans les entreprises de moins de cinquante salariés dépourvues de délégué du personnel faisant fonction de délégué syndical, et jusqu'à la conclusion des accords de branche mentionnés aux I à III, les accords conclus par un ou plusieurs salariés expressément mandatés, pour une négociation d'aménagement et de réduction du temps de travail aux conditions de la loi n° 96-502 du 11 juin 1996, par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives, acquerront la qualité d'accords collectifs de travail.
« Jusqu'à fixation des modalités de protection prévue au III, le licenciement de ces salariés sera soumis à la procédure de l'article L. 412-18 du code du travail. »
La parole est à M. Carle.
M. Jean-Claude Carle. Madame le ministre, l'amendement que nous proposons, Guy Poirieux et moi-même, ne remet pas en cause les accords de branche, d'entreprise ou interprofessionnels, accords auxquels nous sommes, comme vous, fondamentalement attachés.
Le monde de l'entreprise est un monde que je connais bien. Durant vingt ans, j'ai pu apprécier combien les négociations entre partenaires sociaux étaient indispensables. J'ai également pu me rendre compte du climat qui s'instaure lorsqu'il y a absence de négociation ou de dialogue.
La politique contractuelle est le fondement des politiques partenariales que j'engage au sein des collectivités auxquelles j'ai l'honneur d'appartenir.
Cet amendement, contrairement aux craintes exprimées par M. le président Fourcade, vise non pas à prendre moins de précautions, mais à apporter plus de souplesse et de réactivité, ainsi qu'à « coller » au mieux aux réalités et à la diversité des situations.
S'appuyant sur des cas concrets, vécus au quotidien, que je ne peux énumérer aujourd'hui, il vise à ne pas bloquer les situations et à faire bénéficier les PME d'aides, en particulier pour la création d'emplois dans le cadre de la loi Robien. Car ce sont ces entreprises qui, aujourd'hui, sont source d'emplois pour peu que nous « osions » libérer les initiatives, comme l'a affirmé le Président de la République. Il serait illusoire, voire dangereux, de traiter de la même manière un grand groupe et une petite entreprise de mécanique, de menuiserie ou de BTP. Il faut faire du « sur mesure » et non du « prêt-à-porter » et « favoriser les initiatives plus qu'imposer », vient d'affirmer le Premier ministre lors de son discours de politique générale.
Madame le ministre, vous le savez, une dynamique est en train de se créer, dans les PME, autour de la loi Robien ; des milliers d'emplois sont à la clé. Les petits ruisseaux font souvent les grandes rivières. Malheureusement, le flou juridique qui entoure actuellement les conditions de validation des accords dans ces petites entreprises est en train de ruiner les initiatives locales.
Certes, le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui conduira à une clarification lorsque les accords de branche seront fixés. Mais il rend la situation encore plus floue dans l'attente de la signature des accords de branche.
Madame le ministre, on peut craindre que, dans l'attente des accords de branche, la jurisprudence de la Cour de cassation, qui permet aujourd'hui de débloquer de nombreuses situations, ne continue pas de s'appliquer.
On ne peut pas laisser cette question sans réponse. L'amendement que mon collègue Guy Poirieux et moi-même avons déposé vise à combler le vide juridique que le projet de loi créerait dans l'attente des accords de branche. Il ne dénature en rien l'esprit de l'accord national interprofessionnel puisque les branches auront le dernier mot. Mais, ce faisant, il permettra à des milliers de projets de création d'emplois de voir le jour dès demain.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a parfaitement compris le sens de la démarche de MM. Carle et Poirieux, à savoir saisir toutes les occasions pour créer des emplois. Elle n'a cependant pas souhaité modifier l'accord des partenaires sociaux - d'abord parce qu'il est l'accord des partenaires sociaux - en introduisant une exception qui risquerait de le déséquilibrer. De plus, le dispositif étant expérimental, les résultats risqueraient d'être faussés, surtout dans un domaine aussi sensible que l'aménagement du temps de travail. Il faut, en effet, savoir que l'on ferait ainsi sauter un verrou essentiel du dispositif, qui est l'accord de branche.
En simplifiant, voici ce que dit M. Carle : actuellement, l'accord soumet les mécanismes permettant la signature des accords collectifs aux accords de branche ; si une personne est désignée, elle signe un accord qui devient un accord collectif de travail jusqu'à ce que l'accord de branche soit signé.
C'est tout de même ouvrir la porte un peu largement. Ce n'est pas ce qu'ont souhaité les partenaires sociaux. Voilà pourquoi j'aimerais que nos deux collègues acceptent de retirer leur amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Je partage tout à fait le souci qu'a exprimé M. Carle en son nom et au nom de son collègue M. Poirieux, à savoir faciliter le développement du dialogue social. Pour avoir moi-même bien connu le monde de l'entreprise, je sais tout le profit qu'on peut retirer d'un dialogue social bien conduit.
J'ai parfaitement conscience que les grandes entreprises et les petites présentent des différences de situation telles qu'elles ne peuvent faire l'objet d'aucun amalgame, et que le cas des petites et moyennes entreprises et des entreprises artisanales appelle des réponses spécifiques, adaptées.
Les partenaires sociaux en avaient également pleinement conscience lorsqu'ils ont négocié et conclu l'accord interprofessionnel relatif aux négociations collectives, qui vise spécifiquement le développement du dialogue social dans les petites et moyennes entreprises.
