Question de M. VASPART Michel (Côtes-d'Armor - Les Républicains) publiée le 07/11/2019

M. Michel Vaspart attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la prolifération d'armes à feu acquises illégalement en Bretagne. La presse quotidienne régionale s'est récemment fait l'écho des facilités à obtenir des armes pouvant aller du petit calibre au fusil d'assaut, que ce soit dans les grandes agglomérations ou désormais dans les villes plus modestes voire en zone rurale. Cette prolifération serait liée aux trafics de stupéfiants où les armes tiennent un rôle important dans les cas de règlements de comptes ou de différends territoriaux. Ainsi, le journal Le Télégramme du 25 octobre 2019 citait un cadre de la gendarmerie qui évoque « une multiplication de signaux faibles » et le fait que l'on « voit de plus en plus de cas de violences inouïes, y compris dans des petits patelins, pour des dettes de produits stupéfiants qui ne dépassent pas parfois 100 euros. Les trafiquants ont vraiment peur, et s'arment en conséquence. » Les conflits armés se traduisent parfois par des décès comme ce fut le cas en septembre 2019 à Brest (trois blessés dont deux graves). En 2018, la justice nantaise a recensé 45 épisodes de tirs par arme à feu. Devant la prolifération des armes à feu et le regain de violences qui l'accompagne, il souhaite savoir ce que le Gouvernement entend faire pour endiguer ce phénomène.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 17/09/2020

La lutte contre la prolifération des armes illégalement détenues constitue une priorité pour les forces de l'ordre, notamment dans le cadre du plan national de lutte contre les armes illégalement détenues adopté en novembre 2015. En région Bretagne, la mise en œuvre de ce plan porte ses fruits puisque le nombre des saisies opérées par les services de police et de gendarmerie, qui représentaient moins d'une centaine d'armes avant 2016, est passé à plus de 200 en 2016. Cette hausse des saisies ne traduit pas une plus grande disponibilité de l'armement mais une activité en hausse des services répressifs. Quant à la typologie des armes saisies dans la région, à l'instar de ce que l'on observe en général dans l'ensemble du territoire, la proportion des armes de catégorie A saisies (armes interdites à la détention des particuliers) a oscillé entre 0,4 % et près de 2 % de l'ensemble. Dans le même temps, la proportion des armes de catégorie B (armes soumises à autorisation) pouvait représenter de 12 % à 17 % des armes tandis que les armes des catégories C et D (armes soumises à simple enregistrement) se situaient aux alentours de 78 %. S'agissant de la prolifération des armes à feu dans un contexte de violence liée à la criminalité, à des différends territoriaux ou aux trafics de stupéfiants, l'analyse des règlements de compte avec armes à feu constitue un indicateur pertinent, puisque ce mode opératoire relève du grand banditisme, marquant une volonté d'extension du pouvoir ou du territoire. De ce point de vue, on constate que le nombre de faits véritablement qualifiés de « règlements de compte » en France est en constante diminution (113 en 2016, 78 en 2017, 77 en 2018 et 63 en 2019). Le nombre des victimes est également en diminution (160 victimes dont 60 décédées en 2016, 104 victimes dont 43 décédées en 2017, 106 victimes dont 54 décédées en 2018 et 88 victimes dont 39 décédées en 2019). Si l'on se réfère à la seule région Bretagne (quatre départements) et aux critères précités, on constate 1 seul règlement de compte en 2016 à Brest, 1 en 2017 à Rennes, 1 en 2018 à Plescop et 1 en 2019 à Queven. S'agissant des armes dites « de guerre », tirant en rafale, qui proviennent de trafics internationaux, même si l'approvisionnement se fait par le biais de « trafics de fourmis », l'ensemble ne peut que croître au fil des années et seules les saisies peuvent faire diminuer leur stock. Il convient toutefois de souligner que les vols, notamment chez les particuliers, représentent un mode d'approvisionnement du marché criminel loin d'être négligeable. Ainsi, en France en 2016 on comptait plus de 10 000 armes volées. Dans la région Bretagne, les armes volées représentent 156 armes en 2014 pour atteindre 283 en 2016. Les forces de l'ordre interviennent aussi dans la lutte contre les armes à feu illégales à l'occasion du démantèlement de réseaux de trafiquants agissant notamment en marge du milieu des collectionneurs. Une affaire récente résolue par la section de recherches de gendarmerie d'Angers, au cours de laquelle plus de 2 000 armes illégalement acquises ont été saisies dans le cadre d'investigations menées au plan international, en est une illustration. Le plan d'action contre les armes illégalement détenues de 2015 a fixé 20 mesures tendant à renforcer la connaissance des filières, renforcer l'action ciblée des services de l'État, moderniser la réglementation, développer la coopération internationale et développer des actions en direction des citoyens. S'agissant de la collecte du renseignement, celle-ci est centralisée depuis 2002 auprès de la section centrale « armes, explosifs, matières sensibles » de la direction centrale de la police judiciaire et par la création de la plateforme d'identification des explosifs et des armes à feu au sein de la gendarmerie nationale en 2015. La gendarmerie a aussi développé des actions de formation ainsi qu'une plateforme d'assistance téléphonique permanente et une documentation en ligne afin de renseigner les enquêteurs sur le traitement judiciaire des armes (classification, recherche des éléments de preuve en balistiques). Par ailleurs, l'acquisition d'un nouvel outil de rapprochements balistiques a été opérée au profit des 5 laboratoires de police scientifique de l'institut national de police scientifique et du laboratoire de l'institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale. La mise en réseau national de ce système permet à l'ensemble des laboratoires de police et de gendarmerie de travailler de manière coordonnée. Des travaux sont d'ores et déjà en cours afin de permettre des échanges avec les pays européens disposant de la même technologie. Cet outil permet également d'améliorer la connaissance des types d'armes circulant sur le territoire national. Par ailleurs, la création en janvier 2017 au sein du ministère de l'intérieur d'un service central des armes, service à compétence nationale, permet à l'État de mieux coordonner sa politique de contrôle des armes. Ce service travaille également à assurer une simplification de la réglementation, tout en préservant les objectifs de sécurité et d'ordre publics. La lutte contre les trafics d'armes par internet ou par l'entremise du « Darknet » est également engagée grâce à l'adoption de mesures d'enquêtes telles que l'enquête sous pseudonyme, les cyber-patrouilles ou les coups d'achat. Depuis 2015, la France est également activement engagée dans le cycle politique de l'Union européenne et le plan multi-annuel stratégique de lutte contre la criminalité, particulièrement dans le domaine des armes. Avec ses partenaires, la France est amenée à participer à un certain nombre d'actions tendant à endiguer l'afflux d'armes sur le territoire commun (contrôles dans les pays des Balkans, risques en provenance des zones de conflit, etc.). La France et l'Allemagne ont également engagé des coopérations avec les pays des Balkans de l'Ouest.

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