PREMIÈRE PARTIE
UNE AMBITION DE DÉPART À SALUER : ACCOMPAGNER LE PLUS GRAND NOMBRE VERS LA RÉUSSITE

La loi Orientation et réussite des étudiants (ORE) est la traduction législative du plan Étudiants lancé en 2017. Celui-ci visait principalement à répondre à la problématique de l'insuffisance de places en licence, ayant entraîné dans certaines filières et certaines universités un processus de tirage au sort, et à améliorer le taux de réussite des étudiants en premier cycle à l'université.

I. LES RACINES DE LA LOI ORE : S'ADAPTER AUX ÉVOLUTIONS DÉMOGRAPHIQUES METTANT EN TENSION LES ÉTABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Plusieurs éléments peuvent éclairer le contexte de création de la loi ORE. Le premier, le plus structurant, est la hausse continue du nombre d'étudiants en licence, conséquence de décennies d'augmentation du taux de réussite au baccalauréat et de la croissance démographique.

Entre 2010 et 2020, le nombre d'étudiants scolarisés dans l'enseignement supérieur a cru de 20,4 % en France métropolitaine (+43,1 % en outre-mer) et de 15,7 % pour les seuls étudiants à l'université (+43,7 % en outre-mer). Cette hausse a été plus élevée que la moyenne nationale (20,4 %) dans sept académies : Pays de la Loire (Nantes), Versailles, Créteil, Montpellier, Bordeaux, Normandie et Limoges. La croissance démographique était encore davantage élevée dans la deuxième moitié de la décennie, et a continué de s'accélérer au cours des dernières années. Entre 2018 et 2020, la hausse des effectifs dans l'ensemble de l'enseignement supérieur s'élevait à 5 % en France métropolitaine (+13,1 % en outre-mer) avec une hausse de 1,9 % pour les seules universités (+14,2 % en outre-mer).

Évolution du nombre de bacheliers et prévision

(en milliers)

Source : commission des finances

La croissance ayant été concentrée sur certaines filières particulièrement en tension, elle a entraîné dans certaines filières et certaines universités le recours au tirage au sort pour sélectionner les étudiants, ce qui avait été extrêmement mal perçu des étudiants comme du reste de l'opinion publique.

Bien que la sous-direction des systèmes d'information et d'études statistiques (SIES) ait indiqué au rapporteur spécial que « la loi ORE n'a pas été proposée en raison d'évolutions démographiques »3(*), un des principaux enjeux était bien d'absorber le choc démographique dans l'ensemble des filières en garantissant un système plus équitable que le tirage au sort.

Le deuxième aspect prioritaire était de répondre à la problématique de l'échec massif des étudiants en licence : seuls 27 % des étudiants de licence avaient obtenu un diplôme de licence trois ans après leur première inscription en première année de licence (L1) en 2011-2012. Le nombre d'étudiants abandonnant leur formation en licence après une ou deux années d'études était particulièrement élevé : pour les étudiants entrés en licence en 2014, 34 % des bacheliers généraux avaient quitté leur formation, jusqu'à 72 % des bacheliers technologiques et 84 % des bacheliers professionnels. Cela représentait 75 000 jeunes par an ayant commencé des études supérieures et sortant de l'enseignement supérieur sans avoir obtenu de diplôme.

Taux de passage des néo-bacheliers entrant en licence

(en %)

Année d'entrée en L1

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Taux de passage en L2

40,3

39,7

39,5

40,8

41,6

41,0

43,5

45,5

53,5

47,8

Source : SIES

Ces problématiques n'étaient certes pas nouvelles, et avaient déjà été à l'origine du plan « Réussite en licence » de décembre 2007, doté de 730 millions d'euros sur 2008-2012 et dont l'objectif était de diviser par deux le taux d'échec en première année à l'université. Mais la très faible acceptabilité du tirage au sort a entraîné l'annonce en octobre 2017 du « Plan Étudiants », comportant vingt mesures.

Les principales mesures du Plan Étudiants

- « mieux accompagner l'orientation au lycée » par l'instauration d'un second professeur principal en classe de terminale, l'examen par le conseil de classe du projet d'orientation de chaque élève, et la formulation d'un avis communiqué ensuite aux établissements d'enseignement supérieur ;

- « un accès plus juste et plus transparent dans le supérieur » par la suppression du tirage au sort, la définition d' « attendus » pour l'accès à chaque filière, et la possibilité pour un établissement de n'inscrire un candidat qu'à la condition qu'il accepte de bénéficier de certains dispositifs d'accompagnement ;

- « une offre de formation post-baccalauréat sur mesure et rénovée » par la personnalisation des parcours de licence, le tutorat et la mise en place de dispositifs d'accompagnement pédagogiques ;

- « des conditions de vie étudiante au service de la réussite » par le rattachement des nouveaux étudiants au régime général de la Sécurité sociale dès 2018 et un plan de 60 000 logements.

Source : commission de la culture, rapport sur la loi ORE


* 3 Réponses fournies au questionnaire du rapporteur spécial.

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