Je comprends parfaitement la préoccupation concrète et tout à fait légitime que vous avez exprimée, monsieur Carle. Vous souhaitez que toutes les virtualités du dispositif législatif qui résulte de la loi du 11 juin 1996 puissent se concrétiser par la négociation dans l'ensemble des entreprises qui souhaiteraient y recourir, y compris en l'absence de délégué syndical.
Je tiens à vous assurer que votre inquiétude n'est pas fondée. L'intervention du législateur, qui permettra aux branches de mettre en oeuvre les formules prévues par l'accord du 31 octobre 1995 - mandatement ou validation par une commission paritaire - n'a ni pour objet ni pour effet de supprimer d'emblée et de façon générale la jurisprudence de la Cour de cassation, à laquelle vous avez tout à l'heure fait allusion.
La Cour de cassation a ouvert des possibilités de négociation dans les entreprises ne remplissant pas les conditions légales pour avoir des délégués syndicaux. Cette jurisprudence a été conçue à titre supplétif pour combler un vide du droit positif et s'est fondée pour cette raison sur le code civil, qui permet de se faire représenter par un mandataire pour signer un contrat.
Par rapport à cette jurisprudence, monsieur le sénateur, ce qui vous est proposé par le projet de loi tend à ouvrir des facultés supplémentaires aux partenaires sociaux dans un cadre plus précis qu'ils aménageront.
La mise en oeuvre de ce dispositif est, en outre, subordonnée à la conclusion d'un accord de branche. En l'absence d'un tel accord dans une branche déterminée, rien ne peut donc faire obstacle à l'application de la jurisprudence de la Cour de cassation, qui conserve évidemment toute son utilité. L'intervention de la loi ne créera à cet égard aucun vide juridique.
C'est, au demeurant, monsieur le sénateur, la position que nous nous apprêtons à prendre dans la circulaire d'application de la loi du 11 juin 1996, sur laquelle les services du ministère s'appuieront dès cet automne pour instruire les demandes d'aide.
Monsieur Carle, vos préoccupations, très pratiques et tout à fait légitimes, je le répete, ne doivent pas être aujourd'hui source d'inquiétude. J'espère que l'argumentation que je viens de développer vous en aura convaincu, et je vous invite à retirer cet amendement.
M. le président. Monsieur Carle, allez-vous accéder à la demande de Mme le ministre et de M. le rapporteur ?
M. Jean-Claude Carle. Compte tenu des précisions et des assurances apportées par Mme le ministre, notamment sur l'application de la jurisprudence, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 27 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 116, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent, dans le premier alinéa du paragraphe V de l'article 6, de remplacer les mots : « notamment dans les petites et moyennes entreprises » par les mots : « dans les entreprises de moins de cinquante salariés ».
Par amendement n° 117, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent, dans le premier alinéa du paragraphe V de l'article 6, de remplacer les mots : « notamment dans les petites et moyennes entreprises » par les mots : « dans les entreprises où un délégué syndical ne peut être désigné ».
La parole est à Mme Demessine, pour défendre l'amendement n° 116.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement vise à définir les entreprises concernées par l'article 6 en faisant en sorte que celui-ci ne s'applique qu'aux seules entreprises où la désignation d'un délégué syndical est légalement impossible, c'est-à-dire dans les entreprises de moins de cinquante salariés.
Vous avez indiqué dans l'exposé des motifs, madame le ministre, qu'il s'agissait de « relancer le dialogue social en prenant en compte la réalité de la représentation du personnel dans les entreprises, ainsi que son insuffisant développement dans les PME. »
En ne précisant pas clairement que seules sont concernées les entreprises de moins de cinquante salariés, c'est-à-dire celles où il est légalement impossible de désigner un délégué syndical, vous encouragez les chefs d'entreprise à s'affranchir, ou plutôt vous répondez à leurs souhaits de s'affranchir de la présence syndicale dans leur entreprise, puisque vous leur ouvrez la possibilité de négocier des accords collectifs avec de simples salariés mandatés ou avec des délégués du personnel.
Je le répète, la seule précision « entreprises dépourvues de délégué syndical » laisse régner un flou qui ne présage rien de bon pour les salariés.
Il est donc indispensable de préciser que cette absence de délégué ne dépend pas du bon vouloir du chef d'entreprise, mais est due à une impossibilité légale d'en désigner un.
Tel est le sens de l'amendement n° 116.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour présenter l'amendement n° 117.
M. Guy Fischer. Par cet amendement, nous proposons, dans le paragraphe V de l'article 6, de remplacer la notion de « petites et moyennes entreprises » par celle « d'entreprises où un délégué syndical ne peut être désigné ».
Bien évidemment, nous n'acceptons pas la logique de ce texte, que nous estimons très préjudiciable aux salariés. Nous proposons simplement de ne pas ajouter à ces dispositions très contestables le flou d'une notion dont l'application ne pourrait qu'être source de confusion.
En effet, dans la législation française, il n'existe aucune définition précise de ce que peut être une petite entreprise ou une entreprise de taille moyenne.
Selon que l'on considère le chiffre d'affaires, le bénéfice annuel, le nombre de salariés, le volume de travail, la taille ou le nombre des installations ou unités de production, la même entreprise peut objectivement être considérée comme petite, moyenne ou grande.
