SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Convention fiscale avec le Pakistan. - Adoption d'un projet de loi (p. 1 ).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances ; Guy Fischer, Jacques Habert.
Clôture de la discussion générale.

Question préalable (p. 2 )

Motion n° 1 de Mme Luc. - MM. Robert Pagès, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet par scrutin public.

Article unique (p. 3 )

Adoption de l'article unique du projet de loi.

3. Avenant à l'accord fiscal du 25 juillet 1977 avec Malte. - Adoption d'un projet de loi (p. 4 ).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances ; Jacques Habert.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

4. Convention fiscale avec Israël. - Adoption d'un projet de loi (p. 5 ).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances ; Jacques Habert.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

5. Convention fiscale avec la Bolivie. - Adoption d'un projet de loi (p. 6 ).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances ; Jacques Habert.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

6. Avenant à la convention fiscale du 19 décembre 1980 avec la Norvège. - Adoption d'un projet de loi (p. 7 ).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

7. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire du Kazakhstan (p. 8 ).

8. Accord fiscal avec le Panama. - Adoption d'un projet de loi (p. 9 ).
Discussion générale : MM. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances ; Robert Pagès, Jacques Habert.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

9. Déclaration de l'urgence d'un projet de loi (p. 10 ).

10. Candidatures à une commission mixte paritaire (p. 11 ).

Suspension et reprise de la séance (p. 12 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

11. Rappel au règlement (p. 13 ).
MM. Robert Pagès, le président.

12. Nomination de membres d'une commission mixte paritaire (p. 14 ).

13. Candidature à la délégation parlementaire pour l'Union européenne (p. 15 ).

14. Réglementation des télécommunications. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 16 ).
Discussion générale (suite) : MM. Gérard Delfau, Michel Pelchat, Pierre Hérisson, Claude Saunier, Pierre Lagourgue, François Fillon, ministre délégué à la poste, aux télécommunications et à l'espace ; Gérard Larcher, rapporteur de la commission des affaires économiques.
Clôture de la discussion générale.

15. Nomination d'un membre de la délégation parlementaire pour l'Union européenne (p. 17 ).

16. Réglementation des télécommunications. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 18 ).

Exception d'irrecevabilité (p. 19 )

Motion n° 138 de M. Delfau. - MM. Gérard Delfau, Gérard Larcher, rapporteur de la commission des affaires économiques ; François Fillon, ministre délégué à la poste, aux télécommunications et à l'espace. - Rejet par scrutin public.

Question préalable (p. 20 )

Motion n° 57 de Mme Luc. - MM. Félix Leyzour, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet par scrutin public.

Demande de renvoi à la commission (p. 21 )

Motion n° 67 de M. Loridant. - MM. Paul Loridant, le ministre délégué, le rapporteur. - Rejet par scrutin public.

Suspension et reprise de la séance (p. 22 )

Article additionnel avant l'article 1er (p. 23 )

Amendement n° 139 de Mme Pourtaud. - Mme Pourtaud, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.

Article 1er (p. 24 )

MM. Adrien Gouteyron, Claude Billard, le rapporteur.Amendements n°s 79 à 83 de M. Billard. - MM. Pagès, Fischer, Mmes Bidard-Reydet, Luc, MM. Leyzour, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet, par scrutin public, de l'amendement n° 79 ; rejet des amendements n°s 80 à 83.
Adoption de l'article.

Article 2 (p. 25 )

MM. Félix Leyzour, Robert Pagès.
Amendements n°s 84 à 88 de M. Billard et 140 à 143 de Mme Pourtaud. - Mme Bidard-Reydet, M. Fischer, Mme Pourtaud, M. Pagès, Mme Luc, M. Leyzour.

Suspension et reprise de la séance (p. 26 )

PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT

Amendements n°s 84 à 88 et 140 à 143 (suite) ; amendements n°s 1 de la commission, 144 et 145 de Mme Pourtaud. - MM. le rapporteur, Delfau, le ministre délégué, Leyzour. - Rejet des amendements n°s 84, 85, 140, 86, 142, 141, 88, 144 et, par scrutin public, des amendements identiques n°s 87 et 143 ; adoption des amendements n°s 1 et 145.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Adoption, par scrutin public, de l'article modifié.

Article 3 (p. 27 )

Amendement n° 2 de la commission. - Adoption. - Amendement n° 134 rectifié de M. Bourges. - MM. Courtois, le rapporteur, le ministre délégué, Leyzour, Delfau. - Adoption.
M. Félix Leyzour.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 3 (p. 28 )

Amendement n° 206 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué, Delfau. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 4. - Adoption (p. 29 )

Article 5 (p. 30 )

M. Guy Fischer.
Amendement n° 89 de M. Billard. - MM. Leyzour, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.

Article L. 33 du code des postes et télécommunications. -
Adoption (p. 31 )

Article L. 33-1 du code précité
(p. 32 )

Amendement n° 90 de M. Billard. - Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendements n°s 146 de Mme Pourtaud et 196 de la commission. - MM. Delfau, le rapporteur, le ministre délégué, Fischer. - Rejet de l'amendement n° 146 ; adoption de l'amendement n° 196.
Amendements n°s 91 de M. Loridant et 147 de Mme Pourtaud. - MM. Loridant, Delfau, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet, par scrutin public, de l'amendement n° 91 ; rejet de l'amendement n° 147.
Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Amendement n° 4 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Amendement n° 92 de M. Billard. - MM. Leyzour, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement n° 5 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Amendement n° 148 de Mme Pourtaud. - MM. Delfau, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 33-2 du code précité (p. 33 )

Amendement n° 93 de M. Billard. - MM. Leyzour, le rapporteur, le ministre délégué, Pelchat. - Rejet.
Adoption de l'article du code.

Article L. 33-3 du code précité. - Adoption (p. 34 )

Article L. 33-4 du code précité
(p. 35 )

Amendements n°s 94 de M. Billard et 6 rectifié de la commission. - MM. Fischer, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet de l'amendement n° 94 ; adoption de l'amendement n° 6 rectifié.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 34 du code précité. - Adoption (p. 36 )

Article L. 34-1 du code précité
(p. 37 )

Amendement n° 149 de Mme Pourtaud. - MM. Delfau, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Adoption de l'article du code.

Article L. 34-2 du code précité (p. 38 )

Amendement n° 77 rectifié de Mme Bardou. - Mme Bardou, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Delfau, Leyzour. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 34-3 du code précité (p. 39 )

Amendement n° 167 de M. Trégouët. - MM. Trégouët, le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 34-4 du code précité (p. 40 )

Amendements n°s 95 de M. Billard, 96, 97 de M. Loridant, 150 à 152 de Mme Pourtaud, 7 de la commission et sous-amendement n° 153 de Mme Pourtaud ; amendement n° 168 de M. Trégouët. - MM. Leyzour, Loridant, Delfau, Trégouët, le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait de l'amendement n° 168 ; rejet des amendements n°s 95, 96 et 150, 151, 97, 152 et du sous-amendement n° 153 ; adoption de l'amendement n° 7.
Adoption de l'article du code, modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.

17. Transmission de projets de loi (p. 41 ).

18. Dépôt de propositions d'acte communautaire (p. 42 ).

19. Dépôt de rapports (p. 43 ).

20. Ordre du jour (p. 44 ).





COMPTE RENDU INTÉGRAL


PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures cinquante.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

CONVENTION FISCALE AVEC LE PAKISTAN

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 225, 1995-1996), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République islamique du Pakistan en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu (ensemble un protocole). [Rapport n° 386 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la convention conclue entre la France et le Pakistan le 15 juin 1994 qui est aujourd'hui soumise à votre approbation tend à éviter les doubles impositions entre la France et le Pakistan en matière d'impôts sur le revenu. Elle remplacera la convention actuelle, qui date de 1966.
Comme toutes les conventions fiscales conclues par la France, ses dispositions sont inspirées du modèle de l'OCDE. Toutefois, afin de tenir compte des différences de développement économique entre nos deux Etats, certains articles sont repris du modèle de l'ONU. Ainsi, en ce qui concerne l'imposition des bénéfices des entreprises de navigation aérienne, la France a accepté de déroger à la règle habituelle de l'imposition de ces bénéfices exclusivement dans l'Etat du siège de direction effective. Ces bénéfices seront donc imposables également dans l'Etat de la source.
Les dividendes payés par une société qui est un résident d'un Etat contractant à un résident de l'autre Etat contractant sont imposables dans cet Etat. Toutefois, l'Etat de la source pourra imposer à la source à un taux n'excédant pas 15 p. 100. Le principe est le même pour les intérêts et redevances, à la différence que la retenue à la source ne pourra excéder 10 p. 100.
Cette convention devrait permettre à nos relations économiques de se développer. En effet, le Pakistan occupe pour l'instant une place modeste dans notre commerce extérieur puisqu'il n'est que notre soixante-douzième fournisseur et notre quatre-vingt-quatorzième client. Toutefois, grâce à la libéralisation de l'économie pakistanaise et au processus de privatisation en cours, des perspectives intéressantes devraient s'offrir à nos entreprises. A cet égard, je rappelle que nos échanges ont augmenté l'année dernière de 42 p. 100, notamment grâce à l'implantation d'entreprises du secteur de l'énergie ou des télécommunications.
Si nos relations économiques sont encore faibles, nous nous félicitons en revanche du climat politique confiant, qui s'est d'ailleurs renforcé depuis le retour au pouvoir de Mme Bhutto. Par ailleurs, les relations franco-pakistanaises sont particulièrement étroites dans le domaine militaire, comme en témoigne la vente, à l'automne dernier, de sous-marins français à Islamabad. Il convient, en outre, de souligner que la fraternité d'armes existant entre les soldats de nos deux pays à l'occasion des opérations de maintien de la paix, naguère au Koweït, au Cambodge, en Somalie et aujourd'hui en Bosnie, est un sujet de satisfaction pour nos deux gouvernements.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention fiscale franco-pakistanaise qui fait l'objet du projet de loi soumis à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Pakistan, qui compte une population de 130 millions d'habitants, est dirigé depuis deux ans par Mme Benazir Bhutto, qui doit faire face à une opposition très vive.
Des troubles agitent régulièrement le Pendjab, la province clé du pays avec 60 millions d'habitants, la province frontière du nord-ouest et le Baloutchistan.
La situation politique intérieure reste donc difficile. Il en va de même pour la politique extérieure pakistanaise, toujours confrontée à la question des relations avec le voisin indien et marquée par des contacts forts, mais non dénués d'ambiguïté avec la Chine et l'Iran.
Le malaise politique et social constitue un handicap pour le développement économique du pays.
Le taux de croissance, 4,7 p. 100 en 1994-1995, dépend très étroitement des résultats de la production agricole et en particulier de la récolte de coton.
Le niveau des investissements reste insuffisant, ce qui explique la pauvreté de ce pays.
Les relations bilatérales entre la France et le Pakistan sont confiantes comme le démontrent les visites de Mme Bhutto à Paris et l'engagement du Pakistan aux côtés de la France dans nombre d'opérations de maintien de la paix menées sous l'égide de l'ONU.
En ce qui concerne les aspects économiques, si le Pakistan n'est qu'un partenaire modeste - il occupe le cinquante et unième rang de nos fournisseurs et le cinquantième rang de nos clients - la France est le neuvième fournisseur du pays et son huitième client.
Les flux d'échange se sont développés et dégagent le plus souvent un excédent en notre faveur.
Les exportations françaises sont constituées de produits industriels tandis que nos importations sont concentrées sur les produits textiles, l'habillement, le cuir et les chaussures.
En ce qui concerne les investissements directs, notre présence au Pakistan est faible. Elle n'est pas à la hauteur des six protocoles financiers passés avec ce pays pour un total de 2,1 milliards de francs ces quatre dernières années.
J'en viens aux dispositions techniques de l'accord.
Comme toutes les conventions que nous allons examiner ce matin, sauf une, il s'agit de la reprise de la convention type OCDE et ce n'est qu'une variation par rapport à cette convention type qui fait donc l'objet des négociations. Dans le cas précis, il s'agissait de mettre à jour la convention fiscale de 1966. La convention est du type le plus classique et n'appelle pas de commentaire particulier.
C'est la raison pour laquelle, la commission unanime s'est prononcée pour la ratification de cette convention et vous invite, mes chers collègues, à faire de même.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, dans la présentation qui nous a été faite par M. le ministre et M. le rapporteur, on s'aperçoit que les échanges entre notre pays et le Pakistan, s'ils restent faibles, progressent néanmoins de manière substantielle.
Ainsi, l'an passé, avons-nous conclu des contrats dans les domaines de l'énergie et des télécommunications. Nous sommes favorables à ce que de tels échanges puissent se multiplier.
Pour autant, concernant ce pays et les accords que nous pouvons signer, nous avons quelques interrogations auxquelles nous aimerions que le Gouvernement apporte des réponses.
Bien entendu, le problème du travail des enfants sur lequel sera fondée la question préalable déposée par notre groupe est le point majeur de ces interrogations.
Mais il en est un autre sur lequel nous ne pouvons rester silencieux, il s'agit de la production, du commerce de la drogue et du blanchiment de l'argent des revenus de ce trafic. Chacun d'entre nous le sait : c'est une question primordiale qui secoue notre planète. Or le Pakistan est une plaque tournante du trafic de l'opium.
Aujourd'hui, l'économie mondiale de la drogue, cela représente de 300 à 500 milliards de dollars. C'est une organisation criminelle à l'échelle planétaire. Ce sont des pays qui vivent au rythme de cet or blanc.
Ce que l'on voit dans notre pays n'est bien souvent que le bout de la chaîne entre des revendeurs et des consommateurs. Car cette économie mondialisée de la drogue est parfaitement structurée. Elle est typiquement capitaliste, exploite le paysan producteur des pays du Sud, manipule le consommateur, enrichissant une cohorte d'intermédiaires parasitaires : grossistes et détaillants, parrains et financiers, ainsi que leurs protecteurs, policiers, juges, militaires et politiciens. Comment pourrait-on ignorer la place du Pakistan dans ce trafic ?
C'est ce que montre M. Christian de Brie dans le Monde diplomatique lorsqu'il écrit : « Dans certains pays - Pakistan, Birmanie, Panama, Pérou - pour lesquels on peut parler de narco-régimes ou de narco-dictatures, c'est tout l'appareil d'Etat ou de larges secteurs de l'armée, de la police et des services secrets qui sont gangrenés. Dans tous ces pays, le système bancaire participe activement au blanchiment et au recyclage de l'argent de la drogue, en particulier par l'intermédiaire de filières et de correspondants implantés sur l'archipel mondial des paradis fiscaux. »
Vous le voyez, mes chers collègues, le Pakistan n'est pas épargné.
Mais c'est tout le système de développement planétaire qui est en cause. En effet, le rôle de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international n'est pas neutre. Ces deux institutions imposent et font respecter des plans d'ajustement destructeurs pour les économies fragiles des pays du Sud.
Quoi de plus normal, pour les paysans, que de rechercher les activités les plus lucratives ?
Les institutions financières internationales jouent également un rôle trouble en matière de blanchiment.
Prenons l'exemple des pays de l'Est, qui sont brutalement passés d'une économie étatisée au libéralisme le plus effréné. On leur a sans cesse recommandé de procéder à une privatisation massive, voire totale de leur économie, sans leur fournir les fonds nécessaires. Que s'est-il passé ? Eh bien, ces pays, et particulièrement la Hongrie, sont devenus des lieux de choix pour le blanchiment de l'argent sale.
Bien entendu, l'existence et la recrudescence de paradis off shore ne sont pas fortuites. Ce sont des lieux où le brassage des capitaux est tel, où les circuits empruntent de si nombreux dédales que personne ne s'y reconnaît plus. Mais, comme le dit l'adage populaire, « l'argent n'a pas d'odeur ».
En fait, la dualité de l'économie mondiale et l'accroissement des inégalités entre le Nord et les populations d'un grand nombre de régions du Sud, en Amérique latine, en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud-Ouest et du Sud-Est, en Europe centrale et en ex-URSS, ainsi que dans le Bassin méditerranéen, ne peuvent que continuer à favoriser le développement de la culture et de la production de drogues.
L'argent de la drogue est aussi un élément central des conflits régionaux. Or le Pakistan, que ce soit en Afghanistan ou au Cachemire, est impliqué dans de tels conflits.
C'est pourquoi il nous semble que, en nous proposant d'approuver cette convention, on passe à côté de l'essentiel. Certes, cette convention bilatérale ne vise qu'à régler le problème des doubles impositions et à prévenir l'évasion et la fraude fiscales entre notre pays et le Pakistan. Mais on ne peut plus se contenter de dire que le Pakistan fait des efforts, que son économie se renforce, que la démocratie avance dans ce pays et fermer les yeux sur des questions fondamentales au regard des droits de l'homme.
C'est la raison pour laquelle, contrairement à l'usage généralement observé, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront contre le texte autorisant l'approbation de cette convention.
Bien entendu, ce n'est pas au peuple pakistanais que nous nous en prenons en agissant ainsi ; c'est à tous ceux qui vivent du commerce de la drogue.
Nous souhaitons également, par ce geste, interpeller le Gouvernement - et je suis certain, monsieur le secrétaire d'Etat, que, compte tenu de vos activités passées et présentes, vous serez sensible à notre message - pour qu'il agisse avec plus de vigueur qu'il ne l'a fait auprès des instances internationales et des Etats les plus impliqués. Le Pakistan, qui forme avec l'Iran, l'Inde et l'Afghanistan ce que l'on nomme le « croissant d'or », est de ceux-là.
Il est urgent, mes chers collègues, de prendre la mesure de ce trafic et de nous y attaquer avec force, de nous opposer résolument au travail des enfants. C'est pourquoi je vous invite à vous prononcer contre ce texte.
M. Robert Pagès. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en tant que vice-président du groupe d'amitié France-Pakistan, je souhaiterais apporter un « bémol » aux propos que vient de tenir M. Fischer.
Il est exact qu'il existe au Pakistan des problèmes liés à la drogue et au travail des enfants. Ces deux maux ont, à juste raison, été longuement évoqués lors de la visite qu'a effectuée Mme Benazir Bhutto dans notre pays. De même, à l'occasion de notre dernier voyage à Islamabad, nous avons pu nous en entretenir avec nos homologues du Parlement pakistanais et leur dire à quel point cet état de choses nous paraissait répréhensible et dommageable.
Toutefois, il faut le dire, le Pakistan est très loin d'être le seul pays à produire de la drogue ou à blanchir l'argent de la drogue. Nous pourrions en désigner une dizaine, au moins, où s'observent les mêmes pratiques.
Quant au travail des enfants, il est notoire que les « dragons » d'Extrême-Orient y ont recours : bien des chaussures et des produits textiles venant de ces pays sont fabriqués dans des conditions qui n'ont rien à voir avec celles qui prévalent en Europe et qui sont tout à fait condamnables. Il en résulte d'ailleurs pour nos industries une concurrence déloyale et extrêmement grave, à laquelle nous ne devons pas cesser d'être très attentifs.
Il reste que le Pakistan ne peut pas être présenté seulement sous ce jour sombre.
Nous avons eu, avec ce pays, des échanges commerciaux importants, qui n'ont pas cessé d'être favorables à notre balance extérieure. Notre flux d'échanges est de l'ordre de trois milliards à quatre milliards de francs par an.
Par ailleurs, dans l'optique de la suppression du service national en France et de la réorganisation des usines travaillant pour la défense nationale, nous ne devons pas négliger certains pays qui ont passé avec nous des commandes assez importantes.
Bien sûr, nous ne saurions, pour des raisons économiques, faire l'impasse sur les droits de l'homme et ignorer certains aspects de la situation politique et sociale qui prévaut dans tel ou tel pays. Mais nous ne pouvons ignorer non plus que nous avons, avec certains d'entre eux, des échanges tout à fait favorables, qu'il serait préjudiciable d'interrompre.
J'ajoute que le demi-millier de Français qui résident au Pakistan y vivent dans de bonnes conditions et participent très largement à nos exportations ainsi qu'au rayonnement de notre pays dans cette région du monde.
Tels sont les éléments positifs que je voulais souligner concernant le Pakistan, après le tableau très sombre qu'a brossé M. Fischer, même si les points sur lesquels il a insisté ne peuvent être niés : nous les déplorons comme lui.
Nous pensons, cependant, que le fait de repousser ce texte ne changerait rien au problème de fond.
En revanche, cette convention nous permettra de poursuivre nos échanges avec ce pays dans des conditions favorables pour nos compatriotes du Pakistan, en même temps qu'il nous mettra en position d'agir pour essayer de faire en sorte que des règles de travail plus morales et plus normales soient instaurées là-bas.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.

Question préalable

M. le président. Je suis saisi, par Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, d'une motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République islamique du Pakistan en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu (ensemble un protocole) (n° 225, 1995-1996). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
La parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Pagès, pour défendre la motion.
M. Robert Pagès. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la convention fiscale entre notre pays et le Pakistan qu'il nous est proposé d'entériner aujourd'hui est des plus classiques. Elle est similaire à bien d'autres conventions qui concernent, en particulier, la question de la double imposition.
En règle générale, personne, dans cet hémicycle, ne trouve à redire à de tels textes, qui reprennent le modèle de l'OCDE, retouché par l'organisation des Nations unies, et qui permettent de mieux prendre en compte la réalité du développement de certains pays. Comment pourrait-il en être autrement alors que de tels accords bilatéraux sont essentiellement techniques et font en sorte, fort heureusement, que les légisations nationales de chacune des parties soient respectées ?
Toutefois, l'attitude qui prévaut habituellement et qui consiste à laisser passer sans réaction particulière une convention telle que celle dont nous sommes saisis ne peut ête, selon nous, observée aujourd'hui.
En effet, dans le cas du Pakistan, la question centrale du travail des enfants ne saurait être ignorée. Ce serait un déshonneur que de passer sous silence cette réalité.
Certes, ce pays n'a pas le monopole de cette infamie, mais chacun sait combien certains industriels peu scrupuleux de cet Etat ont institutionnalisé l'exploitation des plus jeunes, parfois dès l'âge de quatre ans.
La discussion de ce texte bilatéral est donc bien une occasion privilégiée pour que notre pays fasse entendre sa voix auprès des autorités pakistanaises et réaffirme la plus ferme condamnation de ce servage des temps dits « modernes ».
Sur la planète, selon les diverses estimations des organisations internationales, ce sont 100 à 200 millions d'enfants de moins de quinze ans qui exercent une activité économique. Ils le font, bien entendu, pour survivre, pour faire survivre leur famille, mais aussi, bien souvent, sous la contrainte, après avoir été achetés. Des cas récents ont révélé les mauvais traitements auxquels sont soumis ces enfants, pouvant aller jusqu'aux sévices sexuels.
Vous savez, mes chers collègues, que les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen oeuvrent avec beaucoup d'énergie pour que les droits des enfants soient reconnus et respectés. D'autres, bien sûr, le font avec nous. C'est d'autant plus nécessaire que l'exploitation qui frappe les plus jeunes n'est qu'une des manifestations extrêmes des formes d'exploitation existant sur un marché du travail soumis aux thèses les plus libérales et antisociales.
Quand on ne respecte pas la dignité et la vie des enfants, comment les droits sociaux les plus élémentaires pourraient-ils être reconnus ?
C'est pourquoi nous tenons à alerter l'opinion sur le Pakistan, où la situation à cet égard est insupportable.
Selon le Bureau international du travail, sur 62 millions d'enfants de moins de seize ans, 20 millions travailleraient, dont 7,5 millions en servitude ! On mesure l'ampleur de la tâche qui incombe à notre pays, entre autres, pour faire en sorte que cesse ce véritable trafic.
Et quand on parle du Pakistan, on ne peut oublier l'histoire tragique du jeune Iqbal Massih mort, voilà un peu plus d'un an d'avoir dénoncé ce sytème et ceux qui en profitent.
Iqbal Massih avait pris la tête d'un combat qui ne peut laisser personne indifférent. Il avait décidé de rompre le silence et racontait, de par le monde, comment vivent des centaines de milliers d'enfants pakistanais dans les filatures, les pêcheries, les briquetteries, les ateliers de tapisserie, les verreries, etc.
L'assassinat du jeune Iqbal montre, s'il en était besoin, combien une telle action peut déranger ceux qui vivent de cette exploitation honteuse. Cela doit renforcer la volonté de la France de dénoncer en toutes circonstances des pratiques ausi indignes. Je le répète, l'occasion nous est donnée de le faire aujourd'hui.
C'est d'autant plus décisif que le président du front de libération contre le travail forcé des enfants au Pakistan, Eshan Ullak Khan, explique que l'assassinat d'Iqbal est sûrement le fait de la « mafia du tapis », la toute-puissante association des fabriquants et exportateurs de tapis du Pakistan.
Cette mafia est si puissante dans ce pays qu'elle parvient à justifier l'exploitation des enfants par une prétendue « tradition nationale ».
Ainsi, une soi-disant « commission des droits de l'homme » pakistanaise, saisie du problème du travail des enfants dans l'industrie du tapis, a conclu que « le tissage fait partie des traditions nationales » et qu'il serait « imprudent d'appliquer la loi interdisant le travail des enfants dans les conditions de la concurrence internationale ».
C'est à ce genre de phrases que l'on peut mesurer la volonté réelle d'un partenaire. Le moins que l'on puisse dire, c'est que les industriels pakistanais ne semblent pas enclins à abandonner leur trafic !
Une autre affaire, du même acabit, doit également susciter, plus que des remous, une réprobation de toute la communauté internationale.
Le championnat d'Europe des nations de football, chacun le sait, s'ouvre à la fin de cette semaine en Angleterre. Le football draine une grande partie de la jeunesse, qui trouve dans les joueurs des exemples et dans ce sport des espoirs et du rêve. Cette compétition est donc un moment très attendu par toute la jeunesse d'Europe.
Mais que penseraient nos jeunes s'ils savaient que les ballons avec lesquels ils jouent, comme ceux avec lesquels jouent leurs idoles sont fabriqués par des enfants, et dans des conditions inadmissibles. En effet, 80 p. 100 des ballons de football utilisés dans le monde proviennent du Pakistan, principalement de la ville de Sialkot.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen tiennent à se faire l'écho des propos de la fédération internationale des travailleurs du textile, du cuir et de l'habillement.
Par la voix de son secrétaire général, M. Neil Kearney, les travailleurs du textile, du cuir et de l'habillement ont, le 28 mai dernier, demandé à la fédération internationale de football et à l'union européenne de football d'examiner les conditions d'esclavage des enfants pakistanais qui fabriquent les ballons utilisés lors de la prochaine compétition.
Selon M. Kearney, « ces ballons sont fabriqués par des enfants dont certains ont à peine six ans. Ils travaillent péniblement, dans des ateliers mal éclairés... Ils sont vendus et revendus comme des pièces de rechange, marqués, battus et parfois aveuglés ». Excusez mon émotion mais j'ai des petits-enfants de cet âge.
« Le monde du football, poursuit M. Kearney, devrait être honteux que l'élément central de ce sport soit produit par une industrie où presque chaque usine possède un local de punition pour les enfants..., où ils sont pendus par les genoux, tête en bas, affamés, frappés à coups de bâton ou fouettés. »
« L'industrie du football, conclut-il, s'est enrichie sur le dos de ces enfants ; elle devrait à présent faire amende honorable. »
Il nous semble évident que de telles déclarations de la part de la fédération internationale des travailleurs du textile, du cuir et de l'habillement ne peuvent rester sans réponse de notre part.
Ce serait d'autant plus intolérable que le Parlement français, sur proposition du groupe communiste républicain et citoyen du Sénat et de nos collègues du groupe communiste et apparenté de l'Assemblée nationale, a décidé, voilà peu, d'accorder une place particulière aux droits de l'enfant. J'ai d'ailleurs été le rapporteur de ce texte.
Or si le 20 novembre prochain sera une journée dédiée aux enfants, il reste qu'il nous faut donner du corps à cette journée, pour qu'elle ne soit pas une coquille vide.
Je suis persuadé qu'une intervention immédiate auprès de la fédération internationale de football pour que les ballons utilisés lors de l'Euro 96 soient produits de manière légale et dans des conditions décentes serait appréciée de tous les enfants du monde.
Dans le même temps, monsieur le secrétaire d'Etat, notre groupe souhaiterait une intervention du Gouvernement auprès des institutions internationales et des autorités pakistanaises sur ce point précis.
En conclusion, il faut trouver les solutions qui permettront d'éradiquer cette exploitation scandaleuse.
La première réponse pourrait consister à imposer un label sur certains produits importés avec un système d'étiquetage certifiant qu'aucun enfant n'a été impliqué dans la production. C'est le combat des associations internationales, combat que le Gouvernement français pourrait porter devant les organismes internationaux, relayant ainsi efficacement les efforts de ceux qui n'acceptent pas le statu quo.
La deuxième réponse est européenne. Notre pays pourrait intervenir pour que l'Union européenne crée une taxe spécifique et dissuasive à l'importation de produits provenant de pays où la protection sociale minimale et l'interdiction du travail des enfants ne seraient pas assurées.
La troisième réponse est nationale et hautement symbolique. Elle consiste à mettre à chaque fois sur la table, la question du travail des enfants lorsqu'un pays est le lieu d'un tel trafic. Cela commence, pour ce qui nous concerne aujourd'hui, par repousser ce texte en adoptant la question préalable que je viens de défendre.
En agissant ainsi, c'est non pas à l'égard du peuple pakistanais que le Sénat manifesterait sa défiance, mais à l'égard de ceux qui se croient à l'abri de toutes remarques et qui plongent les enfants dans la vie active en leur volant leur jeunesse. Par un tel choix, le Sénat adresserait un message d'espoir à celles et à ceux qui, au péril de leur vie parfois, se battent pour que la dignité et le respect de la personne humaine l'emportent sur la barbarie.
C'est pourquoi, mes chers collègues, au nom des sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, je vous invite à adopter cette question préalable, symbole du refus de l'exploitation des enfants. Ce serait tout à l'honneur du Sénat et de la France que de délivrer un tel message. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Y a-t-il un orateur contre ?...
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Chaumont, rapporteur. La commission des finances n'a pas eu à connaître de cette question préalable. Ayant été saisie, par le Gouvernement, de l'examen d'une convention tendant à éliminer les doubles impositions entre la France et le Pakistan, elle n'aurait de toute façon pas eu à se prononcer au fond sur cette motion. Je m'exprimerai donc à titre personnel.
Les questions qui ont été soulevées par nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen sont très importantes, et tous les parlementaires sont sensibles à la très grande gravité des faits qui viennent d'être évoqués.
Je tiens simplement à rappeler que le Parlement a ratifié la convention internationale sur les droits de l'enfant. La France a d'ailleurs été l'un des premiers pays à ratifier cette convention due à l'initiative du professeur Robert Debré, qui fut l'un des fondateurs de l'UNICEF.
Bien entendu, le champ d'application de cette convention reste quelque peu décevant dans la mesure où il est difficile de parvenir à des résultats concrets, mais, dans un certain nombre de domaines, y compris dans celui qui est très sensible de la prostitution enfantine, la pression morale exercée par le biais de cette convention a permis d'obtenir certaines améliorations dans les pays les plus concernés.
Je suis persuadé que c'est par le biais de l'action internationale et des conventions, en particulier celle sur les droits de l'enfant, qu'il est possible d'exercer une véritable pression et d'améliorer le sort de ces enfants.
D'une manière plus générale, tant en ce qui concerne le travail des enfants qu'en ce qui concerne leurs conditions de vie et la prostitution enfantine, il n'est pas de solution en dehors d'une véritable lutte contre la pauvreté pour mettre fin à cette misère, qui est le fondement même de tous ces maux.
Il s'agit donc d'un problème considérable auquel le Gouvernement français, de nombreuses organisations non gouvernementales, les ONG, et les organisations internationales se sont attelés.
Je n'irai pas jusqu'à dire que j'approuve totalement les propos de mes collègues du groupe communiste républicain et citoyen sur les ajustements structurels, l'action de la Banque mondiale et celle du Fonds monétaire international mais il est clair que la brutalité des méthodes mises en place sous l'influence de la pensée anglo-saxone a parfois provoqué de véritables drames et qu'il faut introduire une plus grande humanité dans la manière de traiter les problèmes du sous-développement et de l'amélioration des conditions de vie des plus pauvres.
Par conséquent, sur l'essentiel, je ne partage peut-être pas l'analyse de nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen, mais je comprends les préoccupations qui les animent. Toutefois, je n'inviterai pas le Sénat à ne pas ratifier cette convention. Il s'agit, en effet, d'un texte mineur très précis. En outre, le problème évoqué aujourd'hui concerne certes le Pakistan mais aussi un nombre considérable de pays.
Je veux bien que nous débattions de ce problème dans son ensemble, mais ne montrer du doigt que le Pakistan serait, me semble-t-il, une manière dévoyée de le traiter.
M. Robert Pagès. Il ne s'agit pas de cela !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cette motion. Certes, j'aurais des choses à dire, mais tel n'est pas l'objet du projet de loi qui vous est soumis. (M. Pagès proteste.)
M. le président. Quelqu'un demande-t-il la parole pour explication de vote ?...
Je mets aux voix la motion n° 1, repoussée par la commission et par le Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°88 : :

Nombre de votants Nombre de votants
Nombre de suffrages exprimés 218
:

Nombre de votants Nombre de suffrages exprimés
Nombre de suffrages exprimés 218
:

Nombre de votants Majorité absolue des suffrages exprimés
Nombre de suffrages exprimés 110
:

Nombre de votants Pour l'adoptiion
Nombre de suffrages exprimés 15
:

Nombre de votants Contre
Nombre de suffrages exprimés 203

Nous passons à la discussion de l'article unique.
M. le président. « Article unique. - Est autorisée l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République islamique du Pakistan en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu (ensemble un protocole), signée à Paris le 15 juin 1994, et dont le texte est annexé à la présente loi. »

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
M. Robert Pagès. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(Le projet de loi est adopté.)

3

AVENANT À L'ACCORD FISCAL
DU 25 JUILLET 1977 AVEC MALTE

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 224, 1995-1996), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant (ensemble un échange de lettres) à l'accord du 25 juillet 1977 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Malte tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu. [Rapport n° 385 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la France et Malte sont liés depuis le 25 juillet 1977 par une convention visant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu.
Depuis la conclusion de cet accord, le gouvernement maltais a créé une zone d'activité dite off shore assortie d'une zone portuaire franche.
Afin d'éviter tout risque d'évasion fiscale, nous avons souhaité négocier un avenant à la convention de 1977 de manière à exclure de son champ d'application les sociétés établies dans la zone off shore. Les autorités maltaises, comprenant nos préoccupations, ont accepté d'engager rapidement des négociations. Celles-ci ont abouti à l'accord qui est aujourd'hui soumis à votre approbation et qui a été signé le 8 juillet 1994 par M. Lamassoure lors de sa visite officielle à La Vallette.
La négociation de cet avenant a également été l'occasion d'actualiser la convention. Ainsi, l'article 7 prévoit une nouvelle méthode d'élimination des doubles impositions. Alors que dans l'accord actuel les revenus de source maltaise sont exonérés sous réserve de la règle du taux effectif, ils seront désormais imposables en France lorsqu'ils sont reçus par un résident de France. La double imposition est éliminée par l'octroi d'un crédit d'impôt égal à l'impôt payé à Malte, dans la limite de l'impôt français correspondant à ces revenus.
Enfin, l'impôt sur la fortune fait dorénavant partie des impôts couverts par l'accord de 1977.
Très faibles jusqu'en 1987, nos relations avec Malte commencent à se développer. La France est, aujourd'hui, le troisième client de Malte, soit 10,3 p. 100 des exportations maltaises, devant le Royaume-Uni, et son quatrième fournisseur, soit 8,3 p. 100 des importations maltaises. La politique de réalisation de nouvelles infrastructures menée actuellement par Malte nous ouvre la perspective de grands contrats dans les domaines de l'énergie, de l'aéronautique, des équipements sanitaires et des télécommunications.
Grâce à l'avenant à l'accord fiscal de 1977, nous pouvons espérer que nos sociétés qui iront s'implanter à Malte ne le feront pas dans le seul but d'échapper à l'impôt en France, puisque seules les véritables implantations industrielles et commerciales créatrices d'emploi à Malte continueront à bénéficier de l'accord de non-double imposition.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'avenant à l'accord fiscal franco-maltais qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, indépendante depuis 1964, la République de Malte est une démocratie calquée sur le modèle britannique, avec un parti travailliste et un parti conservateur. Ce dernier est au pouvoir depuis 1987 et, ce qui est important, c'est que l'un des thèmes de ce parti est l'adhésion de Malte à l'Union européenne.
Compte tenu de la position géographique privilégiée de la République de Malte dans la Méditerranée, la France ne peut se désintéresser de ce pays. En effet, son produit intérieur brut par habitant s'élève à quelque 70 000 dollars et se situe au même niveau que celui de la Grèce et du Portugal. Il n'y a pratiquement pas de chômage et le taux de croissance est de l'ordre de 5 p. 100 par an. De plus, souhaitant se développer sur le plan économique, ce pays a décidé d'instituer des zones offshore et un certain nombre de facilités fiscales.
Comme l'a dit M. le secrétaire d'Etat, nous entretenons avec ce pays des relations privilégiées dans le domaine commercial. Nos échanges sont, pour l'essentiel, nourris par la société SGS-Thomson composants électroniques qui assurerait 13 p. 100 du produit intérieur brut maltais et 48 p. 100 des exportations de ce pays.
Compte tenu des mesures que vient de prendre le gouvernement maltais, avec la création d'une zone franche et d'une zone d'activité off shore, cette convention est nécessaire pour contrecarrer les risques d'évasion fiscale. M. le secrétaire d'Etat vient de rappeler les conditions de ces mesures.
Il faut signaler que l'avenant inclut dans le dispositif conventionnel l'impôt français de solidarité sur la fortune. Cela est important en matière d'évasion fiscale. Les Maltais ont accepté cette disposition. Pour le reste, cette convention est de type très classique. C'est la raison pour laquelle la commission des finances, unanime, a adopté le projet de loi visant à en autoriser l'approbation et vous invite, mes chers collègues, à faire de même.
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Comment ne pas rappeler, à l'occasion de l'examen d'un projet de loi autorisant l'approbation d'une convention fiscale entre la France et Malte, ce que fut, pendant sept siècles, du xie au xviiie, la présence française dans ce pays ?
Cette présence, commencée sous la dynastie normande de Sicile au xie siècle, s'était poursuivie avec les Angevins de Naples. En 1530 arrivèrent les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem qui, bientôt, devenus chevaliers de Malte, contrôlèrent à partir de cette petite île la Méditerranée tout entière.
Sur soixante-dix-huit grands maîtres de « l'ordre souverain » de Malte, une cinquantaine étaient Français. Cet ordre constitua une force spirituelle et une puissance maritime et financière tout à fait remarquable. Les chevaliers créèrent à Malte un centre naval de première grandeur et, dans le même temps, accomplirent une oeuvre civilisatrice exceptionnelle.
Aujourd'hui, il y a moins de deux cents Français à Malte, nos intérêts y sont très faibles. Dans la capitale, qui porte toujours le nom de son fondateur Jean Parisot de La Valette, les traces visibles de cette époque sont les magnifiques hôtels des chevaliers de Malte. Après cet instant de nostalgie, nous aurons au moins la consolation d'aller faire du tourisme là-bas.
Nous nous réjouissons de cet accord qui fixe les modalités des échanges, actuellement bien limités, entre notre pays et cette petite île, dont la renommée fut si grande dans le passé, en rassemblant souvent le meilleur de la France.
M. Jacques Chaumont, raporteur. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique . - Est autorisée l'approbation de l'avenant (ensemble un échange de lettres) à l'accord du 25 juillet 1977 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Malte tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, signé à La Valette le 8 juillet 1994, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)

4

CONVENTION FISCALE AVEC ISRAËL

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 289, 1995-1996), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Etat d'Israël en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune. [Rapport n° 388 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la France et Israël ont conclu, le 31 juillet 1995, une nouvelle convention fiscale en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune. Ce texte se substituera à l'actuelle convention du 20 août 1963, devenue inadaptée en raison de l'évolution de nos législations internes respectives et de la structure de nos échanges économiques.
Engagées en juillet 1992, les négociations se sont déroulées dans un excellent climat. La nouvelle convention est, dans son ensemble, conforme au modèle de convention fiscale élaboré par l'OCDE, que vous connaissez. Je me bornerai donc à ne mentionner que ses aspects originaux par rapport au modèle de l'OCDE, résultant de la spécificité de la législation fiscale française et de la pratique conventionnelle propre à notre pays.
C'est ainsi que les titres de sociétés immobilières sont assimilés aux fins d'imposition à des biens immobiliers et que plusieurs dispositions visent à éviter l'usage abusif des clauses conventionnelles. Par ailleurs, l'exonération des dons et legs consentis au profit d'un Etat, de ses collectivités locales et de ses organismes à but non lucratif, tient compte des spécificités des législations des deux Etats.
Enfin, certains dividendes de source israélienne, payés à des résidents de France, donneront droit à un crédit d'impôt fictif ou forfaitaire pendant une période de sept ans, alors que cet avantage était accordé, par l'actuelle convention, sans limitation de durée. Cette clause permet en réalité de ne pas imposer des revenus qui, en Israël, sont exonérés pour faciliter le développement économique.
J'ajouterai que l'évolution de nos échanges commerciaux avec Israël est satisfaisante. Ces derniers ont progressé de 14 p. 100 en volume en 1995 et la France a réalisé un excédent commercial de 470 millions de dollars. La présence économique française dans cet Etat est relativement faible. Ce pays semble ne représenter pour nos entreprises qu'un marché de commerce courant. En effet, seule une dizaine d'entreprises françaises, parmi lesquelles l'Oréal ou le Club Méditerranée, y ont des délégations ou des implantations commerciales. De nombreux contacts ont été engagés depuis deux ans, tant sur le commerce courant que sur les projets d'infrastructures, et paraissent prometteurs.
La nouvelle convention fiscale du 31 juillet 1995 permettra donc un renforcement de nos relations économiques en fournissant un cadre sûr et stable aux investisseurs des deux Etats.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention entre la France et l'Israël en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'Etat d'Israël compte une population de 5,5 millions d'habitants qui vivent sur un territoire, contesté en permanence, de 20 700 kilomètres carrés. Malgré les crises qui jalonnent son histoire, Israël a su construire une économie solide. En effet, le produit intérieur brut par habitant s'élève à 12 700 dollars. Il est pratiquement le double du PIB grec et supérieur d'un quart au PIB espagnol. La croissance économique est constante, bien qu'elle soit largement tributaire des relations extérieures du pays.
Faute de matières premières, Israël connaît un déficit commercial structurel permanent et vit dans un état de dépendance constant en ce qui concerne les approvisionnements extérieurs. Toutefois, il bénéficie d'une aide extérieure non négligeable - 5 millions de dollars en 1992 - provenant, pour une bonne part, des Etats-Unis.
Les relations entre la France et Israël sont empreintes d'amitié. Quelque 500 000 résidents israéliens sont francophones, soit près du dixième de la population. En outre, nombre de Français, souvent doubles-nationaux, vivent en Israël. On en estime le nombre à 50 000. D'où la nécessité d'avoir avec ce pays des conventions fiscales.
Comme l'a rappelé M. le secrétaire d'Etat, nos investissements sont très discrets et se situent généralement dans le secteur du tourisme.
La convention qui nous est soumise aujourd'hui a pour objet d'aménager la convention fiscale du 20 août 1963. Elle s'écarte relativement peu de la convention type de l'OCDE, sauf en ce qui concerne les taux de retenue à la source. M. le secrétaire d'Etat a donné à ce sujet les explications nécessaires.
Sur le plan technique, cette convention ne soulève pas de difficulté particulière. C'est la raison pour laquelle la commission des finances a émis, à l'unanimité, un avis favorable sur le projet de loi visant à autoriser l'approbation de cet accord et vous invite, mes chers collègues, à la suivre sur ce point.
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cette convention était vivement souhaitée par nos compatriotes d'Israël, qui sont, selon les chiffres officiels du ministère des affaires étrangères, au nombre de 46 000, les trois quarts d'entre eux étant immatriculés dans nos consulats.
La convention signée il y a plus de trente ans, en 1963, devenait obsolète et il convenait en effet de l'actualiser. Cela a été fait. La présente convention porte sur les rapports entre, d'une part, la France et ces Français d'Israël qui, en effet, sont souvent binationaux et, d'autre part, Israël. Le champ en est assez vaste, puisque les impôts qu'elle couvre sont, en France, non seulement l'impôt sur le revenu, mais aussi l'impôt sur les sociétés, la taxe sur les salaires et l'impôt de solidarité sur la fortune.
Nous approuvons cette convention dans la mesure où elle recueille l'aval de nos compatriotes résidant en Israël. Ces derniers sont d'ailleurs représentés en force, étant donné leur nombre, au Conseil supérieur des Français de l'étranger, puisque trois délégués d'Israël y siègent.
Au demeurant, il était bon de préciser les rapports fiscaux entre la France et Israël, puisque la question va se poser, sur deux points particuliers, pour la Communauté européenne tout entière. Je rappelle que, lors de la séance du 23 mai 1996, a été déposée au Sénat une proposition d'acte communautaire concernant la conclusion de deux accords entre la Communauté européenne et l'Etat d'Israël sur les marchés publics et les marchés des télécommunications.
Par conséquent, il était tout à fait opportun d'examiner aujourd'hui cette question et que la France, pour ce qui la concerne, mette nettement les choses au point, ce que prévoit cette convention. C'est pourquoi nous voterons le projet de loi visant à en autoriser l'approbation.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique . - Est autorisée l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Etat d'Israël en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Jérusalem le 31 juillet 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)

5

CONVENTION FISCALE AVEC LA BOLIVIE

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 223, 1995-1996), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République bolivienne en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole). [Rapport n° 384 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la convention franco-bolivienne en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 15 décembre 1994, a été négociée, à la demande des autorités boliviennes, en complément de l'accord sur la protection des investissements et immédiatement après la conclusion de celui-ci. Ces négociations avec la France s'inscrivent dans le cadre de la politique d'ouverture de l'économie bolivienne aux capitaux étrangers. Cette politique vise aussi bien les Etats européens que les Etats de la région comme les membres du Pacte andin ou du MERCOSUR.
Cet accord respecte, dans ses grandes lignes, le modèle de convention élaboré par l'OCDE. Cela représente une évolution considérable pour la Bolivie qui, tout comme les autres Etats du Pacte andin, n'acceptait pas certains principes de ce modèle. Ces Etats, en effet, se sont toujours opposés à l'imposition des revenus par l'Etat de résidence du bénéficiaire et ont toujours été partisans d'une taxation aussi large que possible par l'Etat de la source.
La convention fiscale, faite de concessions réciproques, établit donc un équilibre entre deux conceptions opposées.
Désormais, la Bolivie admet, avec quelques aménagements, la notion d'établissement stable qui restreint le droit d'imposer de l'Etat dans lequel s'exerce l'activité.
Pour tenir compte des préoccupations boliviennes, l'Etat d'où proviennent les dividendes, intérêts et redevances pourra taxer ces revenus au taux maximum de 15 p. 100. Dans le modèle de l'OCDE, en revanche, la taxation des dividendes et intérêts est de 5 p. 100, alors que les redevances sont imposables exclusivement dans l'Etat où est située la source.
La méthode d'élimination des doubles impositions est, pour la Bolivie, celle de l'exemption et, pour la France, celle du crédit d'impôt qui permet de sauvegarder la progressivité de l'impôt.
L'intérêt de cette convention réside dans la nécessité d'encourager les échanges économiques franco-boliviens. En effet, si le dialogue politique avec la Bolivie se renforce, comme en témoigne une récente rencontre à Paris entre le Président de la République française et le président bolivien, M. Sanchez de Lozada, nos échanges économiques mutuels restent néanmoins modestes et déficitaires. La Bolivie est une source non négligeable de minerais pour la France, mais notre pays détient moins de 1 p. 100 du marché bolivien. Or ce pays s'est engagé dans de grandes réformes de structures, comportant une libéralisation de l'économie, une restructuration du secteur public, une réforme fiscale et un important programme de privatisations lancé en 1992 et accentué en 1995, ouvrant ainsi une large place à l'investissement étranger.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée avec la Bolivie, et dont le Gouvernement vous recommande d'autoriser l'approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la Bolivie représente deux fois la France en superficie mais ne compte que sept millions d'habitants, dont la plupart vivent dans l'Altiplano.
La vie politique de ce pays, indépendant depuis 1825, a été marquée par un rythme soutenu de coups d'Etat de 1825 à 1982. Depuis cette dernière date, la Bolivie a effectué un retour à la démocratie, qu'il convient d'aider et de maintenir. Ce pays, en effet, s'est engagé dans un grand programme de réformes, que M. le secrétaire d'Etat a évoqué à l'instant. Il continue néanmoins à être très pauvre puisque le revenu par habitant n'excède pas, selon les dernières estimations, 920 dollars par an.
Les performances macro-économiques actuelles de la Bolivie sont plutôt satisfaisantes, avec un taux de croissance de 3,5 p.100 par an et une inflation de 6,5 p. 100, ce qui est relativement modéré. Il n'en demeure pas moins qu'en matière de développement économique la Bolivie est, sans doute avec Haïti, l'un des pays les plus défavorisés.
Si la détention de Régis Debray, l'assassinat de l'ambassadeur de Bolivie à Paris et, plus récemment, l'affaire Klaus Barbie ont constitué, à certaines époques, des contentieux délicats entre la France et la Bolivie, les relations actuelles entre ces deux pays sont néanmoins tout à fait amicales. Le nombre des résidents français en Bolivie et des résidents boliviens en France est d'environ cinq cents de part et d'autre.
Nos échanges sont peu importants : les flux cumulés représentent quelque 500 millions de francs par an, ce qui est très modeste. L'intention du Gouvernement est cependant de tout mettre en oeuvre pour aider la Bolivie, dans un contexte très difficile, à mettre en place les réformes nécessaires.
C'est dans cet esprit qu'a été signée le 15 décembre 1994, à La Paz, cette convention, qui reprend pour l'essentiel les solutions du modèle de convention de l'OCDE. Toutefois, une particularité figure à l'article 23, lequel fixe le recours à la méthode du crédit d'impôt pour éliminer les doubles impositions.
M. le secrétaire d'Etat a bien voulu expliquer toutes les modalités techniques de cet accord parfaitement classique. La commission des finances, unanime, a approuvé ce dispositif et vous invite, mes chers collègues, à faire de même.
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous pourrions faire à propos de la Bolivie des déclarations et des réserves analogues à celles qui ont été exprimées pour le Pakistan. En effet, depuis que la Colombie s'est efforcée de supprimer les plantations de cocaïne et s'est attaquée au cartel de Medellin, la Bolivie est devenue l'un des centres essentiels de production de la drogue.
Nous estimons néanmoins qu'il s'agit là d'un autre problème, qui ne concerne pas les conventions fiscales dont nous discutons ce matin.
Par ailleurs, intervenant pour la dernière fois ce matin, je tiens à remercier M. Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances, de la pertinence de ses rapports dans lesquels il a mis toutes ses connaissances d'ancien haut fonctionnaire du Quai d'Orsay, ainsi que la concision et la clarté dont il a toujours fait preuve dans ses fonctions sénatoriales.
Nous voterons naturellement le présent projet de loi.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique . - Est autorisée l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République bolivienne en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole), signée à La Paz le 15 décembre 1994, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)

6

AVENANT À LA CONVENTION FISCALE
DU 19 DÉCEMBRE 1980 AVEC LA NORVÈGE

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 286, 1995-1996), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant à la convention du 19 décembre 1980 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Norvège en vue d'éviter les doubles impositions, de prévenir l'évasion fiscale et d'établir des règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole et un protocole additionnel), modifiée par l'avenant du 14 novembre 1984. [Rapport n° 387 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, l'avenant à la convention fiscale franco-norvégienne du 19 décembre 1980 en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu, signé à Oslo le 7 avril 1995, est étroitement lié à un autre accord franco-norvégien déjà soumis à votre examen : je veux parler de l'accord franco-norvégien sur le transport par gazoduc du gaz du plateau continental norvégien vers la France, signé à Paris le 27 mars 1995.
Négocié à la demande du ministre de l'industrie en 1994, cet avenant fiscal a bien évidemment pour objectif principal de définir le régime d'imposition du nouveau gazoduc, dans la mesure où la convention fiscale franco-norvégienne en vigueur ne contenait aucune stipulation particulière sur ce type d'activités.
Un intérêt majeur s'attachait à ce que la France soit choisie pour être le pays d'atterrage de ce nouveau gazoduc à destination de l'Europe continentale. C'est pourquoi elle a accepté que l'avenant fiscal permette une imposition exclusive, en Norvège, des bénéfices retirés de l'exploitation du gazoduc, par cet Etat ou les sociétés qui y ont leur siège, y compris pour sa partie située dans les eaux territoriales françaises et pour son terminal situé en France.
Je tiens à préciser que des conditions analogues avaient déjà été consenties à la Norvège, pour la réalisation de ce projet, par nos concurrents directs, à savoir la Belgique et l'Allemagne.
L'avenant sauvegarde toutefois les droits de la France d'imposer les bénéfices revenant à des sociétés françaises, retirés de l'exploitation du gazoduc, pour sa partie située dans les eaux territoriales françaises, ou de l'exploitation de son terminal situé en France.
Mais l'intérêt de cet avenant ne réside pas seulement dans la définition du régime fiscal applicable au nouveau gazoduc franco-norvégien. L'occasion de cette négociation a également été saisie pour « moderniser » quelque peu la convention fiscale franco-norvégienne de 1980. C'est ainsi qu'a été supprimée la faculté de retenue à la source sur les dividendes payés par les filiales à leur société mère et sur les intérêts. Cette suppression est en effet conforme à la politique conventionnelle suivie par la France avec ses partenaires de l'OCDE.
Telles sont donc les principales observations qu'appelle l'avenant à la convention fiscale franco-norvégienne du 19 décembre 1980.
J'aimerais toutefois conclure en rappelant que, si nos échanges commerciaux avec cet Etat demeurent lourdement et structurellement déficitaires, en raison du volume de nos importations d'hydrocarbures, la France est néanmoins le troisième investisseur étranger en Norvège.
La convention fiscale franco-norvégienne, telle qu'elle a été rénovée pour tenir compte de la réalisation d'un projet majeur, constitue donc un instrument bilatéral fondamental pour le développement et la sécurité de nos échanges avec cet Etat.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'avenant à la convention franco-norvégienne en vue d'éviter les doubles impositions, de prévenir l'évasion fiscale et d'établir les règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune. C'est pourquoi le Gouvernement vous recommande d'autoriser l'approbation du présent avenant à cette convention.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Parlement a adopté un projet de loi visant à approuver un accord sur le transport par gazoduc du gaz du plateau continental norgévien vers la France. C'est donc, en fait, la réalisation de ce gazoduc qui fait l'objet de cette convention fiscale.
Cet accord a fait l'objet d'un excellent rapport, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, de notre collègue Maurice Lombard, qui a souligné l'importance de cette réalisation et de la construction d'installations d'atterrage à Dunkerque.
Je rappellerai que le tracé de ce gazoduc et son point d'aboutissement ont suscité des concurrences sévères, et que la France a obtenu l'implantation de la station terminale à Dunkerque. Voilà qui explique le caractère un peu particulier de cette convention, qui, lue sous un angle totalement neutre et détachée de son contexte, pourrait être considérée comme quelque peu dérogatoire et trop favorable à la Norvège.
Cette convention comporte au moins trois dispositions pouvant paraître défavorables à notre pays. J'en citerai deux.
Ainsi, il est prévu que les bénéfices tirés soit par l'Etat norvégien, soit par une société norvégienne de la possession ou de l'exploitation d'un gazoduc ne sont imposables qu'en Norvège. Il est précisé que ces stipulations s'appliquent également s'agissant du terminal du gazoduc, qui, lui, est installé en France, à Dunkerque.
Par ailleurs, une certaine inégalité de traitement entre la France et la Norvège provient de la quotité de capital à partir de laquelle une société qui la détient est considérée comme mère de la société dans laquelle elle est détenue. La retenue à la source est supprimée en France dès lors que les sociétés mères norvégiennes détiennent 10 p. 100 du capital de leurs filiales, tandis qu'elle ne l'est, en Norvège, qu'à condition que le seuil de détention soit au moins égal à 25 p. 100.
Ces dispositifs quelque peu dérogatoires s'expliquent, je le répète, par la concurrence acharnée que se sont livrés différents pays.
Telle est la raison pour laquelle la commission des finances a décidé à l'unanimité d'approuver cette convention et vous invite à la suivre.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de l'avenant à la convention du 19 décembre 1980 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Norvège en vue d'éviter les doubles impositions, de prévenir l'évasion fiscale et d'établir des règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole et un protocole additionnel), modifiée par l'avenant du 14 novembre 1984, signé à Oslo le 7 avril 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)

