Question de M. PACCAUD Olivier (Oise - Les Républicains-A) publiée le 25/01/2024

M. Olivier Paccaud attire l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités sur l'incidence de la réforme du droit des travailleurs handicapés en établissements et services d'aide par le travail (ESAT) sur la viabilité financière de ces structures.
La France compte à ce jour 1 500 ESAT assurant le suivi médico social et l'insertion par le travail de 120 000 travailleurs handicapés. Plus d'un tiers de ces établissements sont gérés par le réseau associatif de l'union nationale des associations de parents d'enfants inadaptés (UNAPEI), qui s'inquiète des répercussions financières de l'évolution en cours du statut des travailleurs handicapés.
En effet, telle qu'elle s'élabore, la réforme prévoit de faire converger le régime de rémunération des travailleurs handicapés en ESAT avec celui des salariés de droit commun, ce qui implique notamment la mise en place d'un régime de complémentaire santé obligatoire à partir du 1er juillet 2024, le remboursement des abonnements au transport collectif et une participation accrue des ESAT dans le versement des salaires (à hauteur de 15 % du salaire minimum de croissance ou SMIC).
Pour souhaitables qu'elles soient, ces revalorisations ne sauraient être supportées seules par les ESAT et le réseau UNAPEI.
Les équilibres financiers de ces structures associatives sont en effet précaires, dans la mesure où le chiffre d'affaires qu'elles tirent de leur production et activité commerciale suffit à peine à couvrir leurs charges. Elles dépendent en grande partie des moyens que l'État et les collectivités leur allouent. Or, aucun versement de subsides supplémentaires n'a été anticipé pour leur permettre d'assumer l'inflation subite de leurs masses salariales.
Ainsi, à cadre financier constant, l'UNAPEI du département de l'Oise verrait ses dépenses s'accroitre de 830 000 euros par an. Dès lors, les différentes antennes départementales de l'UNAPEI ne pourront assumer ces nouvelles charges sans dégrader la qualité de leur service (sélection des travailleurs admis sur le critère de leur productivité, abandon des personnes les plus fragiles, etc.) et se détourner de leur vocation médico sociale.
Aussi souhaite t il savoir si des mesures compensatoires sont prévues à brève échéance pour accompagner ce secteur protégé dans la mise en place de ce nouveau régime de rémunération.

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Transmise au Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé des personnes âgées et des personnes handicapées


Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé des personnes âgées et des personnes handicapées publiée le 25/04/2024

Le plan de transformation des Etablissements et services d'accompagnement par le travail (ESAT) impulsé en 2021 par les pouvoirs publics en concertation avec les représentants du secteur vise à créer les conditions d'une dynamique de parcours au bénéfice des personnes en situation de handicap orientées et accueillies en ESAT et à renforcer les droits sociaux de ces travailleurs. La mise en oeuvre du plan a donné lieu depuis 2022 à l'adoption de plusieurs dispositions législatives et réglementaires, à savoir : - la loi 3DS du 21 février 2022 et les décrets des 13 et 22 décembre 2022 modifiant le Code de l'action sociale et des familles (CASF) ainsi que le code du travail et consistant notamment à permettre aux travailleurs d'exercer simultanément une activité à temps partiel en milieu protégé et une activité salariée à temps partiel, à leur ouvrir de nouveaux droits individuels et collectifs et à faire bénéficier les travailleurs sortant d'ESAT d'un parcours renforcé en emploi ; - l'article 1er de la loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, qui ouvre la possibilité aux ESAT de faire bénéficier leurs travailleurs d'une prime de partage de la valeur avec une exonération associée ; - l'article 14 de la loi n° 2023-1196 du 18 décembre 2023 pour le plein emploi dont l'objectif est de permettre aux 120 000 travailleurs handicapés accompagnés par environ 1 400 ESAT de bénéficier de l'essentiel des droits individuels et collectifs des salariés tout en restant usagers d'une structure médico-sociale et titulaires d'un contrat qui n'a pas la nature d'un contrat de travail et qui leur offre en réalité une protection renforcée puisque l'ESAT ne peut exercer de pouvoir disciplinaire à leur encontre ou les licencier. Le renvoi aux articles du code du travail permettra d'assurer une évolution parallèle des droits, sans qu'il soit besoin de repasser par un décret. Sur un strict plan juridique, ces dispositions s'inscrivent dans le cadre de l'application de la convention de l'Organisation des Nations unies sur les droits des personnes handicapées et contribuent également à la mise en oeuvre du droit de l'Union européenne ainsi qu'à la prise en compte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne sur les personnes handicapées accueillies en ESAT. Les nouveaux droits reconnus aux travailleurs d'ESAT par l'article 14 précité de la loi du 18 décembre 2023 couvrent un large champ : - l'inscription de « droits collectifs fondamentaux » dans le CASF : le droit syndical et le droit de grève, le droit d'alerte et de retrait ainsi que le droit d'expression directe et collective ; - le renforcement de l'association aux travaux du comité social et économique de l'ESAT de représentants de l'instance mixte usagers-salariés spécifique aux ESAT ; - la prise en charge des frais de transports domicile-travail ; - l'extension du bénéfice des titres-restaurant et des chèques-vacances ; - le bénéfice d'une complémentaire santé. Ces nouveaux droits sont en vigueur depuis le 1er janvier 2024, à l'exception de la prise en charge des frais de transport domicile-travail, du bénéfice des titres-restaurant et des chèques vacances, ainsi que de la complémentaire santé, dont l'entrée en vigueur est fixée au 1er juillet 2024. Par ailleurs, les modalités de mise en oeuvre de certains des droits prévus par l'article 14 devront être précisées par décret, en particulier pour ce qui concerne la participation de représentants de l'instance spécifique aux réunions du comité social et économique de l'établissement ou du service et la complémentaire santé. Le Gouvernement porte une attention particulière à ce que ces nouveaux droits ne mettent pas en difficulté les ESAT et leurs missions d'accompagnement. Il en évaluera à ce titre les impacts économiques dans la suite de la mission menée par l'inspection générale des finances et l'inspection générale des affaires sociales sur les ESAT. Il est essentiel que les ESAT continuent de contribuer à l'autonomie et à l'inclusion sociale et professionnelle des travailleurs handicapés les plus éloignés de l'emploi, et de leur offrir des opportunités d'évolutions de parcours et de statut, via une employabilité et des compétences et qualifications accrues. Pour cela, ils doivent continuer à se transformer, dans la continuité des travaux engagés depuis plusieurs années. La modernisation de leur outil de production, les partenariats avec le milieu ordinaire, le développement d'activités pérennes, vont dans le sens à la fois d'un meilleur accompagnement des travailleurs et d'une plus grande adaptation des ESAT au tissu économique.

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