Avec moins de cinquante salariés, une entreprise peut très bien générer un chiffre d'affaires et des profits très considérables, pouvant être supérieurs à ceux d'entreprises de deux cents, trois cents, voire plus de cinq cents salariés.
Une société holding dotée d'un capital très important peut, avec très peu de personnel, avoir une importance économique assez considérable. Elle peut être petite, moyenne ou grande, selon le critère que l'on choisit.
Introduire la notion de « petites et moyennes entreprises » dans un texte touchant, même à titre expérimental, au droit du travail, peut s'avérer très dangereux pour les droits des salariés.
Même si le premier alinéa du paragraphe V de cet article 6 vise, j'en conviens, toutes les entreprises, il nous semble inutile de faire figurer dans la loi la notion floue de « petites et moyennes entreprises ».
La notion « d'entreprise où un délégué syndical ne peut être désigné » que nous proposons nous paraît beaucoup plus claire.
Elle correspond aux entreprises de moins de cinquante salariés, notion qui revient à plusieurs reprises dans notre législation du travail.
Ne rendons pas compliqué ce qui peut être clair ! Notre amendement obéit à ce souci de simplification.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 116 et 117 ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 116.
A propos de l'amendement n° 117, je reconnais que votre démarche est cohérente avec la récriture du code du travail que vous avez entreprise, mais la commission n'y a pas été sensible. Elle a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Annie-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements, pour des raisons qui ont déjà été exposées.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 116, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 117, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 118, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, dans le premier alinéa du paragraphe V de l'article 6, après les mots : « négociés et conclus », les mots : « dans les conditions prévues à l'article L. 132-4 du code du travail ».
La parole est Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Nous avons déjà eu l'occasion de vous faire part de notre volonté de voir pleinement appliqué l'article L. 132-4 du code du travail, et ce dans toute négociation.
Il s'agit, vous l'aurez compris, d'un article central, qui, tout en encourageant le recours à la négociation collective, c'est-à-dire à la définition des règles sociales dans l'entreprise par les intéressés eux-mêmes, exige que celles-ci respectent les grands principes qui doivent s'appliquer à tous les salariés.
Autoriser des dérogations à l'article L. 132-4 du code du travail, c'est permettre la remise en cause de tous les droits sociaux acquis.
Un tel retour en arrière est intolérable. Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement fait référence à l'article L. 132-4 du code du travail, qui autorise les dérogations à la loi à condition que celles-ci soient plus favorables aux salariés.
Il s'agit, en l'occurrence, de négocier pour encourager la représentation collective des salariés. Or, l'article L. 132-4 n'a pas véritablement à s'appliquer puisque, en tout état de cause, les partenaires sociaux élaboreront des propositions visant à mieux protéger les salariés et à faire en sorte qu'ils ne subissent pas, par exemple, de retard de carrière.
La commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement a également émis un avis défavorable.
J'ajoute à l'argumentaion de M. le rapporteur que l'accord interprofessionnel précise qu'il appartiendra à l'accord de branche mettant en oeuvre les modalités spécifiques de négociation de déterminer les thèmes qui en feront l'objet. Nous nous sommes déjà précédemment expliqués sur ces sujets.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 118, repoussé par la commission et le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 119, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, à la fin du premier alinéa du paragraphe V de l'article 6, de supprimer les mots : « dans les conditions prévues au I du présent article ».
Par amendement n° 120, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, à la fin du premier alinéa du paragraphe V de l'article 6, de remplacer les mots : « dans les conditions prévues au I du présent article » par les mots : « en prévoyant la possibilité de désigner un délégué syndical dans tout l'établissement ».
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 119.
M. Guy Fischer. A l'approche du terme d'un débat qui n'en porte que le nom, tant nos interventions ont été éludées et nos propositions rejetées sans explication, je veux insister solennellement sur la nocivité de l'article 6, en particulier sur celle de son paragraphe I.
Permettre la signature d'accords d'entreprise dans les entreprises où il n'y a pas de délégués syndicaux par des institutions représentatives du personnel - comité d'entreprise ou délégués du personnel - voire par des salariés pris isolément, met en cause les principes de la représentativité tels qu'ils sont définis par le code du travail.
Le processus de négociation est donc ainsi fondé sur un double chèque en blanc : l'un est signé au niveau de la branche, et l'autre au niveau de l'entreprise.
N'importe quel délégué élu non syndiqué ou n'importe quel salarié mandaté par quelque syndicat que ce soit, représentatif ou non, pourrait donc négocier un accord dans un domaine laissé à l'appréciation des accords de branche. Cet accord aurait alors la valeur juridique d'un accord d'entreprise.
En outre, comme si cela ne suffisait pas, votre texte organise la subsidiarité entre la loi et les dispositions conventionnelles, puisqu'il confie l'élaboration des normes de travail à chaque entreprise.
Cela conduit inévitablement à l'éclatement du droit du travail, à ce que certains membres du CNPF appellent « la modification progressive des conditions du dialogue social ».
Quant au Parlement, son rôle se réduit à adopter les dispositions législatives nécessaires à l'application de mesures arrêtées par ce que l'on appelle aujourd'hui les « partenaires sociaux ». Il n'est dès lors qu'une simple chambre d'enregistrement !