7

SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
DU KAZAKHSTAN

M. le président. J'ai le plaisir de saluer la présence, dans notre tribune officielle, d'une délégation du Parlement de la République du Kazakhstan conduite par M. Djoldasbekov Omirbecque, président du comité du développement socioculturel, qui effectue une visite de travail à Paris.
Au nom de la Haute Assemblée, je lui souhaite la bienvenue et je forme le voeu que son séjour à Paris soit le plus constructif possible et que les relations entre nos deux pays continuent à se développer de façon harmonieuse. (M. le secrétaire d'Etat, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)

8

ACCORD FISCAL AVEC LE PANAMA

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 160, 1995-1996) autorisant l'approbation de l'accord fiscal sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Panama. [Rapport n° 383 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, l'accord fiscal sous forme d'échange de lettres conclu entre la France et le Panama en avril et en juillet 1995, qui est soumis aujourd'hui à votre approbation, paraît être, en raison de sa brièveté, de portée mineure.
Cependant, bien que ne ressemblant pas ou peu, dans sa forme ou dans son fond, aux conventions en vue d'éviter les doubles impositions que vous avez l'habitude d'examiner, cet accord revêt un très grand intérêt pour la France. Son objectif essentiel est, en effet, de mettre fin à un risque important d'évasion, voire de fraude fiscales.
Comme vous le savez, la fiscalité panaméenne présente la particularité d'être extrêmement attrayante pour les sociétés qui n'exercent pas leur activité au Panama. La constitution même d'une société est au Panama une formalité simple et rapide, ce qui explique qu'actuellement plus de cent sociétés y sont créées chaque jour par des étrangers.
Or, profitant des clauses de la nation la plus favorisée et d'égalité de traitement avec les nationaux contenues dans deux accords franco-panaméens antérieurs, la convention d'établissement du 10 juillet 1953 et l'accord sur la protection des investissements du 5 novembre 1982, de nombreuses sociétés écran constituées au Panama et agissant en France, dont les actionnaires jouissent de l'anonymat garanti par la législation panaméenne, peuvent bénéficier actuellement, de manière économiquement abusive, des mêmes avantages fiscaux que ceux qui sont consentis aux sociétés françaises.
C'est pour mettre fin à ce risque d'évasion fiscale que le présent accord ôte toute portée fiscale aux conventions franco-panaméennes précitées, et abroge, notamment, l'article 7 de la convention franco-panaméenne d'établissement.
Par la même occasion, nous avons précisé, conformément aux principes définis par l'OCDE, le régime fiscal applicable à certaines activités ou à certains revenus. C'est ainsi que l'article 3 de l'accord traite de l'imposition des compagnies aériennes ou que l'article 4 rappelle le principe de l'imposition des traitements et pensions publics par l'Etat dont le bénéficiaire est un national.
Telles sont les principales observations qu'appelle l'accord fiscal sous forme d'échange de lettres entre la France et le Panama, dont le Gouvernement vous recommande d'autoriser l'approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Panama est un petit pays de 75 000 kilomètres carrés, peu peuplé - 2,5 millions d'habitants - et qui est indépendant depuis 1903. Il a toujours entretenu avec notre pays d'excellentes relations, mais celles-ci sont relativement faibles sur le plan économique. Bien qu'il s'agisse d'un partenaire commercial peu important, les arriérés du Panama à l'égard de la France s'élèvent actuellement à 100 millions de francs.
Le nombre de Panaméens vivant en France est de quatre-vingts et celui des Français résidant au Panama de cinq cents. Une quarantaine de sociétés françaises sont présentes dans le pays, essentiellement dans le secteur bancaire et financier.
L'importance du Panama est liée non seulement au canal, mais également à une position tout à fait exceptionnelle dans le domaine financier et bancaire. En effet, le secteur tertiaire représente actuellement 75 p. 100 du produit intérieur brut du pays ; il s'est développé à partir de la zone franche de Colon, qui est la deuxième au monde, immédiatement après Hong Kong, avec 10 milliards de dollars d'opérations chaque année. Le secteur bancaire est le principal moteur économique du pays.
La législation panaméenne, se caractérise par un très bas niveau d'imposition et, même, pour les sociétés off shore qui n'excercent pas d'activités économiques dans le pays, par l'absence de toute imposition.
Il convient d'ajouter - ce point n'est pas dépourvu d'intérêt - que le secret des opérations financières et commerciales est absolu au Panama.
De tout cela, il résulte que plus de 35 000 sociétés sont créées chaque année au Panama, soit, comme l'a dit tout à l'heure M. Emmanuelli, près de cent sociétés nouvelles chaque jour.
Compte tenu du secret qui entoure les opérations et de la quasi-absence d'imposition, le Panama peut constituer une source d'évasion fiscale tout à fait exceptionnelle.
La lecture de la presse française pourrait laisser entendre que cette idée ne serait pas totalement dénuée de fondement.
Par conséquent, malgré sa portée extrêmement faible sur le plan fiscal, cette convention a une forte incidence psychologique : c'est la première convention de non double imposition qui lierait le Panama à un autre pays. A l'heure actuelle, il n'existe pas d'autre convention de ce type.
Cette convention a été conclue par un échange de lettres les 6 avril et 17 juillet 1995. C'est la France qui a pris l'initiative de la négocier.
Nous sommes liés avec le Panama par deux traités qui contiennent une clause d'égalité de traitement avec les nationaux. Ce dispositif était gênant, car il favorisait l'évasion et la fraude fiscales. Le présent projet de loi permet de rééquilibrer cette clause.
Au terme d'une négociation extrêmement facile, nous sommes parvenus à un résultat satisfaisant.
La convention compte huit articles. Le plus important est l'article 5, qui ôte toute portée fiscale aux conventions de 1953 et de 1992.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, ce texte est de portée modeste. Néanmoins, compte tenu de son côté novateur - il constitue, je le répète, une première en matière de double imposition - et des objectifs fixés, la commission des finances vous invite à l'adopter.
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen de cette convention fiscale entre la République française et la République du Panama nous conduit à nous interroger sur plusieurs questions fondamentales en matière de coopération fiscale internationale, de coopération économique au sens large, et nous entraîne, naturellement, à nous interroger sur la réalité de l'Etat contractant avec notre Gouvernement cette convention fiscale.
Evidemment, l'économie du Panama et en grande partie dépendante de l'activité de la zone du canal et des relations privilégiées entretenues avec les Etats-Unis.
La communauté panaméenne vivant aux Etats-Unis est relativement importante, tandis que l'essentiel de la dette extérieure - comme, d'ailleurs, du déficit commercial panaméen - se trouve en Amérique du Nord.
Cette dette est d'ailleurs élevée : plus de 3,7 milliards de dollars, soit plus de 1 450 dollars par habitant, et plus de la moitié du produit intérieur brut.
Il convient de noter que le déficit du commerce extérieur panaméen se situait ; à la fin de l'année 1992, à hauteur de 1 545 millions de dollars, les exportations ne couvrant les importations qu'à hauteur de 24 p. 100 environ.
Le Panama enregistre ainsi plus de 1 050 millions de dollars d'importations en provenance des Etats-Unis ou de la zone du canal et ne peut exporter que pour un peu plus de 140 millions de dollars environ.
Les deux tiers du déficit sont donc constatés dans la relation directe avec les Etats-Unis.
Les années quatre-vingt ont été marquées par la tentative de retour d'Arnulfo Arias - à près de quatre-vingts ans ! - mais aussi par la naissance, sur l'instigation, notamment, de la République du Panama, du groupe de Contadora, organisme informel des gouvernements sud-américains destiné à émettre des propositions de résolution des conflits de la zone.
A partir de 1987 apparaît la figure, pour le moins trouble, du général Noriega, qui cumulera bientôt les fonctions de trafiquant de drogue, d'agent des services secrets nord-américains et de porte-parole de l'indépendance nationale.
Le général Noriega a ainsi renversé le présidentDelvalle en février 1988 puis, sous la pression américaine, a accepté l'organisation d'élections en 1989.
Cependant, ces élections ont été marquées par de graves incidents qui servirent, finalement, de point d'appui aux Américains pour mettre en oeuvre l'opération appelée « juste cause » et qui consista essentiellement à briser les manifestations populaires, à se saisir de la personne du général Noriega et à assurer l'accession au pouvoir du candidat le plus proche des Américains, le président Guillermo Endara.
Il n'y a hélas ! pas loin à penser que la montée en puissance, la disgrâce du général Noriega, puis l'installation du président Endara au pouvoir n'avaient finalement qu'une seule finalité : la remise en cause des accords de 1979.
La situation en est aujourd'hui arrivée à ce point, et il y a fort à parier que les Etats-Unis « freineront des quatre fers » pour aboutir aux objectifs de ce traité.
Economiquement, nous avons souligné certaines des données propres à l'Etat de l'isthme.
Il convient toutefois d'y ajouter certaines données relativement connues et qui donnent une spécificité particulière à la situation panaméenne.
Le Panama est une zone franche fiscale de taille relativement importante, où peu de contraintes pèsent sur les entreprises susceptibles de s'y implanter.
Il est également le lieu de résidence d'un nombre considérable de navires marchands, le pays étant spécialisé dans le pavillon de complaisance.
A la fin de l'année 1992, le Panama immatricule plus de cinq mille navires marchands, ce qui représente un tonnage de près de quatre-vingts millions de tonneaux de jauge brute.
Cela signifie que, derrière le Libéria, autre création des Etats-Unis, le Panama dispose de la seconde marine marchande de la planète, ce qui pose d'insolubles problèmes de sécurité et de droit du travail pour les équipages de la flotte considérée.
Personne ne peut d'ailleurs oublier que cette situation de pavillon de complaisance, largement encouragée par les grandes compagnies pétrolières américaines, est à l'origine de quelques-unes des plus célèbres marées noires que la planète ait pu connaître.
Autre particularité significative de la situation panaméenne : servir aujourd'hui de « lessiveuse » d'argent sale et, singulièrement, d'argent issu du narcotrafic.
L'une des motivations de l'opération « juste cause » fut de lutter contre le fait que le général Noriega avait assis une part importante de sa fortune sur le rendement du trafic de drogue.
Il ne faut jamais oublier ici que le Panama, pays de faible administration fiscale, largement dominé par l'ombre de l'aigle américain, est parfaitement placé : il se trouve à proximité de la zone antillaise, simplement gagnée par la fièvre de la déréglementation fiscale, mais aussi juste à côté de quelques-uns des pays de production, tous devenus des narco-Etats.
Il permet aussi, dans le cadre de son droit commercial pour le moins exotique, de constituer, sans trop d'interrogations sur l'origine des capitaux investis, de puissantes féodalités financières.
Nul doute également, puisque la chose a été largement expérimentée par certaines sociétés françaises, et peut-être pour le compte d'un certain nombre de nos partis politiques, que les effets de la révolution informationnelle, de la libéralisation des marchés de capitaux et de la délocalisation et de l'optimisation fiscale constituent une force d'attraction importante pour de nombreux investisseurs.
Ces réflexions nous conduisent évidemment à nous interroger sur le sens de la convention fiscale que l'on nous propose aujourd'hui de ratifier.
Pour prendre une expression anglo-saxone, disons que, pour certains aspects, fiscalité et Panama ne riment pas vraiment et qu'il y a en la matière « nonsense », comme disent nos amis.
Le Panama est un paradis fiscal et constitue donc l'un des facteurs de déstabilisation des normes fiscales communément admises.
Il s'agit ici d'éviter les doubles impositions en ces deux matières, ce qui procède, dans le cas de l'impôt sur les sociétés panaméen, d'une contrainte pour le moins allégée.
Le texte de la convention prévoit d'ailleurs, à l'article 3, une application spécifique aux compagnies de navigation aérienne, avec une imposition dans l'Etat où se situe le siège de la compagnie exploitante.
Il conviendrait peut-être d'aviser de ces dispositions le président d'Air France, d'autant que les mesures relatives à la navigation aérienne s'appliqueront également aux opérations réalisées en groupement, en exploitation commune ou dans le cadre d'un organisme international.
Sous la présidence de Bernard Attali, Air France avait déjà délocalisé son établissement d'achat d'aéronefs en crédit-bail. Pourquoi ne pas utiliser le Panama demain ?
Cela pose, en fait, d'incontestables questions. C'est en effet à un véritable pavillon de complaisance aérien que l'on nous demande de donner quitus.
De surcroît, nous venons juste de voter un texte de loi soumettant certains investissements réalisés à partir de capitaux détenus par des personnes morales de droit panaméen à la levée du secret bancaire lorsqu'est supposée l'origine frauduleuse de ces capitaux.
La coopération avec la République de Panama doit, à notre sens, trouver d'autres applications.
Fiscalement parlant, il est sans doute plus que temps qu'une large consultation internationale, incluant les pays qui, à l'instar de Panama, offrent aujourd'hui les moindres contraintes, soit entreprise sur la chasse aux profits tirés de commerces illicites ou parallèles et sur les limites à poser en termes de libéralisation de la circulation des capitaux.
Il est d'ailleurs en partie paradoxal que la République de Panama soit endettée sur les marchés internationaux de capitaux et favorise concurremment le développement de la spéculation monétaire internationale.
Il est surtout déterminant, de notre point de vue, que nous aidions la République de Panama à acquérir la pleine maîtrise de ses rentrées fiscales et la pleine connaissance des circuits financiers qu'elle abrite aujourd'hui.
Il importe surtout que le Panama puisse effectivement recouvrer pleinement sa souveraineté nationale en obtenant réellement la cession de la zone du canal et le départ des forces armées nord-américaines.
Les 2 600 000 Panaméens résidents et les 560 000 Panaméens de l'extérieur ont légitimement droit à la pleine maîtrise de leur territoire et des revenus tirés de l'exploitation de la liaison transocéanique. En effet, la République ne perçoit encore aujourd'hui que moins du quart des redevances de passage acquittées par les navires empruntant le canal.
La seule cession du canal représenterait un revenu pour la République équivalant à plus de la moitié du service de la dette publique nationale.
Cette situation justifie, en dernière instance, que nous nous refusions à adopter ce projet de loi autorisant l'approbation de l'accord fiscal entre la République française et le Gouvernement de la République du Panama, dans les termes où il nous est présenté. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne pensais pas intervenir dans ce débat, mais l'exposé de M. Pagès me conduit à prendre la parole, surtout à cause des conclusions qu'il a tirées de ses réflexions.
Rappelons d'abord qu'il y a cent ans le Parlement français et la nation tout entière étaient bouleversés par le « scandale » de Panama, mais rappelons aussi que le canal de Panama était une initiative française courageuse, difficile, dans laquelle notre pays s'était investi complètement.
Ferdinand de Lesseps, qui s'était couvert de gloire en creusant le canal de Suez, avait entrepris les travaux avec des centaines d'ingénieurs comme Gustave Eiffel, et des milliers d'hommes s'étaient attaqués à une oeuvre gigantesque.
Il existe, près de Panama, un cimetière où je suis souvent allé et où sont enterrés 8 000 travailleurs français venus des Antilles. Nous avons été vaincus non par les difficultés techniques, mais par la malaria. Aussi, lorsque nous avons cédé le canal aux Américains, ils ont commencé par envoyer des médecins pour trouver la parade à la maladie et aux épidémies. Ils ont ensuite pu terminer ce que nous avions commencé.
En 1903, c'est un Français, Bunau-Varilla, qui a créé le drapeau panaméen en plaçant différemment les trois couleurs de la France. Nous avons donc là-bas des souvenirs !
Mais venons-en à la période contemporaine.
Je suis un peu surpris, monsieur Pagès, de vous entendre parler aujourd'hui du général Noriega avec un certain enthousiasme...
M. Robert Pagès. L'enthousiasme était mitigé !
Mme Danielle Bidard-Reydet. Vous ne nous avez pas bien entendus !
M. Jacques Habert. ... en disant qu'il avait finalement été, en quelque sorte le symbole de la volonté d'indépendance du Panama contre la mainmise américaine, alors qu'il était, tout le monde le reconnaît, le responsable principal, le pivot du trafic de la drogue venue du Sud, en Amérique centrale.
M. Robert Pagès. C'est ce que j'ai dit, mon cher collègue !
M. Jacques Habert. Examinons maintenant le texte de l'accord qui nous est soumis.
Il est vrai qu'il existe une situation et une législation tout à fait anormales qui font de Panama, à beaucoup d'égard, un refuge fiscal. Mais cette situation vaut pour d'autres pays ! Pour s'en convaincre, il suffit de voir ce qui se passe du côté des îles Caïman et du Liechtenstein. Ce problème nécéssiterait donc une réflexion internationale importante.
Vous avez justement dénoncé les pavillons de complaisance et les graves conséquences qui en découlent. Cela vaut dans le domaine maritime comme dans le domaine aérien,...
Mme Danielle Bidard-Reydet. Tout à fait !
M. Jacques Habert. ... il y a là une dérive à laquelle nous devons être très attentifs.
La discussion du présent texte était une bonne occasion de le rappeler ; vous avez bien fait de le faire. Mais je ne pense pas qu'il faille en attribuer la responsabilité au gouvernement américain.
L'accord qui nous est soumis aujourd'hui constitue un premier pas qui permet à la France d'atténuer une situation proprement panaméenne. L'échange de lettres qui y est annexé permet d'apporter des précisions à cet égard. Il offre une base de réflexion et un texte à partir duquel il sera possible de construire une action.
Voilà pourquoi je pense que cet accord constitue une avancée. Il ne s'agit pas de protéger des fraudeurs ! Les 500 Français qui sont installés là-bas et défendent, pour la plupart, des intérêts bancaires ou maritimes le font fort honnêtement.
Ce qu'il faudrait voir de près, au-delà des pavillons de complaisance, ce sont peut-être les adresses de complaisance. N'existe-t-il pas des compagnies ou des individus qui sont censés être là-bas et qui n'y sont jamais ? Ce ne sont pas les Français de l'étranger, mais des faux résidents à l'étranger qu'éventuellement il faudrait poursuivre ! Toute une réflexion pourrait être menée au plan international à ce sujet.
L'accord fiscal entre la France et Panama contient des dispositions qui répondent à cette préoccupation. Il constitue donc une avancée qui nous permettra de poursuivre dans le bon sens. Aussi, nous voterons le projet de ratification qui nous est soumis.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de l'accord fiscal sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Panama, signé à Paris le 6 avril 1995 et à Panama le 17 juillet 1995 et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)

9

DÉCLARATION
DE L'URGENCE D'UN PROJET DE LOI

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

« Paris, le 5 juin 1996.

« Monsieur le président,
« J'ai l'honneur de vous faire connaître qu'en application de l'article 45, alinéa 2, de la Constitution le Gouvernement déclare l'urgence du projet de loi relatif à l'entreprise nationale France Télécom, déposé sur le bureau du Sénat le 29 mai 1996 (n° 391).
« Veuillez agréez, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération.

« Signé : ALAIN JUPPÉ »

Acte est donné de cette communication.

10

CANDIDATURES
À UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation m'a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidat qu'elle présente à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de modernisation des activités financières.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.
L'ordre du jour de ce matin étant épuisé, le Sénat va maintenant interrompre ses travaux ; il les reprendra à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures vingt-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean Faure.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

11

RAPPEL AU RÈGLEMENT

M. Robert Pagès. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. Monsieur le président, mon intervention se fonde sur l'article 36 de notre règlement et tend à vous prier d'excuser l'absence de certains de nos collègues à la reprise de cette séance.
Mes amis Marie-Claude Beaudeau, Nicole Borvo et Louis Minetti sont en effet présents aux côtés de dizaines de milliers de salariés d'EDF-GDF - plus de 50 000 - qui manifestent contre le projet de déréglementation du système énergétique français.
Ce projet européen, que les ministres de l'Union européenne vont examiner le 20 juin prochain à Bruxelles, entraînerait, si, par malheur, il était appliqué, la privatisation d'une part importante du marché de l'électricité.
Ce grand service public, devenu propriété de la nation à la Libération, serait ainsi livré aux appétits des financiers, au détriment de l'intérêt général.
Nous considérons que l'acceptation de la directive européenne conduirait tout droit à l'éclatement de l'entreprise et à la mise en pièces de ses missions de service public.
France Télécom aujourd'hui, EDF-GDF demain et la SNCF après-demain : le Gouvernement de M. Juppé s'attaque à l'un des éléments clés de la spécificité française, à savoir de grands services publics exercés par des entreprises de secteur public.
Ce sont des valeurs essentielles de la République, la défense de l'intérêt général et non des intérêts financiers, que vous tentez de détruire.
Comme l'indique Robert Hue dans cette importante lettre datée du 4 juin : « Les enquêtes d'opinion montrent tout l'attachement des Françaises et des Français à leurs services publics. Plusieurs initiatives d'action sont envisagées et suscitent un large écho. Le parti communiste français, pour sa part, ne manquera pas de les soutenir. »
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen appellent, pour leur part, le Gouvernement et la majorité sénatoriale à écouter enfin le peuple de France, les salariés qui n'acceptent pas que soient ainsi bradés les formidables outils pour le développement économique et pour le progrès social que sont ces fleurons de notre économie.
Le débat qui s'est ouvert depuis hier au Sénat et qui se poursuivra jusqu'à la fin du mois de juin au Parlement sur France Télécom revêt dans ce contexte une grande importance ; c'est pourquoi nous y prendrons toute notre place pour faire entendre dans cet hémicycle la voix des salariés, la voix des usagers, voix auxquelles le Gouvernement et sa majorité restent sourds. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Je vous donne acte de votre déclaration, monsieur le sénateur.

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NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de modernisation des activités financières.
La liste des candidats établie par la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Christian Poncelet, Philippe Marini, Charles Jolibois, Henri Collard, Alain Lambert, Jean-Pierre Masseret et Paul Loridant ;
Suppléants : M. Denis Badré, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Guy Cabanel, Emmanuel Hamel, Jean-Philippe Lachenaud, Jacques Oudin et Alain Richard.

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CANDIDATURE À LA DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
POUR L'UNION EUROPÉENNE

M. le président. L'ordre du jour appelle la nomination d'un membre de la délégation parlementaire pour l'Union européenne, en remplacement de M. Jean-Pierre Tizon.
J'informe le Sénat que le groupe des Républicains et Indépendants a proposé la candidature de M. Jean-Paul Emorine.
Cette candidature a été affichée et sera ratifiée s'il n'y a pas d'opposition dans le délai d'une heure.

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RÉGLEMENTATION
DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

