Question de M. BROSSAT Ian (Paris - CRCE-K) publiée le 14/03/2024

M. Ian Brossat attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement, sur les congés frauduleux donnés par des propriétaires à Paris à l'occasion des jeux Olympiques.

Il l'interroge sur les moyens que son ministère entend mettre en place pour lutter contre ce phénomène.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la mer et de la biodiversité publiée le 08/05/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/05/2024

Mme la présidente. La parole est à M. Ian Brossat, auteur de la question n° 1159, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement.

M. Ian Brossat. Monsieur le secrétaire d'État, les jeux Olympiques (JO) auront lieu bientôt ; c'est la promesse d'un grand événement populaire, que les Français attendent.

Or à Paris, mais aussi dans d'autres communes, notamment en Seine-Saint-Denis, nous constatons la multiplication du nombre de congés frauduleux : des propriétaires voyous se débarrassent de leurs locataires à l'approche des jeux Olympiques, pour louer leur logement pendant cette période sur des plateformes de location touristique de type Airbnb.

Ces locataires, qui se retrouvent donc à la porte de leur appartement, ne trouvent pas, dans le contexte actuel de tension sur le marché immobilier, d'autre solution de logement dans leur ville.

Ce nombre de congés frauduleux est passé en deux ans, à Paris, de 19 % à 28 %, selon l'agence départementale d'information sur le logement (Adil) de Paris.

J'avais eu l'occasion d'interpeller le ministre du logement sur ce phénomène qui nous inquiète. Ma question est donc très simple : quels moyens l'État met-il en oeuvre pour éviter ces congés frauduleux et permettre à ces locataires, qui sont dans leur droit, de continuer à vivre dans leur logement, sans en être chassés par des propriétaires désireux de faire un profit maximum pendant la période des JO ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la mer et de la biodiversité. Monsieur le sénateur Ian Brossat, je vous remercie de votre question, qui est essentielle pour ce qui concerne la capacité de nos concitoyens à se loger dignement durant la période des jeux Olympiques. Celle-ci, si enthousiasmante soit-elle, ne doit pas donner lieu à des dérives.

Vous le savez, l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 encadre drastiquement les possibilités pour un bailleur de donner congé à son locataire. Il ne peut le faire qu'à l'échéance du bail, et seulement dans trois cas de figure.

Premier cas : le bailleur souhaite reprendre le logement pour l'occuper à titre de résidence principale ou y loger un proche. Il doit alors justifier du caractère réel et sérieux de sa décision de reprise.

Deuxième cas : le bailleur souhaite vendre le logement inoccupé. Dans le cas d'un logement non meublé, le locataire est prioritaire pour acquérir le logement. Le bailleur doit lui donner congé en lui indiquant le prix et les conditions de la vente ; cela constitue une offre de vente.

Troisième cas de figure : le bailleur met fin au bail pour un motif légitime et sérieux - non-respect par le locataire de l'une de ses obligations, retard répété de paiement des loyers, défaut d'entretien du logement, trouble de voisinage.

En outre, la loi prévoit la possibilité pour le locataire de saisir le juge pour contester le congé. Ce dernier peut alors, même d'office, vérifier la réalité du motif du congé. Il peut notamment le déclarer non valide si la non-reconduction du bail ne lui apparaît pas justifiée par des éléments sérieux et légitimes.

Le fait pour un bailleur de délivrer un congé justifié frauduleusement par sa décision de reprendre ou de vendre le logement est puni par une amende pénale. Le locataire est recevable dans sa constitution de partie civile et la demande de réparation de ce préjudice.

Il découle de tous ces éléments que la réglementation actuellement en vigueur sur le congé est très protectrice des locataires et présente de nombreux garde-fous pour limiter les abus.

Il y aura toujours des gens qui fraudent, mais, en face, il y aura toujours l'État, le Gouvernement et les élus que vous êtes pour répondre présent et protéger les locataires. Les moyens seront mis en oeuvre et la loi - rien que la loi, mais toute la loi - s'appliquera.

Mme la présidente. La parole est à M. Ian Brossat, pour la réplique.

M. Ian Brossat. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez eu raison de rappeler la loi, mais force est de constater qu'elle ne s'applique pas ! Aujourd'hui, très peu de locataires vont devant le juge pour faire valoir leurs droits. J'y insiste, le dispositif ne fonctionne pas.

Je suis d'autant plus inquiet que le ministre du logement passe plus de temps à expliquer comment il veut expulser que comment il compte loger. Vous lisez ses interviews comme moi : tous les jours, il nous explique comment il va faciliter les expulsions locatives.

Je n'ai toujours pas compris les moyens qu'il allait mettre en oeuvre pour faire en sorte qu'il soit possible de se loger dans notre pays, alors même que 330 000 personnes sont à la rue et que le nombre d'expulsions locatives a enregistré un record cette année !

Il est grand temps de s'occuper du logement dans ce pays ; ce n'est pas encore le cas. (Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit.)

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