Autrement dit, le Parlement risque bien de n'être que la « voiture-balai » de la négociation - pour reprendre l'expression qu'a employée l'une de mes collègues hier - ce qui, soit dit en passant, s'oppose à l'article 34 de la Constitution, comme l'a justement fait remarquer mon amie Michelle Demessine lors de sa présentation, au nom de mon groupe, de la motion d'irrecevabilité.
Tel est le sens de cet amendement, qui ne recueillera sans doute pas vos suffrages, mes chers collègues de la majorité, à moins que le développement d'arguments édifiants auquel nous nous sommes attachés depuis hier n'ait fini par vous convaincre, ce que, malgré tout, j'ose espérer !
M. le président. La parole est à Mme Demessine, pour défendre l'amendement n° 120.
Mme Michelle Demessine. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, cet amendement tend à permettre la désignation d'un délégué syndical dans tout établissement.
En effet, renforcer la représentation collective des salariés, et par là même le rôle de la négociation collective, implique en premier lieu de favoriser la désignation de délégués syndicaux dans les entreprises.
Vous affirmez relancer le dialogue social et contribuer à l'« amélioration » des conditions de représentation collective des salariés, selon les termes mêmes du paragraphe V de l'article 6. Or, toute la logique de cet article vise, au contraire, à écarter les syndicats de la négociation collective.
Une représentation collective des salariés sans les organisations syndicales, voilà une conception pour le moins étrange !
Je me permets de vous rappeler, madame le ministre, que les dispositifs dérogatoires que vous cautionnez par le présent projet de loi ne sont aucunement destinés à s'appliquer exclusivement aux entreprises de moins de cinquante salariés.
Le paragraphe V de l'article 6 précise que les entreprises visées sont « notamment les petites et moyennes entreprises ». D'une part, le terme « notamment » n'est pas exclusif des autres entreprises. D'autre part, l'expression « petites et moyennes entreprises » est fort ambiguë, puisqu'elle ne renvoie à aucun critère précis.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendement n°s 119 et 120 ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Avis également défavorable : ces deux amendements s'écartent trop de l'esprit du texte.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 119, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?... Je mets aux voix l'amendement n° 120, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 121, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, proposent de supprimer le second alinéa du paragraphe V de l'article 6.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Nous souhaitons notamment supprimer les dispositions suivantes : « Afin de permettre l'examen des dispositions législatives nécessaires à l'entrée en vigueur des clauses dérogatoires des accords de branche mentionnés à l'alinéa précédent, le Gouvernement informera le Parlement de leur conclusion ».
Le rapport de M. Souvet explicite parfaitement cette proposition : « Certaines clauses retenues par ces accords de branche pourraient être dérogatoires au droit existant. Une intervention législative serait alors nécessaire ».
La discrétion de cette mesure masque mal l'ampleur du recul qui peut en découler sur le plan du droit du travail.
Ainsi, une loi pourra entériner des accords de branche dérogeant à la législation européenne, et, par les temps qui courent, on imagine mal que ce soit dans le sens de l'amélioration.
Or, nous estimons qu'un accord de branche dérogatoire ne doit, à la source, en aucun cas, primer sur la convention collective et la loi.
Cette disposition de l'article 6 que nous vous proposons de supprimer ouvre la voie, en fait, à tous les reculs.
La première fonction de la convention collective est, selon les premières leçons d'un ouvrage de référence en matière de droit social, la suivante : « Progrès social : dérogation à la loi en faveur du salarié. »
Je vous rappelle que la loi du 13 juillet 1971 a étendu aux accords d'entreprise, d'établissement et interprofessionnel, les principes et garanties inhérents à la convention collective.
Le paragraphe V de l'article 6 du projet de loi dont nous discutons constitue, à notre sens, un mécanisme grossier pour contrer, au sein de telle ou telle branche, la portée des conventions collectives. Nous vous proposons, en conséquence, de le supprimer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable au motif que le législateur doit être informé du résultat des négociations afin d'être en mesure d'apprécier s'il convient ou non, plus tard, de modifier le code du travail.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Monsieur Fischer, il ne faut pas préjuger le contenu des accords qui pourront éventuellement proposer des solutions effectivement différentes de la législation actuelle. Seule la loi intervenant, le cas échéant, au vu du bilan de tels accords pourra déterminer les conséquences à tirer du contenu de ceux-ci. La loi interviendra donc bien a posteriori, chaque année pour permettre l'entrée en vigueur de ces clauses.
Ce système, monsieur le sénateur, est respectueux de la hiérarchie des règles juridiques selon laquelle les dispositions impératives de la loi priment évidemment sur l'accord, ce dernier ne pouvant y déroger que dans les limites prévues par la loi elle-même.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 121.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Le deuxième alinéa du paragraphe V de l'article 6 dont nous réclamons la suppression tend à informer régulièrement le Parlement sur les accords de branche dérogatoires au droit commun afin de l'inciter à établir des lois de plus en plus défavorables aux salariés.
D'un côté - nous venons de le voir au cours de la discussion de l'article 6 - le Gouvernement et sa majorité refusent d'aménager les modalités de la négociation collective de manière à assurer une bonne information des salariés et des négociateurs censés les représenter ; de l'autre, nous les voyons déborder d'initiative pour informer régulièrement le Parlement des progrès faits dans la remises en cause des droits des travailleurs tels qu'ils sont inscrits dans le code du travail.
Je crois qu'il y a là une disproportion tout à fait paradoxale et pour le moins inacceptable.
