Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOCR) publiée le 21/02/2019

M. Roland Courteau appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la prépondérance du suicide dans les risques professionnels des agriculteurs français.
Il souligne que la mortalité par suicide des agriculteurs en France est de 20 % supérieure à celle de la population générale, soit près d'un suicide d'agriculteur tous les deux jours, notamment des hommes de 45 à 54 ans.
À l'origine de ces destins tragiques, il pointe les fluctuations importantes des cours mondiaux des matières premières et évidemment la crise des prix du lait, phénomènes macro-économiques qui se surajoutent à des problèmes récurrents pour les agriculteurs : vente en dessous des coûts de production, surendettement auxquels se confondent les aléas de la vie, solitude, ruptures affectives et maladies.
Il lui demande donc de bien vouloir lui faire un point d'étape les mesures préventives déjà en œuvre comme le plan national de prévention du suicide agricole permettant la mise en place du dispositif Agri'écoutes par la mutualité sociale agricole, et s'il entend généraliser les initiatives de type « agri sentinelles ».
Il lui demande également s'il est envisageable que le régime agricole mette en place une visite médicale annuelle préventive pour tous les agriculteurs afin de détecter les situations à risques et de proposer, en collaboration avec l'ensemble des partenaires du monde agricole, un plan global d'accompagnement de l'exploitant fragile.


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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 21/03/2019

L'identification et l'accompagnement des exploitants et des salariés en difficulté constituent un sujet de préoccupation essentiel pour les services du ministère chargé de l'agriculture. Dès 2011, la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) a été chargée d'élaborer et mettre en œuvre un programme national d'actions afin de recueillir des données chiffrées sur la réalité du suicide chez les exploitants et les salariés agricoles et de permettre de répondre aux alertes de détresse et procurer aux personnes concernées un accompagnement, une orientation, voire un suivi. Ce programme d'actions a été mis en œuvre grâce à un large partenariat avec l'agence santé publique France, les associations d'écoutants via la mise en place d'un service Agri'écoute fonctionnant sept jours sur sept et avec les agences régionales de santé pour la mise en place de cellules pluridisciplinaires de prévention afin de repérer, d'accompagner et d'orienter les agriculteurs en difficulté. Il a été intégré dans le plan gouvernemental de lutte contre le suicide et la feuille de route santé mentale et psychiatrie. De plus, le troisième plan santé au travail (PST 3) 2016-2020 a eu pour ambition de renouveler profondément la politique visant à la préservation de la santé physique et mentale des travailleurs. Ce plan mobilise tous les services de l'État, les partenaires sociaux, la sécurité sociale et les organismes et acteurs de la prévention et donne la priorité à la prévention en se tournant résolument vers une approche positive du travail, facteur de santé. Ainsi, la prévention du risque psychosocial et de l'épuisement professionnel constitue une action prioritaire du Gouvernement et l'instauration d'une visite médicale annuelle pour les agriculteurs avec un médecin du travail fera prochainement l'objet d'une concertation avec les partenaires sociaux concernés. Sur le plan économique, une instruction technique, adressée aux préfets de département fin décembre 2017, instaure un partenariat plus étroit entre les chambres d'agriculture et les services économiques des services déconcentrés du ministère de l'agriculture et de l'alimentation qui, grâce à des signaux d'alerte d'un réseau de sentinelles, favorise la prise en charge le plus en amont possible des situations difficiles et propose un audit économique aux chefs d'entreprises. Sur le plan social, une enveloppe exceptionnelle de quatre millions d'euros a été allouée pour l'année 2017 à la CCMSA pour financer, en complément des crédits d'action sanitaire et sociale traditionnels, le coût du remplacement des exploitants agricoles victimes d'épuisement professionnel. L'évaluation de ces aides, menée en 2018, a permis de les consolider et de les renforcer. Elles resteront inscrites dans le programme d'actions du fonds d'action sanitaire et sociale des caisses de MSA en 2019 et 2020. La mobilisation de l'ensemble des acteurs au sein des territoires a favorisé le succès de ce dispositif et les branches professionnelles se sont également emparées de cet enjeu. Le réseau Agri-Sentinelles, projet piloté par allice et coop de France et animé par l'institut de l'élevage est cité à juste titre. L'objectif de ce projet, d'intérêt général agricole, a reçu le soutien financier du compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural » qui est un levier pour accompagner la transition agro-écologique de l'agriculture. Il mettra en place un réseau coopératif d'alerte et de prévention du suicide en agriculture, venant en prolongement des actions collectives de prévention existantes.

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