Question de M. HENNO Olivier (Nord - UC) publiée le 28/01/2021

Question posée en séance publique le 27/01/2021

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Olivier Henno. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question concerne davantage la recherche et la souveraineté que la stratégie vaccinale à proprement parler.

L'Institut Pasteur a annoncé l'abandon de son projet de vaccin. Ce renoncement est d'autant plus douloureux que cet institut a acquis, tout au long de son histoire, une réputation prestigieuse. Il s'agit de la deuxième déception française après le retard du laboratoire Sanofi.

Sans vouloir jouer les procureurs, mot à la mode (Sourires.), je veux rappeler qu'il y a quelques mois le PDG de Sanofi affirmait avec arrogance que les Américains seraient les premiers servis. Le voilà réduit, du fait de l'urgence sanitaire, au rang de sous-traitant !

De ce double échec, nous pouvons tirer un constat évident : il n'existe pas de vaccin français opérationnel, alors que beaucoup d'autres pays ont réussi à faire aboutir un ou plusieurs de leurs projets.

Comment expliquer ce qu'il faut bien appeler une étrange défaite de la recherche et de l'industrie pharmaceutique françaises, que je taxerais d'étonnante, d'inquiétante et de révélatrice ?

Plusieurs questions doivent être abordées avec gravité.

Pourquoi nos laboratoires ont-ils fait cette erreur stratégique de sous-estimer les biotechnologies, et particulièrement l'ARN messager ? Pourquoi ont-ils préféré l'insécurité à l'innovation ? Est-ce la lourdeur de la réglementation française qui se révèle pénalisante ? Est-ce une question de moyens ? Nous disposons pourtant avec le crédit d'impôt recherche d'un dispositif incitatif pour les entreprises.

Monsieur le ministre, quelles leçons et quelles conséquences en tirez-vous en termes de souveraineté et de stratégie vaccinale à moyen et à long terme ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)


Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 28/01/2021

Réponse apportée en séance publique le 27/01/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Henno, tout d'abord, l'Institut Pasteur a été la première structure scientifique à séquencer le génome du coronavirus, et ce en quelques jours. Il a par la suite fait partager la séquence génétique du virus au monde entier.

Ensuite, l'Institut Pasteur a abrité au moins l'un des deux scientifiques ayant découvert l'ARN messager en tant que tel.

Enfin, l'Institut Pasteur développe de très nombreux projets de recherche fondamentale, de recherche appliquée et de recherche transverse, en lien avec des laboratoires du monde entier. Il continue d'ailleurs de développer plusieurs projets autour de médicaments qui pourraient être utiles demain dans le cadre de la lutte contre la covid-19, ainsi que de vaccins.

Ce n'est pas parce qu'un projet de recherche n'aboutit pas – en l'occurrence celui s'appuyant sur le vaccin contre la rougeole – qu'il faut considérer que l'Institut Pasteur a failli à sa mission.

De façon générale, puisque vous avez fait allusion à une intervention médiatique du Président de la République, faisons aussi l'éloge de l'audace. Encourageons les uns et les autres à entreprendre, à investir, à innover, à rechercher.

Rendez-vous compte de l'exploit qu'a représenté la découverte, non pas d'un, mais de plusieurs vaccins contre un virus inconnu il y a un an – en moins d'un an donc ! –, avec une force de production mondiale en mesure de sortir 1,5 milliard de doses ! Cherchez dans l'histoire contemporaine ou lointaine un phénomène équivalent, une aventure scientifique et industrielle d'une aussi grande portée à l'échelon mondial…

Monsieur le sénateur, on peut regretter de ne pas pouvoir chanter « cocorico » et planter un drapeau bleu, blanc, rouge sur un vaccin – en tout cas pas aujourd'hui –, mais soyons vigilants : plusieurs travaux de recherche sont encore en cours.

On peut au moins considérer que l'Europe a fait son travail, puisqu'elle a commandé les vaccins pour tous les pays européens. Elle pense également aux pays du tiers-monde, qui n'ont pas forcément accès aux vaccins. Elle abrite aussi nombre d'entreprises, dont la fameuse société BioNTech.

On ne parle que de Pfizer, mais le vaccin, c'est aussi BioNTech et ses sites de production en Belgique, en Allemagne, et demain en France, qui permettent de protéger des centaines de millions de personnes chaque jour en Europe grâce à un vaccin efficace.

Encourageons la recherche et les chercheurs. Surtout, n'essayons pas de déterminer les responsabilités politiques ou scientifiques des uns et des autres lorsqu'un projet n'aboutit pas !

Dans le domaine du médicament, un projet de recherche sur cent aboutit, et l'on considère que ce ratio est bon. Aujourd'hui, en matière de recherche vaccinale, on est déjà bien au-delà : c'est une chance pour l'humanité ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour la réplique.

M. Olivier Henno. Monsieur le ministre, vous nous expliquez que l'on peut gagner les 24 heures du Mans après avoir raté son départ… Il est vrai que cela peut arriver, mais pour que ce soit le cas, il faut de l'humilité, de la volonté et une stratégie adaptée. Il me semble qu'il reste encore beaucoup à faire ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

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