Nous voulons donc avec cet amendement n° 121, signifier notre opposition à une méthode qui témoigne, il faut le dire, d'un certain mépris pour les négociateurs comme pour l'édifice protecteur que le code du travail représente aux yeux de millions de salariés.
Je crois pour ma part qu'il faut en toutes circonstances savoir raison garder et éviter d'en rajouter.
Par conséquent, je demande au Sénat d'avoir la sagesse d'adopter cet amendement n° 121, le deuxième alinéa du paragraphe V pouvant être ressenti comme une véritable provocation par les salariés et leurs syndicats, cela d'autant plus que, vous le savez très bien, les organisations patronales sauront très bien informer par d'autres moyens les parlementaires RPR et UDF sur le rythme et les modalités de la mise en pièce négociée des garanties collectives en vigueur dans notre pays.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 121, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 122, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le paragraphe V de l'article 6, d'insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article L. 133-1 du code du travail, après les mots : "pour pouvoir être étendus," sont insérés les mots : "être plus favorables aux salariés que les dispositions en vigueur,". »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Selon l'article L. 133-1 du code du travail, « la convention de branche ou l'accord professionnel ou interprofessionnel, leurs avenants ou annexes doivent, pour pouvoir être étendus, avoir été négociés et conclus en commission composée des représentants des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives dans le champ d'application considéré. »
Nous défendons, vous l'avez bien compris, une conception progressiste de la convention collective allant dans un sens favorable aux salariés.
Nous sommes d'autant plus vigilants sur ce dernier aspect que les pressions exercées aujourd'hui sur le monde du travail, la politique des bas salaires et le nombre de travailleurs privés d'emploi sont autant d'éléments qui mettent à mal, sur le terrain des entreprises, l'application de notre code du travail.
C'est pourquoi notre amendement vise à garantir un peu plus les droits des salariés en précisant que, pour pouvoir être étendus, les accords ou conventions doivent être plus favorables aux salariés que les dispositions en vigueur. Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Défavorable également, car cet amendement est totalement étranger à l'objet de notre texte.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 122, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 123, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, à la fin de la première phrase du paragraphe VI de l'article 6, de remplacer les mots : « de la majorité des organisations syndicales représentatives de la branche. » par les mots : « des organisations syndicales représentatives ayant obtenu aux élections professionnelles de l'année précédente, selon les statistiques du ministère du travail, la majorité des suffrages des électeurs de la branche qui se sont portés sur les listes syndicales. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement porte sur l'une des questions essentielles du présent projet de loi.
Notre droit du travail reconnaît en effet de longue date la représentativité de cinq grandes organisations syndicales de travailleurs, à savoir la Confédération générale du travail, la Confédération française démocratique du travail, la Confédération générale du travail-Force ouvrière, la Confédération française des travailleurs chrétiens et la Confédération française de l'encadrement-Confédération générale des cadres.
Cette pluralité syndicale, qui constitue une spécificité du mouvement syndical de notre pays, est parfois vécue ou présentée comme un handicap alors qu'elle est, de notre point de vue, une richesse.
Quoi qu'on en dise parfois, cette diversité syndicale a aussi la particularité d'être fondée sur l'indépendance des organisations, ce qui n'est pas toujours le cas dans des pays voisins, où il existe parfois un lien organique entre organisations syndicales et partis politiques.
Cette diversité syndicale est toutefois la source d'une égale diversité d'appréhension de la situation créée par telle ou telle évolution économique et sociale.
Face à la crise, à la recherche permanente des gains de productivité, qui se traduisent de manière quasi exclusive par un partage de la valeur ajoutée toujours plus défavorable aux salaires, face aux restructurations industrielles, dont l'objectif premier est de permettre la constitution de fortes entités économiques et financières sans nécessairement prendre en compte la dimension de l'emploi et celle des équilibres économiques locaux, l'action et le positionnement des différentes organisations syndicales confédérées sont différenciés.
La question posée dans notre amendement est relativement simple : à partir de quand peut-on ou doit-on estimer que les conditions de validation d'un accord de branche sont réunies ? Lorsque trois des organisations confédérées représentatives existantes l'ont approuvé, ou lorsque la validité de l'accord est fixée au prorata , en quelque sorte, de l'influence respective de chacune de ces organisations confédérées ?
La réalité des rapports de force syndicaux dans les différentes branches d'activité fait en effet que si la représentativité de telle ou telle confédération est indiscutable, malgré les entraves de plus en plus nombreuses qui existent à un libre et plein exercice de l'activité syndicale, la question de l'influence relative de chaque organisation est posée.
Ainsi, lorsque l'on regarde le secteur public - vous me permettrez cet écart quant au cadre défini par la présente loi - on ne peut estimer approuvé par la majorité des personnels du secteur un accord que ne ratifieraient pas la Confédération générale du travail, la Fédération syndicale unitaire et la Confédération générale du travail-Force ouvrière, alors même que la majorité des organisations syndicales dites représentatives l'auraient ratifié.
