Question de Mme LOISIER Anne-Catherine (Côte-d'Or - UC-R) publiée le 10/10/2019

Question posée en séance publique le 09/10/2019

Mme Anne-Catherine Loisier. À Biarritz comme à la tribune des Nations unies, le président Macron n'a pas manqué de souligner l'importance de la forêt en matière de lutte contre le réchauffement climatique.

À l'heure où l'Amazonie brûle, les forêts européennes aussi sont en danger et n'ont jamais été autant vulnérables.

Plusieurs effets se conjuguent : sécheresses à répétition, fortes chaleurs, attaques parasitaires, dégâts de gibiers croissants…

Aujourd'hui, plus aucune essence, plus aucun territoire n'est épargné. À ce stade, les dégâts dans les grandes régions forestières se chiffrent à plus de 2 millions de mètres cubes. On prévoit 5 à 6 millions – soit plusieurs années de récoltes – au printemps prochain, car beaucoup d'arbres ne repartiront pas.

À la catastrophe écologique s'ajoute le désastre économique : des communes forestières privées de recettes, des marchés saturés, des prix qui chutent et, demain, des trous de production qui ne permettront plus d'alimenter les besoins en constructions ou en charpentes.

Le risque incendie s'intensifie lui aussi et se répand, menaçant des régions situées beaucoup plus au nord.

Face à ces réalités liées au changement climatique qui s'accélère, il nous faut, dès à présent, adapter nos forêts : privilégier des essences plus résistantes, plus sobres en eau, diversifier et mélanger nos essences.

L'Allemagne mobilise 800 millions d'euros pour soutenir sa filière et plante 300 millions d'arbres. La Pologne s'est engagée sur 1 milliard de plants, quand la France en est à 70 millions.

Ces pays ont bien compris l'enjeu d'une forêt renouvelée, productrice de bois d'œuvre et de puits de carbone.

Le Gouvernement français tarde à s'emparer de ce sujet.

Voilà des mois que les forestiers tentent de récolter et de transformer les arbres qui peuvent encore l'être. C'est une course contre la montre pour essayer d'endiguer la propagation des parasites, chercher des débouchés.

Pour cela, il faut un accompagnement public, de l'ingénierie sur les territoires, afin de conseiller les propriétaires.

Une forêt qui sert les intérêts à la fois environnementaux, économiques et sociétaux, mais une forêt qui n'est toujours pas reconnue pour ses bienfaits !

Monsieur le ministre, à quand une valorisation des forêts et du matériau bois, puits de carbone ? À quand un plan d'adaptation aux changements climatiques pour renouveler nos essences ?


M. le président. Il faut conclure !


Mme Anne-Catherine Loisier. À quand un plan d'adaptation pour assurer nos capacités de demain ? À quand un ONF restructuré pour tracer la voie ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et Les Indépendants.)


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 10/10/2019

Réponse apportée en séance publique le 09/10/2019

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Madame la sénatrice, merci pour votre question. Hier, nous avons passé ensemble une grande partie de la journée à l'occasion du comité stratégique bois énergie ; nous étions accompagnés par Daniel Gremillet et une centaine d'autres personnes. Il s'agissait de tracer les perspectives de la forêt française, notamment le programme national de la forêt et du bois. Vous y avez participé, madame la sénatrice, puisque vous êtes présidente d'un comité stratégique. Si nous étions ensemble, c'était pour regarder ce que va devenir la forêt française dans les années à venir. Oui, nous examinons ce qui se passe dans cette forêt !

Il y a deux problèmes, que vous connaissez bien mieux que moi, madame la sénatrice.

D'abord, le problème parasitaire, avec les scolytes, auquel nous essayons de répondre. Nous venons de mettre 16 millions d'euros en argent sonnant et trébuchant sur la table pour aider la filière, qui l'a très bien accepté hier, nous en avons parlé ensemble.

Ensuite, il y a le problème plus structurel du devenir de cette forêt avec le réchauffement climatique, avec sa dégénérescence, sujet sur lequel vous avez beaucoup travaillé. Nous devons repenser la forêt française. Le risque, c'est qu'elle disparaisse faute d'être résiliente.

Aussi, dans le cadre du programme national de la forêt et du bois 2016-2026, avec toute la filière d'amont en aval, nous réfléchissons sur ce que devront être, demain, les essences et sur la future organisation de la filière, afin que cette forêt soit régénérée. C'est la raison pour laquelle, dans les jours qui viennent, une nouvelle organisation de l'ONF va être mise en place. Il est absolument indispensable qu'un travail soit engagé entre l'ONF, les propriétaires privés et les communes forestières.

Madame la sénatrice, vous le savez aussi – je le dis très tranquillement –, nous ne pouvons pas continuer avec une filière forêt-bois d'amont en aval aussi déstructurée, dépourvue de toute contractualisation et de tout travail commun.

Aujourd'hui, nous importons du bois de pays étrangers, par exemple, de Slovénie.

M. Jean Bizet. C'est vrai !

M. Didier Guillaume, ministre. Ce n'est pas possible ! Cette restructuration, que j'appelle de mes vœux, faisons-la ensemble ! (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM, ainsi que sur des travées du groupe RDSE. – M. Jean Bizet approuve.)

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