Suite de la discussion d'un projet de loi
déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 357, 1995-1996), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications. [Rapport (n° 389, 1995-1996).]
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en préambule, je voudrais moi aussi saluer les dizaines de milliers de manifestants qui défendent aujourd'hui un autre service public aussi fondamental que celui des télécommunications, celui du gaz et de l'électricité. Si je suis à cette tribune pour remplir le mandat qui m'a été confié, mon coeur est avec ceux qui défilent. Qu'un peu de leur énergie inspire et éclaire nos débats !
M. Robert Pagès. Très bien !
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, nous abordons aujourd'hui le premier volet d'un ensemble législatif qui, s'il était mené à son terme dans les conditions que vous souhaitez, pourrait avoir le même effet dévastateur que la privatisation de TF1, sous le gouvernement de M. Chirac, en 1986. Il s'agissait, disait M. Léotard, alors en charge du dossier, d'une ouverture maîtrisée à la concurrence.
Dix ans plus tard, le secteur public de l'audiovisuel est rongé par la course au profit que vous avez instaurée, comme vient de le montrer la crise qui secoue France 2 ainsi que France 3 ; et plus personne n'oserait invoquer sans rire le « mieux disant culturel » que la famille Bouygues s'était engagée à respecter devant le Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Le même scénario s'enclenche, à présent, pour les télécommunications. Le paradoxe, c'est que ce soit vous, monsieur Fillon, qui en soyez le porte-parole, alors qu'au fond de vous-même, sans aucun doute, vous le désapprouvez.
Vos deux textes de loi constituent bien une intervention majeure dans l'organisation économique et sociale. Ils peuvent ruiner les acquis d'un siècle d'efforts pour bâtir un secteur performant des télécommunications.
Rappelons-en les grandes dates. Au départ, il y eut la loi de nationalisation des sociétés privées de téléphone, en 1889, voilà plus d'un siècle ; elle fut complétée par l'instauration du budget annexe des PTT, en 1923 ; enfin, l'édifice fut modernisé par la loi Quilès de 1990, créant deux opérateurs publics autonomes : La Poste et France Télécom.
Aujourd'hui, nous débattons de la loi de « déréglementation » et de « dérégulation » des télécommunications. La semaine prochaine, si le scénario ne se grippe pas, vous demanderez, en première lecture au Sénat, de privatiser France Télécom et de laisser le champ libre à la famille Bouygues, une fois de plus, à deux compagnies fermières de l'eau - l'une et les autres connues du grand public par de récents démêlés judiciaires - ainsi qu'à quelques firmes étrangères.
Le géant américain ATT, l'Anglais BT et des nouveaux venus asiatiques attendent que le repas soit prêt. Ils risquent bien d'ailleurs de réécrire à leur façon la fable de L'huître et les plaideurs et de mettre ainsi d'accord malgré eux, les Français.
Quelle que soit l'issue, ce sont les citoyens de notre pays qui en feront les frais.
Or, l'enjeu n'est pas seulement, ni même d'abord, économique : privatiser, dans de mauvaises conditions, les télécommunications, c'est s'attaquer au coeur de notre démocratie et c'est brader un peu de notre histoire.
En cette fin de siècle, l'information circule à travers de multiples canaux interconnectés. Le fil entre des points fixes, le câble, l'hertzien et le satellite servent de supports. Les domaines du téléphone, de l'informatique et de l'audiovisuel sont interdépendants. Comme le disent les auteurs de l'ouvrage Les Télécoms en question, signant sous le pseudonyme A. Leray : « L'information est un bien immatériel qui échappe aux notions ordinaires de propriété ou de marchandise. Elle a une valeur d'usage plus qu'une valeur d'échange : c'est par sa circulation plus que par son accumulation que l'information prend de l'importance. Ainsi, ce sont les réseaux de télécommunications qui sont l'élément dominant de ce que lon peut appeler le "nouvel ordre communicationnel".
Justement, ce sont ces supports que vous voulez achever de privatiser, après la brèche importante introduite par le ministre Longuet, sous le gouvernement Balladur, en 1993 : celui-ci avait ouvert à la concurrence le téléphone mobile et tenté de transformer le statut de France Télécom ; seule la très vive réaction des salariés l'avait empêché d'avancer dans cette direction.
Fixons au passage un point d'histoire, monsieur le ministre : pour introduire ce débat, vous vous retranchez sans cesse derrière l'argument de la directive européenne qui fixe au 1er janvier 1998 la libéralisation des services et des infrastructures de télécommunications. Mais cette décision est de votre seule responsabilité ! Ce sont, en effet, les conseils des ministres réunis à Bruxelles le 16 juin 1993 et le 17 novembre 1994 qui ont décidé à l'unanimité, donc avec l'accord de la France, l'ouverture à la concurrence, d'une part des services vocaux et, d'autre part, des infrastructures filaires de téléphonie au 1er janvier 1998. C'est le gouvernement Balladur qui a accepté ce calendrier.
Dès lors, il était mis un terme au compromis de 1989, négocié sous la présidence de M. François Mitterrand, qui avait su trouver un juste équilibre entre l'ouverture à la concurrence des services à valeur ajoutée et le maintien du monopole sur la téléphonie vocale entre points fixes, ainsi que sur celui des infrastructures publiques, payées par les contribuables. Un simple coup d'oeil sur la chronologie remarquablement établie par notre collègue Gérard Larcher, dans L'Avenir de France Télécom : un défi national - j'ai de bonnes lectures... !
M. Gérard Larcher, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Excellentes !
M. Gérard Delfau. ... le montre clairement.
Dans la foulée fut pensée et votée la réforme Quilès, en 1990, qui assurait sur des bases solides le noyau dur du service public : un opérateur public autonome, ayant le monopole du réseau et de la téléphonie filaire, le reste étant ouvert à la concurrence. Cela n'avait pas si mal marché, tant du point de vue de la cohésion sociale que sous l'angle stratégique et financier : 9,2 milliards de francs de bénéfices en 1995 ! C'est cette construction équilibrée que vous faites voler en éclats.
Pourquoi tant de précipitation ? Sans recommander forcément l'attitude actuellement adoptée par la Grande-Bretagne vis-à-vis de ses partenaires européens, on aurait pu attendre d'un gouvernement nommé par M. Jacques Chirac un peu plus de circonspection et un peu plus de fermeté à Bruxelles.
Surtout, pourquoi tant de zèle ? En effet, s'il est vrai que la Commission européenne exige une concurrence totale entre prestataires de services, à une date rapprochée, elle s'interdit d'émettre un avis sur la nature juridique de l'opérateur public et sur la propriété du réseau. Ces choix relèvent exclusivement de l'Etat national.
Or, loin de préserver ces marges de manoeuvre, vous allez au-devant de l'industrie privée, comme s'il y avait d'autres raisons à cette mise en concurrence complète et à cet affaiblissement délibéré de France Télécom. Parmi celles-ci, il en est une qui inquiète la majorité parlementaire elle-même : il ne vous suffirait pas que la recette attendue de la privatisation vienne combler les déficits du budget.
L'Etat vend ainsi son patrimoine, à la façon d'un fils de famille prodigue, ce qui, simultanément, n'interdit pas à M. Arthuis de fustiger la « hausse de la fiscalité locale », ni au Premier ministre de déplorer la « mauvaise graisse » de la fonction publique. Il est d'étranges donneurs de leçon !
Mais un autre « coup tordu » budgétaire - permettez-moi l'expression - se prépare : est-il vrai, monsieur le ministre, que Bercy envisage d'inscrire en recettes ordinaires les 50 milliards de francs que France Télécom devra verser à l'Etat pour provision de la retraite de ses agents, au lieu de mettre ces sommes dans un fonds de pension, comme l'aurait fait un Pierre Bérégovoy ? Si tel était le cas, on se trouverait devant un tour de passe-passe qui ne manquerait pas d'intéresser la Cour des comptes et d'étonner les observateurs étrangers, attentifs aux signes de rigueur financière.
J'ai beau chercher, je ne vois pas d'arguments qui justifient l'ampleur de ce démantèlement, eu égard à nos engagements européens. Existe-t-il au moins une rationalité économique ? Même pas ! C'est pour pallier les carences - ou les faillites - d'entreprises privées que s'est bâti, peu à peu, depuis un siècle, un vaste secteur d'entreprises publiques.
Et la vague de privatisation qui a déferlé depuis les années quatre-vingt, sur les Etats-Unis et la Grande-Bretagne notamment, n'a pas eu les résultats bénéfiques que certains attendaient ! Les chantres de la « déréglementation » doivent admettre qu'une autorité de régulation peut se montrer plus tatillonne et plus prodigue en textes qu'une administration.
Les adeptes de la « dérégulation » sont contraints de s'interroger sur la baisse de sécurité qui affecte le transport aérien, pour ne citer que cet exemple.
Quant à la fin des « monopoles », il est piquant ou triste - on choisira - de les voir se reconstituer à grande vitesse, par rachats et concentrations, mais cette fois sous forme privée.
Je ne résiste pas au plaisir de citer le journal Le Monde des 2 et 3 juin 1996, pourtant favorable à l'ouverture à la concurrence des entreprises publiques. La journaliste écrit : « Sous le couvert des autorités de tutelle, les fameux « régulateurs » ou la commission des fusions et monopoles, la Grande-Bretagne continue à suivre la marche de ses anciennes protégées dans les secteurs de l'eau, de l'électricité ou du gaz, que ce soit pour empêcher une trop forte concentration qui nuirait à la concurrence ou pour faire baisser les tarifs et préserver les intérêts des usagers pris en otage par les nouveaux propriétaires ». C'est rudement dit !
On peut suivre aussi avec intérêt, et avec beaucoup de craintes, la montée en puissance d'ATT, le géant américain, que la loi anti-trust avait obligé à s'amputer d'une partie de son implantation locale, il y a une vingtaine d'années.
M. Michel Pelchat. Il y a dix ans !
M. Gérard Delfau. Apparemment, il est en voie d'occuper une position hégémonique et, cette fois, à l'échelle planétaire, ce qui représenterait un danger mortel pour notre civilisation. Faut-il vraiment lui faciliter la tâche en lui ouvrant le marché français et, surtout, en démembrant France Télécom ? Etrange attitude de la part de votre Gouvernement !
Tout se passe, en effet, comme si le projet de loi sur la « déréglementation » avait pour objet non seulement d'abolir la position dominante de l'entreprise publique - ce qui est condamnable - mais encore de lui faire financer ses propres concurrents - ce qui est stupéfiant !
En effet, l'article 34 du projet de loi semble avoir été rédigé de la plume de quelques opérateurs privés. D'ailleurs, ils ne s'en cachent pas. Cela porte même un nom bien français : le lobbying.
Et cette pratique détestable n'est pas pour rien dans certaines dérives des hommes politiques... Je me souviens de mon indignation lors d'une réunion que vous présidiez, monsieur le ministre, en entendant les représentants de British Telecom, de Bouygues, de la Lyonnaise des eaux et de la Générale des eaux tenter de nous apitoyer sur leur sort dans le combat qu'ils avaient à livrer face au « requin » - le mot fut prononcé - France Télécom. Les voilà sans doute rassurés par le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale !
Ils auront accès, de plein droit, en tant que câblo-opérateurs et prestataires de services, au réseau national de France Télécom, qui a été financé pour l'essentiel par l'argent du contribuable, à hauteur de 100 milliards de francs, pendant les années soixante-dix et quatre-vingt, ce qui n'est pas rien !
Certes, il est concédé qu'ils devront payer au propriétaire une « juste rémunération », qui « couvrira le coût des prestations fournies et des investissements réalisés ». Mais qui croira que, ne pouvant refuser l'accès à son réseau, France Télécom aura les moyens d'imposer un « juste » retour sur investissement ? Le tenterait-il qu'il serait désavoué par l'autorité de régulation, qui aura pour mission et pour idéologie d'ouvrir au maximum à la concurrence le secteur des télécommunications.
C'est un géant que l'on livre pieds et poings liés au marché international. Américains et Asiatiques remportent là, sans combattre et sous pavillon européen, une belle victoire. C'est un crime contre l'intérêt supérieur de la France.
Le même esprit préside à la mise en oeuvre de l'interconnexion qui vise à construire ce que vous appelez le réseau « sans couture » entre différents opérateurs. Ce problème est au coeur de l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications.
Il n'est pas envisageable que soit construit un nouveau réseau pour lequel 150 milliards de francs seraient nécessaires. Actuellement, seules existent les infrastructures détenues par la SNCF, les sociétés d'autoroute, EDF, les oléoducs, la RATP, les téléports. Au passage, remarquons qu'il s'agit en général d'entreprises publiques entre lesquelles il aurait été facile pour votre Gouvernement d'établir un accord de renforcement mutuel avec l'opérateur principal face à la concurrence étrangère.
Voilà une proposition que nous vous soumettons puisqu'il paraît que nous serions muets sur l'avenir de France Télécom et crispés sur le statu quo !
En ce qui concerne l'interconnexion, le projet de loi traite l'opérateur public national comme s'il était non seulement en position dominante, mais encore coupable d'abus de position dominante.
En effet, seul France Télécom, de fait, sera obligé de se plier aux exigences des autres opérateurs privés. Qui plus est, en ouvrant le droit à l'interconnexion, non seulement aux exploitants de réseaux mais aussi aux services, on ouvre le marché à des entreprises dont le seul objectif sera de pratiquer l'« écrémage », en s'attaquant aux sections les plus rentables en tant que simples revendeurs de capacité, sans pour autant devoir supporter la charge financière des investissements réalisés.
Enfin, les principes de tarification de l'interconnexion sont renvoyés à un décret. Là encore, il y a fort à parier que l'opérateur public sera lésé, le Gouvernement ayant refusé, à l'Assemblée nationale, un amendement socialiste disposant que les tarifs d'interconnexion devaient être évalués en fonction des investissements réalisés par l'opérateur offrant l'interconnexion.
Nous défendrons à nouveau cet amendement. Aurons-nous plus de chance ou allons-nous, ici, au Sénat, accepter cette disposition discriminatoire ? La future autorité de régulation est-elle mise en place pour servir de cheval de Troie aux concurrents de France Télécom ? C'est une lourde responsabilité que vous prendriez, mes collègues de la majorité.
C'est après cet ensemble de mesures concernant l'ouverture à la concurrence qu'arrive, sous le titre « le service public des télécommunications », l'article 35, chef-d'oeuvre, je dois le reconnaître, d'hypocrisie, festival de double langage !
Cet article commence par énoncer les grands principes fixés par les juristes de l'école du service public : égalité, continuité, adaptabilité. Il découpe ensuite la notion de service public en trois composantes : le service universel, notion directement importée de Bruxelles ; les services obligatoires de télécommunication - en quoi sont-ils obligatoires ? Nul ne le dit ! - enfin, les missions d'intérêt général, terminologie, jusqu'ici réservée aux prestations les plus éloignées du coeur du service public, concernant dans ce projet de loi les fonctions régaliennes de l'Etat. Comprenne qui pourra !
Reprenons d'abord les grandes lignes d'une architecture si complexe que, même avec beaucoup de bonne volonté, on s'y perd. Peut-être est-ce intentionnel !
Il y a d'abord le « service universel » défini comme la fourniture à tous d'un service téléphonique de qualité à un prix abordable.
Viennent ensuite les « services obligatoires » de télécommunication, c'est-à-dire l'accès au RNIS, les liaisons louées, la communication de données par paquet, les services avancés de téléphonie vocale, le télex.
Sont rappelées, enfin, les « missions d'intérêt général », à savoir la défense, la sécurité publique, la recherche et l'enseignement supérieur, qui sont confiées à l'Etat.
Voici une première remarque fondamentale : ce découpage préfigure la mort de la notion de service public.
La caractéristique spécifique de cette lente construction juridique et économique, c'est d'avoir posé en principe la mutabilité et l'adaptabilité. A partir de cette conception, chaque génération a pu exprimer ses besoins vitaux, à charge pour l'opérateur public d'y apporter une réponse satisfaisante.
C'était la contrepartie de la situation de monopole et du statut d'agent de la fonction publique concédés à l'entreprise. Celle-ci a toujours conçu sa mission comme devant, non seulement répondre à cette demande sociale, mais encore comme étant susceptible de l'anticiper : l'exemple de l'invention et de la généralisation du Minitel est typique de cet état d'esprit dans l'histoire de France Télécom.
Désormais, un tel miracle ne pourra se reproduire, puisqu'une telle merveille ne pourrait être mise à la disposition des bénéficiaires du « service universel », ce service du pauvre.
Le découpage du service public des télécommunications en trois strates fige une situation et, par là même, il la rend obsolète. Bien sûr, les technologies continueront à progresser à grande vitesse, mais au bénéfice exclusif de ceux qui auront les moyens de payer ces prestations coûteuses. C'est l'esprit même du service public, sous sa double approche traditionnelle, égalité et adaptabilité, que vous reniez.
De plus, vous en donnez une définition restrictive, dans le cadre d'un service dit « universel » qui se résume aux services de base de la téléphonie fil à fil. Or, celle-ci n'est plus l'avenir des télécommunications, vous le savez. Le téléphone mobile se répand comme une traînée de poudre. Le réseau filaire, le câble et l'hertzien se combinent. L'image rejoint le texte. Téléphone, télévision, informatique se rencontrent.
Une autre configuration des télécommunications se met en place sous nos yeux. Vous en excluez le plus grand nombre. Vous refusez l'accès à la modernité à ceux qui en auraient le plus besoin, les plus pauvres et les plus marginalisés, sans oublier les petites entreprises. C'est en cela, surtout, que votre texte est celui d'une majorité de droite.
Au fond - et pour en venir à ma conclusion - c'est ma grand-mère, qui n'use guère du téléphone, c'est le Lozérien, si éloigné de la capitale, c'est l'artisan de ma commune qui paieront pour l'habitant de l'Ile-de-France et pour l'homme d'affaires pressé de donner ses ordres à la Bourse de Hong kong ! (Murmures sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Après cette analyse sans concession de votre projet de loi de « déréglementation » des télécommunications - ce sera ma conclusion - vous imaginez bien, monsieur le ministre, que, avec le groupe socialiste, je me battrai pied à pied pour vous faire renoncer à ce funeste dessein.
Si vous parveniez, malgré tout, à vos fins, sachez qu'un jour, une autre majorité reprendrait le débat, et sur des bases radicalement différentes, car l'histoire du service public est liée à l'histoire de la France. Et je ne désespère pas qu'elle infléchisse même celle de l'Europe !
Aujourd'hui vouée au culte du marché et de la concurrence, notre Union européenne doit s'ouvrir aux notions de « puissance publique » et de « société d'économie mixte ». Elle retrouvera ses racines face à une autre conception du monde que celle qu'inspire l'ultra-libéralisme.
C'est ce combat que j'ai choisi de mener en priorité désormais, avec des parlementaires de toutes les formations politiques, y compris au sein de notre assemblée.
De grâce, monsieur le ministre, ne nous rendez pas la tâche impossible. Relisez le remarquable rapport du député M. Didier Borotra sur « l'Europe et les services publics », publié en octobre 1995. Que, dans ce débat, il vous inspire ! Ce sera ma dernière proposition. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais bien entendu vous proposer de ne pas poursuivre le discours que nous venons d'entendre...
M. Guy Fischer. Cela ne nous étonne pas !
M. Michel Pelchat. ... et d'essayer de trouver d'autres façons d'éclairer notre assemblée que la lampe à huile !
(Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux. Et surtout la démagogie !
M. Claude Estier. Cela vous va bien ! C'est nous, la lampe à huile ? Franchement !
M. Michel Pelchat. Je vous propose de changer de fréquence.
Mon cher collègue, que cela vous plaise ou non, vous ne m'empêcherez pas de dire ce que je pense et de donner mon interprétation du discours précédent.
Je vous propose de changer de fréquence, de passer sur Radio-France et d'écouter la différence, comme disait Roland Faure voilà quelques années.
Une fois de plus, en France, contrairement à ce qui a été dit précédemment, le fait aura précédé le droit, car le projet de loi portant sur la réforme des télécommunications ne vient que confirmer ce qui existe déjà dans ce secteur, l'avènement de la concurrence, simplement en l'organisant et en assurant à la France et à France Télécom une place prépondérante dans ce nouveau système qui est d'ores et déjà en place.
Certes, nous sommes encore dans une situation de monopole de l'opérateur des télécommunications, mais nul n'ignore aujourd'hui les façons de détourner ce monopole. Les exemples sont déjà nombreux, et ils iront en se multipliant !
L'ouverture à la concurrence, à laquelle la France prépare le secteur des télécommunications aujourd'hui, représente une avancée majeure pour le développement de notre économie nationale. En effet, les télécommunications sont présentes dans tous les secteurs économiques, elles jouent un rôle majeur dans la compétitivité de nos entreprises sur les marchés internationaux, et elles occupent une part croissante des richesses produites par les économies développées.
Du cercle de la concurrence, dans lequel il s'agit aujourd'hui de faire entrer les télécommunications, nous attendons, en premier lieu, une baisse des prix.
En effet, nos prix sont 30 p. 100 plus élevés en France que dans les pays ouverts à la concurrence. Nos tarifs peuvent même être jusqu'à six fois à huit fois plus élevés, lorsque l'on considère des services particuliers comme la location de liaisons spécialisées.
Ces tarifs élevés, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, rendent notre marché particulièrement vulnérable à une concurrence étrangère, concurrence qu'aucun moyen juridique ne peut entraver et que les progrès technologiques des prochaines années ne peuvent qu'accélérer.
A titre d'exemple, une communication téléphonique d'une minute entre Paris et Biarritz est facturée à 2,22 francs TTC par France Télécom. Si vous faites appel à des sociétés de call back - permettez-moi de vous faire remarquer que je préfère l'expression française « rappelez-moi », qui signifie la même chose, mais qui est moins usuelle dans le langage courant - elles proposent des tarifs aux alentours de 1,82 franc pour la même communication sans passer par le monopole de France Télécom, ce qui correspond à 30 p. 100 de moins.
Par ailleurs, des pages de télécopie, par exemple, pour une liaison entre Brest et Strasbourg qui durerait trois minutes, seraient facturées 5,93 francs TTC par France Télécom, sans compter l'abonnement, alors que sur Internet ces mêmes pages peuvent être transmises par courrier électronique pour le coût d'une communication locale, soit 1,48 franc TTC les trois minutes, c'est-à-dire quatre fois moins cher.
Voilà ce qui existe aujourd'hui ! Voilà la réalité à laquelle il faut faire face et dans laquelle il faut se positionner pour demain !
Rappelons que les tarifs professionnels dans les pays ouverts à la concurrence ont baissé entre 1990 et 1994 de 8,6 p. 100 tandis qu'ils baissaient seulement de 3,1 p. 100 dans l'ensemble des pays ayant conservé le monopole.
Rappelons aussi que les tarifs résidentiels dans les pays ouverts à la concurrence ont baissé de 3,1 p. 100 entre 1990 et 1994, alors que, au contraire, dans les pays ayant conservé le monopole du service téléphonique, les mêmes tarifs résidentiels ont augmenté de 8,7 p. 100 sur la même période.
Ces exemples illustrent, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la nécessité de baisser les tarifs des télécommunications qui, sous le régime du monopole, ont été maintenus à un nivreau particulièrement élevé.
Il faut rappeler qu'il y aura aussi une amélioration de la qualité des services et une augmentation du nombre de ceux-ci.
En effet, la baisse des prix n'est pas uniquement une nécessité pour faire face aux différentes formes de concurrence qui se développent sur ce marché.
Nous en attendons également une hausse de la consommation avec, notamment, l'émergence, de nouveaux services et aussi une meilleure utilisation des infrastructures existantes. Ces infrastructures doivent ainsi pouvoir contribuer davantage au développement des régions, grâce, par exemple, au télétravail, au télé-enseignement, véritables atouts en terme d'aménagement du territoire.
Là encore, du point de vue de l'aménagement du territoire, nous ne pouvons que souligner le handicap que représentent jusqu'à présent les tarifs trop élevés.
Il faut en particulier constater que les télécommunications représentent, dans les pays qui ont conservé le monopole, une part du produit intérieur brut inférieure à celle que l'on constate dans les pays qui ont d'ores et déjà procédé à la libéralisation de ce secteur. Ainsi, les télécommunications représentent 1,6 p. 100 en France contre 2,1 p. 100 au Royaume-Uni, 2,2 p. 100 aux Etats-unis et 2,4 p. 100 en Suède. Ce moindre développement du secteur se manifeste généralement par plusieurs signes : prix plus élevés que dans les pays cités, moindre diversité des services offerts, taux de croissance et niveau de consommation moins élevés.
La baisse des tarifs va favoriser le développement de nouveaux services et de l'ensemble du marché des télécommunications en France.
Grâce à cela, de nouveaux opérateurs français vont pouvoir émerger, à l'échelle tant nationale qu'internationale, et ceux-ci seront naturellement créateurs de nouveaux emplois. On estime que la croissance des emplois dans le secteur des télécommunications en France serait comprise dans une fourchette de 70 000 à 135 000 emplois dans les cinq prochaines années.
Tels sont les bénéfices que l'on est en droit d'attendre de cette ouverture à la concurrence, qui permettra à la France de continuer à occuper une place de premier rang, sur un secteur aux dimensions de plus en plus internationales et où, partout, les monopoles cèdent la place au dynamisme du marché.
Et l'enjeu du projet de loi sur la réglementation des télécommunications est bien là, monsieur le ministre, mes chers collègues : faire en sorte que, dans cet environnement international et concurrentiel, nos opérateurs nationaux occupent demain les premiers rangs européens et mondiaux.
Ce texte a été enrichi à l'Assemblée nationale de deux avancées majeures.
Premièrement, a été introduite une date butoir pour achever la résorption du déséquilibre tarifaire de France Télécom.
Ce déséquilibre représente à ce jour, selon l'exposé des motifs du projet de loi qui nous est présenté, de 9 milliards à 14 milliards de francs de charge pesant sur l'ensemble du secteur des télécommunications. Il s'agit là d'un lourd handicap pour tous les opérateurs et il serait utile, pour permettre l'essor attendu de l'ouverture à la concurrence, que ce déséquilibre soit résorbé le plus rapidement possible. Il peut l'être pour les deux raisons suivantes.
D'abord, le relèvement de 20 francs environ de l'abonnement téléphonique qu'exige la résorption du « déficit d'accès » serait compensé par la baisse globale des tarifs de communications.
Ensuite, des dispositions du projet de loi, dans le cadre du fonds de service universel, permettraient, notamment aux foyers les plus démunis, de bénéficier d'une réduction, par exemple de moitié du prix de l'abonnement. De la sorte, les effets de la hausse de l'abonnement seraient totalement compensés par la baisse des tarifications.
Par ailleurs, l'élimination du « déficit d'accès » contribue à assainir l'économie entière du secteur des télécommunications, comme l'a souligné le groupe d'experts présidé par le directeur général de l'INSEE.
En effet, on constate le poids que représente la contrainte économique du « déficit d'accès » avec l'illustration du développement tardif du téléphone mobile en France.
On ne peut que regretter que, au termes d'abonnés, la France, avec 2,54 p. 100, arrive derrière des pays comme l'Irlande, le Portugal, l'Espagne et la Grèce.
On voit là combien le handicap du déséquilibre tarifaire de France Télécom, qui a représenté jusqu'à 50 p. 100 des prix pratiqués par les opérateurs de téléphone mobile, freine le développement dynamique de notre marché des télécommunications. Le résorber représente donc aujourd'hui une urgente priorité.
La résorption du « déficit d'accès » est également d'une urgente priorité pour l'opérateur public, comme le dit d'ailleurs son président, car il se retrouve désormais face à une concurrence qui ne manquerait pas de profiter des tarifs trop élevés de France Télécom pour écrémer le marché interurbain et lui prendre la place importante qu'il occupe aujourd'hui sur ce secteur et qui ne demande qu'à se développer.
Dans l'attente de ce rééquilibrage, pour permettre le dynamisme nécessaire au développement des nouveaux services de radiocommunications mobiles, l'Assemblée nationale a adopté une seconde mesure sage : elle consiste à exonérer les opérateurs nationaux de radiocommunications mobiles des versements dus au titre du déséquilibre tarifaire.
Cette mesure ne constitue nullement un cadeau que nos collègues députés auraient offert aux opérateurs. Elle représente simplement la juste contrepartie du développement du trafic téléphonique qu'engendrent les communications mobiles et représente une initiative salutaire car, en allégeant les charges qui pèsent sur les opérateurs, elle est susceptible de permettre à la France de rattraper son retard ; il est donc nécessaire que cette mesure ne soit pas remise en cause au Sénat.
M. Gérard Delfau. Merci pour elle !
M. Michel Pelchat. Je vous en prie, mon cher collègue !
Ce retard est aujourd'hui, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous le savez bien, dommageable à l'aménagement du territoire.
Il convient donc de trouver un juste équilibre entre les contraintes que subissent actuellement ces opérateurs - je pense notamment au niveau élevé des charges d'interconnexion - les engagements que nous souhaitons leur voir prendre et la très rapide évolution des technologies. A ce sujet, j'aurai d'ailleurs l'occasion de défendre un amendement lors de l'examen des articles.
Au-delà de tout cela, cette loi, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, possède un caractère tout à fait original. Il en faudrait d'autres de la même veine !
En effet, alors que tout le monde se pose de grandes questions pour favoriser l'emploi, vous nous proposez, monsieur le ministre, une loi qui va produire trois effets, trois effets qui, jusqu'à présent, ont toujours été jugés contradictoires, mais qui, pour cette fois, sont complémentaires et même s'additionnent, à savoir la création d'emplois, l'augmentation de la consommation et les prélèvements obligatoires.
Commençons par le premier effet, la création d'emplois.
Nous l'avons vu, dans les cinq prochaines années, la croissance des emplois dans le secteur des télécommunications devrait être comprise entre 70 000 et 135 000 emplois.
M. Guy Fischer. C'est à prouver !
M. Michel Pelchat. Sur le marché du téléphone mobile, notamment, la création d'emplois devrait être très importante.
A titre d'exemple, citons le Royaume-Uni. Le bilan de l'ouverture à la concurrence montre que l'emploi a augmenté du fait du succès grandissant de la téléphonie mobile. En effet, dans ce pays, qui compte environ 5 millions d'abonnés, les emplois liés directement ou indirectement à cette activité et qui étaient au nombre de 42 000 en 1994 pourraient passer à 90 000 d'ici à l'an 2000, c'est-à-dire doubler !
J'en viens au deuxième effet, l'augmentation de la consommation.
Les études qui ont été menées en 1993 pour le ministère des télécommunications, vous le savez, monsieur le ministre, ont montré qu'à l'horizon 2000 le marché des télécommunications devrait, dans notre pays, connaître une croissance de près de 7 p. 100 par an pour l'ensemble des services, ce qui est considérable.
Enfin, le troisième effet est la réduction des prélèvements obligatoires.
Avec la mise en concurrence des opérateurs de télécommunication, on va abaisser le coût des communications, et donc réduire les prélèvements obligatoires. M. Larcher, dont je salue le rapport admirable, ...
M. Gérard Larcher, rapporteur. Merci !
M. Michel Pelchat. ... nous le dit bien : la baisse des tarifs « devrait favoriser l'allégement des charges des entreprises ».
Création d'emplois, réduction des prélèvements obligatoires, augmentation de la consommation, voilà, monsieur le ministre, un triptyque que l'on n'arrive jamais à réaliser sans que cela coûte de l'argent public. Eh bien ! là, vous l'avez fait, et vous êtes le premier !
Pourvu que de nombreuses lois comme celle-ci nous soient présentées, non pas pour notre satisfaction personnelle, mais pour l'avenir de notre pays. Merci, monsieur le ministre.
Merci, mes chers collègues, de voter cet excellent texte. Pour ce qui les concerne, les Républicains et Indépendants le feront avec joie ! (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, concilier service public et concurrence, voilà une tâche difficile mais nécessaire. Il nous appartient de trouver un équilibre entre ces deux réalités au bénéfice des utilisateurs et des clients.
Je ne reviendrai pas, dans mon intervention, sur les points de détail qui ont été très bien exprimés dans l'excellent rapport de notre collègue M. Gérard Larcher.
Monsieur le ministre, pour nous, France Télécom, entreprise majeure, ne doit pas, dans ce nouveau contexte, subir les aléas du marché mondial, et non plus seulement européen, comme on veut bien le dire, sans disposer, et c'est bien là l'essentiel pour sa pérennité, des armes indispensables à l'ouverture à la concurrence.
Il ne s'agit en aucun cas de démanteler l'opérateur national. L'adaptation sera le gage de son avenir et non pas seulement de sa survie. Je crois que le changement de statut doit être accompagné d'un changement de culture. Il faudra bien qu'il se traduise en termes de maintien d'emplois, mais aussi de créations d'emplois. En fait, il aura comme conséquence d'amener sur le marché de la concurrence une entreprise comme les autres.
A ce propos, monsieur le ministre, j'aurai l'occasion de défendre un amendement qui permettra, je l'espère, à cette entreprise redevenue une entreprise normale de s'acquitter de sa taxe professionnelle au profit des collectivités locales, comme cela devrait être le cas aujourd'hui, j'en profite pour vous le rappeler, monsieur le ministre.
Si vous pouviez nous donner l'assurance, au moment où M. le Premier ministre s'est engagé à procéder à une réforme de la taxe professionnelle, que ce problème sera réglé à l'occasion de ce projet de loi, ce serait un gage de la volonté du Gouvernement de revoir notre fiscalité.
Le projet de loi que vous nous soumettez définit clairement la notion de service public. Il se place dans une perspective d'évolution et d'adaptation conformes aux principes fondamentaux constituant le coeur même de la notion d'un service public.
Celui-ci ne devrait-il pas, tout simplement, rechercher la satisfaction de la clientèle, et c'est bien là l'essentiel pour une entreprise sur le marché de la concurrence ? « Le client est le personnage le plus important de l'entreprise », cela a été dit avant moi, mais mérite d'être répété.
Notre service public ne peut pas ignorer l'Europe ; c'est bien là toute la question.
Nous assistons à l'éclosion d'un nouveau concept : le service universel, qui pourrait devenir une sorte de service public européen. Sa définition s'appuie sur quatre éléments : couvrir des besoins vitaux et fondamentaux ; être accessible à tous ; fournir des prestations abordables ; fournir des prestations de qualité.
On pourra objecter que le service universel n'est pas public et que ses points d'application envisagés - énergie, télécommunications, services postaux - doivent s'entendre dans un environnement concurrentiel.
A quoi l'on peut rétorquer que, si le service universel n'est pas obligatoirement public, il peut l'être parce que sa finalité première est d'être un instrument de cohésion sociale.
Si le développement futur de l'Union européenne accorde une priorité aux préoccupations sociales et à une amélioration de l'harmonie sociale, rien n'interdit de penser que, par affinements successifs, service public et service universel finiront par se ressembler. Le service public à la française est aujourd'hui un bon article d'exportation qui justifie que l'on s'y attarde.
La qualité du service universel exige une observation attentive de l'évolution des comportements et des besoins des usagers.
Il est de l'intérêt public de préparer notre économie aux nouvelles conditions du marché par un rééquilibrage des tarifs du service du téléphone, tout en respectant les exigences de l'aménagement du territoire.
Si, à l'heure de l'ouverture à la concurrence, c'est-à-dire au 1er janvier 1998, il apparaît que l'équilibre économique et financier du service universel ne pourra être atteint en raison des règles imposées aux opérateurs autorisés, il sera alors indispensable de simplifier et de limiter dans le temps les mesures visant à compenser une charge plaçant France Télécom dans une situation inégale.
Dans le cadre du monopole, la loi avait confié à la commission supérieure du service public des postes et télécommunications, à laquelle j'ai l'honneur d'appartenir, le soin de cette mission. Le projet de loi que nous examinons la maintient tout naturellement dans un marché ouvert. Cette commission, par sa composition, doit apporter les garanties d'expertise et de neutralité suffisantes et demeurer ainsi une sorte de « conscience du service public ». J'ai déposé un amendement visant à accroître la représentation du Parlement au sein de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications, afin d'assurer la parité entre les deux chambres, qui seront représentées, chacune, par sept membres.
Le monde est bel et bien devenu un village planétaire : ce projet de loi scelle la convergence entre les télécommunications, l'informatique et les médias électroniques.
Le secteur des télécommunications est certainement l'un des rares secteurs dont la croissance est plus que prometteuse. En dix ans, le trafic mondial a été multiplié par 2,5. Dans moins de cinq ans, plus de 800 millions de lignes auront été installées sur l'ensemble du globe.
Si la transmission de la voix représente et représentera encore 80 p. 100 des recettes, il ne faut pas négliger la forte demande de transmission de données aux entreprises qui s'installe de manière de plus en plus évidente.
La France a, dans le domaine des technologies de transmission des données, des images et du son, une avance importante. Elle est en mesure de jouer un grand rôle.
Nous ne devons à aucun moment refaire l'erreur que nous avons commise avec le cinéma. Nous avons laissé aux Américains le soin de traduire en une industrie prospère l'idée géniale des frères Lumière. Ne laissons pas l'industrie des nouvelles technologies de l'information aux mains monopolistiques des Américains, sous le seul prétexte qu'ils sont à l'origine de la création d'Internet.
Nous ne sommes pas dépourvus d'atouts. Cinquante ans après sa création, le CNET - le Centre national d'études des télécommunications - peut se vanter d'être l'un des principaux centres de recherche mondiale. Il peut également être fier d'avoir lancé très tôt des programmes de recherche dans le domaine de la télétransmission, de la transmission et de la commutation numérique. Cette démarche originale a permis de gagner une génération de matériel et, surtout, de passer d'une position de « retardataire » à une position de pointe, si ce n'est de leader.
Le CNET doit désormais s'adapter à un nouveau contexte. Pour autant, il doit pouvoir poursuivre la voie engagée et demeurer un laboratoire performant dans une entreprise appelée à être déréglementée.
Aujourd'hui, tous les exploitants sont conscients de l'importance du marché des liaisons spécialisées. Les alliances sont, en ce domaine, fondamentales pour proposer à une clientèle stratégique mondiale les services qu'elle attend. France Télécom, avec ses partenaires de demain, disposent de grands atouts sur ce créneau qu'il convient d'exploiter sans tarder.
Il sera alors temps de définir des règles relatives aux nouveaux services ouverts au public, notamment dans le domaine du multimédia. Ainsi conviendra-t-il de clarifier la répartition des compétences entre l'autorité de régulation des télécommunications et le Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Ce projet de loi qui vise à réglementer les télécommunications permet surtout de prévoir plus facilement quel sera l'avenir de la future société France Télécom.
L'usager consommateur du service public n'est pas encore devenu roi, mais il n'est plus un quelconque sujet. Il s'agit d'une évolution spectaculaire, que mes collègues du groupe de l'Union centriste et moi-même approuvons totalement. C'est pourquoi, monsieur le ministre, nous voterons le projet de loi qui nous est soumis. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Saunier.
M. Claude Saunier. Avant de développer mon argumentation, je voudrais vous dire, monsieur le ministre, dans quel état d'esprit j'aborde personnellement, tout comme un certain nombre de mes collègues, ce débat. Nous ne l'abordons pas avec la frilosité de parlementaires soucieux de défendre des droits acquis, de maintenir un ordre établi et de pratiquer une obstruction inspirée essentiellement par l'immobilisme et le conservatisme. Non, monsieur le ministre, nous l'abordons, les uns et les autres, avec la passion de ceux qui ont mesuré l'importance de la révolution technologique, économique et culturelle majeure qui éclate littéralement sous nos yeux.
Nous l'abordons aussi - je le dis avec regret - en constatant que notre société, en particulier la classe politique, n'a peut-être pas, au cours de ces dernières années, accordé suffisamment d'intérêt à la réflexion collective sur ce qui est le creuset du monde de demain.
Je l'aborde enfin avec un esprit qui tente, depuis quelques années, de comprendre le sens de ce qui se prépare sous nos yeux, avec une curiosité permanente sur l'innovation, avec une sorte de fascination sur le génie inventif de l'humanité, qui s'exprime au travers de ce que nous découvrons chaque jour, mais aussi avec lucidité et perplexité devant ce que la seule technologie nous apporte de meilleur et de pire.
Si j'évoque très librement cet état d'esprit, c'est non pas évidemment pour étaler des impressions personnelles, mais parce que je sais que cette approche est largement partagée par un grand nombre de nos collègues sur les différents bancs de notre assemblée.
Monsieur le ministre, c'est au nom de cette passion, au nom de cette conviction que je vous livre mes impressions quasiment au terme de ce débat et non pas à la lumière de je ne sais quelle lampe à huile que l'on a évoquée voilà quelques instants.
Monsieur le ministre, nous ne sommes pas favorables à votre proposition.
Nous ne le sommes pas, d'abord parce que vous avez utilisé une méthode contestable. Hier, ici même, vous nous avez présenté votre projet de loi comme un texte uniquement technique, guidé par les circonstances, en un mot anodin.
M. François Fillon, ministre délégué à la poste, aux télécommunications et à l'espace. J'ai dit le contraire !
M. Claude Saunier. Ce n'est pas la première fois, monsieur le ministre...
M. François Fillon ministre délégué. J'ai dit qu'il s'agissait d'une réforme historique !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il ne vous a pas écouté !
M. Claude Saunier. Nous avons déjà eu l'occasion d'entendre des propos de même nature, ici même, voilà quelques semaines.
Ainsi, le texte qui nous est soumis, sous une apparence de grande complexité technique, est en fait un texte éminemment politique. Il l'est par ses origines. Il l'est par son inspiration. Il l'est par les conséquences considérables que son application entraînerait dans la vie de nos concitoyens, pour le développement des entreprises et pour l'avenir de la nation.
Or nous constatons en fait un véritable décalage, voire un grand écart, entre l'importance du sujet abordé et la présentation, presque anodine, de dispositions techniques.
Cela relève d'une méthode législative que nous contestons, monsieur le ministre et qui soulève un certain nombre de questions, questions qui ont également été posées par vos propres amis politiques.
En effet, en quelques mois, le Parlement a été invité à se prononcer sur une série de textes qui, tous, sont présentés comme des mesures techniques de circonstances.
Ainsi, le 20 février nous avons examiné un texte autorisant les expérimentations. Ayant participé au débat, j'ai le souvenir de la façon dont vous l'avez abordé vous-même.
Cette semaine, nous discutons de la future réglementation des télécommunications.
La semaine prochaine, nous débattrons du statut de France Télécom.
Hier soir, monsieur le ministre, vous nous avez annoncé l'intention du Gouvernement de définir quelques règles de déontologie, en effet indispensables, pour l'exploitation d'Internet.
Enfin, dans quelques semaines, c'est le chantier de la télévision numérique que nous allons ouvrir.
En un mot, alors que le secteur des télécommunications entre dans une phase radicalement nouvelle de son histoire, alors que notre société dépend de plus en plus de ces nouvelles technologies, qu'il s'agisse d'aménagement du territoire, de formation, de culture, d'économie, le Gouvernement refuse, de fait, d'organiser le grand débat parlementaire qu'exige l'ampleur du sujet.
Le débat que nous venons d'avoir depuis hier soir témoigne de cette contradiction entre l'affichage purement technique et le véritable enjeu de ce projet de loi.
A l'évidence - et c'est, je crois, un point de vue assez largement partagé - le Gouvernement n'a pas saisi l'opportunité d'un grand débat d'intérêt national. Il a choisi, excusez-moi l'expression, le bricolage législatif. Il navigue à vue, sans stratégie.
C'est donc, d'abord, sur le plan de la méthode que nous contestons formellement votre projet de loi. Mais nous le contestons, bien entendu aussi, sur le fond, sur son contenu, que nous considérons comme dangereux.
Vous justifiez votre texte par des impératifs européens. L'explication est un peu courte !
Le calendrier européen n'imposait nullement la hâte avec laquelle vous nous proposez la dérégulation, puisque le rendez-vous est fixé au 1er janvier 1998.
Ce délai aurait pu permettre à la France d'ouvrir, au sein de l'Europe, le grand débat politique qu'exigerait un tel sujet. Pourquoi tant de hâte ?
En réalité, nous avons la réponse. Nous l'avons entendue ici même. Cette hâte traduit une attitude de soumission à la logique libérale, qui constitue l'idéologie de référence du projet de loi.
Il est permis de s'interroger sur les grandes déclarations relatives auservice public à la française faites par les voix les plus autorisées de l'Etat alors que, dans le même temps, nous assistons au démantèlement systématique de ce service public.
Nous ne sommes pas loin, j'ai le regret de le dire, du double langage.
Alors, on invoque des raisons techniques, et ces arguments méritent, en effet, d'être examinés attentivement.
On nous dit que le monopole actuel de France Télécom tombera de toute façon très rapidement, du fait de la mise en place de nouveaux services portés par la conjonction du numérique et des constellations de satellites à orbite basse, par exemple.
Il s'agit effectivement là d'une donnée technique dont j'ai eu l'occasion, voilà quelques jours, de vérifier la réalité, avec quelques-uns de mes collègues, M. Trégouët en particulier, au CNES, chez Matra Space et chez Alcatel Space. Nous avons vu ce que les ingénieurs et les techniciens étaient en train de nous préparer : une nouvelle révolution, un nouveau bouleversement, dont il faut tenir compte.
Fallait-il pour autant, par l'organisation de la dérégulation dans les services existants, prendre le risque de déstabiliser l'opérateur public français ?
Fallait-il introduire le loup dans la bergerie, par l'ouverture massive des services classiques à des groupes privés de taille internationale ?
Sur ce point, ni vos arguments, monsieur le ministre, ni ceux du rapporteur de la commission, M. Gérard Larcher, ne nous ont convaincus, c'est le moins que l'on puisse dire !
M. Robert Pagès. Très bien !
M. Claude Saunier. J'en viens à ce que je considère comme la déstabilisation d'un bon service.
Nous aurions pu être un peu plus sensibles aux vertus de l'ouverture à la concurrence si notre opérateur public avait été mauvais ; après tout, il s'agit de l'intérêt national ! Si France Télécom avait fait preuve d'immobilisme, de mauvaise gestion ou d'incapacité à innover, on aurait pu, en effet, se poser la question.
Or tel n'est pas le cas. D'ailleurs, dans les propos de tous les orateurs, à quelque groupe qu'ils appartiennent, comme dans les vôtres, monsieur le ministre, ce ne sont qu'éloges sur l'efficacité technique et commerciale de notre opérateur public.
Alors, encore une fois, pourquoi en organiser la déstabilisation ? Et dans l'intérêt de qui ?
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Claude Saunier. S'agissant de l'aménagement du territoire, les témoignages, les interrogations, les souhaits ont été nombreux au cours du débat, et pas seulement sur les travées de l'opposition. Vous y répondez par le principe du service public universel. Fort bien, mais tel que celui-ci est aujourd'hui entendu, la réponse est un peu courte !
On a parlé du « RMI du téléphone ». La formule est cruelle, mais éloquente.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Elle est facile !
M. François Fillon, ministre délégué. Elle est surtout cruelle pour son auteur !
M. Claude Saunier. Le service universel tel que vous nous le présentez est en effet bien maigre pour entrer de plain-pied dans la société de l'information que l'on nous annonce en respectant les principes de l'égalité républicaine.
Concrètement, on le sait, les entreprises, y compris les plus petites, vont, demain, consommer non pas de la téléphonie vocale mais, massivement, des capacités de transport d'information.
La dérégulation qui nous est proposée, parce qu'elle est intrinsèquement fondée sur une vision financière pour les opérateurs qui vont s'emparer des nouveaux réseaux, ne peut manquer depénaliser lourdement les zones rurales et les régions excentrées.
Des collègues ont, par ailleurs, bien mis en relief les conséquences de la dérégulation sur la tarification et sur l'emploi, en particulier à la lumière des expériences étrangères.
S'agissant de l'emploi, nous devrons faire preuve de beaucoup de circonspection pour apprécier avec justesse les effets du bouleversement technique et organisationnel qui nous attend.
A plusieurs reprises, on a évoqué les grands talents des ingénieurs du CNET. Je voudrais justement, avant de conclure, vous interroger, monsieur le ministre, sur l'avenir de la recherche et de la formation à France Télécom.
La seule logique financière que l'Etat impose à son grand opérateur dispense celui-ci de missions d'intérêt général comme la recherche et la formation. Puisqu'on lui impose de faire de l'argent, sa mission n'est plus ni de chercher ni de former.
On sait pourtant que notre avenir collectif, notre avenir national, se joue pour une part dans les laboratoires du CNET ou du CCETT, le centre commun d'études de télédiffusion et de télécommunications.
Nous souhaiterions savoir précisément quelles sont, sur ce point, les intentions du Gouvernement.
Vous l'avez deviné, monsieur le ministre, notre opposition au projet que vous nous soumettez est déterminée.
Cette opposition tient autant à l'approche et à la méthode que vous avez retenues qu'au contenu d'un texte qui organise la dérégulation, autant aux multiples conséquences négatives de ce choix pour la nation qu'à la nature idéologique profonde de cette option.
Je le dis très clairement : notre position n'a rien à voir avec un quelconque conservatisme. Nous mesurons comme vous les enjeux technologiques, économiques culturels et sociaux, enjeux considérables, qui se profilent derrière des questions apparemment techniques. C'est précisément pour cela que nous vous demandons de revoir votre méthode et votre projet de loi.
Monsieur le ministre, il s'agit d'un enjeu majeur pour notre pays. Ne continuez pas à jouer à la roulette russe avec l'avenir de la nation ! (Applaudissements sur les travées socialistes. - M. Robert Pagès applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Lagourgue.
M. Pierre Lagourgue. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 1er janvier 1998, le secteur des télécommunications sera ouvert à la concurrence.
La fin du monopole de l'Etat résulte, certes, des engagements européens de la France mais aussi et surtout de l'évolution technologique qui, développant chaque jour davantage les possibilités offertes par les communications satellitaires ou par les réseaux hertziens, a rendu nécessaire la libéralisation du marché, de manière que les attentes du public soient mieux satisfaites et que la compétitivité de nos entreprises soit renforcée dans ce domaine.
Cette étape se trouve franchie avec ce projet de loi qui fixe les règles du jeu appelées à s'appliquer à partir de 1998.
L'intitulé du projet indique bien qu'il s'agit de définir les conditions d'exercice d'un service public des télécommunications dans un secteur qui sera ouvert à la concurrence.
Fort heureusement, France Télécom est confirmé dans sa vocation d'entreprise de service public puisqu'il est nommément désigné comme l'opérateur du « service universel des télécommunications », c'est-à-dire celui qui est chargé de fournir à tous un service téléphonique de qualité et à un prix abordable.
En l'état actuel, seul France Télécom est capable d'assurer, dans sa totalité et sur l'ensemble du territoire, la prise en charge de ce service universel des télécommunications, dont le cahier des charges détermine notamment, aux termes de l'article L. 35-2 du code des postes et télécommunications, « les obligations tarifaires nécessaires, d'une part, pour permettre l'accès au service de toutes les catégories sociales de la population et, d'autre part, pour éviter une discrimination fondée sur la localisation géographique ».
Ce dernier point m'amène directement à l'objet principal de mon propos : la tarification des communications dans les départements d'outre-mer.
La discrimination fondée sur la localisation géographique existe encore, hélas ! à l'encontre de l'outre-mer, bien que, techniquement, elle ne se justifie plus. En effet, l'utilisation des satellites a quasiment aboli le coût lié à la distance, comme l'a reconnu le rapport de l'inspection générale des télécommunications que vous m'avez communiqué, monsieur le ministre. Permettez-moi de citer brièvement quelques extraits des conclusions de ce rapport, qui portait sur « l'offre de services et la tarification dans les départements d'outre-mer » :
« Le constat que nous avons fait est que le tarif des communications entre la métropole et la Réunion est élevé, trop élevé, si l'on se réfère aux tarifs internationaux et aux tendances tarifaires dans lesquelles la chute des coûts de la transmission conduit à tenir de moins en moins compte de la distance.
« Dans un contexte de libéralisation des télécommunications, des offres alternatives et concurrentes à celles de France Télécom ne manqueront pas d'apparaître si une nouvelle stratégie n'est pas fixée par et pour France Télécom à l'horizon de 1998.
« S'il est une partie du territoire national où la notion de "service universel" a un sens, c'est bien dans les DOM, plus que partout ailleurs, et la Réunion n'y fait pas exception. »
Certes, plusieurs baisses tarifaires sont intervenues à la suite de mes interventions, et je saisis cette occasion pour vous en remercier, monsieur le ministre. Cependant, les tarifs des communications interurbaines et internationales demeurent élevés.
Ainsi, certaines communications internationales coûtent plus cher à partir de la Réunion qu'à partir de l'île Maurice. De même, les communications entre la métropole et la Réunion sont souvent plus coûteuses que les communications internationales.
Je ne défends pas aveuglément la position de France Télécom, car la libéralisation du secteur des télécommunications est réalisée avant tout dans l'intérêt des consommateurs, qui attendent, à juste titre, une baisse des tarifs. Mais je trouverais regrettable que France Télécom, par un comportement malthusien, que nous avons rencontré chez d'autres sociétés de service public, ne se donne pas les moyens de conserver la place excellente qui est la sienne parmi les opérateurs mondiaux. En tout cas, je souhaite que cette place soit maintenue.
Je tenais simplement, monsieur le ministre, à attirer votre attention sur la nécessité absolue de poursuivre et même d'accélérer la politique d'alignement des tarifs téléphoniques, afin que cet alignement soit achevé avant l'échéance de 1998, faute de quoi les départements d'outre-mer risqueraient fort de s'adresser à d'autres opérateurs, ce qui serait vraiment regrettable. Je rappelle d'ailleurs que cet alignement avait fait l'objet d'un engagement de la part de M. Jacques Chirac lors de la campagne pour l'élection présidentielle.
Je crains en effet que, du fait de l'irruption de la concurrence, les liaisons avec les DOM n'échappent à l'opérateur public. Je serais le premier à le regretter.
Le président de France Télécom a estimé que ce projet de réglementation des télécommunications contenait de très bonnes dispositions qui permettront à ce secteur de s'intégrer parfaitement dans son environnement mondial.
C'est en tout cas avec cette conviction que je voterai ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et des Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. François Fillon, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Je voudrais tenter de répondre aux très nombreuses questions qui ont été posées par les différents orateurs au cours de ce débat extrêmement riche, qui avait, il est vrai, été ouvert par un rapport de très grande qualité, présenté par M. Gérard Larcher.
Je m'adresserai d'abord à M. Saunier, à propos de la méthode. Je ne sais pas si, hier soir, vous m'avez écouté ; en tout cas, je suis certain que vous ne m'avez pas entendu.
M. Claude Saunier. Vous ne m'avez pas convaincu !
M. François Fillon, ministre délégué. J'ai essayé, tout au long de la présentation de ce texte, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, d'en souligner le caractère essentiel ; j'ai même utilisé, de manière peut-être un peu excessive, le mot d'« historique ». Je n'ai donc jamais tenté de présenter ce projet de loi comme anodin. J'ai, au contraire, pris soin de montrer qu'il constituait un tournant considérable dans l'histoire des télécommunications françaises, puisqu'il tend à mettre fin au monopole de l'Etat en matière de téléphonie.
J'ai veillé à ce que ce texte fasse l'objet d'une consultation publique très large. Organisée par la direction générale des postes et télécommunications, elle a duré près d'une année. Jamais une telle consultation n'avait été organisée sur un sujet comme celui-là. Elle a ainsi permis à tous les acteurs du secteur des télécommunications de s'exprimer.
Enfin, j'ai veillé à ce que ce texte soit négocié - j'emploie ce terme à dessein - avec les organisations syndicales qui l'ont souhaité.
Je tiens à vous faire remarquer, à ce propos, qu'une seule organisation syndicale - il faut lui rendre cet hommage - s'est opposée au projet de loi de réglementation des télécommunications. Elle avait d'ailleurs, en avril dernier, appelé à la grève les personnels concernés. Il n'en va pas de même pour le changement de statut de France Télécom, dont nous débattrons prochainement.
J'en viens aux questions qui ont été soulevées au cours de ce débat.
MM. Trucy et Hoeffel ont tout d'abord évoqué la portabilité des numéros, c'est-à-dire la possibilité donnée aux usagers de conserver tout au long de leur existence leur numéro de téléphone, qu'ils changent de domicile ou d'opérateur. Voilà qui permet de faciliter l'ouverture à la concurrence.
La portabilité des numéros, qui est une disposition très importante, sera mise en oeuvre en deux phases pour des raisons qui sont essentiellement d'ordre technique.
Lors de la première phase, qui s'étendra entre 1998 et l'an 2000, la portabilité sera autorisée en cas de changement d'opérateurs mais non en cas de changement de domicile. Cette portabilité sera fondée a priori sur la technologie du transfert d'appel sous réserve que, d'ici là, une autre technologie plus efficace ne se développe. Les coûts de cette première phase seront entièrement supportés par le nouvel opérateur choisi par l'abonné qui souhaitera avoir accès à la portabilité.
Dans une deuxième phase, à partir de 2001, lorsque les ingénieurs et les techniciens auront mis au point les logiciels permettant d'adapter les terminaux à cette portabilité des numéros, cette dernière sera généralisée. Elle sera fondée sur ce qu'on appelle « la technologie des réseaux intelligents » et son coût sera négligeable puisque cette technologie sera intégrée dans la conception des futurs réseaux et des futurs centraux.
M. Trucy a évoqué les critères qui permettront de déterminer les catégories spécifiques susceptibles de bénéficier d'un tarif privilégié. Ces critères ne sont pas aujourd'hui précisément arrêtés, mais je puis d'ores et déjà indiquer qu'ils reposeront sur des conditions de ressources et sur l'existence de handicaps.
Nous voulons corriger les inconvénients de l'actuel tarif appliqué par France Télécom aux abonnés ayant peu de communications. En effet, attribué sans condition de ressources, ce tarif était surtout avantageux pour les propriétaires de résidences secondaires. Tel n'était pas l'objectif recherché à l'origine par l'opérateur.
MM. Trucy, Hérisson et Saunier se sont interrogés à la fois sur l'avenir de la recherche, notamment du CNET, et sur celui de l'enseignement supérieur.
S'agissant du CNET, je tiens à rassurer le Sénat, en particulier ceux d'entre vous qui ont évoqué cette question. Le CNET est et restera l'organisme de recherche et de développement de France Télécom. D'ailleurs, l'essentiel de son activité est aujourd'hui lié à la stratégie de l'opérateur et ses équipes demeureront au sein de l'entreprise.
De même, France Télécom restera dans les mains de l'Etat puisque celui-ci conservera 51 p. 100 du capital et continuera de faire l'objet d'un contrat de plan, dans lequel seront reconduites ses actuelles obligations en matière de recherche.
Parallèlement, la loi prévoit que les missions de recherche publique dans le domaine des télécommunications, c'est-à-dire celles qui, au fond, ne relèveront plus de l'opérateur, seront exercées par l'Etat ou pour le compte de celui-ci et sous sa responsabilité, dans le cadre de contrats qui préciseront les programmes et les moyens de financement.
Le CNET pourra naturellement être partie prenante dans cette recherche publique au côté d'autres organismes, tels que l'Institut national de recherche en informatique et en automatique, l'INRIA, les laboratoires universitaires, le CNRS et certains laboratoires industriels.
S'agissant de l'enseignement supérieur, les choses doivent être très claires. L'enseignement supérieur relèvera exclusivement de la responsabilité de l'Etat si le Sénat, après l'Assemblée nationale, vote le projet de loi qui lui est soumis.
J'ai confié à l'inspection générale des finances et à l'inspection générale des postes et télécommunications une mission sur la future organisation du service public de l'enseignement supérieur des télécommunications.
Cette mission, qui s'est achevée, a permis de préciser les charges financières afférentes à cette mission de service public. Je puis donc vous préciser que les écoles seront organisées en un établissement public administratif qui sera placé sous la tutelle du ministre chargé des télécommunications. Chacune de ces écoles sera, en outre, dotée de l'autonomie nécessaire à l'accomplissement de ses missions.
En outre, la loi prévoit explicitement que le financement de l'enseignement supérieur, à compter de l'exercice budgétaire de 1997, sera assuré par l'Etat. Celui-ci veillera à ce que les crédits octroyés garantissent la haute qualité de l'enseignement dispensé.
Enfin, les personnels participant à ces missions seront mis à la disposition de l'établissement public. M. Trucy s'est inquiété de l'application du droit de la concurrence au secteur des télécommunications. Il s'est demandé si nous n'étions pas en train de développer un droit spécifique de la concurrence en ce domaine.
Je veux, sur ce point, vous rassurer, monsieur le sénateur. Un droit spécifique ne sera pas créé. Il sera simplement fait application du droit général de la concurrence. Celui-ci s'appliquera pleinement et aucune autorité responsable de son élaboration ou du contrôle de son application ne sera dessaisie.
L'autorité de régulation n'a pas pour mission de définir un droit sectoriel de la concurrence. Elle aura cependant la faculté de saisir le conseil de la concurrence, pour avis ou au contentieux, si elle a un doute sur le respect des règles de la concurrence.
A court terme, il faudra veiller à développer la concurrence et le marché mais, à long terme, cet objectif deviendra moins essentiel.
M. Trucy s'est également inquiété de la non-fixation par la loi des coûts d'interconnexion. Celle-ci précise effectivement qu'ils seront déterminés par un décret d'application. La loi, comme le prévoit la Constitution, pose un principe général. Elle précise que, pour les exploitants qui devront publier leurs tarifs d'interconnexion, ces tarifs devront rémunérer l'usage effectif du réseau de transport et de desserte et refléter les coûts correspondants.
Elle prévoit, ensuite, qu'un décret déterminera plus précisément les principes de tarification auxquels les accords d'interconnexion devront satisfaire.
Enfin, l'autorité de régulation veillera au respect des règles générales fixées par l'Etat.
Vous comprendrez bien, monsieur Trucy, qu'il n'était pas possible de trancher, dans la loi, des questions économiques complexes, telles que les calculs de coûts à long terme.
M. René Trégouët s'est inquiété du raccordement des écoles aux autoroutes de l'information et aux nouveaux réseaux. Ce point constitue effectivement - et nous avons souvent eu l'occasion d'en parler ensemble - une priorité pour le Gouvernement.
Je soutiens donc pleinement la proposition de M. le rapporteur et de M. Trégouët tendant à faire préciser, par le schéma sectoriel des télécommunications prévu par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995, les moyens qui permettent d'assurer à ces établissements un accès préférentiel à ces services.
Je vous rappelle d'ailleurs que j'ai déjà pris un certain nombre de décisions en ce domaine, notamment à l'occasion d'une communication en conseil des ministres en mars dernier. Il s'agit de mettre en réseau, d'ici à la fin de 1996, via le réseau national de recherche Renater, 700 établissements d'enseignement secondaire répartis dans treize académies et de permettre l'accès de tous les collèges et lycées de France au réseau Numéris pour le coût d'une ligne téléphonique classique.
M. Trégouët a également posé le problème de l'inclusion de l'accès au RNIS et à la téléphonie mobile dans le service universel. Nous aurons l'occasion de revenir sur ce sujet lors de l'examen des articles, mais j'indique d'ores et déjà que nous avons choisi d'inclure l'accès au RNIS parmi les services obligatoires, c'est-à-dire parmi ceux qui seront disponibles, comme aujourd'hui, sur l'ensemble du territoire et dans le respect des principes du service public.
Cette proposition répond, me semble-t-il, à vos interrogations, monsieur Trégouët, puisque toutes les entreprises, qui étaient visées dans votre question, pourront avoir accès à ce service au même coût si elles sont placées dans des conditions identiques. En effet, le principe de l'égalité du service public sera respecté. Ainsi, à structure de communications identique, une entreprise accédera à un service au même coût, qu'elle soit située à Paris ou à Brive-la-Gaillarde.
J'avais moi-même envisagé d'inclure le RNIS dans le service universel, mais j'y ai renoncé pour deux raisons. D'abord, l'offre de services, sur le RNIS est aujourd'hui, il faut bien le reconnaître, encore réduite. Je souhaite que cette situation évolue, mais, pour l'instant, c'est la réalité.
Ensuite, l'inclusion du RNIS dans le service universel reviendrait au fond à forcer France Télécom à pratiquer des tarifs abordables pour toutes les catégories d'utilisateurs, y compris les particuliers. En réalité, cette mesure reviendrait donc à subventionner massivement le RNIS, puisque c'est là la différence essentielle entre les services obligatoires et le service universel.
Je préfère, pour ma part, en rester à la démarche du Gouvernement, qui est, me semble-t-il, ambitieuse, et qui permet de répondre aux besoins des entreprises et d'amortir progressivement les investissements réalisés sur le RNIS, en créant ainsi une baisse progressive des tarifs d'accès à ce réseau. C'est ainsi qu'il faut, à mon sens, préparer l'élargissement futur du service universel. Je souhaite que nous puissions ensemble, au cours de ce débat, éclaircir ce point.
Quant à l'inclusion du téléphone mobile dans le service universel, là aussi, je comprends la logique qui sous-tend votre proposition. Le service public intégrera un jour la téléphonie mobile, mais après cette phase d'investissements lourds, nécessaire pour développer les réseaux mobiles, dans laquelle nous sommes encore aujourd'hui.
Au préalable, il faut tenir compte du développement des nouvelles technologies, telles que la téléphonie mobile satellitaire. Vous avez, d'une certaine manière, opposé celle-ci aux dispositifs existants aujourd'hui. Vous avez craint une sorte de concurrence entre ces deux technologies.
Cette technologie constitue une chance formidable en termes d'aménagement du territoire, puisqu'elle permettra de desservir les zones les plus reculées à moindre coût. Elle constitue également une chance pour nos opérateurs puisque, comme vous le savez, France Télécom et Alcatel participent aujourd'hui au projet Global Star qui permettra la mise en oeuvre de ce service de téléphone mondial.
Votre proposition, si je l'ai bien comprise, présenterait un double effet pervers. D'une part, elle ne ferait peser de très lourdes charges d'investissement que sur France Télécom, alors que, dans ce secteur, c'est le développement de la concurrence qui doit permettre d'atteindre l'objectif recherché, au besoin en l'y incitant un peu, comme le propose M. le rapporteur.
D'autre part, votre proposition aboutirait probablement à privilégier des technologies moins coûteuses en investissement que la technologie numérique, mais obsolètes ou en voie de l'être, et aux tarifs prohibitifs.
M. Cluzel a longuement analysé la convergence de plus en plus grande entre les services audiovisuels et les services de télécommunication, d'une part, et entre les supports utilisés dans ces deux secteurs, d'autre part. Le projet de loi tire plusieurs conséquences de cette situation en créant une agence des fréquences pour mieux gérer la ressource hertzienne et en prévoyant la possibilité de développer les services de télécommunication sur le câble.
J'ajoute que la proposition que j'ai évoquée en ce qui concerne le contrôle du contenu sur les réseaux en ligne va dans le sens de la logique développée par M. Cluzel et fondée sur une autorité chargée de la régulation économique et une autorité chargée en quelque sorte du contrôle du contenu. Nous aurons l'occasion de revenir sur ce point au cours de la discussion des articles.
M. Billard n'a pas posé de question. Mais qu'il me permette de lui dire qu'il a commis de nombreuses erreurs dans l'analyse qu'il a faite de ce projet de loi.
M. Claude Billard. Ce n'est pas la même que la vôtre !
M. François Fillon, ministre délégué. Monsieur Billard, je vous ai écouté, laissez-moi au moins développer mes arguments !
D'abord, l'ouverture à la concurrence a pour objet non pas de faire le jeu des multinationales, mais de faire bénéficier nos concitoyens de la baisse des tarifs qui s'est manifestée partout dans les pays qui ont libéralisé. Nos factures de téléphone doivent donc baisser dans les quatre ou cinq ans qui viennent d'au moins 30 p. 100, et pour toutes les catégories d'usagers.
Le projet de loi qui vous est soumis prévoit très clairement que ce que l'on appelle le rééquilibrage de la structure tarifaire de France Télécom, c'est-à-dire la hausse d'une vingtaine de francs de l'abonnement, doit se faire dans le cadre général d'une baisse globale des tarifs, y compris des tarifs locaux. C'est la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale sur ce texte.
Du reste, monsieur Billard, vous avez voulu citer des exemples de pays qui auraient pâti de la libéralisation tarifaire. Permettez-moi de vous dire que vous n'avez cité que des pays qui n'ont précisément pas libéralisé, à savoir la Belgique, les Pays-Bas, l'Italie, qui sont sous monopole. Quant au Canada, les communications locales et internationales n'y sont pas encore libéralisées, mais l'abonnement inclut un forfait gratuit de communications locales.
Enfin, vous n'avez pas pu m'indiquer l'évolution des emplois dans le secteur des télécommunications aux Etats-Unis. Ils ont diminué, m'avez-vous dit. Puisque vous ne m'avez pas fourni de chiffres, je vais, moi, vous les donner. Sachez qu'entre 1988 et 1992, si 6 000 emplois ont bien été supprimés aux Etas-Unis dans le secteur longue distance qui avait été libéralisé, dans le même temps, 19 000 emplois étaient créés par les concurrents de ATT, MCI et Spring, qui sont arrivés sur ce marché.
Dans une étude d'impact, qui est forcément imparfaite puisque ce n'est qu'une estimation, nous avons prévu à hauteur de 70 000 le nombre d'emplois directement créés par les nouveaux opérateurs dans les cinq prochaines années. Comment sommes-nous arrivés à ce chiffre ? Tout simplement en considérant ce qu'ont fait les nouveaux opérateurs de téléphone mobile qui, depuis leur installation dans notre pays, ont créé un grand nombre d'emplois.
Quant au fameux 30 000 départs en préretraite qui pourraient intervenir à France Télécom dans les prochaines années, monsieur Billard, et qui d'ailleurs, au fil des débats, gonflent, passant à 40 000 puis à 50 000 pour maintenant atteindre dans la presse 70 000, ils ne sont pas destinés à réduire les effectifs de France Télécom. Sachez que chaque départ à la retraite est compensé par un recrutement, afin de rajeunir la pyramide des âges de France Télécom. Celle-ci s'est en effet dégradée, pour la raison simple que, depuis plusieurs années et pas seulement depuis deux ans, monsieur Billard, France Télécom ne remplace pas tous les départs en retraite. D'ailleurs, vous le savez bien, puisque France Télécom recrute, bon an, mal an, depuis 1990, entre 1 500 et 2 000 personnes par an, alors qu'il y a plus de 3 000 départs à la retraite chaque année.
Le président de France Télécom s'est engagé, notamment vis-à-vis de plusieurs organisations syndicales, à signer un accord sur l'emploi prévoyant, parallèlement à la mise en place de ce système de préretraite, le recrutement de 3 000 jeunes salariés chaque année à France Télécom. Cette possibilité nous est offerte aujourd'hui parce que France Télécom est une entreprise productive dont, plusieurs d'entre vous l'ont souligné, le ratio nombre de lignes-employés est tout à fait excellent ; il devrait s'améliorer encore dans la mesure où notre pays accuse un certain retard en matière de consommation de téléphone et de trafic, retard que l'arrivée de la concurrence et de nouveaux services doit permettre, en partie, de combler.
Madame Pourtaud, je ne sais pas si nous parlons du même projet de loi. Vous avez évoqué les services obligatoires en indiquant qu'il était scandaleux que leurs prix soient désormais libres. Ils le sont déjà ! Nous ne proposons pas de changer le système. La téléphonie vocale traditionnelle est au coeur du service public, de même que les services de liaisons loués, le télex, les réseaux numériques. Mais ces derniers sont financièrement équilibrés. France Télécom fixe les tarifs en fonction de ses coûts sans pratiquer de péréquation sociale. C'est la situation que vous avez trouvée normale pendant des années et des années. Aujourd'hui, vous voudriez tout d'un coup que la vieille dame de la Lozère...
M. Michel Pelchat. De Sablé-sur-Sarthe !
M. François Fillon, ministre délégué. ... puisse avoir accès au télex, aux liaisons louées, aux réseaux numériques à intégration de services et à toute une série de produits qui sont, en réalité, destinés aux entreprises et que ces dernières paient en fonction du service.
M. Gérard Delfau. Exactement !
M. François Fillon, ministre délégué. Nous ne proposons pas autre chose que de maintenir ce qui existe depuis des années dans ce domaine, sauf si le Parlement estime, dans un délai qu'il lui reviendra de fixer, qu'il convient d'ajouter à la définition du service universel un certain nombre de services nouveaux dont, à l'évidence, nous ne connaissons pas encore la nature puisqu'ils n'existent pas encore. Le choix du Gouvernement de confier au Parlement et à lui seul le soin, à intervalles réguliers, tous les quatre ans proposez-vous, d'enrichir la définition du service universel me semble être la meilleure des garanties que ce service universel évoluera en fonction des progrès technologiques.
Vouloir introduire aujourd'hui de nouveaux services dont on ne sait pas, par définition, quelle technologie permettra de les mettre en oeuvre ne me paraît pas très réaliste.
Une question se pose effectivement pour les réseaux numériques à intégration de services. Nous aurons l'occasion d'en débattre de nouveau.
Mme Pourtaud a également envisagé l'augmentation de la facture des petits consommateurs, après beaucoup de ses collègues. Le projet de loi prévoit, dans son article 6 pour l'article L. 35-3 du code des postes et télécommunications, que le rééquilibrage tarifaire aura lieu dans le cadre de baisses globales des tarifs pour l'ensemble des catégories d'utilisateurs, notamment pour les particuliers. En outre, des conditions tarifaires spécifiques seront proposées aux personnes à faibles ressources ou à handicap.
Mme Pourtaud a longuement évoqué certains pouvoirs qui seraient donnés à l'autorité de régulation. Ces pouvoirs n'existent que dans son imagination. Le pouvoir réglementaire est entre les mains du Gouvernement, le pouvoir législatif restant évidemment entre les mains du Parlement. Quant aux négociations internationales, relisez le texte, elles relèvent clairement du Gouvernement. L'autorité de régulation n'intervient dans ce domaine que pour conseiller le ministre chargé des télécommunications. Elle peut participer à la représentation de la France au plan international si le Gouvernement le lui demande. Elle n'a aucun pouvoir propre dans le domaine des négociations internationales.
Par ailleurs, il n'est nulle part question de porter l'abonnement à 90 francs hors taxes. Je connais la méthode, elle a été utilisée à plusieurs reprises, qui consiste, pour effrayer les Français, à augmenter, de débat en débat, les chiffres qui sont fournis, en particulier dans l'étude d'impact de ce texte. Il n'est nullement question de porter l'abonnement à 90 francs hors taxes ; le seul chiffre public figure, d'ailleurs, non pas dans le projet de loi, mais dans le rapport Champsaur. On pourra considérer le prix de l'abonnement comme équilibré lorsqu'il aura atteint 65 francs hors taxes, ce qui représente environ les 20 francs qui ont été évoqués par plusieurs d'entre vous. Ce rééquilibrage, je l'ai indiqué, se fera progressivement.
Enfin, Mme Pourtaud a évoqué l'inscription des fondements du service public dans le traité sur l'Union européenne. Je n'aurai pas la cruauté de rappeler que ce sont des gouvernements socialistes qui ont négocié le traité sur l'Union européenne. (M. Gérard Delfau proteste.)
Monsieur Delfau, ce sont bien des gouvernements socialistes qui ont négocié le traité sur l'Union européenne, n'est-ce pas ? Et ils l'ont négocié après avoir donné leur aval aux premières directives de libéralisation des services publics dans les domaines des transports aériens et des télécommunications. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. Vous avez la mémoire courte, monsieur Delfau. Ayez le courage de ce que vous avez fait !
M. Michel Pelchat. Bravo !
M. François Fillon, ministre délégué. Nous nous efforçons d'agir pour inscrire les principes du service public dans le traité sur l'Union européenne et, à cet égard,monsieur Delfau, vous avez fait preuve pour le moins d'une mémoire sélective. Vous ignorez, semble-t-il, que, entre 1987, date à laquelle la France a ouvert à la concurrence le radiotéléphone analogique, et 1993, plusieurs gouvernements socialistes se sont succédé qui, tous, ont accompagné le mouvement dans le sens d'une plus large concurrence. Comment cela a-t-il pu vous échapper ?
C'est M. Quilès qui a organisé, au printemps 1991, la concurrence sur le radiotéléphone numérique GSM en attribuant deux licences, l'une à France Télécom, l'autre à SFR, la filiale de cette Générale des eaux que vous n'avez cessé de fustiger tout au long de ce débat.
M. Gérard Delfau. L'essentiel était préservé !
M. François Fillon, ministre délégué. Cette décision, monsieur Delfau, n'était à l'époque nullement imposée par une directive européenne, puisque ce n'est qu'en 1995 qu'un texte européen est intervenu pour rendre obligatoire une telle ouverture à la concurrence. De même, le gouvernement de Michel Rocard a, en 1989, permis l'adoption, sous présidence française, d'une directive européenne libéralisant l'ensemble des services des télécommunications, à l'exception de la téléphonie fixe fournie au public,...
M. Gérard Delfau. Et de la propriété des infrastructures !
M. François Fillon, ministre délégué. ... et c'est en application de cet engagement qu'il a très logiquement ouvert à la concurrence, le 1er janvier 1993, les services supports, mettant ainsi Transpac en concurrence avec British Telecom, la Compagnie générale des eaux, Sprint, Unisource et un grand nombre de fournisseurs de capacités de transport.
M. Christian de La Malène. Voilà !
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Emmanuel Hamel. Il faut inverser la tendance !
M. Gérard Delfau. Vous n'avez pas répondu à ma démonstration !
M. Jean Chérioux. Ils sont amnésiques !
M. François Fillon, ministre délégué. Telle est la réalité, monsieur Delfau.
Pour ma part, je préfère la position du groupe communiste républicain et citoyen qui, lui, est fidèle à sa ligne et ne trahit pas ses engagements,...
M. Michel Rufin. Il faut se reporter au Journal officiel !
M. François Fillon, ministre délégué. ... alors que, vous, vous n'avez eu de cesse de libéraliser le secteur des télécommunications...
M. Gérard Delfau. Cela vous va bien de dire cela !
M. François Fillon, ministre délégué. ... Et, aujourd'hui, vous nous expliquez que nous sommes en train de faire une erreur historique en continuant l'action que vous avez entreprise ? J'avais d'ailleurs rendu hommage à cette action en ouvrant ce débat, car je pense que c'est grâce à la continuité de la position des gouvernements français successifs depuis dix ans que, progressivement, l'idée du service universel, reprenant les principes du service public à la française, est en train de s'imposer au sein de l'Union européenne.
M. Jean Peyrafitte. Ce n'est pas vrai !
M. Gérard Delfau. Non, en effet, cela n'a rien à voir !
M. Christian de La Malène. Vous avez bonne mine !
M. François Fillon, ministre délégué. Monsieur Lagourgue, nous nous sommes déjà souvent entretenus de la question des tarifs de France Télécom dans les départements d'outre-mer. Je suis d'accord avec vous pour reconnaître qu'il y a encore beaucoup de progrès à faire dans ce domaine.
Si le prix de l'abonnement et des communications locales y est le même qu'en métropole, en revanche le prix des communications longue distance est anormalement élevé, vous avez eu raison de le souligner. Depuis deux ans, nous résorbons cet écart, à raison de cinquante centimes environ chaque année ; la dernière baisse est intervenue au début du mois de mars, conformément d'ailleurs aux engagements que j'avais pris devant vous, dans cet hémicycle. Je vous indique d'ores et déjà qu'une prochaine étape sera franchie cet été, avec une nouvelle baisse de cinquante centimes.
Par ailleurs, à la suite des différents contacts que vous avez eus avec mon ministère, plusieurs décisions ont été prises. D'abord, d'ici à la fin de l'année, nous alignerons le prix des communications de l'annuaire électronique, le 11, sur le prix pratiqué en métropole. Ensuite, nous introduirons la formule Primaliste, qui permet d'appeler à tarif réduit trois numéros, comme c'est le cas en métropole. Nous introduirons également la possibilité d'identifier l'appelant.
Au début de l'année 1997, nous procéderons à l'alignement des tarifs Numeris concernant pour la transmission des données sur les réseaux Numeris pour la téléphonie vocale. De même, nous introduirons des modulations tarifaires horaires identiques à celles du téléphone pour les services Numeris, pour l'utilisation de la carte téléphonique et pour celle des messageries télématiques.
Enfin, cette fois dans le courant de l'année 1997, nous introduirons les numéros verts, qui ne peuvent pas aujourd'hui être proposés dans les départements d'outre-mer, ainsi que la possibilité d'accéder à Internet au prix d'une communication locale.
Soyez assuré que je serai extrêmement vigilant sur ce point et ferai en sorte que les départements et les territoires d'outre-mer soient traités équitablement par rapport à la métropole.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, loin d'être anodin, le texte que vous examinez constitue au contraire une réforme historique, comme est historique le contresens qui, me semble-t-il, caractérise la démarche du groupe socialiste. Ce contresens a été sanctionné par 70 p. 100 des Français, qui se prononcent pour l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications, et par les salariés de France Télécom, dont les deux tiers ont désormais compris la nécessité des évolutions proposées par le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Mon rapport oral serait incomplet si je ne donnais pas maintenant, comme je m'y étais engagé, les conclusions des travaux que la commission a achevés ce matin même sur le contrôle du contenu des réseaux en ligne qu'évoquait tout à l'heure M. le ministre.
La commission vous proposera un amendement tendant à insérer, après l'article 11, un article additionnel qui comporte trois volets.
Le premier, c'est la nécessité, selon nous, d'imposer aux fournisseurs d'accès des dispositifs techniques - verrouillage ou accès sélectif - permettant de bloquer l'accès à certains services. Ainsi, des parents pourront contrôler l'accès de leurs enfants à certains services.
Le deuxième volet, qui rejoint les préoccupations exprimées, notamment, par M. Cluzel, et que l'on retrouve chez nombre de nos collègues de toutes les commissions, au premier rang desquelles la commission des affaires culturelles, c'est la déontologie du contenu et de la mise en place d'un organisme chargé de donner son avis sur le contenu des services proposés.
Enfin, le troisième volet, c'est la condition d'exonération de responsabilité pénale des fournisseurs d'accès, notamment s'ils ne respectent pas les dispositifs techniques prévus pour contrôler les accès, ou les avis du conseil de surveillance qui serait créé.
Telles sont les précisions que je souhaitais vous apporter, mes chers collègues, avant que le débat ne se poursuive. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.

15

NOMINATION D'UN MEMBRE
DE LA DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
POUR L'UNION EUROPÉENNE

M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe des Républicains et Indépendants a présenté une candidature pour la délégation parlementaire pour l'Union européenne.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Jean-Paul Emorine membre de la délégation parlementaire pour l'Union européenne, en remplacement de M. Jean-Pierre Tizon. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)

16

RÉGLEMENTATION
DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

Suite de la discussion
d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de réglementation des télécommunications.