Peut-on donc en fait imposer aux salariés d'une branche d'activité ou d'un secteur économique donné un accord, d'ailleurs dérogatoire dans le cas qui nous préoccupe, qui ne serait ratifié que par des organisations manifestement minoritaires quand on examine les données fournies par les élections aux comités d'entreprise ou destinées à pourvoir aux fonctions de délégué du personnel ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. J'ai entendu M. Fischer se plaindre ou critiquer le fait qu'on recherche la productivité pour nos entreprises. Mais, en raison de la mondialisation du marché, ces dernières sont confrontées à des entreprises qui, actuellement, n'ont pas du tout, sur le plan social, les mêmes avantages que les nôtres. Aussi la recherche de productivité répond-elle non à un simple plaisir, mais à une question de vie ou de mort, à savoir le maintien de l'entreprise et donc de l'emploi.
Par conséquent, la commission est défavorable à l'amendement n° 123.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, qui tend à modifier les données spécifiques du système d'opposition.
En effet, son adoption rendrait plus difficile l'exercice du droit d'opposition dans la mesure où, en l'état actuel du texte, des organisations syndicales, même minoritaires en voix dans une branche considérée, peuvent exercer valablement leur droit d'opposition dès lors qu'elles sont majoritaires en nombre.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 123, repoussé par la commission et le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.) M. le président. Par amendement n° 124, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans la seconde phrase du paragraphe VI de l'article 6, de remplacer les mots : « quinze jours » par les mots : « trente et un jours ».
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement tend à allonger de quinze à trente et un jour le délai pendant lequel l'opposition des organisations syndicales devra être notifiée aux signataires de l'accord de branche.
Vous écartez, madame le ministre, les organisations syndicales de la négociation et de la conclusion des accords d'entreprise dérogatoires. Vous prévoyez que ces accords, lorsqu'ils auront été conclus par un salarié mandaté, entreront en vigueur après validation par une commission paritaire de branche, dont vous ne précisez même pas la composition et dont on peut penser que les organisations non signataires seront exclues.
Laissez au moins à ces organisations syndicales non-signataires le temps de notifier leur opposition aux accords de branche, puisque c'est le seul moment où vous leur reconnaissez un quelconque droit d'intervention, qui reste, en tout état de cause, il faut bien le dire, extrêmement limité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement, qui prévoit un allongement du délai pendant lequel l'opposition des organisations syndicales devra être notifiée, a paru hors de propos à la commission. De plus, il entraînerait une incertitude juridique trop longue. C'est pourquoi la commission y est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement y est également défavorable, pour les mêmes motifs.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 124, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 125, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, proposent de compléter le paragraphe VI par un alinéa ainsi rédigé :
« Des accords de branche ou d'entreprise ne pourront être conclus que dans le champ d'application de l'accord interprofessionnel du 31 octobre 1995 ».
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, des accords de branche ou d'entreprise ne doivent pouvoir être conclus que dans le champ d'application de l'accord interprofessionnel du 31 octobre 1995.
Bien évidemment, vous avez là un amendement qui vise à exclure de cet accord néfaste les non-signataires.
Il ne s'agit pas d'avaliser cet accord. Il s'agit, bien au contraire, d'empêcher que des branches ou des entreprises qui ne se trouvent pas concernées le soient aujourd'hui du fait de l'adoption de ce projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. L'accord aura vocation, à la suite de l'adoption du projet de loi, à s'appliquer à toutes les branches. La commission estime, en conséquence, que cet amendement sera sans objet. C'est pourquoi elle y est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Défavorable, pour les mêmes raisons, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 125, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 126, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après le paragraphe VI de l'article 6, un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 431-1-1 du code du travail est abrogé. »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Par cet amendement n° 126, nous proposons de supprimer l'article L. 431-1-1 du code du travail, qui a été créé par la loi quinquennale pour l'emploi.
Je rappelle que cet article a été introduit dans le code du travail pour permettre aux patrons des entreprises de moins de deux cents salariés de décider unilatéralement de la suppression de la représentation spécifique des salariés au sein des comités d'entreprise.
Les délégués du personnel sont alors contraints d'assurer, en plus de leur fonction spécifique, celle des représentants du personnel au comité d'entreprise.
J'ajoute qu'ils ne disposent pas d'un nombre d'heures de délégation suffisant pour assurer correctement la double mission qui leur est impartie par la loi et qui leur est confiée par les salariés.
Cet article L. 431-1-1 du code du travail a, par conséquent, gravement porté atteinte aux capacités de négociation des représentants du personnel.
Le Gouvernement nous dit aujourd'hui vouloir favoriser la négociation collective, mais, dans le même temps, nous constatons qu'il se limite trop dans son élan et que, pour mettre concrètement en oeuvre les louables intentions qu'il affiche, il devrait élargir son champ d'investigation en acceptant notre amendement qui revient sur cet article L. 431-1-1.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Mme Demessine ne sera pas surprise que, son amendement étant hors sujet, la commission ait émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Mme Demessine ne sera pas plus surprise que le Gouvernement soit également défavorable à cet amendement, qui est sans rapport avec le texte.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 126, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 127, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le paragraphe VI de l'article 6, d'insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... . - Les accords d'entreprises conclus dans les conditions prévues au paragraphe 2-3 de l'accord interprofessionnel du 31 octobre 1995 précité, ainsi que la décision de la commission paritaire de la branche, sont adressés par le chef d'entreprise à l'inspecteur du travail par lettre recommandée avec accusé de réception. L'accord d'entreprise ne peut produire effet qu'en l'absence d'avis négatif émis par le fonctionnaire et dans un délai d'un mois suivant l'envoi de l'accord. Un décret fixera les modalités de mise en oeuvre de cette procédure. Pour prendre sa décision, qui sera notifiée aux parties signataires, l'inspecteur du travail vérifiera notamment si les dispositions de l'accord sont conformes aux prescriptions de l'article L. 132-4 du code du travail. »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement porte sur la question importante de la validation des accords d'entreprise.
Dans de nombreuses entreprises où l'inspection du travail doit constater la carence en matière d'institutions représentatives des salariés, malgré la présence éventuelle d'élus ou de représentants désignés du personnel non affiliés à une organisation syndicale, c'est en général l'inspecteur du travail qui doit quasiment assumer le rôle de représentant des salariés.
Cette situation, encore aujourd'hui trop fréquente, procède en fait de cette démocratie politique que nous connaissons et qui s'arrête trop souvent aux portes des entreprises, où règne le chef d'entreprise.
Il existe des entreprises, dans notre pays, où le seul fait de vouloir constituer une section syndicale devient un motif de mise en oeuvre d'une procédure de licenciement et où, parfois, c'est la manière forte qui est employée pour faire accepter l'état de fait.
Nous devons, à l'occasion de l'examen de ce projet de loi, faire en sorte que des accords d'entreprise ne puissent être négociés et signés sous la seule pression d'une situation existante, par nature défavorable aux intérêts des salariés.
C'est le sens de cet amendement, que nous vous demandons d'adopter, mes chers collègues, afin de donner aux services déconcentrés du ministère du travail toute latitude pour apprécier la situation nouvelle créée par le présent projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. L'avis du Gouvernement est défavorable, car la disposition prévue par cet amendement est contraire à l'esprit de l'accord interprofessionnel.
En effet, il tend à ajouter une condition supplémentaire de validation par l'autorité administrative. Or, je rappelle que celle-ci aura bien entendu connaissance des accords validés, qui ne pourront entrer en vigueur qu'après avoir été déposés à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle compétente.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 127, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 128, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter l'article 6 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... . - L'article 38 de la loi n° 93-1313 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle du 20 décembre 1993 est abrogé. »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. L'article 38 de la loi quinquennale de 1993 a créé un article L. 212-1 dans le code du travail afin d'encourager les négociations collectives portant sur l'annualisation du temps de travail.
L'objectif poursuivi était d'autoriser et même de favoriser le contournement du socle législatif que constitue, depuis 1936, le caractère hebdomadaire de la durée du travail des salariés.
Ainsi, syndicats patronaux et syndicats de salariés sont pressés par le Gouvernement d'en finir contractuellement avec la semaine de trente-neuf heures.
Par ce double dispositif législatif et conventionnel, les syndicats sont invités à négocier avec les représentants du patronat sur l'assujettissement des salariés aux injonctions de la conjoncture et des marchés.
L'épaisseur des carnets de commandes est appelé à rythmer la vie des salariés, à qui l'on demande désormais de sacrifier leurs loisirs, leur vie de famille et leur santé pour la bonne marche de l'entreprise dans laquelle ils travaillent.
D'un statut du travail salarié respectant la dignité humaine, acquis tout au long de ce siècle, nous sommes en train de passer à un statut où le travail est considéré comme une marchandise à l'image des autres.
Si encore la bonne marche de l'entreprise était récompensée par une augmentation des rémunérations ou par des embauches, cela pourrait constituer une motivation pour les salariés. Nous savons qu'il n'en est rien, hélas ! puisque les salaires stagnent et que, d'après les comptes de la nation, bien moins de la moitié des 1 550 milliards de bénéfices réalisés en 1995 par les entreprises ont été réinvestis dans l'outil de travail ou dans la formation du personnel.
Avec le dispositif prévu par cet article 38, les salariés sont contraints de travailler beaucoup plus et beaucoup plus longtemps au moment où les commandes affluent alors qu'ils sont renvoyés chez eux sans salaire ou avec un salaire diminué lorsqu'elles refluent.
Ils n'ont donc, la plupart du temps, droit ni au paiement majoré des heures supplémentaires ni à l'indemnisation des périodes creuses au titre du chômage partiel.
Ce dispositif de cantonnement des revenus des salariés est à la fois injuste sur le plan du principe - puisque le patron n'y trouve que bénéfice alors que le salarié n'en perçoit que les désagréments - et inefficace sur le plan économique, en ce qu'il comprime le pouvoir d'achat des salariés, participant ainsi à la compression de la demande solvable.
Il convient donc, comme nous le suggérons à travers cet amendement, de supprimer ce dispositif et non de l'élargir, comme le propose le Gouvernement.
En effet, si l'on permettait à n'importe quel salarié simplement mandaté de négocier des accords d'annualisation du temps de travail dans l'entreprise, il ne fait aucun doute que son inexpérience ou son incompétence, voire les pressions qu'il pourrait subir de la part de la direction de l'entreprise, conduiraient à la conclusion d'accords très défavorables aux salariés concernés.
De plus, cela pèserait considérablement sur l'attitude des syndicats au cours des négociations de branche.
Ainsi, globalement, l'addition des présentes dispositions avec celles de l'article 38 de la loi quinquennale de 1993 relatives à l'annualisation du temps de travail serait très préjudiciable aux droits et aux conditions de vie des salariés, comme elle serait néfaste sur le plan de l'emploi dans notre pays.