Exception d'irrecevabilité

M. le président. Je suis saisi d'une motion n° 138, présentée par M. Delfau, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Pastor, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 2, du règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications (n° 357, 1995-1996). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Delfau, auteur de la motion, pour quinze minutes au maximum.
M. Gérard Delfau. Je suis bâillonné !
M. le président. Je vous fais confiance, on ne bâillonne pas M. Delfau ! (Sourires.)
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, l'ensemble législatif que vous nous présentez, deux projets de lois, modifie substantiellement l'organisation économique et sociale de la nation, puisqu'il vise à la déréglementation des télécommunications et à la privatisation de l'entreprise publique France Télécom.
Or, l'enjeu n'est pas seulement, ni même d'abord, économique. Privatiser dans les pires conditions les télécommunications, c'est s'attaquer au coeur de notre démocratie et c'est brader un peu de notre histoire. Enfin, c'est enfeindre l'esprit du préambule de la Constitution, confirmé par plusieurs décisions du Conseil constitutionnel, depuis sa création.
Etablissons d'abord l'enjeu du débat. A la veille du xxie siècle, l'information circule à travers de multiples réseaux interconnectés. Elle est à la fois le moyen par excellence du lien social et le moteur du développement économique. Qui détient la propriété des supports - le fil entre les points fixes, c'est-à-dire la téléphonie classique, le câble ; l'hertzien ; le satellite - imposera sa loi à nos sociétés, pour peu que nous ne nous soyons pas prémunis contre les dérives.
Toute position dominante dans ce domaine fait prendre le risque d'un retour à la barbarie, si ces nouveaux maîtres ne sont pas étroitement contrôlés par la puissance publique.
Nos anciens, à la fin du siècle dernier, s'étaient déjà trouvés devant une situation analogue : la mise en place d'un nouveau mode de production - le capitalisme - performant sur le plan technique, engendrait des dégâts humains insupportables. Ils inventèrent en tâtonnant la notion de service public et décidèrent de nationaliser la production des biens chaque fois qu'il y avait une urgence de type stratégique ou social. Cela ne se fit pas sans controverse, comme le montrent les échanges entre juristes éminents et les affrontements politiques.
Parmi ces décisions hautement symboliques, figure la loi de nationalisation des entreprises privées de téléphone, en 1889. Vous nous proposez aujourd'hui de renoncer à cette position en privatisant France Télécom et en déréglementant les télécommunications.
Le voudrions-nous, que nous ne le pourrions pas, mes chers collègues, car nous n'en avons pas le droit. C'est ce que je voudrais démontrer maintenant.
Ce qui est en jeu, en effet, c'est la notion même d'Etat, telle que l'a forgée notre histoire et que les textes fondateurs l'ont constituée, et telle que sur les travées de cet hémicycle nombre d'entre nous et d'entre vous y avons adhéré.
Sur cette histoire qui lie étroitement la mise en place d'un Etat républicain et celle du service public, je ne me lasse pas de revenir à un petit livre remarquable, celui du professeur Jacques Chevallier, dont je pourrais lire, mais je ne le ferai pas, tout un chapitre au titre très révélateur : « Le service public comme soubassement de l'Etat ».
Voilà ce que vos deux projets de loi, inconsidérément, entreprennent d'ébranler. En avez-vous conscience ? Cette conception a mis des décennies pour émerger, et un moment crucial de notre histoire l'a définitivement inscrite dans le coeur des Français et dans le texte constitutionnel qui restaurait, enfin ! la République, je veux parler de la Libération et des premières décisions prises par le général de Gaulle au nom du Conseil national de la Résistance en 1945.
Ces faits que je rappelle sont notre bien commun. En altérer l'esprit reviendrait à une forme de trahison. Or, je le dis avec force, le secteur des télécommunications, c'est-à-dire, de proche en proche et sous l'angle des supports, le téléphone, l'informatique, l'audiovisuel, constitue le système nerveux de notre société.
Le soustraire au contrôle de la puissance publique, c'est modifier radicalement le concept d'Etat qui est le nôtre, c'est même commencer à l'abandonner au profit d'une autre conception jusqu'à présent tenue en lisière chez nous : celle du libéralisme, illustrée par la tradition anglo-saxone.
Avez-vous estimé toutes les conséquences de ce tournant ? Est-ce bien à vous, monsieur Fillon, de tenter de nous le faire prendre ?
Or, vos deux textes respirent cette idéologie libérale et tournent le dos à notre tradition : il est facile de le démontrer. Je pourrais d'abord me reporter à votre intervention liminaire. Vous y répétiez le mot « concurrence » avec une obstination et une application qui faisaient peine à voir, car j'ai de l'estime pour vous, monsieur Fillon, et pour vos proches. La concurrence, disiez-vous, stimulera l'innovation. Cela est contraire à toute notre histoire économique ; il suffit de citer le Minitel et le TGV. Elle fera baisser le coût des télécommunications téléphoniques, ajoutiez-vous. Toute l'expérience prouve l'inverse, chiffres à l'appui quand vous le voudrez. Il suffit d'ailleurs de prendre rendez-vous ici même dans cinq ans si vos projets sont adoptés et mis en oeuvre.
Par ailleurs, vous avez dû péniblement, difficilement défendre l'idée de création d'une autorité de régulation. Outre que l'exemple britannique dans ce domaine n'est guère probant, vous savez qu'en démembrant ainsi l'Etat vous portez atteinte à l'organisation des pouvoirs au sein de la République. Dans le débat ancien entre libéraux et partisans du service public, d'une manière schématique entre Européens du Sud et Anglo-Saxons, l'existence ou non d'un pouvoir indépendant de l'Etat et du Parlement est la pierre de touche. Vous avez choisi votre camp, qui n'est pas celui de la majorité des Français.
Et ne venez pas nous dire que cette autorité de régulation des télécommunications n'aura qu'une influence limitée. Telle que vous l'avez conçue, elle sera forcément le porte-parole des intérêts privés, fussent-ils étrangers, au-delà de l'Europe, contre l'opérateur public France Télécom.
Au coeur, enfin, de notre conception de l'Etat et des services publics, il y a la présence de l'usager. Son existence a mis longtemps à s'affirmer entre le rôle du sujet sous l'Ancien Régime et le statut de client, typique de l'époque moderne. Cette notion a-t-elle d'ailleurs produit tous ses effets ? Je ne le crois pas.
Pour le dire autrement, nos services publics sont-ils des exemples achevés de démocratie participative ? Non, hélas ! Et le syndicalisme au sein des entreprises publiques paie aujourd'hui, quand soufflent les vents contraires, son insuffisante attention à cette dimension consubstantielle du mode d'organisation économique qu'il défend légitimement.
Mais cet inachèvement du modèle ne peut en aucune façon justifier son abandon, ou alors c'est un prétexte qui cache d'autres motivations.
Il faudrait évidemment beaucoup de temps pour approfondir cet échange. Quand on touche ainsi à l'assise même de la nation, il n'est pas facile, ni même pertinent, monsieur le président, de faire bref, de faire vite. Je dois pourtant, faute de temps, m'en tenir là pour ce premier faisceau d'arguments.
Mais il est une deuxième raison qui motive notre position. Vos deux projets de loi, monsieur le ministre, ruinent les bases des trois principes du service public élaboré par notre tradition : égalité des citoyens, continuité et mutabilité du service. Or ces principes forment un droit garanti par le préambule de la Constitution et confirmé par plusieurs décisions non équivoques du Conseil constitutionnel.
Je me référerai de nouveau à l'éminent juriste Jacques Chevallier : « Depuis 1958, le problème se pose en termes différents. D'une part, la création des services publics, ne figurant pas explicitement à l'article 34, ne relève plus de manière générale de la loi : le législateur n'est compétent que dans la mesure où cette création touche à des matières énumérées à l'article 34 », ce qui n'est pas le cas, je le précise. « D'autre part, ajoute le juriste, le Parlement ne dispose plus d'une entière liberté d'appréciation en matière de création, ou de suppression, d'un service public : son pouvoir est désormais limité par l'existence "de principes ou règles de valeur constitutionnelle", dont le Conseil constitutionnel assure le respect ; le Conseil a été ainsi conduit à délimiter un noyau dur d'activité, des services publics "par nature", que l'Etat est constitutionnellement tenu d'assurer. »
Il me serait facile de prouver que les principes d'égalité, de continuité et de mutabilité ne sont pas satisfaits par les dispositions de vos projets de lois. Le cadre horaire qui m'est imposé m'empêchera de reprendre cette argumentation, mais elle fut développée sur toutes les travées, je dis bien « toutes », car la défense et la promotion du service public ne sont pas - heureusement ! - l'apanage de la gauche.
Revenons à la question centrale : avez-vous le droit de nous demander de démanteler le service public des télécommunications, fût-ce au nom de l'Europe ? Je ne le crois pas. Je pense même qu'il y a là conflit de compétence et de légitimité, et je voudrais citer une dernière fois Jacques Chevallier. Nous avons établi avec lui que le Parlement n'est pas totalement souverain s'agissant du domaine protégé par la Constitution.
Réexaminons à présent comment le Conseil constitutionnel a tenu, à trois reprises, y compris après la signature de l'Acte unique, à conforter le service public. « Ce régime de service public, explique l'auteur, s'est trouvé conforté par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui a érigé le principe d'égalité en principe de valeur constitutionnelle s'imposant au législateur lui-même. » - 12 juillet 1979. Il ajoute : « Ainsi le principe bénéficie-t-il d'une double protection, le Conseil constitutionnel interdisant l'institution de discriminations légales, non fondées sur une différence objective de situations, et la juridiction administrative veillant à son respect au niveau et de l'organisation et du fonctionnement concret du service. Quant au principe de continuité, il a été rangé au nombre des "principes fondamentaux reconnus par les lois de la République"- 25 juillet 1979 -, ce qui implique que le droit de grève dans les services publics doit être concilié avec lui, selon la décision du 28 juillet 1987. »
Voilà quelques rappels utiles et quelques faits incontestables !
Vous tenterez sans doute d'invoquer votre bonne foi, monsieur le ministre - elle n'est pas en doute - et les multiples précautions que vous avez prises pour assurer « un minimum de minimum de minimum » de service public. Mais le débat a montré et montrera que ni par le contenu du service dit universel ni par son financement, le fonctionnement stable du service public des télécommunications n'est assuré par vos projets de loi.
Comment, pour le dire d'une autre formule, pourriez-vous nous convaincre que vos propositions permettront de garantir à tous les Français, même aux plus pauvres, même aux plus éloignés des agglomérations urbaines, les deux conditions qui caractérisent un service public, à savoir l'optimum économique et le maximum de cohésion sociale ? Qui pourrait prétendre que ce projet de loi satisfait à ces deux exigences dont dépend la consolidation de la République ?
Telles sont, entre autres, les raisons pour lesquelles le groupe socialiste demande au Sénat de voter cette motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité, sur laquelle il souhaite, pour que chacun prenne ses responsabilités, un vote par scrutin public. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai que sur deux mots utilisés par M. Delfau, à savoir « barbarie » et « barbare ». Or - je parle ici sous le contrôle de personnes beaucoup plus cultivées que moi - selon la première acception de ces mots, étaient barbares ceux qui n'étaient point Grecs ! A priori, le retour de la barbarie était déjà annoncé puisque l'opérateur public grec ne me paraît pas devoir jouer, demain, un rôle dominant sur le marché mondial des télécommunications, bien que, nous le lui souhaitions ! (Sourires.) Je crois donc qu'il faut laisser à ces mots la signification que la démocratie leur a conférée, signification empreinte d'un fort caractère historique ou émotif.
Il faut, tranquillement, replacer les choses à leur niveau et à leur place.
Il est précisé, dans l'objet de la motion n° 138, que « ce projet de loi ne permet pas le respect des principes d'égalité, de continuité et de neutralité ». C'est à cet égard que je souhaite m'exprimer pour justifier l'avis défavorable de la commission des affaires économiques et du Plan.
S'agissant des principes constitutionnels d'égalité et de continuité du service public, l'article 6 du projet de loi dispose, notamment dans le texte proposé pour l'article L. 35 du code des postes et télécommunications, que « le service public des télécommunications est assuré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité ».
Quant au principe de neutralité, je rappellerai quatre dispositions du texte.
Tout d'abord, à l'article 5, le texte proposé pour l'article L. 34-10 du code des postes et télécommunications dispose que la loi garantit un accès simple et égal au service téléphonique. A l'article 2, dans le texte proposé pour l'article L. 32-1 du même code, il est prévu que « le ministre chargé des télécommunications et l'autorité de régulation des télécommunications veillent... à l'exercice... d'une concurrence effective, loyale ».
L'indépendance de l'autorité de régulation des télécommunications est assurée par le texte proposé pour l'article L. 36-1 du code des postes et télécommunications.
Enfin, le texte proposé pour l'article L. 34-8 de ce même code prévoit que l'interconnexion est de droit ; elle « ne peut être refusée si la demande est raisonnable ».
Voilà pourquoi les principes d'égalité, de continuité et de neutralité inhérents au service public sont clairement présents dans ce projet de loi et pourquoi cette motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité ne nous paraît pas recevable.
La commission, sur un sujet aussi important, demande également un vote par scrutin public.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Voilà une étrange motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité ! En effet, elle prétend avec bien de la peine trouver dans la Constitution ou dans notre tradition juridique des arguments ou des contre-indications que la seule lecture du projet de loi permet de dissiper !
Tout d'abord, le projet de loi, loin de remettre en cause le service public, le définit et le conforte. Monsieur Delfau, existait-il, avant ce projet de loi, un texte rappelant aussi clairement les trois principes du service public que sont l'égalité, la continuité et l'adaptabilité ? Ces trois principes sont écrits dans le projet de loi qui vous est soumis.
Y a-t-il, en Europe, un texte qui définisse de manière aussi large, aussi généreuse, aussi ouverte sur l'avenir le contenu du service public et du service universel ?
M. Michel Pelchat. Non !
M. François Fillon, ministre délégué. Existait-il, avant ce projet de loi, un seul texte garantissant à chacun d'entre nous le droit à des tarifs abordables de manière que personne, quels que soient ses ressources ou son handicap, ne soit exclu du droit au téléphone ?
A propos de l'autorité de régulation, il me semble, là encore, monsieur Delfau, que vous n'avez pas lu le projet de loi. Où avez-vous vu que cette autorité de régulation serait dotée de pouvoirs réglementaires ? Vous savez - vous n'ignorez pas, en effet, que vous menez là un combat très largement tactique -...
M. Gérard Delfau. Comment ?
M. François Fillon, ministre délégué. ... que l'autorité de régulation n'a pas d'autre mission que de mettre en oeuvre la réglementation découlant de la législation que le Parlement aura votée et de servir d'instance d'arbitrage. C'est l'Etat qui conserve l'intégralité des pouvoirs législatifs, réglementaires et de contrôle du contenu et des tarifs du service public.
Je considère donc, monsieur le président, qu'il n'y a évidemment pas lieu d'adopter une telle motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
M. le président. Je vais mettre aux voix la motionn° 138.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, il existe au moins un point sur lequel nous sommes d'accord, à savoir le caractère historique de ce texte. Effectivement, tel peut être le cas.
J'ajoute que je n'ai pas l'habitude de faire de la tactique avec l'histoire ! C'est même profondément contraire à ma conception de la vie publique.
Par ailleurs, j'ai trouvé inélégant - je pèse mes mots - que vous preniez en otage les personnels qui n'ont pas fait grève hier. Lorsqu'ils sauront comment vous vous prévalez de leurs hésitations, de leurs souffrances, de leurs difficultés face aux pressions d'une certaine hiérarchie, que vous avez en partie téléguidée pour contrecarrer des consignes de grève, je suis sûr qu'ils n'apprécieront pas la parole malheureuse que vous avez eue, parole aussi malheureuse que celle du Premier ministre, s'agissant de la fonction publique.
En fait, vous exprimez une forme de mépris - mais peut-être n'est-ce pas tout à fait volontaire de votre part - vis-à-vis d'une partie des salariés de ce pays qui donnent le meilleur d'eux-mêmes...
M. Michel Rufin. Propos scandaleux ! C'est n'importe quoi !
M. Gérard Delfau. ... et qui, n'en déplaise aux tenants de la lampe à huile, ont su démontrer qu'ils étaient en avance non seulement en France, mais aussi par rapport aux innovations technologiques du monde entier.
J'en viens maintenant à vos très faibles objections à la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
Bien sûr, les principes du service public sont énoncés dans le projet de loi, dites-vous. Mais que valent les énoncés de principes si le fond des procédures ne répond pas à cette formulation, si le fond s'ingénie même à démonter par avance l'application au niveau le plus bas de ce que vous prétendez préserver et parfois même - j'avoue que j'en reste songeur - promouvoir ?
S'agissant de l'Europe, nous n'avons pas attendu la déclaration que vous avez faite voilà quelques instants, monsieur le ministre, pour remarquer que la France est effectivement en avance sur le thème des services publics. Je n'ai pas attendu ce débat pour organiser un groupe interparlementaire composé d'une trentaine de parlementaires européens de toutes formations politiques et de six nationalités, groupe qui a siégé voilà deux mois au Parlement européen. Je m'étais effectivement rendu compte, monsieur le ministre, que nous étions plus exigeants que la moyenne. Comme je ne suis pas complètement analphabète et que l'histoire m'intéresse, je me suis souvenu que la notion de service public - j'ai essayé de le montrer à ma façon tout à l'heure - était liée à notre histoire.
Par conséquent, pourquoi voudriez-vous que nous soyons affectés par le fait que notre conception du service public soit plus exigeante que tout ce que vous avez pu dire et, surtout, faire depuis votre retour à la tête de la France ?
D'ailleurs, monsieur le ministre, puisque vous parlez de l'Europe, voudriez-vous me dire et, au-delà, dire au peuple français, où en est la conférence intergouvernementale ? Où en sont les proclamations martiales sur la protection des services publics, sur votre caractère offensif dans la négociation ? Je crains que le Gouvernement, à moins que ce ne soit le Président de la République - mais là, je ne puis percer ces secrets - n'ait dit à nos partenaires européens que, sur ces questions-là, finalement, la France ne bougerait pas.
Enfin, s'agissant de l'autorité de régulation, j'ai rappelé les débats juridiques qu'a suscités cette question dans notre histoire ; monsieur le ministre, j'ai dit qu'il s'agissait d'un affrontement de civilisations : il y a, d'une part, les Anglosaxons et, d'autre part, l'Europe du Sud, d'autre part. Nous n'avons pas la même conception, je le dis très tranquillement. Et cela vous gêne.
M. le président. Monsieur Delfau, je vous prie de conclure.
M. Gérard Delfau. Sachez, monsieur le ministre, que ce débat rebondira !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 138, repoussée par la commission et par le Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une du groupe socialiste, l'autre de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 89:

Nombre de votants 315
Nombre de suffrages exprimés 315
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 94
Contre 221

Question préalable

M. le président. Je suis saisi d'une motion n° 57, présentée par Mme Luc, MM. Billard, Leyzour, Minetti et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications (n° 357, 1995-1996). »
Je rappelle qu'en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote pour une durée n'excédant pas cinq minutes à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Leyzour, auteur de la motion.
M. Félix Leyzour. Monsieur le ministre, hier, vous nous avez informé qu'Ariane 5 avait explosé en vol soixante-six secondes après son départ. Le mouvement fulgurant de la science et de la technologie n'échappe pas à l'incertain, à l'accidentel.
L'accident n'a, heureusement, pas fait de blessés ; il n'a pas non plus entraîné de conséquences graves pour l'environnement.
Le tribut à payer est, certes, budgétairement lourd, mais il ne s'est trouvé aucune voix autorisée pour réclamer la fin de l'aventure, et c'est heureux. L'épopée d'Ariane, née il y a vingt-trois ans, constitue en effet une réussite exceptionnelle. L'apprivoisement de l'espace n'est ni vain ni fou.
Comme l'écrivait ce matin l'éditorialiste de L'Humanité : « Il fait reculer nos limites matérielles et mentales et change à la fois les données de la vie la plus quotidienne. Il contient comme un appel à une civilisation plus humaine. »
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. Félix Leyzour. La fabrication d'armes toujours plus meurtrières et les obscurs circuits de la spéculation financière nous font payer un tribut autrement plus lourd. L'accident malheureux d'hier est une épreuve dans l'odyssée française de l'espace. Mais aucun échec n'est insurmontable.
Quand vous dites, comme vous l'avez fait hier, que nous allons préparer le deuxième vol d'Ariane 5 et mettre tout en oeuvre pour que la grande aventure spatiale reste celle du succès, nous approuvons.
M. René Trégouët. Très bien !
M. Félix Leyzour. En effet, cette grande aventure spatiale n'est pas sans rapport avec le projet de loi de réglementation des télécommunications que nous examinons aujourd'hui.
En 1973, il fallait passer par les Américains pour envoyer dans l'espace des satellites européens expérimentaux. S'affranchir de cette tutelle permit à la France, en toute indépendance politique et technologique, d'être partie prenante de l'essor des télécommunications et méthodes d'observation spatiale des années quatre-vingt.
Le domaine qui retient notre attention permettant les interconnexions, j'en viens au texte qui nous est soumis. A ce propos, vos dernières réponses ne nous ont pas convaincus.
Depuis des mois, on suit la chronique d'une marche dissimulée vers la privatisation de France Télécom. Cette marche est réglée en tenant compte à la fois de la situation de la France et de la place qu'occupe le service public dans l'esprit de l'ensemble des Français, notamment des salariés.
Un sondage de la SOFRES, réalisé les 8 et 9 septembre 1995, fait ressortir que 92 p. 100 des usagers de France Télécom et 80 p. 100 de ceux de La Poste considèrent que ce service public fonctionne bien.
Mme Hélène Luc. Mais oui !
M. Félix Leyzour. Il est donc difficile, d'emblée, d'en finir avec un tel service public. Alors, on présente les choses comme si l'on voulait presque le sauver en le dégageant du monopole qu'il exerce aujourd'hui.
L'objectif d'étape, avec le présent projet de loi, est donc de circonscrire la place de France Télécom : l'opérateur public serait transformé en société anonyme ouverte au capital privé, l'Etat restant momentanément majoritaire avec 51 p. 100 du capital. Ainsi, France Télécom aurait à assurer, sur l'ensemble du territoire, un service public reposant sur un trépied : le service universel de télécommunications, les services obligatoires de télécommunications, les missions d'intérêt général dans le domaine des télécommunications.
Ce que vous prévoyez est en rupture avec la conception française du service public. C'est, en quelque sorte, le modèle anglo-saxon et américain qui nous vient de Bruxelles.
En réalité, ce service public aux ailes coupées abandonnerait l'essentiel des activités rentables - elles seront très nombreuses - aux opérateurs privés.
Rendu prudent en raison de ce qui s'est passé dans d'autres domaines touchés par la déréglementation, le Gouvernement n'utilise plus ce terme de « déréglementation », pas plus qu'il ne parle d'engagement sur la voie menant à la privatisation.
Il parle de nouvelle réglementation, de fin du monopole du service public et d'ouverture à la concurrence.
Pour parachever la mise en place du nouvel édifice, un projet de loi relatif à l'entreprise nationale de France Télécom viendra en discussion dans le prolongement immédiat de celui-ci.
Tout cela, il faut bien le dire, ne relève pas de l'improvisation, mais est très cohérent. La cohérence qui transparaît est celle de l'exigence des groupes économiques et financiers qui veulent maîtriser à leur profit le secteur des télécommunications, qui se trouve au centre d'enjeux considérables.
Après la séparation de La Poste de France Télécom, la nouvelle étape est celle de la « démonopolisation » du secteur des télécommunications, qui s'accompagne à la fois de la nouvelle définition du secteur public et de la réglementation de la concurrence.
La fin du monopole public est présentée comme étant nécessaire en raison des engagements européens de la France et de la rapidité de l'évolution des technologies. C'est quelque chose d'inéluctable, a-t-on dit ici. S'y plier, ce serait faire preuve de réalisme, ce serait être moderne, ce serait souscrire à la voie du progrès. S'y opposer, ce serait faire preuve de conservatisme. C'est à voir... Et si c'était le contraire !
Votre démarche, monsieur le ministre, a sa logique, mais, à cette logique, nous en opposons une autre : au lieu de limiter le champ d'intervention de France Télécom et de préparer son démantèlement à terme, nous proposons d'adapter l'entreprise publique, de la rénover, de la démocratiser pour qu'elle réponde encore mieux aux besoins d'aujourd'hui et à ceux de demain.
Les échéances européennes ne nous laissent-elles aucune autre issue que celle que vous proposez ? L'argument qui est souvent invoqué est celui de l'échéance de 1998 pour la dérégulation européenne des infrastructures et des services associés.
C'est avec une certaine délectation que vous avez, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, dit et répété, comme pour vous justifier, que le processus que vous voulez achever avec cette réforme a été engagé sous les septennats précédents par deux gouvernements de sensibilité politique différente, et de citer les noms des premiers ministres, MM. Rocard et Balladur.
Le processus auquel vous faites référence, et contre lequel nous nous étions élevés, ne crée pas nécessairement l'obligation d'aller plus loin. A l'échelon européen commencent même à s'exprimer des exigences nouvelles sur lesquelles on peut prendre appui pour corriger des trajectoires qui se révéleraient contraires à nos intérêts et pour contribuer à réviser certaines politiques.
L'échéance de 1996 pour la révision des traités européens offre à la France l'opportunité d'y introduire une définition plus large, plus ouverte et plus riche des services publics. A partir des résultats qui pourraient être obtenus, une révision de la politique européenne en matière de télécommunications deviendrait nécessaire. Notre pays peut jouer un rôle à ce niveau s'il en a la volonté politique.
J'évoquerai également l'argument selon lequel la rapidité de l'évolution des technologies exige qu'il soit mis fin au monopole du service public et qu'il y ait ouverture à la concurrence.
En France, le service public n'est pas sans mérite. Il a répondu à des nécessités économiques et sociales, à des besoins de développement économique, d'aménagement du territoire et de satisfaction à grande échelle des besoins de la population : il avait une obligation de mise à la disposition des populations, aux meilleures conditions, des produits de première nécessité ou socialement indispensables ; il avait une obligation de desserte de l'ensemble du territoire et d'égalité de traitement des usagers. C'est dans ces conditions que France Télécom a su se hisser au quatrième rang mondial.
Ce service public n'a pas été sans subir des contraintes, notamment celle que constitue la double tutelle financière de l'Etat et des banques. Depuis 1982, via des prélèvements divers, France Télécom a versé plus de 160 milliards de francs à l'Etat, tandis que sa dette s'élève à 95 milliards de francs.
De telles contraintes ont privé cette entreprise nationale d'une partie des moyens dont elle aurait eu besoin pour améliorer son fonctionnement, pour satisfaire les revendications de ses personnels et pour l'accomplissement de ses missions.
Pourquoi le monopole du service public se justifierait-il ici ?
A l'origine, le monopole fut un moyen de réserver le service postal et télégraphique au Gouvernement. La justification du monopole public a évolué avec le développement du service public des postes et télécommunications.
Aujourd'hui, il se révèle nécessaire, d'abord pour des raisons économiques. En effet, il garantit des économies d'échelle - on ne finance pas plusieurs fois des réseaux concurrents, ce qui permet de préserver les péréquations tarifaires - et la cohérence de l'offre : un même service est offert partout.
Le monopole permet également de réaliser des économies d'envergure en offrant une gamme élargie de services, car les services rentables financent ceux qui le sont moins.
A y réfléchir, est-il préférable, à l'échelle du pays, de la collectivité nationale, de disposer de monopoles publics nationaux ouverts à la coopération ou de subir la loi de quelques monopoles privés multinationaux ? La question mérite d'être posée !
Si l'on poursuit la logique de la déréglementation, à terme, ne subsisteront que quelques grands coursiers mondiaux à dominante américaine, quelques grands opérateurs de télécommunications. La domination du monde passerait par ces réseaux privés : Etats, gouvernements, peuples seraient dominés par ces quelques multinationales.
Dans une telle perspective, comment s'autoriser à traiter le monopole public de « ringard » ? C'est le contraire qui est vrai ! Il est la condition d'exercice des missions de service public : péréquation tarifaire, aménagement du territoire, maîtrise et cohérence des réseaux, interconnexion.
Pour que la société d'information bénéficie à tous les usagers, il faut un monopole de droit, renforcé.
J'évoquerai une autre question d'importance : la recherche.
En quoi le service public représenterait-il un obstacle à la modernisation ? France Télécom, entreprise exemplaire du service public à l'échelon international, avec un statut du personnel unique en son genre, peut s'enorgueillir d'un réseau de télécommunications les plus modernes du monde.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. Félix Leyzour. Les laboratoires du Centre national d'études des télécommunications, le CNET, notamment à Lannion - mais pas seulement - ont, les premiers, inventés les techniques qui ont permis à France Télécom de se doter d'un réseau à commutation temporelle à 100 p. 100 par une sorte de mariage entre informatique et télécommunications, tous les centraux étant des ordinateurs permettant d'augmenter le nombre de communications sur un même support.
En fait, un opérateur de service public offre la possibilité de procéder à un investissement sur une durée plus longue que le privé.
Dans la perspective de la déréglementation, les recherches sur les équipements comme ceux qui ont permis de créer la commutation temporelle risquent d'être réduites et la priorité pourrait être donnée aux recherches à court terme sur les services, avec une rotation plus rapide des programmes. Bilan : une perte sèche de la recherche industrielle qui n'est pas reprise par l'industriel.
Il est à craindre - de nombreux chercheurs le ressentent ainsi - que ce projet de loi ne programme le recul des investissements dans la recherche et l'industrie, le déclin de l'innovation et de l'emploi qualifié.
Avec un champ d'intervention bloqué, France Télécom aura moins d'ambitions et de possibilités dans le domaine de la recherche, et les réponses que vous avez apportées à l'instant, monsieur le ministre, ne lèvent pas nos inquiétudes.
Le projet de loi que vous nous soumettez n'est pas la seule voie offerte aux télécommunications, et l'engagement sur le chemin de la privatisation des opérateurs publics apparaîtra bientôt comme anachronique.
C'est la raison pour laquelle les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen demandent au Sénat de refuser de discuter de ce projet de loi en adoptant notre motion tendant à opposer la question préalable. Si cette motion est adoptée, nous ne serons pas devant le vide : nous serons en présence d'un service qui existe, qui a fait ses preuves et qui, au lieu d'être affaibli, pourra être développé et modernisé.
C'est une question de choix, une question de volonté politique, et c'est la raison pour laquelle nous demandrons un vote par scrutin public. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cette motion tendant à opposer la question préalable ne nous surprend pas.
Mme Hélène Luc. Elle est logique !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Elle s'inscrit en effet dans la ligne des positions prises depuis 1990...
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... - à l'occasion, alors, de l'examen d'un projet de loi présenté par M. Quilès - par nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen, positions réaffirmées depuis lors de nos discussions sur ce sujet au sein de la commission des affaires économiques et du Plan.
L'objet qui sous-tend sa forme écrite apparaît un peu simplificateur, mais les arguments développés n'en sont pas moins autant d'affirmations péremptoires, et je souhaite y répondre.
Ces arguments, qui sont cinq condamnations articulées dans l'objet de la motion, peuvent-ils être retenus par le Sénat ?
En premier lieu, l'accusation d'atteinte au service public était un peu « téléphonée d'avance », pardonnez-moi cette expression.
M. Félix Leyzour. Vos réponses aussi : elles étaient dactylographiées avant même que j'intervienne !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Mais que prévoit le projet de loi ?
France Télécom demeure l'opérateur du service universel. Le projet comporte, à cet égard, une définition très précise, très complète du service public, avec trois composantes : le service universel, les services obligatoires et les missions d'intérêt général, dont la recherche, que vous avez évoquée, mon cher collègue, à propos du CNET, et pas simplement à Lannion, comme vous l'avez dit.
La discussion de ce projet, dont le groupe communiste républicain et citoyen prétend nous priver cet après-midi, devrait pouvoir l'enrichir autour d'un service universel conforté dans sa dimension sociale et mieux réparti sur l'ensemble du territoire, ainsi que la commission des affaires économiques et du Plan vous les proposera, mes chers collègues.
Seconde affirmation péremptoire en forme d'accusation : l'atteinte au droit des citoyens à communiquer.
Cela me paraît relever un peu d'un procès en sorcellerie. En effet, à quoi aboutira l'ouverture de la concurrence, sinon à une multiplication des moyens de communication dont nous allons disposer ? C'est la diversité qui engendre la richesse !
M. Félix Leyzour. La richesse du capitalisme !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Bien loin d'empêcher les citoyens de communiquer, le projet de loi devrait les y aider.
Quant à l'accusation d'atteinte aux usagers, elle m'apparaît elle aussi relever de la contrevérité. Quand on constate ce qui s'est passé dans les pays étrangers où une démonopolisation des télécommunications a été opérée, on voit bien qu'il n'y a pas d'atteinte aux usagers ! La croissance des télécommunications y a même été plus forte que dans les pays où le monopole a subsisté. Par conséquent, non seulement, les usagers ne sont pas moins bien servis, mais, le plus souvent, ils sont aussi bien, voire mieux que chez nous, notamment en matière tarifaire.
Sans doute fallait-il s'attendre à ce que l'on fasse reproche à ce projet de loi de porter atteinte à l'emploi - nous y reviendrons sûrement au cours du débat - et l'argument mérite réflexion, car il s'agit là d'une question très importante qui nous préoccupe tous, sur quelque travée que nous siégions.
Je ne saurais, au nom de la commission, me dérober à un débat sur ce point.
Il faut d'abord distinguer le cas de France Télécom du secteur des télécommunications en général. Si l'on raisonne par référence à ce qui s'est passé dans des pays comme les Etats-Unis, la Grande-Bretagne ou la Suède, notamment au niveau de la productivité par ligne, on s'aperçoit que France Télécom est en meilleure position que British Telecom près de douze ans après l'évolution de cette dernière, ou encore que ATT aujourd'hui même ; nous avons globalement, par rapport à nos concurrents européens, une productivité qui est de 10 p. 100 supérieure.
Cela étant, on ne peut partir des exemples des opérateurs britanniques ou américains et ne pas prendre en compte la qualité et la fiabilité de France Télécom. Ce serait, pour reprendre ce que disait notre collègue M. Hérisson tout à l'heure, ne pas croire en l'avenir de France Télécom, en sa capacité à conquérir de nouveaux marchés et à se diversifier.
France Télécom et ses fonctionnaires sont-ils pour autant menacés de perte d'emploi, de licenciement dans le présent projet de loi ?
M. Félix Leyzour. Nous en reparlerons la semaine prochaine !
M. Gérard Larcher, rapporteur. La réponse est clairement négative. Dans le plus mauvais des scénarios - c'est-à-dire au cas où cette entreprise ne saurait pas s'adapter à la donne internationale - la stabilisation des effectifs serait opérée au prix du non-remplacement lors des départs à la retraite.
Mais pourquoi cet a priori défaitiste ? Pourquoi continuer à faire nôtre ce que nous trouvons dans les tiroirs de France Télécom depuis 1990, c'est-à-dire un projet de non-remplacement de près de 30 000 agents au cours des années 1990 à 1992 ?
Mme Hélène Luc. Ce n'est pas une raison pour continuer !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Si France Télécom est pugnace, si nous lui donnons les moyens de la réactivité et les moyens de nouer des alliances internationales, non seulement cette société pourra ne pas perdre d'emplois, mais elle pourra en créer, soit directement, soit indirectement, ainsi que M. le ministre le disait hier en parlant de 70 000 emplois qui pourraient à terme être créés dans le secteur des télécommunications.
M. Guy Fischer. Il faudra le prouver !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Quant au secteur des télécommunications en général, il faut être un économiste pessimiste pour ne pas voir qu'il profitera de la démonopolisation.
M. Robert Pagès. Le privé en profitera !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Reste la question de l'équilibre des finances publiques.
C'est un argument auquel nul parlementaire ne saurait être indifférent. Est-il pour autant opportun de l'invoquer dans le présent débat ?
En quoi la modification de la réglementation des télécommunications et la fin des monopoles peuvent-elles être considérées comme menaçant l'équilibre des finances publiques ? La commission des affaires économiques ne le perçoit pas. Faut-il en effet comprendre que l'entreprise France Télécom pourrait être considérée par nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen comme une « vache à lait budgétaire » ? Souvenons-nous de l'époque où de précédents gouvernements l'ont obligée à investir dans le secteur des assurances, par exemple, la ponctionnant par des décisions budgétaires et la détournant de son objet !
En réalité, si la question financière doit être posée, ce ne peut être qu'à propos du texte relatif à France Télécom, à son statut et à sa transformation en entreprise nationale. Je vous proposerai donc de revenir la semaine prochaine sur cette question.
M. Félix Leyzour. Vous pouvez y compter !
Mme Hélène Luc. Vous ne parlez pas des réalisations techniques des télécommunications ou du service public !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Au total, la motion tendant à opposer la question préalable nous apparaît mal-venue.
La commission y est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Je veux d'abord remercier M. Leyzour des mots très justes qu'il a employés au sujet de l'accident d'Ariane 5, que j'ai eu l'occasion de commenter hier dans cet hémicycle.
Il me permettra simplement de lui rappeler que cette grande et belle aventure d'Ariane est une aventure européenne et que nos partenaires y sont très étroitement associés. J'espère d'ailleurs qu'il y demeureront - mais j'en suis sûr - très étroitement attachés.
M. Paul Loridant. Mais la France est chef de file dans Ariane !
M. François Fillon, ministre délégué. Il ne faut pas oublier, surtout en ce moment, la participation capitale de nos partenaires allemands et italiens, par exemple, qui sera bien nécessaire pour nous permettre de poursuivre ce programme, malgré l'incident de parcours que nous venons de rencontrer.
M. Félix Leyzour. Nous sommes toujours pour les coopérations !
M. François Fillon, ministre délégué. Je veux aussi remercier M. Leyzour du soin avec lequel il a rappelé, comme je l'avais fait moi-même avant lui, la très grande continuité de l'action des gouvernements français depuis dix ans au sujet de la libéralisation des télécommunications.
Deux logiques s'affrontent, monsieur Leyzour : la vôtre - vous êtes pour le monopole des télécommunications et vous avez défendu les arguments qui vous conduisent à cette position - et la nôtre - nous sommes pour l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications, parce que nous pensons que le monopole prive aujourd'hui les Français d'un certain nombre de services de télécommunication avancés auxquels les citoyens d'autres pays développés ont droit et parce que le monopole maintient des tarifs élevés qui ont pour conséquence une moindre consommation de services téléphoniques dans notre pays par rapport aux autres pays développés.
Voilà, monsieur Leyzour, un service public devant lequel chacun s'extasie, mais qui n'est utilisé par les Français que huit minutes par jour quand, aux Etats-Unis, ce même service est utilisé vingt minutes par jour et qu'il l'est, en Grande-Bretagne et en Italie, entre quinze et dix-sept minutes par jour.
Nous pensons qu'il faut renforcer l'offre de services et qu'il faut aboutir à des tarifs beaucoup plus bas pour permettre à chacun de pouvoir utiliser les nouvelles techniques de l'information, en particulier les services en ligne, dont je disais au début de ce débat qu'ils ne se développeront dans ce pays que le jour où les communications locales seront presque gratuites dans le cadre d'un forfait, comme c'est le cas dans un certain nombre de pays libéralisés.
M. Delfau parlait tout à l'heure de mépris, mais j'ai, pour ma part, le plus grand respect pour les personnels de France Télécom, et c'est précisément pour cette raison que je ne veux pas les laisser sans armes devant une concurrence qui, de toute façon, s'installe à la fois du fait des décisions européennes, comme cela a été rappelé, mais aussi du fait des évolutions technologiques.
Et c'est bien parce que j'ai le plus profond respect pour eux que, depuis des mois, monsieur Delfau, je négocie avec leurs organisations syndicales.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 57, repoussée par la commission et par le Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une du groupe communiste républicain et citoyen, l'autre de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 90:

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 316159
Pour l'adoption 93
Contre 223


Demande de renvoi à la commission
M. le président. Je suis saisi d'une motion n° 67, présentée par M. Loridant, Mme Beaudeau, MM. Billard, Leyzour et Minetti et les membres du groupe communiste républicain et citoyen et tendant au renvoi à la commission.

Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des affaires économiques et du Plan le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications (n° 357, 1995-1996). »
Je rappelle qu'en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, un orateur d'opinion contraire, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement. Aucune explication de vote n'est admise.
La parole est à M. Loridant, auteur de la motion.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais d'abord m'excuser auprès de vous de n'avoir pu être suffisamment présent cet après-midi dans ce débat. En effet, j'ai dû, au sein de la commission des finances, présider des auditions sur le devenir de la profession bancaire.
La motion de renvoi en commission présentée par le groupe communiste républicain et citoyen, que j'ai l'honneur de défendre en tant que membre du Mouvement des citoyens, s'appuie sur deux arguments essentiels.
Tout d'abord, sur un texte de cette importance, le moins que l'on puisse dire, c'est que le travail a été mené au pas de charge : sauf erreur de ma part, de tous les avis sollicités, seul le Conseil national du patronat français a exprimé sa satisfaction.
Ensuite, les implications financières pour le budget de l'Etat ne semblent pas avoir été étudiées au fond. Je m'étonne d'ailleurs - et c'est l'objet de cette motion - que, sur un sujet de cette importance, et compte tenu des implications sur les finances de l'Etat, la commission des finances n'ait pas été saisies pour avis de ce texte.
Partant de là, mes chers collègues, je vais vous démontrer combien ce projet de loi mériterait plus d'attention et une étude plus approfondie.
Le service public est le ciment de notre République. Il est toujours l'objet d'une fierté nationale et c'est bien légitime. Quel Français ne s'est pas enorgueilli de chemins de fer performants, d'un réseau d'électricité et de gaz sûr et reconnu, d'une diffusion des télécommunications alliant l'intérêt général et les défis de la haute technologie tant il est vrai que l'entreprise France Télécom a su mener à bien la modernisation de ce secteur ?
Aujourd'hui, c'est cela que la majorité tente de réduire : ce service public à la française qui découle de grandes victoires ou de grands mouvements sociaux. Je pense bien sûr à la Révolution mais aussi, plus près de nous, à l'esprit qui a soufflé dans notre pays au moment de la Libération.
C'est si vrai d'ailleurs que, un temps, le Premier ministre actuel avait songé à introduire dans la loi fondamentale, notre Constitution, la notion de service public à la française, et puis cela a disparu.
Le débat, mes chers collègues, n'est pas entre les modernes, qui ne jureraient que par la déréglementation-privatisation, et les archaïques, qui prôneraient le maintien à tout prix du service public. Non, le débat est ailleurs. Il est entre ceux qui estiment que, dans ce pays, dans notre Europe, tout est marchandise - et je crois que c'est effectivement le cas d'un grand nombre de parlementaires de la majorité - et ceux, dont nous faisons partie, qui estiment que certains secteurs de l'économie ont une telle importance qu'ils doivent rester au service de la nation, en tout cas qu'il existe des domaines dans lesquels l'Etat, en tant que tel, usant de son pouvoir régalien d'intervention, doit pouvoir dire clairement où est l'intérêt général.
Oui ! votre volonté de privatiser France Télécom nous paraît, d'abord et avant tout, idéologique. Je dirai que les gesticulations du Gouvernement et de sa majorité sur l'inéluctabilité de ce processus tiennent plus de la méthode Coué que d'autre chose. Comme le dit l'adage : « Qui veut tuer son chien l'accuse de la rage. »
France Télécom, mes chers collègues, ne souffre pas de la rage mais d'une volonté de mainmise par un certain nombre de grands groupes, qu'ils soient nationaux ou internationaux, qui n'ont que faire du service public, mais qui aimeraient bien pouvoir pénétrer davantage encore les seuls segments intéressants pour eux, c'est-à-dire ceux qui ont une rentabilité à court terme.
Avec la déréglementation du service des télécommunications, c'est la guerre économique que l'on tente de mettre en place là où le monopole public a, jusqu'à présent, favorisé la diffusion, la recherche, et pourrait former un cadre pour des opérations de coopération sans domination.
S'il est un exemple de réussite du secteur public, c'est bien l'entreprise France Télécom ! Je reviendrai sur ses résultats financiers, mais comment ne pas souligner dès maintenant le haut degré de satisfaction des usagers, les outils remarquables de recherche, je pense notamment au Centre national d'études des télécommunications ?
En agissant comme vous le faites, vous laissez de côté tout ce qui fait la grandeur du service public, à savoir la mission d'entraîner toute l'économie, le secteur public mais aussi le secteur privé, vers des objectifs de société : le progrès social, l'amélioration du cadre de vie, les technologies de pointe au service de tous, et l'intervention citoyenne dans l'organisation de ces services.
Ce qui vous gêne, monsieur le ministre, ce qui gêne les membres de votre majorité, c'est de voir que le secteur public peut être économiquement performant tout en assurant des missions sociales largement au-dessus de la moyenne. Il faut bien reconnaître que, dans ce tableau, dans ce modèle néo-libéral qui est préconisé aujourd'hui, qui est très à la mode, qui fait partie de ce qu'on appelle la « pensée unique », France Télécom fait quelque peu désordre.
Mais, sans doute, ce dont vous n'avez pas pris la mesure, c'est que l'esprit de service public est largement répandu parmi nos concitoyens. Les mouvements sociaux de novembre et décembre dernier, la sympathie qui les a accompagnés dans la population en sont plus qu'un indice : c'est une preuve flagrante de cet attachement.
Mes chers collègues, les citoyens veulent rester des usagers ; ils se refusent à n'être que des consommateurs.
Alors, avec constance et application, tous les promoteurs de ce projet - Gouvernement, majorité - s'appliquent à montrer que le service public n'est pas remis en cause, que ce serait un mauvais procès, et M. le rapporteur s'est livré à l'instant à cet exercice.
Monsieur le ministre, vous êtes allé jusqu'à dire, au cours du débat à l'Assemblée nationale, que seule la CGT en tant qu'organisation syndicale s'opposait au texte. Aujourd'hui, force est de constater que cela ne correspond pas tout à fait à la réalité : les syndicats les plus représentatifs au sein de France Télécom sont hostiles à votre texte.
M. François Fillon, ministre délégé. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le sénateur ?
M. Paul Loridant. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à M. le ministre, avec l'autorisation de l'orateur.
M. François Fillon, ministre délégué. Monsieur le sénateur, je vous défie de trouver une motion appelant à la grève contre le projet de loi de réglementation des télécommunications émanant d'un autre syndicat que la CGT.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Loridant.
M. Paul Loridant. Je ne veux pas jouer sur les mots, monsieur le ministre, mais je serais étonné que Force ouvrière ou que le syndicat SUD aient exprimé leur accord avec les orientations de ce projet de loi. En tout état de cause, c'est ce qui m'a été rapporté et ce que j'ai entendu de la part des responsables syndicaux, au moins du syndicat SUD.
M. François Fillon, ministre délégué. Regardez !
M. Paul Loridant. J'ai plutôt tendance à croire ceux qui vivent cette déréglementation de l'intérieur !
Un autre point démontre, si besoin était, votre volonté de supprimer le rôle de la puissance publique dans la politique nationale des télécommunications : c'est la création de l'autorité de régulation des télécommunications.
Je dois dire que, sur un certain nombre de travées, et pas seulement sur celles de l'actuelle majorité, cela devient une obsession que de créer des autorités dites indépendantes, mais qui ont comme socle commun des normes libérales importées des Etats-Unis et reprises régulièrement par les autorités de Bruxelles.
Vous connaissez ma réticence, voire mon aversion, pour tout ce qui dessaisit les citoyens de leurs prérogatives. Nous avons là un bel exemple. On confie à un groupe d'experts le soin de définir la politique des télécommunications, comme si le Gouvernement voulait fuir ses responsabilités. Les représentants du peuple sont évincés, et ne parlons pas des citoyens !
On appelle cela un exemple type de technocratie, laquelle était d'ailleurs si violemment mise au banc des accusés par l'actuel Président de la République alors qu'il se trouvait en campagne électorale. Il est vrai qu'il serait plus facile de comptabiliser les promesses tenues que celles qui ne l'ont pas été. Cela irait plus vite !
Verra-t-on bientôt un « M. Trichet bis » des télécommunications expliquer que la péréquation tarifaire n'a plus lieu d'être ? On peut le craindre, mes chers collègues.
Le parallèle avec le gouverneur de la Banque de France et le Conseil de la politique monétaire n'est pas fortuit, car, chacun aura pu le constater, cette autorité indépendante, comme on dit, est le porte-parole le plus puissant de l'orthodoxie en matière monétaire, et même en matière budgétaire, domaine où elle n'est pourtant pas compétente. En effet, c'est bien le gouverneur de la Banque de France qui a enjoint au Gouvernement et à sa majorité d'accélérer la réduction des dépenses publiques. Il ne me semble pas qu'il ait de pouvoir en ce domaine, mais il se pare de toutes ses fonctions pour expliquer que, si l'on ne va pas à la monnaie unique, le pays court à la catastrophe.
Avec cette autorité de régulation, j'ai le sentiment que c'est un peu la même opération qui se renouvelle. Mon ami Georges Sarre vous l'a dit à l'Assemblée nationale, monsieur le ministre : quel rôle jouerez-vous, dans ces conditions, vis-à-vis du secteur des télécommunications ? Avez-vous à ce point le sens du sacrifice que vous renonciez à vos propres fonctions, ou tout au moins à ce qui fait l'essence même de votre autorité de ministre dans ce domaine ?
Enfin, le troisième argument que je tiens à évoquer pour expliquer pourquoi il est nécessaire de conserver le domaine des télécommunications au sein du secteur public est largement connu de la population.
Les principaux opérateurs sur les segments ouverts sont les mêmes - c'est un exemple pris au hasard - que ceux qui travaillent sur le marché de l'eau.
Mes chers collègues, n'y aurait-il pas lieu de craindre quelques excès dans ce domaine, comme nous en avons connu avec le marché de l'eau ? Pour éviter tel ou tel problème d'entente ou plus que cela, le monopole est parfois le meilleur rempart.
Comme vous le constatez, mes chers collègues, les arguments de privatisation de France Télécom sont essentiellement idéologiques, d'autant plus que cette privatisation va à l'encontre de l'objectif affiché de réduction des dépenses publiques.
Examinons très attentivement les résultats de l'entreprise.
Avec plus de 9 milliards de francs de résultats en 1994 et en 1995, France Télécom est l'entreprise qui réalise le plus gros bénéfice en France, devant le secteur bancaire.
Avec plus de 35 milliards de francs d'investissement en 1994 et plus de 32 milliards de francs en 1995, France Télécom est le plus gros investisseur de notre économie.
Avec plus de 130 milliards de francs de chiffre d'affaires, c'est la deuxième entreprise de services du pays. C'est également le cinquième employeur.
A ces chiffres connus de tous, je voudrais en ajouter quelques-uns.
La valeur ajoutée créée, en 1994, est de 101 milliards de francs, soit environ 70 p. 100 de son chiffre d'affaires. Cela montre à la fois les performances de France Télécom et de son personnel, ainsi que la grande profitabilité qui existe dans ce secteur. Ceci explique sans doute cela !
Par ailleurs, comment ne pas insister sur ce que reçoit l'Etat chaque année de la part de France Télécom ? De 1981 à 1995, ce sont quelque 180 milliards de francs qui ont été prélevés par l'Etat sur le budget des télécommunications.
Or, la mise sur le marché de la moitié du capital de cette entreprise pourrait rapporter au budget environ 65 milliards de francs, soit la moitié des fonds propres consolidés.
La dichotomie saute aux yeux : l'Etat va retirer de cette privatisation l'équivalent de cinq années de prélèvements ; mais ensuite, mes chers collègues, ce sera terminé car la privatisation est un fusil à un coup.
Quel que soit l'avis des uns ou des autres en matière de privatisation du secteur public, chacun devrait convenir qu'il s'agit d'une mauvaise affaire pour l'Etat, conséquence d'une politique budgétaire à courte vue.
Qui plus est, France Télécom est actuellement soumis à l'impôt sur les sociétés, ce qui signifie qu'il contribue aux finances de l'Etat. Qu'en sera-t-il après la privatisation ? Nous demandons à voir, connaissant la possibilité pour les grands groupes de répartir leurs résultats dans des processus de mondialisation et de répartition entre les différents pays où ils sont implantés.
Enfin, la question de la pérennité de la recherche et de l'enseignement supérieur liés à France Télécom est directement posée. D'autres l'ont fait avant moi, mais je me permets d'y insister : au sein même de France Télécom, existent des établissements d'enseignement supérieur très performants. Il existe des centres de recherche au Centre national d'études des télécommunications, le CNET ; il y a des établissement d'études à Rennes et à Caen ; il y a le centre d'études de TDF. On sait qu'ils dépendent de France Télécom. L'Etat a-t-il prévu, monsieur le ministre, de les prendre en charge directement sur son budget ?
M. François Fillon, ministre délégué. Je l'ai dit !
M. Paul Loridant. Si tel est le cas, expliquez-nous comment cela se fera dans un contexte où, par ailleurs, il est demandé de réduire les dépenses nouvelles ? C'est en effet une charge nouvelle pour l'Etat, sauf à dire que le Gouvernement se propose de les supprimer ou de les restructurer.
Vous le voyez, mes chers collègues, le choix de la privatisation est, malgré les apparences, un mauvais coup pour nos finances publiques.
Mes chers collègues, vous qui êtes si attachés à ce souci de réduction des dépenses publiques, quelle est votre position ?
En tout état de cause, rien ne me semble avoir été suffisamment étudié, et les pistes que j'ai exposées dans cette motion mériteraient d'être explorées.
La commission des finances a reçu M. Bon mais n'a pas étudié le projet de loi. C'est pourquoi, au nom des sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen et en mon nom personnel, en qualité de membre du Mouvement des citoyens, j'invite le Sénat à adopter cette motion de renvoi à la commission des finances afin que le coût réel de la déréglementation à court terme, à moyen terme, mais aussi à long terme soit connu et rendu public afin que la Haute Assemblée puisse mesurer l'exacte portée de la décision qu'elle est appelée à prendre. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est proposé un renvoi à la commission au motif qu'il serait nécessaire « d'examiner les conséquences inévitables et importantes de l'évolution de la réglementation des télécommunications sur les finances publiques ».
Notre collègue a commencé son exposé en disant que tout cela était fait au pas de charge !
Mme Hélène Luc. C'est exact, puisque ce texte est examiné en urgence !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je le renvoie au rapport L'Avenir de France Télécom : un défi national. C'est le fruit d'un travail de la commission des affaires économiques et du Plan commencé en novembre. Il est paru en mars, après 200 auditions. Il s'agit d'une étude approfondie. Ce n'est pas un rapport de technocrates ! Si l'on peut dire que je suis un « techno » de la vétérinaire, je ne suis en aucun cas un « techno » des télécommunications !
La seule similitude, c'est la puce électronique dans un cas et la puce du lapin dans l'autre, celle qui transmet la myxomatose pulex pulex.
Quoi qu'il en soit, il n'est pas question ici de pas de charge. La tactique évoquée par M. Delfau est comparable à un pas de valse !
Par ailleurs, monsieur Loridant, vous avez mentionné l'exemple de l'eau. J'appelle de mes voeux une autorité de régulation dans ce domaine, comme dans celui des télécommunications.
Enfin, monsieur le sénateur, vous avez parlé de l'enseignement supérieur dépendant de France Télécom et de son transfert à l'Etat. Dois-je vous rappeler que, lorsque vous siégiez sur un banc un peu plus à droite de la partie gauche de cet hémicycle, vous avez voté la loi de 1990, qui prévoyait le transfert des charges relatives à l'enseignement supérieur à l'Etat ?
Il est vrai que les décrets n'ont jamais été pris, mais ce qui est transféré aujourd'hui était bel et bien contenu dans la loi de 1990.
Permettez-moi maintenant de présenter quelques remarques qui rappelleront aux membres de la Haute Assemblée les travaux de la commission des affaires économiques et du Plan parus au mois de mars dernier.
Tout d'abord, s'agissant des collectivités locales, notre commission a analysé les conséquences du système de la redevance d'occupation. Son plafond sera fixé par décret en Conseil d'Etat, mais il appartiendra aux conseils généraux et aux conseils municipaux d'en fixer le montant, qui, d'après une première estimation, serait d'environ 150 millions de francs, ressources et recettes que ne prévoyait pas la loi de 1990.
Ensuite, monsieur Loridant, je vous renvoie à l'étude d'impact que le Gouvernement a transmise à la Haute Assemblée, étude consacrée notamment à l'analyse des incidences financières du projet de loi.
S'agissant des recettes fiscales de l'Etat, qui atteignaient - vous l'avez d'ailleurs rappelé, mais on retrouve cette donnée dans le rapport de la commission que j'ai déjà évoqué - 13 milliards de francs en 1995, qui est le dernier exercice connu, elles devraient être stables si l'on compare avec les entreprises étrangères déjà soumises à la concurrence, et à la condition, bien sûr, que France Télécom fasse face à cette concurrence, se diversifie et se développe.
S'agissant de la valeur de France Télécom et, donc, des intérêts patrimoniaux de l'Etat, les exemples étrangers montrent que l'ouverture à la concurrence a plutôt développé les marchés sur lesquels interviennent les opérateurs historiques. Comme M. le ministre l'a rappelé tout à l'heure, si la durée des communications est de huit minutes par jour en France, elle est de vingt minutes aux Etats-Unis. Il doit y avoir une exception chez moi, à Rambouillet ; mais il s'agit là d'une considération strictement personnelle !
S'agissant des taxes et des redevances, l'étude d'impact apporte des précisions : tout d'abord, il n'est pas envisagé d'augmenter le montant de la taxe de constitution de dossier de demande d'autorisation ; ensuite, le produit des redevances pour le plan de gestion de numérotation et le contrôle que les opérateurs devront acquitter atteindrait entre 5 millions de francs et 7 millions de francs ; enfin, le produit des redevances pour mise à disposition des fréquences radioélectriques, qui sont de 400 millions de francs aujourd'hui, pourrait croître de 100 millions de francs.
S'agissant de l'impact budgétaire de la création des nouvelles structures, notamment de l'autorité de régulation, un transfert de charges devrait être opéré en faveur de cette autorité de régulation à partir des effectifs en personnel du ministère en faveur des opérateurs par une rémunération des prestations et obligations imposées par l'Etat au titre de la défense et de la sécurité.
Enfin, un prélèvement sur la taxe d'apprentissage de 400 millions de francs permettra de financer l'enseignement supérieur qui relèvera désormais de l'Etat.
Dans ces conditions, mes chers collègues, le renvoi en commission n'est nullement nécessaire. C'est pourquoi, au nom de la commission ainsi que de bon nombre de collègues qui se sont intéressés à cette question depuis longtemps, ont analysé et préparé cette réforme importante, je souhaite que nous poursuivions la discussion de ce projet de loi. Je demande d'ailleurs que le Sénat se prononce par scrutin public.
Mme Hélène Luc. Le groupe communiste républicain et citoyen également.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 67, tendant au renvoi à la commission, repoussée par la commission et par le Gouvernement.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une de la commission, l'autre du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 91:

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 316
Majorité absolue des suffrages 159
Pour l'adoption 93
Contre 223

Monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d'aborder la discussion des articles, je vous propose d'interrompre nos travaux pendant quelques instants. (Assentiment.)
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de réglementation des télécommunications.
Nous passons à la discussion des articles.

Article additionnel avant l'article 1er

M. le président. Par amendement n° 139, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 1er, un nouvel article ainsi rédigé :
« La présente loi porte réglementation et développement du service public des télécommunications.
« Les télécommunications sont régies par les principes du service public. A ce titre, elles satisfont au principe d'égalité, de continuité, d'adaptabilité, de neutralité, de participation, de transparence, de simplicité et d'accessibilité. »
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Par cet amendement, nous avons souhaité faire du service public le pivot de la réglementation des télécommunications. En effet, le service public est à nos yeux au coeur du pacte républicain. Il est de ce fait indispensable, car il participe au renforcement de la cohésion sociale et au développement solidaire des territoires.
Le service public, c'est un élément fort de notre démocratie de par les principes qu'il recouvre. Ces principes sont au nombre de huit. Nous avons tenu à tous les décliner.
Le premier est le principe d'égalité. L'égalité est un principe constitutionnel. Il est au coeur de notre devise mais, malheureusement, je crains qu'il ne soit mis à mal par ce texte. Je prendrai un seul exemple. La définition en trois composantes que vous faites du service public, créant ainsi deux catégories de citoyens : ceux qui devront se contenter du service universel et ceux qui auront les moyens d'avoir accès à ce que vous appelez « les services obligatoires », à savoir les modes de télécommunications les plus avancés. De ce traitement inégalitaire, nous ne voulons pas. C'est pourquoi nous proposons d'énoncer clairement que le service public des télécommunications doit respecter le principe d'égalité.
Le deuxième principe est celui de continuité. Il s'agit, là encore, d'un principe très important, car c'est en son nom que les pouvoirs publics se doivent de mener une politique volontariste d'aménagement du territoire afin que tous les citoyens puissent avoir accès, quel que soit le lieu où ils résident, à un service téléphonique de haute qualité. Dans la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, il est prévu la réalisation d'un schéma sectoriel des télécommunications, notamment des réseaux interactifs à haut débit. C'est un objectif ambitieux auquel nous souscrivons. Mais, là encore, en plaçant la concurrence au coeur de la réglementation, je crains que ce schéma ne voit jamais le jour.
Le troisième principe est celui d'adaptabilité. Là encore, nous touchons à un point clé de notre débat. Le service public doit-il rester figé dans une définition arrêtée à un moment donné ? Nous ne le pensons pas et nous ne sommes pas les seuls. Il nous a semblé que, sur toutes les travées, a été défendue la nécessité de donner un égal accès au téléphone mobile et au réseau à haut débit pour tous les citoyens et donc de considérer ces éléments comme partie intégrante du service public.
Si nous n'y prenons garde, votre service public réduit au service universel ne respectera pas ce principe d'adaptabilité. Le projet de loi prévoit, certes, une clause de révision, mais tous les cinq ans. L'Assemblée nationale et notre rapporteur ont proposé un rendez-vous plus rapproché. Cela sera-t-il suffisant compte tenu de la rapidité des progrès technologiques dans ce secteur ? Nous ne le croyons pas. Le service public des télécommunications doit aussi satisfaire à ce principe en permanence.
Le quatrième principe est celui de neutralité. Je crois, monsieur le ministre, que vous y êtes sensible, puisque c'est en quelque sorte en son nom que vous proposez de créer une autorité de régulation. Nous ne pensons pas, pour notre part, que ce soit le meilleur moyen de faire respecter ce principe. Sa mise en application relève plutôt, à nos yeux, des prérogatives de la puissance publique. Qui mieux qu'elle peut en effet garantir un tel principe ? N'est-ce pas là l'objet de l'Etat ? Les fonctionnaires n'ont-ils pas obligation d'agir en vertu de ce principe ? J'ai bien peur que, en donnant à une autorité des compétences en matière réglementaire qui relèvent normalement des missions de pouvoirs publics, nous ne bousculions le principe de neutralité.
Le cinquième principe est celui de participation. Il permet à tous les usagers - personnels, collectivités locales, entreprises - d'avoir leur mot à dire. C'est la parole donnée au citoyen, pour un meilleur fonctionnement de ce service public.
Le sixième principe est celui de transparence. Là encore, ce principe est souvent cité dans le projet de loi. Vous nous dites qu'il ne peut y avoir de concurrence loyale sans transparence. C'est vrai. Pourtant, ce projet de loi ne met pas en oeuvre ce principe. Je ne prendrai qu'un exemple : l'interconnexion. Pourquoi seul France Télécom aura, de fait, une offre tarifaire et technique à publier ?
Le septième principe est celui de simplicité. Un service public doit être un service simple, dont tout le monde comprend l'usage. Le système que vous nous proposez est un vrai maquis. La loi que vous avez écrite est extrêmement complexe. Elle est source, pour les entreprises, d'insécurité juridique, car la frontière entre les compétences de l'Autorité de régulation des télécommunications, du Conseil supérieur de l'audiovisuel et du Conseil de la concurrence n'a pas été suffisamment précisée. De plus, elle met le simple citoyen au coeur de la lutte sauvage à laquelle risquent de se livrer les opérateurs pour gagner des parts de marchés, sans que ses droits de consommateur soient respectés.
Enfin, le huitième et dernier principe est celui d'accessibilité. Il doit permettre à tous d'accéder au service téléphonique. Là encore, ce principe ne sera plus appliqué, nous semble-t-il. J'en donnerai deux exemples : la hausse programmée de l'abonnement et le fait que les mobiles et les réseaux à haut débit donnant accès aux fameuses « autoroutes de l'information » ne seront pas accessibles à tous.
Construire la nouvelle réglementation des télécommunications avec, en son centre, le respect des principes du service public, tel est l'objet de cet amendement que nous vous demandons d'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement n° 139.
Nous avons déjà répondu à beaucoup d'arguments. A force de dialoguer ainsi sans être entendu, je finis par me poser quelques questions !
Rappelez-vous que la clause de révision existe. Nous proposerons que le « rendez-vous » soit avancé d'une année.
Des dispositifs d'engagements sont prévus au cours de l'année 1997 pour un certain nombre de services nouveaux ; je pense aux mobiles, même s'ils sont hors du service public.
Enfin, l'article 35 du code des postes et télécommunications, tel qu'il est rédigé à l'article 6, énonce clairement les principes de service public. Voilà pourquoi c'est à l'article 6 que nous examinerons les conditions d'un service public de qualité, y compris les clauses de révision qui prévoient que le service public n'est pas figé. Je rappelle qu'aujourd'hui le réseau numérique à intégration de services n'est pas dans le service public.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Nous devons nous entendre sur une méthode pour ce débat. Ou bien aucun des arguments apportés par le Gouvernement et par la commission n'est pris en compte par l'opposition et, dans ce cas, il n'est pas utile de continuer à argumenter. Ou bien Mme Pourtaud veut bien examiner quelques-uns des arguments que j'ai eu l'occasion de défendre et qu'elle semble encore ignorer.
Le service universel, c'est le service du téléphone. Il faut y ajouter d'autres services, me dites-vous. Lesquels ? Les services à haut débit ? Quels sont aujourd'hui les services que l'on trouve sur les réseaux à haut débit qui seraient de nature à entrer dans le service universel ? Je veux qu'on me le dise ! Quel est le service qui peut être apporté aujourd'hui - je ne dis pas demain - à un usager de France Télécom, quelque part en France, qui ne puisse être rendu sur le réseau téléphonique actuel ? Y a-t-il aujourd'hui des services qui sont offerts par France Télécom sur des réseaux à haut débit qui s'adressent aux usagers que nous sommes, les uns et les autres ?
M. Delfau, comme beaucoup, a évoqué la vieille dame de la Lozère qui va être privée du service public du téléphone. A-t-elle besoin des liaisons louées à haut débit ? A-t-elle besoin du télex ? A-t-elle besoin du réseau numérique à intégration de services ?
Mme Hélène Luc. Mais il n'y a pas qu'elle en Lozère !
M. François Fillon, ministre délégué. Il y a là une très grande hypocrisie ! Le service public que nous proposons, c'est le service du téléphone avec l'ensemble des composantes auxquelles les Français sont aujourd'hui habitués et attachés.
Si, demain, le Parlement estime qu'il faut intégrer une nouvelle technologie dans la définition du service universel, par exemple le réseau numérique à intégration de services parce qu'il permettrait d'avoir l'image sur le poste téléphonique - mais vous reconnaîtrez qu'aujourd'hui ce service n'existe pas - il le décidera !
Vous continuez de répéter inlassablement que la définition du service universel est figée alors que le Parlement en a la maîtrise ! Comment pourrait-on mieux rendre évolutive la définition du service universel ? Le Gouvernement proposerait de conserver la possibilité de faire évoluer ce service universel, je comprendrais votre argumentation. Le Gouvernement confierait à l'autorité de régulation la possibilité de faire évoluer la définition du service universel, je comprendrais aussi votre argumentation. Mais là, c'est le Parlement qui se saisit directement !
Vous souhaitez une révision tous les quatre ans. L'Assemblée nationale a proposé une révision au moins tous les cinq ans, ce qui permettrait peut-être au Parlement de se saisir en fonction des évolutions technologiques. Nous aurons un débat sur ce point tout à l'heure. En attendant, on ne peut pas dire que nous offrons aujourd'hui un service public minimum !
L'amendement que vous nous proposez revient à élargir à l'ensemble des opérateurs de télécommunications les principes du service public. C'est tout le contraire de ce que nous voulons faire, précisément parce que nous voulons protéger le service public et surtout l'opérateur public en charge du service universel. Vous voulez, vous, que tous les opérateurs - par conséquent, tous les opérateurs privés puisque le projet de loi ouvre les services des télécommunications à la concurrence - respectent les obligations de service public. Il faudrait donc que tous les opérateurs privés participent à l'offre du service public. C'est ce que nous ne voulons pas parce qu'il faut, selon nous, que ce soit France Télécom, l'opérateur public, qui maîtrise l'offre de service public.
Certains pays ont fait d'autres choix. L'Allemagne, par exemple, a choisi de mettre en concurrence le service public. Nous, nous voulons que France Télécom reste le seul opérateur du service public.
Les arguments que vous avez évoqués à propos de la « jungle » à laquelle sera confronté l'utilisateur ne résistent pas à l'examen, notamment en raison des mesures que j'ai énoncées tout à l'heure : par exemple, s'agissant de la portabilité des numéros, qui n'existe pas aujourd'hui, on ne peut pas faire mieux en matière de simplicité puisque chaque usager aura son numéro de téléphone et le conservera quel que soit son lieu d'habitation ou son opérateur. Cela me fait dire que, pour l'usager, cette ouverture à la concurrence sera simple d'emploi et qu'elle se fera dans la transparence.
Enfin, vous continuez à vouloir faire croire que l'usager devra supporter une hausse du coût du service téléphonique, notamment pour les communications locales, alors que le texte précise clairement que la hausse de l'abonnement ne pourra se faire qu'à l'occasion d'une baisse globale des tarifs. Cela signifie que le solde entre la hausse de l'abonnement et la baisse des tarifs devra bénéficier à l'usager.
Dans ces conditions, vous comprendrez que le Gouvernement soit défavorable à cet amendement qui va contre le service public.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 139, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 1er

M. le président. « Art. 1er. - L'article L. 32 du code des postes et télécommunications est ainsi modifié :
« I. - Les 3°, 7° et 9° sont ainsi rédigés :
« 3° Réseau ouvert au public.
« On entend par réseau ouvert au public tout réseau de télécommunications établi ou utilisé pour la fourniture au public de services de télécommunications. » ;
« 7° Service téléphonique au public.
« On entend par service téléphonique au public l'exploitation commerciale pour le public du transfert direct de la voix en temps réel au départ et à destination de réseaux ouverts au public commutés, entre utilisateurs fixes ou mobiles. » ;
« 9° Interconnexion.
« On entend par interconnexion les prestations réciproques offertes par deux exploitants de réseaux ouverts au public qui permettent à l'ensemble des utilisateurs de communiquer librement entre eux, quels que soient les réseaux auxquels ils sont raccordés ou les services qu'ils utilisent.
« On entend également par interconnexion les prestations d'accès au réseau offertes dans le même objet par un exploitant de réseau ouvert au public à un prestataire de service téléphonique au public. »
« II. - Après les mots : "équipements terminaux", la fin du deuxième alinéa du 12° est ainsi rédigée : ", la protection des données, la protection de l'environnement et la prise en compte des contraintes d'urbanisme et d'aménagement du territoire".
« III. - Il est ajouté un 15° ainsi rédigé :
« 15° Opérateur.
« On entend par opérateur toute personne physique ou morale exploitant un réseau de télécommunications ouvert au public ou fournissant au public un service de télécommunications. »
Sur l'article, la parole est à M. Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les temps changent. Le service public demeure et il évolue. C'est bien naturel !
C'est l'objet du projet de loi qui nous est soumis.
Entre une représentation devenue inactuelle des modalités de fonctionnement du service public et l'idéologie libérale à tout va, ce texte vise à concilier les intérêts des différentes catégories d'usagers, et ce de manière satisfaisante, bien que les situations soient multiples et les attentes souvent contradictoires, en combinant liberté d'entreprise et astreintes, dans un schéma qui traduit bien ce que peut être aujourd'hui l'intérêt général dans le domaine des télécommunications.
Les solutions apportées à ces problèmes sont conçues comme durables, sans quoi nous ne légiférerions pas, mais nous savons bien que le secteur est en pleine évolution, et même en pleine recomposition.
Les prochaines années seront marquées par la fusion de l'audiovisuel, de l'informatique et des télécommunications, sous l'influence des techniques numériques, qui permettent de traduire images et sons en données informatiques, de les stocker et de les transporter en quantité.
A terme, on doit s'attendre et se préparer à une utilisation indifférenciée des supports existants.
Depuis longtemps, les satellites de télécommunications sont utilisés à des fins de communication audiovisuelle, et voici que les opérateurs du câble vont pouvoir offrir à leurs abonnés des services de téléphonie vocale entre points fixes. Le moment viendra où les réseaux de télécommunications autorisés par le ministre chargé des télécommunications pourront proposer des services de communication audiovisuelle tels que la vidéo à la demande.
Le projet de loi que nous examinons repose largement sur cette séparation entre télécommunications et audiovisuel qui deviendra fictive à l'horizon de trois, cinq ou dix ans. Vous avez soigneusement préservé, monsieur le ministre, la délimitation du champ et du régime juridique respectifs des télécommunications et de la communication audiovisuelle opérée par la loi du 30 septembre 1986, comme si, devant les bouleversements difficiles à analyser, même par certains aspects, à prévoir, qui commencent pourtant à poindre, vous aviez retenu le souffle du législatif et de l'exécutif.
Or, quand les programmes de TF 1, de France 2 ou des bouquets de chaînes thématiques seront distribués sur le réseau téléphonique, qu'est-ce qui distinguera celui-ci des réseaux câblés ? Qu'est-ce qui justifiera d'appliquer, en matière d'autorisation d'établissement des réseaux, le régime juridique des télécommunications plutôt que celui de la communication audiovisuelle ?
Des questions graves se posent, en matière de contrôle des contenus particulièrement : les services de communication audiovisuelle actuellement diffusés sur le réseau téléphonique comme sur les réseaux de type Internet sont non pas contrôlés par le Conseil supérieur de l'audiovisuel mais soumis au régime juridique de la télématique, qui est, disons, moins exigeant que le dispositif mis en place par la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication. Verra-t-on à terme un même service de communication audiovisuelle soumis à des régimes juridiques différents selon tel ou tel support exploité ?
D'ores et déjà se pose de façon aiguë le problème du contenu des services de communication audiovisuelle diffusée sur Internet. La faiblesse du régime actuel de la télématique a de très nombreuses implications en matière de promotion de la francophonie et de l'industrie française des contenus comme pour la préservation de certaines règles d'ordre public. Je pense à la protection de l'enfance et de l'adolescence, à celle des consommateurs, à celle de la vie privée, tout simplement à celle du citoyen.
Vous avez, monsieur le ministre - vous aussi, monsieur le rapporteur - déposé un amendement qui tend à instaurer un contrôle déontologique du Conseil supérieur de l'audiovisuel sur ces services télématiques et qui permet de mettre en cause la responsabilité pénale des fournisseurs d'accès.
Cet amendement tranche de façon un peu impromptue une partie des problèmes que suscite l'évolution technologique.
Sa discussion permettra, je l'espère, de préciser les procédures qu'il met en place, les pouvoirs qu'il institue, les responsabilités qu'il crée.
J'ai dit qu'il tranchait de manière un peu impromptue. Permettez-moi d'y insister.
A de très nombreuses reprises, devant la commission des affaires culturelles, M. le ministre de la culture a été interrogé sur les problèmes que je viens de rappeler. Nous lui avons demandé quelles étaient ses intentions et celles du Gouvernement. Il nous a répondu qu'il allait engager une concertation à l'échelon européen. Fort bien !
Lorsque le projet de loi est arrivé sur le bureau du Sénat, nous nous sommes demandé si la commission des affaires culturelles ne devait pas se saisir pour avis. Nous y avons renoncé, considérant que la matière telle qu'elle était présentée ne ressortissait évidemment pas du domaine de la commission des affaires culturelles.
Or voilà qu'est déposé un amendement, de manière impromptue, disais-je, qui, de toute évidence, en ressortit, lui.
Je souhaite, monsieur le ministre, que la discussion de l'amendement éclaire notre assemblée et ne laisse pas dans l'ombre un certain nombre de questions qui se posent et que j'aurais souhaité énumérer au cours de cette intervention, forcément trop brève, puisque limitée par notre règlement.
Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, je prends date en vous demandant de profiter de ce débat pour apporter les éclaircissements que, non seulement la commission des affaires culturelles du Sénat, les membres de la Haute Assemblée, mais le pays attendent sur un sujet qui est fondamental.
M. le président. La parole est à M. Billard.
M. Claude Billard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le premier article de ce projet de loi est essentiel. Il définit les procédures et les acteurs sur le marché des télécommunications dans le cadre choisi par le Gouvernement. Les concepts retenus tournent le dos au service public et traduisent une démarche fortement inégalitaire dont les usagers auraient, si ce texte entrait en application, à pâtir gravement.
Il ne faut pas hésiter à le dire, ce premier article est la pierre angulaire de la destruction du service public « à la française » dans le domaine des télécommunications. Et, l'on ne redira jamais assez combien les discours gouvernementaux tenus lors du mouvement de novembre et décembre sur le service public n'étaient en fait que des tentatives de désamorcer une volonté de préserver et rénover les atouts de la France.
M. Gérard Delfau. C'est vrai !
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Claude Billard. L'article 1er est ouvertement défavorable à l'entreprise publique. Notre groupe y reviendra lors de la discussion des amendements de suppression qui seront l'occasion de souligner que ce que vous faites est un pillage du secteur public national au profit de grands groupes privés qui ne jurent que par les dividentes et la rentabilité financière à court terme.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ont une tout autre conception du rôle et du devenir de la télécommunication. C'est une question primordiale, à l'heure où l'on parle de révolution informationnelle et où nombre d'activités professionnelles et domestiques sont parties prenantes de cette révolution.
L'enjeu est bien la maîtrise des réseaux de télécommunications qui, chacun le sait, seront les artères du développement économique et social de notre pays. Bien entendu, avec de telles transformations, le service public dans son ensemble, et qui plus est les télécommunications, doivent relever les défis qui leur sont posés. Il n'est donc nullement question, comme je l'ai dit hier soir, de préconiser un statu quo !
Mais rénover le public, ce n'est pas copier le privé ! Ce serait faire preuve d'un manque d'imagination qui, on le voit sans peine, aboutit dans notre pays à une déliquescence de nos atouts.
Une réelle rénovation du secteur public permettrait d'allier les intérêts des salariés, des usagers, de la nation à la réponse aux nouveau défis technologiques.
Pour rénover le secteur public, il faudrait commencer par développer ses critères et ses règles spécifiques. La France a une tradition originale de gestion publique. Elle a été capable, à chaque période où un nouveau développement du public s'imposait, de créer et de promouvoir une gestion originale.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. Claude Billard. C'est aujourd'hui aux télécoms de trouver la meilleure réponse aux défis à venir. Mais quel gâchis ce serait d'abandonner les critères et les règles du service public à la française pour la solution paresseuse qui consiste à copier le privé !
Oui, une gestion plus autonome, plus décentralisée, avec l'intervention des salariés et des populations est nécessaire. C'est tout autre chose que d'avoir un service minimum dévolu au public car non rentable et une multitude d'acteurs sur les segments porteurs qui se font la guerre et donc gâchent des fonds et des possibilités de développement. Faire intervenir les salariés et les populations, c'est le gage de la démocratie et donc de l'efficacité.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article 1er est liberticide pour l'avenir de France Télécom. Il organise le démantèlement de l'entreprise qui réalise le plus gros bénéfice de France, toutes entreprises confondues, ce dont nous sommes fiers. C'est le résultat d'une politique de développement public qui allie, depuis la Libération, l'égalité de traitement, l'unicité du service public à un travail remarquable des agents de l'Etat.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous confirmons notre opposition résolue à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je souhaiterais ajouter quelques mots aux propos tenus par M. Gouteyron.
M. le président de la commission des affaires culturelles a eu bien raison de dire que l'émergence du multimédia était en train de bouleverser les frontières, héritage technique et historique de nos pratiques, et que, entre l'autorité de contrôle de l'audiovisuel et, demain, l'autorité de régulation de télécommunications, il y avait sans doute à définir des frontières qui puissent, à la manière de ce qui s'est passé pour Schengen, être plus perméables et déterminer un secteur moins segmenté.
Certes, comme l'a dit M. Gouteyron, est intervenu un impromptu qui n'avait pas vocation à trancher mais à essayer de résoudre un certain nombre de problèmes que les réseaux nouveaux, que les fournisseurs d'accès à ces réseaux nouveaux et que le contenu de ces réseaux étaient en train de nous poser. En effet, l'actualité récente, au travers de l'inculpation de deux fournisseurs d'accès, nous a démontré qu'il nous manquait les outils permettant, à la fois, de limiter l'accès et de mettre en place une déontologie.
Je suis certain que la commission des affaires culturelles approfondira le chemin que nous avons souhaité tracer et que les faits imposeront d'apporter des réponses encore plus adaptées et plus larges que celles qui sont actuellement apportées.
En l'occurrence, nous n'avons pas voulu rester dans le vide quant au contrôle du contenu, vide que nous avons longtemps connu à propos du kiosque télématique, vide qui a motivé nombre d'interventions en vue de maîtriser et de contrôler tout ce qui était véhiculé en termes de négation de la dignité humaine.
M. le président. Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les cinq premiers sont présentés par MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 79 tend à supprimer l'article 1er.
L'amendement n° 80 vise à supprimer le paragraphe I de l'article 1er.
L'amendement n° 81 a pour objet :
A. - De supprimer les deuxième et troisième alinéas du paragraphe I de l'article 1er.
B. - En conséquence, dans le premier alinéa du paragraphe I de cet article, de supprimer la référence : « 3° ».
L'amendement n° 82 tend :
A. - A supprimer les quatrième et cinquième alinéas du paragraphe I de l'article 1er.
B. - En conséquence, à supprimer, dans le premier alinéa du paragraphe I de cet article, la référence : « 7° ».
L'amendement n° 83 vise :
A. - A supprimer les sixième, septième et huitième alinéas du paragraphe I de l'article 1er.
B. - En conséquence, dans le premier alinéa du paragraphe I de cet article, à supprimer la référence : « 9° ».
Enfin, par amendement n° 58 rectifié quater, MM. Cabanel, Laffitte, Rausch, Joly, Baudot et Bernadaux proposent de compléter le septième alinéa du paragraphe I de l'article 1er par une phrase ainsi rédigée : « A compter du 1er janvier 1988, l'interconnexion inclut l'itinérance entre les réseaux des opérateurs de radiocommunications mobiles, soumis par leur cahier des charges à des obligations de couverture à l'échelle nationale. »
La parole est à M. Pagès, pour présenter l'amendement n° 79.
M. Robert Pagès. Cet amendement tend à la suppression de l'article 1er.
L'ouverture du réseau au secteur privé est, bien entendu, le principal grief que nous ferons à cet article.
L'expérience prouve que la déréglementation des télécommunications est catastrophique pour les salariés comme pour les usagers.
En effet, sous la pression des grands groupes de la communication, la plupart des pays capitalistes se sont lancés dans une course effrénée à la déréglementation.
Le mouvement est parti, dès 1984, des Etats-Unis, qui ont démantelé le géant American Telegraph and Telephon, ATT, pour créer plusieurs sociétés, capables de partir à la conquête de marchés extérieurs, notamment de marchés européens.
Le résultat pour les consommateurs américains ne s'est pas fait attendre. En effet, les factures des ménages ont augmenté de quelque 60 p. 100. En revanche, les grandes entreprises ont bénéficié de baisses tarifaires.
L'autre conséquence concerne bien entendu l'emploi. Le secteur des télécommunications américaines a aussi connu une véritable saignée, d'abord chez ATT avec des suppressions d'emplois depuis 1984, puis chez les nouveaux opérateurs.
La Grande-Bretagne, puis le Japon ont emboîté le pas aux Américains dès la fin de l'année 1984, ces deux pays ayant inauguré la privatisation de leurs télécommunications. Cela a, bien entendu, été une affaire des plus juteuses pour les places financières de Londres et de Tokyo, qui ont mis sur le marché les plus grosses capitalisations boursières de l'histoire.
Comme aux Etats-Unis, les effets pour les personnels et les usagers ont été destructeurs. Des suppressions d'emplois ont été décidées chez BT et Nikon Telegraph and Telephon.
Les ménages ont, bien évidemment, dû subir une forte hausse des tarifs, notamment en Grande-Bretagne. Voilà qui démontre bien que la bourse est l'ennemie de l'emploi stable, et j'insiste sur cet adjectif.
Les conséquences de la privatisation et de la déréglementation de ce secteur sont toujours les mêmes. Je ne citerai que les deux principales.
La première est la suppression massive d'emplois stables dans les services, mais aussi dans l'industrie des télécommunications. Il faut savoir qu'en Grande-Bretagne cette industrie n'existe pratiquement plus.
La seconde conséquence est la mise des télécommunications entre les mains des multinationales - elles ne sont pas des philantropes - qui en deviennent actionnaires et maîtrisent ainsi directement les réseaux de communication, systèmes nerveux des sociétés contemporaines.
Pour toutes ces raisons, nous demandons à la Haute Assemblée d'adopter, par scrutin public, cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour présenter l'amendement n° 80.
M. Guy Fischer. Par cet amendement de suppression du paragraphe I de l'article 1er, qui introduit dans le code des postes et télécommunications les nouvelles notions de réseaux ouverts au public, de service téléphonique au public et d'interconnexion, nous voulons exprimer notre totale opposition au texte du Gouvernement.
Ces trois notions sont en effet la clé de voûte du système concurrentiel que les partisans de la privatisation veulent mettre en place.
La notion de réseau ouvert au public ouvre en effet les vannes de la déréglementation et de la pénétration des opérateurs privés sur les créneaux d'activité jusqu'à présent réservés à France Télécom qui devait les occuper en appliquant tout ce que le service public peut apporter à tous les usagers.
L'article 5 du projet de loi prévoit certes que cette faculté d'ouvrir un réseau au public sera soumise à une autorisation ministérielle préalable, mais, dans le cadre de cette ouverture à la concurrence, il faut bien constater que les critères de cette autorisation favoriseront l'arrivée des poids lourds des privés du secteur.
France Télécom sera alors tenu de laisser ses concurrents utiliser à moindre frais le réseau construit à partir de l'argent des contribuables et des usagers de ses services, ce qui est, pour nous, totalement inacceptable.
La deuxième notion définie par le paragraphe I de l'article 1er qui est celle de service téléphonique au public ne signifie aucunement service public du téléphone.
C'est même tout le contraire, puisqu'elle permettrait de libéraliser l'accès des grands groupes nationaux et multinationaux aux services téléphoniques les plus immédiatement rentables dans notre pays, dans les gares et les aéroports notamment.
Au lieu de garantir les droits des usagers à un service téléphonique de qualité, cette notion ferait de l'usager un client dont la seule véritable information serait d'ordre publicitaire.
Il ne fait alors aucun doute que les nouveaux opérateurs privés qui investiraient ce nouveau marché ne le feraient que pour les lignes les plus rentables sans se soucier de l'aménagement du territoire ni de l'égalité d'accès au téléphone.
La troisième notion qui est celle d'interconnexion est tout aussi dangereuse puisqu'elle donne une définition technique aux dispositifs d'accès aux réseaux.
Attachés au service public des télécommunications que seule France Télécom peut assurer dans de bonnes conditions tarifaires pour tous, nous ne pouvons donc accepter aucune des trois définitions déclinées au paragraphe I de l'article 1er. Nous ne pouvons donc, par cet amendement n° 80, qu'en demander la suppression.
Mme Hélène Luc et M. Robert Pagès. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Bidard-Reydet, pour défendre l'amendement n° 81.
Mme Danielle Bidard-Reydet. L'article 1er du projet de loi de réglementation des télécommunications est au coeur du dispositif de déréglementation de notre service public des télécommunications.
Au moment de l'arrivée massive de nouveaux outils de communication, au moment de l'explosion de nouveaux médias mêlant simultanément l'image et le son, en faisant appel aux technologies de la téléphonie, l'abandon du monopole de France Télécom est lourd de conséquences.
Une nouvelle fois, nous constatons que nous nous éloignons, chaque jour davantage, des promesses du candidat à la présidence de la République, Jacques Chirac, qui, durant la campagne électorale, soulignait l'importance de la spécificité du service public à la française.
Aujourd'hui, cette spécificité disparaît au bénéfice d'un service « public universel » d'inspiration libérale dont chacun s'accorde à reconnaître qu'il ne s'agit, au fond, que d'une importante modification du service public à la française.
Le secteur des télécommunications est un secteur clé de notre économie. Cette position, appelée à se renforcer et à se développer dans les années à venir, explique d'ailleurs que le président des Etats-Unis, Bill Clinton, fait figurer, dans sa campagne électorale, les autoroutes de l'information parmi les enjeux majeurs du développement économique des Etats-Unis.
La croissance du marché des télécommunications de 5 p. 100 à 7 p. 100 par an, selon les diverses estimations, devrait représenter 8 p. 100 du produit intérieur brut mondial, soit bien plus que l'industrie automobile.
Certains estiment que l'arrivée de ces nouvelles technologies et les contraintes techniques qu'elles engendrent justifient des modifications du service public français.
Il s'agit là, pour nous, de prétextes qui n'ont d'autre objet que de vouloir concéder à des intérêts privés le formidable enjeu économique de la révolution informationnelle qui est en cours.
Quant à la baisse des tarifs liée à l'ouverture de la concurrence, si l'on observe les différentes modifications de tarifs intervenues depuis la réforme de 1994, il apparaît que les baisses ne profitent pas de la même manière aux différentes catégories d'usagers. Les « clients affaires » sortent gagnants d'une diminution opérée à leur seul profit.
L'exemple de la Grande-Bretagne face à la concurrence et à la prétendue baisse des prix de son marché national de l'électricité est particulièrement inquiétant car il en résulte un affaiblissement du service rendu à la population.
En fait, l'ouverture à la concurrence n'a pour objectif que de soumettre le marché de l'information et de la communication en pleine expansion aux intérêts privés. Ce sont les capacités du service public à oeuvrer au développement de ces nouvelles technologies dans notre pays qui seront compromises. Pour y remédier, je vous propose, mes chers collègues, d'adopter l'amendement n° 81.
M. Robert Pagès. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Luc, pour défendre l'amendement n° 82.
Mme Hélène Luc. Dans le droit-fil des propos que nous avons tenus en défendant l'amendement n° 80, nous proposons, par l'amendement n° 82, de supprimer les quatrième et cinquième alinéas du paragraphe I de l'article 1er.
Ces deux alinéas suggèrent une définition du service téléphonique au public qui n'a que peu de rapport avec l'actuel service public.
D'un point de vue technique, l'introduction dans le code des postes et télécommunications de cette nouvelle notion signifie la fin du monopole de France Télécom sur le téléphone filaire et aligne celui-ci sur ce qui existe dans le domaine des radiocommunications mobiles.
Ce régime laxiste n'a pourtant pas permis aux services de radiocommunications mobiles de se développer d'une manière aussi efficace et aussi peu onéreuse qu'il eût été souhaitable et surtout possible, si ce secteur d'activité avait été réservé à France Télécom.
Je rappelle que, si la France est à la traîne en matière de téléphonie sans fil, la déréglementation qui a permis la multiplicité des opérateurs que nous connaissons aujourd'hui n'y est pas pour rien.
La téléphonie sans fil française est l'une des plus chères parmi les pays développés comparables. Nous avons donc ici la preuve de l'inefficacité du système de liberté de la concurrence sur un créneau d'activité. Pourquoi faudrait-il alors le généraliser à la quasi-totalité des activités téléphoniques ?
Dans ces conditions, il nous a paru souhaitable de demander la suppression des dispositions qui organisent l'ouverture des services téléphoniques à la concurrence.
Tel est l'objet de l'amendement n° 82, que je vous demande, mes chers collègues, d'adopter.
M. Robert Pagès. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Leyzour, pour défendre l'amendement n° 83.
M. Félix Leyzour. Par cet amendement, nous demandons de ne pas retenir la notion et la définition de l'interconnexion qui est proposée car elle implique l'utilisation à des fins lucratives par des entreprises privées des réseaux qui ont été imaginés et construits à partir des investissements et de la contribution des usagers du service public des télécommunications.
M. le président. L'amendement n° 58 rectifié quater est-il soutenu ?...
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 79, 80, 81, 82 et 83 ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. L'article 1er définit les principaux concepts juridiques institués ou modifiés par le projet de loi. La suppression de cet article viderait le projet de loi de sa substance. Nous sommes donc défavorables à ces amendements car ils sont contraires à la position adoptée par la commission en ce domaine.
Je ne relèverai pas les propos qui ont été tenus concernant les raisons du faible développement du téléphone mobile en France. Après l'analogique, il y a eu le numérique et l'on pourrait presque parler maintenant, à vous entendre, madame Luc, de « syllogique », terme un peu spécieux qui ferait croire que l'ouverture à une certaine concurrence aurait entraîné un retard dans le développement de la téléphonie mobile en France.
En revanche, je reviendrai sur les tarifs car beaucoup a été dit depuis le début de l'après-midi à ce sujet. Je prendrai pour exemples trois pays, et, pour commencer, les Etats-Unis. J'ai pu constater que le groupe communiste républicain et citoyen défendait avec beaucoup de conviction...
M. Félix Leyzour. De constance !
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... le monopole privé américain antérieur à 1984, c'est-à-dire ATT. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
J'ai compris que c'était la loi de 1984 qui avait détruit ce monopole privé...
M. Robert Pagès. Ce n'est pas très sérieux !
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... en introduisant la concurrence sur de longues distances et une organisation régionale.
M. Guy Fischer. C'est de la provocation !
M. Gérard Larcher, rapporteur. J'ai donc cru comprendre que le premier détonateur avait été la loi de 1984.
M. Félix Leyzour. Vous me decevez, monsieur le rapporteur !
Mme Hélène Luc. M. Larcher ne pense pas ce qu'il dit !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Prenons maintenant le montant de l'abonnement dans trois pays. Il s'élève à environ 52 francs pour France Télécom, à 63 francs pour BT et à 55 francs pour Nynex.
Les services proposés par l'abonnement sont identiques pour les trois opérateurs, mais s'y ajoute la facturation détaillée, gratuite pour BT et Nynex, et qui s'élève à 8 francs pour la France.
Maintenant, parlons du prix des communications. Pour trois minutes, le prix d'un appel urbain est de 0,613 franc en France, de 0,668 franc en Grande-Bretagne et de 0,326 franc aux Etats-Unis. Le coût d'un appel téléphonique interurbain pour trois minutes s'élève, en moyenne, à 5,10 francs en France, à 2,84 francs aux Etats-Unis et à 1,44 franc en Grande-Bretagne. Il s'agit de tarifs pour les particuliers : abonnements, appels urbain et interurbain.
J'en viens au coût des appels internationaux. Naturellement, ceux-ci profitent plus aux entreprises. Cependant, ne sommes-nous pas là pour les aider à être présentes et compétitives sur le marché international ? Pour une entreprise, le prix d'un appel international est de 13,06 francs en France, de 8,96 francs aux Etats-Unis et de 6,30 francs en Grande-Bretagne. Et on nous répète depuis des heures qu'un danger majeur pèse sur les tarifs, qui s'envoleraient,...
M. Gérard Delfau. Mais oui !
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... et que les petits seraient spoliés. Voilà la réponse tarifaire à ces arguments et le panier moyen. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 79, 80, 81, 82 et 83 ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement n'a rien à ajouter à une démonstration aussi brillante, qui vient appuyer les thèses qu'il s'efforce de démontrer au Sénat depuis près de deux jours. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 79, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 92:

Nombre de votants 307
Nombre de suffrages exprimés 307
Majorité absolue des suffrages 154
Pour l'adoption 93
Contre 214

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 80, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 81, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 82, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 83, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.
M. Robert Pagès. Le groupe communiste républicain et citoyen votre contre.
(L'article 1er est adopté.)