Tout le monde sait en effet que les signes de déflation perceptibles aujourd'hui sont dus, pour une bonne part, à l'absence de débouchés solvables pour nos productions.
Madame le ministre, mes chers collègues, je vous en prie, n'aggravons pas cette situation en ajoutant à l'injustice du dispositif de 1993 l'inefficacité de celui qui est proposé aujourd'hui !
C'est pourquoi nous vous proposons, mes chers collègues, de voter notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. L'amendement n° 128 vise à abroger l'article 38 de la loi quinquennale, relatif à l'annualisation.
Or, la commission des affaires sociales du Sénat a voté la loi quinquennale, comme elle a adopté la transposition de l'accord national interprofessionnel du 31 octobre 1995.
Par conséquent, logique avec elle-même, elle a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 128.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement ne peut être que défavorable à cet amendement, qui est sans objet par rapport au texte dont nous débattons.
Je compléterai les propos de M. le rapporteur en précisant que cet amendement met en cause le contenu même de l'accord du 31 octobre 1995 relatif à l'emploi et à l'aménagement du temps de travail, qui est actuellement mis en oeuvre par les branches professionnelles et qui, je le rappelle, a été signé par quatre confédérations syndicales.
Par ailleurs, je suis en désaccord profond avec les commentaires de Mme Demessine sur ce point... mais il n'y a pas lieu d'en débattre aujourd'hui.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 128, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 129, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter l'article 6 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... L'article 42 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle ne pourra s'appliquer dans le cadre de la présente loi. »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Nous proposons d'abroger l'article 42 de la loi quinquennale de 1993, qui alourdit inutilement notre législation par la notion d'annualisation du temps de travail.
En permettant une meilleure utilisation des machines et des hommes, cette disposition devait déboucher sur la création de dizaines de milliers d'emplois dans notre pays.
On nous disait, à l'époque, que les salariés y trouveraient leur compte en gagnant du temps pour se consacrer à leur famille et aux loisirs.
Or, trois ans plus tard, on constate que l'annualisation du temps de travail s'est essentiellement traduite par une augmentation de la productivité des entreprises acquise à partir de la dégradation des conditions de vie et de travail des salariés concernés.
Cette mesure d'annualisation négociée du temps de travail n'a donc pas favorisé la création d'emplois ; elle a en fait permis aux patrons d'engranger un surcroît de bénéfices qui, l'expérience le prouve, ont plutôt été dirigés vers la spéculation que réinvestis dans l'amélioration des capacités de production des entreprises.
L'article 42 de la loi quinquennale modifie, je le rappelle, l'article L. 212-5 du code du travail afin d'organiser, par le biais de la négociation collective, le remplacement du paiement des heures supplémentaires à taux majoré par des repos compensateurs.
En clair, il s'agit, pour le patronat, d'obtenir la signature d'un ou de plusieurs syndicats pour éviter de payer à un taux majoré les heures supplémentaires travaillées pendant les périodes d'activité intense.
Avec ce système, les salariés restent en fait « libres » d'utiliser leurs repos compensateurs dans les périodes creuses de l'activité des entreprises, ce qui ne coûte rien à l'employeur.
Ainsi, avec l'accord de syndicats complaisants, le patronat peut obtenir à peu de frais la possibilité de spolier les salariés de leur droit au paiement des heures supplémentaires à taux majoré.
Il s'agit là, de toute évidence, d'un marché de dupes.
Il va de soi que le nombre des accords professionnels de branche ou d'entreprise allant dans ce sens est plutôt rare car les syndicats hésitent tout de même à en conclure, et c'est heureux !
Avec le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui nojus craignons de voir se développer ces accords de type léonin, qui lèsent gravement les intérêts pécuniaires des salariés, sans leur procurer d'avantages réellement équivalents.
Par ailleurs, j'attire l'attention du Gouvernement et de notre assemblée sur le fait que l'accroissement du nombre de ces accords risquerait d'avoir une très fâcheuse influence sur la capacité financière des salariés à consommer, dans une période où la demande solvable se rétrécit et où cela entraîne notre économie tout entière dans la dangereuse voie de la récession et du chômage.
Lorsqu'il n'était encore que le candidat à la fonction suprême, M. Chirac avait - je le rappelle - déclaré à très juste raison que la feuille de paye n'était pas l'ennemie de l'emploi.
Je crois qu'il est grand temps de passer de la théorie aux travaux pratiques et que l'un des moyens d'y parvenir serait de voter notre présent amendement.
Ce geste salutaire pour les salariés de notre pays permettrait, en effet, non seulement de mettre fin à une injustice, mais encore de ne pas en rajouter en amplifiant une injustice existante.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement étant hors sujet, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
Je souhaite préciser que, aux termes de l'article L. 212-5 du code du travail, modifié par l'article 42 de la loi quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle, le repos compensateur de remplacement peut être mis en place non seulement par un accord collectif mais également, en l'absence de délégués syndicaux, sur l'initiative de l'employeur en l'absence d'opposition du comité d'entreprise ou des délégués du personnel. Il n'y a donc pas de raison d'empêcher que les possibilités de négociation élargie ouvertes par le projet de la loi portent sur ce dispositif, qui permet une régulation simple de l'activité de l'entreprise.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 129, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'Assemblée nationale a supprimé l'annexe.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 6:

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 316
Majorité absolue des suffrages 159
Pour l'adoption 222
Contre 94

Article 7