Article 2

M. le président. « Art. 2. - L'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications est ainsi rédigé :
« Art. L. 32-1 . - I. - Dans les conditions prévues par les dispositions du présent code :
« 1° Les activités de télécommunications s'exercent librement, dans le respect des autorisations et déclarations prévues au chapitre II, qui sont délivrées ou vérifiées dans des conditions objectives, transparentes, non discriminatoires et proportionnées aux objectifs pousuivis ;
« 2° Le maintien et le développement du service public des télécommunications défini au chapitre III, qui comprend notamment le droit de chacun au bénéfice du service universel des télécommunications, sont garantis ;
« 3° La fonction de régulation du secteur des télécommunications est indépendante de l'exploitation des réseaux et de la fourniture des services de télécommunications. Elle est exercée au nom de l'Etat dans les conditions prévues au chapitre IV par le ministre chargé des télécommunications et par l'Autorité de régulation des télécommunications.
« II. - Le ministre chargé des télécommunications et l'Autorité de régulation des télécommunications veillent, dans le cadre de leurs attributions respectives :
« 1° A la fourniture et au financement de l'ensemble des composantes du service public des télécommunications ;
« 2° A l'exercice, entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de télécommunications, d'une concurrence effective, loyale et bénéfique aux utilisateurs ;
« 3° Au développement de l'emploi, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des télécommunications ;
« 4° A la définition de conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence ;
« 5° Au respect par les opérateurs de télécommunications du secret des correspondances et du principe de neutralité au regard du contenu des messages transmis ;
« 6° Au respect, par les exploitants de réseaux et les fournisseurs de services de télécommunications, des obligations de défense et de sécurité publique. »
Sur cet article, la parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après l'article 1er qui tendait à modifier certaines définitions sur lesquelles s'appuie la réglementation, nous entrons, avec l'article 2, au coeur du dispositif de déréglementation que nous propose le Gouvernement.
En effet, l'article 2 tend à fixer le cadre général en modifiant de fond en comble l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications.
Alors que dans son texte actuel l'article L. 32-1 affirme d'entrée l'autorité de l'Etat sur le secteur des télécommunications, ce qui signifie donc que c'est de l'autorité de l'Etat que procède l'ensemble de l'organisation du secteur, la nouvelle rédaction de l'article L. 32-1 opère un renversement total de cette logique, le principe premier étant désormais que « les activités de télécommunications s'exercent librement » même si c'est « dans le respect des autorisations et déclarations prévues au chapitre II ».
Certes, l'objectif de maintien et de développement du service public est ensuite affirmé dans le 2° de l'article L. 32-1, mais il est subordonné à la libéralisation des marchés ; on est ramené au « droit de chacun au service universel », c'est-à-dire à un service minimum pour tous, avec une domination de la logique privée sur les grands services modernes. En bonne logique libérale, l'intervention de l'autorité publique est réduite au rôle de simple régulateur du marché.
C'est la définition de cette régulation qui est prévue par le 3° du nouvel article L. 32-1 ; il prévoit que cette activité de régulation soit confiée non seulement au ministre chargé des télécommunications, mais, aussi, et c'est la nouveauté, à une « autorité de régulation des télécommunications », l'ART.
Cette autorité qui, malgré ce qui a été affirmé, ne sera ni indépendante ni transparente, ne défendra ni l'intérêt national, ni celui des consommateurs, mais celui des opérateurs, en particulier privé.
Composé de trois personnes nommées de manière irrévocable par le Gouvernement, cette autorité, entièrement indépendante de la puissance publique, risque, dans un contexte de déréglementation généralisée, de pousser toujours plus loin le feu de la privatisation, de l'ouverture internationale et de la guerre économique.
S'agissant des télécommunications, on passe d'une maîtrise nationale du secteur, - en l'occurrence ce rôle est exercé par l'Etat - à une maîtrise par le marché.
C'est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen propose de supprimer l'article 2.
M. Robert Pagès. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi bouleverse un équilibre datant des années soixante et consistant à pratiquer pour les abonnements et les communications locales un tarif minoré par rapport aux prix des communications interurbaines et internationales.
Cette péréquation sociale a permis à notre pays de rendre le téléphone réellement accessible à tous en un laps de temps très court, de rattraper le retard pris et de réaliser l'un des réseaux les plus modernes du monde.
La péréquation géographique, quant à elle, recoupe un tarif identique de l'abonnement quel que soit le lieu dans lequel il est souscrit et une même taxe de base quelle que soit la zone. Mais c'est surtout le même tarif pour une distance équivalente. Cette égalité de traitement des usagers constitue indéniablement un élément essentiel d'une politique d'aménagement du territoire permettant une véritable cohésion nationale.
Les chiffres sont là pour le prouver : l'abonnement et les communications locales représentent près de 90 p. 100 de la facture moyenne d'un abonné résidentiel ; le pourcentage des lignes numérisées est de 86 p. 100 en France, contre 75 p. 100 en Grande-Bretagne et 66 p. 100 aux Etats-Unis.
La privatisation envisagée et la libéralisation du secteur des télécommunications accéléreront la politique tarifaire commencée en 1994 et se traduiront incontestablement par une hausse de la dépense de téléphone pour les revenus modestes. Au-delà, l'accès aux nouvelles technologies de télécommunications sera réglé par des critères financiers, alors que l'on devrait, au contraire, essayer d'enrichir la péréquation sociale.
Votre projet de loi, en effet, en acceptant l'idée d'un service public découpé en trois niveaux, tourne le dos à cet objectif, qui tend à faire partager dans les meilleures conditions possibles, sans discrimination liée au revenu, les nouveaux moyens de communication, à offrir la possibilité au plus grand nombre d'accéder et de maîtriser les nouvelles technologies qui feront la communication de demain.
Il entérine la logique maastrichtienne qui privilégie le droit de la concurrence et néglige presque complètement la notion de service public.
De fait, le secteur des télécommunications, comme celui des services postaux ou celui des réseaux ferroviaires, est un exemple édifiant de la conception ultralibérale qui prévaut en matière de construction communautaire.
Alors que le traité de Rome excluait le secteur des télécommunications des compétences de la Communauté économique européenne, la Communauté s'est progressivement intéressée à ce domaine en se référant à l'objectif défini par l'Acte unique et visant à construire un grand marché intérieur.
Poursuivant ce processus, le traité signé à Maastricht le 7 février 1992 a donné compétence à la Communauté pour établir et développer les réseaux transeuropéens dans le secteur des télécommunications.
Dans le même temps, la Commission européenne s'est saisie du dossier de manière contestable et contestée. L'article 90-3 du même traité lui permet, en effet, d'adresser aux Etats membres des directives ou décisions afin de faire appliquer les règles communautaires en matière de concurrence.
C'est sur le fondement de cette prérogative législative qu'ont été prises les principales directives du secteur des télécommunications. C'est également l'article 90-3 que la Commission européenne envisage, à intervalles réguliers, d'appliquer afin de faire adopter les directives sur le marché intérieur de l'électricité et du gaz.
C'est pourquoi nous demandons au Gouvernement d'intervenir pour la suppression de cet article à l'occasion de la conférence intergouvernementale qui se déroule en ce moment. M. Borotra était d'ailleurs favorable à cette abrogation. Qu'en est-il aujourd'hui ?
Dans ce cadre européen, comment la péréquation géographique, comme la péréquation sociale, sera-t-elle assurée alors que le texte que vous nous proposez stipule, en termes très vagues, qu'il faudrait « éviter une discrimination fondée sur la localisation géographique » et n'évoque que de façon très générale la nécessité et l'urgence de « l'accès de tous » en le fondant sur l'impératif vague de pratiquer un « prix abordable » permettant de résorber « les déséquilibres tarifaires au regard du fonctionnement réel du marché » ?
Cela signifiera concrètement - à plus ou moins long terme, monsieur le ministre, lorsque seront passés les effets de conquête du public - une augmentation des tarifs à la charge des ménages et des petits professionnels.
C'est cela que nous contestons, cette logique destructrice, porteuse d'inégalités et d'exclusion.
M. le président. Sur l'article 2, je suis saisi d'un certain nombre d'amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune ; mais, pour la clarté du débat, je les appellerai les uns après les autres.
Par amendement n° 84, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer cet article.
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement vise à la suppression d'un des principaux articles de ce texte qui prévoit et organise la déréglementation du secteur des télécommunications et met gravement en cause l'exercice des missions de services publics.
L'opérateur historique France Télécom serait ainsi privé de l'essentiel de ses capacités de développement et devrait non seulement permettre, mais également organiser l'utilisation de ses réseaux, qui, je le rappelle, ont été financés par les usagers et par les contribuables.
Contrairement aux affirmations du Gouvernement et de sa majorité, nous sommes bien confrontés à une entreprise de démembrement du service public à la française et de déstabilisation de l'entreprise publique qui devra, sous l'effet des dispositions, se replier sur les activités les moins rentables financièrement et renoncer, par conséquent, à toute politique audacieuse de développement.
Nous ne pouvons donc en aucune manière accepter le dispositif de cet article 2, qui sera préjudiciable tant à l'emploi qu'aux consommateurs de communications locales.
Rares sont en effet ceux de nos concitoyens qui ont à téléphoner pour leurs besoins personnels à New York, à Los Angeles, à Tokyo, ou, plus près de nous, à Londres, à Berlin ou à Stockholm.
Or ce sont précisément ces communications longues distances que l'on prétend vouloir favoriser le plus par ce texte, et ce au détriment des communications de proximité que nos compatriotes sont amenés à utiliser fréquemment pour téléphoner pour des raisons personnelles ou professionnelles.
Nous refusons une telle orientation.
C'est donc pour l'ensemble de ces raisons que nous demandons la suppression de l'article 2. (Très bien ! sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Par amendement n° 85, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer le deuxième alinéa (1°) du paragraphe I du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement tend à supprimer le deuxième alinéa du paragraphe I du texte proposé pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications.
En effet, ce paragraphe introduit pour la première fois dans le texte du projet de loi le principe de déréglementation du secteur des télécommunications. Permettez-moi de citer l'alinéa dont nous proposons la suppression :
« Les activités de télécommunications s'exercent librement, dans le respect des autorisations et déclarations prévues au chapitre II, qui sont délivrées ou vérifiées dans des conditions objectives, transparentes, non discriminatoires et proportionnées aux objectifs poursuivis. »
Cet alinéa pose donc le principe du libre exercice des activités de télécommunications. Il rappelle les principes imposés par les directives européennes.
Vous comprendrez, mes chers collègues, que le groupe communiste républicain et citoyen s'oppose à un tel texte qui pose juridiquement le principe du libre exercice des activités de télécommunications pour les entreprises privées et entérine en fait la suppression du monopole de service public détenu par France Télécom.
Une telle disposition serait à terme lourde de conséquences pour les usagers, pour l'emploi et pour le développement des télécommunications dans notre pays.
Ce jugement se fonde notamment sur les conséquences de la privatisation des télécommunications dans d'autres pays.
Prenons, par exemple, le bilan de cette privatisation au Royaume-Uni : BT est aujourd'hui la plus grande société privée en Grande-Bretagne ; les énormes bénéfices réalisés le sont au profit beaucoup plus des directeurs et des actionnaires que des petits consommateurs.
Pendant que sir Jan Vallance, le président de la société, s'octroie, en 1995, un salaire astronomique de plusieurs millions de francs,...
M. Gérard Delfau. Eh oui !
M. Guy Fischer. ... BT a supprimé des dizaines de milliers d'emplois.
M. Gérard Delfau. Eh oui !
M. Guy Fischer. Dans son rapport sur les services publics, l'ancien député Franck Borotra chiffrait d'ailleurs à 150 000 la perte d'emplois.
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Guy Fischer. De 230 000 personnes employées en 1990, BT prévoit de n'en garder bientôt que 100 000 !
Des rapports internes de plusieurs années ont révélé une baisse du moral des salariés de l'entreprise.
Enfin, parmi les clients, ce sont essentiellement les grandes entreprises qui sont favorisées par le tarif.
La politique suivie par BT est en effet de faire payer davantage les sept millions d'abonnés qui ont le téléphone chez eux et d'accorder des rabais aux grands usagers.
Notons au passage que l'expérience de la concurrence est largement artificielle. Après plus de dix ans, BT possède environ 90 p. 100 de parts du marché. Voilà la vérité !
Mais, en fait, l'objectif prioritaire semble moins l'instauration d'une concurrence interne que l'internationalisation des opérateurs nationaux sur le modèle d'ATT démembré aux Etats-Unis, dont l'objectif est d'atteindre 50 p. 100 de son chiffre d'affaires à l'extérieur des Etats-Unis, ou de BT, qui vise 10 p. 100 du marché européen.
Il n'y a rien d'étonnant à constater que la Grande-Bretagne, une fois de plus, a servi de « cheval de Troie » à une politique dérégulatrice.
On a privatisé BT en même temps qu'ATT, mais c'est le Sud - l'Italie et l'Espagne - qui a accueilli ATT.
L'Europe va-t-elle devenir un champ de bataille entre opérateurs nationaux de télécommunications au bénéfice de pays comme les Etats-Unis ou le Japon qui ont dérégulé en fermant leurs marchés à la pénétration européenne ? Poser la question, c'est évidemment y répondre !
L'expérience britannique prouve, s'il en était besoin, combien est néfaste une ouverture à la concurrence d'un secteur qui exige au contraire une maîtrise publique, afin de répondre aux besoins de tous les citoyens.
C'est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d'approuver cet amendement. (Très bien ! sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Par amendement n° 140, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le deuxième alinéa (1°) du paragraphe I du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications, après le mot : « respect », d'insérer les mots : « des principes du service public et ».
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Cet amendement vise à rappeler que le principe du service public est de même valeur que celui de la libre concurrence.
Vous prétendez, monsieur le ministre, avoir voulu préserver le service public par ce projet de loi. Vous vous prévalez, si je vous ai bien entendu, du fait de l'avoir pour la première fois inscrit et défini dans un projet de loi. Le Gouvernement auquel vous appartenez entendait même, en décembre dernier, inscrire ce principe dans la Constitution, ainsi que dans le texte du traité sur l'Union européenne. L'amendement n° 140 devrait donc être adopté à l'unanimité par le Sénat ! (Sourires.)
M. le président. Par amendement n° 86, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le troisième alinéa (2°) du paragraphe I du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications, de supprimer les mots : « défini au chapitre III, qui comprend notamment le droit de chacun au bénéfice du service universel des télécommunications, ».
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. L'article 2 du projet de loi vise à modifier le texte proposé pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications, qui définit le cadre général de la législation sur les télécommunications et les principes qui la sous-tendent.
Le texte tend ainsi à introduire une notion nouvelle dans le droit français, celle de « service universel ».
Permettez-moi, à propos du principe d'universalité, de faire la citation suivante, monsieur le ministre, mes chers collègues : « Il ne sert à rien de garantir une desserte universelle s'il y a éviction des usagers par les prix. Or, la commission entend manifestement remettre rapidement et totalement en cause la péréquation implicite entre les tarifs locaux et les tarifs longue distance.
« La commission souhaite notamment une augmentation très rapide et forte du coût des communications locales, afin d'accroître la concurrence, au détriment naturellement des consommateurs de base, qui ne passent pas majoritairement des appels internationaux. Les réactions hostiles à la dernière opération de "rééquilibrage" lancée par France Télécom en témoignent, si besoin était. La totale égalité entre la tarification et les coûts serait socialement encore plus douloureuse, puisque environ 60 p. 100 des ménages font perdre de l'argent à France Télécom ! »
Ce texte est extrait d'un paragraphe relatif au service public dans les télécommunications, dont le titre était pour le moins édifiant : en faisant référence aux propositions de directive de la Commission européenne, il parlait en effet de « l'accès de tous au téléphone menacé ».
Le paragraphe que j'ai lu est extrait d'un rapport d'information, éminemment intéressant, enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 6 octobre 1995. Déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, son auteur n'était autre que l'actuel ministre de l'industrie, de La Poste et des télécommunications, M. Borotra, alors député.
Pouvez-vous m'expliquer, monsieur le ministre, en quoi le projet de loi que vous nous soumettez aujourd'hui a levé les craintes et permettra d'éviter les graves dangers que vous évoquiez il y a moins d'un an ?
Je ferai une autre citation : « Si des adaptations sont impératives pour lutter contre l'exclusion sociale et territoriale, la société doit plus que jamais pouvoir s'appuyer sur des services publics qui répondent aux attentes des citoyens. Le service public, que certains estiment dépassé, est donc plus que jamais d'actualité. »
Partageant cette réflexion de M. Philippe Séguin, qui figure dans l'introduction du rapport précité,...
M. Gérard Braun. Très bonnes références !
M. Robert Pagès. ... nous proposons au Sénat de supprimer la référence à la notion britannique de « service universel ».
Cette notion, éminemment réductrice par rapport à la notion de service public, ne permettrait pas, si elle devait se substituer à la conception du service public « à la française », de garantir l'égalité de traitement des citoyens et la solidarité entre les différentes catégories d'usagers. Mais nous aurons l'occasion, au cours de l'examen de l'article 5 du projet de loi, de revenir sur ces questions essentielles.
Telles sont les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, nous vous demandons d'adopter l'amendement n° 86, dont je ne doute pas qu'il aurait été voté, entre autres, par M. Borotra, à l'Assemblée nationale, et par la majorité des parlementaires membres de la délégation pour l'Union européenne en octobre dernier.
M. Gérard Braun. Nous sommes au Sénat, non à l'Assemblée nationale !
M. le président. Les deux amendements suivants sont présentés par Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 142 tend, dans l'avant-dernier alinéa (2°) du paragraphe I du texte proposé par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications, à supprimer les mots : « , qui comprend notamment le droit de chacun au bénéfice du service universel des télécommunications, ».
L'amendement n° 141 vise à insérer, après le troisième alinéa (2°) du paragraphe I du texte proposé par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications, un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Les droits des usagers sont garantis par l'accès à un abonnement de prix abordable, soumis à une péréquation en fonction de la situation sociale des usagers et dont l'augmentation suit l'évolution du pouvoir d'achat des ménages, la fourniture à un prix abordable de factures détaillées et l'obligation pour l'opérateur, en cas de non-paiement des factures de téléphone, de proposer avant toute interruption de fourniture une réduction des services offerts. »
La parole est à Mme Pourtaud, pour défendre ces deux amendements.
Mme Danièle Pourtaud. L'amendement n° 142 a pour objet d'affirmer que la notion de service public se suffit à elle-même et ne nécessite nulle référence à un autre concept emprunté au droit européen, c'est-à-dire le service universel.
Quant à l'amendement n° 141, il donne sa juste place aux droits de l'usager. En effet, dans les termes où elle est proposée, la réforme de la réglementation des télécommunications ne fait aucune place à l'usager, alors que c'est en dernier ressort pour le bénéfice de ce dernier qu'elle doit être conçue.
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° 87, est présenté par MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Le second, n° 143, est déposé par Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent, dans la seconde phrase du dernier alinéa (3°) du paragraphe I du texte proposé par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications, à supprimer les mots : « et par l'Autorité de régulation des télécommunications ».
La parole est à Mme Luc, pour défendre l'amendement n° 87.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte proposé pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications nous permet d'appréhender l'existence d'une nouvelle instance de régulation, dénommée « autorité de régulation des télécommunications ».
A l'instar du Conseil supérieur de l'audiovisuel pour les services de communication audiovisuelle, cette autorité serait donc en charge de faire respecter, pour le compte de l'Etat, les règles déontologiques en vigueur de par la loi et le code pour ce qui concerne les prestations de services de télécommunications.
Il arrive très souvent, s'agissant notamment des projets de loi les plus sensibles, que le Gouvernement estime nécessaire la création d'une instance de régulation afin de faire respecter des règles qui, dans les faits, sont amenées à être profondément modifiées au regard des dispositions existantes.
Pour autant, cette abondance croissante d'autorités de régulation pose un certain nombre de questions de fond.
La première, et non la moindre, est celle qui est posée par le principe même de l'existence d'une telle autorité, conseil supérieur ou je ne sais quel comité ou haut comité.
A chaque fois, l'Etat se dessaisit sur un organisme non élu, dont les membres sont non pas investis par le suffrage universel mais seulement désignés par les représentants de la nation, d'une part de ses responsablités.
En fait, ce processus ces réduit le pouvoir même des élus de la nation, étant entendu, par exemple, que les assemblées parlementaires n'ont pas d'autres droits, en matière d'instance de régulation, que de voir leurs présidents respectifs désigner une partie des membres de telle ou telle institution nouvelle.
En réalité, l'indépendance de cet organisme n'est qu'apparente.
La deuxième question posée par la création d'une telle autorité est celle de la régulation.
A la limite, on peut se demander pourquoi on a pu vivre, dans notre pays, depuis tant d'années, avec une administration des postes et télécommunications placée, d'abord, sous tutelle directe du Gouvernement, puis, depuis 1990, mise en situation d'exploitant public, sans que cela ne légitime la mise en place de la moindre autorité de régulation.
Et si cette situation provenait tout simplement du fait que France Télécom n'a rien fait d'autre, dans le passé, que de répondre aux exigences de la politique nationale de développement des infrastructures de communication ! Elle l'a d'ailleurs accompli dans un contexte financier particulier, à savoir le versement quasi intégral, dans un premier temps, des résultats d'exploitation au budget général de l'Etat, puis, depuis 1994, au travers d'une contribution à l'équilibre de ce budget particulièrement significative au titre de l'impôt sur les sociétés, de la taxe sur la valeur ajoutée ou de la taxe professionnelle.
L'instance de régulation avait-elle une raison d'être lorsque, l'espace de deux secondes, un beau jour d'octobre 1986, France Télécom fut capable de procéder, de par son avance technologique, à la renumérotation de l'ensemble des lignes existantes par modification des zones de tarification ?
M. Gérard Delfau. Très bien !
Mme Hélène Luc. Les citoyens sont-ils si peu satisfaits de la mission de service public accomplie par France Télécom qu'il y aurait matière à leur proposer la mise en place d'une autorité de contrôle susceptible de recevoir leurs doléances ? Cela n'est pas du tout notre avis, monsieur le ministre, et c'est pourquoi nous sommes contre.
La vraie question, c'est que le fait d'édicter de nouvelles règles en matière de télécommunications aura comme conséquence principale de les voir régulièrement transgressées par ceux qui guettent depuis de longues années le juteux et prometteur marché des télécommunications.
Il y a, en ce domaine, de l'argent à faire prospérer, et même beaucoup d'argent, ce qui implique que l'on décide, en fait, de procéder d'une façon relativement simple.
Dans un premier temps, l'Etat définit des règles, aussi générales qu'apparemment précises.
Dans un deuxième temps, il confie à une autorité non élue le soin de les faire respecter et la responsabilité, par ailleurs, de choisir les acteurs du nouveau marché ouvert.
Dans un troisième temps, la guerre commerciale fait rage, à grands coups d'investissements publicitaires coûteux, de basses manoeuvres diverses et variées, qui n'éveillent en général que des remontrances bien senties de l'autorité de régulation, sans autre conséquence sur la poursuite de la compétition ouverte.
En général, le perdant, dans ces cas-là - on peut dire dans tous les cas - c'est le service rendu à la population, l'usager ou le citoyen ne devenant qu'un client ou un segment de la part de marché qu'il faut conquérir.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, sous le bénéfice de ces observations, il ne nous semble pas nécessaire de confier le devenir de notre secteur des télécommunications à une autorité non élue, confisquant le droit de décider en la matière aux représentants légitimes de notre peuple. C'est pourquoi nous vous demandons d'adopter notre amendement.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud, pour présenter l'amendement n° 143.
Mme Danièle Pourtaud. Le motif de cet amendement, qui a pour objet de manifester une préférence pour la notion de régulation d'Etat sur celle d'autorité de régulation indépendante dans les télécommunications, a été exprimé avec justesse comme l'a indiqué un de mes collègues, sous la plume de M. Franck Borotra, député, dans le rapport qu'il avait remis dans le cadre de la délégation à l'Union européenne de l'Assemblée nationale le 6 octobre 1995.
Le titre de ce rapport, à l'époque provocateur, aujourd'hui, hélas ! prophétique était : « Faut-il défendre le service public ? » M. Borotra y écrivait : « Le système des régulateurs est un concept anglo-saxon étranger à notre culture. » On ne saurait mieux dire !
Mais, plus précisément, l'article L. 32-1 dont nous traitons pose le principe de l'indépendance de la régulation du secteur des télécommunications.
Or, bien qu'il pose ce principe, le projet de loi ne permet pas de le faire respecter : la création de l'Autorité de régulation des télécommunications en fournit la preuve.
En effet, assurer l'indépendance, c'est satisfaire aux principes de neutralité, de transparence et d'égalité. Or ces trois principes ne sont pas respectés. Il s'agit d'une fausse neutralité, puisque les membres de l'autorité sont nommés par le Gouvernement et puisque ce ne seront pas des fonctionnaires qui, par définition, sont tenus au respect de ce principe, qui en seront membres.
On constate également une absence de transparence, car les avis de l'Autorité de régulation des télécommunications sont rarement rendus publics.
Enfin, le principe d'égalité n'est pas observé, puisque l'objet de ce projet de loi est non pas de garantir un service public des télécommunications performant pour tous, mais de faire entrer sur ce marché de nouveaux opérateurs.
Neutralité, transparence, égalité, autant de principes dont la défense relève par essence, à nos yeux, des missions de l'Etat, mais que malheureusement il n'assurera plus. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Par amendement n° 88, MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit le premier alinéa du paragraphe II du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications :
« II. - Le ministre chargé des télécommunications veille : ».
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Cet amendement tend à réserver au ministre chargé des télécommunications un certain nombre de fonctions qu'il ne doit pas partager avec une quelconque autre autorité.
L'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications dipose, dans la rédaction actuelle de son paragraphe II : « Le ministre chargé des télécommunications et l'Autorité de régulation des télécommunications veillent, dans le cadre de leurs attributions respectives :
« 1° A la fourniture et au financement de l'ensemble des composantes du service public des télécommunications ;
« 2° A l'exercice, entre les exploitants du réseau et les fournisseurs de services de télécommunications, d'une concurrence effective, loyale, et bénéfique aux utilisateurs ;
« 3° Au développement de l'emploi, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des télécommunications ;
« 4° A la définition des conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence ;
« 5° Au respect par les opérateurs de télécommunications du secret des correspondances et du principe de neutralité au regard du contenu des messages transmis ;
« 6° Au respect, par les exploitants de réseaux et les fournisseurs de services de télécommunications, des obligations de défense et de sécurité publique. »
A y regarder de plus près, on en vient, en fait, à se poser une question de fond.
L'ensemble des missions et des principes définis par cet article a, en effet, de longue date et de manière permanente, été inscrit dans ce que l'on peut appeler le cahier des charges.
La démarche nationale de planification a, dans les faits, pleinement intégré, pour l'administration des postes et télécommunications, puis pour France Télécom, à compter de la réforme de 1990, les principes que prétend exposer l'article L. 32-1.
Le moins que l'on puisse dire est que l'objectif a été largement atteint, l'indice d'équipement des ménages étant désormais particulièrement élevé, tandis que l'on ne peut reprocher aux salariés de France Télécom de ne pas mettre en oeuvre l'ensemble de leurs compétences pour répondre, dans les délais les meilleurs, aux dysfonctionnements éventuels du réseau.
La meilleure preuve de ce processus ne nous est-elle pas fournie par la perspective très proche d'une nouvelle modification de la numérotation des abonnés, qui interviendra en fin d'année, et qui témoigne de la haute maîtrise technologique de l'exploitant public ?
A moins que l'un des objectifs de cette nouvelle numérotation ne soit d'offrir des lignes disponibles aux opérateurs du secteur privé habilités demain, par la loi, à intervenir sur les réseaux...
Tirons le fil jusqu'au bout et interrogeons-nous sur le fait que cette nouvelle numérotation ne soit qu'une « composante du service public de télécommunications » ou encore une condition de « l'exercice d'une concurrence effective, loyale et bénéfique aux utilisateurs » consistant à faire supporter au seul exploitant public la charge des investissements nécessaires à la mise en place de cette technologie nouvelle.
Nous ne le répéterons jamais assez : l'existence du monopole de France Télécom n'a jamais constitué un obstacle à l'innovation technologique et au développement de l'emploi.
La meilleure preuve en est fournie par le simple fait que France Télécom et, avant elle, l'administration des postes et télécommunications disposaient des moyens d'expérimentation des nouvelles technologies de par leur fonction sociale et économique même.
Sur les principes mêmes qui guident la rédaction de l'article L. 32-1, force est de constater que le projet de loi fait le choix du doublon.
Au pouvoir du ministre, ce qui est tout à fait concevable dans notre tradition nationale, s'ajoute celui de la nouvelle autorité prétendument indépendante qui va se nommer « autorité de régulation des télécommunications ».
Permettez-nous de nous interroger sur une autorité indépendante qui n'aura de compte à rendre à personne, et au premier chef aux salariés eux-mêmes du secteur des télécommunications ; elle pourra, au gré des changements de majorité politique, continuer de peser sur les choix nationaux susceptibles d'être effectués en matière de développement d'infrastructures de communication.
Depuis la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, dont le rapporteur fut, pour une part, l'auteur, notre pays est doté d'un schéma national des télécommunications.
Ce schéma sera-t-il demain respecté par les opérateurs et sera-t-il opposable aux orientations fixées par tel ou tel opérateur dès lors que ses choix n'y répondront pas ?
En particulier, quel intérêt y aura-t-il pour un opérateur en téléphonie mobile à investir largement les zones rurales de notre pays ?
L'autorité de régulation des télécommunications ira-t-elle jusqu'à suspendre l'activité d'un opérateur s'il manque gravement aux obligations de son cahier de charges ?
Mais, surtout, pourquoi une autorité dite indépendante de plus ?
Et que fait-on de la simple consultation des premiers intéressés, personnels ou usagers ?
C'est la raison pour laquelle, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.) M. le président. Mes chers collègues, étant encore saisis de plusieurs amendements sur l'article 2, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Michel Dreyfus-Schmidt.)

PRÉSIDENCE DE
M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de réglementation des télécommunications.
Dans la discussion des articles, le Sénat en est parvenu, au sein de l'article 2, à l'amendement n° 1.
Présenté par M. Gérard Larcher, au nom de la commission, cet amendement a pour objet de rédiger ainsi le 2° du II du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications :
« 2° A l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de télécommunications ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cet amendement a pour objet d'inverser certains termes contenus dans l'article 2 pour souligner que la concurrence doit s'exercer d'abord au bénéfice des utilisateurs.
M. le président. Par amendement n° 144, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter le II du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications par un alinéa ainsi rédigé :
« A l'équilibre des conditions de fourniture des réseaux et services de télécommunications, en promouvant des offres de services de télécommunications non discriminatoires et ouvertes au plus large public. »
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Cet amendement tend à compléter les missions confiées au ministre chargé des télécommunications et à l'autorité de régulation. Ceux-ci devront veiller à ce qu'émergent des offres cohérentes et non discriminatoires en matière de télécommunications, afin d'éviter que des fournisseurs de services ou des opérateurs se placent sur des « niches » du marché pour procéder à un « écrémage » préjudiciable à l'équilibre de l'ensemble.
Avec cet amendement et avec un certain nombre de ceux que nous présenterons tout au long de ce débat, nous pouvons illustrer ce que nous n'avons cessé de dire dans la discussion générale : nous craignons, en effet, que certains opérateurs de service ne cherchent, en fait, qu'à utiliser au mieux les zones les plus rentables, portant ainsi préjudice à l'équilibre de l'ensemble et compromettant ce que nous continuons à appeler le service public.
M. le président. Par amendement n° 145 Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter le II du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 32-I du code des postes et télécommunications par un alinéa ainsi rédigé :
« A la prise en compte de l'intérêt des territoires et des utilisateurs dans l'accès aux services et aux équipements. »
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Cet amendement tend également à compléter les missions confiées au ministre chargé des télécommunications et à l'autorité de régulation, en réintroduisant les grands absents que sont les collectivités territoriales.
Les auteurs de ce texte dit de réglementation des télécommunications semblent en effet ignorer le rôle desdites collectivités en la matière et à quel point elles sont trop souvent victimes de procédures un peu anarchiques, qui vont parfois à l'encontre de l'intérêt réel de leurs administrés.
Il nous semble impossible que le Sénat ne profite pas de l'occasion que nous lui offrons pour réaffirmer que, dans le partenariat nécessaire entre les fournisseurs de services et les utilisateurs, les collectivités locales doivent être directement intéressées et leur avis dûment enregistré et, dans la mesure du possible, suivi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 84, 85, 140, 86, 142, 141, 87, 143, 88, 144 et 145 ? M. Gérard Larcher, rapporteur. L'article 2 organise la liberté des activités de télécommunication et leur contrôle.
Nous sommes défavorables à l'amendement n° 84, car il tend à supprimer cet article 2 et il vide le texte d'une partie de son contenu.
Nous sommes aussi défavorables à l'amendement n° 85, car l'exercice des activités de télécommunication y est visé et son adoption viderait également le texte d'une partie de son contenu.
L'amendement n° 140 a attiré l'attention de la commission. Il aurait pour effet, en soumettant les concurrents de l'opérateur historique aux règles imposées à ce dernier - et tout particulièrement au principe d'égalité, - d'ôter tout contenu à la concurrence. L'égalité n'est pas l'égalitarisme ! Cet amendement ayant pour effet d'empêcher l'émergence de nouveaux produits, nous y sommes défavorables.
L'amendement n° 86 vise à supprimer la référence au service universel. A l'évidence nous ne pouvons y être favorables.
Il en va de même de l'amendement n° 142, qui tend lui aussi à la suppression du service universel.
L'amendement n° 141 est en partie satisfait par un amendement que nous examinerons ultérieurement sur le caractère insaisissable, dans un certain nombre de conditions, de la ligne téléphonique, véritable « fil de vie » destiné à recevoir des appels d'urgence et qui constitue un acquis majeur dans le cadre du service public. Cet amendement consacrera l'insaisissabilité d'une telle ligne en cas de difficultés financières ou sociales tout en prévoyant la fourniture à un prix abordable de factures détaillées.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire, un certain nombre d'opérateurs, notamment en Grande-Bretagne, fournissent gratuitement de telles factures. Prévoir un prix, fût-il abordable, pour les factures détaillées, c'est abdiquer face à ce qui pourrait émerger du jeu de la concurrence.
Il en est de même du principe de fourniture à un prix abordable par rapport au pouvoir d'achat des ménages, puisque l'on nous propose une augmentation, alors que nous faisons le pari d'une baisse des tarifs.
Nous sommes donc défavorables à cet amendement. L'amendement n° 87 vise à supprimer l'autorité de régulation des télécommunications, l'ART. Nous y sommes défavorables.
L'amendement n° 143 ayant également pour objet de faire passer l'ART à la trappe, nous y sommes défavorables.
L'amendement n° 88 vise à supprimer les compétences de l'autorité de régulation s'agissant du contrôle, notamment, des principes fondant le respect des droits de la concurrence. Nous y sommes défavorables.
L'amendement n° 144, présenté à l'instant par M. Delfau, vise à interdire ce que l'on appelle « l'écrémage » auquel se livrent un certain nombre d'opérateurs. En réalité, compte tenu de la manière dont il est rédigé, cette interdiction est édictée dans de telles conditions qu'elle entrave toute concurrence et abolit la diversité.
Dès le départ, nous avons souligné la nécessité d'un texte équilibré entre l'opérateur historique et la concurrence. Nous sommes donc défavorables à cet amendement.
L'amendement n° 145, enfin, précise utilement la portée du texte, notamment les exigences essentielles qu'impose la prise en compte des contraintes d'urbanismes et d'aménagement du territoire. Nous retrouverons d'ailleurs les mêmes principes à l'article 6.
Nous sommes favorables à cet amendement, parce que l'aménagement du territoire est l'une des préoccupations majeures de la commission et que cette préoccupation, je le sais, est largement partagée par le Sénat. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 84, 85, 140, 86, 142, 141, 87, 143, 88, 1, 144 et 145 ?
M. François Fillon, ministre délégué. Les amendements n°s 84 et 85 visent à empêcher l'ouverture à la concurrence, qui est l'objet même du texte qui vous est soumis.
Nous avons déjà répondu aux arguments qui ont été avancés à plusieurs reprises par les membres du groupe communiste républicain et citoyen. Dans les pays déjà libéralisés, la concurrence a été source de création d'emplois, de baisse des tarifs et d'augmentation du nombre de services.
La description qui nous a été faite de la Grande-Bretagne, où le téléphone serait rare et cher, où les gens les plus modestes ne pourraient pas accéder aux services, est tellement caricaturale que je ne peux pas croire qu'elle corresponde réellement à l'opinion de ceux qui l'ont émise.
M. Guy Fischer. Et qu'en pense M. Borotra ?
M. François Fillon, ministre délégué. Vous avez des références intéressantes ! Moi, j'en ai d'autres, mais nous allons y venir.
L'amendement n° 140 vise lui aussi à soumettre aux obligations de service public l'ensemble des opérateurs, alors que nous avons fait clairement le choix - et je crois que c'est un choix qui va dans le sens de la garantie du service public - de confier ledit service public à France Télécom, et seulement à France Télécom.
Les amendements n°s 86 et 142 visent à supprimer la référence au service universel. Votre référence constante est le rapport de M. Borotra - que vous n'avez d'ailleurs pas tout à fait lu jusqu'au bout, mais j'aurai l'occassion d'y revenir - alors que j'ai, pour ma part, une autre référence, qui est l'introduction pour la première fois par M. Quilès, dans une résolution sur la poste qu'il a fait adopter sous présidence française par le Conseil des ministres européen d'Antibes, en septembre 1989, de la notion de service universel.
Le Gouvernement n'a pas voulu réduire le service public au service universel, puisque le service public, pour lui, c'est le service universel, plus le service obligatoire, plus les missions d'intérêt général.
J'ajoute que nous avons fait figurer la notion de service universel dans ce projet de loi parce qu'il s'agit d'une notion utile dans la mesure où elle constitue, dans ce secteur, un socle commun à l'Europe.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, c'est notamment grâce à l'action des gouvernements français depuis dix ans que le contenu du service universel dans la réglementation européenne ne diffère pas de celui du service public et repose sur les mêmes principes. Il serait dommage de ne pas inscrire dans cette loi ce que signifie, pour nous, le service universel. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Il est également défavorable à l'amendement n° 141, qui vise à énumérer les droits des usagers. En effet, les usagers souhaitent que leurs droits soient garantis et non pas définis d'une manière limitative.
D'ailleurs, la tentative de définition des droits est extrêmement périlleuse, puisque vous oubliez un certain nombre de ces droits, tels le droit de ne pas figurer sur un annuaire, le droit d'être indemnisé en cas d'interruption de service. Vous faites ainsi la démonstration qu'une liste des droits des usagers est un exercice périlleux et restrictif, et qu'il vaut mieux s'en tenir à la définition générale que nous avons introduite.
Le Gouvernement est aussi défavorable aux amendements n°s 87, 143 et 88, qui visent à supprimer l'autorité de régulation des télécommunications. C'est le choix du Gouvernement de rester l'actionnaire majoritaire de France Télécom, ce choix conduit à proposer la création d'une autorité de régulation des télécommunications,
Le groupe communiste a souligné que cette autorité de régulation n'avait pas été nécessaire dans le passé. Et pour cause, nous étions en situation de monopole ! La régulation du marché n'a de sens, dans mon esprit, que lorsqu'il y a concurrence.
En revanche, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 1, présenté par M. Larcher, au nom de la commission des affaires économiques. La rédaction proposée fait mieux ressortir que celle du Gouvernement que la concurrence doit bénéficier aux utilisateurs.
Enfin, le Gouvernement est également favorable à l'amendement n° 145 du groupe socialiste, qui reprend très exactement les termes de l'amendement n° 73 de Mme Bardou.
Je note simplement, monsieur Delfau, que les collectivités locales, loin d'avoir été oubliées dans le projet de loi, vont faire, pour la première fois, l'objet du versement d'une redevance d'utilisation du service public par les opérateurs, ce qui ne figurait ni dans la loi de 1990, ni dans les textes précédents.
Mais il est une limite que nous ne devrions pas franchir. S'agissant de la prise en compte de l'avis des collectivités locales sur la mise en place des réseaux, il ne faudrait pas donner à celles-ci un pouvoir de régulation qui ne permettrait pas l'établissement de réseaux nationaux, auxquels nous sommes attachés. Mais je ne pense pas que ce soit votre intention.
Enfin, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 144.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 84, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 85, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 140, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 86, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 142, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 141.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Je voudrais revenir un instant sur cet amendement qui concerne les droits des usagers.
Monsieur le ministre, vous nous dites que toute liste est périlleuse, et je vous l'accorde bien volontiers. Mais l'absence des termes « droits des usagers », l'absence de préoccupation à l'égard des usagers me paraît non seulement périlleuse mais condamnable.
En fait, ce texte axé sur la concurrence - vous ne vous en cachez pas, c'est votre litanie - concerne uniquement l'arrivée ou le développement d'opérateurs privés dans le secteur des télécommunications.
Nous réaffirmons avec force que, pour être équilibré, dans la mesure où nous ne sommes plus en présence d'un opérateur public disposant d'un quasi-monopole, ce texte aurait dû définir un droit des usagers.
Je ferai d'ailleurs observer, et ce sera ma dernière remarque, que je parle d'« usagers », conformément à une tradition républicaine s'agissant du service public, et que vous parlez d'« utilisateurs », ce que je comprends d'ailleurs, puisque vous vous placez dans l'optique de la stricte loi du marché. Mais la nuance est d'importance.
M. François Fillon, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Je préciserai simplement, à l'adresse de M. Delfau, que le terme d'« utilisateurs » est le terme consacré par la loi de 1990, à laquelle je suis fidèle le plus souvent possible.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Ce n'est peut-être pas un terme républicain, mais enfin !...
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 141, repoussé par la commission et le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 87 et 143, repoussés par la commission et par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 93:

Nombre de votants 314
Nombre de suffrages exprimés 314
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 89
Contre 225

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 88, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Félix Leyzour. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Le grand mérite de cet amendement de la commission des affaires économiques et du Plan est, pour le moins, d'être clair.
Par son contenu et du fait que son auteur est M. le rapporteur, cet amendement revêt une grande importance et appelle une explication de vote.
En effet, après la discussion de l'article 1er, M. le rapporteur estime qu'il est indispensable de procéder à une réécriture du paragraphe II, 2°, de l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications qui ne constitue pas qu'un simple apport de portée rédactionnelle au projet de loi.
Or, l'amendement de M. le rapporteur - personne ne s'y sera trompé - est significatif de l'idéologie qui sous-tend une bonne partie de l'opération de déstabilisation du service public des télécommunications.
Il est vrai que le rapporteur du présent projet de loi est également l'auteur du rapport d'information qui a, pour une part essentielle, présidé à la conception du projet de statut de France Télécom.
Les organisations syndicales de France Télécom ne s'y sont d'ailleurs pas trompées en liant, dans le cadre de leur action revendicative, les deux textes précités, dont les objectifs ne sont, dans les faits, guère avouables.
Sous la plume d'un syndicaliste, on trouve d'ailleurs dans le journal d'information du syndidat Sud-PTT - je le signale parce qu'il a été indiqué qu'aucune organisation syndicale ne s'était élevée contre ce projet - un article intitulé : « Les contrevérités du sénateur Larcher » qui fait le florilège des arguments spécifiquement idéologiques accompagnant l'orientation imprimée par les deux projets de loi.
Ces arguments sont classiques : modification des technologies, possibilités nouvelles offertes pour la communication à l'échelle internationale par les nouveaux réseaux à haut débit, nécessité d'alliances stratégiques nécessitant souplesse des structures et abandon de garanties statuaires pour pouvoir se positionner sur les crénaux ouverts.
M. Larcher est devenu, dans cette assemblée, le porte-parole de la majorité de droite en matière de télécommunications. Il a déclaré être opposé aux amendements que mon groupe a déposés. Nous sommes, nous, opposés à l'amendement n° 1 qu'il vient de présenter et c'est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen votera contre.
M. Paul Loridant. C'est un scoop ! (Sourires.)
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Monsieur Leyzour, vous avez suivi avec beaucoup d'attention et d'intérêt l'ensemble des travaux que nous conduisons depuis le mois de novembre. Vous avez fait part de vos réflexions et apporté votre contribution au rapport.
M. Félix Leyzour. Tout à fait !
Mme Hélène Luc. M. Leyzour est toujours très assidu !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il est vrai que nous ne sommes pas parvenus sur le sujet aux mêmes conclusions même si, à certains moments, nos préoccupations étaient communes en matière de recherche et de développement d'un opérateur public fort.
En effet, nous, nous croyons que pour arriver à un opérateur public fort devenant l'opérateur historique, il ne faut pas procéder à un repli frileux sur soi-même. Il faut d'autant moins agir ainsi que, du fait des évolutions techniques, les frontières vont disparaître, que nous le souhaitions ou non. Il convient donc de s'adapter à ce monde nouveau et de se mettre en position de conquête.
Je vous remercie de l'hommage indirect que vous avez rendu à l'ensemble de la commission, à sa cohésion derrière son rapporteur. Il est normal, dans un secteur où nous travaillons en réseau, d'être le porte-parole du réseau de la majorité du Sénat, mais c'est pour moi un honneur dont je ne sais pas si je suis encore digne !
Plusieurs sénateurs du RPR. Mais si, mais si ! (Sourires.)
M. Gérard Delfau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, vous avez affirmé voilà un instant dans cet hémicycle que vous aviez repris le terme « utilisateurs » figurant dans la loi de 1990, que vous nous citez abondamment. Sans doute l'avez-vous fait à la suite d'une lecture un peu hâtive.
Or, dans le comparatif, je lis à l'alinéa 3 de l'article 2 de la loi de 1990 : « A ce que soit respecté, par l'exploitant public et les fournisseurs de services de télécommunications, le principe d'égalité de traitement des usagers, quel que soit le contenu du message transmis. » Dont acte, monsieur le ministre, il faudra compléter votre information !
Mais ce qui m'importe - j'en profite pour le dire, parce qu'après tout la plume peut hésiter - c'est qu'un alinéa complet précise : « Afin que soit respecté par l'exploitant public le principe d'égalité de traitement des usagers. » Autrement dit, la préoccupation des consommateurs, que l'on appelle ici, selon la tradition républicaine, des « usagers » puisqu'il s'agit d'un service public quasiment en fonction de monopole, est bien au centre ; en tout cas, elle est fort présente.
Vous et vos conseillers pouvez hâtivement compulser le texte que vous nous présentez, les usagers, consommateurs, utilisateurs sont les grands absents.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Mais non !
M. François Fillon, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Je ne consulte pas plus hâtivement que vous, monsieur Delfau, les pages de la loi du 29 décembre 1990, que je tiens à votre disposition et qui, dans son article L. 34-6, par exemple - mais j'ai trouvé quatre références -, prévoit que « les représentants des fournisseurs des services, des utilisateurs des services, ainsi que des personnalités qualifiées nommées par le ministre chargé des télécommunications font partie de la commission,... ».
Cela veut dire que le mot d'utilisateur est cité à plusieurs reprises dans la loi de 1990. S'il est chargé de tout le sens que vous lui donniez tout à l'heure, alors pourquoi se retrouve-t-il dans cette loi de 1990 ?
Mais je conviens que cette querelle est quelque peu dérisoire...
M. Gérard Braun. Tout à fait !
M. Gérard Delfau. Le vocabulaire a du sens !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.
M. Gérard Delfau. Le groupe socialiste vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 144, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 145, accepté par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'ensemble de l'article 2.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. L'article 2, nous l'avons dit, est un article clef de ce texte de déréglementation.
M. le ministre et M. le rapporteur de la commission des affaires économiques ont insisté, au cours de la discussion générale et lors de la présentation des deux premiers articles, sur la nécessité de supprimer le monopole public de France Télécom en raison de la concurrence. Ils ont avancé l'argument selon lequel ce texte s'inscrivait dans une logique visant à promouvoir le service public.
Cette assertion nous paraît tout à fait contraire à la réalité, et les salariés des principaux services publics, qu'ils soient de France Télécom, d'EDF-GDF ou de la SNCF, soutenus par la très grande majorité des Français, ne s'y sont pas trompés.
Je voudrais revenir sur la question des tarifs, argument fort avancé de manière solennelle par M. le ministre et par notre rapporteur.
De ce point de vue, à cette heure un peu avancée de la nuit, je vous invite à consulter un hebdomadaire satyrique célèbre paraissant le mercredi.
M. Jean Delaneau. Francophile ?
Mme Danielle Bidard-Reydet. Il est écrit dans cet hebdomadaire, sous le titre « La fin du monopole de France Télécom va coûter de 8 à 12 milliards aux usagers » : « Pour préparer dignement la libéralisation du téléphone, prévue au 1er janvier 1998, les usagers risquent de devoir débourser de 8 à 12 milliards à petites doses. »
M. Gérard Braun. Ce n'est pas une certitude, c'est un risque !
M. Gérard Larcher, rapporteur. C'est de l'homéopathie !
Mme Danielle Bidard-Reydet. « Sans attendre, France Télécom vient déjà d'augmenter de 15 p. 100 le prix de ses abonnements, uniquement pour les particuliers, celui des entreprises restant inchangé. Certes, la loi prévoit que France Télécom et ses futurs concurrents devront, comme aujourd'hui, proposer des tarifs sociaux pour les plus démunis, un effort estimé entre 500 millions et 1 milliard de francs, mais qui reste une aumône en comparaison des 8 à 12 milliards de recettes supplémentaires prévus sur les abonnements et les communications locales. »
Cet hebdomadaire étant connu pour le sérieux de ses informations (Exclamations sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants), je vous renvoie à ses rédacteurs !
Mes chers collègues, ces quelques lignes qui ne proviennent pas de nos travées, vous en conviendrez,...
M. Jean-Patrick Courtois. Vous n'êtes pas assez bons !
Mme Danielle Bidard-Reydet. ... viennent à l'appui des longues démonstrations que nous avons faites au cours du débat et vous comprendrez que, ces éléments confortant notre position, nous voterons résolument contre cet article 2 sur lequel nous demandons un scrutin public. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Gérard Braun. Scrutin public demandé par le Canard enchaîné. (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 2, modifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 94:

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 316
Majorité absolue des suffrages 159
Pour l'adoption 223
Contre 93

Article 3

M. le président. « Art. 3. - L'article L. 32-2 du code des postes et télécommunications est ainsi modifié :
« I. - Le premier alinéa est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« Elle veille également au respect des principes du service public et notamment du service universel dans le secteur des télécommunications. Outre les avis, recommandations et suggestions qu'elle adresse au ministère dans les domaines de sa compétence, elle peut être consultée par l'Autorité de régulation des télécommunications et par les commissions permanentes de l'Assemblée nationale et du Sénat sur les questions relevant de leurs compétences spécifiques en matière de télécommunications. Elle peut saisir l'Autorité de régulation des télécommunications sur des questions concernant la compétence de cette autorité en matière de contrôle et de sanction du respect, par les opérateurs, des obligations de service public et service universel résultant des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont applicables en vertu du présent code et des autorisations dont ils bénéficient. »
« II. - Au deuxième alinéa, les mots : "aux articles L. 33-1, L. 33-2, L. 34-2, L. 34-3, L. 34-4 et L. 34-5 du présent code" sont remplacés par les mots : "aux articles L. 33-1, L. 33-2, L. 34-1, L. 34-2, L. 34-3 et L. 34-4". »
« III. - Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Elle établit un rapport annuel qui est remis au Parlement et au Premier ministre. Ce rapport comprendra obligatoirement un bilan de l'exercice du service public des télécommunications comportant donc un chapitre concernant particulièrement le service universel des télécommunications. Il est établi après que la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications a pris connaissance du rapport annuel de l'Autorité de régulation des télécommunications. »
Par amendement n° 2, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, dans la deuxième phrase du deuxième alinéa du III de cet article, après les mots : « du service public des télécommunications comportant », de supprimer le mot : « donc ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 134, MM. Bourges et Courtois proposent de compléter in fine la deuxième phrase du texte présenté par le III de l'article 3 pour compléter l'article L. 32-2 du code des postes et télécommunications par les mots : « ainsi qu'un chapitre sur la mise en oeuvre des missions d'intérêt général de service public définies au troisième alinéa de l'article L. 35-6. »
La parole est à M. Courtois.
M. Jean-Patrick Courtois. Les missions de service public sont essentielles à la préservation et au maintien d'opérations relevant de l'intérêt général du pays. Il est donc nécessaire que les autorités publiques chargées de la gestion et du contrôle des réseaux de télécommunications soient régulièrement informées des conditions dans lesquelles ces missions de service public ont été assurées au cours de l'année et il est nécessaire que cette obligation soit fixée par la loi.
Tel est le sens de cet amendement que je demande au Sénat de bien vouloir adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. La commission des affaires économiques et du Plan a estimé pouvoir être favorable à cet amendement sous réserve d'une rectification. Elle souhaiterait en effet que les mots « de service public » soient supprimés non pas pour porter atteinte au service public, qui, je le rappelle, repose sur trois piliers, le service universel, les services obligatoires et les missions d'intérêt général, mais parce que la rédaction qui nous est proposée pourrait laisser croire qu'il n'y a qu'un pilier ou qu'il y a un quatrième pilier de service public.
M. le président. Monsieur Courtois, acceptez-vous de rectifier ainsi votre amendement ?
M. Jean-Patrick Courtois. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 134 rectifié, présenté par MM. Bourges et Courtois, et tendant à compléter in fine la deuxième phrase du texte proposé par le paragraphe III de l'article 3 pour compléter l'article L. 32-2 du code des postes et télécommunications par les mots : « ainsi qu'un chapitre sur la mise en oeuvre des missions d'intérêt général définies au troisième alinéa de l'article L. 35-6. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 134 rectifié.
M. Félix Leyzour. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Je n'ai pas très bien compris les explications de M. le rapporteur. Depuis le début de ce débat, j'entend parler de l'intérêt qui est porté au service public. Or, maintenant, M. le rapporteur demande une rectification consistant à supprimer la référence au service public. Je ne perçois pas très bien la portée de cette rectification, mais, en tout état de cause, nous voterons contre cet amendement.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je rappellerai simplement à notre collègue, M. Félix Leyzour, qu'à l'article 6 du projet de loi il est clairement précisé que « le service public des télécommunications comprend le service universel des télécommunications, les services obligatoires et les missions d'intérêt général ».
Vous voyez donc, mes chers collègues, que la rectification ne met nullement en cause la définition du principe de service public.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. L'explication fournie par notre rapporteur ne peut être reçue.
La présentation, dont nous contestons le principe, qui vise à décomposer en trois strates le service public fait que chacune de celles-ci est un élément du service public.
Je ne comprends donc pas plus que mon collègue Félix Leyzour que, tout à coup, il faille supprimer ce qui n'est qu'une reprise de la définition contenue dans l'article 6 du projet de loi. Serait-ce une phobie qui se manifesterait ainsi ? Mais je sais bien que ce n'est pas le cas.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 134 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'article 3.
M. Félix Leyzour. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. L'article 3 vise à adapter les missions de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications à la réforme. On nous a dit qu'il complétait ces missions, mais vous comprendrez, mes chers collègues, que nous n'avons pas la même lecture de ce texte que M. le ministre et M. le rapporteur.
En effet, cette commission aura pour objet, désormais, de veiller au respect des principes du service public et notamment du service universel dans le secteur des télécommunications.
Avec la mention du service universel, nous avons plutôt l'impression que cette commission aura en charge de veiller à l'application du service minimum.
Certes, par l'obligation qui est faite à la commission de remettre un rapport au Parlement, on tente d'habiller ce choix du service minimum des atours de la concertation. Il n'en reste pas moins que toutes les instances existantes et celles que vous mettez en place sont conçues pour organiser l'ouverture des réseaux et l'amoindrissement des services publics.
C'est la raison pour laquelle notre groupe votera contre l'article 3.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)

Article additionnel après l'article 3

M. le président. Par amendement n° 206, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les troisième et quatrième alinéas de l'article 35 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications sont ainsi rédigés :
« - sept députés,
« - sept sénateurs, désignés par leurs assemblées respectives, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. La loi de 1990 n'avait pas institué de parité dans la représentation, au sein de la commission supérieure du service public de la poste et des télécommunications, des deux chambres du Parlement. Nous souhaitons aujourd'hui établir cette parité et qu'à cette commission siègent sept députés et sept sénateurs. Cette disposition a également pour objet d'élargir la représentation, donc la représentativité, des différentes sensibilités qui existent au sein du Parlement.
Pour avoir participé aux travaux de cette commission, je puis dire qu'elle fait depuis longtemps un bon travail en faveur du service public.
Ce fut une innovation utile de la loi de 1990.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Aujourd'hui, elle mérite d'être renforcée. C'est l'occasion de réaffirmer le rôle de consultation, d'avis, d'information, de transparence que cette commission a déjà joué et jouera demain pour la préservation et le renforcement du service public.
Notre collègue M. Hérisson, qui siège au sein de cette commission, avait préparé ce texte. En cet instant du débat, je tenais à lui rendre hommage pour sa participation à l'ensemble de la réflexion que nous avons conduite depuis le mois de novembre sur ce sujet.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement partage l'avis qui vient d'être formulé par M. le rapporteur.
En effet, la commission supérieure du service public des postes et des télécommunications joue un rôle tout à fait positif. Je note d'ailleurs qu'à ma connaissance elle a donné un avis favorable, à l'unanimité de ses membres, sur le projet de loi de réglementation des télécommunications. Mais mes informations ne sont peut-être pas complètes sur ce sujet.
Quoi qu'il en soit, le Gouvernement a tenu le plus grand compte des observations de cette commission dans la phase de préparation de ce texte.
Nous n'avions pas osé modifier la loi de 1990 quant à la composition de la commission. Bien entendu, le Gouvernement ne voit que des avantages à ce que l'Assemblée nationale et le Sénat soient représentés à parité.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 206.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Je souscris tout à fait à l'hommage qui a été rendu par M. le rapporteur à cette commission mise en place par la loi de 1990 et qui joue effectivement un rôle utile.
Monsieur le ministre, vous vous souvenez sans doute de mon mutisme lors de la présentation du texte dont nous débattons, mutisme qui ne laissait pas, je pense, augurer de grandes louanges. Vous m'aviez fait observer que je me réservais pour l'hémicycle ; c'était le cas.
Pour revenir à l'essentiel, je dirai qu'il est nécessaire que les deux assemblées du Parlement soient représentées à égalité. Je regrette évidemment que le rôle de la commission sorte amoindri du projet de loi qui nous est proposé, si du moins il est voté en l'état. En tout état de cause, il est nécessaire qu'elle joue son rôle, et il est normal que le Sénat y soit normalement représenté.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 206, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.

Article 4

M. le président. « Art. 4. - L'article L. 32-4 du code des postes et télécommunications est ainsi modifié :
« I. - Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Pour l'accomplissement de leurs missions, le ministre chargé des télécommunications et le président de l'Autorité de régulation des télécommunications peuvent : ».
« II. - Au premier alinéa du 2°, les mots : "il désigne" sont remplacés par les mots : "ils désignent".
« III. - Le début du deuxième alinéa du 2° est ainsi rédigé :
« Le ministre chargé des postes et télécommunications et le président de l'Autorité de régulation des télécommunications veillent... (Le reste sans changement.) » - (Adopté.)

Article 5

M. le président. « Art. 5. - Le chapitre II du titre Ier du livre II du code des postes et télécommunications est ainsi rédigé :

« Chapitre II

« Régime juridique

« Section 1

« Réseaux

« Art. L. 33. - Les réseaux de télécommunications sont établis dans les conditions déterminées par la présente section.
« Ne sont pas concernées par la présente section :
« 1° Les installations de l'Etat établies pour les besoins de la défense nationale ou de la sécurité publique ou utilisant des bandes de fréquences ou des fréquences attribuées par le Premier ministre à une administration pour les besoins propres de celle-ci, en application de l'article 21 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;
« 2° Les installations mentionnées aux articles 10 et 34 de la même loi. Celles de ces installations qui sont utilisées pour offrir au public des services de télécommunications sont soumises aux dispositions du présent code applicables à l'exploitation des réseaux ouverts au public, dans la seule mesure nécessaire à leur offre de services de télécommunications.
« Art. L. 33-1. - I. - L'établissement et l'exploitation des réseaux ouverts au public sont autorisés par le ministre chargé des télécommunications.
« Cette autorisation ne peut être refusée que dans la mesure requise par la sauvegarde de l'ordre public ou des besoins de la défense ou de la sécurité publique, par les contraintes techniques inhérentes à la disponibilité des fréquences, ou lorsque le demandeur n'a pas la capacité technique ou financière de faire face durablement aux obligations résultant des conditions d'exercice de son activité, ou a fait l'objet d'une des sanctions mentionnées aux articles L. 36-11, L. 39, L. 39-1, L. 39-2, L. 39-3 et L. 39-4.
« L'autorisation est soumise à l'application des règles contenues dans un cahier des charges et portant sur :
« a) La nature, les caractéristiques, la zone de couverture et le calendrier de déploiement du réseau ;
« b) Les conditions de permanence, de qualité et de disponibilité du réseau ainsi que les modes d'accès, notamment au moyen de cabines établies sur la voie publique ;
« c) Les conditions de confidentialité et de neutralité au regard des messages transmis ;
« d) Les normes et spécifications du réseau et des services, notamment européennes s'il y a lieu ;
« e) Les prescriptions exigées par la protection de l'environnement et par les objectifs d'aménagement du territoire et d'urbanisme, comportant, le cas échéant, les conditions d'occupation du domaine public et les modalités de partage des infrastructures ;
« f) Les prescriptions exigées par la défense et la sécurité publique ;
« g) La contribution de l'exploitant à la recherche et à la formation en matière de télécommunications ;
« h) L'utilisation des fréquences allouées et les redevances dues à ce titre ainsi que pour les frais de leur gestion et de leur contrôle ;
« i) L'allocation de numéros et de blocs de numéros, les redevances dues pour les frais de la gestion du plan de numérotation et de son contrôle, dans les conditions de l'article L. 34-10 ;
« j) Les obligations du titulaire au titre du service universel dans les conditions prévues aux articles L. 35-2 et L. 35-3 et au titre des services obligatoires définis à l'article L. 35-5 ;
« k) La fourniture des informations nécessaires à la constitution de l'annuaire universel prévu à l'article L. 35-4 ;
« l) Les droits et obligations de l'exploitant en matière d'interconnexion ;
« m) Les conditions nécessaires pour assurer une concurrence loyale ;
« n) Les conditions nécessaires pour assurer l'équivalence de traitement des opérateurs internationaux conformément aux dispositions des III et IV ci-après ;
« o) Les conditions nécessaires pour assurer l'interopérabilité des services ;
« p) Les obligations qui s'imposent à l'exploitant pour permettre le contrôle du cahier des charges par l'Autorité de régulation des télécommunications ;
« q) Les taxes dues pour la délivrance, la gestion et le contrôle de l'autorisation, dans les conditions prévues par les lois de finances ;
« r) Supprimé ;
« s) L'égalité de traitement et l'information des utilisateurs, notamment sur les conditions contractuelles de fourniture du service, comportant en particulier les compensations prévues pour le consommateur en cas de manquement aux exigences de qualité précisées en b.
« L'autorisation est délivrée pour une durée de quinze ans. Deux ans au moins avant la date de son expiration, le ministre notifie au titulaire les conditions de renouvellement de l'autorisation et les motifs d'un refus de renouvellement. Dans les cas d'établissement ou d'exploitation de réseaux expérimentaux, de modification ou d'adaptation de l'autorisation ou lorsque le demandeur le propose, l'autorisation peut être délivrée pour une durée inférieure à quinze ans ; le cahier des charges précise alors le délai minimal dans lequel sont notifiés au titulaire les conditions de renouvellement de l'autorisation et les motifs d'un refus de renouvellement.
« Un décret, pris après avis de la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications, précise celles des clauses énumérées plus haut qui doivent être conformes à des clauses types dont il détermine le contenu. Les dispositions du projet de décret relatives à la clause mentionnée au m sont soumises pour avis au Conseil de la concurrence.
« II. - Les opérateurs réalisant un chiffre d'affaires annuel sur le marché des télécommunications supérieur à un seuil fixé par arrêté des ministres chargés des télécommunications et de l'économie sont tenus d'individualiser sur le plan comptable l'activité autorisée.
« En outre, lorsqu'ils disposent dans un secteur d'activité autre que les télécommunications d'un monopole ou d'une position dominante appréciée après avis du Conseil de la concurrence, et que les infrastructures utilisées peuvent être séparées physiquement, ils sont tenus, dans l'intérêt d'un bon exercice de la concurrence, d'individualiser cette activité sur le plan juridique.
« III. - Sous réserve des engagements internationaux souscrits par la France comportant une clause de réciprocité applicable au secteur des télécommunications, l'autorisation mentionnée au présent article, lorsqu'elle concerne un réseau utilisant des fréquences radio-électriques, ne peut-être accordée à une société dans laquelle plus de 20 p. 100 du capital social ou des droits de vote sont détenus, directement ou indirectement, par des personnes de nationalité étrangère.
« De même, aucune personne de nationalité étrangère ne peut procéder à une acquisition ayant pour effet de porter, directement ou indirectement, la part détenue par des personnes de nationalité étrangère à plus de 20 p. 100 du capital social ou des droits de vote dans les assemblées générales d'une société titulaire d'une telle autorisation.
« Est considérée comme personne de nationalité étrangère, pour l'application du présent article, toute personne physique de nationalité étrangère, toute société dont la majorité du capital n'est pas détenue, directement ou indirectement, par des personnes physiques ou morales de nationalité française.
« Les dispositions du présent III ne sont pas applicables aux personnes physiques ou morales ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen.
« IV. - Sous réserve des engagements internationaux souscrits par la France, le ministre chargé des télécommunications et l'Autorité de régulation des télécommunications veillent à ce que soit assurée l'égalité de traitement des opérateurs autorisés à acheminer du trafic international au départ ou à destination de réseaux ouverts au public français, notamment dans les conditions d'interconnexion aux réseaux français et étrangers auxquels ils demandent accès.
« Sous la même réserve, ils veillent également à ce que les opérateurs des pays tiers à la Communauté européenne assurent aux opérateurs autorisés en application des articles L. 33-1 et L. 34-1 des droits comparables, notamment en matière d'interconnexion, à ceux dont ils bénéficient sur le territoire national, en application du présent code.
« V. - Le nombre des autorisations peut être limité en raison des contraintes techniques inhérentes à la disponibilité des fréquences.
« Dans ce cas, le ministre chargé des télécommunications publie, sur proposition de l'Autorité de régulation des télécommunications, les modalités et les conditions d'attribution des autorisations.
« L'allocation des fréquences doit dans tous les cas permettre d'assurer des conditions de concurrence effective.
« Art. L. 33-2. - L'établissement des réseaux indépendants, autres que ceux mentionnés à l'articleL. 33-3, est autorisé par l'Autorité de régulation des télécommunications.
« Un décret, pris après avis de la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications, détermine les conditions générales d'établissement et d'exploitation de ces réseaux en ce qui concerne les exigences essentielles, les prescriptions relatives à la sécurité publique et à la défense et les modalités d'implantation du réseau que doivent respecter les exploitants. Il précise les conditions dans lesquelles ceux-ci, ainsi que ceux mentionnés à l'article L. 33-3, peuvent, sans permettre l'échange de communications entre des personnes autres que celles auxquelles l'usage du réseau est réservé, être connectés à un réseau ouvert au public.
« L'autorisation ne peut être refusée qu'en cas de non-conformité à l'une des conditions générales d'établissement définies dans le décret mentionné au précédent alinéa ou à l'une des conditions d'établissement fixées par l'Autorité de régulation des télécommunications conformément aux dispositions de l'article L.36-6. A défaut de décision expresse dans les deux mois suivant la demande, et sauf dans le cas mentionné à l'alinéa suivant, elle est réputée acquise.
« Lorsqu'elle concerne un réseau qui utilise des fréquences assignées à son exploitant, l'autorisation doit être expresse. Elle est assortie d'un cahier des charges qui porte sur les prescriptions mentionnées au h du I de l'article L. 33-1 et qui précise les obligations pesant sur le titulaire en application du décret prévu au deuxième alinéa du présent article.
« Un exploitant de réseau indépendant ne peut conférer à son réseau le caractère de réseau ouvert au public sans autorisation préalable délivrée dans les conditions prévues à l'article L. 33-1. A défaut, l'exploitant peut être sanctionné dans les conditions prévues aux articles L. 36-11, L. 39 et L. 39-3.
« Art. L. 33-3. - Sous réserve de leur conformité aux dispositions du présent code, sont établis librement :
« 1° Les réseaux internes ;
« 2° Les cabines téléphoniques en dehors de la voie publique ;
« 3° Les réseaux indépendants de proximité, autres que radio-électriques, d'une longueur inférieure à un seuil fixé par le ministre chargé des télécommunications ;
« 4° Les installations radioélectriques de faible puissance et de faible portée dont les catégories sont déterminées conjointement par les ministres chargés des télécommunications, de la défense et de l'intérieur ;
« 5° Les installations radioélectriques n'utilisant pas des fréquences spécifiquement assignées à leur utilisateur.
« Les conditions d'utilisation des installations radioélectriques mentionnées ci-dessus sont déterminées dans les conditions prévues à l'article L. 36-6.
« Art. L. 33-4. - La publication des listes d'abonnés ou d'utilisateurs des réseaux ou services de télécommunications est libre, sous réserve de la protection des droits des personnes concernées.

« Section 2

« Services

« Art. L. 34. - La présente section s'applique aux services de télécommunications fournis au public.
« Art. L. 34-1. - La fourniture du service téléphonique au public est autorisée par le ministre chargé des télécommunications.
« Cette autorisation ne peut être refusée que dans la mesure requise par la sauvegarde de l'ordre public ou les besoins de la défense ou de la sécurité publique, ou lorsque le demandeur n'a pas la capacité technique ou financière de faire face durablement aux obligations résultant des conditions d'exercice de son activité, ou a fait l'objet d'une des sanctions mentionnées aux articles L. 36-11, L. 39, L. 39-1, L. 39-2, L. 39-3 et L. 39-4.
« L'autorisation est soumise à l'application des règles contenues dans un cahier des charges et portant sur les points mentionnés au I de l'article L. 33-1, à l'exception des e et h .
« Lorsque la fourniture du service suppose l'établissement d'un réseau ouvert au public, l'autorisation délivrée en application de l'article L. 33-1 autorise la fourniture du service.
« Art. L. 34-2. - La fourniture au public des services de télécommunications autres que le service téléphonique est libre sous réserve du respect des exigences essentielles et des prescriptions relatives à la défense et la sécurité publique.
« Toutefois, ces services sont soumis à autorisation dans les cas prévus à l'article L. 34-3 et à déclaration dans le cas prévu au premier alinéa de l'article L. 34-4.
« Un décret en Conseil d'Etat précise le contenu de la déclaration et de la demande d'autorisation et les conditions dans lesquelles sont fixées les prescriptions techniques nécessaires au respect des exigences essentielles.
« Art. L. 34-3. - La fourniture au public des services de télécommunications utilisant des fréquences hertziennes est soumise à autorisation préalable du ministre chargé des télécommunications dans les conditions suivantes :
« 1° Lorsqu'elle suppose l'établissement d'un nouveau réseau ou la modification d'un réseau déjà autorisé, les dispositions de l'article L. 33-1 sont applicables ;
« 2° Lorsqu'elle est assurée grâce à un réseau utilisant des fréquences assignées par une autre autorité que celle compétente en matière de télécommunications, la délivrance de l'autorisation est subordonnée au respect des dispositions mentionnées au I de l'article L. 33-1. Cette autorisation est délivrée après que l'autorité assignant les fréquences a donné son accord sur l'usage de celles-ci.
« Art. L. 34-4. - La fourniture au public des services de télécommunications autres que le service téléphonique sur les réseaux établis ou exploités en application de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle et de l'article 34 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est soumise, après information de la commune ou du groupement de communes ayant établi les réseaux ou autorisé leur établissement, à déclaration préalable auprès de l'Autorité de régulation des télécommunications.
« Cette déclaration a pour seul objet de permettre à l'Autorité de régulation des télécommunications de vérifier la nature du service fourni et des installations utilisées.
« Lorsque le service proposé est le service téléphonique au public, sa fourniture est soumise aux dispositions de l'article L. 34-1.
« En ce cas, l'autorisation est délivrée après consultation de la commune ou du groupement de communes ayant établi le réseau ou autorisé son établissement.
« Lorsque l'objet du service proposé est directement associé à la fourniture des services de radiodiffusion sonore et de télévision distribués sur le réseau, les dispositions du premier alinéa de l'article L. 34-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée reçoivent application.
« Les conventions en vigueur qui contiennent des clauses excluant la fourniture de services de télécommunications sur les réseaux mentionnés au premier alinéa ci-dessus ou lui apportant des restrictions de nature juridique ou technique devront être mises en conformité, avant le 1er janvier 1998, avec les dispositions du présent article. Ces mêmes conventions garantissent une juste rémunération du propriétaire de ces réseaux assurant la couverture, par le fournisseur de services, du coût des prestations fournies et des investissements réalisés. Elles précisent les modalités de mise à disposition des capacités supplémentaires nécessaires ainsi que les conditions techniques d'utilisation de ces réseaux. En cas de litige, l'Autorité de régulation des télécommunications peut être saisie, dans les conditions prévues à l'article L. 36-8.

« Section 3

« Dispositions communes

« Art. L. 34-5. - Sont placées auprès du ministre chargé des télécommunications et de l'Autorité de régulation des télécommunications deux commissions consultatives spécialisées, d'une part dans le domaine des réseaux et des services radioélectriques, d'autre part dans celui des services mentionnés aux articles L. 34-1, L. 34-2 et L. 34-4. Elles comprennent, en nombre égal, des représentants des fournisseurs de services, des représentants des utilisateurs de services et des personnalités qualifiées nommés par le ministre chargé des télécommunications.
« La commission consultative compétente est consultée par le ministre chargé des télécommunications ou par l'Autorité de régulation des télécommunications sur tout projet de mesure visant à définir les procédures d'autorisation, à fixer ou à modifier les conditions techniques et d'exploitation, les spécifications et les prescriptions techniques des services relevant de son domaine de compétence. Ses conclusions sont transmises à la commission supérieure du service public des postes et télécommunications.
« Un décret détermine la composition, les attributions et les conditions de fonctionnement de chacune de ces deux commissions consultatives.
« Art. L. 34-6. - Les autorisations délivrées en application des dispositions des sections 1 et 2 du présent chapitre sont liées à la personne de leur titulaire. Elles ne peuvent être cédées à un tiers.
« Les autorisations délivrées en application des articles L. 33-1, L. 34-1 et L. 34-3, ainsi que, le cas échéant, les cahiers des charges qui leur sont annexés, sont publiées au Journal officiel.
« Les refus d'autorisation sont motivés et notifiés aux intéressés.
« La suspension, la réduction de durée et le retrait total ou partiel des autorisations sont prononcés par l'Autorité de régulation des télécommunications, dans les conditions prévues à l'article L. 36-11.
« Art. L. 34-7. - Les infrastructures de télécommunications établies sur le domaine public ou pour les besoins de missions de service public peuvent être utilisées pour l'aménagement et l'exploitation de réseaux ouverts au public et la fourniture au public de tous services de télécommunications, dans le respect des dispositions du présent code.

« Section 4

« Interconnexion et accès au réseau

« Art. L. 34-8. - I. - Les exploitants de réseaux ouverts au public font droit, dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, aux demandes d'interconnexion des titulaires d'une autorisation délivrée en application des articles L. 33-1 et L. 34-1.
« La demande d'interconnexion ne peut être refusée si la demande est raisonnable au regard, d'une part des besoins du demandeur, d'autre part des capacités de l'exploitant à la satisfaire. Le refus d'interconnexion est motivé.
« L'interconnexion fait l'objet d'une convention de droit privé entre les deux parties concernées. Cette convention détermine, dans le respect des dispositions du présent code et des décisions prises pour son application, les conditions techniques et financières de l'interconnexion. Ces conditions doivent être suffisamment détaillées pour faire apparaître les divers éléments propres à répondre aux demandes spécifiques. La convention susmentionnée est communiquée à l'Autorité de régulation des télécommunications.
« Lorsque cela est indispensable pour garantir l'égalité des conditions de concurrence ou l'interopérabilité des services, l'Autorité de régulation des télécommunications peut, après avis du Conseil de la concurrence, demander la modification des conventions déjà conclues.
« Un décret détermine les conditions générales, notamment celles liées aux exigences essentielles, et les principes de tarification auxquels les accords d'interconnexion doivent satisfaire.
« II. - Les exploitants de réseaux ouverts au public figurant sur la liste établie en application du 7° de l'article L. 36-7 sont tenus de publier, dans les conditions déterminées par leur cahier des charges, une offre technique et tarifaire d'interconnexion approuvée préalablement par l'Autorité de régulation des télécommunications. Les tarifs d'interconnexion rémunèrent l'usage effectif du réseau de transport et de desserte, et reflètent les coûts correspondants.
« L'offre mentionnée à l'alinéa précédent contient des conditions différentes pour répondre, d'une part aux besoins d'interconnexion des exploitants de réseaux ouverts au public et, d'autre part, aux besoins d'accès au réseau des fournisseurs de service téléphonique au public, compte tenu des droits et obligations propres à chacune de ces catégories d'opérateurs.
« Les mêmes exploitants doivent, dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, assurer un accès à leur réseau aux utilisateurs et fournisseurs de services de télécommunications autres que le service téléphonique au public, ainsi qu'aux services de communication audiovisuelle déclarés en application de l'article 43 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée. Ils doivent également répondre aux demandes justifiées d'accès spécial correspondant à des conditions techniques ou tarifaires non publiées, émanant de ces fournisseurs de services ou des utilisateurs.
« III. - Les litiges relatifs aux refus d'interconnexion, aux conventions d'interconnexion et aux conditions d'accès peuvent être soumis à l'Autorité de régulation des télécommunications conformément à l'article L. 36-8.

« Section 5

« Equipements terminaux

« Art. L. 34-9. - Les équipements terminaux sont fournis librement.
« Les équipements destinés à être connectés à un réseau ouvert au public, ainsi que les installations radioélectriques, doivent faire l'objet d'une évaluation de leur conformité aux exigences essentielles. Les organismes intervenant dans la procédure d'évaluation de conformité sont désignés de façon à offrir aux industriels concernés un choix préservant leur indépendance par rapport à des entreprises offrant des biens ou services dans le domaine des télécommunications.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine :
« 1° Les conditions dans lesquelles l'Autorité de régulation des télécommunications peut désigner les organismes chargés de délivrer l'attestation de conformité ;
« 2° Les conditions dans lesquelles sont élaborées et publiées les spécifications techniques des équipements soumis à l'évaluation de conformité et les conditions de leur raccordement aux réseaux ouverts au public ;
« 3° Les cas dans lesquels une qualification technique est requise pour procéder au raccordement et à la mise en service de ces équipements ou installations et les conditions permettant de la garantir ;
« 4° La procédure d'évaluation de conformité et de délivrance des attestations correspondantes, les cas où celles-ci, en raison des caractéristiques techniques des équipements, sont acquises tacitement, ainsi que les conditions particulières dans lesquelles l'attestation est délivrée pour les installations destinées à être connectées aux réseaux mentionnés au 1° de l'article L. 33.
« Les équipements ou installations soumis à l'évaluation de conformité ne peuvent être fabriqués pour l'Espace économique européen, importés, en vue de leur mise à la consommation de pays n'appartenant pas à celui-ci, détenus en vue de la vente, mis en vente, distribués à titre gratuit ou onéreux, connectés à un réseau ouvert au public ou faire l'objet de publicité que s'ils ont fait l'objet d'une attestation de conformité et sont à tout moment conformes à celle-ci.

« Section 6

« Numérotation

« Art. L. 34-10. - Un plan national de numérotation est établi par l'Autorité de régulation des télécommunications et est géré sous son contrôle. Il garantit l'égal accès, par les utilisateurs, aux différents réseaux et services de télécommunications et l'équivalence des formats de numérotation.
« L'Autorité de régulation des télécommunications attribue aux opérateurs des préfixes et des numéros ou blocs de numéros, dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, moyennant une redevance, fixée par décret en Conseil d'Etat, destinée à couvrir les coûts de gestion du plan de numérotation et le contrôle de son utilisation.
« Les conditions d'utilisation de ces préfixes, numéros ou blocs de numéros sont précisées selon le cas par le cahier des charges de l'opérateur ou par la décision d'attribution qui lui est notifiée.
« L'Autorité de régulation des télécommunications veille à la bonne utilisation des numéros attribués. Les préfixes, numéros ou blocs de numéros ne peuvent pas être protégés par un droit de propriété industrielle ou intellectuelle. Il sont incessibles et ne peuvent faire l'objet d'un transfert qu'après accord de l'Autorité de régulation des télécommunications.
« A compter du 1er janvier 1998, tout abonné qui ne change pas d'implantation géographique peut conserver son numéro en cas de changement d'opérateur dans la limite des technologies mises en oeuvre et des capacités qu'elles permettent. Jusqu'au 31 décembre 2000, les coûts induits par le transfert des appels par l'opérateur initial sont supportés par le nouvel opérateur qui, seul, peut les refacturer à l'abonné. Les opérateurs sont tenus de prévoir les dispositions nécessaires dans les accords d'interconnexion conclus entre eux. Les dispositions du présent alinéa ne s'appliquent pas aux numéros alloués aux réseaux radioélectriques lorsqu'ils sont utilisés pour fournir des services mobiles.
« A compter du 1er janvier 2001, tout utilisateur peut, à sa demande :
« - conserver son numéro s'il change d'opérateur sans changer d'implantation géographique ;
« - obtenir de l'opérateur auprès duquel il est abonné, un numéro lui permettant de changer d'implantation géographique ou d'opérateur en gardant ce numéro.
« A compter de la même date, les opérateurs sont tenus de prévoir les dispositions nécessaires dans les accords d'interconnexion et de proposer aux utilisateurs les offres correspondantes, dont les conditions sont approuvées préalablement par l'Autorité de régulation des télécommunications. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet article 5, qui modifie à lui seul 16 articles du code des télécommunications, est l'un des plus dangereux de ce projet de loi puisqu'il organise le régime juridique des télécommunications ouvertes à la concurrence.
A première vue pourtant, cet article paraît prévoir des garde-fous aux turpitudes bien prévisibles des opérateurs privés.
Il convient cependant de le resituer dans son contexte réel et de le lire en comparant point par point les dispositions qu'il modifie dans l'actuel article du code des télécommunications.
On s'aperçoit alors qu'il opère un véritable bouleversement dans le paysage des télécommunications de notre pays et qu'un certain nombre des garanties qu'il semble offrir se révèlent être des coups contre le service public des télécommunications.
Avec cet article 5, les pouvoirs publics n'auront que très peu de motifs légaux pour refuser l'intrusion en France d'opérateurs étrangers menaçant les intérêts nationaux.
Il s'agit donc là d'une affaire très grave et qui pourrait coûter très cher à notre pays.
Je rappelle, à cet égard, que la France peut faire obstacle à toute décision qui léserait ses intérêts nationaux les plus fondamentaux devant les institutions communautaires.
Il paraît donc très surprenant que notre pays ne puisse opposer la sauvegarde de ses intérêts nationaux devant un opérateur qui les mettrait en cause.
L'article 5 va également à l'encontre des intérêts des collectivités locales en leur déniant toute réelle participation au processus de décision de construction d'infrastructures de télécommunications, ce qui nous semble faire bien peu de cas des droits des collectivités locales.
Le régime de l'interconnexion très laxiste qu'il prévoit pour les opérateurs privés obligerait l'opérateur historique France Télécom à favoriser l'introduction de ses propres concurrents sur le marché et lui ferait supporter des charges disproportionnées.
Les compagnies téléphoniques privées pourraient ainsi se connecter au réseau de l'opérateur, pour l'instant public, pour un prix dérisoire, qui ne tiendrait compte ni de l'entretien du réseau qu'elles utiliseraient ni du coût de son amortissement.
Ce réseau, il faut le rappeler une nouvelle fois, a été payé par les contribuables et par les usagers de France Télécom et il est par conséquent tout à fait inconcevable que ceux qui l'utiliseraient n'acquittent pas un prix correspondant réellement au coût total de son utilisation.
Enfin, l'article 5 crée un régime juridique dérogatoire qui consisterait à soumettre à une autorité de réglementation des télécommunications particulière les litiges relatifs aux problèmes d'interconnexion entre France Télécom et ses concurrents privés.
Quand on sait que l'objectif de cette nouvelle institution est avant tout de faciliter l'exercice de la concurrence, il y a fort à parier que ses décisions seront principalement prises à l'encontre de l'opérateur France Télécom.
Par conséquent, et pour toutes ces raisons, je tenais, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, à alerter le Sénat sur le contenu réel des dispositions de l'article 5, qui est l'un des éléments clés du dispositif de privatisation de la plupart des activités que France Télécom exerce aujourd'hui avec l'efficacité que l'on sait et au service du public et non d'intérêts financiers privés.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Très bien !
M. le président. Par amendement n° 89, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer l'article 5.
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Nous proposons, par cet amendement, de supprimer l'article 5, qui, nous venons de l'expliquer, est sous des apparences anodines l'un des éléments principaux de l'équilibre de ce texte.
Avec ces dispositions, des sociétés spécialisées dans la pose d'autres tuyaux que ceux de l'information vont pouvoir s'attaquer en grand au marché que représentent les télécommunications.
Nous souhaitons, pour notre part, que ces entreprises se concentrent sur leur activité principale, plutôt que de chercher à s'accaparer des marchés dans des domaines dans lesquels elles ne paraissent pas à première vue particulièrement qualifiées.
Nous pourrions, pendant des heures, comparer l'efficacité des compagnies fermières chargées de la gestion et de la distribution de l'eau et des entreprises publiques, telles que France Télécom, EDF-GDF ou la SNCF.
Il en ressortirait sans aucun doute que les entreprises publiques gèrent mieux le service public et ont le souci permanent de l'innovation, du progrès technologique et de la création d'emplois.
Nous souhaitons, pour notre part, que les compagnies des eaux se consacrent pleinement à la gestion et à la distribution de l'eau et qu'elles y consacrent l'ensemble de leurs investissements.
Il est en effet très étonnant que ces sociétés réclament en permanence de l'argent public et augmentent inconsidérément leurs tarifs pour construire les installations nécessaires à la dénitrification de l'eau et à leur mise aux normes européennes, pendant qu'elles investissent leurs énormes profits ailleurs.
Nous estimons que les modifications de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications contenues dans l'article 5 font la part trop belle aux compagnies téléphoniques privées par rapport à France Télécom.
Il n'est, en effet, pas normal de prévoir dans cet article de les exonérer de l'individualisation juridique de leurs activités futures dans le secteur des télécommunications, ce qui leur permettrait de maintenir une certaine opacité de leurs activités et de leurs comptes.
C'est la porte ouverte à de nombreuses futures affaires qui pourraient défrayer la chronique au cours des prochaines années.
Pour toutes ces raisons, l'article 5 est donc parfaitement inacceptable. C'est pourquoi nous demandons au Sénat de voter sa suppression.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il n'y aurait plus de loi si cet amendement était adopté car, comme l'a souligné M. Leyzour, la suppression de l'article 5 reviendrait à tourner la page et à renvoyer ce texte aux calendes grecques. La commission est donc naturellement défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 89, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Toujours sur l'article 5, je suis maintenant saisi d'un certain nombre d'amendements.

ARTICLE L. 33 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. le président. Sur le texte proposé pour l'article L. 33 du code des postes et télécommunications, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 33 du code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 33-1 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. le président. Par amendement n° 90, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le deuxième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, après le mot : « sauvegarde », d'insérer les mots : « de l'intérêt national, ».
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. L'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications tend à instaurer une autorisation préalable du ministre chargé des télécommunications pour l'exploitation de réseaux ouverts au public.
L'amendement n° 90 tend à préciser et à étendre les motifs pour lesquels une telle autorisation peut être refusée.
En effet, les motifs invoqués sont si minimes que l'on peut légitimement dire que le ministre ne pourra jamais refuser l'agrément. Or, comme nous l'avons démontré depuis le début de la discussion de ce texte, les télécommunications ne sont pas une marchandise comme une autre. Les enjeux de leur accès et de leur diffusion dans la population sont tels qu'il s'agit, pour nous, d'une question d'intérêt national.
Certes, dans les propos de campagne ou dans ceux de M. le Premier ministre, lors du mouvement qui a éclaté au cours des mois de novembre et de décembre derniers, il a souvent été question de cet intérêt national que l'on défendait à Bruxelles.
Je me permets de rappeler que M. Juppé déclarait avec solennité : « Nous défendrons le service public français auprès de Bruxelles. J'ai dit avec humilité aux Français que je suis prêt à le faire inscrire dans la Constitution. »
Aujourd'hui, ces promesses sont quelque peu oubliées. L'heure est à la déréglementation, à la casse du service public français et à la remise en cause de l'intérêt national.
Pour notre part, nous sommes persuadés que les télécommunications seront le système nerveux du développement économique. La maîtrise de ces flux doit donc rester entre les mains des représentants de la nation. C'est essentiel pour assurer un développement économique et social cohérent et pour maintenir le pacte républicain.
C'est pourquoi, mes chers collègues, au nom des sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, je vous propose d'ajouter les mots : « de l'intérêt national » après le mot : « sauvegarde ».
M. Félix Leyzour. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. La commission se prononce contre...
M. Paul Loridant. L'intérêt général ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Non ! La commission est contre cet amendement car la notion de l'intérêt national mérite de retenir toute notre attention.
Je tiens à rappeler que le texte comporte des précisions très claires en matière de sauvegarde.
La sauvegarde de l'ordre public, des besoins en matière de défense ou de sécurité publique relèvent bien, que je sache, de l'intérêt national. Mais, dans ce cas d'espèce, une notion doit être juridiquement solide pour pouvoir être introduite dans le texte parce qu'elle pourra faire l'objet de recours. Il ne nous semble donc pas que l'introduction de cette notion d'intérêt national, qui reste assez vague sur le plan juridique, soit de nature à renforcer le texte, bien au contraire. La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Si nous pouvions nous mettre d'accord sur cette notion d'intérêt national, je serais prêt à accepter cet amendement. Mais, pour moi, l'intérêt national dans le domaine des télécommunications, c'est apporter à nos concitoyens plus de services ou au moins autant que dans les pays libéralisés, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, à des tarifs plus bas que ceux que nous pratiquons aujourd'hui et à permettre à France Télécom de partir à la conquête des marchés européens, américains et asiatiques parce que le quatrième opérateur mondial a vocation à être présent sur les trois continents.
Pour vous, l'intérêt national, c'est la défense d'un monopole qui maintient nos concitoyens dans une situation dans laquelle les services sont moins nombreux et plus chers. Je crois que nous ne pouvons donc pas nous mettre d'accord sur cette notion.
Mme Danielle Bidard-Reydet. La caricature vous sied mal, monsieur le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. C'est la vérité !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 90, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 146, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, après les mots : « ou lorsque le demandeur », de rédiger ainsi la fin du deuxième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications : « n'a pas la capacité technique et financière de faire face durablement aux obligations résultant des conditions d'exercice de son activité ou n'a pas satisfait aux prescriptions régissant la mission ou la délégation de service public qui lui a été confiée dans un autre secteur d'activité, ou encore a fait l'objet d'une des sanctions mentionnées aux articles L. 36-11, L. 39, L. 39-1, L. 39-2, L. 39-3 et L. 39-4. »
Par amendement n° 196, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, dans le deuxième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de supprimer la référence : « , L. 39-3 ».
La parole est à M. Delfau, pour défendre l'amendement n° 146.
M. Gérard Delfau. Cet amendement a pour objet d'élargir les motifs de refus de délivrance d'une autorisation d'établissement et d'exploitation de réseaux ouverts au public. En effet, il n'échappe pas au Sénat qu'un certain nombre de groupes privés bénéficiaires d'une concession de services, ont connu ces dernières années des démêlés judiciaires. Certains de ces groupes ont même fait l'objet d'une sanction.
Il nous semble opportun de préciser qu'une autorisation d'utilisation de réseaux ne pourra pas être accordée à un groupe ayant fait l'objet d'une condamnation dans le cadre d'une concession de services, par exemple, dans le cadre du service des eaux.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 146 et pour présenter l'amendement n° 196.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Dans sa présentation, M. Delfau a précisé quelles étaient les sociétés visées. J'ai en effet connu un moment d'angoisse en commission. En effet, nous étions restés dans le vague, et j'ai pensé qu'il pouvait y avoir des doutes sur la SNCF, qui envisage de s'engager dans le domaine des télécommunications... Me voilà mieux informé !
Mais s'agissant des entreprises visées, notamment les grands distributeurs d'eau, il ne faut pas être atteint d'un syndrome d'une ville que je ne citerai pas car le dossier n'est pas encore clos. Il faut, en la matière, rester serein.
Que prévoit le texte ? Lorsque les opérateurs « disposent dans un secteur d'activité autre que les télécommunications d'un monopole ou d'une position dominante appréciée après avis du conseil de la concurrence, et que les infrastructures utilisées peuvent être séparées physiquement... », ce qui est le cas - j'ai tout à l'heure appelé de mes voeux une autorité de régulation dans le domaine de l'eau, mais restons dans celui des télécommunications - « ils sont tenus, dans l'intérêt d'un bon exercice de la concurrence, d'individualiser cette activité sur le plan juridique. » La réponse est là. Il ne s'agit pas de nier les problèmes qui se posent mais il faut éviter cette espèce de sentiment sulfureux que l'on voudrait faire planer au-dessus de l'ensemble de ces secteurs qui, rappelons-le, sont porteurs pour notre économie.
Arrêtons de nous suicider collectivement quand nous avons des entreprises qui fonctionnent, notamment Alcatel, qui est la première entreprise dans le domaine des télécommunications. Cessons de jeter ces entreprises en pâture, car elles sont une chance pour la France ! (MM. Bernard Seillier, Michel Pelchat et Gérard Braun applaudissent.)
Aussi, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 146.
J'en viens à l'amendement n° 196. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement n° 44 visant à supprimer le texte proposé par l'article 7 pour l'article L. 39-3 du code des postes et télécommunications, et qui concerne la possibilité de déclarer pénalement responsable une personne morale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 146 et 196 ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 146 et il approuve les propos que vient de tenir M. le rapporteur. Je m'étonne d'ailleurs que les socialistes, qui ont été au pouvoir pendant près de douze ans, n'aient pas modifié la législation concernant ces sociétés qui leur semblent désormais représenter le diable.
S'agissant de l'amendement n° 196, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 146.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. A la suite des explications de M. le rapporteur, j'aurais envie de lui dire, mais ce serait facile, que chacun a ses champions !
M. Gérard Braun. Alors, ne le dites pas !
M. Gérard Delfau. Je souhaiterais élever le débat. Je voudrais lui faire observer que j'ai employé les mots « à titre d'exemple » et « notamment ». S'il est vrai qu'il y a une actualité regrettable et condamnable, il y a aussi tout simplement nécessité, pour le législateur, de prendre un certain nombre de garanties en ce qui concerne l'ensemble des filières et des opérateurs concernés, ni plus ni moins.
Par ailleurs, je voudrais tout de même suggérer à M. le rapporteur ainsi qu'à M. le ministre de bien écouter ce que dit la population.
M. Emmanuel Hamel. Mais nous sommes la population !
M. Gérard Delfau. Il vaudrait mieux que, de ce point de vue, nous soyons à la limite un peu trop rigoureux, plutôt que de passer pour un peu trop laxistes !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 146, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 196.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. S'agissant de l'entreprise Alcatel, qui a été évoquée par M. le rapporteur, je voudrais simplement faire remarquer qu'à un moment s'est posé un problème de surfacturation à France Télécom, lequel a porté sur près de deux milliards de francs. Certes, c'était une bonne entreprise, mais encore faut-il veiller à ce que la vérité se fasse véritablement.
M. Gérard Larcher, rapporteur. C'était le fait du monopole !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 196, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 91, MM. Loridant, Ralite, Billard et Leyzour, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après le deuxième alinéa du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il s'agit d'infrastructures nouvelles, l'autorisation du ministre chargé des télécommunications ne peut être délivrée qu'après consultation et avis des collectivités territoriales concernées. »
Par amendement n° 147, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après le deuxième alinéa du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« L'autorisation d'établissement d'un nouveau réseau ne peut être délivrée qu'après consultation et avis des collectivités locales et territoriales concernées. »
La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° 91.
M. Paul Loridant. Cet amendement a pour objet de tenir compte de l'avis des collectivités locales lorsqu'il s'agit d'implanter de nouveaux réseaux.
A n'en pas douter, monsieur le ministre, mes chers collègues, le secteur des télécommunications connaît d'intenses évolutions et le projet de loi réglementant ce secteur nous a fait accomplir un grand bond, mais c'est, nous semble-t-il, un fantastique bond en arrière !
Je ne reviendrai pas sur les conséquences sociales et économiques qu'ont développées les précédents orateurs, ni sur les conséquences en termes d'aménagement du territoire à travers la fin de la péréquation pour les services obligatoires. Je partage ces analyses.
Je voudrais attirer plus modestement l'attention de la Haute Assemblée sur un point particulier de ce projet de loi, et lui soumettre un amendement qui devrait recueillir un très large consensus.
Mes chers collègues, nous devons veiller particulièrement au rôle des collectivités territoriales. Nous savons tous quel rôle incontournable elles jouent pour fédérer des acteurs locaux, pour faire naître de nouveaux services.
De très grandes villes européennes, comme Anvers, ont décidé de se doter d'infrastructures de télécommunications. Plusieurs centaines de villes françaises de toute importance et des départements entiers déploient sur leurs territoires des réseaux câblés, sur lesquels fonctionnent déjà des services de télécommunications, et vont en expérimenter d'autres dans le cadre des futures autoroutes de l'information. Des régions - je pense, en particulier, à l'Aquitaine - réfléchissent à des schémas directeurs en matière de télécommunications et investissent dans des équipements structurants, en partenariat avec France Télécom.
Les villes sont consultées, pour l'implantation de pylônes de télécommunications, pour des travaux de voirie permettant le passage de câble. Au sein de l'association des villes câblées, de nombreux maires nous ont fait part des sollicitations dont ils font déjà l'objet, de la part des hôpitaux, des centres de recherche et des universités, pour créer des réseaux locaux. Nous avons aussi nos propres besoins, pour relier les équipements administratifs, les écoles, les médiathèques et tout autre équipement.
Les villes sont aussi des aménageurs, elles sont à l'écoute des entreprises pour leurs besoins d'infrastructures de toutes sortes, et je peux vous dire, en tant que maire d'une ville où sont installées de nombreuses entreprises dans des secteurs de pointe, qu'elles nous interpellent aussi sur les télécommunications.
Ces projets, ces réalisations, vous en connaissez peut-être une partie, c'est « Visio université Ile-de-France », c'est l'anneau culturel de Valenciennes, pour le câble c'est « Metz interactive », c'est Futuroscope TV, c'est Cristal en Alsace. Du Vercors au Limousin, de l'Hérault à Lille, ces initiatives se chiffrent par plusieurs dizaines, et ce n'est qu'un début. Vous avez noté qu'il y a des départements ou des équipements qui sont chers au coeur du Sénat, je pense au Futuroscope.
Face à ce rôle de véritable pivot que jouent les collectivités territoriales entre les institutions, les entreprises et, bien sûr, les habitants, que prévoit ce projet de loi ? Rien. Les communes, les départements, les régions sont ignorés. Le ministre seul autoriserait la création d'infrastructures nouvelles sans même recueillir le simple avis des collectivités concernées.
Il s'agit bien d'un fantastique bond en arrière par rapport aux principes de la décentralisation.
Une infrastructure de télécommunications ne se décide pas à la sauvette. Elle s'étudie avec soin. Les investissements considérables, tant en matériel qu'en génie civil, doivent s'amortir sur un grand nombres d'années. Pour quels besoins, pour quels services ?
Alors, pourquoi ne pas recueillir l'avis des collectivités ? Ces infrastructures n'auraient-elles aucune incidence sur la vie locale ? N'y a-t-il aucune cohérence à rechercher ? N'y a-t-il pas le risque de voir certaines zones sous-équipées et d'autres suréquipées, sans rentabilité dans les deux cas, par un simple manque d'information et de concertation ? La concurrence est une chose, la gabegie en est une autre.
On nous objecte qu'il ne saurait y avoir 36 000 réseaux de télécommunications, comme il y a 36 000 communes. Mes chers collègues, nous sommes la Haute Assemblée. C'est un faux procès.
Il ne s'agit pas de cela. Depuis la décentralisation, que je sache, on construit toujours des routes, des autoroutes ou des voies ferrées. L'avis des communes et de leurs groupements est toujours recueilli. Les procédures sont rodées. Loin de bloquer les projets, cette procédure permet de leur assurer une meilleure insertion. Elle permet aussi aux collectivités d'anticiper sur l'arrivée de ces équipements, de les accompagner. Sur les autoroutes de l'information, n'y aura-t-il pas besoin de bretelles pour rejoindre la circulation locale ?
Les collectivités locales ne sont pas des freins à la croissance, au développement ; elles en sont un des moteurs, vous le savez bien. Je vous propose donc, mes chers collègues, que la consultation et l'avis des collectivités concernées soient introduits dans le projet de loi pour l'autorisation du ministre concernant les infrastructures nouvelles.
En adoptant cet amendement, vous voterez à la fois pour la défense des principes de la décentralisation et pour une meilleure efficacité économique. Je ne doute pas un seul instant que la Haute Assemblée sera sensible à cet amendement.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Delfau, pour défendre l'amendement n° 147.
M. Gérard Delfau. Cet amendement, comme le précédent, tend à faire droit aux prérogatives des collectivités locales pour l'établissement d'infrastructures de télécommunications.
Comme les usagers, les collectivités locales sont les parents pauvres de ce projet de loi. Nous proposons donc, tout au long du débat, plusieurs amendements visant à faire droit à leurs prérogatives.
En l'occurrence, il s'agit d'autoriser l'établissement d'un nouveau réseau seulement après consultation et avis des collectivités concernées. Cet amendement est modeste. Il ne vise pas à conditionner l'établissement des réseaux à l'autorisation des communes. Il ne s'agit pas de donner aux communes un pouvoir de régulation, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, à M. Guyard qui défendait, à l'Assemblée nationale, un amendement similaire.
Les collectivités territoriales, le Sénat le sait tout particulièrement, sont adultes. La décentralisation n'était plus, dans cette enceinte, ces dernières années, objet de contestation. Encore que, avec la loi Pasqua, on se demandait parfois s'il n'y avait pas quelque impatience de l'Etat pour revenir sur quelques transferts de compétences - mais c'est là une remarque au passage.
Pour revenir à notre texte, monsieur le ministre, il nous paraît impossible, comme à vous tous, mes chers collègues, que nous n'acceptions pas de donner à nos communes, à nos départements, à nos régions, à nos syndicats intercommunaux, communautés de communes ou districts au moins le droit à une consultation et la possibilité élémentaire de donner un avis.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 91 et 147 ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. S'agissant de ces deux amendements, nous devons dire les choses telles qu'elles sont.
Je rappellerai, tout d'abord, que nous avons souligné que les infrastructures de télécommunications seraient, dans les années à venir, encore plus importantes que les infrastructures de communications ou de transport bâties au siècle dernier ou dans les soixante-dix premières années du xxe siècle, et qu'elles seraient déterminantes en matière d'aménagement et de dynamique du territoire.
Je dirai également que le Sénat est naturellement attaché à la liberté des collectivités locales et territoriales.
Je voudrais néanmoins rappeler l'enjeu. L'amendement n° 91 ne vise pas une permission de voirie. Cette dernière figure d'ailleurs dans le texte proposé pour l'article L. 47 du code des postes et télécommunications, en ce qui concerne notamment le domaine routier, avec une consultation et une permission telles que le code de la voirie routière les prévoit. L'amendement présenté par M. Loridant tend, en fait, à consulter et à demander l'avis des collectivités territoriales concernées pour que le ministre puisse délivrer une autorisation d'infrastructures nouvelles.
Je prendrai l'exemple d'une infrastructure nouvelle le long de l'autoroute de l'Est assurant la jonction Paris-Strasbourg.
M. Félix Leyzour. Vous nous avez déjà donné cet exemple !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Oui, j'ai déjà pris cet exemple en commission, monsieur Leyzour, mais permettez-moi d'en faire profiter l'ensemble de la Haute Assemblée !
M. Michel Pelchat. C'est un bon exemple !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cette autoroute traverse plus de 620 communes, huit départements, quatre régions, ce qui signifierait autant de délibérations. Allons-nous être atteints du syndrome « TGV belge », qui, à la suite de la fédéralisation de la Belgique, bloque depuis cinq ans cette infrastructure essentielle pour nos voisins et pour nous-mêmes ? Je crois qu'en cette matière nous sommes trop attachés à la fois à l'intérêt national...
M. Emmanuel Hamel. On n'est jamais trop attaché à l'intérêt national !
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... et à l'aménagement du territoire pour nous complaire dans ce type de méandres.
A l'époque des grandes décisions conduites par les gouvernements du général de Gaulle, l'intérêt national était l'une des priorités qui ont permis à notre territoire d'être dans l'état dans lequel il se trouve aujourd'hui.
C'est pourquoi l'amendement n° 91 qu'il ne faut pas confondre avec un amendement concernant la permission de voirie, me paraît particulièrement dangereux.
Les élus locaux que nous sommes aiment être consultés et donner leur avis, ce qui est naturel. Mais il y a aussi l'intérêt national. La commission des affaires économiques émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 91, et ce pour des raisons de fond qui sont d'ailleurs liées aux nécessités de l'aménagement et de l'équipement du territoire.
S'agissant de l'amendement n° 147, je formulerai les mêmes observations : l'aménagement du territoire et la décentralisation, c'est non pas une addition de grands et de petits duchés qui se mettraient successivement d'accord, mais un territoire qui reste, à mes yeux, un et indivisible et dont il revient à certains moments à l'exécutif de décider de l'intérêt supérieur.
La commission émet donc également un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 91 et 147 ?
M. François Fillon, ministre délégué. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ferai trois réflexions.
Tout d'abord, monsieur Delfau, si vous êtes si soucieux de l'avis des collectivités locales sur l'établissement de ces réseaux, vous me permettrez de m'interroger sur les raisons qui ont conduit depuis tant d'années le groupe socialiste, en particulier, à ne pas réclamer ce droit qui n'existait ni dans la loi de 1990 ni auparavant.
M. Gérard Delfau. On l'a fait !
M. François Fillon, ministre délégué. Par ailleurs, je voudrais vous faire remarquer que ce texte prévoit pour la première fois le versement d'une indemnité aux collectivités locales.
Mais il s'agit d'établir des réseaux nationaux, des réseaux européens. Comment accepter que, pour établir un réseau national, il faille obtenir l'accord de l'ensemble des collectivités locales traversées ?
En réalité, on voit bien ce qui se cache derrière l'amendement n° 91 : si ce texte était adopté, il y aurait les communes favorables au réseau de l'opérateur public, et les communes favorables au réseau des opérateurs privés.
M. Michel Pelchat. Voilà !
M. François Fillon, ministre délégué. C'est vers ce type de combat département par département que nous nous orienterions au moment où il s'agirait d'établir des grands réseaux « sans couture », au moins sur le territoire national, sinon sur le territoire européen.
Par conséquent, je vous en prie ! Vous avez à plusieurs reprises évoqué l'intérêt national. Certaines responsabilités incombent aux collectivités locales ; nous devons les assumer et les renforcer. D'autres responsabilités appartiennent à l'Etat, dans l'intérêt national. S'agissant de l'établissement de réseaux qui sont des réseaux nationaux, il n'y a pas de doute : ils doivent être établis sans procédure de consultation des collectivités locales même si, ensuite, pour le droit de passage sur le domaine des collectivités locales, la consultation intervient forcément.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 91.
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Monsieur le minisre, je crains que nous ne soyons au coeur d'une contradiction forte et que les collectivités territoriales - mais vous aussi, monsieur le ministre, et vos services encore plus - ne soient confrontés, à l'avenir, à de très sérieuses difficultés si vous n'écoutez pas les raisons et le bon sens de notre proposition. Si une contradiction institutionnelle existe bien sûr et si l'intérêt de l'Etat se justifie, l'intérêt des communes, des départements et des régions doit néanmoins être également pris en compte.
Nos amendements - je l'ai dit - ne cherchent pas à méconnaître le rôle qui peut être celui de l'Etat ou de grandes entreprises publiques comme France Télécom. Cependant, nous sommes bien obligés de constater que le texte, tel qu'il nous est soumis, ne tient pas compte d'un certain nombre de réalités déjà établies sur le terrain, singulièrement en matière de télévisions locales de câble.
C'est si vrai que, dans ce projet de loi, « l'établissement et l'exploitation des réseaux ouverts au public sont autorisés par le ministre chargé des télécommunications » sans plus de consultation des acteurs locaux.
Or, depuis la loi du 30 septembre 1986 et son article 34, les communes établissent ou autorisent l'établissement des réseaux câblés sur le territoire ; l'exploitation des services est autorisée par le CSA pour les services audiovisuels et par le ministre chargé des télécommunications pour les services de télécommunication, sur proposition des communes dans les deux cas.
Or, les réseaux câblés sont des réseaux de télécommunications ouverts au public, comme ceux qui sont visés par l'article L. 33-1 auquel nous nous référons. Il apparaît donc clairement que le texte dont nous débattons aujourd'hui revient en partie sur des dispositions adoptées voilà presque dix ans, et ce sans que vous l'ayez dit publiquement et sans que vous en ayez informé la Haute Assemblée.
Je sens donc pointer le risque de conflits d'interprétation juridique puisque nous savons que, à terme, tous les réseaux offriront l'ensemble des services, à savoir la voix, les données, les images.
C'est ainsi que l'instauration d'un double régime pour des réseaux et services de même nature empêcherait l'accomplissement des prérogatives des collectivités territoriales, qui sont aussi chargées de veiller à la cohérence des infrastructures et qui sont garantes de l'intérêt général.
Si nous pouvons comprendre que les rédacteurs du projet de loi ont souhaité ne pas donner le sentiment de morceler la politique nationale des télécommunications entre les 36 000 communes, nous constatons cependant qu'ils ont poussé très loin leur zèle jacobin au point de méconnaître les lois antérieurement votées et la réalité du terrain. Les élus locaux seront donc exclus de tout processus décisionnel ou de concertation, alors que leur avis n'en est pas moins précieux.
D'ailleurs, le directeur des relations extérieures de France Télécom ne disait pas autre chose lorsqu'il s'est exprimé récemment dans la revue de l'association des villes câblées : « Il ne serait pas normal que les élus se sentent de purs spectateurs d'une bataille entre opérateurs, alors qu'il s'agit en partie du développement de leur ville. Il y a donc lieu, poursuivait-il, de rechercher une forme d'intervention qui, sans être une course d'obstacles pour des opérateurs contribuant au développement local, permette quand même d'imprimer la marque d'une municipalité sur ce qui est autre chose qu'un simple problème de voirie ».
Tel est l'enjeu, mes chers collègues. Si le Sénat rejette notre amendement, soyez certains que vous reviendrez alors sur certaines dispositions de la loi de 1986, que vous mettrez en difficulté des communes qui sont déjà reliées à un réseau câblé et que vous ne permettrez pas à d'autres de « prendre le train en marche » lorsque des réseaux de télécommunications seront en mesure de les desservir et que, pour une raison ou pour une autre, le ministre, dans le secret de son bureau, ignorera les réalités locales.
Mes chers collègues, nous formons le Grand conseil des communes de France ; je vous invite donc à bien réfléchir avant de repousser notre amendement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Delfau applaudit également.)
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. J'avoue que ce débat, que je suis avec une très grande attention, comme chacun d'entre nous j'imagine, me laisse franchement interloqué !
De quoi s'agit-il ? Il s'agit d'un conflit de compétences qui, comme vient de l'indiquer mon collègue Paul Loridant, a été tranché, s'agissant du plan câble, par la loi de 1986, ou qui a été surmonté par un certain nombre de pratiques d'opérateurs nationaux, tels que Gaz de France, qui n'hésite pas, du moins maintenant, avant de procéder à des travaux, à consulter les communes, ce qui est bien la moindre des choses.
Nous discutons ce soir d'un projet de loi qui tend à modifier complètement l'implantation des réseaux de télécommunications.
Comment comprendre que le Sénat, dans cette affaire, accepte que les collectivités locales ne puissent pas dire leur mot ? C'est leur prérogative, et cela n'est pas discutable, monsieur le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Si, c'est discutable !
M. Gérard Delfau. Si nous étions d'accord sur le principe, je vous suivrais plus avant pour considérer qu'il faut éviter les blocages et que l'on ne peut donc pas tout morceler ; j'admettrais avec vous, par exemple, que, s'agissant d'un réseau de télécommunications, l'avis doit être demandé à la collectivité locale directement concernée : ce serait le district urbain, si ce réseau touche le district urbain, la région, si l'ensemble de la région est concerné, ou le département, si le réseau de télécommunications touche seulement un département.
Mais comment expliquer que le ministre puisse prendre des mesures aussi décisives pour la vie quotidienne des habitants sans qu'à un moment donné, dans une France qui a voté les lois de décentralisation, un représentant des collectivités locales puisse donner un avis ?
Vous refusez ! Pour moi, c'est incompréhensible. Vous essayez de caricaturer notre position : nous disons « avis » ; vous feignez d'entendre « accord » ou « refus motivé ». Ce n'est pas ce que nous demandons !
Par conséquent, nous maintenons fermement notre position. Le groupe socialiste votera l'amendement présenté par M. Loridant. S'il n'est pas adopté, je ne donne pas plus de deux ans pour que le Sénat revienne sur cette question...
M. Paul Loridant. C'est sûr !
M. Gérard Delfau. ... car, devant les dégâts et la révolte des élus locaux, monsieur le ministre, vous, ou votre successeur, serez bien obligé de revoir votre position.
M. François Fillon, ministre délégué. C'est ainsi depuis 1990 et il n'y pas eu de révolte des élus locaux !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 91, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 95:

Nombre de votants 315
Nombre de suffrages exprimés 315
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 94
Contre 221

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 147, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 3, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose de compléter in fine le sixième alinéa c du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications par les mots suivants : « et des informations liées aux communications ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cet amendement tend à accroître la confidentialité et la neutralité imposées aux opérateurs par le cahier des charges, en ce qui concerne non seulement le contenu des messages, mais également leur provenance, leur destination et l'heure à laquelle les appels ont eu lieu.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui tend à préciser le texte ; il répond à un souci qui est aussi celui du Gouvernement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 4, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, dans le quatorzième alinéa k du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de remplacer les mots : « de l'annuaire universel prévu » par les mots : « et à la tenue de la liste prévue ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de clarification. En effet, la rédaction que nous vous proposons dissipe toute équivoque d'interprétation qui pourrait laisser supposer que l'organisme - nous y reviendrons au cours du débat - chargé de collecter les informations nécessaires à l'édition de l'annuaire éditerait lui-même l'annuaire.
Il convient de distinguer nettement l'édition de l'annuaire de la collecte des informations et de la gestion de la liste par l'organisme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 60 rectifié quater, MM. Cabanel, Laffitte, Rausch, Joly, Baudot et Bernadaux proposent de rétablir le vingt et unième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications dans la rédaction suivante :
« r) Les obligations sociales ou culturelles, sous la forme d'engagements pris par le futur opérateur en matière de raccordement d'institutions d'intérêt général tels que les établissements d'enseignement, de soins médicaux, les musées ou les fondations reconnues d'utilité publique. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° 92, MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le second alinéa du paragraphe II du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de remplacer les mots : « d'un monopole ou d'une position dominante appréciée après avis du conseil de la concurrence, et que les infrastructures utilisées peuvent être séparées physiquement » par les mots : « d'une présence ».
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Cet amendement tend à supprimer une disposition défavorable à l'opérateur historique sur le plan de la concurrence.
Cette disposition permettrait aux sociétés qui exercent des activités dans d'autres secteurs que celui des télécommunications d'individualiser juridiquement leur nouvelle activité dans le secteur des télécommunications.
La mesure prévue par le paragraphe II du texte proposé pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications se situe pleinement dans la stricte application des directives de Bruxelles en matière de télécommunications.
M. Gérard Larcher l'explique clairement dans son rapport en indiquant que « le II de l'article L. 33-1 transpose une règle européenne de séparation comptable figurant dans la directive 96/19/CE de la Commission du 13 mars 1996 ».
Sans vouloir paraphraser M. Pierre Mazeaud, président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, je dirai que le rôle du Parlement se trouve, de fait, confiné à celui d'une chambre d'enregistrement, puisque la norme européenne s'impose à la norme nationale, selon la jurisprudence de la Cour de justice européenne, mais aussi du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation.
M. Emmanuel Hamel. Hélas ! Trois fois hélas !
M. Félix Leyzour. Hélas ! en effet, monsieur Hamel !
Nous pouvons donc nous interroger sur la portée de votre pouvoir d'appréciation sur la disposition que nous examinons présentement.
Cette mesure, qui régit l'individualisation des situations comptables, impose à l'opérateur historique, en l'occurrence France Télécom, des dispositions de libre concurrence qui avantageront, de manière incontestable, ces grandes multinationales, prêtes à se jeter sur toutes les activités potentiellement génératrices de profit.
Nous vous proposons donc, mes chers collègues, d'adopter notre amendement n° 92, afin d'éviter une dérive anarchique issue d'un libéralisme effréné, dérive dont les usagers et les salariés ne manqueraient pas de faire les frais.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Nous sommes défavorables à cet amendement n° 92. En effet, la disposition retenue favorise les petites et moyennes entreprises par rapport aux grosses entreprises.
Je tiens à rappeler que l'obligation de filialisation que nous proposons concerne les opérateurs qui disposent d'un monopole ou d'une position dominante. Nous n'avons pas les mêmes exigences pour ceux qui émergent dans le marché, c'est-à-dire les petites et moyennes entreprises.
Vous êtes hostile à l'émergence de la concurrence, monsieur Leyzour, vous l'avez rappelé. Je n'oserai pas rapprocher ce fait de la défense du monopole de ATT avant 1984. La disposition que nous prévoyons tend à éviter que seules quelques grosses entreprises ne dominent le marché et à faire émerger réellement la concurrence au travers des petites et moyennes entreprises.
M. Gérard Delfau. Vous aurez les mêmes résultats !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. L'amendement n° 92 revient à imposer une obligation de filialisation à tout intervenant dans le secteur des télécommunications, dès lors qu'il exerce une activité dans un autre secteur, même s'il ne dispose d'aucune position dominante.
Cet amendement vide de son sens la disposition prévue dans le projet de loi. Par ailleurs, la mesure proposée me paraît impossible à mettre en oeuvre dans le cas où les infrastructures ne peuvent être séparées.
J'ajoute que, contrairement à ce qu'a indiquéM. Leyzour, nous n'appliquons pas strictement la réglementation européenne. Nous allons plutôt plus loin pour respecter la jurisprudence du conseil de la concurrence, telle qu'elle s'est appliquée à plusieurs reprises dans notre pays.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 92.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 92, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 5, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, dans le deuxième alinéa du IV du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, de remplacer les mots : « des articles L. 33-1 et L. 34-1 » par les mots : « du présent article et de l'article L. 34-1 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.
M. Félix Leyzour. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 148, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés, proposent de compléter ainsi le premier alinéa du V du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications : « ou s'il est établi que ce nombre risque de porter atteinte au service public des télécommunications. »
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Cet amendement a pour objet d'élargir les cas où le nombre de licences peut être limité, notamment lorsque ce nombre risque de porter atteinte au service public des télécommunications.
En effet, la directive 96/19/CE de la Commission a retenu, contre l'avis du Parlement européen, le principe de non-limitation des licences. Il convient, au contraire, d'encadrer ce droit à partir de l'intérêt du service.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 148. En effet, pour quelle raison l'importance du nombre de concurrents porterait-elle atteinte au service universel, dès lors que celui-ci est strictement défini et financé par les concurrents eux-mêmes ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour les mêmes raisons que celles qui viennent d'être exposées par M. le rapporteur.
J'ajoute - M. Delfau l'a dit lui-même - que l'amendement n° 148 est contraire à l'engagement européen qui a été pris par tous les Etats membres, y compris la France, de ne limiter le nombre de licences que dans les situations de pénurie de fréquences. Les dispositions proposées seraient donc inapplicables en cas de contentieux.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 148.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Je souhaite simplement faire observer que la pénurie de licences peut concerner très directement le service public.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 148, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications.
M. Félix Leyzour. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
M. Gérard Delfau. Le groupe socialiste également.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 33-2 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. le président. Par amendement n° 93, MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer la seconde phrase du troisième alinéa du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-2 du code des postes et télécommunications.
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Avec cet amendement, que nous soumettons à la réflexion de la Haute Assemblée, nous proposons de ne pas retenir la possibilité d'obtenir l'autorisation d'établir des réseaux indépendants sans décision expresse de l'autorité chargée de l'accorder. L'écoulement d'un délai de deux mois à compter de la demande ne doit pas valoir autorisation tacite.
Le premier alinéa de l'article L. 32-2 prévoit que ce n'est plus, comme dans le régime actuel, le ministre chargé des télécommunications qui délivrera l'autorisation, mais l'autorité de régulation des télécommunications.
Je ne reviendrai pas sur notre position concernant l'autorité de régulation. Nous nous sommes, je pense, largement exprimés sur ce point. Je rappelle toutefois que nous condamnons fermement le désengagement de l'Etat dans la décision d'autoriser l'établissement de réseaux indépendants.
En outre, comme l'indique M. Larcher, à la page 109 de son important rapport, « afin de renforcer la libéralisation du marché, le projet de loi prévoit, contrairement au cas de figure habituel où le silence de l'administration vaut décision de rejet, que le silence gardé pendant deux mois suivant une demande vaut autorisation ».
Nous voyons bien là l'intention réelle des auteurs de ce projet de loi, qui est de faciliter l'entrée de multiples opérateurs sur le marché des télécommunications au détriment du maintien d'un service public de qualité.
Nous ne saurions admettre une telle entorse à ce qui prévaut habituellement en droit administratif, d'autant moins qu'elle ne se justifie aucunement.
Le Gouvernement et la majorité tiennent absolument à donner tout pouvoir à une autorité de régulation indépendante dont les membres seront dégagés de toute responsabilité et de tout contrôle, mais subiront indéniablement la pression de certains lobbies comme ceux qui agissent pour les entreprises privées agissant dans ce secteur.
Au regard de la transparence et de la démocratie, un tel dispositif est proprement indéfendable.
Telle est la raison pour laquelle nous sommes certains que le Sénat va émettre un avis favorable sur l'amendement déposé par le groupe communiste républicain et citoyen, car il permettra sans doute d'étudier dans de meilleures conditions le cadre général de l'établissement et de l'exploitation des réseaux indépendants.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je constate que M. Leyzour nous lit avec attention, mais je suis obligé de lui dire que la commission est défavorable à son amendement, parce qu'il alourdit les procédures.
La réflexion devrait sans doute être élargie s'agissant des rapports entre l'administration, les citoyens et les entreprises, afin d'éviter le syndrome huméro-cubital bien connu qui fait que des dossiers restent sous cette importante articulation pendant un délai qui excède, me semble-t-il, ce que l'on peut considérer comme un délai normal de réponse. (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Dans l'optique de la réforme de l'Etat, qui fait l'objet d'un débat depuis quelques semaines, M. le Premier ministre a souhaité que soient systématiquement supprimés les régimes d'autorisation, de manière à défendre le droit des usagers...
M. Gérard Larcher, rapporteur. Très bien !
M. François Fillon, ministre délégué. ... lorsqu'ils présentent telle ou telle demande à l'administration. En effet, il n'y a aucune raison que ceux-ci dépendent du bon vouloir d'un service administratif. (M. le rapporteur opine.)
Je ne vois pas de raison, s'agissant de ce texte, d'agir différemment. Il s'agit là, me semble-t-il, d'une évolution qui va dans le sens de la défense des droits des citoyens : l'administration doit répondre dans les délais et, quand elle ne le fait pas, c'est qu'elle donne son accord tacite à la demande qui lui a été adressée.
Si nous adoptons ce principe dans tous les domaines de notre organisation administrative, celle-ci connaîtra de véritables bouleversements.
M. Gérard Braun. Tout à fait !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 93.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n'avais pas déposé d'amendement sur cet article, son texte me paraissant suffisamment clair, précis et bienvenu, comme viennent de l'indiquer M. le rapporteur et M. le ministre.
Toutefois, l'amendement qui a été défendu à l'instant me donne l'occasion de demander quelques précisions, et vous ne serez pas étonnés, mes chers collègues, que je ne partage pas l'opinion de M. Leyzour. En effet, je crains que cette demande d'autorisation auprès de l'autorité de régulation des télécommunications ne soit trop contraignante pour ces réseaux indépendants et je souhaiterais, monsieur le ministre, obtenir quelques précisions sur l'état d'esprit dans lequel vous entendez traiter ce dossier.
Puisqu'il s'agit de confier à l'ART la responsabilité d'attribuer cette autorisation, je voudrais savoir si cette procédure ressemblera à ce qui se pratique dans des pays comparables à la France comme la Suède, le Royaume-Uni ou les Etats-Unis, où le même système que le nôtre a été adopté depuis déjà plusieurs années et où, pour les réseaux indépendants, l'autorisation était quasiment un acte déclaratif. Il n'y avait pas d'instruction particulière pour de tels dossiers.
Va-t-on, en France, dans cette direction ou, au contraire, va-t-on dans une direction nettement plus administrative et nettement plus contraignante, même si, effectivement, comme vous l'avez bien expliqué, l'absence de réponse au bout de deux mois vaut avis favorable, ce qui va déjà dans le bon sens ?
Serons-nous aussi libéraux et l'autorisation de l'ART se résumera-t-elle à un acte déclaratif pour les réseaux indépendants ?
M. François Fillon, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Le régime d'autorisation des réseaux indépendants prévu dans cet article est bien un régime d'autorisation générale, avec approbation tacite. Il s'agit donc d'un système automatique dès lors que l'on remplit certaines conditions générales définies à l'avance, sauf dans le cas d'allocation de fréquences à l'opérateur.
M. Michel Pelchat. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 93, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 33-2 du code des postes et télécommunications.
M. Félix Leyzour. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 33-3 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. le président. Sur le texte proposé pour l'article L. 33-3 du code des postes et télécommunications, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 33-3 du code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 33-4 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. le président. Par amendement n° 94, MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 33-4 du code des postes et télécommunications, après les mots : « sous réserve », d'insérer les mots : « des conditions et du respect d'un cahier des charges fixés par le ministre chargé des télécommunications et ».
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Le projet de loi achève, avec cet article L. 33-4, le processus de libéralisation en rendant libre la publication de toute liste d'abonnés ou d'utilisateurs de réseaux ou de services de télécommunications.
Cette liberté accrue, précise toutefois le texte, ne doit pas porter atteinte aux droits des personnes concernées.
Nous proposons que, dans le texte présenté pour l'article L. 33-4 du code des postes et télécommunications, soit insérée une disposition permettant au ministre chargé des télécommunications de contrôler que la publication des listes d'abonnés ou d'utilisateurs des réseaux ou services de télécommunications se fasse, dans le respect des libertés individuelles, en fonction d'un cahier des charges fixé par le même ministère.
Refuser cet amendement reviendrait à accepter que n'importe quelle imprimerie, n'importe quelle société puisse, « sous réserve de la protection des personnes concernées », notion bien floue pour un sujet si essentiel que le respect des libertés individuelles, constituer un annuaire.
A l'Assemblée nationale, sur cette question primordiale, les députés, conseillés par le Gouvernement, ont refusé l'adoption d'un amendement tendant à préciser la nature des droits des personnes concernées.
Il semblerait que cette position ne satisfasse pas la commission des lois, puisqu'elle propose, par voie d'amendement, de compléter l'article L. 33-4 du code des postes et télécommunications en définissant certains des droits garantis en ce domaine. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
Cela étant, il conviendrait d'aller beaucoup plus loin.
Vous vous vantez de faire de la satisfaction des besoins du consommateur votre priorité, mais comment pourra-t-il s'y retrouver si le texte est adopté en l'état ?
A l'heure actuelle, les choses sont simples, claires et définies. Demain, c'est sans doute une certaine anarchie qui prévaudra.
Est-ce cela que vous souhaitez en libéralisant complètement la publication des annuaires ? J'ose espérer que non.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous demandons d'adopter notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commision ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cet amendement déposé par le groupe communiste...
M. Paul Loridant. ... républicain et citoyen ! (Sourires.)
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... - groupe qui est, je crois, jacobin et non pas girondin, comme je l'ai entendu tout à l'heure - vise à revenir à un régime beaucoup plus rigide.
Nous y sommes défavorables, mais nous sommes attentifs au respect des droits de l'abonné. C'est la raison pour laquelle nous avons présenté un amendement n° 6 rectifié, que je souhaiterais défendre dès à présent si vous m'y autorisez, monsieur le président.
M. le président. Je suis en effet saisi d'un amendement n° 6 rectifié, présenté par M. Gérard Larcher, au nom de la commission, et tendant à compléter in fine le texte proposé par l'article 5 pour l'article L. 33-4 du code des postes et télécommunications par un alinéa ainsi rédigé :
« Parmi les droits garantis figure celui pour toute personne de ne pas être mentionnée sur les listes d'abonnés ou d'utilisateurs publiées, de s'opposer à l'inscription de l'adresse complète de son domicile dans ces listes, d'interdire que les informations nominatives la concernant soient utilisées dans des opérations commerciales, ainsi que de pouvoir obtenir communication desdites informations nominatives et exiger qu'elles soient rectifiées, complétées, clarifiées, mises à jour ou effacées dans les conditions prévues aux articles 35 et 36 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cet amendement n° 6 rectifié vise à garantir le droit pour l'usager des télécommunications à figurer sur ce que l'on appelle la liste rouge, à s'opposer à l'inscription de son adresse complète à côté de ses nom et numéro de téléphone, à ne pas voir utiliser à des fins commerciales les informations nominatives le concernant et, enfin, à exiger, en tant que de besoin, la correction de ces informations.
Cette protection est au coeur de nos préoccupations.
C'est la raison pour laquelle nous proposons au Sénat d'adopter cet amendement n° 6 rectifié et de repousser l'amendement n° 94.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n° 94 et 6 rectifié ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 94, qui vise à revenir sur une liberté acquise depuis 1990 et qui n'a pas posé de problèmes tels qu'il faille mettre en place un régime moins libéral que celui que nous connaissons aujourd'hui.
Si le Gouvernement a conseillé à l'Assemblée nationale de repousser l'amendement qui lui avait été proposé sur les droits des abonnés, c'est parce que le texte en question énonçait les droits d'une manière exhaustive, et donc limitative - il en manquait, d'ailleurs - alors que la rédaction que propose votre commission n'est pas limitative. Elle me semble beaucoup plus adaptée à la défense des droits des abonnés.
Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 6 rectifié et défavorable à l'amendement n° 94.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 94, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L. 33-4 du code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 34 DU CODE
DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS

M. le président. Sur le texte proposé pour l'article L. 34 du code des postes et télécommunications, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 34 du code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 34-1 DU CODE
DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS

M. le président. Par amendement n° 149, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, après les mots : « ou lorsque le demandeur », de rédiger ainsi la fin du deuxième alinéa du texte proposé par l'article 5 pour l'article L. 34-1 du code des postes et télécommunications : « n'a pas la capacité technique et financière de faire face durablement aux obligations résultant des conditions d'exercice de son activité ou n'a pas satisfait aux prescriptions régissant la mission ou la délégation de service public qui lui a été confiée dans un autre secteur d'activité, ou encore a fait l'objet d'une des sanctions mentionnées aux articles L. 36-11, L. 39, L. 39-1, L. 39-2, L. 39-3 et L. 39-4 ».
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Cet amendement est l'homologue de l'amendement n° 146, la différence étant que ce dernier avait trait aux réseaux tandis l'amendement n° 149 vise les services de télécommunications.
Je ne reprendrai donc pas l'argumentation que j'ai développée tout à l'heure, d'autant qu'elle a donné lieu à un échange de vues fourni qui ne nous a pas permis de nous mettre d'accord. J'imagine d'ailleurs que je ne convaincrai pas plus M. le rapporteur maintenant.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. La commission émet un avis défavorable. Par ailleurs, j'éprouve les mêmes regrets que M. Delfau, puisque je n'ai pas su le convaincre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 149, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 34-1 du code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 34-2 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. le président. Par amendement n° 77, Mme Bardou, MM. Emin, Revol, Rigaudière et Moinard proposent d'insérer, après le premier alinéa du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-2 du code des postes et télécommunications, un alinéa ainsi rédigé :
« Les opérateurs bénéficiaires d'une licence ou autorisation sont tenus de fournir annuellement les informations statistiques concernant les flux, les équipements et leur état, les conditions et zones d'accès selon des modalités qui seront définies par décret. »
La parole est à Mme Bardou.
Mme Janine Bardou. Il s'agit de permettre à l'autorité de régulation des télécommunications de disposer d'un maximum d'éléments chiffrés pour assurer sa mission dans les meilleures conditions, notamment celle qui concerne la prise en compte de l'intérêt des territoires et des utilisateurs.
L'autorité de régulation doit pouvoir observer avec précision l'évolution de l'offre des télécommunications dans les régions et les départements, et veiller à ce qu'une partie de la population - même faible - ne soit pas pénalisée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Mme Bardou ainsi que MM. Emin, Revol, Rigaudière et Moinard sont extrêmement attentifs à tous les problèmes relatifs à l'aménagement du territoire.
Ils ont su apporter leur contribution et la commission a repris un certain nombre de leurs propositions, quant aux équipements des établissements d'enseignement dans les secteurs de revitalisation, tant urbaine que rurale, et quant à l'incitation au développement sur l'ensemble du territoire, quel que soit son niveau de peuplement, notamment en matière de téléphonie mobile.
Leurs apports aux travaux tant de la commission que du Sénat sont extrêmement importants.
L'amendement n° 77 vise à souligner clairement que les préoccupations d'aménagement du territoire et les comptes rendus sur les niveaux d'équipement doivent être annuels. Ce dispositif est assez lourd, nous n'en disconvenons pas.
Toutefois, mon expérience récente en tant que président d'une commission chargée de la préparation du schéma national d'aménagement du territoire me montre que, si l'on veut traduire dans les faits la politique d'aménagement du territoire à laquelle le Sénat a porté une attention particulière et consacré des études approfondies, une vraie volonté est indispensable. Et les rendez-vous fréquents ne sont pas inutiles pour rafraîchir quelques mémoires.
Voilà pourquoi nous sommes favorables à cet amendement.
M. Gérard Delfau. Dites-le bien au Gouvernement !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Madame Bardou, je partage complètement l'objectif que vous cherchez à atteindre. En effet, il est très important que l'autorité de régulation puisse observer l'évolution du secteur des télécommunications, en particulier les offres de services.
Néanmoins, votre amendement ne permet pas de satisfaire cet objectif parce qu'il prévoit des obligations pour des opérateurs autorisés alors que l'article L. 34-2 traite non pas des opérateurs autorisés mais des services offerts librement.
Il me semble d'ailleurs que vos souhaits sont satisfaits par d'autres dispositions du projet de loi. Tout d'abord, le cahier des charges des opérateurs autorisés prévoit des dispositions en la matière, notamment sur les zones de couverture et le déploiement des services. Il prévoit aussi que l'autorité de régulation pourra demander toute information permettant de contrôler le cahier des charges.
Par ailleurs, comme nous en discuterons à l'article L. 36-14 du code des postes et télécommunications, l'autorité de régulation des télécommunications peut mener des études et recueillir des données sur le secteur.
Sous le bénéfice de ces explications, je souhaiterais, madame Bardou, que vous puissiez retirer cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 77.
Mme Janine Bardou. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Bardou.
Mme Janine Bardou. Monsieur le ministre, comme M. le rapporteur, j'estime qu'il faut être extrêmement vigilant en matière d'aménagement du territoire.
Peut-être cet amendement ne figure-t-il pas à la bonne place. Il n'en demeure pas moins que les opérateurs bénéficiaires d'autorisations doivent fournir certaines informations. Je ne pense pas qu'il soit excessif de le leur demander.
Sur cette question importante, je me conformerai à la décision que le Sénat prendra.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. C'est en tant que Languedocien que j'approuve ce texte ; mais mon propos dépasse bien évidemment ce cadre géographique.
L'amendement de Mme Bardou pose une vraie question. En effet, la multiplicité des opérateurs rendra plus illisible la carte de desserte du territoire en matière de télécommunications.
Il est absolument nécessaire, monsieur le ministre, que vous nous indiquiez très précisément où, quand et comment l'autorité de régulation des télécommunications va pouvoir suivre - si elle en a le pouvoir - l'évolution annuelle et non pas quinquénale.
D'ailleurs, la commission supérieure du service public des postes et télécommunications ne serait-elle pas, elle aussi, d'une certaine façon, concernée, pour la partie service public ?
En tout cas, la question se pose et la Haute Assemblée, qui est très attentive au déséquilibre du territoire - je parle ici devant d'éminents collègues - ne peut pas ne pas traiter ce problème, ne pas lui apporter de solution.
M. Félix Leyzour. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Avec cet amendement, c'est tout le problème de l'aménagement du territoire qui est posé.
Je comprends l'inquiétude des auteurs de cet amendement, car le sort des départements ruraux éloignés des grandes métropoles reste en suspens.
Selon moi, la régulation de l'offre devrait être de la responsabilité du Gouvernement. Bien évidemment, pour les départements ruraux, la meilleure garantie, c'est l'obligation de la péréquation sociale et géographique que nous avons prônée en défendant le monopole du service public.
Ne soyons pas dupes, les opérateurs privés qui vont se ruer sur la téléphonie ne se bousculeront pas pour s'implanter dans les départements les plus ruraux ! Nous restons donc persuadés que le maintien du monopole public serait le meilleur garant d'une offre de qualité au moindre coût.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire en commission lorsque Mme Bardou a présenté cet amendement, nous ne sommes pas des partisans du tout ou rien et nous allons voter cet amendement.
Je note d'ailleurs que le fait que le Gouvernement refuse cet amendement est tout à fait significatif de la réalité que recouvre ce projet de loi.
Le Gouvernement accepte certes que l'on parle d'aménagement du territoire - un discours dans lequel on n'emploie pas cette expression n'est vraiment pas au goût du jour ! - mais à la condition qu'on ne fixe pas clairement aux opérateurs de télécommunications l'objectif d'aménager réellement le territoire.
Notre groupe émettra et votera donc pour cet amendement.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande à Mme Bardou de rectifier son amendement. Il nous semble plus judicieux que cet amendement figure après le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 34-2 et non après le premier.
M. le président. Madame Bardou, acceptez-vous de rectifier votre amendement en ce sens ?
Mme Janine Bardou. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 77 rectifié, présenté par Mme Bardou, MM. Emin, Revol, Rigaudière et Moinard, et tendant, après le deuxième alinéa du texte proposé par l'article 5 pour l'article L. 34-2 du code des postes et télécommunications, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les opérateurs bénéficiaires d'une licence ou autorisation sont tenus de fournir annuellement les informations statistiques concernant les flux, les équipements et leur état, les conditions et zones d'accès selon des modalités qui seront définies par décret. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement n° 77 rectifié ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement est très embarrassé. Sur le fond, je l'ai dit, je n'ai aucune objection à formuler sur l'esprit de cet amendement, mais je persiste à dire à Mme Bardou qu'il n'aura pas de sens, et qu'il en aura encore moins, monsieur le rapporteur, après l'alinéa qui concerne TDF.
Ce que vous voulez, c'est que les opérateurs de téléphone soient soumis à un certain nombre d'obligations en matière d'informations concernant les flux, les équipements et leur état, etc. Or, vous déposez un amendement sur un article qui concerne non pas les opérateurs de téléphone, mais les transmissions de données, les services qui sont libres.
Encore une fois, le Gouvernement n'est pas hostile à cet amendement sur le fond ; il considère simplement qu'il n'a rien à voir avec cet article et qu'il n'aura donc, s'il est adopté, aucun des effets que vous recherchez.
Je vous demande donc, madame Bardou, de le retirer.
M. le président. Madame Bardou, l'amendement n° 77 rectifié est-il maintenu ?
Mme Janine Bardou. Monsieur le ministre, si je vous comprends bien, c'est une question de forme et non de fond qui vous amène à vous opposer à mon amendement.
J'estime donc que même s'il n'est pas déposé sur le bon article, ce que je ne conteste pas, les informations que nous demandons pourront être obtenues par le biais de cet amendement.
En tout état de cause, monsieur le président, il revient maintenant à chacun de voter comme il l'entend.
M. François Fillon, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Permettez-moi d'insister sur le fait que le Gouvernement ne peut être favorable à un amendement qui, portant sur cet article, sera dépouvu de sens et qui, malgré tous les regrets que j'exprime à Mme Bardou, n'entraînera aucune obligation pour les services qu'elle vise. Je crois que c'est dommage, mais je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 77 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. Emmanuel Hamel. Vous avez un grand succès, madame !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé par l'article L. 34-2 du code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 34-3 DU CODE
DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. le président. Par amendement n° 167, M. Trégouët propose de compléter le dernier alinéa du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-3 du code des postes et télécommunications par une phrase ainsi rédigé : « Elle doit notamment établir les conditions d'une concurrence loyale entre les fournisseurs de services, quelle que soit l'autorité assignant les fréquences. »
La parole est à M. Trégouët.
M. René Trégouët. La mise en oeuvre de réseaux radioélectriques utilisant des fréquences assignées par des autorités différentes pour la fourniture au public de services de télécommunications de même nature est susceptible de générer des conditions de concurrence inégales entre fournisseurs.
En effet, les règles appliquées pour autoriser l'établissement de réseaux radioélectriques peuvent varier selon les autorités qui assignent les fréquences. Ces différences peuvent notamment porter sur les conditions techniques et financières d'utilisation des fréquences et d'installation des réseaux. Il convient donc d'éviter que des distorsions de concurrence ne résultent de ces différences.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cet amendement précise que les autorisations accordées doivent permettre une concurrence loyale quelle que soit l'autorité qui attribue ces fréquences ; ce peut-être par exemple le CSA.
Bien que la nécessité d'une concurrence loyale figure déjà à l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications, tout particulièrement dans sa deuxième partie, et soit valable pour l'ensemble des dispositions du texte, notre commission a été favorable à cet amendement, qui rappelle utilement les conditions nécessaires à une concurrence loyale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre délégué. Favorable.
M. Emmanuel Hamel. Parfait !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 167, accepté par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L. 34-3 du code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 34-4 DU CODE
DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS

M. le président. Sur cet article, je suis saisi de huit amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 95, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer le texte présenté par cet article 5 pour l'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 96 est présenté par MM. Loridant, Ralite, Billard, Leyzour et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 150 est présenté par Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent, au premier alinéa du texte proposé par cet article 5 pour l'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications, à remplacer le mot : « information » par les mots : « avis conforme ».
Par amendement n° 151, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, dans la seconde phrase du troisième alinéa du texte présenté par cet article 5 pour l'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications, après le mot : « consultation » les mots : « et avis conforme ».
Par amendement n° 97, MM. Loridant, Ralite, Billard et Leyzour et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent d'ajouter dans le troisième alinéa du texte présenté par cet article 5 pour l'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications, après le mot : « consultation », les mots : « et avis ».
L'amendement n° 7, présenté par M. Gérard Larcher, au nom de la commission, tend à rédiger comme suit la deuxième phrase du dernier alinéa du texte proposé par cet article 5 pour l'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications :
« Ces mêmes conventions garantissent, au titre de ces services, une juste rémunération du propriétaire de ces réseaux, assurant la couverture par le fournisseur de services du coût des investissements utilisés à cet effet et des prestations fournies. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 153, déposé par Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés et tendant, dans le texte proposé par l'amendement n° 7 pour la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications, à remplacer le mot : « utilisés » par le mot : « réalisés ».
L'amendement n° 168, présenté par M. Trégouët, est identique à l'amendement n° 7.
Par amendement n° 152, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de supprimer l'avant-dernière phrase du dernier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications.
La parole est à M. Leyzour pour défendre l'amendement n° 95.
M. Félix Leyzour. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre amendement n° 95 tend à maintenir la situation juridique actuelle qui soumet la fourniture des services de télécommunications au public à l'autorité ministérielle chargée des télécommunications.
Le projet d'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications confie cette compétence à la future autorité de régulation des télécommunications, l'ART, instance dépourvue, nous l'avons déjà souligné, de toute légitimité démocratique.
La compétence de l'ART sera décidément extrêmement vaste. Cette autorité sera associée à l'élaboration des lois et elle veillera à leur application. Elle sera associée au décret, et même - au nom de quelle légitimité ? -, aux négociations internationales.
Si nous avons bien compris le texte dont nous discutons, elle prendra l'initiative des arrêtés d'application de la présente loi à la place du ministre, qui se contentera de les valider avant leur publication au Journal officiel .
Elle instruira les autorisations délivrées par le ministre. C'est également elle qui délivrera les certificats de conformité des équipements terminaux. Nous le verrons plus tard dans le débat, c'est l'ART qui sera chargée de régler un certain nombre de litiges à la place de la justice, dessaisie.
Enfin, et je ne suis pas exhaustif, l'ART contrôlera les obligations des opérateurs résultant de la loi et des cahiers des charges. Cette dernière compétence sera valable, y compris en matière de financement.
Trop c'est trop. Nous estimons qu'avec cette marche forcée vers une pseudo-indépendance, vers un libéralisme qui masque mal la voie ouverte au capitalisme le plus sauvage, c'est la démocratie même qui se trouve ainsi bafouée. C'est pourquoi nous vous proposons d'adopter notre amendement n° 95, qui remet en cause l'une des compétences de la future autorité de régulation des télécommunications.
M. le président. La parole est à M. Loridant, pour présenter l'amendement n° 96.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement vise à permettre aux collectivités territoriales d'intervenir dans la décision d'utilisation des réseaux câblés à des fins de services de télécommunications et de téléphonie.
En soi, mon argumentaire ne variera pas vraiment de l'amendement que j'ai défendu précédemment puisque, là encore, il me semble que les communes concernées doivent pouvoir faire entendre leur voix, à la différence près que, là, on fait état de réseaux câblés qui existent déjà.
Tel qu'il est rédigé, l'article L. 34-4 laisse entendre que la fourniture au public des services de télécommunications autres que le service téléphonique sur les réseaux établis dans le contexte de lois précédemment votées permettra d'outrepasser la volonté des communes.
En effet, comment interpréter autrement la rédaction de cet article, qui ne prévoit comme mode de relations avec les collectivités locales qu'une simple information avant autorisation d'une nouvelle source de services de télécommunications susceptibles d'emprunter les réseaux locaux établis avec la participation financière de celles-ci ? Je me dois de vous rappeler, mes chers collègues, qu'un certain nombre de collectivités territoriales ont participé financièrement à l'établissement de ces réseaux locaux câblés.
Le risque encouru à la suite de cette rédaction initiale, c'est que les communes concernées soient le plus souvent mises devant le fait accompli sans qu'elles n'aient en rien été associées au processus de décision.
« Après information de la commune... » est une rédaction passive qui ne permet pas à la commune ou au groupement de communes ayant établi des réseaux ou autorisé leur établissement de faire valoir un point de vue.
C'est pourquoi nous préférerions une autre rédaction plus active ou les mots « avis conforme » remplaceraient le mot « information ».
Encore une fois, la représentation parlementaire ne peut pas faire comme si rien ne s'était produit depuis les lois de décentralisation et celles qui portent sur l'établissement des réseaux câblés sur leur territoire.
De fait, des communes et des groupements de communes ont énormément investi dans ces réseaux câblés qui sont aujourd'hui largement déployés à travers tout le territoire. Ils ne sont encore à ce jour ni rentables ni amortis. Ils ont été établis avec des participations financières des villes dans le cadre du plan câble ou sous le régime de la concession - majorité des sites « nouvelle donne » - et appartiennent donc, de ce fait, aux communes.
Dès lors, il ne serait pas légitime que de nouvelles infrastructures puissent être établies sur le territoire des communes sans que celles-ci soient consultées et qu'elles aient pu émettre un avis. Cela paraît relever du simple bon sens, au-delà de tout esprit partisan puisque les communes concernées appartiennent à l'ensemble de l'échiquier politique.
On voudrait nous faire croire que la volonté des communes pourrait aller à l'encontre de l'intérêt général. Voilà bien une réflexion de technocrates qui n'ont que peu le sens des réalités locales. Sommes-nous, mes chers collègues, vous qui souvent, comme moi, partagez des responsabilités locales, des contrevenants à l'intérêt général lorsque nous veillons, dans nos communes, au respect de la loi républicaine, à la cohérence des infrastructures, à l'aménagement du territoire, au développement économique et à celui de la démocratie ?
Pourquoi diable se méfier à ce point des décideurs locaux ?
Comprenez bien que notre amendement n'a pas pour objet de transformer les 36 000 communes de France en autant de régulateurs des télécommunications ; il s'agit non pas de leur confier un rôle d'autorisation, mais de les consulter pour avis avant que le ministre ne délivre les autorisations qui concernent l'aménagement de leur territoire et déterminent leur économie.
Une telle revendication ne nous paraît pas infondée ni contraire à l'esprit du temps et aux discours tenus par les plus hautes instances de ce pays.
N'est-ce pas se mettre en conformité tout simplement avec les souhaits qu'exprime le Président de la République, notamment aujourd'hui, lorsqu'il se rend dans les régions de France ?
Mes chers collègues, je m'en remets à votre sagesse et je vous demande d'adopter cet amendement par simple bon sens.
M. le président. La parole est à M. Delfau, pour défendre l'amendement n° 150.
M. Gérard Delfau. La législation actuelle dispose, s'agissant des réseaux câblés existants, d'une part, que les communes ont compétence pour établir ou autoriser l'établissement des réseaux câblés sur leur territoire et, d'autre part, que c'est sur leur proposition que l'exploitation des services est autorisée par le CSA pour les services audiovisuels et par le ministre chargé des télécommunications pour les services de télécommunications.
Il n'apparaît donc pas légitime que les communes qui ont participé financièrement à l'établissement des réseaux câblés et qui sont impliquées dans l'exploitation de ces réseaux n'aient pas leur mot à dire sur la fourniture des services, hors téléphonie vocale, sur leur réseau. L'objet de cet amendement consiste donc à rétablir les droits et prérogatives des communes.
En effet, si la lecture à l'Assemblée nationale a permis d'améliorer ce projet de loi, elle n'en demeure pas moins insuffisante. La procédure de l'information ne permet pas aux communes de faire jouer pleinement leurs compétences. C'est la raison pour laquelle nous proposons qu'elle soit utilement précisée par les termes : « avis conforme », faute de quoi il y aurait objet de litige, et sur l'ensemble du territoire. Le Sénat, qui se doit de veiller, comme d'ordinaire, à l'intérêt des collectivités locales, c'est sa mission, ne peut qu'approuver cet amendement.
Quant à l'amendement n° 151, il est analogue au précédent ; mais il s'agit cette fois de la fourniture des réseaux téléphoniques sur le réseau câblé d'une commune ou d'un groupement de communes.
M. le président. La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° 970.
M. Paul Loridant. Cet amendement est de pure coordination rédactionnelle puisqu'il ne fait qu'ajouter le mot « avis » au troisième alinéa de l'article L. 34-4.
Il tend à ce que les communes ou groupements de communes ayant établi un réseau ou autorisé sa construction puissent non seulement être consultés, mais également donner leur avis lorsque la fourniture d'un nouveau service proposé, soumis aux dispositions de l'article L. 34-1 du code des postes et télécommunications, est le service téléphonique au public.
Permettez-moi cependant d'ajouter quelques propos à ceux que j'ai déjà tenus préalablement.
Certes, l'Assemblée nationale a formalisé une avancée par rapport au texte initialement proposé par le Gouvernement, qui ne prévoyait en aucune manière la consultation des communes câblées. Cependant, cette nouvelle rédaction demeure insuffisante pour permettre aux communes de s'impliquer réellement dans le développement des services locaux, qui constituent pourtant les motivations initiales d'établissement de ces réseaux.
Dans un document émanant de la direction des relations extérieures de France Télécom, j'ai pu lire le propos suivant : « France Télécom entend être un acteur dynamique et performant du nouveau cadre. De par son histoire, sa culture de service, de par les missions de service public que la loi lui confiera, sa relation avec les collectivités locales ne sera pas une simple relation client-fournisseur. France Télécom entend rester un acteur engagé du développement local au côté des responsables locaux ».
Voilà un état d'esprit qui pourrait me convenir, mais force est de constater que la lettre du projet de loi, tel qu'il nous est soumis après lecture à l'Assemblée nationale, ne correspond pas tout à fait aux propos officiels tenus par la direction de l'établissement public.
Le flou existant autour de la terminologie employée à propos des rapports entre France Télécom et les collectivités locales, ajouté aux très nombreux renvois à des décrets d'application, est loin de me rassurer.
Monsieur le ministre, je souhaiterais fermement que vous vous engagiez, devant la représentation nationale, à ce que France Télécom veille systématiquement à prendre le pouls des collectivités locales, singulièrement de celles qui sont engagées dans le développement de réseaux locaux, dès lors que l'entreprise publique cherchera à développer de nouveaux produits ou des services pouvant avoir une incidence sur la gestion des réseaux câblés ou, plus généralement, sur l'organisation de l'économie locale.
Ce n'est pas jouer les empêcheurs de tourner en rond que de revendiquer une certaine considération des collectivités locales dans le processus décisionnel. Il n'y a pas d'incompatibilité entre l'intérêt général, qui serait défendu par France Télécom, dont chacun comprend bien qu'elle cherche à défendre sa place prééminente, et l'intérêt des collectivités locales en termes de développement économique et d'aménagement du territoire.
Ces deux intérêts ne s'opposent pas, ils se complètent.
Le projet de loi, tel qu'il se présente, laisse pourtant planer un doute sur la confiance de France Télécom à l'égard de ses partenaires locaux.
Aussi est-ce pour lever ce doute que je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir voter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 7.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cet amendement tend à préciser que la rémunération prévue au présent article pour la fourniture au public de services de télécommunications sur le réseau câblé est bien une rémunération additionnelle spécifiquement liée aux dits services et qu'elle portera sur les investissements réalisés, c'est-à-dire sur les investissements utilisés à cet effet. En effet, il ne s'agirait pas de prendre en compte l'ensemble des investissements qui ne seraient point utilisés pour ces services particuliers du téléphone sur le réseau câblé.
Nous aboutirions à des coûts prohibitifs et à la multiplication des investissements, ce qui serait un gaspillage ! L'objectif ne serait pas atteint pour l'opérateur historique qui, ayant beaucoup investi dans un réseau, en attend un retour sur investissements et non pas un accroissement des infrastructures.
M. le président. La parole est à M. Trégouët, pour défendre l'amendement n° 168.
M. René Trégouët. Mon amendement reprenant exactement les termes de l'amendement de la commission, je le retire.
Il ne faut pas voir dans le dépôt de cet amendement un « effet de pompage », mais, comme on le dit sur le réseau, un « effet de miroir », et je vois que la commission avait envoyé un bon signal ! (Sourires.)
M. Gérard Larcher, rapporteur. Un miroir est toujours agréable quand il renvoie une bonne image !
M. le président. L'amendement n° 168 est retiré.
La parole est à M. Delfau, pour défendre le sous-amendement n° 153 et l'amendement n° 152.
M. Gérard Delfau. Avec ce sous-amendement, nous sommes au coeur d'une des questions les plus difficiles soulevée par ce projet de loi.
Il s'agit de savoir dans quelle mesure les nouveaux opérateurs pourront utiliser des réseaux existants et quel dédommagement il y aura dans ce cas.
Dans le texte qui nous est proposé, il est question d'une rémunération pour les investissements utilisés. Nous souhaitons qu'il soit bien précisé - c'est l'objet de notre sous-amendement - que l'investissement réalisé doit être indemnisé. Nous craignons en effet qu'il n'y ait sous-estimation du coût réel, et que la rémunération, qui doit être juste puisque la loi elle-même la prévoit, n'aboutisse finalement qu'à sous-estimer l'engagement financier de l'opérateur public France Télécom et, par-delà France Télécom, ce qu'ont payé les contribuables et les usagers.
J'en viens à l'amendement n° 152.
S'agissant des réseaux câblés, l'Assemblée nationale a introduit une disposition prévoyant que les conventions entre le propriétaire, par exemple l'opérateur public, et l'exploitant desdits réseaux « précisent les modalités de mise à disposition des capacités supplémentaires nécessaires pour la fourniture de services sur ces réseaux ».
Cet ajout nous paraît source de difficultés. La notion de capacité supplémentaire est une notion évolutive, donc difficile à définir de manière immuable et à l'avance, du fait notamment des progrès techniques. C'est pourquoi nous proposons de supprimer cette mention pour revenir au texte initial.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 95, 96, 150, 151, 97, 7 et 152, ainsi que sur le sous-amendement n° 153 ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 95, qui, en fait, vise à revenir à la rédaction antérieure, c'est-à-dire à une autorisation du ministre alors que le projet de loi soumet la fourniture des services à une déclaration auprès de l'autorité de régulation. Les amendements n°s 96, 150, 151 et 97 visent, en quelque sorte, à substituer à la déclaration l'autorisation du maire.
Mais nous ne sommes pas en présence d'une loi de municipalisation des réseaux !
Je crois que l'information des collectivités locales est un élément suffisant. Voilà pourquoi la commission est défavorable à l'ensemble de ces amendements.
J'en viens au sous-amendement n° 153 et à l'amendement n° 152.
Il ne faudrait pas faire payer un certain nombre de choix qui ne se sont pas révélés fructueux et qui correspondent à plus de 25 milliards de francs par la concurrence ou par l'utilisateur.
Voilà pourquoi nous avons préféré mentionner les « investissements utilisés à cet effet ». Notre position sur ce sujet est claire : elle est traduite par l'amendement n° 7. La commission est donc défavorable au sous-amendement n° 153.
En ce qui concerne l'amendement n° 152, l'expression « capacités supplémentaires » ne vise en aucun cas, à nos yeux, à obliger le propriétaire à réaliser de nouveaux investissements. Je rappelle d'ailleurs que l'autorité de régulation des télécommunications doit veiller à ce que les conventions respectent l'équilibre des relations entre le propriétaire et l'exploitant, afin d'écarter le risque que soulignait M. Delfau. Voilà pourquoi nous sommes défavorables à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements, ainsi que sur le sous-amendement n° 153 ?
M. François Fillon, ministre délégué. L'amendement n° 95 vise à interdire la libéralisation de la téléphonie sur les réseaux câblés. Le Gouvernement y est donc totalement défavorable, car l'introduction du téléphone sur le câble favorisera un meilleur équilibre de l'exploitation des réseaux câblés et aidera à la poursuite du câblage dans nos communes.
La téléphonie sur le câble fournira aussi l'occasion d'introduire une concurrence innovante, source de nouveaux services pour les usagers. Les expériences en cours dans ce domaine sont extrêmement prometteuses.
Le Gouvernement est également défavorable aux amendements n°s 96, 150, 151 et 97 pour des raisons que j'ai déjà indiquées tout à l'heure et que M. le rapporteur vient de rappeler.
Nous souhaitons, là encore, que la concurrence s'exerce partout et que tous les usagers puissent en bénéficier, quel que soit l'avis sur ce sujet de telle ou telle collectivité engagée dans telle ou telle négociation avec tel ou tel opérateur.
Là où nous introduisons un régime de simple déclaration, vouloir introduire une autorisation de la collectivité locale - car l'avis conforme revient à une autorisation - c'est déplacer le pouvoir en matière d'autorisation de réseaux vers les collectivités locales, ce qui ne me semble pas aller dans le sens de l'intérêt national.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 7, qui clarifie l'intention du Gouvernement en distinguant bien les rémunérations du propriétaire pour l'usage lié au service des télécommunications dont il est question dans ce texte des rémunérations pour l'usage audiovisuel.
En revanche, le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 153, ainsi qu'à l'amendement n° 152.
Il est vrai, monsieur Delfau, que la notion de capacité supplémentaire est évolutive, donc difficile à définir de manière immuable à l'avance, comme l'indique l'exposé des motifs de votre amendement.
C'est la raison pour laquelle le projet de loi ne définit pas cette notion et renvoie aux conventions le soin d'en traiter. J'ignore quel est votre objectif, monsieur Delfau, mais s'il consiste à s'opposer au développement de telle capacité supplémentaire, le Gouvernement ne peut bien évidemment pas être favorable à l'amendement n° 152, puisqu'il souhaite l'émergence de nouveaux services sur le câble.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 95, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 96 et 150, repoussés par la commission et par le Gouvernement.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 151, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 97, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 153.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Je tiens à redire que nous craignons beaucoup que ce texte ne soit déséquilibré au détriment de France Télécom et au profit d'opérateurs privés.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 153, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 152, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 34-4 du code des postes et télécommunications.
M. Gérard Delfau. Le groupe socialiste vote contre.
M. Félix Leyzour. Le groupe communiste républicain et citoyen également.
(Ce texte est adopté.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

17

TRANSMISSION DE PROJETS DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement définitif du budget de 1994.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 404, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'information et à la consultation des salariés dans les entreprises et les groupes d'entreprises de dimension communautaire, ainsi qu'au développement de la négociation collective.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 411, distribué et renvoyé à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

18

DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTE COMMUNAUTAIRE

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil portant modification de l'article 12 de la directive 77/780/CEE visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, des articles 2, 6, 7 et 8 et des annexes II et III de la directive 89/647/CEE relative à un ratio de solvabilité des établissements de crédit, ainsi que de l'article 2 et de l'annexe II de la directive 93/6/CEE sur l'adéquation des fonds propres des entreprises d'investissement et des établissements de crédit.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-638 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 76/207/CEE relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation professionnelle et les conditions de travail.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-639 et distribuée.

19

DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Paul Masson un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de résolution (n° 274, 1995-1996) présentée en application de l'article 73 bis du règlement par M. Daniel Millaud sur la proposition de décision du Conseil portant révision à mi-parcours de la décision 91/482/CEE du Conseil, du 25 juillet 1991, relative à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté européenne (n° E-594).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 405 et distribué.
J'ai reçu de M. Gérard Larcher un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur le projet de loi relatif à l'entreprise nationale France Télécom (urgence déclarée) (n° 391, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 406 et distribué.
J'ai reçu de M. Lucien Lanier un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi organique, adoptée par l'Assemblée nationale complétant la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française (n° 376, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 407 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Jacques Robert un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur le projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, sur la loyauté et l'équilibre des relations commerciales (n° 392, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 408 et distribué.
J'ai reçu de M. Jacques Oudin un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le projet de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, portant diverses mesures en faveur des associations (n° 340, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 409 et distribué.
J'ai reçu de M. Jacques Oudin un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur la proposition de loi relatif à l'encouragement fiscal en faveur de la souscription de parts de copropriété de navires de commerce (n° 348, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 410 et distribué.
J'ai reçu de M. Charles de Cuttoli un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur :
- la proposition de loi organique de MM. Charles de Cuttoli, Jacques Habert, Pierre Croze, Paul d'Ornano, Jean-Pierre Cantegrit, Xavier de Villepin, Mme Paulette Brisepierre, MM. Hubert Durand-Chastel et André Maman, tendant à compléter la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République (n° 270, 1995-1996) ;
- la proposition de loi organique de MM. Charles de Cuttoli, Jacques Habert, Pierre Croze, Paul d'Ornano, Jean-Pierre Cantegrit, Xavier de Villepin, Mme Paulette Brisepierre, MM. Hubert Durand-Chastel et André Maman tendant à modifier et à compléter la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République (n° 271, 1995-1996) ;
- la proposition de loi organique de Mme Monique ben Guiga, MM. Guy Penne et Pierre Biarnès tendant à modifier la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République (n° 397, 1995-1996) ;
- la proposition de loi organique de Mme Monique ben Guiga, MM. Guy Penne et Pierre Biarnès tendant à compléter la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République (n° 398, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 412 et distribué.

20

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, jeudi 6 juin 1996 :
A dix heures quinze :
1. Suite de la discussion du projet de loi (n° 357, 1995-1996), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications.
Rapport (n° 389, 1995-1996) de M. Gérard Larcher, fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan.
A quinze heures et le soir :
2. Questions d'actualité au Gouvernement.
3. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur la situation en Corse.
Aucune inscription de parole dans ce débat n'est plus recevable.
4. Suite de l'ordre du jour du matin.

Délai limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

1° Projet de loi déclaré d'urgence relatif à l'entreprise nationale France Télécom (n° 391, 1995-1996).
Le délai limite pour les inscription de parole dans la discussion générale est fixé au lundi 10 juin 1996, à douze heures.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé au lundi 10 juin 1996, à douze heures.
2° Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, portant dispositions diverses relatives à l'outre-mer (n° 333, 1995-1996).
Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé au mercredi 12 juin 1996, à dix-sept heures.
3° Proposition de loi organique, adoptée par l'Assemblée nationale, complétant la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française (n° 376, 1995-1996).
Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé au mercredi 12 juin 1996, à dix-sept heures.

Délai limite général pour le dépôt des amendements

Le délai limite pour le dépôt des amendements à tous les projets de loi et propositions de loi ou de résolution prévus jusqu'à la fin de la session ordinaire, à l'exception des textes de commissions mixtes paritaires et de ceux pour lesquels est déterminé un délai limite spécifique, est fixé, dans chaque cas, à dix-sept heures, la veille du jour où commence la discussion.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 6 juin 1996, à une heure cinq.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ERRATA
Au compte rendu intégral de la séance du 23 mai 1996
AIR ET UTILISATION RATIONNELLE DE L'ÉNERGIE

Page 2852, 1re colonne, dans le texte proposé par l'amendement n° 172 pour le second alinéa de l'article 4, dixième ligne :
Au lieu de : « périodique, qui est confiée, pour »,
Lire : « périodique, qui peut être confiée, pour ».

Au compte rendu intégral de la séance du 28 mai 1996
LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Page 3008, 1re colonne, dans l'intitulé du sous-amendement n° 62 rectifié, troisième ligne :
Au lieu de : « le dernier alinéa »,
Lire : « l'avant-dernier alinéa ».

Délai limite pour le dépôt des amendements
à une proposition de résolution

En application de l'article 73 bis, alinéa 7, du règlement, la commission des lois a fixé au mardi 11 juin 1996, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à la proposition de résolution qu'elle a adoptée sur la proposition de décision du Conseil portant révision à mi-parcours de la décision 91/482/CEE du Conseil du 25 juillet 1991, relative à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté européenne (n° E 594).
Le rapport n° 405 (1995-1996) de M. Paul Masson sera mis en distribution aujourd'hui, jeudi 6 juin 1996.
Les amendements devront être déposés directement au secrétariat de la commission des lois et seront examinés par la commission lors de sa réunion du mercredi 12 juin 1996, à neuf heures.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Statut des infirmiers du secteur psychiatrique

421. - 5 juin 1996. - M. Jean-Marc Pastor attire l'attention de M. le ministre du travail et des affaires sociales sur la situation pour le moins paradoxale et problématique dans laquelle se trouvent les infirmiers du secteur psychiatrique et en particulier sur les difficultés rencontrées quant à la régularisation et l'obtention, pour certains d'entre eux, de leur diplôme d'Etat d'infirmier. Il lui rappelle qu'en 1994 le ministre des affaires sociales et de la santé de l'époque avait jugé que la délivrance de droit de diplômes d'Etat aux infirmiers du secteur psychiatrique était tout à fait justifiée et avait donc pris un arrêté dans ce sens le 26 octobre 1994. Or, le 20 novembre 1995, la direction générale de la santé a informé le Conseil supérieur des professions médicales de la décision de suspendre la délivrance des diplômes d'Etat d'infirmiers, sur consigne de la Commission européenne. De ce fait, on peut aisément comprendre la situation à la fois délicate et injuste dans laquelle se trouve la profession concernée, certains infirmiers ayant pu valider leur diplôme d'infirmier psychiatrique et d'autres pas, mais situation aussi scandaleuse car ce sont leurs compétences professionnelles et médicales qui sont purement et simplement remises en cause. Il souhaite que soit mis un terme à cette situation ambiguë engendrée par une mesure discriminatoire et injuste. Il lui demande de bien vouloir lui donner une réponse.

Politique du logement dans le département du Pas-de-Calais

422. - 5 juin 1996. - M. Léon Fatous attire l'attention de M. le ministre délégué au logement sur la politique du logement dans le département du Pas-de-Calais et en particulier dans le district urbain d'Arras. Il lui demande de lui préciser le montant des crédits PLA (prêt locatif aidé) et Palulos (prime à l'amélioration des logements à usage locatif et d'occupation sociale).

Apprentissage et formation

423. - 5 juin 1996. - M. René-Pierre Signé indique à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche que le désir d'adapter notre système à la crise économique pose le problème de l'apprentissage et de la formation ; on a retrouvé, par le biais des centres de formation d'apprentis (CFA), la vieille notion d'école du patronat et mis, qu'on le veuille ou non, dans les régions à faible démographie scolaire, en concurrence CFA et lycées professionnels. Les CFA sont des établissements privés qui reçoivent des fonds publics, y compris des taxes d'apprentissage importantes de services de l'Etat, ce qui pose tout de même interrogation et entraîne une concurrence malsaine. Le secteur public est ainsi menacé par la priorité que l'on donne à l'apprentissage et l'alternance. On peut s'inquiéter, dans une société où l'emploi précaire est de règle, ou seuls des emplois éphémères sont créés, de cette formation étroite et spécifique pour un métier bien déterminé, que dispense les CFA. On peut s'interroger sur cet enseignement très orienté, assez éloigné du socle technique et polyvalent, nécessaire pour demain quand l'apprenti devenu ouvrier sera peut-être confronté à une nouvelle formation pour exercer un autre métier. Outre la concurrence exercée, il y a aussi formation tronquée qui risque de freiner les chances de reconversion. Le lycée offre d'autres possibilités. Il lui demande quelles sont les perspectives de son action dans ce domaine.

Régime social des travailleurs transfrontaliers

N° 424. - 5 juin 1996. - M. Philippe Richert constate que l'Alsace, tout comme l'ensemble des régions transfrontalières, se distingue par les importants flux de personnes résidant dans un pays et venant travailler de l'autre côté du Rhin. Cette situation, qui favorise les échanges, se justifie généralement par des raisons d'ordre économique. Toutefois, certains problèmes subsistent dans la vie quotidienne de ces ressortissants qui restent confrontés à bon nombre de difficultés. Cela est notamment le cas dans le domaine social, qu'il s'agisse par exemple des problèmes liés à l'attribution des allocations familiales ou aux questions d'invalidité. En effet, il arrive bien souvent que la législation des deux pays concernés ne soient pas en totale juxtaposition, ce qui peut créer certaines interférences et avoir des conséquences particulièrement fâcheuses pour les transfrontaliers. Ne serait-il dans ces conditions pas souhaitable d'envisager la création d'une commission « sociale », qui statuerait sur tous les problèmes liés à ces personnes ? Il pourrait en l'occurrence s'agir d'une commission paritaire franco-allemande, qui aurait un pouvoir décisionnel et qui serait à même de régler la plupart des litiges résultant des situations évoquées précédemment. Cette proposition avait d'ailleurs déjà été évoquée dès 1993 par l'actuel Président de la République et elle mériterait d'être examinée avec attention. Il souhaiterait en conséquence connaître la position de M. le ministre du travail et des affaires sociales sur la question et les suites qu'il entend y réserver.



ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance du mercredi 5 juin 1996


SCRUTIN (n° 88)



sur la motion n° 1, présentée par Mme Hélène Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tendant à opposer la question préalable au projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la Convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République islamique du Pakistan en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu (ensemble un protocole).

Nombre de votants : 218
Nombre de suffrages exprimés : 218
Pour : 15
Contre : 203

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

N'ont pas pris part au vote : 24.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :
Contre : 92.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Jacques Valade, qui présidait la séance.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

N'ont pas pris part au vote : 74.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :
Contre : 58.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Contre : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Contre : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour




Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Nicole Borvo



Michelle Demessine
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Félix Leyzour
Paul Loridant



Hélène Luc
Louis Minetti
Robert Pagès
Jack Ralite
Ivan Renar

Ont voté contre


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Charles Jolibois
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

N'ont pas pris part au vote


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Monique ben Guiga
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Jacques Bimbenet
Marcel Bony
André Boyer
Guy Cabanel
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Henri Collard
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Jean François-Poncet
Aubert Garcia
Gérard Gaud
François Giacobbi
Paul Girod
Roland Huguet
Pierre Jeambrun
Bernard Joly
Philippe Labeyrie
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
François Lesein
Claude Lise
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Georges Mouly
Georges Othily
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Claude Pradille
Roger Quilliot
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
René Regnault
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Fernand Tardy
André Vallet
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Henri Weber

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Jacques Valade, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification et conformes à la liste de scrutin ci-dessus.

SCRUTIN (n° 89)



sur la motion n° 138, présentée par M. Gérard Delfau et les membres du groupe socialiste et apparentés, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité au projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications.


Nombre de votants : 315
Nombre de suffrages exprimés : 315
Pour : 94
Contre : 221

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 6. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. François Giacobbi.
Contre : 18.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Contre : 93.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Pour : 73.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Claude Pradille.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Contre : 57.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Contre : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Contre : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
François Giacobbi
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet



Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière



Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé



Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber


Ont voté contre


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

N'ont pas pris part au vote


MM. Claude Pradille et Paul Vergès.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification et conformes à la liste de scrutin ci-dessus.

SCRUTIN (n° 90)



sur la motion n° 57, présentée par Mme Hélène Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen tendant à opposer la question préalable au projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications.


Nombre de votants : 315
Nombre de suffrages exprimés : 315
Pour : 93
Contre : 222

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre : 19.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Contre : 93.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Pour : 73.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Claude Pradille.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Contre : 57.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Contre : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Contre : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet


André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber


Ont voté contre


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

N'ont pas pris part au vote


MM. Claude Pradille et Paul Vergès.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 316
Nombre de suffrages exprimés : 316
Majorité absolue des suffrages exprimés : 159
Pour l'adoption : 93
Contre : 223

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 91)



sur la motion n° 67, présentée par M. Paul Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tendant au renvoi à la Commission du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications.


Nombre de votants : 315
Nombre de suffrages exprimés : 315
Pour : 93
Contre : 222

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre : 19.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Contre : 93.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Pour : 73.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Claude Pradille.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Contre : 57.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Contre : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Contre : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet


André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber


Ont voté contre


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

N'ont pas pris part au vote


MM. Claude Pradille et Paul Vergès.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 316
Nombre de suffrages exprimés : 316
Majorité absolue des suffrages exprimés : 159
Pour l'adoption : 93
Contre : 223

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 92)



sur l'amendement n° 79, présenté par M. Claude Billard et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tendant à supprimer l'article premier du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications (mission de service public de France Télécom).


Nombre de votants : 306
Nombre de suffrages exprimés : 306
Pour : 93
Contre : 213

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre : 19.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Contre : 93.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Pour : 73.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Claude Pradille.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Contre : 57.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Contre : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

N'ont pas pris part au vote : 10.

Ont voté pour


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet


André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber


Ont voté contre


Nicolas About
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean-Pierre Fourcade
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

N'ont pas pris part au vote


MM. Philippe Adnot, Philippe Darniche, Hubert Durand-Chastel, Alfred Foy, Jean Grandon, Jacques Habert, Jean-Pierre Lafond, André Maman, Claude Pradille, Alex Türk et Paul Vergès.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 307
Nombre de suffrages exprimés : 307
Majorité absolue des suffrages exprimés : 154
Pour l'adoption : 93
Contre : 214

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 93)



sur l'amendement n° 87, présenté par M. Claude Billard et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, à l'article 2 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications (opposition à la création d'une autorité de régulation des télécommunications).


Nombre de votants : 315
Nombre de suffrages exprimés : 315
Pour : 88
Contre : 227

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 1. _ M. François Abadie.
Contre : 23.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Contre : 93.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Pour : 72.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance, et Claude Pradille.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :
Contre : 58.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Contre : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Contre : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet


André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber


Ont voté contre


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
André Boyer
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Yvon Collin
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Joëlle Dusseau
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

N'ont pas pris part au vote


MM. Claude Pradille et Paul Vergès.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 314
Nombre de suffrages exprimés : 314
Majorité absolue des suffrages exprimés : 158
Pour l'adoption : 89
Contre : 225

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 94)



sur l'ensemble de l'article 2 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications (régulation des télécommunications).


Nombre de votants : 315
Nombre de suffrages exprimés : 315
Pour : 223
Contre : 92

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Contre : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 19.
Contre : 5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Mme Joëlle Dusseau.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Pour : 93.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Contre : 72.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance, et Claude Pradille.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Pour : 58.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Pour : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Pour : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk


Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon


Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

N'ont pas pris part au vote


MM. Claude Pradille et Paul Vergès.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 316
Nombre de suffrages exprimés : 316
Majorité absolue des suffrages exprimés : 159
Pour l'adoption : 223
Contre : 93

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 95)



sur l'amendement n° 91, présenté par M. Paul Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, à l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications proposé par l'article 5 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de réglementation des télécommunications (participation des collectivités locales au processus décisionnel en matière d'autorisation pour la construction et l'exploitation des infrastructures et des services des télécommunications).


Nombre de votants : 314
Nombre de suffrages exprimés : 314
Pour : 93
Contre : 221

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre : 19.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Pour : 1. _ M. Emmanuel Hamel.
Contre : 91.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Philippe de Gaulle.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Pour : 72.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance, et Claude Pradille.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Contre : 58.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Contre : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Contre : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Emmanuel Hamel
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet


André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber


Ont voté contre


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

N'ont pas pris part au vote


MM. Philippe de Gaulle, Claude Pradille et Paul Vergès.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 315
Nombre de suffrages exprimés : 315
Majorité absolue des suffrages exprimés : 158
Pour l'adoption : 94
Contre : 221

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.